1. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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LES NOUVELLES MODALITÉS D’ACTION
Les bases techniques des plans d’urgence relevant
des pouvoirs publics
The technical bases for government emergency plans
par Didier Champion, directeur de l’environnement et de l’intervention et Karine Herviou, adjointe au chef du service
des situations d’urgence et d’organisation de crise – Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
Objectifs des plans d’urgence Pourquoi et comment établir des
bases techniques des plans d’urgence
Les plans d’urgence élaborés par les pouvoirs pu-
blics autour de la plupart des installations nu- L’efficacité de la mise en œuvre des plans d’ur-
cléaires de base (INB) répondent à l’objectif géné- gence suppose que ceux-ci aient été élaborés en
ral de protection des populations en cas d’accident amont de tout accident, en tenant compte des spé-
grave pouvant se produire dans ces installations. cificités propres à chaque installation et à son envi-
Cette démarche contribue à la défense en profon- ronnement. Pour cela, une analyse des situations
deur au titre de la sûreté nucléaire. accidentelles variées, susceptibles de se produire
dans l’installation ou à l’occasion du transport de
En effet, malgré toutes les dispositions techniques colis de matières radioactives, sert de base tech-
et organisationnelles prises pour prévenir les dé- nique à la conception de ces plans.
faillances matérielles et humaines, les INB demeu-
rent des activités à risque, pour lesquelles la sur- Ainsi, pour chacun des sites nucléaires, l’exploitant
venue d’accidents graves pouvant entraîner des re- qui est responsable de la réalisation des études de
jets importants de produits radioactifs ou toxiques sûreté et de l’évaluation des conséquences des ac-
dans l’environnement doit être prise en considéra- cidents, est tenu de réaliser un inventaire de tous
tion. En cas d’accident dans une installation, même les types d’événement envisageables, pouvant en-
en l’absence de tout rejet immédiat à l’extérieur, traîner des rejets liquides ou gazeux de substances
l’exploitant met en œuvre son plan d’urgence in- radioactives ou toxiques. Dans cet inventaire, sont
terne (PUI) dont l’un des objectifs est de maîtriser pris en compte les événements pouvant causer un
le plus en amont possible toute aggravation de la si- accident, qu’ils soient d’origine interne (défaillance
tuation, afin de prévenir ou de limiter l’exposition d’un équipement ou d’un système de sûreté) ou
accidentelle des travailleurs sur le site et de la po-
pulation riveraine. De plus, si l’accident provoque
ou menace de provoquer des rejets importants Executive Summary
dans l’environnement, le préfet déclenche le Plan
Despite technical and organisational existing arrangements to prevent
Particulier d’Intervention (PPI), conduisant à mettre human and equipment failures, the occurrence of a severe accident in-
en œuvre des actions de protection des populations ducing an important release of radioactive or toxic products could not be
à court terme, telles que l’évacuation, la mise à totally excluded. Public authorities are responsible for the development
l’abri ou l’ingestion d’iode stable. of emergency plans which main objective is the protection of the popu-
lation in case of accident. The efficiency of emergency plans assumes
they have been established before the occurrence of any accident, tak-
De façon similaire aux INB, la survenue d’un acci- ing into account specificities of the installation and its environment. On
dent au cours d’un transport de matières radioac- the basis of the list of possible events likely to induce releases into the
tives ne peut, elle aussi, être exclue. Pour faire face environment, some “envelope” scenarios are selected and their conse-
aux conséquences potentielles de ce type d’événe- quences are assessed. The comparison of the consequences to refer-
ment (rejets radioactifs ou émission de rayonne- ence levels for which protective actions are recommended gives the area
where actions may be required. This approach is applied for the differ-
ments) le préfet met alors en œuvre un plan de se-
ent nuclear facilities in France. Examples are given in the article on the
cours spécialisé pour les transports de matières definition of emergency plans technical basis for nuclear power plants,
radioactives (PSS-TMR). other nuclear facilities and transportation of radioactive materials.
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2. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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d’origine externe, compte tenu de l’environnement sont pris en compte pour l’établissement du plan
propre à chaque site (environnement industriel, d’urgence.
voies de communication, événement climatique ex-
ceptionnel…). L’IRSN, qui est notamment chargé de La comparaison des conséquences dosimétriques
l’examen des dossiers de sûreté fournis par l’ex- ou toxiques propres aux scénarios de référence
ploitant, évalue chacune de ces situations et définit avec les niveaux d’intervention ou seuils d’effets
les scénarios accidentels “enveloppes“, c’est-à- létaux et irréversibles permet de déterminer a
dire déterminant les conséquences radiologiques priori les périmètres au sein desquels il faut pré-
ou toxiques englobant celles des autres situations voir, dans le cadre des plans d’urgence, l’applica-
accidentelles susceptibles de survenir sur le site. tion des différentes actions de protection des
Certains scénarios sont également retenus en rai- populations.
son de la rapidité d’apparition de rejets significatifs
dans l’environnement. Ces scénarios constituent la Au début des années 2000, cette démarche a été
référence pour l’élaboration des plans. complétée afin de protéger plus efficacement les
populations lors d’accidents pouvant entraîner des
De même, pour les transports de matières radio- rejets dont les conséquences, bien que plus faibles
actives, l’inventaire des situations accidentelles que les scénarios enveloppes de référence, se-
combine différents types de matières radioactives raient susceptibles d’atteindre les niveaux d’inter-
transportées, de colis, de défaillances et d’agres- vention précités dès les toutes premières heures
sions. Suivant la nature du risque (radiologique ou suivant le début de l’événement. Elle a conduit à
chimique) et la cinétique de l’accident et du rejet prévoir l’engagement de façon “réflexe“ du plan
(rapide ou lente), ces situations sont regroupées particulier d’intervention permettant ainsi d’enga-
par catégories. Pour chaque catégorie, il est retenu ger, dans des délais brefs et sur une distance pré-
un rejet-type considéré comme enveloppe. déterminée, les premières actions de protection de
la population.
Chaque scénario accidentel de référence ou caté-
gorie de situations accidentelles est caractérisé par Application au cas des réacteurs à eau
un rejet-type de substances radioactives ou pressurisée (REP) français
toxiques, également appelé “terme source“. Les
conséquences radiologiques ou toxiques dans l’en- La démarche présentée ci-dessus a été mise en
vironnement et sur les populations sont alors cal- œuvre dès la fin des années 1970 pour la définition
culées en prenant en compte différentes hypo- des plans d’urgence des centrales électronu-
thèses sur les conditions météorologiques (stabilité cléaires comportant un réacteur à eau sous pres-
atmosphérique, vitesse du vent, précipitations plu- sion (REP). Il s’agit d’un cas complexe à cause de la
vieuses). variété des combinaisons de défaillances envisa-
geables. Il se caractérise aussi par l’existence, dans
Les doses ainsi estimées pour les personnes qui la plupart des cas d’accident possibles, de délais
seraient exposées aux substances radioactives importants permettant la mise en œuvre anticipée
présentes dans l’air ou déposées au sol au cours de d’actions de protection des populations avant l’ap-
ces rejets sont comparées aux niveaux d’interven- parition de rejets importants.
tion à partir desquelles des actions de protection
sont recommandées en situation d’urgence radio- À la fin des années 1970, l’Institut de protection et
logique. En France, ces niveaux d’intervention sont de sûreté nucléaire (IPSN) a élaboré des “termes
fixés par un arrêté ministériel paru en 2003, repre- sources“ de référence sur la base d’une étude pro-
nant des recommandations de l’Agence internatio- babiliste américaine portant sur les réacteurs à eau
nale pour l’énergie atomique. Les valeurs ainsi re- sous pression, dont les résultats permettaient
tenues sont : d’apprécier les divers modes de défaillance de l’en-
•une dose efficace de 10 mSv pour la mise à l’abri; ceinte de confinement lors d’accidents impliquant
•une dose efficace de 50 mSv pour l’évacuation; la fusion du cœur du réacteur. Trois termes sources
•une dose équivalente à la thyroïde de 100 mSv de référence, différenciés par le délai de défaillance
pour l’administration d’iode stable. de l’enceinte de confinement et la filtration des re-
jets radioactifs, ont été étudiés. C’est le terme-
En ce qui concerne les rejets accidentels de sub- source de référence dénommé “S 3“, conduisant à
stances chimiques, ce sont les seuils d’effets létaux un rejet différé et filtré de produits radioactifs, qui a
(SEL) et les seuils d’effets irréversibles (SEI) qui été retenu, au début des années 1980, comme en-
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3. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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veloppe pour la définition des actions de protection La figure 2 présente l’évolution en fonction du
des populations à court terme. Ce scénario repose temps des distances auxquelles les niveaux d’inter-
sur la fusion totale du cœur et l’utilisation du sys- vention à considérer pour l’établissement des péri-
tème d’éventage-filtration de l’enceinte de confine- mètres des PPI sont atteints pour le terme source
ment (filtre à sable). Le déroulement de l’accident S3, tel qu’il a été défini au début des années 80. Au-
est illustré sur la figure 1. Les radionucléides libé- delà des premières 24 heures, les niveaux d’inter-
rés dans l’enceinte provoquent des rejets tout vention correspondant à la mise à l’abri et à l’in-
d’abord limités pendant les 24 premières heures gestion d’iode stable pourraient être atteints sur
puis plus importants au-delà. des distances dépassant 10 km, pour les individus
les plus sensibles (enfants d’un an). Les rayons ac-
Depuis ces travaux fondateurs, l’évolution des tuels de 5 et 10 km retenus dans les PPI des REP
connaissances a permis d’affiner ce scénario en- sont toutefois adaptés pour l’engagement des ac-
veloppe en distinguant des défaillances de l’en- tions de protection des populations au cours des
ceinte de confinement par surpression interne, par 24 premières heures et même au-delà puisque
interaction corium-béton et par défaut d’étan- l’utilisation du filtre à sable dès 24 heures après le
chéité d’une traversée, et en calculant les consé- début de l’accident est une hypothèse pessimiste.
quences radiologiques correspondantes. Des re- En situation accidentelle réelle, et selon le pronos-
cherches se poursuivent encore aujourd’hui pour tic adapté aux circonstances propres à cet accident,
améliorer les connaissances en matière d’accident il pourrait être nécessaire d’étendre les actions de
grave; elles visent notamment à évaluer plus pré- protection au-delà des rayons préétablis des PPI;
cisément les rejets associés à un accident de fu- les délais disponibles seraient alors mis à profit
sion du cœur. pour la mise en œuvre de ces actions.
T0 - Brèche Chute des barres de contrôle et
sur le circuit baisse du niveau d’eau conduisant
primaire au dénoyage du cœur
T0 + 1 heure – Fusion du cœur et dispersion des produits T0 + 24 heures – Rejet de produits radioactifs dans
radioactifs dans l’enceinte • Rejets dans l’environnement l’environnement après filtration suite à l’ouverture
par les fuites naturelles de l’enceinte de confinement du filtre à sable
Figure 1 : déroulement de l’accident de référence pris en compte pour dimensionner les PPI des réacteurs à eau pressurisé (terme source S3).
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4. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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Distance dans l'axe du vent à laquelle la dose efficace pour un enfant âgé d'un an
présent durant le passage du nuage atteint 10 mSv et 50 mSv
15
14
13
12
11
10
Distance en km
9
8
7
6
5
4
3
2
1
3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51
Temps depuis la fusion du cœur en heures
Distance dans l'axe du vent à laquelle la dose à la thyroïde par inhalation pour un
enfant âgé d'un an présent durant le passage du nuage atteint 100 mSv
24
22
20
18
16
Distance en km
14
12
10
8
6
4
2
3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51
Temps depuis la fusion du cœur en heures
Figure 2 : évolution au cours du temps de la distance à laquelle serait atteinte une dose efficace de 10 mSv et de 50 mSv (graphique du haut) et
une dose à la thyroïde de 100 mSv (graphique du bas) pour un enfant de 1 an qui demeurerait sur place sans protection au cours d’un rejet
accidentel correspondant au terme source S3. Les conditions météorologiques retenues pour cette estimation sont celles considérées comme
moyennes pour les sites français.
L’introduction dans les PPI d’un mode de déclen- Application au cas des autres installa-
chement réflexe au début des années 2000, a tions nucléaires de base
conduit, sur la base de l’accident de référence dé-
crit précédemment, à définir un nouveau rayon de D’autres installations nucléaires de base telles que
2 km pour la mise à l’abri et à l’écoute des popula- les réacteurs expérimentaux, les usines de fabrica-
tions en cas d’accident à “cinétique rapide“. tion et de retraitement du combustible nucléaire,
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5. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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Tableau 1 : doses engagées sur 24 heures en cas de fusion totale et immédiate du cœur du réacteur expérimental OSIRIS.
Doses engagées sur 24 heures 1 km 2 km 5 km
Dose efficace 40 mSv 12 mSv 2 mSv
Dose par inhalation à la thyroïde 100 mSv 30 mSv 5 mSv
sont également concernées par un PPI depuis déré sur le réacteur OSIRIS, 24 heures après le dé-
l’adoption, en 1988, d’un décret relatif aux plans but de l’accident, pour une condition météorolo-
d’urgence. gique de diffusion normale et un vent d’une vitesse
de 5 m/s.
La définition des bases techniques des PPI de ces
installations a été engagée au début des années Tricastin
1990, selon une approche analogue à ce qui a été
développé pour les REP antérieurement. Le site du Tricastin regroupe un grand nombre
Cependant, contrairement au cas des REP, plu- d’installations présentant des risques variés de na-
sieurs rejets-types sont généralement considérés ture radiologique et chimique, dont des REP, des
pour la définition des actions de protection des po- installations présentant un risque de criticité, des
pulations à court terme. Les principaux accidents installations mettant en œuvre des produits urani-
pouvant affecter ces installations sont l’incendie, fères, notamment l’hexafluorure d’uranium (UF6).
l’explosion, la criticité, la fuite de produits radioac- L’inventaire des situations accidentelles suscep-
tifs ou chimiques, notamment l’UF6, et la fusion du tibles de se produire sur le site et l’évaluation des
cœur pour les réacteurs expérimentaux. conséquences associées ont conduit à retenir plu-
sieurs rejets-types correspondant à 12 accidents de
L’exemple des PPI établis pour les sites de Saclay référence, dont celui relatif aux REP. La chute acci-
et du Tricastin présenté ci-dessous illustre la dé- dentelle d’un avion militaire sur l’usine de COGEMA
marche appliquée. ou sur un parc de conteneurs d’UF6 cristallisé ou
encore la fuite de conteneurs ou de stockages d’UF6
Saclay ou d’acide fluorhydrique (HF) font partie des acci-
dents de référence retenus pour la définition des
Dans le cas du PPI du site CEA de Saclay, les rejets- actions de protection à mettre en œuvre dans le
types considérés relèvent de deux scénarios enve- cadre du PPI. En raison de la complexité du site et
loppes. des nombreuses installations concernées par un
accident à cinétique rapide, et par souci de simpli-
Le premier scénario retenu est un accident de fu- cité et d’efficacité, un rayon unique de 3,5 km a été
sion totale et immédiate du cœur du réacteur expé- retenu pour le déclenchement du PPI en mode ré-
rimental OSIRIS, avec un rejet immédiat non filtré flexe. Il englobe l’ensemble des périmètres obtenus
de produits radioactifs suivi d’un rejet prolongé fil- à partir des scénarios enveloppes.
tré. Le calcul des rejets suppose que les pièges à
iode ne sont plus efficaces. À titre d’illustration, le tableau 2 présente les
conséquences radiologiques et les distances aux-
Le second scénario retenu est un incendie généra- quelles pourraient être atteints des seuils d’effets
lisé dans une aile du bâtiment de l’installation CIS- létaux irréversibles pour un accident de fuite d’un
BIO de fabrication de produits pharmaceutiques, conteneur UF6 sur l’usine de COGEMA, pour deux
impliquant l’ensemble des produits radioactifs pré- conditions météorologiques données.
sents dans les différents locaux.
Application au cas des transports de
D’autres situations accidentelles peuvent bien sûr matières radioactives
se produire sur le site de Saclay, mais leurs consé-
quences radiologiques sont moindres, au regard de Des plans d’urgence sont également élaborés par
celles des deux scénarios retenus pour le PPI. les pouvoirs publics depuis le début des années
2000 pour faire face à des accidents au cours du
Le tableau 1 présente les conséquences radiolo- transport de matières radioactives. Dans un tel cas,
giques associées à l’accident de référence consi- les principaux risques pour les populations sont,
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6. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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Tableau 2 : conséquences radiologiques et distances d’atteinte des seuils toxiques associées à un accident de fuite de conteneur d’UF6 sur
l’usine de COGEMA.
Conséquences radiologiques dues à l’uranium
Condition météo Diffusion faible – vent de 3 m/s Diffusion normale – vent de 5 m/s
Distance 1 km 2 km 5 km 1 km 2 km 5 km
Dose efficace 32 mSv 9 mSv 1,4 mSv 16 mSv 4 mSv 0,7 mSv
Distances d’atteinte de seuils toxiques pour l’uranium
Condition météo Diffusion faible – vent de 3 m/s Diffusion normale – vent de 5 m/s
Effets létaux (50%)* < 500 m < 500 m
Effets irréversibles (lésion rénale) Jusqu’à 2900 m Jusqu’à 1800 m
Distances d’atteinte de seuils toxiques pour l’acide fluorhydrique
Condition météo Diffusion faible – vent de 3 m/s Diffusion normale – vent de 5 m/s
Effets létaux < 500 m < 500 m
Effets irréversibles Jusqu’à 580 m < 500 m
*le SEL correspond à 50% des décès.
d’une part, l’exposition par inhalation de sub- d’expérience des exercices. Cette démarche est
stances radioactives rejetées dans l’environnement complétée par la détermination des éléments d’in-
à la suite de la défaillance des barrières de confi- formation (ou critères) pouvant être recueillis sur
nement d’un colis, d’autre part, l’exposition directe les lieux de l’accident pour apprécier la gravité
aux rayonnements émis par les matières radioac- réelle ou potentielle de l’accident et définir le péri-
tives transportées si la protection radiologique du mètre de sécurité à mettre en place. Enfin, cer-
colis est dégradée, ou en cas d’accident de criticité. taines situations ont été regroupées afin de ne re-
tenir qu’un nombre limité de périmètres de sécu-
Un accident de transport de matières radioactives rité réflexes.
peut se produire pratiquement à n’importe quel en-
droit en France et il peut concerner des types de Ainsi, trois périmètres de sécurité sont retenus
transport très divers; il n’y a donc pas, en règle gé- dans le cas d’un accident de transport de matières
nérale, d’équipe spécialisée immédiatement dispo- radioactives affectant un colis :
nible pour identifier de façon certaine les risques et • une zone d’évacuation systématique de 100
définir et mettre en œuvre les actions optimales de mètres de rayon autour du lieu de l’accident;
protection des populations. Il a donc été décidé de dé- •une zone de mise à l’abri de la population dans un
finir a priori des critères et des actions simples per- rayon de 500 mètres autour du lieu de l’accident,
mettant aux premiers intervenants (forces de l’ordre pour un transport de colis notifié auprès de la
ou premiers secours), à partir des constats faits sur Direction de la défense et de la sécurité civile et de
les lieux de l’accident, d’engager de façon réflexe des la Direction générale de la sûreté nucléaire et de la
premières actions de protection des populations, radioprotection (soumis ou non à un incendie) et
adaptées à la gravité de l’accident. Ces actions se- pour les situations d’incendie sévère affectant un
raient à mettre en œuvre à l’intérieur d’un périmètre certain type de colis;
de sécurité, caractérisé par une distance de sécurité. •la mise à l’abri de la population dans un secteur
angulaire d’environ 60°, sur une distance de 1000
La démarche générale proposée pour l’évaluation mètres, orienté sous le vent du colis, pour les si-
des distances de sécurité à retenir dans les PSS- tuations d’incendie sévère affectant un colis de type
TMR a été établie en cohérence avec celle corres- citerne ou chargé d’hexafluorure d’uranium.
pondant aux plans particuliers d’intervention (PPI).
Elle a de plus été menée en concertation avec les Conclusion
acteurs de terrain pour tenir compte de leur expé-
rience en matière d’intervention, y compris pour les Un plan particulier d’intervention ou un plan de se-
accidents de nature chimique, et intègre le retour cours spécialisé permet de faire face aux consé-
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7. Dossier : Protéger la population en situation d’urgence
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quences à court terme d’un accident entraînant un 1990, notamment à l’occasion de la préparation
rejet de produits radioactifs ou chimiques corres- des exercices, et doit se poursuivre encore.
pondant aux accidents de référence pris en compte Compte tenu de l’évolution des connaissances, no-
lors de l’établissement des bases techniques et tamment en matière d’accident grave et de com-
d’assurer la protection immédiate des populations. portement des produits radioactifs ou chimiques à
En fonction du déroulement de l’accident et du l’intérieur des installations ainsi que dans l’envi-
contexte local (nombre de personnes concernées, ronnement, les bases techniques des PPI sont
voies d’accès…) des actions de grande ampleur mises à jour, dans le but de disposer d’évaluations
pourraient être décidées en termes d’évacuation, plus réalistes. Dans ce contexte, les améliorations
de mise à l’abri et d’ingestion d’iode stable. apportées aux modèles de dispersion atmosphé-
rique des substances radioactives ou toxiques de-
De telles actions ne peuvent être engagées effica- vraient permettre de mieux prendre en compte les
cement que si elles ont été définies au préalable, spécificités des sites et de leur environnement, par
notamment en terme de dimension. Il s’agit là de exemple la présence de reliefs. Par ailleurs, les
l’intérêt initial des bases techniques des plans bases techniques des PPI considèrent principale-
d’urgence, telles que décrites dans cet article. Au- ment les premières 24 à 48 heures d’un accident;
delà, la connaissance des situations accidentelles dans le cadre des réflexions en cours au plan na-
de référence est essentielle à la bonne information tional sur la gestion post-accidentelle d’un événe-
des administrations locales, des élus et plus géné- ment à caractère radiologique et la transition avec
ralement du public. Cette démarche d’information la phase d’urgence, il conviendra de tenir compte
sur le risque accidentel lié aux activités nucléaires des conséquences des rejets accidentels sur une
s’est largement développée depuis les années plus longue durée. ■
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