2. Introduction p.4
l’Homme qui sait l’Homo Sapiens
:
Le designer soumit à des réalités naturelles p.11
Rien ne naît ni ne périt P.11
Le bagage universel du Designer P.12
Le point - la grille P.14
Les mathématiques - langage universel P.16
La grille anthropomorphique P.18
LE NOMBRE D’OR P.24
l’Homme qui fabrique l’Homo Faber
:
Collecter - collectionner P.31
Les territoires P.31
LES INTERSTICES P.32
Les champs P.34
LES Territoires en rhizomes P.38
Se constituer sa boite à outils P.38
le Bricolage SELON Lévi Strauss P.38
La recherche P.40
Détourner - s’approprier P.42
Le point de vue - la perception P.42
Le ready made P.44
LE Situationnisme DE guy Debord P.45
l’Homme qui joue l’Homo Ludens
:
Déconstruire P.48
La grammatisation P.50
Les iconèmes et les graphèmes P.50
Les codes P.51
Iconèmes Héréditaires P.52
Élaboration de la grille P.54
Introduction à l’expérimentation personnelle p.58
Conclusion p.66
2
3
Bibliographie P.69
3. Introduction
Cette réflexion de fin d’études est pour moi l’occasion de réfléchir à ma pratique de designer L’Homme moderne a d’abord été qualifié par les lumières d’Homo sapiens (qui sait) auquel
graphique. Souvent j’ai l’impression de faire, de savoir faire mais ce n’est pas pour autant s’est ajouté la notion d’Homo faber (qui fabrique). Puis, l’historien Johan Huizinga, inventa
que je comprends toujours les tenants et les aboutissants d’une idée. J’aimerais comprendre le terme d’Homo ludens qui vient compléter la définition de ce qu’est un homme par une
la part de convenu et la part de sensible dans mon travail. En matière de production intellec- fonction propre à notre société, l’acte de jouer. Ces trois qualificatifs - qui sait, qui fabrique et
tuelle je ne suis qu’un amateur. C’est pour cela que j’ai choisi comme axe de réflexion une chose qui joue - semblent être des gestes primordiaux qui conditionnent et qui structurent nos façons
d’aussi solitaire que l’acte de création. Mon envie était de trouver ce qui peut se dégager pour de concevoir. C’est à un premier niveau ce que j’appellerai une structure. En effet ces caractères
moi de structurant dans les différentes lectures que j’ai faites. L’idée, au sens général du terme, de l’être humain nous renseignent sur une manière d’agencer et de construire notre langage.
aussi est à l’origine personnelle. Elle se met en action et déclenche des potentiels grâce à un On peut dire qu’il existe certaines conventions naturelles primaires dont on peut difficilement se
bagage, un savoir-faire, des références, qui nous sont propre en tant que designer graphique soustraire. Par contre il peut être utile de savoir s’en servir. Comment alors identifier ces réalités
mais aussi en tant qu’individu. Mais si l’idée nous appartient, elle résonne dans toutes les disci- naturelles ? Comment cet environnement nous conditionne ou nous aide dans nos représenta-
plines de manières différentes. J’espère que ma réflexion au delà de ce qu’elle a dégagé pour tions graphiques ?
moi lors de sa construction, et même si elle ne peut être qu’incomplète et à relativiser, résonnera
un peu chez vous lecteurs et ce peut importe votre discipline. Ces fondements primaires de l’être humain et de son environnement nous amènent à des terri-
toires et des conventions culturelles. Je poserais la question du «faire». Que «fait» le designer
Le mot graphisme provient de la racine grecque graphein qui signifie à la fois écrire et dessiner. graphique quand il pratique sa passion ? Comment s’appuie-il sur ces structures sociales pour se
Il y a donc la dimension du texte et celle du dessin. Pour moi pratiquer le design graphique c’est constituer un premier bagage, une boite à outils ? Comment s’en défait-il ?
avant tout trouver son écriture dans sa forme et dans son contenu. Le designer graphique
Pierre Di Sciullo propose, pour éviter le jugement de valeur, un parallèle avec la profession Dans une ultime partie j’essaierais d’appliquer les fondements théoriques que j’aurais précé-
de musicien. Il existe selon lui deux pratiques : celle d’interprète et celle de compositeur. En demment développés par une démonstration typographique et par l’introduction de mon
musique il est tout à fait possible de distinguer les deux. Ce n’est pas parce qu’il y a musique expérimentation personnelle en lien avec le mémoire.
qu’il y a forcement composition.
Trouver son écriture c’est dire « j’existe ». Si on observe l’histoire, l’Homme a toujours voulu
laisser une trace écrite. En atteste les peintures rupestres vieilles d’au moins 30 000 ans. Cette
pratique est restée continue jusqu’à nos jours. Elle n’est pas le fruit d’une ethnie ou d’une culture
particulière, mais s’est répandue dans le monde suivant une distribution universelle. Selon le
préhistorien Emmanuel Anati, il existerait 45 millions de peintures rupestres sur des rochers et
dans des grottes, sur 170 000 sites de 160 pays. Il existe aussi des cultures de l’oralité mais dans
le cas du design graphique et de ma réflexion, le vocabulaire et sa syntaxe se veulent visuels.
4
5
4. Les peintures rupestres de Los Antiguos, protégées par le ravin Particulièrement connu pour la collecte d’affiches lacérées,
du Río Pinturas, appartiennent à une civilisation qui a habité pratique qu’il débute en 1949 avec le photographe Raymond Hains,
la région il y a 10.000 ans. l’artiste Jacques Villéglé récupère dans la rue des placards publi-
citaires déchirés et tagués pour les proposer comme œuvre d’art,
laissant une large place à la thématique politique
qui comporte des affiches syndicales, partisanes et électorales.
6
7
5. L’Homme
qui sait :
l’Homo
Sapiens.
8
9
Quelques reslutats d’une recherche à partir du terme « savoir » sur
Google images.
6. Le designer soumit à des réalités naturelles
JE SUPPOSE QUE C’EST DANS LE SAVOIR QUE RÉSIDE LE PREMIER VECTEUR
DE CRÉATIVITÉ CAR RIEN N’EST JAMAIS « ORIGINAL ».
IL EST ICI QUESTION DE DONNER UN CADRE À MA RECHERCHE. JE SUPPOSE ALORS
QUE C’EST DANS LA PERCEPTION CONSCIENTE DES LIMITES ET DES FRONTIÈRES
QUI NOUS ENTOURENT QUE NOUS POUVONS LES DÉPASSER VOIRE LES REDÉFINIR.
NOUS SOMMES SOUMIS À DES RÉALITÉS NATURELLES. LA NATURE CRÉE ELLE MÊME
SA PROPRE STRUCTURE. COMMENT EMPRUNTER À CETTE STRUCTURE ?
Rien ne naît ni ne périt
L’idée ne date pas d’hier. Ce principe avait déjà été
énoncé au Ve siècle avant J.C. par un philosophe
très en avance sur son temps, Anaxagore de
Clazomènes :
« Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà
existantes se combinent, puis se séparent de
nouveau ».
Antoine Laurent de Lavoisier confirme cette théorie
au XVIIIe siècle dans son traité élémentaire de chimie
en arrivant à décomposer l’eau en deux éléments qu’il
nomme oxygène et hydrogène.
« [...] car rien ne se crée, ni dans les opérations de
l’art, ni dans celles de la nature, et l’on peut poser
en principe que, dans toute opération, il y a une
égale quantité de matière avant et après l’opé-
ration [...] et qu’il n’y a que des changements, des
modifications. »
À gauche, sur la représentation du cycle de l’eau on
voit bien que malgré plusieurs états et transformations
possibles de l’élément, son volume reste toujours le
même mais que cela n’empêche pas une série de trans-
10
11
Représentation qualitative du cycle de l'eau, Antoine Laurent de Lavoisier, formations. La composition de la matière reste la même
d'après Horton (1931), extraite de Gray (1972) Traité élémentaire de chimie,
mais possède plusieurs états.
7. Le bagage universel du Designer
À mon sens c’est en identifiant les limites de notre monde naturel
que l’ont peut s’en soustraire, s’en émanciper. Il me semble intéressant
de revenir sur ce qui a trait à l’ensemble de l’espèce humaine.
L’ethnologue Claude Lévi Strauss pense que toutes les formes de cultures
possèdent le même répertoire de signes qui ne sont que des observa-
tions que l’on peut faire dans le monde de la nature. C’est donc un bagage
universel.
Si l’on part de formes graphiques, ces formes conceptuelles font partie
du patrimoine universel et sont, de fait, limitées par des principes géomé-
triques et naturels. Il existe donc des formes graphiques primaires :
Le point, la ligne et la courbe.
Ce sont les premières limites de notre territoire. Nous ne pouvons nous en
soustraire mais nous pouvons les identifier et nous en servir.
Physiologiquement aussi nous possédons un bagage commun.
Cela détermine notre rapport au temps et à l’espace par exemple. Au niveau
de la perception, la sensibilité est un caractère naturel de l’être humain.
C’est la propriété d’un être vivant de capter un stimulus et d’y répondre.
C’est la base de la communication et si l’on va plus loin, du dialogue.
Dans ces interactions nous pouvons voir un premier niveau de créativité.
On parlera de tout ce qui est de l’ordre de la Nature, de l’inné. Le mot naturel
qualifie ce qui n’a pas été transformé, mélangé ou altéré par un artifice
quelconque. La nature et les structures qui la composent est sans doute
à l’origine des esthétiques. Les différences esthétiques ne se situeraient
donc pas dans le vocabulaire visuel, car fondamentalement commun à tous,
mais dans notre capacité à l’identifier, à l’employer et à l’étendre.
12
13
Claude Lévi-Strauss est né à Bruxelles le 28 novembre 1908. Après
l’agrégation de philosophie en 1931, sa carrière d’anthropologue
américaniste débute en 1934, lorsqu’il part enseigner la sociologie
à São Paulo, où il demeure jusqu’en 1939. C’est à cette occasion
qu’il séjourne parmi les populations indiennes nambikwara,
caduveo et bororo.
Directeur d’études à la Ve section de l’EPHE (Religions comparées
des peuples sans écriture) en 1950, il est élu au Collège de France
en 1959. Il y occupe la chaire d’anthropologie sociale jusqu’en
1982.
8. Le point - la grille
Revenons à nos formes graphiques primaires
ou naturelles. Pour être plus exact l’élément le plus
minimal est en fait le point. Selon la philosophie
atomiste l’univers est composé de « grains » (atomes)
et de « vide » qui servent à constituer l’immense
diversité de la nature. De la même manière le point
est à l’image de cette vision atomiste de l’univers.
Le point nous permet donc d’envisager notre espace
de composition. Le point est notre système de référence,
que ce soit à l’écran comme à l’impression. Le point
définit la grille, le point est la grille. La page sera donc
toujours quadrillée de lignes de construction, l’écran
Modèle de l’atome (source google images)
de pixels, le temps de secondes, le monde de latitudes
et longitudes, etc...
On se figure naturellement que le point est de forme
ronde. Le point n’est finalement qu’une représentation
arbitraire de coordonnées. Les coordonnées ne sont pas
représentable, c’est pourquoi les mathématiciens leur
ont donné un corps. Si on admet que le point n’est que
l’élément référent de la grille on peut alors le symboliser
par ce que l’on veut.
Par exemple, le point peut être à l’image du pixel.
C’est le référentiel de l’écran, du moniteur
en informatique. Il peut aussi être figuré par d’autres
signes. Le point devient l’élément d’une « trame »,
qui est l’ensemble des fils passant transversalement
sur un métier à tisser pour former un tissu, par exemple.
En littérature on parlera d’« intrigue » sur lequel
se détachent des événements.
C’est en mettant en évidence certains de ces points
que l’on peut composer quelque chose de nouveau.
Michiel Schuurman Bodoni SvtyTwo ITC TT, bold « a »
Designer graphique Hollandais
Poster pour l’Hotel Mariakapel
14
15
9. Le Voyager Golden Record C’est une vision empirique et donc sans ces règles tout s’effondre. Ces contraintes sont de nature
est un disque embarqué
à bord des deux sondes spatiale (espace infini, continu, homogène etc.). Ce sont les propriétés convenues d’une certaine
spatiales Voyager,
lancées en 1977. réalité, d’un certain espace.
Ce disque contient des sons et
des images sélectionnés pour
dresser un portrait
de la diversité de la vie Au même titre que le mathématicien qui développe ses formules à l’aide des géométries qu’il
et de la culture sur Terre,
et est destiné à d’éventuels rencontre dans la nature, le designer graphique peut s’appuyer ou emprunter à la science des
êtres extraterrestres
qui pourraient le trouver. mathématiques pour concevoir des modèles de représentations. L’emprunt de ces idées en
mathématiques ne résonnera pas de la même façon pour un designer graphique mais pourra
en quelque sorte lui permettre d’établir une structure cohérente dans un champ d’application
différent de celui des mathématiques.
Plutôt que de chercher à démontrer ou à résoudre le designer graphique essaiera de créer
une harmonie pour un espace (celui de la commande, du projet, du support, etc.) et les pièces
graphiques qui le composent. L’idée n’est donc pas juste de puiser dans les formes indénia-
blement graphiques que produit la géométrie mais de choisir, de se servir de ses règles ou non
lorsqu’on aborde la conception d’un projet de design graphique.
Les mathématiques - langage
universel
La science la plus à même de définir le réel au sens objectif du terme
est sans doute les mathématiques. Cette science permet le processus
de conceptualisation, de catégorisation par la pensée tout en développant
un langage symbolique. La géométrie et les systèmes de représentations
mathématiques sont calqués sur des phénomènes que l’on rencontre
dans le monde naturel.
En identifiant certaines de ces représentations le mathématicien donne
une logique aux choses qui nous entourent. Le philosophe Otto Neurath,
considère le graphiste comme un intermédiaire entre le chercheur
(l’historien, l’économiste ou le mathématicien) et son public.
« La chose la plus incompréhensible à propos de l’univers,
c’est qu’il est compréhensible ». Albert Einstein.
Nous sommes émerveillés par le fait que notre univers ne soit pas
anarchique, que les atomes obéissent aux mêmes lois aussi bien dans des
galaxies distantes que dans les laboratoires. L’efficacité des mathématiques
est de pouvoir décrire ces structures. Pour cela le mathématicien a conçu
un outil : la géométrie. La géométrie est une partie des mathématiques au
même titre que l’algèbre. C’est un lieu qui nous permet d’apprendre à appré-
hender l’espace. La géométrie classique répond à des contraintes sans qui
16
17
elle ne pourrait exister.
Les sondes spatiales Pioneer 10 et Pioneer 11 ont embarqué à
leurs bords une plaque, appelée plaque de Pioneer, comportant
un message pictural de l’humanité destiné à d’éventuels êtres
extraterrestres. Sur cette plaque métallique gravée sont repré-
sentés un homme et une femme nus, ainsi que plusieurs symboles
fournissant des informations sur l’origine des sondes.
10. La grille Le typographe Geoffroy Tory
applique lui aussi la conception
anthropomorphique anthropomorphique pour la compo-
sition des lettres de son Champs
Fleury (1529). Cet ouvrage a marqué
Dans l’architecture comme aux débuts de l’impri-
l’histoire de la typographie, et on
merie, les hommes se sont heurtés à la complexité de
y retrouve des termes appartenant
construire. Ils firent donc naturellement appel à ce qu’ils
encore une fois à la physiologie
pouvaient observer dans la nature. Léonard de Vinci
humaine : l’oeil, le pied, le corps, le
applique par exemple une conception anthropomor-
jambage, etc.
phique de l’architecture. Dans la traduction suivante Geoffroy Tory, Le Champs
Fleury
on voit bien la récurrence des termes empruntés à la
Ces termes ont d’ailleurs fait date et
morphologie humaine.
ont toujours cours dans le langage
typographique.
« […] que la Nature a distribué
les mesures du corps humain
comme ceci. Quatre doigts font
une paume, et quatre paumes font
un pied, six paumes font une coude :
Leornard de Vinci,
quatre coudes font la hauteur Homme dit de vitruve, 1492
(source wikipédia)
d’un homme. Et quatre coudes Le Corbusier termine en 1948 la
font un double pas, et vingt-quatre la racine de cheveux, un septième. rédaction de son essai, intitulé Le
paumes font un homme ; et il a Depuis les tétons jusqu’au sommet Modulor. Fruit d’une réflexion menée
utilisé ces mesures dans de la tête, un quart de la hauteur de dès les années 20, le Modulor est
ses constructions. l’homme. La plus grande largeur né, nous dit-il, de l’observation de la
Si vous ouvrez les jambes de façon des épaules est contenue dans nature, de l’étude des oeuvres d’art,
à abaisser votre hauteur le quart d’un homme. Depuis le de leurs tracés régulateurs et des
d’un quatorzième, et si vous étendez coude jusqu’au bout de la main, un travaux de Matila Ghyka consacrés
vos bras de façon que le bout cinquième. Depuis le coude jusqu’à au Nombre d’or dans la nature et
de vos doigts soit au niveau l’angle de l’avant bras, un huitième. dans l’art.
du sommet de votre tête, vous devez La main complète est un dixième
savoir que le centre de vos membres de l’homme. Le début des parties Ce système a été utilisé à Marseille
étendus sera au nombril, et génitales est au milieu. Le pied est pour bâtir la « Cité radieuse », il
que l’espace entre vos jambes un septième de l’homme. Depuis devait permettre de construire
sera un triangle équilatéral. la plante du pied jusqu’en dessous l’habitat du bonheur.
La longueur des bras étendus du genou, un quart de l’homme.
d’un homme est égale à sa hauteur. Depuis sous le genou jusqu’au début « La nature est mathématique, les
Depuis la racine des cheveux des parties génitales, un quart de Le Corbusier, Modulor chefs-d’œuvre de l’art sont en conso-
1948
jusqu’au bas du menton, il y a un l’homme. nance avec la nature ; ils expriment
dixième de la hauteur d’un homme. La distance du bas du menton au les lois de la nature et ils s’en
Depuis le bas du menton jusqu’au nez, et des racines des cheveux servent »
sommet de la tête, un huitième. aux sourcils est la même, ainsi que
Depuis le haut de la poitrine jusqu’au l’oreille : un tiers du visage. » Le Corbusier, modulor, 1948.
sommet de la tête, un sixième ;
18
19
depuis le haut de la poitrine jusqu’à Vitruve, De l’architecture, Leonardo Da vinci.
11. Certains designers graphiques
répondent littéralement à la
question du rapport anthropomor-
phique en typographie.
D’autres à l’image de M&M,
semblent quand à eux se détourner
cette approche en inversant le
processus. Chez eux c’est la lettre
qui vient sculpter le corps humain.
The Alphabet, studio M&M The Alphamen, studio M&M
2004 2004
Body Type a été créée
par Peter Bil’ak en 2011.
(source typothêque.com)
Cette police de caractère
a été créée par Charles Mazé
en 2006. Initialement réalisé
avec un groupe de danse,
l’alphabet anthropomorphique
est ensuite digitalisé
avec Lieuxcommuns
pour la publication
L’art en présence, bilan
des centres chorégraphiques
nationaux.
20
21
Philip Dam Roadley-Battin,
anatomytype, 2008
12. 22
23
Matila C. Ghyka, illustration
provenant de son ouvrage
« le nombre d’or » dans lequel
il affirme qu’il existe
une esthétique scientifique.
1932
13. LE NOMBRE D’OR
Les exemples que nous avons vu précédemment font apparaître une
nouvelle notion : le nombre d’or (1,618) ou divine proportion. Ce nombre
symbolisé par Ø est en fait essentiellement une curiosité mathématique. Le
nombre d’or n’est ni une mesure, ni une dimension, c’est un rapport entre
deux grandeurs homogènes.
Celle-ci apparaît dans une époque où l’on conçoit la réalité, comme nature
créée par Dieu. La nature est à l’image de Dieu, la perfection. Le typographe
face à la page blanche souhaite ordonner les éléments dont il dispose de
la manière la plus harmonieuse, à l’image de la nature. Dieu seul pouvant
accomplir cette tâche, on comprend pourquoi il cherche un moyen de faire
appel à la proportion divine pour organiser la page.
Le nombre d’or aurait été mis au jour par le mathématicien grec Pythagore
il y a 5000 ans. Cette divine proportion semble un principe mathématique
faisant partie des lois de la natures.
On retrouve ce nombre dans la nature : certaines fleurs, les plantes dont les
feuilles s’enroulent en hélice autour de leur tige, la plupart des coquillages
comme le Nautile, la coquille de l’oursin, la toile de l’araignée, la structure de
l’A.D.N., et ainsi de suite... Il apparaît donc que l’homme emprunte continuel-
lement à la nature pour créer les concepts nécessaires à son développement
et en l’occurrence à la création.
Si étonnant qu’il y paraisse, ce n’est qu’en 1932 qu’est né le terme «nombre
d’or». C’est un prince roumain, Matila Ghyka, diplomate et ingénieur, qui
l’invente. Il lui consacre un volumineux ouvrage dans lequel il affirme qu’il
existe une esthétique scientifique. En effet, pour le philosophe Platon (IVe
siècle avant J.-C.), le beau se traduit par des figures géométriques.
Pour affirmer que le nombre d’or est la clef mathématique de la beauté,
Matila Ghyka se fonde sur le pentagone, dont les diagonales se coupent
selon un «partage en extrême et moyenne raison» (en géométrie, raison
signifie proportion). Pour donner plus de poids à sa thèse, Matila Ghyka
la rapproche de la doctrine attribuée au philosophe et mathématicien grec
Pythagore selon laquelle «tout est arrangé par le nombre».
24
25
Le coquillage nautile a une forme de spirale logarithmique ou
spirale dorée. On peut la dessiner à partir d’une série de rectangles
d’or. On retrouve ce modèle sous diverses formes dans le monde
naturel.
14. 26
27
La figure du pentagrame est liée au nombre d’or et au triangle
d’or. Outre la multitude de significations symbolique qu’elle
véhicule, elle sert notamment à la recherche de la perfection, dans
le visage humain.
15. l’Homme
qui
fabrique :
l’Homo
Faber.
28
29
Quelques reslutats d’une recherche à partir du terme « faire » sur
Google images.
16. Collecter - collectionner
Les territoires
J’AI PRÉCÉDEMMENT MONTRÉ QUE LE DESIGNER GRAPHIQUE, ÉTAIT Pour collecter il faut sans doute commencer par identifier des champs
SOUMIS À SA RÉALITÉ. C’EST À DIRE À DES MODÈLES NATURELS de récupération. Qu’est-ce qu’un territoire ? Un territoire peut être réel et
QUI SONT À LA FOIS DES STRUCTURES DE PENSÉES MIS AU JOUR géographique. Il sera alors défini par une des frontières ainsi qu’une aire.
PAR DES SCIENCES TELLES QUE LES MATHÉMATIQUES, MAIS AUSSI Ces frontières peuvent être, par exemple, une barrière physique, une langue,
À DES REPRÉSENTATIONS GRAPHIQUES PRIMAIRES. des lois, etc. Les territoires qu’explore un designer graphique ont donc aussi
un caractère social et culturel ou tout ce qui a trait aux sciences humaines.
J’AIMERAIS MAINTENANT MONTRER QUE LE DESIGNER PEUT
- ET DOIT - TENTER D’ÉTENDRE CETTE RÉALITÉ NATURELLE. Intervient donc ici la notion de paradigme. Ce terme est employé pour
COMMENT CES RÉALITÉS NATURELLES PEUVENT NOUS AMENER décrire l’ensemble des expériences, des croyances et des valeurs qui
À DES CONVENTIONS CULTURELLES ? POUR CE FAIRE, LE DESIGNER influencent la façon dont un individu perçoit la réalité et réagit à cette
GRAPHIQUE DOIT, À MON SENS, ÊTRE « AUX AGUETS » POUR COLLECTER perception. Ce système de représentation lui permet de définir l’environ-
DES MATÉRIAUX, LES SÉLECTIONNER POUR EN FAIRE UNE SORTE nement, de communiquer à propos de cet environnement, voire d’essayer de
DE BOITE À OUTILS ET ENSUITE SE LES RÉAPPROPRIER PAR LE BIAIS le comprendre ou de le prévoir. En d’autres termes c’est un modèle. Le philo-
DU DÉTOURNEMENT. sophe Louis Althusser parle lui d’idéologies qu’il définit comme des objets
culturels perçus-acceptés-subis, et qui agissent fonctionnellement sur les
hommes par un processus qui leur échappe profondément. Ces idéologies
sont donc inconscientes.
30
31
Louis Althusser (1918-1990), philosophe français, théoricien Pierre Bourdieu (1930-2002) L’oeuvre sociologique de Pierre Bourdieu est dominée par une analyse des
marxiste, qui fut un maître à penser des années 1970. Philosophe mécanismes de reproduction des hiérarchies sociales. Il met en évidence l’importance des facteurs
officieux du Parti communiste jusqu’à Mai 1968, il entra en culturels (persistance des comportements acquis au sein du milieu d’origine) et symboliques dans les
polémique avec la direction du PCF Althusser doit sa renommée
. actes de la vie sociale.
internationale à la publication de Pour Marx, suivi, la même année, Ses travaux de recherche s’accompagnent d’une action militante et d’un engagement politique à
de Lire « le Capital ». gauche.
Reconnu internationalement comme l’un des maîtres de la sociologie contemporaine, Pierre Bourdieu
a été l’un des rares intellectuels humanistes engagés de la fin du XXe siècle
17. Le sociologue, Pierre Bourdieu préfère employer le terme « [...] L’habitus est le produit
« champs » (culturel, économique, artistique, religieux, du travail d’inculcation
etc.). Ces champs définissent les espaces dans lesquels et d’appropriation nécessaire
se socialisent les individus. Bourdieu nous renvoie à la pour que ces produits de l’histoire
notion d’habitus qu’il définit comme « structures struc- collective que sont les structures
turées structurantes ». En sociologie l’habitus est donc objectives (de la langue,
une disposition d’esprit. de l’économie, etc.) parviennent
à se reproduire, sous la forme
Si l’on observe le schéma simple de territoire, à droite, de dispositions durables, dans tous
on peut constater qu’un territoire n’existe que s’il est en les organismes (que l’on peut, si l’on
relation avec d’autres territoires. Les territoires sont donc veut, appeler individus) durablement
inter-connectés par leurs bordures, leurs marges. D’un soumis aux mêmes conditionne-
point de vue sociologique le mot marge est intéressant ments, donc placés dans les mêmes
car il nous rapporte aux marginaux. Les marginaux sont conditions matérielles d’existences. »
par définition des groupes d’individus qui ne veulent pas
ou ne sont pas admis par la culture dominante. On parle Pierre Bourdieu, Esquisse d’une théorie de la
aussi de contre-culture, à l’image du mouvement punk pratique, p. 282.
par exemple. Si l’on se positionne dans une démarche de
collecte de matériaux nouveaux ou différents car sortant
du cadre de notre territoire originel, c’est sans doute
dans ces marges que les passerelles - d’échanges ou de
collectes - de culture
sont les plus propices.
LES INTERSTICES
Henri Lefebvre posait clairement la question :« Qu’est-ce
qui échappe à l’État ? », il orientait sa réponse autour du
« combat » que se livre administration et individu :
« S’il est vrai que l’État ne laisse hors de lui que
l’insignifiant, il n’en reste pas moins que l’édifice
politico-bureaucratico-étatique a toujours des
fissures, des interstices et des intervalles. D’un
côté, l’activité administrative s’acharne à boucher
ces trous, laissant de moins en moins d’espoirs et
de possibilités à ce qu’on a pu appeler la liberté
interstitielle. D’un autre côté l’individu cherche à
élargir ces fissures et à passer par les interstices ».
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne III. De la modernité
32
33
au modernisme, 1981.
Modèle de figuration des territoires
réalisé avec le plugin scriptographer
et le script Voronoi Tool
de Jonathan Puckey
18. Les champs
Si l’on reprend le terme « champs » de Bourdieu, on
peut concevoir une autre représentation des territoires.
Comme je l’ai précédemment défini, les champs sont
des espaces dans lesquels les individus se socialisent.
Cela suppose d’une part que ce sont les individus qui
composent les champs. Ils sont à l’image des points (la
grille).
De plus selon Bourdieu les individus peuvent se situer
dans plusieurs champs à la fois. Ces champs se super-
posent et se confondent en certains endroits.
Figure représentant les couleurs CMJN
On peut faire l’analogie avec le symbole des couleurs
CMJN. Le Cyan, le Magenta et le Jaune lorsqu’ils se
sur-impriment, donnent comme résultat un Noir CMJN.
Il existe alors des champs primaires et des champs
qui cumulent les propriétés des primaires et qui
forment un nouvel ensemble. On peut supposer que
la « sur-impression » va faire plus qu’additionner les
caractéristiques culturelles. Cela va créer de nouveaux
habitus.
34
35
Modèle de figuration des champs
réalisé avec le plugin scriptographer
et le script PhyllotacticSpiral
de ken frederick
19. LES TErritoires en rhizomes
La pensée rhizomorphe de Deleuze emprunte à la botanique le
modèle du « rhizome », plante multicentre, anarchique et souterraine.
Penser en réseau, c’est penser la multiplicité des échanges, multitude
de flux déterritorrialisants et prolifères. Ce n’est pas penser le territoire
comme centralisé, mais comme réticulaire, la communication comme
fluide et liquide, les limites solubles... Certains designers graphique, à
l’image de Neville Brody ou David Carson, appliquent les propriétés du
Illustration d’un rhizome
rhizome à la grille typographique dans le but de la déconstruire et de en botanique.
l’exploser. La grille typographique est une trame dont le plus petit élément
commun à la page est le lettre. À l’inverse des territoires contraints par leurs
frontières, la grille peut partir du plus petit élément qui peut s’étendre à
l’infini.
« Un tel système pourrait être nommé rhizome. Un rhizome comme
tige souterraine se distingue absolument des racines et radicelles.
Les bulbes, les tubercules sont des rhizomes. Des plantes à racine et
radicelle peuvent être rhizomorphes à de tout autres égards : c’est une
question de savoir si la botanique, dans sa spécificité, n’est pas tout
entière rhizomorphique. Des animaux même le sont, sous leur forme
de meute, les rats sont des rhizomes. Les terriers le sont, sous toutes
leurs fonctions d’habitat, de provision, de déplacement, d’esquive et
de rupture. Le rhizome en lui-même a des formes très diverses, depuis
son extension superficielle ramifiée en tous sens jusqu’à ses concré-
tions en bulbes et tubercules. [...] N’importe quel point d’un rhizome
peut être connecté avec n’importe quel autre, et doit l’être. C’est très
différent de l’arbre ou de la racine qui fixent un point, un ordre. [...]
Les multiplicités sont rhizomatiques, et dénoncent les pseudo-multipli-
cités arborescentes. Pas d’unité qui serve de pivot dans l’objet, ni qui
se divise dans le sujet. Pas d’unité ne serait-ce que pour avorter dans
l’objet, et pour « revenir » dans le sujet. Une multiplicité n’a ni sujet ni
objet, mais seulement des déterminations, des grandeurs, des dimen-
sions qui ne peuvent croître sans qu’elle change de nature (les lois
de combinaison croissent donc avec la multiplicité). [...] Un rhizome
peut être rompu, brisé en un endroit quelconque, il reprend suivant
telle ou telle de ses lignes et suivant d’autres lignes. [...] Principe de
cartographie et de décalcomanie : un rhizome n’est justiciable d’aucun
modèle structural ou génératif. Il est étranger à toute idée d’axe
génétique, comme de structure profonde. »
Gilles Deleuze et Félix Guattari Rhizome, Paris, France,
Les Éditions de Minuit, 1976, 74 pages.
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37
Modèle de figuration de rizhome
réalisé avec le plugin scriptographer
et le script Sketchy Structure
de Jay Weeks
20. Le philosophe Gilles Deleuze, définit l’animal et l’écrivain
comme des créatures « aux aguets ». Je pense qu’il en
Se constituer va de même pour le designer graphique. Il doit être prêt
à déceler des signes en toutes occasions. À la manière
sa boite à outils du chasseur qui reconnaît et comprend les signes ou
empreintes laissés par l’animal, le designer graphique
doit reconnaître ou en tout cas percevoir les signes qui
composent les différents territoires culturel dans lequel
le Bricolage il évolue. Le designer graphique doit donc s’adapter
aux matériaux - outils - qu’il collecte dans un territoire
SELON LÉvi Strauss de façon arbitraire ainsi qu’à ceux qu’il collecte dans le
cadre d’une recherche consciente.
Dans la pensée sauvage, Lévi Strauss définit le bricolage
Le designer graphique Hollandais Hans Gremmen travail
par la séquence appropriation - détournement - réinter-
sur un projet d’édition nommé sérendipity. La séren-
prétation. Cette séquence suppose le prélevement
dipité est le fait de réaliser une découverte inattendue
d’éléments pré-éxistants et leur réemploi par de
grâce au hasard, au cours d’une recherche dirigée
nouvelles combinaisons. Selon l’anthropologue, toute
initialement vers un objet différent de cette décou-
chose peut constituer un signe, simplement en devenant
verte. Dans le cas précis il s’agit pour Hans Gremmen
le support de significations pour un individu. Dans le cas
de la découverte de test d’impression ratés de l’atelier
du collage, les fragments sont des signes hétérogènes
de sérigraphie du designer graphique Paul Wyber à
déjà investis de sens, qu’un individu a extrait de leurs
Amsterdam. Il décèle dans ces image fortuites la beauté
univers d’origine. Les significations passées enrichissent
Modèle de la boite à outils de l’erreur et s’en sert alors pour en faire un livre.
ainsi le nouveau «récit». pour la qualité
Qualité et Rentabilité, C.
Delagneau, C. Ladislas, 1997,
Ces affiches étaient déjà là, faite par une
Selon Lévi Strauss, le bricoleur dispose d’un ensemble
imprimante qui n’avait pas la moindre idée
d’outils et de matériaux donnés. Il peut et n’hésitera pas
qu’elle faisait quelque chose. Le résultat est
à alimenter et enrichir son stock d’autres objets hétéro- « Le bricoleur est apte à exécuter un
tout simplement parfait. Mais ce n’est pas un
clites qu’il obtient au gré de ses découvertes ou de ce grand nombre de tâche diversifiées;
manifeste pour la non-conception. Ce n’est pas
qu’il conserve de ses chantiers précédents. mais, à la différence de l’ingénieur, il
le sujet de ces affiches. Ce qui les rend intéres-
ne subordonne pas chacune d’elles
santes, c’est le paradoxe. Si ces affiches sont
Le bricoleur est donc collectionneur et conserve des à l’obtention de matières premières
belles, c’est grâce aux dessins de Mevis & van
outils ou matériaux sous le prétexte que ceux-ci peuvent et d’outils, conçus et procurés à la
Deursen, Lex Reitsma, Roger Willems (du studio
toujours servir. Le bricoleur ne fabrique pas l’outil mesure de son projet : son univers
de design graphique hollandais WyberZeefdruk)
optimal pour chaque utilisation comme peut le faire instrumental est clos, et la règle de
qui fonctionnent si bien. Donc, je pense que les
l’ingénieur. Le bricoleur comme le designer graphique son enjeu est de toujours s’arranger
deux mondes besoin les uns des autres, et tout le
n’a pas vocation à être le meilleur technicien mais en avec les “moyens du bord”[...] »
monde doit déterminer pour lui-même quelle est
connaît suffisamment pour concevoir ce qui répond à
sa position là-dedans.
ses besoins. Sa véritable force réside dans sa capacité « Ça peut toujours servir »
à percevoir une utilité dans des outils ou des matériaux
Hans Gremmen
que l’ingénieur n’aurait pas décelé. Lévi Strauss
Serendipity, Hans Gremmen, 2008
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21. La recherche
Il existe deux types de recherches. L ’une est de l’ordre de la culture générale. Le designer graphique américain
C’est en quelque sorte une collection de références aussi diverses que le Ben Critton propose un outil qui va
paysage dans lequel nous évoluons. On y retrouve le phénomène de socia- dans ce sens.
lisation qui définit tout ce qui nous est transmis par les champs sociaux
desquels nous provenons. La seconde est de l’ordre de la recherche Le site web http://falsearms.com
consciente et s’applique donc à un cadre donné par la commande, le projet. propose un panel d’images relatives
Le créatif tentera donc d’orienter sa recherche. Nous nous enrichissons grâce à des couleurs de référence.
à cela ce qui nous permet de générer des idées plus facilement.
La sélection de ces images se
L’idée sous-jacente est que plus nous enrichissons cette banque de veut arbitraire. L’idée que défend
références plus il sera facile de faire germer des idées. L ’inconvénient étant Ben Critton est que ces systèmes
qu’il est difficile de se servir de cette masse d’informations de la façon la plus d’organisation arbitraires sont des
optimale qui soit. Cette matière est dure à manipuler si l’on n’essaye pas de systèmes d’organisation quand
la canaliser. C’est peut être la raison pour laquelle tant de gens ressentent le même.
besoin de collectionner des « trucs ».
En observant les personnes que j’ai pu rencontrer en stage ou dans mon
entourage j’ai pu voir qu’il existait de nombreuses manières de collecter. J’ai
aussi pu observer qu’il n’existait pas vraiment de recette miracle à l’élabo-
ration d’une idée. La plupart des gens ressentent ce besoin de collecter des
choses sans toutefois s’interroger sur l’utilité de cet acte. Comment mettre à
profit cette matière ?
Il y a toutes sortes de collections : des petites des grandes, des originales,
des insolites, des banales.
Mais chacune a un sens particulier pour celui qui la crée. La curiosité, la
quête, l’amour de l’objet détaché de sa fonction sont des points communs
aux collectionneurs. « Collecter - Collectionner » évoquent à la fois le geste,
l’accumulation, la collecte d’éléments - mais aussi la dimension secrète
ou au contraire publique d’une collection - la manière dont on montre, on
expose, et également les thématiques que peuvent traverser ces deux verbes
collecter et collectionner : l’inventaire, la série, la trace, la mémoire.
«Le Tennis c’est 90% de collecte
d’informations et 10% de créativité»
Joe Chang, tennisman
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22. Détourner - s’approprier
Le point de vue - la perception
On peut voir dans le principe de Lavoisier l’apparition d’un élément nouveau. L ’acte de parvenir
à décomposer l’eau en deux composants même s’il ne crée rien de nouveau est une innovation.
L’innovation est le résultat de l’action d’innover. C’est un changement dans le processus de
Le studio de design graphique Experimental JetSet
pensée visant à exécuter une action nouvelle. Elle se distingue d’une invention ou d’une
pour la refonte de l’identité visuelle de la Réunion des
découverte dans la mesure où elle s’inscrit dans une perspective applicative. C’est à dire que
Musées Nationaux (RMN), emprunte directement au
l’innovation s’établit dans la construction de la pensée nouvelle mais que le résultat concret ne
travail d’Adrian Frutiger. Le nouveau logotype de la
sera pas une découverte. Ce n‘est donc pas une découverte mais plutôt une redécouverte.
Réunion des musées nationaux conserve le sceau «m»
dans un cercle, créé par Adrian Frutiger en 1969, dans
On peut aussi dire qu’il y a de la « créativité » qui réside dans les modifications et les change-
toute son intégrité. Il s’adapte l’acronyme d’usage, RMN.
ments que nous opérons. Le problème se situe donc dans les choix et les tranches que le
Le nouveau logotype et sa charte graphique, qui consti-
designer graphique va effectuer pour modifier cette matière à sa convenance ou plutôt à ce qu’il
tuent la nouvelle identité visuelle de la RMN, obéissent
veut ou doit montrer. L’idée que rien ne naît ni ne périt n’est pas en contradiction avec celle de la
à certains principes d’utilisation. Ces principes simples
créativité.
garantissent la tenue et la durabilité de cette nouvelle
01. identité.
Elle tend juste à démontrer que le répertoire auquel nous faisons appel quotidiennement existe
depuis toujours dans ce que l’on peut observer dans la nature. Cela ne nous empêche pas
« Il s’agit d’un geste graphique. La solution est
d’innover et d’étendre ce répertoire.
endogène, les deux lettres manquantes émergent
du «m» existant. Celui-ci conserve toute son
Ci-dessous, le designer, Arnaud Finix se constitue une grammaire structurelle à base de matières,
intégrité. Coupé en sa moitié selon un angle de
d’objets et d’espaces pour ensuite créer ses objets.
66 degrés, le «m» révèle un «r» à gauche et «n»
à droite. Cette résolution intérieure, sans ajout
exogène, décrit deux cercles coupés qui encadrent
le cercle plein «m», donnant de l’élan à l’ancien
sceau. De relativement statique, celui-ci devient
plus dynamique, dans un mouvement intérieur/
02.
extérieur et extérieur/intérieur animant les trois
éléments géométriques qui composent désormais
le logotype. »
Expérimental JetSet
Arnaud Finix,Lampe IKHYO,
Lampe au sol modulable,
la luminosité varie selon
la forme qu’on lui donne.
66°
03.
42
43
Ci-dessus, les différentes
Arnaud Finix, étapes de la conception
répértoire - boite à outils du nouveau logo.
23. Le ready made LE Situationnisme DE guy Debord
C’est en quelque sorte ce que montre les ready made dans le monde de Le cinéaste et essayiste Guy Debord, au travers du mouvement situationniste n’a qu’un objectif :
l’Art. Le ready made est un terme inventé par Marcel Duchamp en 1916 et créer des situations c’est à dire des expériences. La vérité artistique se définit chez les situa-
qui consiste à percevoir d’une manière nouvelle un objet qui nous semblait tionnistes que par le jamais vu ou toute chose qui permet de questionner l’existant. Il a donc
d’emblée une donnée toute faite. Marcel Duchamp nous dit avec son urinoir un profond dédain de l’Art existant et plus généralement pour toute culture « aliénée », c’est à
que ce n’est pas un urinoir, c’est une oeuvre d’art. Il y parvient par le simple dire coupée de l’expérience directe. Il ne déteste pas l’Image comme en atteste sa profession
acte de signer et de mettre son urinoir dans un contexte qui en plus de ne première de cinéaste. Il puise ses réflexions dans la « décomposition » de cette culture du
pas être son contexte naturel est celui d’une institution artistique. Par cette spectacle. Il imagine ensuite des techniques pour « détourner » ces fragments. C’est finalement
simple action il modifie notre regard sur un objet industriel produit en série, cette culture aliénée qui lui sert de matériau principal pour créer ses films ainsi
Marcel Duchamp, Fontaine, a priori dépourvu de qualités plastiques ou conceptuelles. que ses théories.
1917
Les principes de récupérations ont été largement théorisés au court de l’histoire humaine et
En modifiant la perception de cet objet en le déplaçant, il modifie donc du particulièrement au XXe siècle par nombre de personnes ou courants de pensée.
même coup l’objet lui même. L ’objet ne se définit donc plus par sa fonction
usuelle mais par la perception que nous en avons. Duchamp enfonce le clou
en nommant son urinoir « fontaine ». « Le 28 février 1969, de Gaulle reçoit
Nixon. Je vois alors sur le mur d’un
Par ce biais, la présentation matérielle devient accessoire quand l’essentiel couloir de métro : les trois flèches
est dans la représentation mentale. L ’urinoir devenu fontaine doit déclencher de l’ancien parti socialiste, la croix
le jeu des représentations symboliques associées spontanément à ces de Lorraine gaullienne, la croix
formes. L ’urinoir est une fontaine alimentée par l’homme, etc. On voit bien gammée nazie, la croix celtique
au travers de cet exemple que Duchamp ne « crée » pas au sens ou l’on peut inscrite dans le O des mouvements
l’entendre. Il réduit d’une part la fonction usuelle de l’objet et étend d’autre « jeune nation », « ordre nouveau »,
part la perception que nous en avons. Pour Albert Einstein « tout est relatif » « occident », etc. Puis à nouveau
et on pourrait ainsi dire tout est subjectif car assujettit à notre point de vue les trois flèches dynamiques et
personnel. barreuses de Tchakhotine indiquant
sans autre commentaire le nom
Dans la pensée post-moderne et plus précisément en littérature, la théori- du président américain. L’impact
cienne littéraire Linda Hutcheton pose un principe qui va lui aussi dans ce des idéogrammes politiques ainsi
sens : l’intertextualité. Cette notion se fonde sur l’idée que l’on ne peut pas assemblés primait sur tous les autres
envisager un texte sans penser à ceux qui ont déjà été écrits. En somme, on slogans anti-yankees de l’heure. »
crée toujours en référence à une création antérieure.
Jacques Villéglé
44
45
Par exemple l’artiste Jacques Villéglé récupère la symbolique L’Alphabet de la guérilla, octobre 1983
socio-politique pour concevoir un alphabet qui serait comme une Fonds national d’art contemporain,
sorte de condensé de la civilisation. A partir de ce moment-là il Ministère de la culture et de la communication, Paris
se pose en « releveur de traces de civilisation » pour reprendre En dépôt au Musée des Beaux-arts, Nantes
l’expression du philosophe Walter Benjamin.
24. l’homme
qui joue :
l’Homo
Ludens.
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Quelques reslutats d’une recherche à partir du terme « faire » sur
Google images.
25. DANS CETTE ULTIME PARTIE DE MA RÉFLEXION, JE SOUHAITERAIS REPRÉSENTER CERTAINS Le site FontStruct.com, propose de créer ses propres familles de caractères
DES CONCEPTS ÉVOQUÉS PRÉCÉDEMMENT PAR LE BIAIS D’UN CAS PRATIQUE. DANS UN en ligne. Pour cela on dispose d’une interface de création simplifiée et d’une
PREMIER TEMPS, JE JOUERAIS AVEC CES PRINCIPES POUR CONCEVOIR UN ALPHABET. SA large séléction de modules graphique que l’on appelera plus après des
SEULE VOCATION EST D’ÊTRE UN PRÉTEXTE DIDACTIQUE ET N’A DONC PAS DE PRÉTENTION graphèmes, ainsi que d’outils et d’une grille de composition. Ce sont les
ESTHÉTIQUE OU DE CONSIDÉRATION PARTICULIÈRE POUR LA LISIBILITÉ. DANS UN SECOND règles du jeu. Voici une approche ludique et interactive de la typographie.
TEMPS J’INTRODUIRAIS UNE EXPÉRIMENTATION PERSONNELLE EFFECTUÉE DANS LA CONTI-
NUITÉ DU MÉMOIRE. L’IDÉE DIRECTRICE DE CETTE EXPÉRIMENTATION ÉTANT DE PROPOSER
LA MATRICE D’UNE BOÎTE À OUTILS DESTINÉE AUX DESIGNERS GRAPHIQUES.
Déconstruire
Comment alors concevoir sa propre écriture ? Ici il me paraît pertinent de comprendre comment
se structure la conception d’un alphabet pour parler d’écriture. Chacun possède ses « petites
recettes » et il m’intéresse d’en développer une qui me corresponde.
Comme lorsque l’on appréhende un projet, il faut commencer avant toute chose par identifier le
problème, le manque à combler. On commence certainement par isoler un ou plusieurs signes
graphiques. Ensuite les étudier, les décrire par rapport à leur taille, leur orientation, leur rythme
et leur trajectoire. Dans l’interview filmée, l’abécédaire, Gilles Deleuze nous parle de territoires en
évoquant le cas de la tique. Ce qu’il trouve fascinant c’est que « les animaux ont des mondes ».
Leurs mondes se distinguent les uns des autres par la restriction des choses qu’ils perçoivent.
Il explique que le territoire de cet insecte est défini par la sélection et l’extrait d’élément dans
l’immense diversité de la nature. La tique, par exemple, répond à trois excitants : La lumière,
l’odeur et le toucher. Pour lui c’est donc ça « qui fait un monde ».
De la même manière nous pouvons constituer notre territoire à partir d’éléments fondamentaux
voir irréductibles. Des modules en somme.
J’essaierais ici à partir du cas du dessin de caractère de montrer comment concrètement on peut
déconstruire à l’extrême pour ensuite étendre les principes basiques à l’élaboration complète
d’un alphabet. N’étant ni typographe, ni dessinateur de caractère je resterais volontairement
cantonné à des mécanismes de conception sans me soucier des problèmes hyper-techniques que
peuvent soulever le dessin et le développement d’une typographie.
Si l’on prend l’exemple de la typographie ou dessin de caractère, nous n’agissons finalement
jamais sur les composantes essentielles d’une typo. En effet un « a » devra toujours être perçu
comme un « a ». Une famille de caractères devra toujours être constituée d’au moins 26 signes
qui constituent notre alphabet Français. C’est un paradigme culturel dont nous ne pouvons nous
soustraire. Les familles typographiques sont autant de façons de figurer notre alphabet. Il est
possible et même nécessaire de récupérer ces contraintes données et réelles pour les trans-
former et en faire quelque chose de nouveau.
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26. La grammatisation Les codes
La grammatisation est un processus de description, Avant toute chose il faut comprendre la notion de « code ». Toute commu-
de formalisation et de discrétisation des comportements nication n’est possible que s’il existe un code commun à l’émetteur et au
humains (la voix et les gestes) qui permet leur reproduc- récepteur et réciproquement.
tibilité. Grammatiser, c’est isoler des grammes et des
graphes (éléments constitutifs en nombres finis formant En sémiologie on dit que le code est l’outil qui permet de transcrire en
un système). une entité cohérente (le message) un certain nombre de signes qui corres-
pondent chacun à une partie du réel, à un référent spécifique. Rédiger un
Grammatiser c’est donc discrétiser un signal et de ce fait message, alphabétique ou iconique, consiste donc à donner une structure
pouvoir le reproduire. Par exemple, je peux discrétiser la langagière à une série de signes. Fabriquer une image fonctionnelle consiste
langue avec une trentaine de signes graphique : effectivement à construire celle-ci conformément à un répertoire connu et
les lettres de l’alphabet. L’alphabet permet de retranscrire selon des règles d’enchaînement normales.
n’importe quelle langue du monde dont il accomplit la
discrétisation littérale. C’est cette connaissance du code qui permet de faire surgir la signification.
Les caractères de l’alphabet romain sont notre code pour transcrire le
Le concept de grammatisation permet de définir des langage parlé phonétique en langage écrit.
époques et des techniques qui apparaissent et qui ne
disparaissent jamais (en aucun cas l’informatique ne fait
disparaître la lecture et l’écriture, c’est au contraire
une archi-lecture qui change les conditions de la lecture
et de l’écriture).
Les iconèmes et
les graphèmes
Si l’on réduit une famille de caractères à sa forme la plus brute alors tout
notre outillage graphique est réduit à deux signes, le cercle et le carré. Cet
outillage est un code, c’est à dire un répertoire fini de signes (un dictionnaire)
que l’on peut soumettre ensuite à des règles de combinatoire (une syntaxe).
Avant de procéder aux choix qui vont construire notre typographie nous
allons donc à la rencontre de ces signes irréductibles. En linguistique on
nomme ces signes des iconèmes. Ces iconèmes sont eux mêmes composés
de ce que l’on appelle des graphèmes (lignes et courbes). On pourrait d’ail-
leurs aussi bien se contenter d’un seul de ces deux iconèmes pour composer
une fonte.
Une fonte composée d’un seul iconème est une donc soumise aux règles
d’un seul module.
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27. Iconèmes Héréditaires
À partir de ces premiers éléments graphiques minimaux (rond, carré) nous pouvons dorénavant
redéfinir nos iconèmes de manière plus précise. On interprète alors nos iconèmes pour les
modifier à notre convenance. Ces nouveaux iconèmes conservent des propriétés héréditaire avec
les iconèmes « basiques ».
Par exemple, dans le cadre de cette typographie on devra rajouter un 3e iconème qui n’est
qu’une déclinaison du carré. On modifie l’inclinaison de l’iconème «carré» on crée un nouvel
iconème « losange ». Même s’il est composé des mêmes graphèmes il sera perçu comme un
nouvel iconème par le cerveau humain. Il est ici question d’étendre notre répertoire pour pouvoir
ensuite procéder à des combinaisons qui définiront notre syntaxe.
C’est l’un des premiers choix que nous faisons lors de l’élaboration d’une typographie. Ces
signes de base vont servir à définir la grille typographique, les modules qui composeront les
caractères et tout ce qui servira à l’élaboration de notre famille de caractère. Le choix de ces
nouveaux iconèmes s’effectue ici de façon arbitraire pour ne pas rajouter de signification supplé-
mentaire à l’exemple qui se veut minimal. Mais c’est à cet instant de la conception que l’on
devrait imposer notre concept, l’idée et finalement le partis pris qui déterminera le dessin des
caractères.
Comme l’animal qui définit son monde au travers d’une sélection restreinte de ce qu’il perçoit
dans l’immense diversité de la nature, le designer devra ici sélectionner les concepts ou les
signes pertinents. Tout est envisageable tant que la cohérence avec le projet ou la commande est
au rendez-vous.
Pour illustrer cette idée de déconstruction - extention nous prendrons
l’exemple du Tangram. Le Trangram est un jeu chinois qui consiste à créer
des fIgures à partir de la dissection d’un carré en sept pièces élémentaires.
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28. Élaboration
de la grille
Bien que soumis à un système de C’est en tout cas avec ces règles que
combinaisons, comme on l’a vu nous pouvons dessiner et déterminer
auparavant, nous pouvons à loisir les attributs de la grille qui nous
jouer avec l’échelle, la graisse et aidera ensuite à concevoir notre
l’angle d’inclinaison des différents dessin. La grille, ci-dessus, montre
graphèmes. Tout est question de se qu’à partir des graphèmes établis
fixer des règles d’utilisation. Ces arbitrairement depuis l’iconème
règles peuvent être déterminées «carré» je peux définir deux pentes
soit pour des raisons esthétiques, différentes pour l’élaboration de mes
soit par souci de lisibilité, soit pour caractères.
enrichir le dessin.
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29. Si on décompose le code de
l’alphabet romain en formes
graphiques minimales, il pourrait
alors être représenté ainsi (voir
schéma ci-dessous). On constate
alors que chaque caractère est
soumis à des règles combina-
toires. Ces combinaisons de
graphèmes donnent lieu à l’appa-
rition de nouveaux graphèmes plus
complexes que sont les caractères
typographiques.
Karl Nawrot & Walter Warton, Studio Voidwreck, Templates &
Le thème de la réduction et de l’épure ayant déjà été exercices, (2008)
traité avec brio par quantité de designers, j’orienterais
mon exemple du côté de l’extension.
Si l’on observe le tableau ci-dessus, on s’aperçoit que Nous avons vu précedemment les façon de structurer
l’alphabet majuscule latin se compose de 11 éléments la démarche de l’élaboration d’une police de caractères
graphiques minimaux, c’est à dire que l’ont ne peut dans sa dimension la plus formelle. Ci-dessus, Karl
pas réduire et qui suffisent à l’élaboration de tout les Nawrot et Walker Warton du studio Voidwreck adopte
signes de notre alphabet. Ici 8 de ceux-ci sont droits et le même procédé mais d’une façon plus expérimentale
3 courbes. Ces éléments graphiques minimaux repré- pour concevoir des signes qui leur appartiennent.
sentent les syllabes qui nous permettront de construire
nos mots. Ils serviront de matériaux pour concevoir
notre vocabulaire.
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30. Introduction à l’expérimentation
personnelle
Si il est un objet que nous avons tous en commun en tant que designer graphique c’est bien le
carnet de note ou de croquis. C’est d’une part un catalogue, un répértoire qui nous sert à garder
une trace des idées, pensées, références, adresse internet, etc., que l’ont peut rencontrer quoti-
diennement. C’est aussi un outil de création graphique et plastique à part entière. C’est dans ces
pages que l’on jette sans compromis les germes de représentations graphique, que l’on mélange
des symboles, que l’ont commence à faire notre « cuisine ».
Pour moi c’est un élément essentiel et un fondamental de ma pratique. C’est ma structure - struc-
turée - structurante primaire. J’en possède d’ailleurs des dizaines et chacun ont leur spécificité :
Certains ont un quadrillage qui me sert beaucoup pour composer a peu près à l’echelle ou pour
contenir mon trait. D’autres sont des térritoires vierges où je peux tracer sans contraintes. Les
formats font partis de ces caratéristiques qui, forcément, ont une incidence sur mon trait ou la
façon dont je vais structurer mon croquis. Lorsque j’entamme un projet j’aime me replonger
dans ces carnets pour aider un peu à trouver un point de départ. Le carnet de note est donc aussi
pour moi un formidable outils d’archives personelles.
Mais le problème trivial et très concret est que plus j’accumule et collectionne ces objets, plus il
m’est difficile de m’y retrouver. C’est pourquoi j’ai eu l’envie de concevoir un objet qui m’appar-
tienne vraiment et qui m’offre l’éventail de possible que j’ai ennoncé plus haut. Cet objet pourra
à la fois contenir des grilles qui se distinguent en fonction des besoins, des pages de croquis
purs, ou des moments d’écriture et de prise de note. J’ai essayé de voir lors de mes recherches
sur ce projet, si il était appropriable par d’autres que moi. Les grilles que je proposais dans la
maquette, particulièrement, étaient investies et réappropriées de manières différentes selon les
personnes. Certaines y ont vu un intérêt pour la conception d’une typographie, d’autres un livre
de coloriages ou d’illustrations, d’autres encore y ont seulement pris des notes.
Je souhaitais donc concevoir graphiquement ma structure, mon outil d’élaboration d’une idée
ou plutôt une partie de celle-ci. Je voulais un objet simple, qui ne me coute presque rien, que je
puisse imprimer facilement et en plusieurs format homotétiques et qui reste en devenir et exten-
sible à l’avenir.
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