Synthèse Solucom - Energéticiens et monde digital : une relation en mode combat?
1. UNE RELATION
EN MODE COMBAT ?
ENERGÉTICIENS ET MONDE DIGITAL
LES SYNTHÈSES - N°51
2. À propos de Solucom
Solucom est un cabinet indépendant de conseil en management et système d’information.
Ses clients sont dans le top 200 des grandes entreprises et administrations.
Pour eux, le cabinet est capable de mobiliser et de conjuguer les compétences de plus
de 1300 collaborateurs. Sa mission ? Porter l’innovation au cœur des métiers, cibler et piloter
les transformations créatrices de valeur, faire du système d’information un véritable actif
au service de la stratégie de l’entreprise. Solucom est coté sur Euronext Paris et a obtenu
la qualification entreprise innovante décernée par BPI.
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3. REMERCIEMENTS
1
Nous remercions l’ensemble
des start-ups et énergéticiens grâce
à qui nous avons eu des échanges de
grande qualité lors de notre Atelier.
Nous sommes notamment très
reconnaissants des prises de parole
que certains d’entre eux nous ont livré
dans cette Synthèse.
Cette Synthèse a été rédigée en
collaboration avec Alexandra Le
Borgne (consultante), Raphaël Brun
(consultant senior, Risk management)
et Benoît Paroissin (consultant senior,
Architecture des SI).
4. 2
Les grands groupes énergétiques se
livrent à une concurrence entre égaux,
à coup d’investissements massifs,
de lobbyings intenses, de fusions-
acquisitions, de programmes
de performance opérationnelle.
Leurs façons de faire bien connues
s’inscrivent dans un environnement
globalement mature en Europe.
La transformation numérique
va changer la donne. On le sait,
les objets connectés vont se déployer
dans les réseaux, les compteurs, ainsi
que les logements et les voitures,
les bâtiments et les usines, les villes
et les territoires. On parle ainsi
d’internet of things, d’internet of me
ou de quantified self, de plant 3 ou 4.0
et de connected cities. Les clients
utilisent donc l’énergie au sein de
systèmes de plus en plus connectés,
qui vont donc produire de plus en plus
de données. Ces objets connectés et
les données en très grand nombre,
plus variées, plus immédiates, plus
exactes et plus génératrices de valeur*
vont faire évoluer en profondeur les
usages et faire apparaître de nouveaux
acteurs, transformer les chaînes
de valeur et requestionner les business
models.
La révolution numérique sera aussi
et avant tout une transformation
du monde économique.
Dans la sphère privée, nous le vivons
tous, le numérique est le compagnon
quotidien de chacun d’entre nous.
Il transforme les comportements des
consommateurs, des collaborateurs.
Dans les entreprises, le numérique
impose de nouvelles règles : dans
la gestion des assets et des opérations,
en offrant de nouvelles sources de
productivité ; dans les modes de
travail, en distribuant massivement
la connaissance, en augmentant
l’exigence sur l’environnement de
travail, en bouleversant les rapports au
travail et les modèles de management ;
dans la façon d’innover, en changeant
les règles : une innovation plus rapide,
XAVIER METZ
Directeur associé
*data volume + data variety + data velocity + data veracity = data value.
5. 3
plus ouverte, plus collaborative, plus
expérimentale.
Les acteurs du digital ont un objectif
clair et bien connu : capter la marge
des entreprises en place sur les grands
secteurs historiques rentables.
On connaît les exemples de l’hôtellerie,
de la distribution, du tourisme…
Ils y parviennent en cassant les
codes établis, avec une culture et des
comportements totalement différents.
Le défi est donc double
pour les grands énergéticiens.
Un défi stratégique :
• comment valoriser les données ?
•Comment régénérer les propositions
de valeur ?
• Comment améliorer les modèles
d’affaires et en inventer de
nouveaux ?
Un défi d’adaptation :
• comment adopter ces nouvelles
règles du jeu, faites d’audace et
d’agilité, d’obsession de l’action,
de design thinking et de test learn,
d’open innovation et de coworking
avec l’écosystème et les clients ?
• Comment repousser les limites grâce
aux technologies et à de nouvelles
compétences ?
• Comment coopérer avec les start-ups
et le monde digital ?
Nos retours d’expérience dans
l’énergie et dans d’autres secteurs,
nos échanges avec nos clients et les
acteurs du digital, GAFAM (Google,
Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) et
start-ups, notamment lors des Ateliers
Solucom, nous permettent de vous
proposer dans cette Synthèse quelques
pistes et convictions.
ÉDITO
6. AUTEURS
DAMIEN MERMET
Diplômé de l’AgroParisTech, et fort de près de
30 ans d’expérience, Damien est directeur associé
du cabinet Solucom. Il accompagne notamment les
comptes du secteur de l’énergie dans la conception
et la conduite de leurs grands projets de transforma-
tion en management et organisation. Il a acquis une
grande expérience de la mobilisation de l’intelligence
collective pour réussir ces transformations
GHISLAIN DE PIERREFEU
Diplômé de l’École Centrale Paris, et doté de 13 ans
d’expérience, Ghislain est aujourd’hui senior manager
au sein de la practice Business transformation
Energie, Transport, Telcos. Il accompagne les
transformations du secteur de l’énergie tant sur les
dimensions stratégiques métiers que sur les décli-
naisons innovantes et technologiques afférentes.
XAVIER METZ
Diplômé de l’EM Lyon et doté de 25 ans d’expérience,
Xavier est directeur associé du cabinet Solucom.
Il accompagne nos clients grands comptes dans
la définition et le pilotage de leurs stratégies
d’entreprise et les conseille dans leurs projets de
transformation, en particulier dans le domaine de la
relation client.
4
7. 5
SOMMAIRE
Les énergéticiens ne peuvent plus ignorer
la question de la donnée
Un secteur Énergie à la traîne :
comment y remédier ?
La nécessaire conversion des énergéticiens
à de nouvelles logiques économiques…
Des postures radicalement nouvelles
pour réussir
Repousser les limites grâce aux technologies
et aux nouvelles compétences
La transformation ne se fera
que dans une logique collaborative
7 clés pour s’engager et réussir à valoriser
les données dans l’énergie
06
17
24
34
41
50
53
9. 7
Données de circulation urbaine,
enregistrements médicaux, compteurs
électriques communicants, historiques
des navigations sur internet…
La numérisation de l’information
engendre dans tous les secteurs
d’activité une production jusqu’alors
inégalée de données. Toutes ces
informations représentent pour les
entreprises l’opportunité d’affiner leurs
modèles prédictifs, de mieux répondre
aux attentes et besoins de leurs clients
et d’améliorer leur efficacité interne.
Cela implique de décrypter et
d’analyser en quasi temps réel
ces données de nature variée
(déstructurées, dans un langage
naturel, de diverses sources et formats
et dont la véracité ne peut être certifiée)
et issues de différentes interactions
(géo-localisation, internet des objets,
échanges interpersonnels…).
Aujourd’hui la maturité des
technologies d’analyse permet de
traiter le volume, la variété, la vélocité
et la véracité de ces données*
d’un
genre nouveau : c’est la valorisation de
la donnée.
Les entreprises du web, de la grande
distribution et du transport se
distinguent par leur maturité.
Grâce à l’agrégation de leurs données
internes à des données sectorielles et
extra-sectorielles et à l’analyse qui en
est faite, elles améliorent l’expérience
client et optimisent leurs processus
internes.
*On parle des 4 V du Big data. Pour en savoir plus, cf. chapitre p. 41
10. 8
Initiative de valorisation
incluant également
des données sectorielles
Accès commun aux BDD
au sein de l’entreprise
pour éviter de siloter
les données / les SI
Initiative de valorisation
à partir de données
de l’entreprise
Services
postaux
Énergie
Traitement
automatisé
des enveloppes
et « C-Suivi »
• Détection proactive
d’incidents
• Prévision temps
réel de production
Niveau 0 Niveau 1 Niveau 2
Source : Observatoire Solucom
11. 9
Initiative de valorisation
incluant également
des données hors-secteur
Données spontanément
transmises par les
utilisateurs (ex : sur
les réseaux sociaux)
Transport
Retail
Web
Assurance
Estimation
anticipée
des coûts
d’indemnité sur
la base des profils
(+200%)
• Information
voyageur
• Affluence
dans les trains
• Maintenance
préventive
• Offres ciblées
multicanal
• BI multi-domaine
temps réel
• Tendances conso
multi-sources • Pub ciblées
temps réel
• Suivi de tendances /
pandémies
• Big data
« As A Service »
Maîtrise
de la donnée
Niveau 3 Niveau 4
12. 10
En comparaison de ces secteurs,
les initiatives dans l’énergie
sont encore peu développées.
Quatre incertitudes majeures freinent
aujourd’hui les grands groupes :
l’évolution de la régulation du secteur,
la compétitivité des tarifs régulés,
le calendrier de déploiement
des compteurs communicants et
le cadrage juridique des enjeux de
confidentialité et de sécurité.
Les initiatives se limitent pour le
moment à une valorisation partielle
des données internes à l’entreprise,
parfois agrégées à des données
externes comme la météo.
Chaque maillon de la chaîne de valeur
énergétique est pourtant concerné.
Valoriser les données permettra
de créer de la valeur pour les acteurs
de l’énergie, de renforcer leurs
espaces de légitimité, de défendre
et de développer leur position dans
l’écosystème.
Dans le secteur de l’énergie,
la valorisation de la donnée
est une opportunité pour améliorer
les processus internes et
la performance opérationnelle.
Cela devrait permettre aux
énergéticiens d’optimiser leurs
investissements en amont.
La digitalisation offre également aux
actifs décentralisés (effacement et
production) l’opportunité d’exploiter
pleinement leur potentiel,
comme le font les actifs centralisés.
Enfin, les producteurs, les
transporteurs et les distributeurs
pourraient anticiper les incidents et les
traiter plus rapidement et à moindre
coût. Le succès des services d’analyse
des données réseau de la start-up
étasunienne C3 Energy confirme cette
opportunité. Ses solutions ont permis
aux gros distributeurs américains
de réaliser 12 milliards de dollars
d’économie depuis 2009 grâce à une
meilleure gestion des incidents et au
maintien de l’équilibre production /
consommation.
Les acteurs de l’énergie peuvent
également s’inspirer des secteurs
du web, de la grande distribution, du
transport et de l’assurance :
ils utilisent la valorisation de la donnée
pour enrichir et personnaliser la
relation client, acquérir de nouveaux
clients en ligne, développer des offres
plus en adéquation avec leurs besoins
spécifiques et détecter les risques
de résiliation (churn). Des initiatives
existent déjà : par exemple, Nest
propose un thermostat intelligent
qui auto-apprend les préférences
de l’utilisateur (confort, rythme de vie)
et s’adapte à l’environnement extérieur
(conditions météo). Le business model
de la start-up californienne repose sur
le volume de données gigantesque
13. 11
• Croissance du nombre d’objets connectés
dans les centrales de production (SCADA+…)
• Équilibrage de plus en plus difficile à prévoir,
dû en majeure partie à la production diffuse
• Explosion de la quantité de données générées
par les compteurs intelligents et autres box énergie...
• Complexité croissante des mécanismes marchés
et des équilibrages sur les réseaux
• Enjeu autour de l’amélioration
de la connaissance client
• Attitude défensive vis-à-vis de l’utilisation
de leurs données (protection de la donnée, CNIL…)
• Quelques intérêts émergents autour
des objets connectés dans la maison
OPTIMISATION TRADING
TRANSPORT DISTRIBUTION
FOURNISSEURS
CONSOMMATEURS
PRODUCTION
IMMERSION / INTERMÉDIATION /
CONTRIBUTION DES ACTEURS « DIGITAUX »
DANS LA CHAÎNE DE L’ÉNERGIE
IMPACTS DU DIGITAL
SUR LA CHAÎNE DE VALEUR DE L’ÉNERGIE
14. 12
dont elle devient dépositaire : cela lui
permet de proposer aux utilisateurs
des services complémentaires en
partenariat avec les énergéticiens.
Elle travaille notamment avec certains
fournisseurs pour faciliter les actions
d’effacement pendant les pics de
demande. Ce système combine donc
connaissance client et amélioration
des processus internes.
L’utilisation des données hors-
secteur et l’analyse des informations
diffusées par les utilisateurs eux-
mêmes sur les réseaux sociaux par
exemple, sont deux leviers ambitieux
de développement à activer pour tirer
parti à 100% des possibilités apportées
par le Big data* (digitalisation et
massification des données). C’est le
pari qu’a fait ERDF pour développer
son outil cartographique PRECARITER.
Ce service statistique à destination des
collectivités territoriales recoupe un
éventail de données publiques portant
sur le parc résidentiel français,
sur la mobilité, les ménages,
leurs revenus et certaines données
collectées par ERDF. Plus largement,
la valorisation des données issues des
compteurs intelligents est l’opportunité
pour les distributeurs de structurer
proactivement un secteur public
de la donnée.
Au regard des nombreux exemples
observés dans d’autres secteurs,
les opportunités de valorisation
de la donnée dans l’énergie sont
importantes.
Start-ups digitales, pure players,
énergéticiens, entités agiles au sein
de grands groupes… l’écosystème de la
valorisation de la donnée dans l’énergie
est composé d’acteurs aux profils et
aux enjeux différents. Découvrons
la vision de deux acteurs du marché :
un énergéticien et une start-up.
* Pour en savoir plus sur le Big data, consultez notre dossier sur www.solucominsight.fr
15. 13
Pour ERDF,
comment les
enjeux sur la
valorisation
des données
sont-ils apparus ?
Le 1er
déclencheur a été la transition
énergétique et le développement des
énergies renouvelables décentralisées
et intermittentes. Ces sources de
production créent des aléas au niveau
des flux. Notre travail est de permettre
au marché de fonctionner en assurant
à tous les acteurs la sécurité du réseau
et l’acheminement de l’électricité.
Aujourd’hui, le réseau doit gérer à
tout instant l’équilibre production /
consommation sur une maille locale,
avec des variations aléatoires très
importantes.
L’explosion du volume des données de
comptage avec Linky nous interroge
sur la façon de les valoriser pour
répondre aux besoins de chaque
acteur : fournisseurs, opérateurs
d’effacement, collectivités locales,
consommateurs finaux. Ils sont
tous demandeurs de données
correspondant à leur rôle (gestion de
flux, aménagement du territoire…).
Les compteurs communicants vont
nous apporter des données de bout
en bout dont nous n’avons pas encore
mesuré tout le potentiel.
Par ailleurs, les marchés s’organisent
pour développer des flexibilités.
Par exemple, le marché de
capacité a été créé pour répondre
à la problématique française de la
gestion de la pointe d’effacement.
La valorisation de la donnée est un
levier pour répondre aux nouveaux
fonctionnements du marché.
Quel est le cadre réglementaire
de diffusion des données collectées
par ERDF ?
Les données mises à disposition sont
réglementées suite à des travaux
de concertation, sous l’égide de la
CRE (Commission de régulation
de l’énergie). Pour les données
transmises au client final, le régulateur
a demandé des éléments précis :
donner accès au particulier à ses
données, enregistrer la courbe de
charge au pas de 30 minutes…
Aujourd’hui, nous mettons déjà à
disposition des collectivités le bilan
annuel des consommations. Linky
pourra donner envie d’avoir des
données sur des délais plus courts.
Point de vue de l’énergéticien :
TÉMOIGNAGE DE FRANÇOIS BLANC
16. 14
L’enjeu est de trouver un équilibre
entre la diffusion des données aux
acteurs et le respect de la vie privée.
Nous devons également faire attention
aux informations commercialement
sensibles.
La question du niveau de granularité et
de transparence des données pour les
analyses « territoriales », par exemple
dans la cadre de l’accompagnement
d’un éco-quartier, est un point délicat
qui n’est pas encore traité.
Comment ERDF s’adapte-t-il
à ce changement de culture
et de fonctionnement ?
Philippe Monloubou, président d’ERDF,
considère que l’évolution numérique
des métiers du distributeur est un axe
fort de transformation. Nous nous
impliquons beaucoup dans les travaux
autour des nouveaux marchés, comme
ceux de capacité et d’effacement.
Le réseau de distribution a un rôle
important à jouer, tout en assurant la
sécurité du réseau. Nous nous mettons
en position d’écoute vis-à-vis de
l’écosystème.
Le marché de l’électricité évolue
intensément : de nouveaux entrants le
pénètrent et le time-to-market diminue.
Le changement culturel est important :
nous devons désormais traiter avec des
acteurs qui n’ont pas la même culture
que celle du cercle des énergéticiens
historiques.
Nous devons également traiter de plus
en plus de données en temps réel et
les transmettre aux clients industriels.
À l’avenir, une agence de conduite
du réseau ERDF ressemblera à une
agence locale de dispatching RTE.
Ces évolutions impliquent-elles
des partenariats avec des spécialistes
du digital ?
C’est incontournable. Dans la mise
en œuvre de processus et d’offres
de services, nous allons travailler
en partenariat avec des acteurs du
digital et des nouvelles technologies.
Nous le faisons déjà en développant
nos systèmes d’information. Nous
réalisons aussi des simulations sur
des démonstrateurs via des
partenariats avec des start-ups,
des pôles technologiques, des
collectivités…
17. 15
Par analogie
avec les
transformations
d’autres
secteurs, quelles
perspectives
entrevoit-on sur le marché de
l’énergie ?
En 20 ans, le secteur du high tech a
subi de nombreuses transformations
digitales et numériques, qui ont semblé
surprendre les acteurs. Par exemple,
des offres gratuites et illimitées dans
les télécoms. Ces nouvelles offres
séduisent les consommateurs et
suppriment les intermédiaires.
Dans l’hôtellerie, les grands groupes
se plaignaient des agents de voyage
qui prenaient 25% de commission.
Ils ont accepté l’arrivée des acteurs
du digital comme Booking.com pour
augmenter leurs marges. Résultat : la
valeur est désormais préemptée par
trois marchands dans le monde qui
imposent leurs clauses aux hôteliers et
captent l’essentiel de leurs marges.
Cela vaut aussi pour l’industrie
musicale avec l’arrivée de Spotify ou
Deezer. L’énergie sera également
concernée. C’est le sens du rachat de
Nest par Google. Le géant du web est
un spécialiste de l’interposition digitale.
Ce rachat lui permettra de discuter
directement avec le consommateur,
pour lui vendre de l’électricité,
de l’effacement…
Le salut des acteurs de l’énergie
dépendra de leur capacité à proposer
des produits attractifs. Il y a une
demande sociétale pour cela, qui sera
de toute façon servie.
Quel est le positionnement
de Netatmo sur la valorisation
des données ?
Notre business model est celui
d’un équipementier. Les données sont
un moyen d’étendre notre distribution.
Nous en récoltons un volume très
important, que nous pourrions
valoriser en échange de nouveaux
canaux de distribution.
Plus largement, nous offrons des
solutions séduisantes, ergonomiques
et simples grâce à une solution de
Point de vue de la start-up :
TÉMOIGNAGE DE FRED POTTER
LE SALUT DES ACTEURS DE L’ÉNERGIE
DÉPENDRA DE LEUR CAPACITÉ À
PROPOSER DES PRODUITS ATTRACTIFS
18. 16
gestion des données dans le Cloud.
Notre offre est sans abonnement et
nous proposons des services gratuits
pour valoriser l’équipement, par
exemple des benchmarks pour évaluer
la performance énergétique.
Notre positionnement est résolument
B2C : nous souhaitons déclencher
l’adhésion du consommateur,
avec un bénéfice direct et visible.
Que pensez-vous des partenariats
entre start-ups et énergéticiens ?
Qu’attendez-vous d’eux ?
Faisons une analogie avec les
télécoms : dans les années 2000,
à chaque fois qu’Orange voulait ajouter
une fonctionnalité dans la Livebox,
l’ensemble de ses fournisseurs
devait l’intégrer dans leur système,
ce qui entraînait un délai de 18 mois.
À l’opposé, Free avait choisi une
approche radicalement différente :
la symbiose avec un seul fournisseur
qui a démontré son efficacité en termes
de time-to-market.
Netatmo veut proposer des
équipements communicants pour créer
le désir de piloter sa consommation
énergétique. Nous les vendrons par
tous les canaux possibles, notamment
en développant une marque vers
le consommateur lui-même, voire
pourquoi pas via les énergéticiens.
Nous n’avons pas les prétentions
d’arbitrer le marché de l’énergie.
Ce marché est fortement demandeur
de partenariats. Tous les canaux vont
se réveiller. Les clients vont demander
à leur installateur de chaudière gaz de
leur installer les thermostats gaz qu’ils
désirent. Cela représente 71% de taux
de pénétration pour nous.
Les énergéticiens seront un canal de
vente parmi d’autres.
Quels sont les perspectives pour le
marché de l’énergie, sur les volets
B2B et B2C ?
Sur le marché B2C des objets
connectés, nous pensons que
le pilotage des dépenses n’est pas le
principal levier. Pour le consommateur
final, c’est la problématique du
confort qui domine, notamment via
son pilotage. Toujours sur le B2C, la
valorisation des données vers d’autres
cibles par agrégation ne correspond
pas à notre positionnement actuel.
Je connais moins le marché B2B
car nous n’y sommes pas actifs.
De nombreuses sociétés sont déjà
positionnées sur les équipements
de mesure et de pilotage énergétique.
Il me semble que c’est une compétence
essentielle du métier de gestionnaire
d’énergie.
19. 17
UN SECTEUR ÉNERGIE À LA TRAÎNE :
COMMENT Y REMÉDIER ?
La valorisation des données suppose la mise en œuvre d’une
démarche nouvelle : diversité des compétences nécessaires,
incertitude du résultat, nécessité d’une approche innovante
résolument tournée vers le futur… Comment réussir une telle
démarche ?
20. 18
Il existe un certain nombre de freins
à la démarche de valorisation
des données. Ceux-ci concernent
en premier lieu le cadre externe
qui dispose de sa propre logique.
D’autre part, les processus,
référentiels, ainsi que la culture
des grands groupes sont souvent
peu adaptés.
Un cadre législatif
et normatif incertain
Quel que soit le secteur d’activité,
le droit de la donnée est un sujet
sensible, en particulier dans le cadre
de la CNIL. Il s’agit de savoir jusqu’à
quel niveau de détail on peut agréger
les données et ce que l’on est en droit
d’en faire.
Pour le secteur de l’énergie, il faut
aussi prendre en compte le cadre
régulatoire de la CRE* qui s’ajoute
à l’environnement réglementaire
général. Deux freins principaux
doivent être surmontés : un cadre
précis et contraignant de propriété
et de circulation des données entre
les acteurs, ainsi qu’un processus
d’instruction et de validation
de catalogues de prestations
peu adapté à une démarche
d’innovation foisonnante.
Pour les énergéticiens historiques,
le droit de la concurrence constitue
une limite forte : comment différencier
et diversifier son activité en gérant
le risque lié au concept « d’acteur
dominant » ?
Enfin, et en dehors de toute notion
réglementaire, le sujet est marqué
par l’incertitude sur les standards et
normes qui s’imposeront dans le futur.
Des processus et référentiels internes
peu adaptés
Les processus et la définition claire
des responsabilités font la force des
grands groupes. Ils peuvent s’appuyer
dessus pour garantir la fiabilité des
données. Un assouplissement est
toutefois nécessaire pour s’adapter
aux besoins d’agilité des initiatives de
valorisation de la donnée. Avec des
cycles de planification à pas annuel
et une certaine frilosité pour prendre
des initiatives quand le ROI reste
incertain, l’environnement traditionnel
des grandes entreprises n’offre pas
la réactivité nécessaire aux projets
innovants.
DES FREINS BIEN PRÉSENTS…
QU’IL EST POSSIBLE DE MAÎTRISER
* Pour en savoir plus : www.cre.fr
21. 19
La posture recommandée n’est
pourtant pas d’attendre qu’un ROI
positif soit garanti pour démarrer mais
de décider combien l’entreprise est
prête à perdre pour un projet ayant
de bonnes probabilités de succès.
Force est de constater que les start-
ups sont aujourd’hui beaucoup plus
aguerries que les grands groupes pour
mettre en œuvre ce principe, malgré
les moyens plus conséquents dont
disposent ces derniers.
Bien souvent, la répartition
de la propriété des données
en interne est également un frein
et ralentit leur assemblage et
leur recombinaison. Au contraire,
les initiatives de valorisation
de la donnée gagneraient à être
réalisées dans une approche
transversale et ouverte,
positionnant ces informations
comme un bien commun.
Des entreprises qui doivent
dépasser leurs carcans culturels
L’histoire et l’expérience des grands
groupes de l’énergie est parfois
un frein à la démarche de valorisation
de la donnée. Tout d’abord, il est
difficile de s’émanciper des business
models établis parce que cela implique
une prise de risque. D’autre part,
le cloisonnement interne peut freiner
les démarches et regards transverses.
En outre, la difficulté de mise en œuvre
des partenariats n’est pas négligeable.
Elle relève de la crainte d’une « fuite
de valeur » et d’une hégémonie
relationnelle qui se caractérise
par un rapport « donneur d’ordre /
prestataire » très différent du modèle
partenarial. Enfin, les groupes français
se contentent parfois de retours
d’expérience de projets nationaux sans
s’enrichir, en complément,
des retours d’expérience d’autres
zones géographiques.
22. 20
COMMENT LES START-UPS SONT-ELLES
AGILES ET INNOVANTES ?
« Le challenge des entreprises
pour assurer leur survie et leur
croissance : trouver de nouveaux
business models. Le lean start-up
est une source d’inspiration pour
les énergéticiens en quête d’effi-
cience. La philosophie est simple :
une entreprise doit tester la valeur
d’une innovation pour son futur uti-
lisateur avant d’y investir du temps
et de l’argent. Il s’agit d’éprouver
tous les aspects relatifs à sa vision
du business, à son marché et ses
clients... et adapter en temps réel
son business model en fonction des
retours clients.
Dans la continuité des méthodes
« agiles », cette démarche très uti-
lisée par les start-ups se concentre
avant tout sur ce qui marche et
tend à développer ensuite le reste.
Plutôt que de rédiger un business
plan compliqué, elles répartissent
leurs hypothèses dans un business
model « canvas » d’une seule page :
ce diagramme indique comment
l’entreprise crée de la valeur pour
elle-même et ses clients. Le succès
d’une telle démarche dépend de
la capacité à mobiliser correcte-
ment les outils et méthodes de
lean start-up, à gérer efficacement
le changement et à alimenter une
vraie culture entrepreneuriale
en interne. En d’autres termes :
construire vite, publier souvent,
mesurer, apprendre et répéter !
Ce pragmatisme est une source
d’inspiration pour les énergéti-
ciens qui tentent de rationaliser leur
fonctionnement tout en améliorant
leur performance. En encourageant
et en systématisant un environne-
ment entrepreneurial, elles peuvent
libérer la créativité et l’esprit d’inno-
vation de leurs équipes.
23. 21
Mettre en place une démarche de
valorisation des données peut être
facilité par quelques actions clés.
Mettre en évidence la nécessité
de la démarche
L’immobilisme entraîne des risques
importants à terme pour l’entreprise.
Ces menaces peuvent être soulignées
aux acteurs internes pour les
mobiliser. On peut citer par exemple le
risque d’interposition : si l’entreprise
ne valorise pas elle-même ses
données, d’autres le feront à sa place,
ce qui aura des conséquences sur son
business. Il peut aussi être pertinent de
pointer les initiatives et les nouveaux
acteurs qui agissent et peuvent
générer des impacts sur la position de
l’entreprise.
Promouvoir la « data value attitude »
Afin de réussir cette démarche de
valorisation des données, il est
essentiel de développer l’ouverture
et l’intelligence collective, interne et
externe, ainsi que de s’appuyer sur
la créativité et les compétences des
start-ups. Des digital natives peuvent
notamment être recrutés pour enrichir
les équipes de l’entreprise.
Il est également nécessaire d’adapter
les business plans à la souplesse
des projets de valorisation de la
donnée. Pour cela il faut, d’une part,
rechercher un business rentable en
s’appuyant sur les résultats tout en
reconnaissant la prise de risque d’un
tel projet. D’autre part, il faut faire
preuve d’opportunisme. Enfin, il s’agit
d’adopter un rythme dans la prise de
décision qui permette de garantir une
progression par petites étapes mais
sans retour en arrière.
Dernier élément de « data value
attitude », il est indispensable
de rechercher explicitement les
partenariats win-win en identifiant et
organisant les bénéfices réciproques
dans la durée et en impliquant le
juridique comme une expertise au
service du succès.
DES LEVIERS RÉELS ET DISPONIBLES QU’IL FAUT MOBILISER
24. 22
Obtenir des succès
grâce à l’expérimentation
Sur les grandes facettes que sont
les bénéfices clients et les bénéfices
industriels, il apparaît nécessaire de
conduire les projets par étapes avec
des POCs et des démonstrateurs.
Les clients doivent être intégrés à cette
démarche afin d’identifier, tester et
développer des services utiles, visibles,
simples, fiables et attractifs. Cela
permet d’associer une pensée créative
sur les usages avec les besoins
fondamentaux.
L’entreprise doit quant à elle identifier,
tester et développer des services
optimisant la performance industrielle.
Il peut par exemple s’agir de travailler
sur le pilotage, la dématérialisation
des processus ou la maintenance
prédictive.
LEVIERS FREINS
Ouverture
et transversalité
Nécessité
Des données !
Bénéfices clients
Bénéfices industriels
Réglementation
ROI incertain
Inertie culturelle
Processus internes
peu adaptés
LES PRINCIPAUX
25. 23
Au-delà des risques concernant les
données personnelles, les objets connectés
doivent être considérés comme une porte
d’accès possible pour un cyber-attaquant.
Susceptibles d’être utilisés pour piloter
les réseaux d’énergie à grande échelle,
ils peuvent être à l’origine d’un vrai risque
industriel (ex: coupure énergétique).
La liste de bonnes pratiques est longue
pour assurer leur protection. Du côté des
organismes normatifs, l’IEC 62443 est sans
doute le référentiel le plus connu : il donne
une définition claire de la segmentation du
réseau afin d’assurer la sécurité au sein
des réseaux industriels (ICS et SCADA).
L’ISO 27019 est quant à elle la petite soeur
de l’ISO 27002 (sécurité des SI) pour le
secteur de l’énergie. Au programme :
référentiel des actifs, principe de cloi-
sonnement du SI et prise en compte des
aspects sécurité avec les tiers.
Au-delà du choix du (ou des) référentiel(s),
l’enjeu de sécurité reposera surtout sur la
capacité des « projets objets connectés » à
identifier et mobiliser les bons acteurs en
charge des systèmes industriels et de leur
sécurisation.
RISQUES
CYBERCRIMINALITÉ
LEVIERS
L’efficacité des objets connectés repose sur
la quantité et la variété des données qu’ils
permettent de recueillir. Or, il s’agit là d’un
sujet très sensible vis-à-vis du grand public
et encadré par la loi.
Les entreprises françaises ont la chance de
pouvoir s’appuyer sur la CNIL qui, au-delà de
son rôle de régulateur, cherche à les aider à
protéger au mieux les données personnelles
qu’elles manipulent. Une récente approche
sectorielle a permis d’ériger quelques
règles sur le sujet des objets connectés. Un
1er
groupe de travail sur le secteur de l’énergie
concernant les compteurs communicants a
d’ores et déjà été couronné de succès et a
abouti à la création d’un pack de conformité.
La CNIL est claire : seules peuvent être
collectées certaines données permettant
notamment la définition de l’efficacité
énergique du logement, la prospection
commerciale, le pilotage à distance des
équipements...
La CNIL différencie également les réseaux
sur lesquels transitent les données : les
plus sensibles (pour l’usager) ne doivent pas
sortir de la maison (principe du In – In). Reste
à rassurer les futurs usagers du respect de
leur vie privée ! Cela passera en outre par
une totale transparence concernant les trai-
tements effectués et la mise à disposition
des données sur le principe de l’Open data.
La labellisation CNIL des compteurs utilisés
pourra être envisagée, même si tout reste à
faire sur ce sujet…
27. 25
Le rachat de Nest* par Google début
2014 est symptomatique de l’intérêt
des géants du web pour la valorisation
de la donnée dans l’énergie. Comme
dans les autres secteurs, ils se
positionnent en capteurs de marge
des marchés existants par des services
émergents et attractifs.
Plus généralement, les acteurs
du digital sont aujourd’hui intéressés
par la valeur des données et se
positionnent sur différents leviers,
comme l’indique le schéma concernant
le B2C (p. 26-27).
Face à ces nouveaux entrants,
la position des acteurs de l’énergie
doit être à la fois défensive et offensive.
L’enjeu principal pour eux est
de faire émerger puis de développer
les marchés de demain et d’en capter
une part à moyen terme.
Il s’agit également pour ces acteurs
de développer et d’améliorer
la gamme de services nécessaires
à leur activité actuelle et future.
De ce fait, la collaboration est la clé
de la réussite des modèles de
valorisation des données.
L’analogie avec les secteurs
précurseurs dans la valorisation
de la donnée – web, grande
distribution, transport - permet
de cerner les grands modèles
d’affaire qui dynamiseront la question
du Big data dans le marché de l’énergie.
Trois grands modèles peuvent
être identifiés : l’Open data,
la création de nouveaux services
et l’optimisation des processus,
y compris du back-office.
* Nest est une entreprise fabriquant des thermostats intelligents
LA COLLABORATION
EST LA CLÉ
DE LA RÉUSSITE
DES MODÈLES
DE VALORISATION
DES DONNÉES.
28. 26
4 ANGLES D’ATTAQUE POUR LES ACTEURS DIGITAUX
SUR LES MARCHÉS B2C
Intermédiation
Consommation
de partage
EXEMPLES
EXEMPLES
30. 28
L’Open data consiste à mettre
gratuitement les données à
disposition du public.
Ce modèle parie sur l’intelligence
collective pour améliorer la valorisation
des données et développer des services
et des processus plus performants.
Les réussites de partage des données
ne manquent pas sur des mailles
locales : par exemple, aux États-Unis,
le distributeur et fournisseur de gaz
et d’électricité San Diego Gas
Electric (SDGE) partage publiquement
les données de consommation et celles
issues des 2,2 millions de nœuds de
données.
Ce projet a notamment donné
naissance à un outil de détection
des risques d’incendie ou des tensions
sur les transformateurs. Dans le
secteur de l’énergie, l’Open data est
particulièrement intéressant pour
les entreprises réglementées comme
les distributeurs ERDF et GrDF. Cela
leur permet de développer une image
positive en termes de responsabilité
sociale, de transparence et de
modernité. Par ailleurs, les données
sont un moyen de renforcer leur
relation avec leurs partenaires clés,
les territoires par exemple.
Enfin, c’est une façon de valoriser
la richesse de leurs activités tout en
défendant et développant leur position
au sein de l’écosystème.
Les acteurs de l’énergie peuvent
également être moteurs et inventer
de nouveaux services.
La fourniture « sèche » de l’énergie
offre de faibles niveaux de marge
pour les commercialisateurs
et est peu impliquante pour les
consommateurs. Une option pourrait
être de s’émanciper des offres de
fourniture pour imaginer des services
couplés. Ces nouvelles offres peuvent
s’appuyer sur d’autres leviers que
la simple fourniture d’énergie, par
exemple l’attrait pour l’ergonomie d’un
équipement de pilotage énergétique. Le
développement de nouveaux services
de données est un autre levier et doit
permettre d’enrichir l’expérience
consommateur, par exemple en
améliorant son confort. À l’instar
des offres tout compris proposées
depuis une dizaine d’années dans la
téléphonie mobile, les énergéticiens
et leurs partenaires pourraient tirer
parti de l’attente des consommateurs
envers un objet désirable et concevoir
une solution complète combinant un
objet design, la fourniture énergétique
et un service de données. L’association
à des partenaires d’autres secteurs ou
d’autres cultures est incontournable
pour développer de telles offres. Des
démonstrateurs doivent être déployés
pour évaluer la génération de nouveaux
revenus à court et moyen termes, et les
gains en termes de fidélisation client.
L’OPEN DATA
31. 29
3
GRANDS
BUSINESS MODELS
DE VALORISATION
DE LA DONNÉE
DANS L’ÉNERGIE
VALORISATION
ET OUVERTURE DES DONNÉES
CRÉATION DE NOUVEAUX SERVICES
OPTIMISATION DE PROCESSUS
Enfin, la valorisation de la donnée doit
permettre aux acteurs d’être vertueux
dans l’optimisation de leurs processus
industriels et métier, voire de réaliser
de véritables bonds de performance.
Certaines parties prenantes pourraient
notamment réaliser d’importantes
économies sur la maintenance et les
investissements dans les moyens de
production et le réseau.
Dans le domaine de l’aéronautique,
Airbus et IBM ont par exemple
développé Smarter Fuel, une solution
d’optimisation de la consommation
de carburant sur les avions du
constructeur grâce aux informations
provenant des capteurs de sa flotte.
Ces trois grands modèles sont
complémentaires et répondent à
des objectifs différents. Ils sont
conditionnés par la faculté des
différents acteurs à développer leurs
capacités industrielles SI et comptage,
à acquérir des marges de manœuvre
dans le marché français de l’énergie et
à fonctionner en partenariats.
32. 30
LE ROI EST MORT, VIVE LE TEST LEARN !
Les grands groupes s’appuient
traditionnellement sur un business
plan pour décider de lancer un nouveau
projet : ce document concret et
structuré précise de façon chiffrée
et opérationnelle la trajectoire,
les délais et surtout les retombées
du projet. La prise d’initiatives leur
est difficile lorsque le retour sur
investissement (ROI) n’est pas certain.
Or, la mutation des marchés accélérée
par les nouvelles technologies se situe
aujourd’hui dans un environnement
d’incertitude, en particulier sur
le ROI. Plutôt que de se positionner
en suiveurs sur des services dont
la rentabilité est garantie,
les acteurs de l’énergie doivent
adopter une approche plus
audacieuse d’expérimentation.
Pour cela, ils peuvent s’appuyer
sur l’étude du modèle d’affaire du
projet plutôt que sur la formalisation
d’un business plan détaillé.
Un modèle d’affaire correspond
à une vision stratégique à grosse
maille qui décrit la logique du projet
et la façon dont il crée de la valeur
afin d’assurer le développement de
l’entreprise.
L’analyse du comportement agile
des start-ups est ici instructive :
elles sont plus souples et
astucieuses pour tirer de la valeur
d’un projet de RD insatisfaisant
en réorientant leurs objectifs ou
leurs business models. Contrairement
à elles, il semble que les grands
groupes abandonnent plus souvent
une partie de leurs efforts de RD.
Les grandes entreprises de
l’énergie ont tout à gagner à
s’inspirer du comportement agile
des start-ups : c’est ainsi qu’elles
pourront être motrices pour
développer l’activité actuelle et
future et préempter les marchés
de demain. Plus que le retour sur
investissement, leur préoccupation
doit porter sur une gouvernance
efficace et une plus grande flexibilité
du modèle d’affaire de leurs projets
de valorisation de la donnée.
Pour autant, il ne s’agit pas de ne rien
contrôler. Le motto est justement
de tester et de mesurer les grandes
opportunités, pour mieux prendre
les décisions (poursuivre le projet,
le réorienter, le redimensionner, voire
l’abandonner au bon moment).
34. 32
SOURCES DE DONNÉES
UNIVERS DE DONNÉES
CRM et
Data Mart
Relation avec
l’énergéticien
(contact, contrat,
paiement, etc.)
Consommation
et courbe
de charge
Comportements
sur les usages
Vie des
équipements
Vie du client /
Données
individuelles
(ex: nouvel
enfant, etc.)
Image des
énergéticiens
(perception)
Compteurs
communicants
Données
ouvertes
(météo, etc.)
Données
sociales
Données tiers /
Partenaires
Objets
connectés
au sein
du système
client
LES CAS D’USAGE POSSIBLES DE VALORISATION
DE LA DONNÉE DANS L’ÉNERGIE
35. 33
DATA
VALUE
CAS D’USAGES POSSIBLES
Optimisation
des opérations
(appels sortants,
comportements
prédictifs, etc.)
Personnalisation
de l’offre (service,
pricing
comportemental)
Offres
de flexibilité
Offres de
pilotage des
consommations
et des usages
Optimisation
du BFR
(recouvrement,
PNT, etc.)
Valorisation de données
auprès de tiers
(société de services
énergétiques, fabricants
d’équipements)
Optimisation de
la communication
et du marketing
opérationnel
(fidélisation, etc.)
36. 34
POUR RÉUSSIR
DES POSTURES
RADICALEMENT
NOUVELLES
Les périmètres sont vastes, les initiatives hétérogènes, les acteurs
peuidentifiés,lesfreinsnombreuxetlesretourssurinvestissement
peu évidents… Dans ce contexte, comment démarrer des projets de
« valorisation de la donnée » dans l’énergie ? Comment obtenir de
réels succès rapidement ? Qui doit mener ces transformations dans
l’entreprise ? Y-a-t-il des démarches types ?
Une approche disruptive, en dehors des processus traditionnels
en place au sein de l’entreprise, est nécessaire. Les entreprises
doivent adopter les règles du jeu du monde numérique : agilité et
innovation,ouvertureetdimensioninternationale,travailcollaboratif
et mobilisation des initiatives. Cette adoption de nouvelles règles
peut être illustrée, à titre d’exemples, par 4 grandes postures.
37. 35
Prioriser, agir et apprendre vite
L’entreprise doit acquérir une réelle obsession de l’action et de l’expérimentation.
Pour y parvenir, elle peut s’inspirer des nouvelles démarches d’innovation
digitale : design thinking, test learn, coworking avec l’écosystème et les clients,
open innovation...
OPEN VISION
TRY THINK
Démarche « agile » et innovante pour chacun des streams
FOCALISER LES EFFORTS SUR LES ENJEUX MAJEURS
Les possibilités offertes par la valorisation des données ne sont pas bornées,
donc comportent le risque de dispersion des ressources sur des enjeux secondaires.
S’AFFRANCHIR DES CONTRAINTES
Le maître mot est l’ambition: il faut s’affranchir de toutes les barrières,
qu’elles soient juridiques ou au niveau SI, au moins pour la réflexion.
DÉMONTRER PLUS QUE DÉPLOYER
L'objectif est bien de prouver la valeur des sujets et axes de valorisation adressés
par les POCS et leurs accessibilités, afin d'initier une démarche d'entreprise
(création d'un « Data Lab » et participation active de l'ensemble des Métiers) ;
ne pas chercher à aller jusqu'à la phase industrielle.
PRIORISER
AGIR
ÉVALUER LES CONCEPTS TESTÉS
Au-delà du déploiement il est important de mesurer l’impact financier
des concepts, utiliser le ROI pour évaluer rapidement les performances
et l’avantage concurrentiel que cela peut procurer.
CAPITALISER SUR L’EXPÉRIENCE
Enfin, mettre à profit le knowledge que l’on retire de ces expériences
et reproduire les concepts à succès pour remodeler le marché.
APPRENDRE VITE
À chaque étape
Adopter le disruptif
POSTURE 1
38. 36
Notre expérience au sein des grands groupes montre que la mise en place de tels
dispositifs constitue une des réponses à la révolution numérique. Ils permettent
de préparer l’avenir, d’inventer de nouveaux business et de nouvelles offres et
d’accélérer le rythme face aux concurrents. Ils offrent une avance technologique,
de l’agilité et de l’intimité avec de nouveaux écosystèmes.
En voici quelques illustrations.
POSTURE 2
Faire vivre des dispositifs agiles et innovants…
en marge de l’organisation et protégés de ses contraintes
VOCATION RÉGULATION EXEMPLESFACTEUR CLÉ
DE SUCCÈS
MODÈLE
« START-UP »
MODÈLE
« HÔTE »
MODÈLE
« USINE
AGILE »
Développer
de nouvelles
activités à partir
d’un business
model innovant
• Indépendance
opérationnelle
par rapport
au métier
historique
• Régulation
en mode
investisseur
Acuité du
business model :
concentration,
différenciation,
arbitrage
Compléter un
business model
en développant
des offres
innovantes qui
s’appuient sur
une chaîne
de valeur
existante
• Autonomie
opérationnelle
forte
• Régulation
des interactions
Maîtrise
des coûts grâce
à la numérisa-
tion, le lean
management et le
positionnement
stratégique
Renforcer
un business
model existant
en accélérant
le time-to value
sur différents
projets
• Autonomie
limitée
• Régulation
en mode projet
Maîtrise
d’un modèle
agile
multicompé-
tence,
notamment
des métiers SI
39. 37
Dans cette optique, les grandes
entreprises peuvent s’inspirer
de la démarche d’une start-up
en recherche de son business model :
il est nécessaire de mesurer
la performance des différents
dispositifs grâce à des indicateurs
de suivi (pourcentage de projets qui
aboutissent, rapidité de mise sur
le marché par rapport aux projets
traditionnels…) et de les faire évoluer
pour en tirer toute la valeur.
POSTURE 3
Éviter les raisonnements en silos
et bien équilibrer faire et faire-faire
Les opportunités issues de la valori-
sation de la donnée ne sont possibles
qu’en croisant et en enrichissant les
sources d’information. Il faut donc
déployer une logique de pilotage et
une dynamique d’initiatives trans-
verses. Le raisonnement en silo serait
une erreur : l’entreprise risquerait de
perdre une bonne partie de la richesse
potentielle de ses données.
Au contraire, des lieux de partage des
initiatives autour de la donnée dans
l’entreprise sont nécessaires ainsi
qu’un pilotage centralisé et transverse
de ce portefeuille d’initiatives.
Pour autant, une approche visant à tout
prendre en charge dans un programme
unique serait trop ambitieuse et
dangereuse pour la plupart des
grandes entreprises dont le métier
n’est pas uniquement « digital » :
il est important d’éviter de créer
un « métier digitalisé » à côté de
chaque « métier historique ». L’enjeu
est plutôt d’impliquer les Métiers eux-
mêmes dans leur transformation et
dans la bonne utilisation des données.
Pour un énergéticien, la bonne
alchimie sera bien souvent de
s’appuyer sur un programme de
transformation en trois volets :
Prendre en charge
le pilotage global et
transverse du portefeuille
d’initiatives « Data smart »,
Réaliser
quelques chantiers
emblématiques :
construction de
la plateforme Big data,
pilotage en propre
de quelques projets…,
Déléguer les chantiers
de transformation
des métiers historiques
à ces mêmes métiers.
40. 38
Bien activer les leviers
d’une transformation de cette nature
Au-delà du levier principal test learn,
des leviers complémentaires peuvent
être activés pour créer des usages et
trouver des bénéfices :
l’agilité du SI,
la cyber-sécurité,
la mise en place d’une démarche
d’innovationparticipative
ou open (beaucoup d’idées
de valorisation de la donnée
émergent au sein
de démarches d’innovation),
l’écoute et l’implication
des opérationnels Métiers
et du terrain,
la veille et la mise en place
d’un observatoire de
la valorisation de la donnée
dans l’énergie, voire de
manière multisectorielle.
La logique d’incubation « en marge »
est souvent nécessaire pour s’extraire
au moins temporairement
des processus lourds et complexes
qui peuvent tuer dans l’œuf toute
initiative n’ayant pas de ROI immédiat.
Pour aboutir à une transformation
digitale de l’entreprise, la DSI doit
s’imposer comme un acteur central
de la dynamique. Ses collaborateurs
sont intéressés par le digital, même
si ses procédures et son fonctionnement
restent lourds parce qu’elle se doit
d’offrir une excellente qualité de service
aux Métiers.
Il s’agit donc d’accompagner
la transformation du métier de la DSI
vers un mode de fonctionnement plus
agile pour qu’elle devienne facilitateur
de la transformation et potentiellement
fournisseur de compétences et
ressources « digitales » qui pourront
enrichir les initiatives. La problématique
de la cyber-sécurité est également
à traiter avec soin. Qui dit « donnée »
dit « information », dit « pouvoir »,
dit « convoitise » et risques.
Partir de cet axiome peut briser
immédiatement toute initiative.
Ces sujets sont à instruire, comme
des lots du programme… Toutefois, ils
ne doivent pas être activés dans une
logique « police des données ». Ce lot
doit au contraire être un apporteur de
solutions par une approche de maîtrise
de risque, un facilitateur et non un
censeur. Pour cela, l’entreprise doit
être pragmatique et au fait des risques
et réglementation…mais surtout des
solutions pour les traiter !
POSTURE 4
41. 39
Pouvez-vous
nous expliquer
votre
positionnement
dans l’écosystème
du Smart ?
Ecometering a été mise en place
comme un technocentre européen
pour accélérer le développement
de solutions Smart dans le domaine
de l’énergie. Nous sommes une SAS
déconsolidée* du groupe GDF SUEZ.
Nous sommes gérés dans une logique
d’actionnariat, de façon à faciliter
l’agilité, l’innovation et la culture
entrepreneuriale. Notre financement
est assuré par le groupe et nous
bénéficions de sa position de leader
et de ses canaux de vente.
Nous sommes donc un « animal
hybride », à mi-chemin entre
l’organisation très « processée »
d’un grand groupe et celle d’une
start-up. En fonction du segment
de marché, le curseur est positionné
entre « usine agile » et « lean
start-up »**.
La gestion de partenariats est
essentielle pour nous et, à ce titre, je
partage la recherche d’un partenariat
« win-win durable », et en particulier la
nécessité de la co-construction
des solutions.
Nous avons mis en place à cette fin
notre communauté de testeurs,
le LabEnergie :
www.labenergiegdfsuez. com
Nous sommes en permanence en train
de nous questionner sur ce qui doit être
fait en interne, considéré comme notre
cœur de métier, et sur ce que nous
pouvons externaliser. En contrepartie
de la confiance que nous accordent
les entités de commercialisation
de GDF SUEZ, nous devons être en
permanence à l’état de l’art. Cela
nécessite une remise en question très
régulière, une veille continue et des
partenariats avec les meilleurs
acteurs du marché.
TÉMOIGNAGE DE MICHAEL SCHACK
* Type de filiale partiellement indépendante.
** Concept renvoyant à une organisation visant à optimiser les lancements de produits
afin de valider ou revoir une offre le plus rapidement possible.
NOUS SOMMES
UN « ANIMAL HYBRIDE »,
À MI-CHEMIN ENTRE
L’ORGANISATION
TRÈS « PROCESSÉE »
D’UN GRAND GROUPE ET
CELLE D’UNE START-UP.
42. 40
L’énergie est un secteur incertain
et en très rapide mutation de par
l’émergence de l’internet des objets et
du « consomm’acteur » (contrairement
au consommateur qui les subit, ce
dernier est actif vis-à-vis des produits
qui l’entourent). Cela requiert une
grande agilité et une forte réactivité.
L’approche symbiotique, telle que
pratiquée par Free nous semble
répondre à ce besoin.
Les partenariats les plus prometteurs
et créateurs de valeur pour les
énergéticiens sont peut-être ceux avec
de nouveaux acteurs venant d’autres
horizons, comme l’internet des objets,
le web 2.0, le design, les plateformes IT
de 3ème
génération…
Et avec des cultures d’entreprises
différentes comme les « lean start-up »
pour bousculer les cultures process
des acteurs établis.
44. 42
Les limites techniques
de la valorisation des données
Parler de « valorisation » de la
donnée », c’est partir du postulat
que cette dernière n’a pas de valeur
en elle-même ou plutôt que l’on
cherche à dépasser celle qu’elle porte
intrinsèquement. Valoriser la donnée,
c’est jouer sur au moins l’une de ces
trois caractéristiques :
Interprétation:certaines
données telles que l’audio, la
vidéo ou le texte en langage
naturel sont dites « non
structurées ». Pour pouvoir être
traitées informatiquement,
l’information qui y est contenue
doit en être extraite.
Corrélation : cela consiste à
mettre les données en relation
avec d’autres données,
issues de l’interne ou de
l’externe (données ouvertes,
partenaires…) pour leur
apporter un nouveau sens.
Vélocité : lorsque les
données à exploiter
représentent des informations
« événementielles », la
valorisation de la donnée
trouve sa mesure dans la
vitesse d’analyse de celle-ci.
Derrière ces trois formes de
création de valeur se cachent trois
caractéristiques : la variété [des
données et de leurs formats],
la volumétrie [des données prises
en considération] et la vitesse
[de traitement des données].
Combinées à la véracité, on les
retrouve derrière l’acronyme des 4V.
Les technologies dites standards,
utilisées avec succès depuis plusieurs
dizaines d’années, montrent
rapidement des limites lorsque l’une
au moins de ces 4 caractéristiques
devient prépondérante.
Une maturité qui a
pour nom Big data
Certains acteurs, du fait de leurs
activités, ont été confrontés très tôt
à la nécessité de tirer de la valeur
à partir d’ensembles de données
volumineux. C’est le cas notamment
des acteurs bancaires (analyse
d’exposition aux risques…), de la
prévision météorologique ou de la
recherche.
À une époque où ces besoins n’étaient
pas démocratisés ils ont dû se
doter d’infrastructures matérielles
coûteuses et / ou développer leurs
propres socles logiciels d’analyse.
LES APPORTS DU BIG DATA
45. 43
Les acteurs du monde web (Google,
Facebook, Twitter…) sont de ceux-là et,
pour supporter leurs activités,
ils ont comblé l’absence de solutions
standards en créant de nouvelles
approches pour le stockage et
le traitement de l’information.
Les points communs de ces nouvelles
approches :
• elles s’appuient sur des modèles
informatiques hautement distribués,
qui permettent l’utilisation de
ressources matérielles nombreuses
mais peu coûteuses unitairement,
offrant ainsi capacité, performance
et disponibilité ;
• elles ont été pour la plupart rendues
disponibles aux communautés
open source telles qu’Apache leur
assurant ainsi une pérennité et une
évolutivité dépassant le cadre de leur
berceau.
Ces approches sont des architectures
types telle que Map-Reduce (dont
l’implémentation la plus connue
est Apache Hadoop) ou des bases
de données dites NoSQL (HBase,
Cassandra, Voldemort…).
Mais la capacité à traiter toujours
plus de données et toujours plus
rapidement, repose aussi sur les
appliances* décisionnelles (Teradata,
IBM PureData Systems for Analytics,
Oracle Exadata…), les bases de
données mémoire (SAP HANA…), les
solutions d’analyse événementielle
(Tibco Business Events...) ou les outils
d’analyse et de restitution dit « agiles »
(QlikView, Tableau…).
La déferlante de technologies
citées précédemment est loin d’être
exhautive. Ce qu’il faut avant tout ici
retenir est que la problématique de
la valorisation de la donnée a de très
nombreuses réponses techniques. Ces
réponses sont données par un marché
foisonnant et à maturité, porté à la fois
par des petits acteurs spécialisés, des
grands acteurs généralistes et des
acteurs du monde open source.
Et ce marché s’appelle Big data.
*Une appliance est une offre entièrement packagée intégrant à la fois le matériel et le logiciel, orientée
vers un usage spécifique pour proposer une capacité technique optimisée.
LE MARCHÉ DU BIG DATA
EST FOISONNANT, PORTÉ
À LA FOIS PAR DES PETITS
ACTEURS SPÉCIALISÉS,
DES GRANDS ACTEURS
GÉNÉRALISTES ET DES ACTEURS
DU MONDE OPEN SOURCE
46. 44
Faire du test learn une réalité techniquement possible
Les exemples prouvant la valeur
métier d’une exploitation étendue
du patrimoine informationnel de
l’entreprise ne manquent pas. Pour
autant, il reste difficile aujourd’hui
d’évaluer le ROI d’une plateforme Big
data, et ce d’autant plus qu’il existe
plusieurs typologies de solutions
Big data, parfois adaptées à des cas
d’usage spécifiques.
En l’absence de cas d’usage définis, les
entreprises débutent généralement par
une expérimentation des possibilités
de la plateforme Hadoop, qui offre une
richesse suffisante pour couvrir un
large spectre de besoins.
Mais Hadoop requiert de mettre en
œuvre de nouveaux paradigmes de
conception des applications, basés
sur la parallélisation du traitement
et du stockage qu’il est nécessaire
d’acquérir. En cela le Big data amène
une vraie rupture marquée par la
rareté des compétences en entreprise
et sur le marché.
Afin de ne pas être freiné dès les
1ères
étapes par des investissements
initiaux, il est conseillé de s’appuyer
sur les offres de plateforme Hadoop
en mode Cloud computing proposée par
de nombreux acteurs (Google, Amazon,
Microsoft…) permettant de disposer
ainsi d’un socle « prêt à l’emploi »
et de pouvoir se focaliser sur
l’essentiel.
Viendra ensuite le temps des projets
métiers et la nécessité de la mise
en oeuvre d’une plateforme Big data
d’entreprise, hébergée en interne ou
en externe selon les enjeux propres à
chaque entreprise.
47. 45
VALEUR DES CAS D’USAGE ET COMPLEXITÉ DE MISE EN ŒUVRE
EN FONCTION DES CRITÈRES VITESSE X VOLUMÉTRIE X VARIÉTÉ
Valeur du cas d’usage
Complexité de mise en œuvre
Les cas d'usage présentant le plus
de valeur sont ceux qui exploitent
au mieux les différentes dimensions
du Big data
1
Aujourd'hui c'est au niveau de la
dimension variété que se situe la plus
grande complexité de mise en œuvre...
2
...et c'est donc autour de la volumétrie et de la vitesse d'analyse
que doivent se concentrer les premières expérimentations pour optimiser
le ratio efforts / résultats
3
48. 46
Data scientist :
la compétence rare du Big data
La valorisation des données associe
de nombreuses compétences
(connaissance des besoins potentiels
des clients, du contexte réglementaire,
des données disponibles…) et suppose
une montée en puissance
de l’intégration des processus
de la donnée (collecte, stockage,
traitement, mise à disposition) dans
les métiers de la chaîne de valeur
de l’énergie.
La plupart des compétences
nécessaires existent, l’enjeu
consistant principalement
à les associer efficacement.
Un rôle apparaît cependant comme
plus critique : le data scientist.
S’agit-il d’un nouveau métier ou
de la mise au goût du jour d’un métier
« ancien », celui de statisticien ?
Les nouvelles dimensions de
la donnée (les 4 V) militent pour une
vision nouvelle. Le savoir-faire visé
est de combiner la connaissance
fine des données et la capacité à
développer des modèles et algorithmes
mathématiques… qui aient du sens.
Ces modèles peuvent concerner
aussi bien des traitements de données
« en stock » que des traitements
de données « en flux », ainsi que
la combinaison des deux (typiquement
la comparaison de données en temps
réel avec des historiques).
Ces profils de « mathématiciens
appliqués aux données » jouent un rôle
clé dans la puissance et la pertinence
de la valorisation des données.
Ce métier est identifié comme
un métier d’avenir et les écoles
d’ingénieurs, Les Mines de Paris,
Télécom Paris, l’ENSIMAG, l’ENSAE,
l’ENS Cachan, et certaines universités
ont ou sont en train de lancer
des masters spécialisés avec des
DE NOUVELLES COMPÉTENCES À EXPLOITER
49. 47
intitulés qui précisent les enjeux, par
exemple « Machine learning for Big
data » ou « Mathématique / Vision /
Apprentissage ».
Globalement, il s’agit de développer
des méthodes mathématiques qui
relèvent plus de l’abduction que de
la déduction (recherche de liens
formels et indiscutables entre facteurs
et effets). L’enjeu est de rechercher
des règles permettant de formuler
des hypothèses probables sur les
liens entre facteurs et effets, par
l’observation empirique, d’où le terme
d’apprentissage. Il ne s’agit pas de
théories nouvelles, les travaux de la
fin du XXème
siècle sur l’intelligence
artificielle ont largement développé
ces concepts… mais il s’agit de les
appliquer concrètement, dans des
processus opérationnels en entreprise.
Le champ de ces analyses prédictives
(identifier des probabilités fortes, pas
des certitudes) est très important,
aussi bien dans la relation client
(besoins, attentes, comportements)
que dans le pilotage des activités de
l’entreprise.
Pour toutes les activités techniques
des énergéticiens (production,
infrastructures, services techniques),
le développement des technologies
Smart apporte par exemple des
données clés pour augmenter
la performance de la maintenance
prédictive.
Où sont les datascientists
aujourd’hui ?
La finance de marché ou le trading
dans l’énergie sont historiquement
des fonctions qui recrutent et
valorisent des datascientists.
Aujourd’hui, d’autres fonctions
(marketing, logistique, maintenance…)
cherchent à valoriser les données et
recherchent ce type de profil.
Dans ce contexte, les spécialistes
trouvent un terrain favorable à
leur développement. Il peut s’agir
de prestataires très focalisés sur
une activité, comme Enerdata qui
a développé une expertise sur les
analyses macroéconomiques du
secteur de l’énergie et qui produit
des études qui font référence, ou
de prestataires pouvant mettre à la
disposition des acteurs de l’énergie
des savoir-faire développés auprès
de secteurs plus matures. Quentin
Michard, associé chez Ekimetrics
présente ci-après quelques points clés
d’expérience sur ce savoir-faire.
50. 48
Quelles
compétences
doit avoir un
datascientist selon
vous ?
Un datasientist doit à mon sens avoir
une triple compétence: consultant
business, statisticien et développeur.
En créant Ekimetrics en 2006, nous
avons capitalisé sur les méthodologies
quantitatives utilisées notamment en
finance de marché, pour mesurer
le ROI des investissements marketing
de grands groupes internationaux.
L’imaginaire collectif tend à croire que
les outils développés par les grands
éditeurs de logiciels, suffiront à l’avenir
à « faire parler les données d’elles-
mêmes ». Nous sommes, au contraire
convaincus qu’il y a une vraie valeur
à construire des modèles dédiés.
Les spécificités et le contexte
déterminent souvent une part
importante des phénomènes mesurés
et en cela la statistique seule ne
suffit pas. Le savoir-faire doit être
transversal, la « datascience »
permet de combiner habilement
des connaissances en informatique,
marketing et modélisation.
Comment travaillez-vous ?
Nos consultants sont formés pour
résoudre les problématiques
inhérentes aux différents secteurs,
avec une approche tant macro que
microéconomique. Bien que
les méthodologies diffèrent, ce sont
les mêmes consultants qui traitent
les aspects tactiques et stratégiques
de nos missions : cela leur permet
d’avoir une vision élargie des différents
secteurs d’activité.
Traditionnellement nous accompagnons
les départements marketing,
commerciaux, logistiques et financiers
d’entreprises issues des secteurs
du luxe, des telcos, de l’assurance,
de biens de consommation et
de l’automobile.
TÉMOIGNAGE DE QUENTIN MICHARD
LA « DATASCIENCE »
PERMET DE COMBINER
HABILEMENT DES
CONNAISSANCES
EN INFORMATIQUE,
MARKETING ET
MODÉLISATION.
51. 49
Nous avons noté un engouement
particulier autour de notre expertise
en « pricing » et en pilotage du mix
marketing.
L’accessibilité croissante de données
pertinentes nous permet d’étendre
notre expertise analytique
à d’autres sujets.
En effet, les systèmes d’information
mettent à disposition de plus en plus
de données ; leur exploitation offre des
opportunités clés pour développer un
avantage concurrentiel et optimiser
la productivité ou la marge
des entreprises.
Les analyses prédictives (ventes,
chiffre d’affaires…) connaissent aussi
un rapide développement, avec des
données fiables, il suffit de quelques
mois pour construire des modèles
prédictifs affinés. Je pense que les
solutions autour des modèles prédictifs
sont celles qui se généraliseront le plus
rapidement, tous secteurs confondus.
Nous vivons actuellement un moment
charnière, de plus en plus de Proof of
concepts sont déployés sur
des problématiques d’avenir.
C’est notamment dans ce cadre
que nous réalisons en partenariat avec
Solucom un POC pour un grand compte
du secteur de l’énergie sur l’internet
des objets. La datascience implique
une approche « disruptive » à contre-
courant du fonctionnement des grandes
entreprises.
52. 50
LA TRANSFORMATION
NE SE FERA QUE
DANS UNE LOGIQUE
COLLABORATIVE
La valorisation des données dans l’énergie suppose la combinaison
decompétences.Ellepasse,laplupartdutemps,pardespartenariats
entre les énergéticiens et des spécialistes des équipements,
systèmes et services de données qui peuvent être des acteurs
« installés » (comme Schneider Electric ou Atos) ou des start-ups
focalisées sur des domaines précis (comme C3 Energy, EnerData,
Energiency, Nest, Netatmo…).
Comment tirer parti de ces partenariats ? Quelles sont les attentes
respectives?Quelmodedefonctionnementmettreenplace?Autant
de questions auxquelles nous avons répondu avec énergéticiens et
start-ups lors de l’Atelier Solucom.
53. 51
Le tableau ci-après présente la lecture croisée des attentes et valeurs ajoutées
réciproques.
DES ATTENTES ET VALEURS AJOUTÉES RÉCIPROQUES
PARTANT DES ATOUTS ET LIMITES DE CHACUN
Attentes des start-ups
à l’égard des énergéticiens :
• Un fonctionnement réactif (décision,
action) « à l’abri » de la complexité
de l’organisation d’un grand groupe
• Des terrains d’expérimentation (POCs…)
• Un accès rapide à un marché large
capitalisant sur le portefeuille clients
de l’énergéticien
• Une contribution financière pour
accélérer le développement des projets
• Des relations équilibrées…
pour ne pas être « étouffées »
• Des compétences et une force
de démultiplication
Attentes des énergéticiens
à l’égard des start-ups :
• La création de nouveaux usages
et de nouveaux marchés, pouvant
entraîner des changements profonds
dans la dynamique des marchés par
le développement de nouveaux
business models
• Des perspectives de relais
de croissance par des croissances
externes ou collaboratives
• Une (certaine) externalisation
de la prise de risques
• Une culture et des savoir-faire
d’innovation, d’agilité,
de time-to-market
Valeur ajoutée des start-ups
pour les énergéticiens :
• Des solutions efficaces et peu
coûteuses, issues d’une RD agile
et à moindre coût
• Une culture d’innovation, de créativité
et d’entrepreneurship
• Des profils atypiques qui jouent
un rôle important dans les approches
multi-regards des phases amont
• Des compétences rares
• Une prise de risque, avec un droit
à l’erreur assumé
Valeur ajoutée des énergéticiens
pour les start-ups :
• Un accès au marché, aussi bien
en termes de portefeuille clients,
que de canaux de vente
• Des terrains d’expérimentation
de grande taille
• Une démultiplication des ressources :
ressources humaines et moyens
financiers
• La crédibilité et la notoriété
de la marque
• Une forte connaissance des spécificités
du marché de l’énergie (acteurs,
réglementations, pouvoirs publics…)
qui peut être utile pour des start-ups
issues d’autres secteurs
54. 52
En synthèse, on peut dire que :
• L’énergéticien apporte des clients
et un potentiel,
• La start-up apporte des innovations
et une culture,
• Ensemble, ils construisent
et mettent en place des
expérimentations apportant de
la valeur aux clients et à chacun.
UN FONCTIONNEMENT BASÉ
SUR UNE POSTURE
« WIN-WIN DURABLE »
Le passage d’un fonctionnement
« donneur d’ordre / prestataire »
à un fonctionnement « win-win
durable » est un enjeu clé de ces
partenariats. Nous proposons pour
cela quelques principes :
• Une organisation de la collaboration
simple et réactive avec en particulier
des interlocuteurs décideurs bien
identifiés et sponsors des projets
engagés.
• L’installation d’un cadre de
travail commun (co-innovation,
co-développement) associant
les compétences dans un esprit
ouvert orienté vers le business.
Concrètement cela peut passer par
la mise en place d’un plateau projet
regroupant les équipes internes
et externes avec des rites de partage
et de co-construction.
• Une contractualisation équilibrée
recherchant explicitement
la pérennité et le développement
des deux partenaires. Cela passe
par la mise à plat des modèles
d’affaires de chacun, une
vision partagée du modèle de
développement de l’activité et
par la construction d’un contrat
partageant la valeur. Dans ce cadre,
la clarification de la question
de la propriété intellectuelle
des modèles est essentielle.
• Et surtout des projets concrets,
à la fois ambitieux et réalistes,
conduits de bout en bout
en pilotant finement et de façon
très pragmatique le rapport
à l’incertitude.
56. 54
1ère
OBSESSION
Agissez, agissez, agissez !
« The only way to do it IS to do it », est
le 1er
message que l’on voit lorsque
l’on rentre dans la D-Scholl de
Stanford. Cette maxime s’applique
particulièrement à la valorisation des
données.
Dans cet environnement en ébullition,
en perpétuel mouvement avec de
nombreux acteurs très agiles, il ne faut
pas perdre de temps à étudier et à faire
des plans.
C’est bien en essayant et en
interagissant avec les clients,
les start-ups et les acteurs d’autres
secteurs que l’on apprend,
sans avoir peur des échecs.
Il faut avoir l’obsession
de la génération d’idées,
de l’action
et de l’expérimentation.
2ème
OBSESSION
Raisonnez évolution du business
model. Oubliez les business plans.
L’innovation en rupture résiste
rarement au business plan, qui exige
une visibilité sur les temps de retour.
Les données n’ont pas de ROI mais
elles doivent nourrir des business
models qui créent de la valeur.
Il s’agit de trouver les filons de valeur,
de les tester et de les faire évoluer
par la pratique.
Les histoires des start-ups qui ont
réussi sont toujours fondées sur
des phases de « pivotement » qui ont
permis par l’action et l’expérimentation
de faire évoluer le business model
pour le rendre gagnant.
57. 55
3ème
OBSESSION
Soyez rigide sur l’agilité
Les grandes entreprises sont souvent
prisonnières de leurs lourdeurs.
Notre expérience au sein des grands
groupes montre que la mise en place
de dispositifs agiles et innovants en
marge de l’organisation et protégés
de ses contraintes, constitue
l’une des réponses à la révolution
numérique. Ces derniers permettent
de préparer l’avenir, d’inventer de
nouveaux business et de nouvelles
offres, d’accélérer le rythme face
aux concurrents, en apportant de
l’avance technologique, de l’agilité
et de l’intimité avec de nouveaux
écosystèmes.
4ème
OBSESSION
Co-construisez avec vos clients dans
un esprit design thinking
Les données seront au final valorisées
auprès des clients externes pour
enrichir la proposition de valeur
ou des clients internes pour optimiser
la performance.
Développer l’empathie avec les
utilisateurs, comprendre ce qu’ils font
des données, ce qu’ils pensent, ce qu’ils
ressentent plus que ce qu’ils disent.
Leur montrer ou mieux leur faire utiliser
les services, même avec des prototypes
imparfaits, plutôt que leur raconter.
S’adresser aussi à l’humain
et à l’émotion, même en B2B.
Voilà des obsessions design thinking.
58. 56
5ème
OBSESSION
Osez innover dans de nouveaux
écosystèmes
Les grands énergéticiens sont des
acteurs internationaux qui connaissent
bien leur secteur d’activité et son jeu
concurrentiel.
L’innovation par les données nécessite
de se brancher sur le monde du
digital, grands acteurs (Google, Adobe,
IBM, Cisco…) et start-ups, mais aussi
d’apprendre à travailler avec d’autres
secteurs pour créer de la valeur
en partageant des données et en
co-construisant des services. On pense
bien naturellement, sur l’exemple de
la maison connectée (Smart home), aux
acteurs de la santé, de l’assurance ou
des telcos/medias.
Sortir de sa zone de confort, apprendre
de nouvelles règles du jeu, construire
des coopérations gagnantes…
6ème
OBSESSION
Raisonnez Smart data,
au-delà du Big data
Les technologies dites du Big data,
les mathématiques appliquées
aux données sont de nouvelles
compétences que les grands acteurs
doivent acquérir et développer. Mais,
elles ne sont évidemment pas des
finalités.
Il faut raisonner Smart data, c’est-
à-dire avoir toujours l’obsession de
créer de la valeur business à partir des
données, en mélangeant les mondes
et en les faisant travailler ensemble :
technologues, data scientists et
Métiers.
7ème
OBSESSION
Tuez les silos et inventez de nouveaux
modes de collaboration
La création de valeur à partir des
données suppose de s’inscrire dans
de nouveaux écosystèmes, de faire
travailler ensemble des compétences
et des profils différents.
Transdisciplinarité, diversité des
profils, logique collaborative… doivent
donc être la 7ème
obsession.
59.
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