En partenariat avec le groupe de conseil en stratégie sociale Alixio, la SIACI SAINT HONORE a organisé une table ronde dédiée au décryptage des nouvelles dispositions de l’accord national interprofessionnel conclu le 11 janvier 2013. Différents intervenants s’interrogent sur les contraintes et les opportunités qu’il implique pour le dialogue social des branches professionnelles.
GENERALISATION DES DISPOSITIFS DE PROTECTION SOCIALE
1. Synthèse
Conférence-débats
La généralisation des dispositifs
de protection sociale
mercredi 21 mai 2014
En partenariat avec le groupe de conseil en stratégie
sociale Alixio, la SIACI SAINT HONORE a organisé
une table ronde dédiée au décryptage des nouvelles
dispositions de l’accord national interprofessionnel
conclu le 11 janvier 2013. Différents intervenants
s’interrogent sur les contraintes et les opportunités
qu’il implique pour le dialogue social des branches
professionnelles.
C’est Christophe Vanackere, journa-
liste fondateur et directeur de fil-social.
com, qui anime la matinée. L’objectif est
d’offrir aux partenaires sociaux et aux
professionnels concernés une analyse
technique de l’impact de l’évolution des
textes sur la pratique de la négociation
collective.
Valorisez
votre expertise dans
la conception et la
négociation des régimes
santé et prévoyance
Jacques Barthélémy, avocat-conseil en
droit social du cabinet Jacques Barthé-
lémy & Associés, juriste précurseur dans
la conception du droit social comme une
technique d’organisation de l’entreprise,
rappelle que « le législateur s’efforce de
construireundroitsocialdutravaild’essence
plus contractuelle que réglementaire, afin
de concilier efficacité économique et pro-
tection des travailleurs. » La question de
la négociation collective sur la protection
sociale ne peut être dissociée de cette
évolution : elle doit être conçue comme un
outil de gestion à part entière.
La généralisation de la couverture santé
devra désormais être mise en œuvre via
des systèmes collectifs obligatoires. Pour
Jacques Barthélémy, « la protection sociale
devient de fait attachée à un statut collectif
du salarié. On s’éloigne de la logique du
complémentderémunérationliéàuncontrat
de travail. » En réponse à cette obligation,
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2. Synthèse mercredi 21 mai 2014
Conférence-débats
La généralisation des dispositifs de protection sociale
lespartenairessociauxontdeuxpossibilités.
Ils peuvent se contenter de fixer la nature
et le niveau des prestations, ou mettre en
place un véritable régime de couverture
santé. « Il n’y a de véritable régime que s’il
y a un pot commun sur lequel on prélève
les droits qui peuvent ne pas être direc-
tement contributifs : c’est le principe de
solidarité. » Les rapports entre branches
et entreprises s’en trouvent profondément
modifiés : l’entreprise ne peut plus déroger
à l’accord de branche. La généralisation
des dispositifs de protection sociale est
une excellente occasion de construire
des solutions innovantes permettant de
compenser le coût de l’opération. C’est la
meilleure manière de répondre à l’objectif
de sécurisation de l’emploi.
La clause de désignation, qui permettait
jusqu’à présent aux partenaires sociaux
d’imposer un opérateur de prévoyance
à l’ensemble d’un secteur professionnel,
a été écartée au profit de la clause de
recommandation. Désormais, les par-
tenaires sociaux ne peuvent plus que
recommander un opérateur d’assurance
à la branche professionnelle. L’entreprise
peut faire le choix d’un autre assureur au
risque d’engendrer une exécution fautive de
la convention collective. L’écueil majeur de
cette clause réside dans le fait qu’aucune
pénalité n’est prévue pour les branches
professionnelles où aucune recommanda-
tion n’est faite. Malgré cela, la clause de
recommandation offre l’opportunité de bâtir
un véritable régime de protection sociale.
Pour atteindre cet objectif, le contrat
d’assurance proposé doit être en tous
points conforme à l’accord collectif qui
constitue l’acte fondateur des garanties.
Cet acte ne peut être obtenu qu’en parfait
respect des accords de méthode qui
doivent garantir l’équilibre de pouvoir entre
les parties, la bonne foi des négociateurs
et l’application effective des dispositions
prévues au contrats.
Chaque point de l’accord collectif doit faire
l’objet d’une analyse approfondie, sans
quoi il existe un risque de mise en cause
de l’intégralité de la convention collective.
Contribuez
à l’amélioration
de la couverture sociale
des salariés
Marie-Hélène Gourdin
secrétaire fédérale de la CFDT,
fédération Chimie-Énergie
« Notre objectif est de mettre en place le
régime le plus bénéfique pour les salariés
comme les entreprises. Nous commençons
par déterminer les conditions en amont :
prise en compte des risques professionnels,
solidarité, garanties. Une fois définis, ces
éléments nous permettent d’élaborer un
cahier des charges que nous soumettons
à la concurrence en vue du choix final.
En tant que partenaire social, l’organisa-
tion syndicale doit impérativement être
impliquée dans le processus de décision.
Cela implique de réaliser un important
travail préparatoire sur la sociologie de
la branche. Il faut également faire preuve
de pédagogie vis-à-vis des militants pour
dépasser le débat sur les conditions de
prise en charge, et prendre en compte la
réalité économique de la branche. On ne
doit pas s’attacher aux détails, mais définir
le régime prévoyance et complémentaire
santé dans sa globalité. Un long travail de
persuasion doit permettre de faire adhérer
les partenaires sociaux à la démarche.
L’organisation syndicale joue un rôle
d’intermédiaire et de modérateur sur un
sujet crucial : la santé. Elle doit le faire
avec pragmatisme, afin que les garanties
négociées n’aillent jamais à l’encontre de
l’intérêt de l’entreprise. »
Olivier Sillion,
président de la PRODAF (CGPME)
« La situation est très différente selon les
branches. Ma branche représente 20 000
salariés appartenant à 12 000 entreprises
qui sont pour la plupart des TPE aux acti-
vités hétérogènes, sans connaissance du
métier de négociation de branche. C’est
donc un secteur très atomisé, sans vision
métier horizontale. Les conditions d’une
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3. Synthèse mercredi 21 mai 2014
Conférence-débats
La généralisation des dispositifs de protection sociale
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négociationfructueusesontparticulièrement
difficiles à réunir. Les chefs d’entreprises
comme les ressources syndicales n’ont
ni le temps ni la compétence pour la
conduire efficacement. En outre, ils n’ont
généralement pas les moyens de se doter
des meilleurs conseils.
Lors de la mise en place d’un régime
de frais de santé, l’employeur recherche
toujours une solution utile aux employés et
acceptable en termes de coûts, adaptée
au contexte économique de la branche.
La qualité du contrat d’assurance ne doit
pas être uniquement jugée au rapport
entre son coût intrinsèque et l’étendue de
la prestation mise en place. C’est la com-
pétence, la réactivité, la compréhension
de la branche et la qualité de son analyse
prospective qui doivent caractériser le
meilleur prestataire. Dans cette perspective,
la mise en concurrence n’est pas toujours
la meilleure solution.
Malheureusement, les derniers boulever-
sements législatifs créent de nouvelles
contraintes. La fiscalisation de la part
patronale en est un bon exemple : elle est
défavorable aux salariés. »
Laure Lazard Holly
senior manager, chez Alixio
« Le rôle des partenaires sociaux est primor-
dial, pour obtenir le meilleur consensus en
fonction des contraintes et des demandes
de chacun. Cela nécessite un important
investissement personnel sur des sujets
techniques. Mais leur rôle ne s’arrête pas
là : les partenaires sociaux sont également
responsables de la gestion et l’évolution
du dispositif au fil du temps, ce qui peut
représenter des budgets de plusieurs
millions d’euros. La connaissance de
la branche doit constamment être mise
à jour : sociologie, pénibilité, contexte
économique…
Il faut donc savoir s’entourer des bons
experts. Trois compétences doivent être
réunies au niveau des branches : l’expertise
juridique pour garantir la bonne rédac-
tion de l’accord, l’expertise assurantielle
pour négocier les aspects techniques, et
l’expertise stratégique dans la conduite
des négociations sociales. Cette expertise
stratégique permet notamment d’antici-
per l’articulation entre les négociations
sur le régime frais de santé et les autres
négociations inscrites à l’agenda social. »
Olivier Massa
directeur Prévoyance Santé
de SIACI SAINT HONORE
« L’expertise technique est importante pour
une contractualisation irréprochable du
dispositif. C’est la qualité intrinsèque du
dispositif proposé qui légitime la recom-
mandation. L’employeur ne pourra limiter
les coûts qu’en privilégiant la création de
valeur ajoutée.
Aujourd’hui, 50 % des salariés souhaitent
en priorité avoir accès à un régime santé
de qualité : dans ce contexte, le minimum
garanti ne suffit plus. Il est de la responsa-
bilité des partenaires sociaux de satisfaire
cette exigence.
Les acteurs de la négociation doivent
gagner en légitimité. Ils doivent s’accorder
sur les constats avant de prendre des
décisions : c’est le rôle du rapport de
branche qui constitue un élément impor-
tant de la connaissance de la branche.
Les responsabilités de la branche, de
l’organisme d’assurance et du gestionnaire
doivent être clairement définies : c’est un
enchevêtrement complexe à mettre en
place. L’élaboration du cahier des charges
doit impérativement s’appuyer sur une
expertise assurantielle forte. »