3. 3
Cette passerelle piétonne, conçue par Jürg Conzett et construite en
1999, franchit une portée de 40 m au-dessous d'un cours d'eau dans
les Alpes suisses. Le dénivellé entre les deux points d'appui est de 4
m et le concepteur a voulu réduire la flèche au maximum pour créer
une silhouette mince et élancée qui donne l'impression de flotter au-
dessus du cours d'eau.
4. 4
Le tablier de la passerelle est constitué de plaques
de granit de 6x25x110 cm alignées bout-à-bout et
simplement déposées sur deux rubans d'acier
inoxydable de 15x180 mm. Le garde-corps,
minimaliste, est constitué de minces tiges d'acier
(16 mm de diamètre) espacées à 30 cm c/c.
Puisque le granit possède une masse volumique
de 2700 kg/m3 (2,7 kN/m3), le poids du tablier est
égal à 1,62 kN/m2 (i.e. 2,7 kN/m3 x 0,06 m). On
estime le poids de l'acier (rubans + garde-corps)
à environ 38 kg/m2 ce qui donne une charge
morte (wD) de 2 kN/m2 (i.e. 1,62 + 0,38 kN/m2).
La charge d'utilisation pour ce type de passerelle
est égale à 2,5 kN/m2 selon les normes suisses et
la charge de neige dans cette région est évaluée
à 3 kN/m2. Comme charge vive (wL) nous
retenons la plus élevée de ces deux valeurs i.e.
3 kN/m2.
5. 5
La charge totale majorée (wF) est donc donnée par:
La charge totale supportée par la passerelle (W) est égale à:
Le concepteur veut que le
tablier de la passerelle soit
tangent à l'horizontale en
son point le plus bas
(l'extrémité droite). Sur le
diagramme de forme, on
peut donc tracer la ligne de
fermeture (qui relie les deux
points d'appui et une ligne
horizontale passant par
l'appui droit. On peut
ensuite reporter des droites
parallèles à ces deux lignes
sur le polygone de forces et
le croisement de ces droites
nous permet de localiser le
point focal o.
6. 6
On peut alors diviser arbitrairement la structure en dix tranches de 4 m
et appliquer une force verticale de 31 kN au centre de chacune de ces
tranches. Après avoir compléter le polygone de forces, on peut
finalement tracer le profil de la structure caténaire sur le diagramme de
forme. Le polygone de forces nous indique que l'effort de tension
maximale dans la structure caténaire est égal à 1630 kN ce qui est 5 fois
plus élevé que la charge totale supportée par la passerelle (310 kN).
7. 7
Le profil très plat du polygone de forces témoigne du fait que la
structure est fortement sollicitée p/r aux charges qu'elle supporte.
Sur le diagramme de forme on peut aussi mesurer que la flèche n'est
que de 1 m pour une portée de 40 m ce qui nous donne un profil très
élancé (s/L = 1/40). On aurait pu accroître la flèche pour réduire les
efforts de tension... mais c'est justement l'aspect très plat et élancé
du tablier qui confère à la passerelle toute son élégance.
8. 8
L'effort résistant en traction (Tr) des deux rubans d'acier qui
supportent le tablier est égal à:
Si l'acier possède une contrainte admissible (Ft) de 350 MPa, on
trouve alors que:
Comme l'effort résistant (Tr) est plus grand que l'effort maximal
appliqué (Tf), la structure est donc capable de supporter les charges
qui lui sont imposées.
9. 9
Le polygone de forces indique que la réaction d'appui horizontale est élevée
(1600 kN) aux extrémités de la structure. Pour transférer cette charge aux
appuis, on a choisi de les ancrer directement au roc qui est affleurant à la
surface. Cela nécessite l'installation de tirants d'ancrage en acier de 15 m de
longueur aux deux extrémités de la passerelle.
10. 10
Reste à assurer une stabilité suffisante à la structure. Le garde-corps est trop
léger pour offrir un quelconque soutien. Pour cet ouvrage, le concepteur a choisi
d'utiliser la technique du tablier post-contraint pour accroître la stabilité de la
structure. Dans un premier temps, le tablier en granit vient buter sur une plaque
d'acier ancrée dans la fondation en béton. Puis, à l'aide d'un vérin hydraulique
portable fixé à un crochet en forme de C, on applique une force de tension sur le
ruban en acier, qui s'étire, et on place alors une plaque en acier pour combler
l'espace vide créé entre la plaque d'acier encastrée dans le béton et le crochet.
On termine en relâchant la tension et en retirant le vérin hydraulique. En voulant
reprendre sa longueur initiale, le ruban vient buter sur le tablier en granit pour lui
imposer une effort de compression. Le tablier agit alors comme une arche
inversée qui est beaucoup plus rigide qu'un câble suspendu. Toute charge
additionnelle qui sera imposée au tablier diminuera la compression dans les
dalles de granit sans modifier la tension dans les rubans en acier.
14. 14
Comme second exemple, nous analyserons une autre passerelle
piétonne conçue par le même ingénieur, Jürg Conzett, et construite à
proximité de la passerelle Suransuns, la passerelle Traversina I est
juchée à 34 m au-dessus d'une vallée étroite sur un site de montagne
peu accessible. Pour cette raison, il a été décidé au départ que la
passerelle serait entièrement préfabriquée puis transportée par
hélicoptère et déposée sur le site. Ainsi, le poids de chacune des
composantes ne devait pas excéder 4300 kg, ce qui correspond à la
capacité de levage du plus gros hélicoptère disponible. On a ainsi
séparé la structure en deux composantes.
15. 15
D'abord une sous-structure, de forme lenticulaire, constituée de deux
câbles porteurs de forme caténaire unis par des cadres triangulaires en bois
et des tirants en acier en forme de X qui confèrent à l'ensemble une bonne
rigidité. Puis, une superstructure constituée de cadres en bois en forme H
déposée sur la sous-structure.
16. 16
Un pontage en bois et des panneaux de contreplaqué servant de
garde-corps sont ensuite installés sur place pour compléter la
superstructure. Cette superstructure permet le passage des piétons
et sa géométrie en forme de U confère à l'ensemble une grande
rigidité qui procure une meilleure rigidité à la structure portante
lenticulaire et réduit les vibrations occasionnées par le passage des
piétons.
17. 17
Le poids total est estimé à 12 tonnes ce qui signifie que la charge
morte linéaire est égale à:
La charge vive correspond à la charge maximale de neige dans cette
région (3 kN/m2) ce qui donne:
La charge totale majorée est donc égale à:
Pour le câble caténaire, le concepteur a choisi un rapport flèche/
portée (s/L) de 1/10 ce qui signifie que la flèche au centre du câble
est égale à:
La charge totale supportée par la passerelle (W) est égale à:
18. 18
Cela signifie que chacun des
deux câbles supporte une
charge de 180 kN (360 kN/2).
Puisque la charge verticale est
uniformément répartie sur toute
la longueur de la structure, on
peut localiser directement le
point focal o sur le polygone de
forces en faisant se croiser les
deux segments d'extrémité à
une distance égale à 9,4 m (i.e.
2 x 4,7 m) en-dessous de la
corde de fermeture au centre
de la portée.
19. 19
on divise la portée en 10
intervalles de 4,7 m et, au
centre de chaque intervalle,
on place une charge verticale
de 18 kN (i.e. 180 kN/10).
On peut alors compléter le
polygone de forces et tracer
le diagramme de forme du
câble caténaire. Le polygone
de forces nous indique que
l'effort de tension maximal
dans le câble est égal à 245
kN et qu'il est situé à
l'extrémité gauche de la
passerelle. Contrairement à
la passerelle Suransuns, la
composante horizontale de
la réaction d'appui aux
extrémités de la passerelle
n'est pas transmises aux
fondations mais reprise par
le tablier en bois qui est
sollicité en compression
20. 20
La passerelle doit aussi résister à une charge latérale de vent qui est
estimée à 1,3 kN/m. C'est pour cette raison que le concepteur a choisi
de ne pas placer les deux câbles caténaires dans un plan vertical mais
de les incliner pour créer une structure lenticulaire. La vue en plan de la
passerelle montre que, dans le plan horizontal, les deux câbles
agissent aussi comme une structure caténaire pour résister aux
charges de vent. Si, comme précédemment, on divise la portée en 10
intervalles de 4,7 m, on peut placer, au centre de chaque intervalle, une
charge horizontale (P) égale à:
La flèche horizontale du câble (s) est donnée par:
21. 21
Comme la charge est
uniformément répartie on
peut localiser facilement le
point focal o sur le
polygone de forces en
faisant se croiser les deux
segments d'extrémité à
une distance de 3,7 m (i.e.
2 x 1,85 m) sous la corde
de fermeture au centre de
la portée. Il suffit alors de
compléter le polygone de
forces et de tracer le
diagramme de forme du
câble. On mesure alors
que l'effort de tension
maximal induit dans le
câble caténaire par l'action
des forces horizontales est
égal à 290 kN.
22. 22
L'effort de tension maximal dans le câble (Tf) est obtenu en
additionnant l'effort causé par la charge verticale à celui causé par la
charge horizontale:
Si les câbles porteurs sont construits avec un acier qui possède une
contrainte admissible (Ft) de 1200 MPa, leur diamètre (d) est égal ou
supérieur à:
23. 23
La passerelle est constituée de 24
cadres verticaux espacés d'environ
2 m c/c. Pour dimensionner les
membrures en bois qui relient les
câbles porteurs au tablier de la
passerelle, on peut isoler l'un de ces
cadres (nous choisirons celui du
milieu où les membrures sont les
plus longues) et tracer le diagramme
de corps libre d'un point a situé au
centre du tablier. Quatre charges
convergent vers ce point: une
charge verticale correspondant à la
somme du poids de la structure et
de la charge d’utilisation (Pf), une
charge horizontale causée par le
vent (Hf) ainsi que deux forces de
compression, F1 er F2, dans les
membrures diagonales qui relient les
câbles porteurs au tablier.
F1
F2
4,7 m
4,7 m
4,1m
a
24. 24
La charge verticale (Pf) et la charge horizontale causée par le vent (Hf)
sont respectivement égales à:
À partir du diagramme de corps libre, on peut tracer le polygone de
forces au point a pour trouver les deux forces inconnues F1 er F2. On
trouve alors que la charge maximale de compression dans les poteaux
(Pf) est égale à 15,4 kN.
(b) polygone de forces(a) diagramme de corps libre
F1
3,9 kN
F2
4,7 m
4,7 m
4,1m
15,4kN
3,9 kN
=13,1kN
F
1
a
15,4 kN
=4,1kN
F2
25. 25
Pour faciliter les assemblages, les membrures diagonales sont
constituées de 4 pièces de bois carrées. Chacune de ces pièces doit
donc résister à une charge de compression de 3,3 kN (i.e. 13,1 kN/4).
Puisque l'on utilise du bois de sciage de très bonne qualité (de type
Sapin Douglass select structural), on consulte le tableau 2.8 et on
trouve que la contrainte admissible en compression (Fc) est égale à 9,5
MPa et que le module élastique (E) est égal à 8,5 MPa. En utilisant la
feuille EXCEL conçue pour le dimensionnement des profilés sur mesure
on en conclut que les membrures diagonales peuvent être constituées
par l'assemblage de 4 profilés de 65 x 65 mm (3" x 3").
29. 29
En 1999, trois ans seulement après sa construction, la passerelle
Traversina I s'est effondrée, emportée par une avalanche de neige.
Pour la remplacer une seconde passerelle a été construite 70 m plus
loin en 2005 et sa conception a été confiée au même ingénieur que la
précédente, Jürg Conzett. Cette nouvelle passerelle est en fait
constituée d'un escalier en bois suspendu à deux câbles caténaires.
L'escalier franchit une portée de 56 m avec 23 m de dénivelé.
30. 30
Deux systèmes ont été combinés pout assurer la stabilité de la
structure et lui donner une grande rigidité. On a d'abord choisi
d'utiliser des suspentes inclinées plutôt que verticales pour créer un
effet de triangulation qui donne à la structure plus de rigidité dans l'axe
vertical.
31. 31
Pour assurer la stabilité horizontale de la structure, et lui conférer une
bonne résistance aux charges de vent, on a par la suite choisi de disposer
quatre poutres en bois assez massive de chaque côté de la voie piétonne.
Ces poutres sont liées par des profilés en acier en forme de I dans l'axe
perpendiculaire et des tirants formant un juxtaposition de
contreventements en forme de X sous le tablier. Cette structure agit
comme une grosse poutre placée à plat qui reprend tous les efforts
horizontaux alors que tous les efforts verticaux sont transférés aux câbles
porteurs via les câbles de suspente inclinés. La série de huit poutres
placées de part et d'autre du tablier éloigne aussi le piéton du vide et, par
son aspect massif, dégage un sentiment de sécurité propre à rassurer le
promeneur.
32. 32
La charge morte de la structure (wD) est estimée à 5 kN/m et la charge vive
(wL) est toujours égale à 3 kN/m (i.e. la charge de neige à cet endroit). La
charge totale majorée (wF) est donnée par:
La charge totale supportée par chacun des deux câbles porteurs (W) se
calcule facilement:
33. 33
On connaît l'inclinaison souhai-
tée du câble à l'appui gauche
(une pente de 5:12) et on sait
que la force externe résultante
(300 kN) est située dans l'axe
vertical au milieu de la portée de
l'escalier. Sur le diagramme de
forme, ces deux droites se
croisent au point u. Puisque la
force externe forme, avec les
deux réactions d'appui, un
système de trois forces non-
parallèles, ces forces sont
situées sur 3 axes qui se
croisent forcément en un même
point (le point u). Sur le
diagramme de forme on peut
donc tracer une ligne qui relie le
point u au point d'appui à droite
de la structure pour trouver
l'inclinaison de la réaction
d'appui à cet endroit. En
reportant les deux lignes
pointillées sur le polygone de
forces, on trouve la position du
point focal o.
34. 34
On divise alors la portée
de l'escalier en bois en
dix intervalles de 5,6 m
(56 m/10) et on place
une force concentrée de
30 kN (300 kN/10) au
centre de chacun de ces
intervalles. On peut ainsi
compléter le polygone
de forces et tracer le
diagramme de forme du
câble caténaire. Le
polygone de force nous
révèle que la force de
tension maximale dans
le câble (Tf) est égale à
445 kN et qu'elle se
situe à l'extrémité droite
de la structure.
35. 35
En supposant que la contrainte admissible de l'acier (Ft) est égale à 1200
MPa. on peut alors calculer le diamètre minimal du câble (d) qui est
donné par:
Reste à considérer la réaction d'appui horizontale aux extrémités du
câble. Comme pour la passerelle Suransuns, cette composante est
transmise à l'assise rocheuse mais la force d'ancrage requise est environ
deux fois plus élévée que celle de la passerelle Suransuns. Cela
nécessite la construction de fondations importantes en béton qui sont en
partie enfouies dans le sol.
41. 41
Inauguré en 1962, le terminal de l'aéroport Dulles à Washington a été
conçu par Eero Saarinen. Le toit est constitué de dalles de béton de
10 cm d'épaisseur supportées par une série de câbles caténaires
espacé à 1,5 m c/c. L'extrémité des câbles est fixée à une poutre de
rive en béton armé qui ramène les efforts sur une série de poteaux
inclinés en béton armé espacés à 12 m c/c. La portée du toit
caténaire est de 65 m.
42. 42
On peut évaluer la charge morte de la toiture de la façon suivante:
dalles de béton: 24 kN/m3 x 0,1 m = 2,4 kN/m2
membrane imperméable : 0,3 kN/m2
revêtement de plafond : 0,3 kN/m2
mécanique : 0,25 kN/m2
wD = 3,25 kN/m2
Le poids la toiture (325 kg/m2) permet de stabiliser la toiture et de la
rendre peu sensible à l'effet de soulèvement causé par le vent. C'est
un choix délibéré car il aurait été possible de construire une toiture
beaucoup plus légère.
À Washington, la charge de neige est évaluée à 0,95 kN/m2. On
prendra donc en considération une charge vive de 1 kN/m2 ce qui
correspond à la charge minimale d'utilisation sur les toitures selon le
C.N.B. (c.f. tableau 2.4). La charge totale pondérée (wF) est donc égale
à :
43. 43
Comme les poteaux sont espacés à 12 m c/c, la charge totale supportée
par chacun des axes structuraux (W) est égale à:
Cette force résultante forme avec les deux réactions d'appui aux
extrémités du câble un système de trois forces non-concourantes qui se
croisent en un point. À partir de cette prémisse, Saarinen a envisagé
diverses combinaisons de hauteur et d'inclinaison des poteaux, jumelées
à diverses inclinaisons des câbles aux points d'appui, avant de retenir la
géométrie illustrée à la figure ci-dessous qui montre des proportions
harmonieuses. Le sommet des poteaux possède une forme arrondie et la
géométrie retenue fait en sorte que les câbles sont tangents à la courbe
des poteaux à leur point d'appui ce qui confère une grande élégance à
cet assemblage.
44. 44
Pour déterminer la forme
caténaire de la toiture, on
peut la diviser en 10 inter-
valles égaux de 6,5 m de
largeur et placer une
charge concentrée de 437
kN (i.e. 4370 kN/10) au
centre de chacun de ces
intervalles. En reprenant
l'inclinaison des câbles aux
points d'appui définie
précédemment, on peut
construire le polygone de
f o r c e s e t t r a c e r l e
diagramme de forme de la
structure (figure 3.136). On
constate que la forte
maximale de tension dans
la toiture caténaire est
égale à 7880 kN.
45. 45
Puisque les câbles porteurs sont espacés de 1,5 m c/c et que la
largeur tributaire de la structure est égale à 12 m, la force de tension
maximale dans un câble (Tf) est donnée par:
En supposant que l'acier utilisé pour les câbles possède une contrainte
admissible de 1200 MPa, la diamètre minimal des câbles est égal à:
46. 46
Pour cette structure, la composante horizontale des
câbles porteurs à leurs points d'appui est transmise
aux fondations par l'intermédiaire de poteaux
inclinés encastrés au sol. La figure ci-contre montre
les forces qui s'exercent sur le plus long des
poteaux inclinés. La force de tension dans le câble
au sommet du poteau (7880 kN) peut être
remplacer par deux composantes: l'un parallèle
(5250 kN) et l'autre perpendiculaire (5430 kN) à l'axe
du poteau qui les transfèrent à la fondation. La force
de tension dans le câble est excentrée p/r à la base
du poteau et génère un moment d'encastrement qui
est égal à la force multipliée par son bras de levier
(M = F x d):
Pour résister à ce gigantesque moment de flexion,
Saarinen a conçu des poteau en béton armé très
massifs avec un profil sculptural dont l'épaisseur
atteint 6 m à la bas. Ces éléments se comportent
comme des poteau-poutres puisqu'ils doivent
résister à l'action combinée des effort de
compression et de flexion qui les sollicitent.
47. 47
Le dimensionnement des pièces
en béton armé nécessitent
l'acquisition de connaissances
plus poussées qui ne sont pas
abordées dans cet ouvrage.
Pour les fins de la démonstra-
tion on peut cependant dimen-
sionner ce poteau comme s'il
était constitué d'un tube évidé
en acier fabriqué sur mesure. En
utilisant les feuilles EXCEL
prévues à cet effet notre choix
s ' a r r ê t e s u r u n p r o fi l é
rectangulaire de 0,6 x 4 m avec
des parois de 50 mm d’épais-
seur. L’équation d'interaction
nous donne que:
48. 48
On constate que la membrure se comporte
beaucoup plus comme une poutre que comme
un poteau puisque elle est sollicitée à 94% de sa
résistance à la flexion et seulement à 4% de sa
résistance à la compression. On constate aussi
que l'effort tranchant résistant du profilé (Vr =
54059 kN) est environ 10 fois supérieur à l'effort
tranchant causé par l'application des charges
externes (Vf = 5430 kN).
Il aurait été possible d'accroître très
significativement l'efficacité structurale des
poteaux en ajoutant un tirant qui vient
contrebalancer l'effort horizontal transmis par les
câbles caténaires au sommet du poteau. En
traçant le polygone des forces qui convergent
vers le sommet du poteau, on trouve que le
poteau supporterait une charge de compression
deux fois plus élevée (Pf = 10 500 kN) mais que,
en revanche, on éliminerait complètement le
moment de flexion.
49. 49
En utilisant la feuille EXCEL conçue pour les poteaux on constate que
l'on pourrait utiliser, par exemple, un poteau circulaire en acier de 850
mm de diamètre avec une paroi de 20 mm d'épaisseur pour lequel on
obtient Pr =10 640 kN > Pf). La section du poteau (A = 50 580mm2)
serait alors presque 9 fois inférieure à celle du poteau choisi
précédemment (A = 450000 mm2) ce qui représente une économie de
matériau très importante... mais qui ne servirait pas le parti
architectural du projet.
50. 50
En effet, c'est l'aspect massif et sculptural des poteaux en béton armé
supportant un mince voile flottant au-dessus de l'espace qui confère à
l'ouvrage tout son potentiel d'expression architecturale. À cet égard
l'alternative envisagée serait moins intéressante. Cela montre bien que,
parfois, la recherche de la plus grande efficacité structurale n'offre pas
pas la meilleure solution architecturale.
56. 56
Construit en 1996 à Hanovre
en Allemagne, le Hall 26 est
un centre de foire conçu par
Thomas Herzog. Le bâtiment
est constitué de trois toitures
caténaires d’environ 55 m x
115 m supportées par des
cadres triangulés en acier de
22,5 m de hauteur. La forme
de bâtiment a été choisie,
non seulement pour sa
grande efficacité structurale
qui permet de dégager de
grands espaces sans appuis
verticaux, mais aussi parce
qu'elle facilite la ventilation et
l'éclairage naturels.
57. 57
La toiture est constituée de panneaux sandwich en bois supportés par
une série de câbles caténaires espacés à 4,5 m c/c. Ces panneaux
sont remplis de gravier pour l'alourdir et lui conférer une bonne stabilité.
Dans chacune des trois travées, deux câbles stabilisateurs relient la
toiture aux treillis verticaux. Ces câbles restreignent la déformation de la
toiture et sont particulièrement efficaces lorsqu'il y a un amoncellement
de neige au point bas de la structure. Le poids de la toiture est estimé
à environ 100 kg/m2. Puisque la charge maximale de neige à Hanover
est de 0,85 kN/m2, on choisira comme charge vive la charge minimale
d'utilisation prévue par le C.N.B. qui est égale à 1 kN/m2. La charge
totale majorée (wF) est donc égale à:
58. 58
La charge supportée par chacun des
câbles caténaires est donnée par:
Pour trouver la forme du câble, on
peut le subdiviser arbitrairement en 10
intervalles égaux et placer une charge
concentrée de 68 kN (i.e. 680 kN/10)
au centre de chacun de ces inter-
valles. Sur le diagramme de forme on
place d'abord les deux points d'appui
que l'on relie par la corde de
fermeture et on trace une ligne hori-
zontale pointillée correspondant à
l'élévation du point le plus bas de la
courbe caténaire recherchée. On
place ensuite les points a à k sur le
polygone de forces.
K
10 forces de 68 kN
A B C G I JD E F H
a
b
c
d
e
f
g
h
i
j
k
(a) diagramme de forme
(b) polygone de forces
59. 59
Sachant que la charge est uniformément
distribuée sur la structure, on en déduit que
les réactions d'appui verticales sont les
mêmes aux deux extrémités du câble. Cela
signifie que la corde de fermeture croisera
l'axe vertical des charges externes à mi-
hauteur, ce qui signifie que le point z est
superposé au point f. À partir de ce point on
trace une ligne parallèle à la corde de
fermeture (c'est la ligne pointillée bleue) et on
place arbitrairement le point focal o sur celle
ligne. Après avoir complété le polygone de
forces, on trace le diagramme de forme pour
constater qu'il passe bien par les deux points
d'extrémité, mais que son point le plus bas
est situé en-dessous de la ligne pointillée. Ce
point le plus bas est situé juste en-dessous
de la force qui sépare les intervalles G et H.
Sur le diagramme de forces on trace alors
deux cordes qui relient le point le plus bas
aux deux points d'appui (ce sont les deux
lignes pointillées vertes). Sur le polygone de
forces on trace, à partir du point o, deux
lignes parallèles à ces cordes qui
interceptent l'axe vertical aux points x et y.
60. 60
On retourne alors au diagramme de
forme pour tracer deux cordes qui
relient le point le plus bas recherché
aux deux points d'appui (ce sont les
lignes pointillées rouge sur la figure).
Sur le polygone de forces on trace
deux lignes pointillées rouge qui sont
parallèles à ces deux cordes et qui
interceptent les points x et y sur
l'axe vertical. Ces deux lignes ainsi
que le prolongement de la corde de
fermeture se croisent en un point o
qui est le point focal recherché.
Il ne reste plus qu'à compléter le
polygone de forces et à tracer le
diagramme de forme pour obtenir le
profil de la toiture caténaire. On
constate que la force de tension
maximale dans le câble est égale à
1070 kN et qu'elle est située à
l'appui gauche.
61. 61
Il ne reste plus qu'à compléter
le polygone de forces et à
tracer le diagramme de forme
pour obtenir le profil de la
toiture caténaire. On constate
que la force de tension
maximale dans le câble est
égale à 1070 kN et qu'elle est
située à l'appui gauche. En
supposant que Ft = 1200 MPa,
on peut calculer le diamètre
minimal du câble (d) nécessaire
pour supporter cette charge:
62. 62
Tâchons maintenant de dimensionner le cadre
triangulé qui supporte la toiture et dont on
assume que les points d'appui sont rotulés.
On constate que chaque cadre supporte une
largeur tributaire de 11,25 m([18+4,5]m/2).
Les charges transmises au cadre par la toiture
caténaire sont donc respectivement égales à
2675 kN (i.e. 1070 kN x 11,25m/4,5m) et
2440 kN (i.e. 975 kN x 11,25m/4,5m).
Dans un premier temps on trace le
diagramme de corps libre de la structure en
indiquant les trois réactions d'appui
inconnues R1, V2 et H2. Pour calculer la
réaction d'appui H2, on fait la somme des
moments au point a et on trouve que:
63. 63
Pour obtenir les deux autres
réactions inconnues (R1 et V1), on
trace simplement le polygone des
forces qui sollicitent le cadre et on
trouve:
R1 = 2525 kN et V2 = 4025 kN.
64. 64
M a i n t e n a n t q u e l e s
réactions d'appui sont
connues, on peux tracer le
diagramme de forme en y
indiquant la notation par
intervalles. À partir de ce
diagramme, on trace le
polygone de forces pour
obtenir les efforts internes
dans les membrures. Sur
ce polygone, les efforts
externes sont représentés
en rouge ce qui nous
permet de constater que
les efforts internes dans les
membrures sont importants
comparativement aux
charges externes. Ces
efforts sont représentés sur
le diagramme des efforts
internes.
65. 65
Contrairement aux autres, le
cadre triangulé à l'extrémité
gauche du bâtiment ne
supporte qu'une seule série
de câbles caténaires. En
répétant l'analyse graphique
de la structure pour ce
chargement on obtient les
résultats présentés à la
figure ci-contre.
66. 66
On constate que la charge de compression maximale dans la membrure
verticale est égale à 7000 kN alors que la charge de tension maximale
dans les membrures diagonales est égale à 6375 kN. Le concepteur a
choisi d'utiliser des profilés évidés carrés en acier pour construire les
cadres triangulés. En consultant le tableau de profilés standard on
constate que le plus gros profilé disponible sur le marché nord-
américain (HSS305x305x13) possède une résistance à la compression
(Pr) de 1881 kN pour les conditions données (k =1 et L = 12 m) ce qui
est nettement inférieure à la charge appliquée (Pf = 7000 kN).
On utilise donc la feuille de calcul EXCEL destinée à calculer la résistance
à la compression de profilés sur mesure. Notre choix s'arrête sur un
profilé carré de 450x450x19 mm pour lequel on trouve que Pr = 7311
kN > 7000 kN.
Pour les membrures sollicitées en tension on choisira un profilé de
même dimension (450x450 mm) mais avec une paroi plus mince.
Comme les membrures tendues ne sont pas sujettes au flambement, on
peut utiliser la feuille EXCEL conçue pour les poteaux mais en utilisant
une valeur de flambement Lx = Ly = 0. On choisit alors un profilé de
450x450x12 mm pour lequel Tr = 6622 kN > 6325 kN.