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SOMMAIRE
Introduction Générale………………………………………………………………… 5
Première partie : Le principe de la responsabilité du transporteur maritime de
marchandises au Sénégal et en France……………………………..………………
11
Chapitre I : La qualité de transporteur maritime au Sénégal et en France ……… 13
Section I: Des fondements textuels différents……………..…….................................... 13
Section II : Notion de transporteur maritime de marchandises …………………………. 21
Chapitre II : L’étendue de la responsabilité du Transporteur maritime de
marchandises au Sénégal et en France………….…………………………………….
27
Section I : DU SECTIONNEMENT A L’UNITE JURIDIQUE DU CONTRAT DE TRANSPORT
MARITIME …………………………………………………………………………..
28
Section II L’EXTENSION DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR PAR LES REGLES
DE HAMBOURG ET CMM DE 2002 ………………………………………………………
33
Deuxième partie : La mise en œuvre de la responsabilité du transporteur maritime
de marchandises au Sénégal et en France ……….…………………………………….
39
Chapitre I : Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité…………………. 41
Section I : Les conditions proprement dites……………….…………………………… 41
Section II : Les causes d’exonération de responsabilité et leur neutralisation …………. 44
Chapitre II : La limitation de responsabilité et l’action en responsabilité …………. 52
Section I : La limitation de responsabilité du transporteur maritime de marchandises … 52
Section II : L’action contre le transporteur maritime de marchandises.. 60
Conclusion Générale……………………………………………………………………… 65
2
ABREVIATIONS
COCC : Code des Obligations Civiles et Commerciales
CMM : code de la marine marchande
CNUCED : conférence des nations unies sur le commerce et le développement
CNUDCI: commission des nations unies pour le droit commercial international
COCC: code des obligations civiles et commerciales
DMF : droit maritime français
DTS : droit de tirage spécial
JORS : journal officiel de la république du Sénégal
NU : nations unies
NVOCC : non vessel operating common carrier
OMI : organisation maritime internationale
PAD : port autonome de Dakar
PVD : pays en voie de développement
SCGMI : société de courtage et de gestion maritime ivoirienne
SOAEM : société ouest africaine d’entreprises maritimes
3
Résumé
Le droit de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises est l’ensemble des règles
qui régissent la responsabilité du transporteur maritime . Ce droit a considérablement
évolué du fait notamment de la place que le transport maritime s’est créé aujourd’hui dans le
commerce international.
En effet , le transport maritime à lui seul représente 90% des échanges commerciaux
internationaux.
Au Sénégal ce régime de responsabilité a été pendant longtemps régi par le code de la marine
marchande du 22 mars 1962, fortement inspiré par la convention de Bruxelles du 25 août 1924,
mais à laquelle le Sénégal était partie, aujourd’hui son régime de responsabilité est régi par la
convention de Hambourg que le Sénégal a ratifié en 1986 et auquel son code de la marine
marchande est venue s’aligner par une modification en 2002.
Quant à la France, son régime de responsabilité est régi en droit international par la convention
de Bruxelles de 1924, et en droit interne par la loi du 18 juin 1966 et son décret d’application
du 31 décembre de la même année.
Ainsi les régimes appliqués en France comme au Sénégal mettent en place un système de
responsabilité fondé sur le même principe (responsabilité limitée à la charge du transporteur de
même que des cas d’exonération de responsabilité, délai de prescription de l’action ….), mais
qui sont différents dans le fond, le régime de la Convention de Hambourg étant plus favorable
aux chargeurs que celui de la convention et donc un système de responsabilité plus sévère à
l’égard du transporteur.
4
Abstract
The law concerning the responsibility of the goods shipping company involves all the rules
that take into account the responsibility of the shipping agent. This law has evolved
considerably because of the place sea transport has built up in the international trade today.
Indeed, shipping alone represents 90% of international trades.
In Senegal, this system of responsibility has been governed for long by the Merchant Navy
Code on the twenty second of March, 1962, strongly inspired by Brussels Convention on the
twenty fifth august, 1924. But Senegal left it. Today, the system of responsibility is governed
by Hamburg Convention which was ratified in 1986 by Senegal and matched the Merchant
Navy Code thanks to an amendment in 2002.
When it comes to France, on international law, the system of responsibility is based on
Brussels Convention and on domestic law by the law of June 18, 1966 and a decree specifying
how it should be enforced on December of the same year.
Then, the rules applied in France and in Senegal organize a system of responsibility based on
the same principle (limited responsibility for the shipper as well as cases of exemption from
responsibility, action limitation period). But they are different in substance because Hamburg
Convention is more favorable to the loaders than the system of the convention. Then it has a
system of responsibility that is harsher on the shipping company.
5
6
Le droit des transports de marchandises (par mer) se définit comme l’ensemble des
règles qui régissent le déplacement d’une marchandise d’un port à un autre port par la voie de
la mer.
Aujourd’hui, le transport maritime est un des plus précieux outils du commerce
international ; il représente, à lui seul, plus de 90 % des échanges commerciaux
internationaux. Il est, en lui-même, hautement international, comme le sont d'ailleurs ses
modes d'opérations. La plupart des problèmes et questions de politique, liés au transport
maritime, transcendent les frontières nationales. Ainsi, le transport maritime constitue l'un des
secteurs vitaux de l'économie dont la gestion optimale passe inévitablement par une
coopération entre états, notamment au niveau de régions bien définies, et à l'échelle
internationale, à savoir : l'OMI1
, la CNUCED.
Le commerce maritime quant à lui, est un domaine assez vaste, impliquant plusieurs
acteurs (transporteurs, chargeurs, manutentionnaire) et ayant d’importants enjeux
économiques, d’autant que les opérations de transport sont assez souvent source de dommages
quant aux marchandises transportées et par conséquent un régime juridique de responsabilité
lui est applicable. Généralement cela implique des professionnels engendrant de ce fait la
conclusion de contrat de transport maritime de marchandises qui peut être défini comme le
contrat par lequel le transporteur s’engage à transporter d’un point à un autre une cargaison
déterminée contre le paiement d’un fret.
Ce droit des transports de marchandises s’est construit autour de la notion du risque
de mer en raison des aléas que l’on peut rencontrer en mer durant la phase de transport et
pouvant avoir d’importants enjeux financiers sur une expédition de marchandises ou la
cargaison d’un navire, notamment en cas de perte ou de dommages.
Au Sénégal comme en France le législateur s’est depuis longtemps attelé à préciser
très clairement les obligations et la part de responsabilité des différents acteurs de l’opération
de transport, plus particulièrement celle du transporteur maritime de marchandise. Le régime
de responsabilité qui fera l’objet de notre étude, plus précisément le régime de responsabilité
du transporteur maritime de marchandises s’appliquera au Sénégal et à la France. Ainsi
chaque pays (le Sénégal comme la France) dispose de textes spécifiques en la matière, pour
1
OMI : ORGANISATION MARITIME INTERNATIONALE
7
régler tous les problèmes liés au transport maritime de marchandises notamment aux
questions de responsabilité
De ce fait, il existe une diversité juridique qui est le fruit d’un long conflit d’intérêts
entre armateurs et chargeurs.
La France a toujours été une grande puissance maritime d’ou l’ancienneté de ses règles
de transport maritime. Déjà, le Droit Romain consacrait la responsabilité de l'armateur (le
"nauta") pour les dommages causés aux marchandises et aux bagages des passagers ; C’est un
principe de responsabilité de plein droit la force majeure2
étant l’exception.
Dans l'Ancien Droit, on ne retient pas cette responsabilité de plein droit. On retrouve
plutôt la responsabilité pour faute prouvée qui est retenue par le « Consulat de la Mer ».
Quant à l'Ordonnance de la Marine de 1681, elle mettait l'accent sur la responsabilité
du Capitaine, l'armateur ne paraissant responsable que par son intermédiaire.
Le Capitaine est « responsable de toutes les marchandises chargées dans son bâtiment »3
Aussi le droit français de 1808 à 1936 était-il gouverné par le Code de Commerce
notamment par l'article 222 qui dispose en son alinéa 1er
que le Capitaine « est responsable
des marchandises dont il se charge » et par l'article 230 qui précise que "la responsabilité du
Capitaine ne cesse que par la preuve d'obstacles de force majeure".
En d’autres termes le capitaine ne se libère de sa responsabilité qu'en faisant la preuve
d’un cas fortuit ou de force majeure, le vice de la chose ou la faute du chargeur4
, ce régime
étant donc plus sévère (loi de 36 et loi de 66 puis droit international).
Sur le plan international, la France adoptera une grande convention internationale qui
régit actuellement son transport international, il s’agira de la Convention internationale pour
l'unification de certaines règles en matière de connaissement, appelée règles de la Haye signée
2
R. RODIERE, "Traité Général de Droit Maritime", Affrètements & Transports, Tome II, n°574;
3
Ordonnance de la Marine de 1681, art 9
4
R. RODIERE, "Traité Général de Droit Maritime", Affrètements & Transports, Tome II, n°576
8
à Bruxelles le 25 août 1924, et entrée en vigueur le 2juin 1931 ;texte qui marque un tournant
important dans le droit du transport maritime international.
Par la suite en droit français, on adoptera la loi du 9 avril 1936, loi qui sera remplacée
plus tard par celle du 18 juin 1966 intitulée « « loi sur les contrats d'affrètement et de
transport maritimes qui aujourd’hui régit le transport maritime interne de la France ainsi que
son décret d’application du 31décembre de la même année ; les deux textes venant ainsi
aligner le droit interne au droit internationale c’est à dire la convention de 1924.
Cette évolution du droit maritime français influence en grande partie le Sénégal en
raison des rapports séculaires qui le lient à France, ancienne puissance coloniale. Le Sénégal,
pays de plus de 11 millions d’habitants5
avec une superficie de 196.200 kilomètres carrés, se
situe à l’extrême ouest du continent africain.
Le pays dispose en outre de 530 kilomètres de côte représentant ainsi une importante
façade maritime à l’ouest avec l’atlantique.
De par la position géographique du pays, le port de Dakar (capitale du Sénégal)
bénéficie d’un avantage géographique aussi exceptionnel, car situé sur la pointe la plus
avancée de la côte ouest africaine. Il est ainsi un véritable carrefour pour de nombreuses
voies maritimes entre l’Amérique du nord, l’Europe, l’Amérique latine et le continent
africain ; d’où le slogan du port autonome de Dakar (PAD) de : port océane de l’Afrique. En
outre, le PAD est le premier port en eau profonde touché par les navires venant du nord et le
dernier port touché à l’entrée par les navires provenant du sud.
Contrairement à de la France, on constate au Sénégal qu’il n’existe, dans le domaine du
transport maritime, qu’une seule loi particulière. C’est pourquoi les juges vont recourir au
droit commun pour résoudre le contentieux maritime. La base légale est essentiellement
constituée de Code des Obligations Civiles et Commerciales6
et le CCM (code de la marine
5
Statistiques nationales de l’année 2000.
6
IBRAHIMA KHALIL DIALLO le contentieux maritime devant le juge tome I éditions juridiques africaines
Dakar 1992 P 123
9
marchande), s’il s’agit d’un transport interne, et aux conventions internationales pour ce qui
concerne les transports internationaux.
En effet ce n’est qu’après son indépendance (4 avril 1960) que le Sénégal a adopté un
texte de droit maritime qui lui est propre en matière. Il s’agira du Code de la Marine
Marchande (CMM) du 22 mars 19627
, texte fortement inspiré de la convention de 1924 sur le
transport sous connaissement à laquelle le Sénégal était liée, ce code abrogeant de ce fait les
textes internes antérieurs contraires.
Par la suite le Sénégal a adhéré à la convention adoptée le 31 mars 1978, et entrée en
vigueur le 1er
novembre 1992 ; c’est « la Convention des Nations unies sur le transport de
marchandises par mer », plus communément appelée « Règles de Hambourg ».
L’esprit de cette convention est différent de celui de la convention de 1924 . Or, pendant
longtemps le Sénégal n’a pas adopté de texte de droit interne qui venait s’aligner aux règles
de Hambourg (comme l’impose le principe de la hiérarchie des normes). Le CMM restait
encore le seul texte d’application en droit interne sénégalais, alors que, comme nous l ‘avons
souligné, le CMM est fortement inspiré par la convention de 1924, texte qui n’était plus
d’application au Sénégal.
De ce fait, se posait un problème d’application et d’interprétation des textes
concernant la responsabilité du transporteur maritime de marchandises au Sénégal (entre le
droit interne et le droit international ) , problème qui ne se pose pas en France pays qui n’est
pas lié par les règles de Hambourg.
Ce n’est que 40 ans plus tard que le Sénégal décida enfin de modifier son CMM pour
une conformité avec les Règles de Hambourg, ce par une loi N° 2002-22 du 16aout 2002
portant code de marine marchande. Ainsi on retrouvera une certaine fraîcheur dans ce
nouveau texte et une certaine harmonie avec le droit maritime international, ce qui semblait
bien évidemment nécessaire au vu de l’évolution considérable du domaine maritime depuis
ces 40 dernières années qui rendaient le texte de 1962 inapproprié aux réalités du monde
7
Code de la marine marchande de la loi n° 66.32 du 22 mars 1962 JORS du 14mai 1962 p.787s
10
maritime sénégalais. Ce, notamment en matière de responsabilité du transporteur maritime de
marchandises objet de notre étude.
L’analyse de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises dans une
approche comparative entre le droit sénégalais et le droit français pose de nombreuses
interrogations. Quelle est l’incidence de l’application des règles de responsabilité de la
convention de Hambourg sur le droit du transporteur maritime sénégalais ?
Qu’en est-il du régime de responsabilité pour la France ? Et enfin quels rapprochements peut
on faire entre les deux droits internes?
La responsabilité du transporteur maritime étant un domaine assez large, chacun des
deux pays disposant de ses propres législations en la matière. Il nous faudra donc, pour
répondre à ces questions d’abord délimiter le régime de responsabilité du transporteur
maritime de marchandises applicable au Sénégal et en France (I) puis ensuite étudier les
règles de mise en œuvre de cette responsabilité propre à chacun des deux pays (II).
11
LE PRINCIPE DE LA RESPONSABILITE DU
TRANSPORTEUR MARITIME DE
MARCHANDISES AU SENEGAL ET EN
FRANCE
12
Les contrats varient souvent selon les obligations qui pèsent sur les parties, il peut y
avoir soit une obligation de moyen c’est à dire que le débiteur ne s’engage pas à un résultat
précis, mais à faire tout le nécessaire pour exécuter son obligation) ; soit une obligation de
résultat (le débiteur dans ce cas s’engage comme son nom l’indique à atteindre un résultat à
défaut, il pet être déclaré comme responsable).
Par le contrat de transport, chacune des parties s’engage à exécuter ses obligations, le
transporteur s’engage en ce qui le concerne à acheminer les marchandises d’un port à un
autre, ce dans les conditions requises par les textes que ce soit pour un transport interne que
pour un transport international (exemple : obligation de soins appropriées….), c’est une
obligation de résultat qui pèse ainsi sur le transporteur maritime de marchandises.
Mais, pour étudier l’étendue de ses obligations, il faut d’abord cerner la notion même
de transporteur maritime telle que définie par les textes de droit interne et les textes
internationaux (Chapitre I) puis délimiter l’étendue ( dans le temps) de la responsabilité du
transporteur maritime de marchandises (Chapitre II) qui varie selon que ce soit en droit
sénégalais ou en droit français.
13
Chapitre premier : La qualité de transporteur maritime de
marchandises au Sénégal et en France
Le transporteur maritime de marchandises est en principe la personne qui s’engage
contractuellement à acheminer la marchandise confiée à lui par le chargeur d’un port à un
autre. Ainsi en cas de manquement à ses obligations contractuelles il peut engager
contractuellement sa responsabilité.
Mais il peut arriver, aussi bien au Sénégal qu’en France, des situations dans lesquelles
la personne qui se dit transporteur n’a pas réellement cette qualité, ce qui peut avoir des
conséquences sur le régime de responsabilité applicable au transporteur.
D’où la nécessité de déterminer la notion de transporteur au Sénégal et en France
(Section II). Mais pour cela il faudra d’abord déterminer les fondements textuels de la
responsabilité du transporteur maritime au Sénégal et en France (Section I).
SECTION 1 : DES FONDEMENTS TEXTUELS DIFFERENTS
Ces fondements sont différents dans les deux pays ; en France , on applique la
convention de Bruxelles de 1924 , et la loi interne du 18 juin 1966 ainsi que son décret
d’application de décembre de la même année. Quant au Sénégal, on y applique aujourd’hui
les règles de Hambourg de 1978 ,et en droit interne, le CMM. D’où l’étude d’abord des textes
internationaux, puis des textes de droit interne applicables dans chaque pays.
§ 1 : Les textes internationaux applicables en France et au Sénégal
Au Sénégal et en France deux textes internationaux sont applicables en matière de
responsabilité du transporteur maritime. Il s’agira d’une part de la convention de Bruxelles
de1924 pour la France et, d’autre part, des règles de Hambourg pour le Sénégal.
14
A- La convention de Bruxelles de 1924
La convention de Bruxelles originelle a été signée à Bruxelles le 25 août 1924 et est
entrée vigueur le 2 juin 1931. Communément appelée « règles de la Haye » ou Hague
Rules » selon les anglophones ; cette convention pour « l’unification de certaines règles en
matière de connaissement » a été approuvée en France par la loi du 9avril 1936 et
promulguée par un décret du 25 mars 1937. Elle a aussi régi pendant longtemps le droit
sénégalais de la responsabilité du transporteur maritime, ce jusqu’à l’adoption définitive des
règles de Hambourg.
Cette convention de droit substantiel, a un caractère impératif8
et est en quelque sorte
le droit commun de la responsabilité du transporteur maritime au plan international. Elle est
venue créer en quelque sorte un équilibre entre intérêt des chargeurs et des transporteurs, et
prévoit pour celui-ci 17 cas d’exonérations de responsabilité.
Elle a connu deux modifications par les protocoles modificatifs.
La première a été faite par le protocole de Visby du 23 février 1968 qui est entré en
application le 23 juin 1977, et en France le 10 juillet de la même année et qui vient modifier
les articles 3 et 4 de la convention originelle en augmentant le montant de la limitation de la
réparation, protocole qui n’a pas recueilli un nombre important de ratifications (environs un
tiers des états qui ont ratifié la convention originelle).
Le second protocole est celui du 21 décembre 1970 : qui s’est avéré indispensable avec
la réforme du système monétaire international de 1978 avec l’abandon de l’or comme
monnaie de référence au profit du DTS avec toujours très peu de ratifications, la France l’a
ratifié le 18 novembre 1984.
Cette convention a institué pour le transporteur maritime un régime de responsabilité de
plein droit ; et ce à son article 3, ce qui veut dire qu’en cas de dommage inconnu, le
transporteur est présumé responsable, à charge pour lui d’apporter la preuve contraire. Donc
on a une présomption de responsabilité qui pèse sur le transporteur maritime de marchandises
8
Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 572 § 888
15
faisant présumer que jusqu’à preuve contraire de sa part, il a mal exécuté son obligation de
résultat auquel il est tenu ; tel est l’esprit de la convention de Bruxelles.
Reste que le transporteur pourra s’exonérer s’il peut établir l’existence d’un cas excepté
prévu par la convention et qui sont des causes d’exonération de responsabilité du transporteur
maritime, à défaut, la présomption de responsabilité demeure, c’est dans ce sens que va une
décision de la Cour de Cassation du 4 mars 20039
.
Cependant il n’en va pas de même pour les Règles de Hambourg.
B- Les Règles de HAMBOURG de 1978
Adoptée le 31mars 1978, « la convention des NU sur le transport de marchandises par
mer » ou Règles de Hambourg, du nom de la ville où elle a été signée est entrée en
application le 1er
novembre 1992 entre les pays qui l’ont ratifiés y compris le Sénégal qui l’a
ratifié par une loi n°86.11 du 24 janvier 198610
. L’initiative de cette convention vient de
l’intervention de la CNDCI et de la CNUCED sur demande des PVD notamment les pays de
chargeurs qui considéraient la convention de Bruxelles comme trop favorable au transporteur
maritime.
Comme prévu ce texte apporte un certain nombre de modifications avec notamment :
• Une responsabilité qui demeure mais qui repose sur la présomption de faute du
transporteur et non de responsabilité cette règle se retrouve à l’art 5§1 de la
convention qui dispose que « Le transporteur est responsable du préjudice résultant
des pertes ou dommages subis par les marchandises ainsi que du retard à la livraison,
si l'événement qui a causé la perte, le dommage ou le retard a eu lieu pendant que les
marchandises étaient sous sa garde au sens de l'article 4 ».
• La suppression de nombreux cas exceptés qui venaient alléger la responsabilité,
du transporteur dans la convention de 1924.
• L’introduction de la responsabilité du fait du retard.
9
Cour de Cassation du 4mars 2003 navire NL Crète9
DMF 2003 .1096
10
Journal officiel de la république du Sénégal (JORS) 1986 p 631
16
• Le délai de prescription passe à deux ans au lieu d’un an comme prévu dans la
convention de 1924.
• Extension de son domaine d’application aux transports d’animaux vivants et aux
transports en pontée, ce qui était exclu dans Bruxelles .
• La majoration du montant de la limitation de réparation.
Cependant cette convention ne fait pas le poids devant celle de Bruxelles car elle n’a
reçu que 32 ratifications depuis son élaboration, chiffre ne représentant qu’un et demi pour
cent du tonnage de la flotte mondiale et ne comptent parmi eux aucune grande puissance
maritime11
. Ainsi les règles de Hambourg sont loin de leur objectif premier qui était de
remplacer à terme la convention de 1924.
Pour que le texte de la convention de Hambourg entre en vigueur il fallait au moins 20
ratifications, chiffre atteint qu’en 1992 ce qui fait qu’au Sénégal on continuait à appliquer la
convention de Bruxelles de 1924 à laquelle le Sénégal était liée (avant la ratification des
règles de HAMBOURG) par ratification par une loi n° 77.118 du 26 décembre 197712
.
§ 2- Les textes de droit interne
La France, grande puissance maritime s’est très vite dotée de textes concernant le
transport maritime, plus précisément de lois qui règlent les questions de responsabilité du
transporteur maritime.
Parallèlement la législation sénégalaise est pauvre en la matière. Le seul grand texte de droit
interne reste le CMM.
A- Les dispositions de droit interne en France
Déjà le droit romain consacrait le principe de la responsabilité de plein droit de
l’armateur. Puis on a l’ordonnance de la marine de 1681 et le code de commerce de 1807 qui
11
Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 576 § 896
12
JORS du 21 janvier 1978 p 787S
17
assimilaient le contrat de transport à l’affrètement, mais ces textes n’avaient pas d’effet
impératif13
.
Ces textes étant anciens ; avec l’entrée en vigueur de la convention de 1924, il fallait
harmoniser le droit français avec la convention internationale, ainsi le premier grand texte en
matière de responsabilité du transporteur en France sera la loi du 12 avril 1936.
Mais ce texte ne répondait pas réellement à ses objectifs, car il ne transpose pas
véritablement la convention de 1924 en droit interne français. Donc une réforme est vite
apparue nécessaire au législateur français.
D’où la loi n° 66.420 du 18juin 1966 et ses décrets d’application :
Le décret n° 66.1078 du 31 décembre 1966 qui introduit des dispositions concernant
les réserves faites par le transporteur et le mode de calcul des limitations au kilo.
Et le décret du 12 novembre 1967 qui vient préciser le mode de calcul du montant de
la limitation par colis en cas d’utilisation de conteneur ou de palette.
Cette loi intitulée loi « sur les contrats d’affrètement et de transport maritime » a connu
plusieurs modifications, dont la dernière a été faite par une loi n° 87.922 du 23 décembre
1986, avec toujours le soucis d’harmoniser le droit français avec le droit international, objectif
atteint dans l’ensemble, évitant au maximum les conflits entre le droit interne et la
convention.
L’objectif de cette modification était de rapprocher le droit interne de celui de la
convention de 1924, telle que amendée par les protocoles modificatifs.
Comme la convention de 1924, elle pose le principe de responsabilité de plein droit
du transporteur maritime de marchandises, ce à son article 27 qui dispose que : « Le
transporteur est responsable des pertes ou dommages subis par la marchandise depuis la
prise en charge jusqu'à la livraison, à moins qu'il ne prouve que » le dommage est causé par
un des cas exceptés prévus.
13
Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 574§892
18
Donc on trouve une certaine uniformisation de la loi de 1966 avec la convention de
1924.
Au Sénégal cela s’est fait différemment.
B- Les dispositions de droit interne sénégalais
Avant l’indépendance du Sénégal en 1960, on appliquait dans le pays les règles
françaises de droit maritime du fait que le Sénégal était encore une colonie française, donc
soumise au droit français. Après l’indépendance le pays va mettre en place le premier grand
texte qui règle les questions maritimes ; il s’agira du CMM.
Donc le transport maritime sénégalais est aujourd’hui régi par le CMM sénégalais dont
la première version date du lendemain de l’indépendance : c’est le CMM du 22 mars 1962,
qui gouvernera le droit maritime sénégalais jusqu’en 2002 et dont les dispositions sont
fortement inspirées de la convention de Bruxelles de 1924.
En principe, lorsqu’un Etat ratifie la convention de Hambourg du 31 mars 1978, celle-
ci devient par dénonciation dans les 5 ans de la convention de Bruxelles , partie intégrante de
son droit positif, la convention de Bruxelles se trouvant alors abrogée. C’est dans ce sens que
va un arrêt du tribunal régional de Dakar du 1er
juillet 1989 NAVIRE AMAZONE. Il
s’agissait d’un transport de 10.000 douzaines de couteaux d’Abidjan à Dakar. Un recours a
été exercé par la société nationale d’assurance mutuelle dite SONAM contre la société de
courtage et de gestion maritime ivoirienne (CGMI) et la SOAEM pour qu’elles soient
déclarées responsables des manquants et avaries constatés sur la cargaison destinée à la SST.
Dans cette affaire, les marchandises ont été livrées le 16juillet 1987, et la SONAM a
intenté son action le 18juillet 1988, le CMM inspiré de la convention de Bruxelles prévoyait
une prescription annale pour les actions en responsabilité contre le transporteur maritime de
marchandises.
Le juge dans son analyse, a retenu que cette prescription annale a été modifiée par
l’article 20 de la convention de Hambourg intégrée au droit positif sénégalais depuis la loi du
24 janvier 1986, article qui prévoit un délai de prescription de deux ans à partir de la livraison
ou du jour où elle aurait dû avoir lieu.
19
Décision très critiquable dans le sens où la convention de Hambourg n’était pas encore
entrée en vigueur, étant donné qu’elle n’avait pas atteint le nombre de 20 ratifications
nécessaires à son entrée en vigueur, seul le délai d’un an prévu par la convention de Bruxelles
de 1924 et par le CMM, textes en vigueur à l’époque aurait dus être appliqués. En outre,
l’article 17 de la constitution sénégalaise prévoyait à son alinéa 2 que les traités et accords
internationaux « ne prennent effet qu’après avoir été ratifiés ou approuvés ». L’action était par
conséquent prescrite en l’espèce.
En outre le CMM de 1962 prévoyait, à son art 327, ce à l’image de l’article 10 de la
convention de Bruxelles que ces dispositions « sont applicables à tout connaissement créé au
Sénégal ». Ce qui peut être critiquable c’est le recours systématique au CMM car la règle est
que la convention de Bruxelles devrait s’appliquer dès lors que le connaissement a été émis
dans un pays contractant et que le transport est international, donc trois conditions :
• Emission d’un connaissement
• Connaissement émis dans un état contractant
• Et un transport entre deux pays différents
Or, le CMM, règle de droit interne ne devra s’appliquer que si le connaissement a été
émis au Sénégal, que le transport soit interne ou international non régi par la convention de
1924.
En effet quand on analyse la loi française du 18 juin 1966, elle prévoit que ses dispositions
s’appliquent à tout transport maritime au départ ou à destination d’un port français. D’où une
nécessaire réforme de l’article 327 du CMM qui en effet est une mauvaise transposition de
l’article 10 des règles de la Haye.
Plusieurs décisions des juridictions sénégalaises, après avoir constatés que le
connaissement avait été émis à l’étranger, dans un pays ayant adhéré aux règles de la HAYE
(trois conditions d’application de la convention de Bruxelles), ont tout de même appliqués le
20
CMM, on peut citer en exemple le jugement du tribunal régional de Dakar du 14 novembre
198714
.
Dans cette affaire après avoir constaté l’émission d’un connaissement à Abidjan (la Côte
d’Ivoire ayant adhéré à la convention de 1924) pour un transport de 22 colis de feuilles
contreplaqués à destination de Dakar, le juge sénégalais a tout de même appliqué la LEX
FORI (CMM sénégalais) alors que toutes les conditions étaient réunies pour l’application
des règles de la Haye. Le juge a donc mis au profit sa loi nationale.
Mais il faut noter cependant que ce n’est pas pour autant que le CMM du Sénégal ne
s’appliquait pas à un transport international. En effet, à partir du moment où le connaissement
a été émis au Sénégal, on pouvait appliquer le CMM.
Donc au regard de ces lacunes, il a fallu réformer le CMM notamment son art 327, ce qui
fut fait avec la modification du code de 1962 par une loi No 2002-22 du 16 Août 2002
portant Code de la Marine Marchande. Entre autres raisons, près d’une vingtaine de décret
ont été pris pour l’application du code de 1962, entraînant une dispersion de la réglementation
maritime sénégalaise. Aussi en quarante ans, le transport maritime a connu des évolutions
considérables, d’où le besoin d’adaptation du texte de 1962.
Ainsi, pour éviter les problèmes d’interprétation rencontrés dans le code de 1962, le code
de 2002 a, dans son article 442, modifié l’art 327 du CMM de 1962 en des termes plus
appropriés en disposant que « Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux
transports effectués au départ ou à destination d’un port sénégalais » dans un chapitre intitulé
le contrat de transport de marchandises par mer.
L’autre apport du CMM de 2002 du Sénégal, c’est que les règles de Hambourg étant
entrées en vigueur définitivement en 1992, ce code de 2002 est venu s’aligner à ces règles
pour une conformité du droit interne sénégalais à son droit international, la convention de
1924 n’étant plus d’application.
14
Tribunal régional de Dakar jugement n°2058 du 14 novembre 1987 (ETS I Kary c/ Sté navale Transafric et
autres navire « FREDERIQUE LEONIE »
21
De ce fait le code de 2002 a apporté des réformes importantes et permis une
harmonisation avec le droit maritime international sénégalais régi par la convention de
Hambourg.
Concernant les règles de responsabilité du transporteur, le nouveau CMM de 2002 a
adopté une solution simple ; en effet, elle stipule dans son article 453 que « Dans le cadre du
présent code le régime de responsabilité du transporteur et du chargeur, la prescription et les
règles de compétence sont ceux régis par la Convention des Nations Unies sur le transport de
marchandises par mer de 1978 ». Le droit interne sénégalais fait un renvoi pur et simple aux
dispositions des règles de Hambourg sur la responsabilité du transporteur maritime de
marchandises.
Quid de la conception de la notion de transporteur maritime au Sénégal et en France ?
SECTION 2 : NOTION DE TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES AU SENEGAL ET EN
FRANCE
Dans un contrat de transport il y a plusieurs acteurs, et pour définir le régime de
responsabilité, il faut définir le rôle et la fonction de chacun d’eux. Ainsi il faut définir la
notion de transporteur maritime et par là, ce qu’est un transporteur substitué notion nouvelle
apporté par les règles de Hambourg
§ 1 Notion de transporteur maritime
Ici il faut distinguer entre le transporteur maritime proprement dit , et les autres personnes
pouvant avoir cette qualité.
A- Le transporteur maritime proprement dit
Dans les règles de Hambourg, le transporteur maritime désigne toute personne par
laquelle ou au nom de laquelle un contrat de transport de marchandises par mer est conclu
avec un chargeur15
. Dans le CMM du Sénégal on ne retrouve pas de définition du terme
15
Article 1er
§1 des règles de Hambourg
22
transporteur, on suppose qu’il renvoit simplement aux règles de Hambourg comme en matière
de responsabilité .
Dans la convention de Bruxelles de 1924, on retrouve une définition similaire qui
dispose que « Transporteur » comprend le propriétaire du navire ou l'affréteur, partie à un
contrat de transport avec un chargeur16
.
Généralement l’identité du transporteur figure dans le document de transport, plus
précisément dans le cadre supérieur droit. De ce fait quand l’identité du transporteur est
établie dans ce document, si le transport a engendré des dommages, le tiers porteur du
connaissement ( document de transport) devra donc demander réparation au transporteur dont
le nom figure sur ce document ,qui aura pour ce tiers valeur de contrat , ce tiers n’étant
engagé que dans les liens du contrat de transport17
.
Il peut arriver que le connaissement ne donne aucune mention sur l’identité du
transporteur, c’est le connaissement sans en–tête. Dans ce cas, des difficultés peuvent se
poser pour le tiers porteur du document de transport quant à l’identité du transporteur
notamment en cas de dommages, pertes ou avaries sur les marchandises objets du contrat de
transport.
En France pendant longtemps le tiers porteur du connaissement voyait souvent devant
certaines juridictions son action contre le propriétaire armateur inscrit au registre
d’immatriculation rejeter à défaut d’identité du transporteur18
. Les juges considéraient que
l’armateur ne pouvait être tenu pour responsable car n’ayant pas agi en qualité de transporteur
(solution critiquée ) tandis que d’autres juridictions jugeaient recevables leur requête dans ce
sens tel est le cas de la cour d’appel d’Aix19
qui a considéré dans cette affaire qu’en
« l’absence de toute indication portée au connaissement et précisant l’identité du
transporteur maritime, l’armateur propriétaire , transporteur apparent , devait être réputé
avoir acquis cette qualité20
» .
16
Article 1er
.a de la convention de Bruxelles de 1924
17
Article 17.alinéa 2 de la loi du 18 juin 1966
18
Cours de cassation chambre commerciale 10 mai 1983 navire JULIA DMF 1984. 269
19
Cour d’appel d’AIX 14 février 1984 navire BaÏtin DMF 1985 .542
20
Pierre Bonassies, Christian Scapel, traité de droit maritime LGDJ p607 § 947
23
Pendant longtemps ces deux conceptions se sont opposées, mais la solution de la cour
d’Aix semble être la plus juste dans la mesure où d’une part le tiers porteur du connaissement
ne dispose d’aucun moyen pour déterminer l’identité du transporteur si ce n’est par le biais
de l’armateur, et d’autre part l’armateur contre qui l’action est intentée pourra en retour se
retourner contre le transporteur dont il doit certainement connaître l’identité on pourra établir
la charge des responsabilités , et par là même il pourra (l’armateur) se dégager de toute
responsabilité .
C’est cette deuxième solution (celle de la cour d’Aix) qui a été retenue par la
jurisprudence française notamment dans l’arrêt VOMAR de la chambre commerciale de la
cour de cassation du 21 juillet 198721
.
Mais d’autres personnes peuvent avoir la qualité de transporteur sans effectuer
réellement l’opération de transport : il s’agira du cas du transporteur apparent, du consortium
et du NVOCC22
B- L’extension de la qualité de transporteur
Nous avons situation dans laquelle le connaissement indique le nom du transporteur
alors que en réalité ce n’est qu’une apparence , un auxiliaire de transport , un transitaire ou un
commissionnaire, un agent maritime pour des raisons commerciales va mentionner son nom
sur le connaissement et apparaître comme le transporteur, alors que son rôle se limite à
rassembler des marchandises puis confier leur transport à un véritable transporteur , qui lui,
n’apparaîtra pas sur le document de transport.
La jurisprudence est sans hésitation sur le régime appliqué à ce transporteur apparent et
le condamne comme un transporteur réel, les énonciations du connaissement faisant foi pour
son cocontractant et dans cette situation, en cas de dommages on lui appliquera les mêmes
règles qu’au transporteur.
21
Chambre commerciale de la cour de cassation du 21 juillet 1987 navire VOMAR DMF
1987.573
22
NVOCC : non vessel operating common carrier
24
Autre situation, c’est la pluralité de transporteurs, qui résulte souvent d’une alliance
entre armateurs pour exploiter des lignes en « consortium ». Généralement dans cette
situation, le connaissement désigne l’ensemble des membres de l’alliance. Dans ce cas, se
pose le problème de savoir qui est le véritable transporteur pour l’ayant droit.
En pareil cas, le porteur du connaissement devra déterminer qui des membres du groupe
est son transporteur, l’identité du navire qui effectue le transport figurant toujours sur le
connaissement. Il pourra alors consulter le registre d’immatriculation, mais si ce transporteur
n’est pas propriétaire du navire, il pourra alors assigner l’ensemble du groupe et demander
leur condamnation « in solidum ». À eux par la suite de dire qui est le véritable transporteur
maritime.
Reste à voir le cas du NVOCC, qui peut être assimilé au commissionnaire de transport.
Le NVOCC conclu un contrat de transport avec un transporteur maritime réel , mais sur le
connaissement remis au tiers , c’est le nom du NVOCC qui y figurera , on peut le confondre
avec le transporteur apparent , mais son rôle est beaucoup plus déterminant dans le contrat de
transport dans la mesure où , par qualité il accepte d’assumer toutes les responsabilités liées
au contrat de transport maritime, alors qu’il n’effectue pas lui-même l’opération de transport.
Il a le statut de transporteur contractuel, car le lien contractuel existe entre lui et les
propriétaires de marchandises et non entre ces derniers et le transporteur réel.
On applique au NVOCC le même régime de responsabilité que le transporteur maritime
réel et il sera soumis aux mêmes obligations que celui-ci. Ce qui semble être justifié
notamment à la lecture de l’art 18 de la loi de 18 juin 1966 qui définit le transporteur maritime
comme « celui qui s’engage à acheminer une marchandise déterminée d’un port à un autre ».
D’où l’on peut affirmer que la base du contrat de transport est l’acheminement de la
marchandise d’un point à un autre et non la personne qui s’en charge. On se basera alors sur
les mentions du connaissement qui ont valeur de contrat.
Autre notion, c’est celle de transporteur de fait ou transporteur substitué, notion
nouvelle introduite par les règles de Hambourg
25
§ 2 : transporteur de fait et transporteur substitué
il faut d’abord définir la notion, puis étudier son régime juridique.
A- Notion de transporteur substitué
Selon les termes de l’article 1.2 des règles de Hambourg, Les termes « transporteur
substitué » désignent toute personne à laquelle l'exécution du transport de marchandises, ou
d'une partie de ce transport, est confiée par le transporteur et doivent s'entendre également de
toute autre personne à laquelle cette exécution est confiée.
On retrouve une définition identique dans le nouveau CMM du Sénégal de 2002 en son
article 1er
.b sur les définitions. Le CMM le définit comme toute personne à laquelle
l’exécution du transport de marchandises ou d’une partie de ce transport est confiée par le
transporteur et doit s’entendre également de toute autre personne à laquelle cette exécution est
confiée.
Ainsi cette notion que l’on retrouve en droit aérien23
(sous le terme transporteur de
fait), est nouvellement introduite dans le droit du transport maritime international par les
Règles de Hambourg. Le terme « toute personne » est d’une certaine neutralité. Ainsi, il suffit
que l’opération de transport soit confiée à une autre personne que le transporteur qui a émis
le connaissement pour le cocontractant (le chargeur et le destinataire) pour qu’on parle de
transporteur substitué.
Il agit à la suite d’un sous –contrat de transport avec le transporteur contractuel24
et
donc il se « substitue » à celui-ci pour effectuer le transport, d’où le terme transporteur
substitué, il n’a donc aucun lien avec le chargeur, il ne lui remet aucun connaissement et le
document de transport qu’il remet au transporteur contractuel n’est qu’un connaissement de
service25
.
Quel est le régime juridique applicable dans ce cas au transporteur substitué ?
23
Convention de droit aérien de GUADALAJARA 18septembre 1961 (voir objet)
24
Colloque IMTM 1993, « l’entrée en vigueur des règles de Hambourg, observation de Pierres Bonassies
25
Pierre Bonassies, Christian Scapel Traité de droit maritime LGDJ p 612, § 953
26
B- Régime juridique applicable au transporteur substitué
En droit commun le transporteur substitué n’ayant aucun lien avec le chargeur ou le
destinataire, sa responsabilité sera engagée par ces derniers sur la base extra contractuelle, ce,
en vertu des articles 1382 ou 1384 du code civil français ou des dispositions du COCC en la
matière (article 137 et suivants).
Mais les règles de Hambourg l’assimilent à un véritable transporteur contractuel. En
effet, l’article 10 alinéa2 de ce texte dispose que : « Toutes les dispositions de la présente
Convention régissant la responsabilité du transporteur s'appliquent également à la
responsabilité du transporteur substitué pour le transport par lui effectué ». A la lecture de ce
texte les dispositions de la convention de Hambourg seront appliquées au transporteur
substitué au même titre que le transporteur réel, il en est de même au Sénégal.
La conséquence de ce régime est que même en l’absence de lien contractuel entre le
transporteur substitué, le chargeur comme le destinataire pourront agir contre le transporteur
substitué sur la base contractuelle et invoquer de ce fait les dispositions des règles de
Hambourg à son encontre, le transporteur substitué ayant alors le même statut que le
transporteur contractuel.
27
CHAPITRE 2 : L ‘ÉTENDUE DE LA RESPONSABILITE DU
TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES
Il est nécessaire de déterminer le point de départ et la fin de l’opération de transport car
c’est dans cet intervalle que se situe la responsabilité maritime du transporteur.
En effet aussi bien au Sénégal qu’en France, que ce soient les règles de droit interne ou
celles de droit international, le régime de responsabilité qui gouverne le transport maritime
est un régime impératif, qui donc s’impose mais uniquement pour les opérations composant le
transport maritime. Ainsi, au début et après la fin du transport maritime, le transporteur n’est
en effet éventuellement responsable que par application d’autres règles généralement de droit
commun.
Il est donc apparu nécessaire au législateur de délimiter le début et la fin des opérations
de transport.
La convention de Bruxelles de 1924 délimitait l’opération de transport aux opérations
matérielles de chargement et de déchargement. La loi française du 2avril 1936, dans le but
de préciser la formulation de la convention de Bruxelles prévoyait que les dispositions de la
convention s’appliquaient de la prise sous palan à la remise sous palan, ce, à son article 1er.
Les opérations post et ante palan n’étant pas couvert par le régime de responsabilité
applicable aux opérations de transport.
Le Sénégal, à l’imitation de cette convention, prévoyait aussi dans le CMM de 1962
(article 313 alinéa 1.e), un sectionnement légal du transport maritime c'est-à-dire comme
dans la convention du chargement au déchargement.
Le doyen Rodière a longtemps combattu un tel cloisonnement et un tel sectionnement
du contrat de transport.
De ce fait, ses critiques et suggestions vont permettre la mise en place, à l’article 15 de
la loi du 18 juin 1966 d’un nouveau domaine d’application qui va de la prise en charge à la
28
livraison, instituant ainsi une unicité juridique du contrat de transport. Ce qui va aussi
influencer les règles de Hambourg qui vont opter aussi pour la même délimitation que la loi
du 18 juin 1966. Cette solution sera suivie par le législateur sénégalais dans le CMM de
2002.
SECTION 1 : DU SECTIONNEMENT A L’UNITE JURIDIQUE DU CONTRAT DE TRANSPORT
MARITIME
Pendant plus d’un demi-siècle, la durée de la responsabilité de transporteur maritime
était considérée comme allant du chargement au déchargement (Convention de 1924 et
CCMM Sénégal) ou « de palan à palan » selon la loi du 2 avril 1936, jusqu’à ce que le
législateur s’oriente dans le sens d’une extension de la durée de responsabilité et une unicité
du contrat de transport.
§1: La limite de la responsabilité du transporteur maritime à la phase strictement
maritime du transport.
Cette délimitation, que l’on retrouve dans la convention de Bruxelles, avait entraîné un
sectionnement du contrat de transport maritime de marchandises.
A- La délimitation du contrat de transport dans la convention de Bruxelles
Pour délimiter les bornes du transport maritime, la convention de Bruxelles appliquait
un critère matériel qui va du chargement au déchargement des marchandises, on retrouve cette
règles à son article 1er
.e qui dispose que « transport de marchandises couvre le temps écoulé
depuis le chargement des marchandises à bord du navire jusqu’à leur déchargement du
navire ».
A la convention de rajouter à son article 3§2 que « le transporteur procédera de façon
appropriée et soigneuse au chargement à la manutention, à l’arrimage, au transport, à la
garde, aux soins et au déchargement des marchandises transportées ».
29
Ainsi, selon la convention de Bruxelles, la période maritime du transport commence
avec le chargement des marchandises à bord du navire et finit par leur déchargement sur le
quai. Elle excluait donc de cette période les opérations qui précèdent le chargement et celles
qui succèdent le déchargement. La convention opère de ce fait un sectionnement légal du
contrat de transport en trois phases :
•Une phase terrestre qui couvre la période avant le chargement,
•La phase maritime qui va du chargement au déchargement et
•Une phase terrestre qui succéde les opérations de déchargement
Seule la phase maritime relève du domaine impératif prévu par la convention, les
deux phases terrestres étant soumises à la liberté contractuelle et au droit commun.
B- Le sectionnement légal en droit interne
Ce sectionnement s’est fait aussi bien en droit français qu’en droit sénégalais.
1- Le sectionnement légal du contrat de transport en droit français
En droit français, ce sectionnement prévu par la convention de Bruxelles de 1924 est
repris par la loi du 2avril 1936, qui disposait en son art 1er
alinéa 2 que la loi s’appliquait
« seulement de la prise en charge des marchandises sous palan jusqu’à leur remise sous
palan au destinataire ».
Or, le fait pour la loi de préciser que le chargement et le déchargement, s’effectuent
« sous palan, l’a sensiblement éloigné de la convention et lui a valu les critiques de la
doctrine »26
. Ainsi l’on était face à l’inadaptation du texte de 1936 aux méthodes nouvelles
de chargement et de déchargement, car déjà en 1936 beaucoup de chargements de navires ne
se faisaient plus sous palan (apparition des navires Ro-Ro, les porte- conteneurs)27
.
Autre inadéquation du texte de 1936, il s’agissait de la difficulté à déterminer le
moment exact du chargement ou du déchargement pour certaines marchandises notamment
26
René Rodière Bulletin des transports 1978 P 295
27
Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 590 § 915
30
des cargaisons liquides en vrac ou de marchandises comme les grains en vrac solides qui
étaient chargées par aspiration par exemple. Il est d’ailleurs irrecevable de dire que la
manutention de telles cargaisons s’effectue sous palan. D’autre part, on a reproché à la loi
d’avoir introduit en droit maritime français le sectionnement du contrat de transport28
, ce qui
était déjà fait dans les règles de la Haye.
Le Sénégal aussi a connu cette période de sectionnement du transport maritime.
2- Le sectionnement légal du contrat de transport en droit sénégalais
Le CMM du Sénégal de 1962 inspiré du texte de la convention de Bruxelles de 1924, a
repris les mêmes termes de l’article 1er
alinéa 2 au terme de son article 313alinéa 1er
.e à
savoir que « transport de marchandises couvre le temps écoulé depuis le chargement des
marchandises à bord du navire jusqu’à leur déchargement du navire ». Ainsi au Sénégal on
appliquait le critère matériel pour déterminer la phase maritime des opérations.
Pour les phases terrestres du transport même on avait un renvoi au droit commun. Le
juge sénégalais ne faisait pas cependant une application systématique de ce droit .En effet,
dans un jugement du tribunal de première instance de Dakar, affaire du GAROUFALIA 29
.
Dans cette affaire, le juge sénégalais a considéré qu’en « ce qui concerne la phase terrestre
les principes du droit international privé sénégalais donne compétence à la loi du lieu
d’exécution du contrat, soit la loi sénégalaise selon les termes de l’article 848 alinéa4 du
code de la famille ».
Dans cet arrêt, le juge sénégalais a déterminé comme loi applicable au contrat, la loi du
lieu de chargement, ce qui l’a conduit à appliquer sa propre loi.
Le doyen Rodière a pendant longtemps combattu ce cloisonnement du contrat de
transport, et ce découpage du contrat de transport, ce qui a abouti en France à une réforme de
la législation par la loi du 18 juin 1966, qui met en place une nouvelle délimitation allant de la
prise en charge à la livraison. Texte qui va fortement inspirer les Règles de Hambourg, dont le
28
Fraikin « le transport maritime sous connaissement à l’heure du marché commun » LGDJ paris 1966 p 174
29
TPI Dakar jugement n° 635 du 22 MARS 1980 la Foncière c/SOAEM et société astromando CN navire s/s
GAROUFALIA
31
Sénégal va aussi s’inspirer pour modifier aussi sa législation en la matière, ce qui va aboutir à
une unicité du contrat de transport
§ 2- L’extension de la de responsabilité : par la loi du 18 juin 1966
Par de vives polémiques sur le sectionnement du contrat de transport, les contestations
du Doyen Rodière ont abouti à la fin du sectionnement du contrat de transport qui régissait
jusqu’en 1966 le contrat du transport maritime en France, et ont entraîné la mise en place
d’une unité juridique qui jusque là gouvernera le régime du contrat de transport.
A- Les fondements de la réforme
Le régime du palan à palan, institué par la loi française de 1936, du fait du
sectionnement du contrat qu’il engendrait a été à l’origine de vifs débats de 1936 à 1966,
notamment quant au régime à appliquer aux phases terrestres du contrat.
L’article 15 de la loi du 18 juin 1966, à l’initiative du Doyen Rodière, vient mettre en
place un nouveau domaine d’application « de la prise en charge jusqu’à la livraison » cela
rompt ainsi en droit français avec la formule du « palan à palan » instituée par la loi de 1936,
l’objectif était de mettre fin au sectionnement du contrat de transport et d’instituer une unité
du contrat qui couvrira l’ensemble des opérations liées au contrat.
En effet en France, le doyen Rodiére auteur de la loi de 1966 a longtemps combattu ce
sectionnement du contrat de transport. Son idée est de créer un système à géométrie variable.
Il considérait que le « sectionnement était déraisonnable » et que « l’unité juridique du
contrat devait prévaloir » afin que les conditions de la marchandise soient les mêmes, dès
lors qu’elle était sous la garde du transporteur, qu’elle se trouve avant ou après palan, dans
les entrepôts de l’armateur ou dans les cales du navire, d’où l’application du régime du
transport maritime depuis la prise en charge jusqu’à la livraison30
.
30
Pierre Bonassies, Christian Scapel, traité de droit maritime LGDJ § 917
32
Ainsi sera pris en compte l’ensemble des opérations du contrat à partir de la prise en
charge, en passant par la prise sous palan et la remise sous palan jusqu’à la livraison de la
marchandise.
De ce fait, la réforme aura des conséquences notoires sur le régime de la responsabilité
du transport notamment pour le transporteur.
B- Les apports de la réforme
L’idée de délimiter les opérations de transports de la prise en charge jusqu’à la livraison
permet une division du contrat de transport en deux étapes et d’inclure dans cette délimitation,
des phases qui étaient exclues à savoir les phases de séjour des marchandises à quai en
attendant leur chargement en cale, au port de chargement et leur séjour (toujours) en cale en
attendant leur récupération par le destinataire au port de déchargement.
Mais le législateur de 1966 ne donne pas une définition des termes prise en charge et
livraison, donnant ainsi au transporteur une liberté contractuelle quant à la fixation des
moments de la prise en charge et de la livraison.
La prise en charge de la marchandise par le transporteur marque le point de départ de
l’opération de transport et sa livraison au destinataire lorsqu’elle parvient à bon port, la fin de
l’opération de transport maritime.
La prise en charge de la marchandise s’effectue par « l’appréhension des marchandises
par le capitaine ou les agents du transporteur ».
La livraison elle, peut se définir comme l’appréhension de la marchandise par le
destinataire, son représentant ou le tiers porteur du connaissement au port de débarquement.
Mais par une trop grande liberté, le transporteur pourrait être tenté de réduire le plus
possible sa responsabilité, en retardant le moment de la prise en charge et en anticipant celui
de la livraison.
33
Pour éviter cela, l’article 38 du décret du 31 décembre 1966, est venu modifier l’article
15 de la loi de 1966 en y ajoutant une disposition reprenant l’art 3§2 de la convention et selon
laquelle « (……) le transporteur procède de façon approprié et soigneuse au chargement ….
Et au déchargement de la marchandise »
Cependant comme il est souligné dans le traité31
que la liberté du transporteur même
limitée, « certaines opérations à quai antérieures à la prise en charge contractuelle ou
postérieures à la livraison contractuelle, échapperont au régime du transport maritime ». Mais
on est cependant bien loin du régime du sectionnement que le texte de 1966 a voulu écarter,
car pour les autres intervenants à côté du transporteur maritime on a instauré un régime de
responsabilité qui se rapproche de celui du transporteur maritime, (a peu prés les mêmes
règles), notamment les intervenants à quai dans la phase terrestre du transport.
SECTION 2 : L’ETENDUE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR SOUS LES REGLES DE
HAMBOURG ET LE CMM DE 2002
Influencés par le renouveau de la loi de 1966 sur la durée de la responsabilité, les
Règles de Hambourg ont repris les mêmes règles qui seront aussi suivis au Sénégal lors de la
réforme du CMM.
§1: - La délimitation de la responsabilité par les règles de Hambourg et le CMM
sénégalais
Les règles de Hambourg, ont en effet repris, en des termes identiques, les dispositions de
l’article 15 de la loi française de 1966, à son article 4§1. Et à cet article 4 de rajouter au § 2
que « la responsabilité du transporteur en ce qui concerne les marchandises couvre la
période pendant laquelle les marchandises sont sous sa garde au port de chargement, durant
le transport et au port de déchargement ».
31
Pierre Bonassies, Christian Scapel traité de droit maritime LGDJ § 917)
34
Ainsi au Sénégal pas de grande surprise, suite à la réforme du CMM, de nouvelles
dispositions sont venues mettre fin au sectionnement juridique que l’on retrouvait à l’article
313 alinéa 1er
du CMM de 1962. Les nouvelles dispositions que l’on retrouve à l’article 441
du CMM de 2002, venus s’aligner sur les Règles de Hambourg, énoncent que les règles
relatives au contrat de transport s’appliquent « de la prise en charge à la livraison ».
Ainsi ces textes à l’exemple de la loi française instaurent une unicité juridique de contrat
de transport en droit interne et international sénégalais.
L’un des apports des règles de Hambourg est, qu’à la différence de la loi française de
1966, les règles de Hambourg ont pris le soin de définir les notions de « prise en charge et de
livraison ».
A- Notion de prise en charge
En effet, La convention de Hambourg énonce en son article 4,2.a que « les marchandises
sont réputées être sous la garde du transporteur à partir du moment où celui-ci les prend en
charge des mains :
i) du chargeur ou d’une personne agissant pour son compte ; ou
ii) d’une autorité ou autre tiers auquel les marchandises doivent être remises pour
expédition, conformément aux lois et règlements applicables au port de
chargement.
De part ces dispositions on peut déduire qu’il y a prise en charge dès lors que le
transporteur accepte la marchandise qui lui est confiée pour être transportée.
Cette prise en charge n’est liée à aucune modalité particulière de manutention, la seule
acceptation par le transporteur vaut application du régime du contrat de transport.
Le texte nous donne une définition matérielle de la notion, ainsi la prise en charge se
traduit par le transfert effectif de la marchandise aux mains du transporteur, permettant ainsi
35
de ne pas confondre avec la prise en charge juridique, qui est juste un transfert formel (par
signature par exemple) alors que la marchandise n’a pas effectivement encore été remise au
transporteur ; ceci pouvant poser un problème de responsabilité à savoir qui est responsable si
la marchandise subi un dommage ou est perdue avant sa remise effective au transporteur, la
marchandise n’étant pas encore sous sa garde effective (du transporteur).
B -Notion de livraison
La livraison peut se définir comme la délivrance par le transporteur ou son représentant de
la marchandise au destinataire.
Les règles de Hambourg nous en donnent une définition expresse à l’article 4,2 b qui
énonce que les marchandises sont réputées sous la garde du transporteur « jusqu’au moment
où il en effectue la livraison :
i) en remettant les marchandises au destinataire ; ou
ii) dans le cas ou le destinataire ne reçoit pas les marchandises du transporteur, en
les mettant à la disposition du destinataire conformément au contrat ou aux lois
ou aux usages du commerce considéré applicables au port de déchargement ; ou
iii) en remettant les marchandises à une autorité ou autre tiers auquel elle doivent
être remises conformément aux lois et règlements applicables au port de
déchargement ».
Comme pour la prise en charge , le texte nous donne ici une définition matérielle de la
notion de livraison pour éviter la même confusion à savoir entre livraison effective et
livraison juridique qui peut se faire aussi alors que la marchandise est encore entre les mains
du transporteur. Se pose aussi le même problème à savoir quel régime appliquer en cas de
dommages sur la marchandise entre le moment de la livraison juridique et celui de la
livraison effective.
36
Au Sénégal le CMM reprend l’article 4§1 mais ne définit pas comme dans la loi de
1966 les notions de livraison et de prise en charge, généralement les juges sénégalais
appliquent le critère de la prise en charge matérielle par le transporteur et de la délivrance
matérielle au destinataire, définition classique.
Les règles de Hambourg et le CMM sénégalaises bien qu’ils se soient inspirés du texte
de 1966 présentent une lacune importante en ce qu’ils n’encadrent pas la liberté contractuelle
du transporteur quant à la détermination de la prise en charge et de la livraison (ce que fait
l’article 38 du décret du 31 décembre 1966 précité en droit français). Ainsi en vertu de ces
textes, le transporteur pourra se dégager contractuellement de toute responsabilité en cas de
dommages subis par la marchandise avant les opérations de déchargement, estimant que celle
ci étant à la charge du destinataire.
§2: Délimitation de la garde : entre la prise en charge et la livraison
La notion de garde est une notion nouvelle introduite par les règles de Hambourg à l’art
4§2
A - Portée de la notion de garde
L’article 4-1 des règles de Hambourg énonce que le transporteur est responsable durant
la période « pendant laquelle les marchandises sont sous sa garde au port de chargement,
durant le transport et au port de déchargement, de ce fait le sectionnement institué auparavant
au Sénégal par la convention de 1924 et le CMM de 1962 sont écartés.
Cette notion de garde délimite le domaine d’application du régime de responsabilité au
transporteur maritime de marchandises qui commence à partir de la prise en charge de la
marchandise au port de chargement par le transporteur, jusqu’à sa livraison au port de
déchargement ou port de livraison.
La garde se situera alors entre la prise en charge et la livraison. Ce qui veut dire que les
étapes précédant la prise en charge et celles qui succèdent à la livraison échappent à la période
de garde, donc au contrôle du transporteur.
37
Quelles sont les conséquences d’une telle délimitation ?
Il en résulte donc que le transporteur est responsable tant que la marchandise est sous
sa garde, depuis la prise en charge effective , jusqu’à la livraison effective au destinataire.
A contrario, le transporteur échappe à toute responsabilité en cas de dommages subis
par la marchandise, dès lors que la marchandise n’est plus, ou n’est pas encore, sous son
contrôle et bien que le chargeur ne l’ait pas encore remise au transporteur ou qu’un
destinataire n’ait pas encore pris délivrance de celle-ci.
Mais qu’en est t-il du régime à appliquer lorsque la marchandise n’est pas sous la garde
du transporteur ?
B- Les phases exclues de la garde
La garde telle que posée à l’article 4 des règles de Hambourg, se situe entre la prise
en charge à la livraison.
Ainsi, la phase qui précède la prise en charge, et celle succédant à la livraison
échappent au domaine d’application du régime du contrat de transport maritime.
Dans ce cas quel régime leur appliquer étant donné que ces phases sont en quelque
sorte liées au processus des opérations de transports ?
Pour résoudre la question, les juges sénégalais comme dans le CMM de 1962
renvoient aux dispositions nationales applicables au port de chargement ou au lieu
d’exécution du contrat.
Les règles de Hambourg renvoient aux dispositions nationales applicables au port de
chargement ou de déchargement ou au contrat.
Ce qui peut poser un problème d’uniformité car là où le Sénégal prévoit l’application
des dispositions nationales applicables au port de chargement ou au lieu d’exécution du
38
contrat, d’autres Etats prévoient l’application de règles différentes, les usages n’étant pas les
mêmes dans chaque port.
39
LA MISE EN ŒUVRE DE LA
RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR
MARITIME DE MARCHANDISES AU
SENEGAL ET EN FRANCE
40
Le contrat de transport fait peser sur le transporteur maritime, une obligation de résultat que
l’on retrouve tant en droit commun qu’en droit maritime. En effet, par ce contrat, le
transporteur s’engage « à acheminer une marchandise déterminée d’un port à un autre »32
. Il
s’ensuit qu’il est responsable du seul fait de l’inexécution de son obligation.
En outre les textes font peser sur le transporteur d’autres obligations à savoir d’abord
l’obligation, avant et au début du voyage, de faire diligence pour mettre le navire en état de
navigabilité33
. L’obligation de résultat repose en fait sur l’acheminement de la marchandise à
bon port et en bon état.
Mais le transporteur pourra s’exonérer en faisant la preuve d’un cas excepté prévu par
les textes. Il faut cependant préciser qu’une fois que le transporteur aura prouvé l’existence de
ce cas excepté et celle du lien de causalité, entre le dommage et le cas excepté, il n’a pas à
faire la preuve de l’absence de faute de sa part. C’est dans ce sens que va une décision de
chambre commerciale de la cour de cassation du 5 juillet 199434
.
Ainsi il faut voir qu’elle sont les conditions de mise en œuvre de cette responsabilité du
transporteur maritime de marchandises (I) puis étudier l’action même en responsabilité contre
ce transporteur (II) au Sénégal et en France.
32
Article 15 de la loi du juin 1966
33
Article 3§1 des règles de la Haye et article 21 de la loi du 18juin 1966
34
Chambre commerciale de la cour de cassation du 5 juillet 1994, navire AL Hoceima DMF 1994 P 760
41
Chapitre premier : Les conditions de mise en œuvre de
responsabilité du transporteur maritime de marchandises
En droit commun, quiconque cause un dommage à autrui doit le réparer. De même en droit
maritime en cas de dommages à la marchandise les textes posent le principe de la
responsabilité du transporteur maritime de marchandises, avec une particularité, c’est
l’introduction du retard par les règles de Hambourg comme condition de responsabilité du
transporteur.
Ainsi le droit maritime sénégalais et français prévoit chacun les conditions dans lesquelles la
responsabilité du transporteur peut être mise en œuvre (Section I). Mais le particularisme des
deux droits réside dans les causes d’exonération de cette responsabilité, causes pouvant être
neutralisées (Section II).
SECTION 1 : LES CONDITIONS PROPREMENT DITES DE MISE EN ŒUVRE DE LA
RESPONSABILITE
Il faudra voir d’une part les dommages couverts , et d’autre part le cas du retard qui a
été introduit par les règles de Hambourg.
§ 1 : les dommages couverts
Selon les textes la responsabilité couvre les pertes ou dommages subis par la
marchandise.
L’article 27 de la loi de 1966 prévoit que le régime de responsabilité ne couvres que les
« pertes ou dommages subis par la marchandise ». A la lecture de ce texte sont visés
uniquement les dommages causés à la marchandise elle-même, et non les dommages qui
résulteraient de l’opération de transport. Ces dommages n’étant pas couverts par le régime de
42
responsabilité applicable au transporteur, le transporteur pourra être quand même tenu pour
responsable de ces dommages autres que ceux causés à la marchandise, mais sous un régime
autre que celui de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises, les dommages
visés par le législateur de 1966 étant donc uniquement les dommages matériels.
Le champ d’application est plus large dans la convention de Bruxelles qui étend en effet
le régime « aux pertes ou dommages » (article 4§ 1 et 2), et prévoit une application du
montant de la limitation « aux pertes ou dommages subis par la marchandise, ou concernant
celle-ci » (article 4§5), reste à voir jusqu’où va cette extension.
La réponse varie généralement en fonction des juridictions saisies, notamment
s’agissant des préjudices commerciaux. Les juridictions anglaises ont tendance à faire une
extension à ces domaines, en la soumettant à la condition que le préjudice ait pu être
prévisible par le transporteur35
, mais les juridictions françaises ne semblent pas pratiquer une
telle extension, comme on nous le souligne dans le traité.
L’article 5§1 des règles de Hambourg prévoit aussi une application de son régime de
responsabilité pour « pour les préjudices résultant des pertes ou dommages subis par la
marchandise….. »
Mais il faut aussi déterminer la nature de ses dommages.
Le dommage peut se définir comme la dégradation physique de la marchandise. En
outre, les règles de Hambourg nous donnent une définition de la perte, à l’article 5.3 qui
dispose « L'ayant droit peut considérer les marchandises comme perdues si elles n'ont pas été
livrées comme il est prescrit à l'article 4 dans les 60 jours consécutifs qui suivent l'expiration
d'un délai de livraison conforme au paragraphe 2 du présent article ».
Le principe est qu’en cas de perte ou de dommages, l’ayant droit (chargeur ou
destinataire) devra le notifier au transporteur, ce par l’émission de réserves (article 19 des
règles de Hambourg). Mais il faudra faire la distinction entre dommage apparent et les
dommages non apparents.
35
Pierre Bonassies, Christian Scapel, Traité de droit maritime LGDJ P 681 ? §1069
43
A-Pour les dommages apparents
L’article 19.1 des règles Hambourg pose une obligation pour les ayant droits d’émettre un
avis de pertes ou de dommage à l’encontre du transporteur « au plus tard le premier jour
ouvrable suivant le jour où les marchandises lui ont été remises ».
Le texte de la convention de Bruxelles pose quant à lui un délai plus réduit d’émission des
réserves à son article 3 « par écrit au transporteur ou à son agent au port de déchargement,
avant ou au moment de l'enlèvement des marchandises, et de leur remise sous la garde de la
personne ayant droit ».
A défaut les marchandises sont présumées être livrées conformément aux énonciations
du document de transport, mais ceci est une présomption simple.
B-Pour les dommages non apparents
Ce sont ceux que l’on ne peut pas déceler à partir de l’extérieur du colis. L’article 19§2
porte le délai des réserves dans ce cas à 15 jours à partir du jour où les marchandises ont été
remises, alors que ce délai est de 3 jours ouvrables dans le texte français (article 57 du décret
de 31 décembre 1966) et dans la convention de 1924.
Le texte sénégalais (CMM de 2002) ne contient aucune disposition analogue sur la
question renvoyant toujours aux règles de Hambourg.
Il faut aussi noter que la responsabilité du transporteur maritime de marchandises peut être
engagée en cas de retard dans la livraison.
§2- Le cas du retard
Les dommages dus au retard sont une des nouveautés des règles de Hambourg, en effet
la notion n’est visée expressément ni par la convention de 1924 ni par le législateur français.
Seul, en effet l’article 5.1 des règles de Hambourg énonce le principe suivant lequel le
44
transporteur est responsable non seulement des pertes ou des dommages subis par la
marchandise mais aussi du retard à la livraison., notion de retard que le texte définit à son
article 5.2 qui dispose que « Il y a retard à la livraison lorsque les marchandises n'ont pas été
livrées au port de déchargement prévu par le contrat de transport par mer, dans le délai
expressément convenu ou, à défaut d'un tel accord, dans le délai qu'il serait raisonnable
d'exiger d'un transporteur diligent compte tenu des circonstances de fait ».
Ainsi les règles de Hambourg ont tenté de matérialiser le retard. Quant au délai, il peut
être fixé contractuellement. Dans ce cas la responsabilité du transporteur pourra être engagée
s’il ne respecte pas le délai prévu au contrat. A défaut de ce délai convenu le transporteur est
tenu d’assurer le transport de façon appropriée et de respecter un délai normal
d’acheminement.
Mais il faut cependant noter que le transporteur maritime de marchandises peut voir sa
responsabilité exonérée dans certaines situations prévues par les textes.
SECTION 2 : LES CAUSES D’EXONERATION DE RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR
MARITIME DE MARCHANDISES ET LEUR NEUTRALISATION
Alors que la Convention de Bruxelles a aménagé une liste assez conséquente de cas
(17 cas exceptés) qui se veulent, en principe, libératoires de la responsabilité du
transporteur, les Règles de Hambourg sont plus restrictives sur la question. Seulement deux
(02) cas) y sont pris en compte. Le texte de 1966 a voulu réduire le champ de l’exonération en
prévoyant seulement 9 cas. Quant au droit sénégalais, il opère un simple renvoi aux règles de
Hambourg sur la question.
§ 1- Les causes d’exonération prévues par les textes
45
On peut le classer en quatre catégories
A- Les cas exceptés tenant à des événements extérieurs au navire et à la cargaison
Il s'agit :
Des périls de mer : Communément appelés « fortune de mer ». En France, on
retrouve la notion à l’article 4.2.C des Règles de la HAYE. On peut citer à titre
d’exemple le mauvais temps qui n’est retenu qu’à des conditions très strictes. Ainsi les
tribunaux français refusent de la retenir comme cas exceptés si le mauvais temps était
prévisible, ou habituel, d’autant plus que les navires modernes sont armés contre ces
risques36
. Le transporteur qui invoque ce cas devra donc démontrer l’imprévisibilité de
l’événement.
D'un «acte de Dieu» : notion ne faisant l’objet d’aucune définition précise, il
correspond à l’intervention du hasard comme la foudre37
.
Des faits de guerre : qui est apprécié en fonction de l’intensité.
Du fait d'ennemis publics : il s’agira par exemple des actes de piraterie en haute mer
D'un arrêt ou fait du prince : c’est « tout ce qui peut être la suite de décisions prise
par les autorités établies38
. Le transporteur ne peut l’invoquer que s’il s’est vu
interdire le déchargement de sa marchandise
D’une restriction de quarantaine que l’on, peut assimiler au fait du prince,
De grèves ou Lock-out : retenu comme cas excepté sauf qu’ils ne doivent pas être
provoqués par la faute du transporteur
D'émeutes ou de troubles civils
36
Tribunal de commerce de Marseille 3mars 1995, navire JOLLY Grigio DMF 1996, p 251 n° 69
37
Traité de Rodière tome II n° 760
38
Traité de Rodière tome II n° 760
46
La convention rajoute un cas excepté fourre-tout à l’article 4§2 qui vise les « faits
constituant un événement non imputable au transporteur ». Il s’agit des dommages ayant
toute autre cause ne provenant pas du fait ou de la faute du transporteur ou des ses agents
préposés.
La loi de 1966 ne se réfère qu’à trois cas spécifiques à savoir l’incendie, la grève, l’acte ou
la tentative de sauvetage et pour le reste elle les regroupe sous la formulation synthétique des
faits « constituant un événement non imputable au transporteur » (article 27 d de la loi de
1966). Ce sont des cas que l’on peut qualifier de force majeure, qui se définit comme un
événement imprévisible et irrésistible.
Cela entraîne une nuance entre les deux textes dans le sens où dans un transport soumis à
la loi de 1966, le transporteur qui invoque un cas résultant d’un fait extérieur devra faire la
preuve que ce fait ne lui est pas imputable, étant non seulement pour lui extérieur, mais aussi
imprévisible et insurmontable, alors que sous le régime de la convention de 1924, le
transporteur qui invoque un cas exceptés devra seulement prouver que les circonstances
invoqués correspondent bien à la qualification du cas invoqué 39
.
B- Les cas exceptés tenant au fait de la marchandise ou à la faute du chargeur
L’article 4§2 de la convention de 1924 prévoit que ni le transporteur ni le navire ne seront
responsables pour pertes et dommages résultant :
(i) D'un acte ou d'une omission du chargeur ou propriétaire des marchandises, de son agent
ou représentant;
(m) De la freinte en volume ou en poids ou de toute autre perte ou dommage résultant de vice
caché, nature spéciale ou vice propre de la marchandise ;
(n) D'une insuffisance d'emballages;
(o) D'une insuffisance ou imperfection de marques.
39
Chambre commerciale de la cour de cassation du 7 décembre 1999 navire Aydan DMF 2000 P 828
47
La principale faute du chargeur est la faute d’emballage, de marquage ou de
conditionnement de la marchandise.
Le vice caché de la marchandise ou vice propre est aussi exonératoire de la
responsabilité. Dans ce cas le transporteur devra faire la preuve que le dommage résulte bien
de ce vice. L’ayant droit de la marchandise peut aussi faire la preuve que le dommage résulte
en tout ou partie de la faute du transporteur.
Quant à la freinte de route, elle se rapproche légèrement du vice propre, c’est le « fait
pour une marchandise de perdre du poids ou du volume du fait de la dessiccation, évaporation
ou dispersion due à sa nature »40
. On peut citer en exemple le tabac, le vin, …, le taux de
perte varie selon les ports et selon la nature de la marchandise transportée.
C- Les cas exceptés tenant à l’exploitation du navire
Il s’agit de :
L'incendie: prévue aussi bien par la convention que par la loi de 1966. Mais l’article
27 de la loi de 1966 prévoit la possibilité pour le chargeur de prouver que la faute du
transporteur a participé à la production du dommage ou est à l’origine même du cas
excepté que le transporteur invoque.
Le sauvetage ou la tentative de sauvetage : de biens ou de vies. Ce cas nous parait
être le cas excepté le plus justifié comme il est souligné dans le traité, et à a loi de
1966 de rajouter le déroutement raisonnable.
L’innavigabilité du navire : cas qui peut être invoqué par le transporteur en cas de
défaut du navire, mais cette exonération est conditionnée par la preuve par le
transporteur de sa DUE DILIGENCE à mettre le navire en état de navigabilité.
L faute nautique : Elle est définie par la convention de Bruxelles de 1924 comme :
« les actes, négligence ou défaut du capitaine, marin, pilote, ou des préposés du
transporteur, dans la navigation ou dans l’administration du navire ». C’est le cas le
40
Pierre Bonassies, Christian Scapel traité de droit maritime LGDJ § 1087
48
plus contesté, les tribunaux tendent plus vers la non exonération de ce cas. La notion
est à distinguer de la faute commerciale qui, non visée par les textes, désigne la faute
dans l’administration de la cargaison. Elle n’exonère pas le transporteur de sa
responsabilité. Quant à la faute nautique, elle désigne la faute dans l’administration du
navire.
Cependant, la faute nautique ne vaut que si l'acte ou la faute est effectivement imputable
aux personnes visées à l'article 4 .2a à savoir « capitaine, marin, pilote, ou des préposés du
transporteur ». En outre, cette personne ne doit pas avoir agit sous ordre du transporteur, ce
qui semble difficile aujourd’hui car avec le développement des télécommunications, le
transporteur pourrait être régulièrement en contact avec les membres de son équipage, et par
là, donner des ordres et instructions pour les besoins de l’expédition.
D-Les causes exonératoires retenues par les Règles de Hambourg
C’est sans doute la modification la plus importante apportée par les règles de
Hambourg, en effet les règles viennent réduire considérablement la liste des cas prévus par la
convention de 1924 pour n’en retenir que : l’assistance et l’incendie.
Pour le cas de l’incendie, les règles de Hambourg disposent que le transporteur est
responsable « des pertes ou dommages aux marchandises ou du retard à la livraison, causés
par l’incendie. Si le demandeur prouve que l’incendie résulte d’une faute ou d’une négligence
du transporteur, de ses préposés ou mandataires » donc l’incendie étant exonératoire pour le
transporteur mais le transporteur sera déchu de ce droit dés lors que sa faute ou celle de l’un
de ses préposés aura contribué à la survenance du dommage.
Par conséquent sous le régime de Hambourg, lorsque l’incendie a causé le dommage, le
transporteur ne sera responsable que si cet incendie résulte de sa faute, faute que devra
démontrer le demandeur. Cela est particulièrement important, car l’incendie est le plus
souvent, d’origine inconnue et la preuve en la matière est particulièrement difficile à apporter.
S’agissant de l’assistance l’article 5§6 prévoit que « Le transporteur n'est pas
responsable, sauf du chef d'avarie commune, lorsque la perte, le dommage ou le retard à la
49
livraison résulte de mesures prises pour sauver des vies ou de mesures raisonnables prises
pour sauver des biens en mer ». Dans ce cas, le transporteur devra démontrer que son
capitaine ou lui-même ont agit raisonnablement41
.
Pour le reste l’article 5.1 prévoit que le transporteur pour s’exonérer de sa
responsabilité devra prouver « que lui-même et ses préposés ou mandataires ont pris toutes
les mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées pour éviter l’événement et ses
conséquences ». En droit interne sénégalais on retenait sous le régime du CMM de 1962 les
mêmes cas d’exonérations que celles de la convention de 1924, cas aujourd’hui abandonnés
pour laisser place à ceux prévus par les Règles de Hambourg.
Reste que ces cas exceptés peuvent être neutralisés, c'est-à-dire qu’ils n’auront plus
d’effet notamment en cas de faute prouvée du transporteur.
§2- La neutralisation des cas exceptés : la faute du transporteur maritime
Il ne suffit pas que le cas excepté invoqué le soit effectivement (invoqué) pour que le
transporteur soit automatiquement exonéré. En effet comme on nous le souligne dans le traité,
« même prouvé et approuvé, comme tel par le juge tout cas excepté peut être neutralisé par la
faute du transporteur ayant concouru au dommage ».
A- En droit français
Ce principe est prévu expressément en droit français par l’article 27 de la loi de 1966.
Ainsi le chargeur pourra faire sauter le cas excepté en faisant la preuve que le dommage est dû
en toute ou partie à la faute du transporteur ou de ses préposés. Mais l’article 27 prévoit que la
faute nautique ne peut être invoquée pour écarter un autre cas excepté.
La convention de 1924 quant à elle ne prévoit explicitement la possibilité de faire la
preuve de la faute du transporteur, même si le cas excepté est établi que pour l’incendie.
41
Colloque IMTM 1993Pierre Bonassies l’entrée en vigueur des règles de Hambourg
50
Si les juges reconnaissent la faute du transporteur, cela aura pour conséquence, la
neutralisation du cas excepté. Dans ce cas, le transporteur sera déclaré entièrement
responsable et ne pourra plus bénéficier de la limitation de responsabilité prévue par les
textes.
Mais aussi bien la convention de 1924 que la loi de 1966 prévoient que si le dommage
n’est dû que partiellement à la faute du transporteur, le juge pourra opérer un partage de
responsabilité, le transporteur ne devant réparation qu’à hauteur de sa contribution au
dommage.
Les règles de Hambourg, telles que appliqués au Sénégal contiennent des dispositions
analogues.
B- En droit sénégalais
Au Sénégal, l’établissement d’un cas excepté n’est pas libératoire de la responsabilité du
transporteur, aussi bien en droit interne qu’en droit international, ce par application des Règles
de Hambourg, régime appliqué dans ce pays . En effet l’article 5 alinéa 4 des règles de
Hambourg prévoit que :
« a) Le transporteur est responsable :
(i) des pertes ou dommages aux marchandises ou du retard à la livraison causés par
l'incendie, si le demandeur prouve que l'incendie résulte d'une faute ou d'une négligence du
transporteur, de ses préposés ou mandataires,
(ii) des pertes, dommages ou retard à la livraison dont le demandeur prouve qu'ils résultent
de la faute ou de la négligence du transporteur, de ses préposés ou mandataires en ce qui
concerne les mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées pour éteindre l'incendie et
éviter ou atténuer ses conséquences ».
L’alinéa 5 sur le transport d’animaux vivant prévoit la responsabilité du transporteur,
si celui ci, ses préposés ou mandataires ont commis une faute ou une négligence en manquant
notamment de se conformer aux instructions relatives au transport desdits animaux.
51
L’alinéa 6 concernant l’assistance prévoit aussi une responsabilité du transporteur
lorsqu’en vue de sauver des biens en mer, le transporteur a adopté des mesures
déraisonnables.
A la lecture de ces textes, lorsque le demandeur parvient à établir la faute ou la
négligence du transporteur ou celle de ses préposés le caractère déraisonnable des mesures
prises dans le dernier cas qu’est l’assistance, le transporteur ne pourra plus échapper à sa
responsabilité, le cas excepté étant écarté. Par conséquent, il ne pourra plus bénéficier de la
limitation de responsabilité dont il bénéficiait.
52
Chapitre deuxième : La limitation de responsabilité et l’action en
responsabilité contre le transporteur maritime de marchandises
au Sénégal et en France
En droit commun on pose le principe de la réparation intégrale en cas de dommages.
Quiconque cause un dommage à autrui doit le réparer, tel est le principe de base de toute
responsabilité.
Mais en droit maritime le transporteur dispose d’un privilège le faisant bénéficier
d’une limitation de sa responsabilité qui est marquée par un certain seuil de réparation du
dommage. A l’origine, les transporteurs jouissaient d’une grande liberté contractuelle, ce qui
les amenait souvent à prévoir dans les contrats des clauses de non responsabilité ou
« négligence clause ». L’insertion de telles clauses a été interdite définitivement par le Harter
act, texte américain de 1893, suite à la réaction des chargeurs. Mais le principe de la limitation
de responsabilité a été définitivement mis en place par les Règles de la Haye, et sera suivi
simultanément par la loi de 1966 et par les règles de Hambourg. Cependant le régime de cette
responsabilité diffère selon les textes.
A la différence du droit commun, le régime de responsabilité mis en place en matière
maritime est un régime impératif, mais le transporteur maritime, lui, se voit accorder une
limitation de responsabilité.
53
SECTION 1 : LA LIMITATION DE RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME DE
MARCHANDISES
Aussi bien en droit sénégalais que français, le transporteur maritime de marchandises
bénéficie d’un certain montant de limitation ; limitation pouvant être écartée en cas de
renonciation ou de faute de sa part.
§1- La détermination du montant de la limitation
Il s’agira ici d’analyser la détermination de la limitation successivement en droit
français et sénégalais.
A- Détermination du montant en droit français
Les différentes modifications de la convention de 1924 intervenues à travers les
protocoles modificatifs ont créé une certaine pluralité des montants de la limitation. Mais
quelque soit le régime appliqué, les montants fixés ne pouvaient être modifiés
contractuellement que dans le sens de leur hausse, et non de leur réduction.
Ainsi la convention de Bruxelles originaire en son article 4§5 disposait que le
transporteur n’est tenu « en aucun cas des pertes ou dommages causés aux marchandises ou
les concernant pour une somme dépassant 100 livres Sterling par colis ou unité, ou
l’équivalent de cette somme en une autre monnaie ». Ici il s’agissait de valeur or.
Le terme colis vise des marchandises individualisées en tant que tel sur le titre de
transport et prises comme des entités distinctes ayant leur existence propre
La notion d’unité est par contre plus difficile à déterminer, le doyen Rodière propose
les quatre conceptions suivantes.
Il peut s’agir :
- de l’unité matérielle d’usage compte tenu de la nature de la marchandise, dite en
anglais (commodity unit),
- l’unité matérielle utilisée dans la police (shipping unit),
54
- l’unité idéale de poids ou de mesure utilisée comme paramètre pour la fixation du fret
(freight unit), avec une distinction possible entre la mesure utilisée de façon explicite
(declared freight unit) et la mesure utilisée de façon courante (customary freight unit).
Le doyen Rodière opte pour le second système qui retient l’unité matérielle utilisée dans
la police. En effet, selon lui, « Il répond à la sécurité des parties puisqu’elles savent
désormais à quoi s’en tenir, et la solution répond au souci de faire du connaissement le titre
littéral qui éclaire le porteur sur ses droits »42
.
Mais le développement des transports avec notamment l’apparition des conteneurs va
poser problème. La solution sera apportée par le protocole de Visby de 1968 qui prévoit que
le calcul se fera soit par colis ou unité soit par kilogramme. L’ayant droit ayant le choix entre
les deux. Mais le protocole avait maintenu les montants de la limitation calculé en franc et
fixé à 10.000 francs par colis ou unité ou 30 francs par kilogramme.
Ce protocole règle aussi une difficulté relative aux conteneurs et rajoute de ce fait à
l’article 4§5 de la convention les dispositions selon lesquelles « lorsqu’un cadre, une palette
ou un engin similaire est utilisé pour grouper des marchandises, tout colis ou unité énuméré
au connaissement comme étant inclus dans cet engin sera considéré comme étant inclus dans
cet engin sera considéré comme un colis ou unité … ». Ainsi tout dépendra des stipulations
du connaissement.
En 1978 l’or n’était plus la monnaie de référence, par conséquent il a fallu une réforme
qui sera introduite par le protocole de 1979. De ce fait les limitations s’expriment désormais
en DTS (droit de tirage spécial) et vont connaître une légère hausse. Les montants sont fixés
à 666,67 DTS par colis ou unité, ou à 2 DTS par kilo brut de marchandise perdue.
En droit interne français, le législateur de 1936 avait fixé le même taux de limitation que
la convention de Bruxelles originaire, taux qui équivalait à 8000 francs. Ce montant atteindra
les 100.000, ancien franc qui équivalait à 200 nouveaux francs sous le régime de la loi du 18
juin 1966.
42
René Rodière, traité général de droit maritime tome II page 302
55
Après la réforme du système monétaire mondiale en 1979 et l’adoption du protocole de
1979, le législateur français à voulu s’aligner à la convention de 1924 suite au changement
intervenu. C’est dans ce sens que sera adoptée la loi du 23 décembre 1986 qui vient modifier
l’article 28 de la loi de 1966 qui dit que désormais « La responsabilité du transporteur est
limitée, pour les pertes ou dommages subis par les marchandises, aux montants fixés au a du
paragraphe 5 de l'article 4 de la convention internationale pour l'unification de certaines
règles en matière de connaissement signée à Bruxelles le 25 août 1924, modifiée par le
protocole signé à Bruxelles le 21 décembre 1979 ».
En résumé, la responsabilité du transporteur en France est limitée au montant fixé par la
convention internationale telle que modifiée par le protocole de 1979.
Par ailleurs quel est le régime de limitation applicable au Sénégal ?
B- Détermination du montant en droit sénégalais
Sous le régime du CMM de 1962 le Sénégal appliquait bien évidemment le régime de
la limitation de la convention de 1924 et a suivi les nombreuses modifications intervenues.
Ce n’est qu’après l’adoption du CMM de 2002 que le Sénégal applique désormais les
limitations fixées par les règles de Hambourg, qui sont plus favorables aux chargeurs.
L’article 6.1.a des règles de Hambourg dispose que « La responsabilité du transporteur
pour le préjudice résultant des pertes ou dommages subis par les marchandises
conformément aux dispositions de l'article 5 est limitée à une somme équivalant à 835 unités
de compte par colis ou autre unité de chargement ou à 2,5 unités de compte par kilogramme
de poids brut des marchandises ». L’unité de compte étant le DTS, on observe alors une
hausse du montant de la limitation.
L’autre originalité des Règles de Hambourg se trouve dans les dispositions prévues en
cas de retard. Question non traitée par la convention de 1924 et par la loi française. L’article
6.1.b des règles prévoit ainsi qu’en cas de retard, la responsabilité du transporteur maritime
est limitée « à une somme correspondant à deux fois et demie le fret payable pour les
marchandises ayant subies un retard, mais n’excédant pas le montant total du fret payable en
vertu du contrat de transport de marchandise par mer »
56
La convention de Hambourg en son article 6 - 2° règle aussi la question des conteneurs
et distingue deux cas de figure.
Si le contenu du conteneur est détaillé sur le connaissement, la réparation s’effectue sur la
base des colis contenus dans le conteneur.
Mais si aucune mention n’a été portée sur le connaissement, les marchandises
contenues dans le conteneur sont considérées comme un colis et le conteneur lui même a la
valeur d’une unité de chargement indépendamment de son contenu.
Le Sénégal ne prévoit aucune disposition relative à la limitation , seul L’article 446 du
CMM de 2002 qui concerne les réserves prévoit que « Si la réserve volontairement omise
concerne un défaut de la marchandise dont le transporteur avait ou devait avoir connaissance
lors de la signature du connaissement, il ne pourra pas se prévaloir du défaut pour éluder sa
responsabilité et ne bénéficiera pas de la limitation de responsabilité prévue à l’article 6 de la
convention des Nations Unies sur le transport de marchandises par mer de 1978 ».
Donc le législateur sénégalais renvoie encore ici aux dispositions des Règles de
Hambourg concernant la limitation de responsabilité.
Le régime de la limitation est cependant différent si le transporteur a la qualité
d’armateur.
C- Le cas du transporteur armateur
L’armateur , selon l’article 1er
de la loi du 3 janvier 1969 est « celui qui exploite le
navire en son nom, qu’il en soit ou non propriétaire ».La limitation de responsabilité de
l’armateur joue de façon globale « par navire » et par événement alors que celle du
transporteur, joue par contrat ou par élément transporté43
. L’armateur, à la différence du
transporteur, bénéficie d’un régime spécial de limitation fixé forfaitairement. Cette limitation
est fixée par la convention de 1976.
43
Pierre Bonassies, Christian Scapel traité de droit maritime LGDJ §1105
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  • 1. 1 SOMMAIRE Introduction Générale………………………………………………………………… 5 Première partie : Le principe de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises au Sénégal et en France……………………………..……………… 11 Chapitre I : La qualité de transporteur maritime au Sénégal et en France ……… 13 Section I: Des fondements textuels différents……………..…….................................... 13 Section II : Notion de transporteur maritime de marchandises …………………………. 21 Chapitre II : L’étendue de la responsabilité du Transporteur maritime de marchandises au Sénégal et en France………….……………………………………. 27 Section I : DU SECTIONNEMENT A L’UNITE JURIDIQUE DU CONTRAT DE TRANSPORT MARITIME ………………………………………………………………………….. 28 Section II L’EXTENSION DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR PAR LES REGLES DE HAMBOURG ET CMM DE 2002 ……………………………………………………… 33 Deuxième partie : La mise en œuvre de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises au Sénégal et en France ……….……………………………………. 39 Chapitre I : Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité…………………. 41 Section I : Les conditions proprement dites……………….…………………………… 41 Section II : Les causes d’exonération de responsabilité et leur neutralisation …………. 44 Chapitre II : La limitation de responsabilité et l’action en responsabilité …………. 52 Section I : La limitation de responsabilité du transporteur maritime de marchandises … 52 Section II : L’action contre le transporteur maritime de marchandises.. 60 Conclusion Générale……………………………………………………………………… 65
  • 2. 2 ABREVIATIONS COCC : Code des Obligations Civiles et Commerciales CMM : code de la marine marchande CNUCED : conférence des nations unies sur le commerce et le développement CNUDCI: commission des nations unies pour le droit commercial international COCC: code des obligations civiles et commerciales DMF : droit maritime français DTS : droit de tirage spécial JORS : journal officiel de la république du Sénégal NU : nations unies NVOCC : non vessel operating common carrier OMI : organisation maritime internationale PAD : port autonome de Dakar PVD : pays en voie de développement SCGMI : société de courtage et de gestion maritime ivoirienne SOAEM : société ouest africaine d’entreprises maritimes
  • 3. 3 Résumé Le droit de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises est l’ensemble des règles qui régissent la responsabilité du transporteur maritime . Ce droit a considérablement évolué du fait notamment de la place que le transport maritime s’est créé aujourd’hui dans le commerce international. En effet , le transport maritime à lui seul représente 90% des échanges commerciaux internationaux. Au Sénégal ce régime de responsabilité a été pendant longtemps régi par le code de la marine marchande du 22 mars 1962, fortement inspiré par la convention de Bruxelles du 25 août 1924, mais à laquelle le Sénégal était partie, aujourd’hui son régime de responsabilité est régi par la convention de Hambourg que le Sénégal a ratifié en 1986 et auquel son code de la marine marchande est venue s’aligner par une modification en 2002. Quant à la France, son régime de responsabilité est régi en droit international par la convention de Bruxelles de 1924, et en droit interne par la loi du 18 juin 1966 et son décret d’application du 31 décembre de la même année. Ainsi les régimes appliqués en France comme au Sénégal mettent en place un système de responsabilité fondé sur le même principe (responsabilité limitée à la charge du transporteur de même que des cas d’exonération de responsabilité, délai de prescription de l’action ….), mais qui sont différents dans le fond, le régime de la Convention de Hambourg étant plus favorable aux chargeurs que celui de la convention et donc un système de responsabilité plus sévère à l’égard du transporteur.
  • 4. 4 Abstract The law concerning the responsibility of the goods shipping company involves all the rules that take into account the responsibility of the shipping agent. This law has evolved considerably because of the place sea transport has built up in the international trade today. Indeed, shipping alone represents 90% of international trades. In Senegal, this system of responsibility has been governed for long by the Merchant Navy Code on the twenty second of March, 1962, strongly inspired by Brussels Convention on the twenty fifth august, 1924. But Senegal left it. Today, the system of responsibility is governed by Hamburg Convention which was ratified in 1986 by Senegal and matched the Merchant Navy Code thanks to an amendment in 2002. When it comes to France, on international law, the system of responsibility is based on Brussels Convention and on domestic law by the law of June 18, 1966 and a decree specifying how it should be enforced on December of the same year. Then, the rules applied in France and in Senegal organize a system of responsibility based on the same principle (limited responsibility for the shipper as well as cases of exemption from responsibility, action limitation period). But they are different in substance because Hamburg Convention is more favorable to the loaders than the system of the convention. Then it has a system of responsibility that is harsher on the shipping company.
  • 5. 5
  • 6. 6 Le droit des transports de marchandises (par mer) se définit comme l’ensemble des règles qui régissent le déplacement d’une marchandise d’un port à un autre port par la voie de la mer. Aujourd’hui, le transport maritime est un des plus précieux outils du commerce international ; il représente, à lui seul, plus de 90 % des échanges commerciaux internationaux. Il est, en lui-même, hautement international, comme le sont d'ailleurs ses modes d'opérations. La plupart des problèmes et questions de politique, liés au transport maritime, transcendent les frontières nationales. Ainsi, le transport maritime constitue l'un des secteurs vitaux de l'économie dont la gestion optimale passe inévitablement par une coopération entre états, notamment au niveau de régions bien définies, et à l'échelle internationale, à savoir : l'OMI1 , la CNUCED. Le commerce maritime quant à lui, est un domaine assez vaste, impliquant plusieurs acteurs (transporteurs, chargeurs, manutentionnaire) et ayant d’importants enjeux économiques, d’autant que les opérations de transport sont assez souvent source de dommages quant aux marchandises transportées et par conséquent un régime juridique de responsabilité lui est applicable. Généralement cela implique des professionnels engendrant de ce fait la conclusion de contrat de transport maritime de marchandises qui peut être défini comme le contrat par lequel le transporteur s’engage à transporter d’un point à un autre une cargaison déterminée contre le paiement d’un fret. Ce droit des transports de marchandises s’est construit autour de la notion du risque de mer en raison des aléas que l’on peut rencontrer en mer durant la phase de transport et pouvant avoir d’importants enjeux financiers sur une expédition de marchandises ou la cargaison d’un navire, notamment en cas de perte ou de dommages. Au Sénégal comme en France le législateur s’est depuis longtemps attelé à préciser très clairement les obligations et la part de responsabilité des différents acteurs de l’opération de transport, plus particulièrement celle du transporteur maritime de marchandise. Le régime de responsabilité qui fera l’objet de notre étude, plus précisément le régime de responsabilité du transporteur maritime de marchandises s’appliquera au Sénégal et à la France. Ainsi chaque pays (le Sénégal comme la France) dispose de textes spécifiques en la matière, pour 1 OMI : ORGANISATION MARITIME INTERNATIONALE
  • 7. 7 régler tous les problèmes liés au transport maritime de marchandises notamment aux questions de responsabilité De ce fait, il existe une diversité juridique qui est le fruit d’un long conflit d’intérêts entre armateurs et chargeurs. La France a toujours été une grande puissance maritime d’ou l’ancienneté de ses règles de transport maritime. Déjà, le Droit Romain consacrait la responsabilité de l'armateur (le "nauta") pour les dommages causés aux marchandises et aux bagages des passagers ; C’est un principe de responsabilité de plein droit la force majeure2 étant l’exception. Dans l'Ancien Droit, on ne retient pas cette responsabilité de plein droit. On retrouve plutôt la responsabilité pour faute prouvée qui est retenue par le « Consulat de la Mer ». Quant à l'Ordonnance de la Marine de 1681, elle mettait l'accent sur la responsabilité du Capitaine, l'armateur ne paraissant responsable que par son intermédiaire. Le Capitaine est « responsable de toutes les marchandises chargées dans son bâtiment »3 Aussi le droit français de 1808 à 1936 était-il gouverné par le Code de Commerce notamment par l'article 222 qui dispose en son alinéa 1er que le Capitaine « est responsable des marchandises dont il se charge » et par l'article 230 qui précise que "la responsabilité du Capitaine ne cesse que par la preuve d'obstacles de force majeure". En d’autres termes le capitaine ne se libère de sa responsabilité qu'en faisant la preuve d’un cas fortuit ou de force majeure, le vice de la chose ou la faute du chargeur4 , ce régime étant donc plus sévère (loi de 36 et loi de 66 puis droit international). Sur le plan international, la France adoptera une grande convention internationale qui régit actuellement son transport international, il s’agira de la Convention internationale pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, appelée règles de la Haye signée 2 R. RODIERE, "Traité Général de Droit Maritime", Affrètements & Transports, Tome II, n°574; 3 Ordonnance de la Marine de 1681, art 9 4 R. RODIERE, "Traité Général de Droit Maritime", Affrètements & Transports, Tome II, n°576
  • 8. 8 à Bruxelles le 25 août 1924, et entrée en vigueur le 2juin 1931 ;texte qui marque un tournant important dans le droit du transport maritime international. Par la suite en droit français, on adoptera la loi du 9 avril 1936, loi qui sera remplacée plus tard par celle du 18 juin 1966 intitulée « « loi sur les contrats d'affrètement et de transport maritimes qui aujourd’hui régit le transport maritime interne de la France ainsi que son décret d’application du 31décembre de la même année ; les deux textes venant ainsi aligner le droit interne au droit internationale c’est à dire la convention de 1924. Cette évolution du droit maritime français influence en grande partie le Sénégal en raison des rapports séculaires qui le lient à France, ancienne puissance coloniale. Le Sénégal, pays de plus de 11 millions d’habitants5 avec une superficie de 196.200 kilomètres carrés, se situe à l’extrême ouest du continent africain. Le pays dispose en outre de 530 kilomètres de côte représentant ainsi une importante façade maritime à l’ouest avec l’atlantique. De par la position géographique du pays, le port de Dakar (capitale du Sénégal) bénéficie d’un avantage géographique aussi exceptionnel, car situé sur la pointe la plus avancée de la côte ouest africaine. Il est ainsi un véritable carrefour pour de nombreuses voies maritimes entre l’Amérique du nord, l’Europe, l’Amérique latine et le continent africain ; d’où le slogan du port autonome de Dakar (PAD) de : port océane de l’Afrique. En outre, le PAD est le premier port en eau profonde touché par les navires venant du nord et le dernier port touché à l’entrée par les navires provenant du sud. Contrairement à de la France, on constate au Sénégal qu’il n’existe, dans le domaine du transport maritime, qu’une seule loi particulière. C’est pourquoi les juges vont recourir au droit commun pour résoudre le contentieux maritime. La base légale est essentiellement constituée de Code des Obligations Civiles et Commerciales6 et le CCM (code de la marine 5 Statistiques nationales de l’année 2000. 6 IBRAHIMA KHALIL DIALLO le contentieux maritime devant le juge tome I éditions juridiques africaines Dakar 1992 P 123
  • 9. 9 marchande), s’il s’agit d’un transport interne, et aux conventions internationales pour ce qui concerne les transports internationaux. En effet ce n’est qu’après son indépendance (4 avril 1960) que le Sénégal a adopté un texte de droit maritime qui lui est propre en matière. Il s’agira du Code de la Marine Marchande (CMM) du 22 mars 19627 , texte fortement inspiré de la convention de 1924 sur le transport sous connaissement à laquelle le Sénégal était liée, ce code abrogeant de ce fait les textes internes antérieurs contraires. Par la suite le Sénégal a adhéré à la convention adoptée le 31 mars 1978, et entrée en vigueur le 1er novembre 1992 ; c’est « la Convention des Nations unies sur le transport de marchandises par mer », plus communément appelée « Règles de Hambourg ». L’esprit de cette convention est différent de celui de la convention de 1924 . Or, pendant longtemps le Sénégal n’a pas adopté de texte de droit interne qui venait s’aligner aux règles de Hambourg (comme l’impose le principe de la hiérarchie des normes). Le CMM restait encore le seul texte d’application en droit interne sénégalais, alors que, comme nous l ‘avons souligné, le CMM est fortement inspiré par la convention de 1924, texte qui n’était plus d’application au Sénégal. De ce fait, se posait un problème d’application et d’interprétation des textes concernant la responsabilité du transporteur maritime de marchandises au Sénégal (entre le droit interne et le droit international ) , problème qui ne se pose pas en France pays qui n’est pas lié par les règles de Hambourg. Ce n’est que 40 ans plus tard que le Sénégal décida enfin de modifier son CMM pour une conformité avec les Règles de Hambourg, ce par une loi N° 2002-22 du 16aout 2002 portant code de marine marchande. Ainsi on retrouvera une certaine fraîcheur dans ce nouveau texte et une certaine harmonie avec le droit maritime international, ce qui semblait bien évidemment nécessaire au vu de l’évolution considérable du domaine maritime depuis ces 40 dernières années qui rendaient le texte de 1962 inapproprié aux réalités du monde 7 Code de la marine marchande de la loi n° 66.32 du 22 mars 1962 JORS du 14mai 1962 p.787s
  • 10. 10 maritime sénégalais. Ce, notamment en matière de responsabilité du transporteur maritime de marchandises objet de notre étude. L’analyse de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises dans une approche comparative entre le droit sénégalais et le droit français pose de nombreuses interrogations. Quelle est l’incidence de l’application des règles de responsabilité de la convention de Hambourg sur le droit du transporteur maritime sénégalais ? Qu’en est-il du régime de responsabilité pour la France ? Et enfin quels rapprochements peut on faire entre les deux droits internes? La responsabilité du transporteur maritime étant un domaine assez large, chacun des deux pays disposant de ses propres législations en la matière. Il nous faudra donc, pour répondre à ces questions d’abord délimiter le régime de responsabilité du transporteur maritime de marchandises applicable au Sénégal et en France (I) puis ensuite étudier les règles de mise en œuvre de cette responsabilité propre à chacun des deux pays (II).
  • 11. 11 LE PRINCIPE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES AU SENEGAL ET EN FRANCE
  • 12. 12 Les contrats varient souvent selon les obligations qui pèsent sur les parties, il peut y avoir soit une obligation de moyen c’est à dire que le débiteur ne s’engage pas à un résultat précis, mais à faire tout le nécessaire pour exécuter son obligation) ; soit une obligation de résultat (le débiteur dans ce cas s’engage comme son nom l’indique à atteindre un résultat à défaut, il pet être déclaré comme responsable). Par le contrat de transport, chacune des parties s’engage à exécuter ses obligations, le transporteur s’engage en ce qui le concerne à acheminer les marchandises d’un port à un autre, ce dans les conditions requises par les textes que ce soit pour un transport interne que pour un transport international (exemple : obligation de soins appropriées….), c’est une obligation de résultat qui pèse ainsi sur le transporteur maritime de marchandises. Mais, pour étudier l’étendue de ses obligations, il faut d’abord cerner la notion même de transporteur maritime telle que définie par les textes de droit interne et les textes internationaux (Chapitre I) puis délimiter l’étendue ( dans le temps) de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises (Chapitre II) qui varie selon que ce soit en droit sénégalais ou en droit français.
  • 13. 13 Chapitre premier : La qualité de transporteur maritime de marchandises au Sénégal et en France Le transporteur maritime de marchandises est en principe la personne qui s’engage contractuellement à acheminer la marchandise confiée à lui par le chargeur d’un port à un autre. Ainsi en cas de manquement à ses obligations contractuelles il peut engager contractuellement sa responsabilité. Mais il peut arriver, aussi bien au Sénégal qu’en France, des situations dans lesquelles la personne qui se dit transporteur n’a pas réellement cette qualité, ce qui peut avoir des conséquences sur le régime de responsabilité applicable au transporteur. D’où la nécessité de déterminer la notion de transporteur au Sénégal et en France (Section II). Mais pour cela il faudra d’abord déterminer les fondements textuels de la responsabilité du transporteur maritime au Sénégal et en France (Section I). SECTION 1 : DES FONDEMENTS TEXTUELS DIFFERENTS Ces fondements sont différents dans les deux pays ; en France , on applique la convention de Bruxelles de 1924 , et la loi interne du 18 juin 1966 ainsi que son décret d’application de décembre de la même année. Quant au Sénégal, on y applique aujourd’hui les règles de Hambourg de 1978 ,et en droit interne, le CMM. D’où l’étude d’abord des textes internationaux, puis des textes de droit interne applicables dans chaque pays. § 1 : Les textes internationaux applicables en France et au Sénégal Au Sénégal et en France deux textes internationaux sont applicables en matière de responsabilité du transporteur maritime. Il s’agira d’une part de la convention de Bruxelles de1924 pour la France et, d’autre part, des règles de Hambourg pour le Sénégal.
  • 14. 14 A- La convention de Bruxelles de 1924 La convention de Bruxelles originelle a été signée à Bruxelles le 25 août 1924 et est entrée vigueur le 2 juin 1931. Communément appelée « règles de la Haye » ou Hague Rules » selon les anglophones ; cette convention pour « l’unification de certaines règles en matière de connaissement » a été approuvée en France par la loi du 9avril 1936 et promulguée par un décret du 25 mars 1937. Elle a aussi régi pendant longtemps le droit sénégalais de la responsabilité du transporteur maritime, ce jusqu’à l’adoption définitive des règles de Hambourg. Cette convention de droit substantiel, a un caractère impératif8 et est en quelque sorte le droit commun de la responsabilité du transporteur maritime au plan international. Elle est venue créer en quelque sorte un équilibre entre intérêt des chargeurs et des transporteurs, et prévoit pour celui-ci 17 cas d’exonérations de responsabilité. Elle a connu deux modifications par les protocoles modificatifs. La première a été faite par le protocole de Visby du 23 février 1968 qui est entré en application le 23 juin 1977, et en France le 10 juillet de la même année et qui vient modifier les articles 3 et 4 de la convention originelle en augmentant le montant de la limitation de la réparation, protocole qui n’a pas recueilli un nombre important de ratifications (environs un tiers des états qui ont ratifié la convention originelle). Le second protocole est celui du 21 décembre 1970 : qui s’est avéré indispensable avec la réforme du système monétaire international de 1978 avec l’abandon de l’or comme monnaie de référence au profit du DTS avec toujours très peu de ratifications, la France l’a ratifié le 18 novembre 1984. Cette convention a institué pour le transporteur maritime un régime de responsabilité de plein droit ; et ce à son article 3, ce qui veut dire qu’en cas de dommage inconnu, le transporteur est présumé responsable, à charge pour lui d’apporter la preuve contraire. Donc on a une présomption de responsabilité qui pèse sur le transporteur maritime de marchandises 8 Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 572 § 888
  • 15. 15 faisant présumer que jusqu’à preuve contraire de sa part, il a mal exécuté son obligation de résultat auquel il est tenu ; tel est l’esprit de la convention de Bruxelles. Reste que le transporteur pourra s’exonérer s’il peut établir l’existence d’un cas excepté prévu par la convention et qui sont des causes d’exonération de responsabilité du transporteur maritime, à défaut, la présomption de responsabilité demeure, c’est dans ce sens que va une décision de la Cour de Cassation du 4 mars 20039 . Cependant il n’en va pas de même pour les Règles de Hambourg. B- Les Règles de HAMBOURG de 1978 Adoptée le 31mars 1978, « la convention des NU sur le transport de marchandises par mer » ou Règles de Hambourg, du nom de la ville où elle a été signée est entrée en application le 1er novembre 1992 entre les pays qui l’ont ratifiés y compris le Sénégal qui l’a ratifié par une loi n°86.11 du 24 janvier 198610 . L’initiative de cette convention vient de l’intervention de la CNDCI et de la CNUCED sur demande des PVD notamment les pays de chargeurs qui considéraient la convention de Bruxelles comme trop favorable au transporteur maritime. Comme prévu ce texte apporte un certain nombre de modifications avec notamment : • Une responsabilité qui demeure mais qui repose sur la présomption de faute du transporteur et non de responsabilité cette règle se retrouve à l’art 5§1 de la convention qui dispose que « Le transporteur est responsable du préjudice résultant des pertes ou dommages subis par les marchandises ainsi que du retard à la livraison, si l'événement qui a causé la perte, le dommage ou le retard a eu lieu pendant que les marchandises étaient sous sa garde au sens de l'article 4 ». • La suppression de nombreux cas exceptés qui venaient alléger la responsabilité, du transporteur dans la convention de 1924. • L’introduction de la responsabilité du fait du retard. 9 Cour de Cassation du 4mars 2003 navire NL Crète9 DMF 2003 .1096 10 Journal officiel de la république du Sénégal (JORS) 1986 p 631
  • 16. 16 • Le délai de prescription passe à deux ans au lieu d’un an comme prévu dans la convention de 1924. • Extension de son domaine d’application aux transports d’animaux vivants et aux transports en pontée, ce qui était exclu dans Bruxelles . • La majoration du montant de la limitation de réparation. Cependant cette convention ne fait pas le poids devant celle de Bruxelles car elle n’a reçu que 32 ratifications depuis son élaboration, chiffre ne représentant qu’un et demi pour cent du tonnage de la flotte mondiale et ne comptent parmi eux aucune grande puissance maritime11 . Ainsi les règles de Hambourg sont loin de leur objectif premier qui était de remplacer à terme la convention de 1924. Pour que le texte de la convention de Hambourg entre en vigueur il fallait au moins 20 ratifications, chiffre atteint qu’en 1992 ce qui fait qu’au Sénégal on continuait à appliquer la convention de Bruxelles de 1924 à laquelle le Sénégal était liée (avant la ratification des règles de HAMBOURG) par ratification par une loi n° 77.118 du 26 décembre 197712 . § 2- Les textes de droit interne La France, grande puissance maritime s’est très vite dotée de textes concernant le transport maritime, plus précisément de lois qui règlent les questions de responsabilité du transporteur maritime. Parallèlement la législation sénégalaise est pauvre en la matière. Le seul grand texte de droit interne reste le CMM. A- Les dispositions de droit interne en France Déjà le droit romain consacrait le principe de la responsabilité de plein droit de l’armateur. Puis on a l’ordonnance de la marine de 1681 et le code de commerce de 1807 qui 11 Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 576 § 896 12 JORS du 21 janvier 1978 p 787S
  • 17. 17 assimilaient le contrat de transport à l’affrètement, mais ces textes n’avaient pas d’effet impératif13 . Ces textes étant anciens ; avec l’entrée en vigueur de la convention de 1924, il fallait harmoniser le droit français avec la convention internationale, ainsi le premier grand texte en matière de responsabilité du transporteur en France sera la loi du 12 avril 1936. Mais ce texte ne répondait pas réellement à ses objectifs, car il ne transpose pas véritablement la convention de 1924 en droit interne français. Donc une réforme est vite apparue nécessaire au législateur français. D’où la loi n° 66.420 du 18juin 1966 et ses décrets d’application : Le décret n° 66.1078 du 31 décembre 1966 qui introduit des dispositions concernant les réserves faites par le transporteur et le mode de calcul des limitations au kilo. Et le décret du 12 novembre 1967 qui vient préciser le mode de calcul du montant de la limitation par colis en cas d’utilisation de conteneur ou de palette. Cette loi intitulée loi « sur les contrats d’affrètement et de transport maritime » a connu plusieurs modifications, dont la dernière a été faite par une loi n° 87.922 du 23 décembre 1986, avec toujours le soucis d’harmoniser le droit français avec le droit international, objectif atteint dans l’ensemble, évitant au maximum les conflits entre le droit interne et la convention. L’objectif de cette modification était de rapprocher le droit interne de celui de la convention de 1924, telle que amendée par les protocoles modificatifs. Comme la convention de 1924, elle pose le principe de responsabilité de plein droit du transporteur maritime de marchandises, ce à son article 27 qui dispose que : « Le transporteur est responsable des pertes ou dommages subis par la marchandise depuis la prise en charge jusqu'à la livraison, à moins qu'il ne prouve que » le dommage est causé par un des cas exceptés prévus. 13 Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 574§892
  • 18. 18 Donc on trouve une certaine uniformisation de la loi de 1966 avec la convention de 1924. Au Sénégal cela s’est fait différemment. B- Les dispositions de droit interne sénégalais Avant l’indépendance du Sénégal en 1960, on appliquait dans le pays les règles françaises de droit maritime du fait que le Sénégal était encore une colonie française, donc soumise au droit français. Après l’indépendance le pays va mettre en place le premier grand texte qui règle les questions maritimes ; il s’agira du CMM. Donc le transport maritime sénégalais est aujourd’hui régi par le CMM sénégalais dont la première version date du lendemain de l’indépendance : c’est le CMM du 22 mars 1962, qui gouvernera le droit maritime sénégalais jusqu’en 2002 et dont les dispositions sont fortement inspirées de la convention de Bruxelles de 1924. En principe, lorsqu’un Etat ratifie la convention de Hambourg du 31 mars 1978, celle- ci devient par dénonciation dans les 5 ans de la convention de Bruxelles , partie intégrante de son droit positif, la convention de Bruxelles se trouvant alors abrogée. C’est dans ce sens que va un arrêt du tribunal régional de Dakar du 1er juillet 1989 NAVIRE AMAZONE. Il s’agissait d’un transport de 10.000 douzaines de couteaux d’Abidjan à Dakar. Un recours a été exercé par la société nationale d’assurance mutuelle dite SONAM contre la société de courtage et de gestion maritime ivoirienne (CGMI) et la SOAEM pour qu’elles soient déclarées responsables des manquants et avaries constatés sur la cargaison destinée à la SST. Dans cette affaire, les marchandises ont été livrées le 16juillet 1987, et la SONAM a intenté son action le 18juillet 1988, le CMM inspiré de la convention de Bruxelles prévoyait une prescription annale pour les actions en responsabilité contre le transporteur maritime de marchandises. Le juge dans son analyse, a retenu que cette prescription annale a été modifiée par l’article 20 de la convention de Hambourg intégrée au droit positif sénégalais depuis la loi du 24 janvier 1986, article qui prévoit un délai de prescription de deux ans à partir de la livraison ou du jour où elle aurait dû avoir lieu.
  • 19. 19 Décision très critiquable dans le sens où la convention de Hambourg n’était pas encore entrée en vigueur, étant donné qu’elle n’avait pas atteint le nombre de 20 ratifications nécessaires à son entrée en vigueur, seul le délai d’un an prévu par la convention de Bruxelles de 1924 et par le CMM, textes en vigueur à l’époque aurait dus être appliqués. En outre, l’article 17 de la constitution sénégalaise prévoyait à son alinéa 2 que les traités et accords internationaux « ne prennent effet qu’après avoir été ratifiés ou approuvés ». L’action était par conséquent prescrite en l’espèce. En outre le CMM de 1962 prévoyait, à son art 327, ce à l’image de l’article 10 de la convention de Bruxelles que ces dispositions « sont applicables à tout connaissement créé au Sénégal ». Ce qui peut être critiquable c’est le recours systématique au CMM car la règle est que la convention de Bruxelles devrait s’appliquer dès lors que le connaissement a été émis dans un pays contractant et que le transport est international, donc trois conditions : • Emission d’un connaissement • Connaissement émis dans un état contractant • Et un transport entre deux pays différents Or, le CMM, règle de droit interne ne devra s’appliquer que si le connaissement a été émis au Sénégal, que le transport soit interne ou international non régi par la convention de 1924. En effet quand on analyse la loi française du 18 juin 1966, elle prévoit que ses dispositions s’appliquent à tout transport maritime au départ ou à destination d’un port français. D’où une nécessaire réforme de l’article 327 du CMM qui en effet est une mauvaise transposition de l’article 10 des règles de la Haye. Plusieurs décisions des juridictions sénégalaises, après avoir constatés que le connaissement avait été émis à l’étranger, dans un pays ayant adhéré aux règles de la HAYE (trois conditions d’application de la convention de Bruxelles), ont tout de même appliqués le
  • 20. 20 CMM, on peut citer en exemple le jugement du tribunal régional de Dakar du 14 novembre 198714 . Dans cette affaire après avoir constaté l’émission d’un connaissement à Abidjan (la Côte d’Ivoire ayant adhéré à la convention de 1924) pour un transport de 22 colis de feuilles contreplaqués à destination de Dakar, le juge sénégalais a tout de même appliqué la LEX FORI (CMM sénégalais) alors que toutes les conditions étaient réunies pour l’application des règles de la Haye. Le juge a donc mis au profit sa loi nationale. Mais il faut noter cependant que ce n’est pas pour autant que le CMM du Sénégal ne s’appliquait pas à un transport international. En effet, à partir du moment où le connaissement a été émis au Sénégal, on pouvait appliquer le CMM. Donc au regard de ces lacunes, il a fallu réformer le CMM notamment son art 327, ce qui fut fait avec la modification du code de 1962 par une loi No 2002-22 du 16 Août 2002 portant Code de la Marine Marchande. Entre autres raisons, près d’une vingtaine de décret ont été pris pour l’application du code de 1962, entraînant une dispersion de la réglementation maritime sénégalaise. Aussi en quarante ans, le transport maritime a connu des évolutions considérables, d’où le besoin d’adaptation du texte de 1962. Ainsi, pour éviter les problèmes d’interprétation rencontrés dans le code de 1962, le code de 2002 a, dans son article 442, modifié l’art 327 du CMM de 1962 en des termes plus appropriés en disposant que « Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux transports effectués au départ ou à destination d’un port sénégalais » dans un chapitre intitulé le contrat de transport de marchandises par mer. L’autre apport du CMM de 2002 du Sénégal, c’est que les règles de Hambourg étant entrées en vigueur définitivement en 1992, ce code de 2002 est venu s’aligner à ces règles pour une conformité du droit interne sénégalais à son droit international, la convention de 1924 n’étant plus d’application. 14 Tribunal régional de Dakar jugement n°2058 du 14 novembre 1987 (ETS I Kary c/ Sté navale Transafric et autres navire « FREDERIQUE LEONIE »
  • 21. 21 De ce fait le code de 2002 a apporté des réformes importantes et permis une harmonisation avec le droit maritime international sénégalais régi par la convention de Hambourg. Concernant les règles de responsabilité du transporteur, le nouveau CMM de 2002 a adopté une solution simple ; en effet, elle stipule dans son article 453 que « Dans le cadre du présent code le régime de responsabilité du transporteur et du chargeur, la prescription et les règles de compétence sont ceux régis par la Convention des Nations Unies sur le transport de marchandises par mer de 1978 ». Le droit interne sénégalais fait un renvoi pur et simple aux dispositions des règles de Hambourg sur la responsabilité du transporteur maritime de marchandises. Quid de la conception de la notion de transporteur maritime au Sénégal et en France ? SECTION 2 : NOTION DE TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES AU SENEGAL ET EN FRANCE Dans un contrat de transport il y a plusieurs acteurs, et pour définir le régime de responsabilité, il faut définir le rôle et la fonction de chacun d’eux. Ainsi il faut définir la notion de transporteur maritime et par là, ce qu’est un transporteur substitué notion nouvelle apporté par les règles de Hambourg § 1 Notion de transporteur maritime Ici il faut distinguer entre le transporteur maritime proprement dit , et les autres personnes pouvant avoir cette qualité. A- Le transporteur maritime proprement dit Dans les règles de Hambourg, le transporteur maritime désigne toute personne par laquelle ou au nom de laquelle un contrat de transport de marchandises par mer est conclu avec un chargeur15 . Dans le CMM du Sénégal on ne retrouve pas de définition du terme 15 Article 1er §1 des règles de Hambourg
  • 22. 22 transporteur, on suppose qu’il renvoit simplement aux règles de Hambourg comme en matière de responsabilité . Dans la convention de Bruxelles de 1924, on retrouve une définition similaire qui dispose que « Transporteur » comprend le propriétaire du navire ou l'affréteur, partie à un contrat de transport avec un chargeur16 . Généralement l’identité du transporteur figure dans le document de transport, plus précisément dans le cadre supérieur droit. De ce fait quand l’identité du transporteur est établie dans ce document, si le transport a engendré des dommages, le tiers porteur du connaissement ( document de transport) devra donc demander réparation au transporteur dont le nom figure sur ce document ,qui aura pour ce tiers valeur de contrat , ce tiers n’étant engagé que dans les liens du contrat de transport17 . Il peut arriver que le connaissement ne donne aucune mention sur l’identité du transporteur, c’est le connaissement sans en–tête. Dans ce cas, des difficultés peuvent se poser pour le tiers porteur du document de transport quant à l’identité du transporteur notamment en cas de dommages, pertes ou avaries sur les marchandises objets du contrat de transport. En France pendant longtemps le tiers porteur du connaissement voyait souvent devant certaines juridictions son action contre le propriétaire armateur inscrit au registre d’immatriculation rejeter à défaut d’identité du transporteur18 . Les juges considéraient que l’armateur ne pouvait être tenu pour responsable car n’ayant pas agi en qualité de transporteur (solution critiquée ) tandis que d’autres juridictions jugeaient recevables leur requête dans ce sens tel est le cas de la cour d’appel d’Aix19 qui a considéré dans cette affaire qu’en « l’absence de toute indication portée au connaissement et précisant l’identité du transporteur maritime, l’armateur propriétaire , transporteur apparent , devait être réputé avoir acquis cette qualité20 » . 16 Article 1er .a de la convention de Bruxelles de 1924 17 Article 17.alinéa 2 de la loi du 18 juin 1966 18 Cours de cassation chambre commerciale 10 mai 1983 navire JULIA DMF 1984. 269 19 Cour d’appel d’AIX 14 février 1984 navire BaÏtin DMF 1985 .542 20 Pierre Bonassies, Christian Scapel, traité de droit maritime LGDJ p607 § 947
  • 23. 23 Pendant longtemps ces deux conceptions se sont opposées, mais la solution de la cour d’Aix semble être la plus juste dans la mesure où d’une part le tiers porteur du connaissement ne dispose d’aucun moyen pour déterminer l’identité du transporteur si ce n’est par le biais de l’armateur, et d’autre part l’armateur contre qui l’action est intentée pourra en retour se retourner contre le transporteur dont il doit certainement connaître l’identité on pourra établir la charge des responsabilités , et par là même il pourra (l’armateur) se dégager de toute responsabilité . C’est cette deuxième solution (celle de la cour d’Aix) qui a été retenue par la jurisprudence française notamment dans l’arrêt VOMAR de la chambre commerciale de la cour de cassation du 21 juillet 198721 . Mais d’autres personnes peuvent avoir la qualité de transporteur sans effectuer réellement l’opération de transport : il s’agira du cas du transporteur apparent, du consortium et du NVOCC22 B- L’extension de la qualité de transporteur Nous avons situation dans laquelle le connaissement indique le nom du transporteur alors que en réalité ce n’est qu’une apparence , un auxiliaire de transport , un transitaire ou un commissionnaire, un agent maritime pour des raisons commerciales va mentionner son nom sur le connaissement et apparaître comme le transporteur, alors que son rôle se limite à rassembler des marchandises puis confier leur transport à un véritable transporteur , qui lui, n’apparaîtra pas sur le document de transport. La jurisprudence est sans hésitation sur le régime appliqué à ce transporteur apparent et le condamne comme un transporteur réel, les énonciations du connaissement faisant foi pour son cocontractant et dans cette situation, en cas de dommages on lui appliquera les mêmes règles qu’au transporteur. 21 Chambre commerciale de la cour de cassation du 21 juillet 1987 navire VOMAR DMF 1987.573 22 NVOCC : non vessel operating common carrier
  • 24. 24 Autre situation, c’est la pluralité de transporteurs, qui résulte souvent d’une alliance entre armateurs pour exploiter des lignes en « consortium ». Généralement dans cette situation, le connaissement désigne l’ensemble des membres de l’alliance. Dans ce cas, se pose le problème de savoir qui est le véritable transporteur pour l’ayant droit. En pareil cas, le porteur du connaissement devra déterminer qui des membres du groupe est son transporteur, l’identité du navire qui effectue le transport figurant toujours sur le connaissement. Il pourra alors consulter le registre d’immatriculation, mais si ce transporteur n’est pas propriétaire du navire, il pourra alors assigner l’ensemble du groupe et demander leur condamnation « in solidum ». À eux par la suite de dire qui est le véritable transporteur maritime. Reste à voir le cas du NVOCC, qui peut être assimilé au commissionnaire de transport. Le NVOCC conclu un contrat de transport avec un transporteur maritime réel , mais sur le connaissement remis au tiers , c’est le nom du NVOCC qui y figurera , on peut le confondre avec le transporteur apparent , mais son rôle est beaucoup plus déterminant dans le contrat de transport dans la mesure où , par qualité il accepte d’assumer toutes les responsabilités liées au contrat de transport maritime, alors qu’il n’effectue pas lui-même l’opération de transport. Il a le statut de transporteur contractuel, car le lien contractuel existe entre lui et les propriétaires de marchandises et non entre ces derniers et le transporteur réel. On applique au NVOCC le même régime de responsabilité que le transporteur maritime réel et il sera soumis aux mêmes obligations que celui-ci. Ce qui semble être justifié notamment à la lecture de l’art 18 de la loi de 18 juin 1966 qui définit le transporteur maritime comme « celui qui s’engage à acheminer une marchandise déterminée d’un port à un autre ». D’où l’on peut affirmer que la base du contrat de transport est l’acheminement de la marchandise d’un point à un autre et non la personne qui s’en charge. On se basera alors sur les mentions du connaissement qui ont valeur de contrat. Autre notion, c’est celle de transporteur de fait ou transporteur substitué, notion nouvelle introduite par les règles de Hambourg
  • 25. 25 § 2 : transporteur de fait et transporteur substitué il faut d’abord définir la notion, puis étudier son régime juridique. A- Notion de transporteur substitué Selon les termes de l’article 1.2 des règles de Hambourg, Les termes « transporteur substitué » désignent toute personne à laquelle l'exécution du transport de marchandises, ou d'une partie de ce transport, est confiée par le transporteur et doivent s'entendre également de toute autre personne à laquelle cette exécution est confiée. On retrouve une définition identique dans le nouveau CMM du Sénégal de 2002 en son article 1er .b sur les définitions. Le CMM le définit comme toute personne à laquelle l’exécution du transport de marchandises ou d’une partie de ce transport est confiée par le transporteur et doit s’entendre également de toute autre personne à laquelle cette exécution est confiée. Ainsi cette notion que l’on retrouve en droit aérien23 (sous le terme transporteur de fait), est nouvellement introduite dans le droit du transport maritime international par les Règles de Hambourg. Le terme « toute personne » est d’une certaine neutralité. Ainsi, il suffit que l’opération de transport soit confiée à une autre personne que le transporteur qui a émis le connaissement pour le cocontractant (le chargeur et le destinataire) pour qu’on parle de transporteur substitué. Il agit à la suite d’un sous –contrat de transport avec le transporteur contractuel24 et donc il se « substitue » à celui-ci pour effectuer le transport, d’où le terme transporteur substitué, il n’a donc aucun lien avec le chargeur, il ne lui remet aucun connaissement et le document de transport qu’il remet au transporteur contractuel n’est qu’un connaissement de service25 . Quel est le régime juridique applicable dans ce cas au transporteur substitué ? 23 Convention de droit aérien de GUADALAJARA 18septembre 1961 (voir objet) 24 Colloque IMTM 1993, « l’entrée en vigueur des règles de Hambourg, observation de Pierres Bonassies 25 Pierre Bonassies, Christian Scapel Traité de droit maritime LGDJ p 612, § 953
  • 26. 26 B- Régime juridique applicable au transporteur substitué En droit commun le transporteur substitué n’ayant aucun lien avec le chargeur ou le destinataire, sa responsabilité sera engagée par ces derniers sur la base extra contractuelle, ce, en vertu des articles 1382 ou 1384 du code civil français ou des dispositions du COCC en la matière (article 137 et suivants). Mais les règles de Hambourg l’assimilent à un véritable transporteur contractuel. En effet, l’article 10 alinéa2 de ce texte dispose que : « Toutes les dispositions de la présente Convention régissant la responsabilité du transporteur s'appliquent également à la responsabilité du transporteur substitué pour le transport par lui effectué ». A la lecture de ce texte les dispositions de la convention de Hambourg seront appliquées au transporteur substitué au même titre que le transporteur réel, il en est de même au Sénégal. La conséquence de ce régime est que même en l’absence de lien contractuel entre le transporteur substitué, le chargeur comme le destinataire pourront agir contre le transporteur substitué sur la base contractuelle et invoquer de ce fait les dispositions des règles de Hambourg à son encontre, le transporteur substitué ayant alors le même statut que le transporteur contractuel.
  • 27. 27 CHAPITRE 2 : L ‘ÉTENDUE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES Il est nécessaire de déterminer le point de départ et la fin de l’opération de transport car c’est dans cet intervalle que se situe la responsabilité maritime du transporteur. En effet aussi bien au Sénégal qu’en France, que ce soient les règles de droit interne ou celles de droit international, le régime de responsabilité qui gouverne le transport maritime est un régime impératif, qui donc s’impose mais uniquement pour les opérations composant le transport maritime. Ainsi, au début et après la fin du transport maritime, le transporteur n’est en effet éventuellement responsable que par application d’autres règles généralement de droit commun. Il est donc apparu nécessaire au législateur de délimiter le début et la fin des opérations de transport. La convention de Bruxelles de 1924 délimitait l’opération de transport aux opérations matérielles de chargement et de déchargement. La loi française du 2avril 1936, dans le but de préciser la formulation de la convention de Bruxelles prévoyait que les dispositions de la convention s’appliquaient de la prise sous palan à la remise sous palan, ce, à son article 1er. Les opérations post et ante palan n’étant pas couvert par le régime de responsabilité applicable aux opérations de transport. Le Sénégal, à l’imitation de cette convention, prévoyait aussi dans le CMM de 1962 (article 313 alinéa 1.e), un sectionnement légal du transport maritime c'est-à-dire comme dans la convention du chargement au déchargement. Le doyen Rodière a longtemps combattu un tel cloisonnement et un tel sectionnement du contrat de transport. De ce fait, ses critiques et suggestions vont permettre la mise en place, à l’article 15 de la loi du 18 juin 1966 d’un nouveau domaine d’application qui va de la prise en charge à la
  • 28. 28 livraison, instituant ainsi une unicité juridique du contrat de transport. Ce qui va aussi influencer les règles de Hambourg qui vont opter aussi pour la même délimitation que la loi du 18 juin 1966. Cette solution sera suivie par le législateur sénégalais dans le CMM de 2002. SECTION 1 : DU SECTIONNEMENT A L’UNITE JURIDIQUE DU CONTRAT DE TRANSPORT MARITIME Pendant plus d’un demi-siècle, la durée de la responsabilité de transporteur maritime était considérée comme allant du chargement au déchargement (Convention de 1924 et CCMM Sénégal) ou « de palan à palan » selon la loi du 2 avril 1936, jusqu’à ce que le législateur s’oriente dans le sens d’une extension de la durée de responsabilité et une unicité du contrat de transport. §1: La limite de la responsabilité du transporteur maritime à la phase strictement maritime du transport. Cette délimitation, que l’on retrouve dans la convention de Bruxelles, avait entraîné un sectionnement du contrat de transport maritime de marchandises. A- La délimitation du contrat de transport dans la convention de Bruxelles Pour délimiter les bornes du transport maritime, la convention de Bruxelles appliquait un critère matériel qui va du chargement au déchargement des marchandises, on retrouve cette règles à son article 1er .e qui dispose que « transport de marchandises couvre le temps écoulé depuis le chargement des marchandises à bord du navire jusqu’à leur déchargement du navire ». A la convention de rajouter à son article 3§2 que « le transporteur procédera de façon appropriée et soigneuse au chargement à la manutention, à l’arrimage, au transport, à la garde, aux soins et au déchargement des marchandises transportées ».
  • 29. 29 Ainsi, selon la convention de Bruxelles, la période maritime du transport commence avec le chargement des marchandises à bord du navire et finit par leur déchargement sur le quai. Elle excluait donc de cette période les opérations qui précèdent le chargement et celles qui succèdent le déchargement. La convention opère de ce fait un sectionnement légal du contrat de transport en trois phases : •Une phase terrestre qui couvre la période avant le chargement, •La phase maritime qui va du chargement au déchargement et •Une phase terrestre qui succéde les opérations de déchargement Seule la phase maritime relève du domaine impératif prévu par la convention, les deux phases terrestres étant soumises à la liberté contractuelle et au droit commun. B- Le sectionnement légal en droit interne Ce sectionnement s’est fait aussi bien en droit français qu’en droit sénégalais. 1- Le sectionnement légal du contrat de transport en droit français En droit français, ce sectionnement prévu par la convention de Bruxelles de 1924 est repris par la loi du 2avril 1936, qui disposait en son art 1er alinéa 2 que la loi s’appliquait « seulement de la prise en charge des marchandises sous palan jusqu’à leur remise sous palan au destinataire ». Or, le fait pour la loi de préciser que le chargement et le déchargement, s’effectuent « sous palan, l’a sensiblement éloigné de la convention et lui a valu les critiques de la doctrine »26 . Ainsi l’on était face à l’inadaptation du texte de 1936 aux méthodes nouvelles de chargement et de déchargement, car déjà en 1936 beaucoup de chargements de navires ne se faisaient plus sous palan (apparition des navires Ro-Ro, les porte- conteneurs)27 . Autre inadéquation du texte de 1936, il s’agissait de la difficulté à déterminer le moment exact du chargement ou du déchargement pour certaines marchandises notamment 26 René Rodière Bulletin des transports 1978 P 295 27 Pierre Bonassies, Christian Scapel TRAITE DE DROIT MARITIME LGDJ p 590 § 915
  • 30. 30 des cargaisons liquides en vrac ou de marchandises comme les grains en vrac solides qui étaient chargées par aspiration par exemple. Il est d’ailleurs irrecevable de dire que la manutention de telles cargaisons s’effectue sous palan. D’autre part, on a reproché à la loi d’avoir introduit en droit maritime français le sectionnement du contrat de transport28 , ce qui était déjà fait dans les règles de la Haye. Le Sénégal aussi a connu cette période de sectionnement du transport maritime. 2- Le sectionnement légal du contrat de transport en droit sénégalais Le CMM du Sénégal de 1962 inspiré du texte de la convention de Bruxelles de 1924, a repris les mêmes termes de l’article 1er alinéa 2 au terme de son article 313alinéa 1er .e à savoir que « transport de marchandises couvre le temps écoulé depuis le chargement des marchandises à bord du navire jusqu’à leur déchargement du navire ». Ainsi au Sénégal on appliquait le critère matériel pour déterminer la phase maritime des opérations. Pour les phases terrestres du transport même on avait un renvoi au droit commun. Le juge sénégalais ne faisait pas cependant une application systématique de ce droit .En effet, dans un jugement du tribunal de première instance de Dakar, affaire du GAROUFALIA 29 . Dans cette affaire, le juge sénégalais a considéré qu’en « ce qui concerne la phase terrestre les principes du droit international privé sénégalais donne compétence à la loi du lieu d’exécution du contrat, soit la loi sénégalaise selon les termes de l’article 848 alinéa4 du code de la famille ». Dans cet arrêt, le juge sénégalais a déterminé comme loi applicable au contrat, la loi du lieu de chargement, ce qui l’a conduit à appliquer sa propre loi. Le doyen Rodière a pendant longtemps combattu ce cloisonnement du contrat de transport, et ce découpage du contrat de transport, ce qui a abouti en France à une réforme de la législation par la loi du 18 juin 1966, qui met en place une nouvelle délimitation allant de la prise en charge à la livraison. Texte qui va fortement inspirer les Règles de Hambourg, dont le 28 Fraikin « le transport maritime sous connaissement à l’heure du marché commun » LGDJ paris 1966 p 174 29 TPI Dakar jugement n° 635 du 22 MARS 1980 la Foncière c/SOAEM et société astromando CN navire s/s GAROUFALIA
  • 31. 31 Sénégal va aussi s’inspirer pour modifier aussi sa législation en la matière, ce qui va aboutir à une unicité du contrat de transport § 2- L’extension de la de responsabilité : par la loi du 18 juin 1966 Par de vives polémiques sur le sectionnement du contrat de transport, les contestations du Doyen Rodière ont abouti à la fin du sectionnement du contrat de transport qui régissait jusqu’en 1966 le contrat du transport maritime en France, et ont entraîné la mise en place d’une unité juridique qui jusque là gouvernera le régime du contrat de transport. A- Les fondements de la réforme Le régime du palan à palan, institué par la loi française de 1936, du fait du sectionnement du contrat qu’il engendrait a été à l’origine de vifs débats de 1936 à 1966, notamment quant au régime à appliquer aux phases terrestres du contrat. L’article 15 de la loi du 18 juin 1966, à l’initiative du Doyen Rodière, vient mettre en place un nouveau domaine d’application « de la prise en charge jusqu’à la livraison » cela rompt ainsi en droit français avec la formule du « palan à palan » instituée par la loi de 1936, l’objectif était de mettre fin au sectionnement du contrat de transport et d’instituer une unité du contrat qui couvrira l’ensemble des opérations liées au contrat. En effet en France, le doyen Rodiére auteur de la loi de 1966 a longtemps combattu ce sectionnement du contrat de transport. Son idée est de créer un système à géométrie variable. Il considérait que le « sectionnement était déraisonnable » et que « l’unité juridique du contrat devait prévaloir » afin que les conditions de la marchandise soient les mêmes, dès lors qu’elle était sous la garde du transporteur, qu’elle se trouve avant ou après palan, dans les entrepôts de l’armateur ou dans les cales du navire, d’où l’application du régime du transport maritime depuis la prise en charge jusqu’à la livraison30 . 30 Pierre Bonassies, Christian Scapel, traité de droit maritime LGDJ § 917
  • 32. 32 Ainsi sera pris en compte l’ensemble des opérations du contrat à partir de la prise en charge, en passant par la prise sous palan et la remise sous palan jusqu’à la livraison de la marchandise. De ce fait, la réforme aura des conséquences notoires sur le régime de la responsabilité du transport notamment pour le transporteur. B- Les apports de la réforme L’idée de délimiter les opérations de transports de la prise en charge jusqu’à la livraison permet une division du contrat de transport en deux étapes et d’inclure dans cette délimitation, des phases qui étaient exclues à savoir les phases de séjour des marchandises à quai en attendant leur chargement en cale, au port de chargement et leur séjour (toujours) en cale en attendant leur récupération par le destinataire au port de déchargement. Mais le législateur de 1966 ne donne pas une définition des termes prise en charge et livraison, donnant ainsi au transporteur une liberté contractuelle quant à la fixation des moments de la prise en charge et de la livraison. La prise en charge de la marchandise par le transporteur marque le point de départ de l’opération de transport et sa livraison au destinataire lorsqu’elle parvient à bon port, la fin de l’opération de transport maritime. La prise en charge de la marchandise s’effectue par « l’appréhension des marchandises par le capitaine ou les agents du transporteur ». La livraison elle, peut se définir comme l’appréhension de la marchandise par le destinataire, son représentant ou le tiers porteur du connaissement au port de débarquement. Mais par une trop grande liberté, le transporteur pourrait être tenté de réduire le plus possible sa responsabilité, en retardant le moment de la prise en charge et en anticipant celui de la livraison.
  • 33. 33 Pour éviter cela, l’article 38 du décret du 31 décembre 1966, est venu modifier l’article 15 de la loi de 1966 en y ajoutant une disposition reprenant l’art 3§2 de la convention et selon laquelle « (……) le transporteur procède de façon approprié et soigneuse au chargement …. Et au déchargement de la marchandise » Cependant comme il est souligné dans le traité31 que la liberté du transporteur même limitée, « certaines opérations à quai antérieures à la prise en charge contractuelle ou postérieures à la livraison contractuelle, échapperont au régime du transport maritime ». Mais on est cependant bien loin du régime du sectionnement que le texte de 1966 a voulu écarter, car pour les autres intervenants à côté du transporteur maritime on a instauré un régime de responsabilité qui se rapproche de celui du transporteur maritime, (a peu prés les mêmes règles), notamment les intervenants à quai dans la phase terrestre du transport. SECTION 2 : L’ETENDUE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR SOUS LES REGLES DE HAMBOURG ET LE CMM DE 2002 Influencés par le renouveau de la loi de 1966 sur la durée de la responsabilité, les Règles de Hambourg ont repris les mêmes règles qui seront aussi suivis au Sénégal lors de la réforme du CMM. §1: - La délimitation de la responsabilité par les règles de Hambourg et le CMM sénégalais Les règles de Hambourg, ont en effet repris, en des termes identiques, les dispositions de l’article 15 de la loi française de 1966, à son article 4§1. Et à cet article 4 de rajouter au § 2 que « la responsabilité du transporteur en ce qui concerne les marchandises couvre la période pendant laquelle les marchandises sont sous sa garde au port de chargement, durant le transport et au port de déchargement ». 31 Pierre Bonassies, Christian Scapel traité de droit maritime LGDJ § 917)
  • 34. 34 Ainsi au Sénégal pas de grande surprise, suite à la réforme du CMM, de nouvelles dispositions sont venues mettre fin au sectionnement juridique que l’on retrouvait à l’article 313 alinéa 1er du CMM de 1962. Les nouvelles dispositions que l’on retrouve à l’article 441 du CMM de 2002, venus s’aligner sur les Règles de Hambourg, énoncent que les règles relatives au contrat de transport s’appliquent « de la prise en charge à la livraison ». Ainsi ces textes à l’exemple de la loi française instaurent une unicité juridique de contrat de transport en droit interne et international sénégalais. L’un des apports des règles de Hambourg est, qu’à la différence de la loi française de 1966, les règles de Hambourg ont pris le soin de définir les notions de « prise en charge et de livraison ». A- Notion de prise en charge En effet, La convention de Hambourg énonce en son article 4,2.a que « les marchandises sont réputées être sous la garde du transporteur à partir du moment où celui-ci les prend en charge des mains : i) du chargeur ou d’une personne agissant pour son compte ; ou ii) d’une autorité ou autre tiers auquel les marchandises doivent être remises pour expédition, conformément aux lois et règlements applicables au port de chargement. De part ces dispositions on peut déduire qu’il y a prise en charge dès lors que le transporteur accepte la marchandise qui lui est confiée pour être transportée. Cette prise en charge n’est liée à aucune modalité particulière de manutention, la seule acceptation par le transporteur vaut application du régime du contrat de transport. Le texte nous donne une définition matérielle de la notion, ainsi la prise en charge se traduit par le transfert effectif de la marchandise aux mains du transporteur, permettant ainsi
  • 35. 35 de ne pas confondre avec la prise en charge juridique, qui est juste un transfert formel (par signature par exemple) alors que la marchandise n’a pas effectivement encore été remise au transporteur ; ceci pouvant poser un problème de responsabilité à savoir qui est responsable si la marchandise subi un dommage ou est perdue avant sa remise effective au transporteur, la marchandise n’étant pas encore sous sa garde effective (du transporteur). B -Notion de livraison La livraison peut se définir comme la délivrance par le transporteur ou son représentant de la marchandise au destinataire. Les règles de Hambourg nous en donnent une définition expresse à l’article 4,2 b qui énonce que les marchandises sont réputées sous la garde du transporteur « jusqu’au moment où il en effectue la livraison : i) en remettant les marchandises au destinataire ; ou ii) dans le cas ou le destinataire ne reçoit pas les marchandises du transporteur, en les mettant à la disposition du destinataire conformément au contrat ou aux lois ou aux usages du commerce considéré applicables au port de déchargement ; ou iii) en remettant les marchandises à une autorité ou autre tiers auquel elle doivent être remises conformément aux lois et règlements applicables au port de déchargement ». Comme pour la prise en charge , le texte nous donne ici une définition matérielle de la notion de livraison pour éviter la même confusion à savoir entre livraison effective et livraison juridique qui peut se faire aussi alors que la marchandise est encore entre les mains du transporteur. Se pose aussi le même problème à savoir quel régime appliquer en cas de dommages sur la marchandise entre le moment de la livraison juridique et celui de la livraison effective.
  • 36. 36 Au Sénégal le CMM reprend l’article 4§1 mais ne définit pas comme dans la loi de 1966 les notions de livraison et de prise en charge, généralement les juges sénégalais appliquent le critère de la prise en charge matérielle par le transporteur et de la délivrance matérielle au destinataire, définition classique. Les règles de Hambourg et le CMM sénégalaises bien qu’ils se soient inspirés du texte de 1966 présentent une lacune importante en ce qu’ils n’encadrent pas la liberté contractuelle du transporteur quant à la détermination de la prise en charge et de la livraison (ce que fait l’article 38 du décret du 31 décembre 1966 précité en droit français). Ainsi en vertu de ces textes, le transporteur pourra se dégager contractuellement de toute responsabilité en cas de dommages subis par la marchandise avant les opérations de déchargement, estimant que celle ci étant à la charge du destinataire. §2: Délimitation de la garde : entre la prise en charge et la livraison La notion de garde est une notion nouvelle introduite par les règles de Hambourg à l’art 4§2 A - Portée de la notion de garde L’article 4-1 des règles de Hambourg énonce que le transporteur est responsable durant la période « pendant laquelle les marchandises sont sous sa garde au port de chargement, durant le transport et au port de déchargement, de ce fait le sectionnement institué auparavant au Sénégal par la convention de 1924 et le CMM de 1962 sont écartés. Cette notion de garde délimite le domaine d’application du régime de responsabilité au transporteur maritime de marchandises qui commence à partir de la prise en charge de la marchandise au port de chargement par le transporteur, jusqu’à sa livraison au port de déchargement ou port de livraison. La garde se situera alors entre la prise en charge et la livraison. Ce qui veut dire que les étapes précédant la prise en charge et celles qui succèdent à la livraison échappent à la période de garde, donc au contrôle du transporteur.
  • 37. 37 Quelles sont les conséquences d’une telle délimitation ? Il en résulte donc que le transporteur est responsable tant que la marchandise est sous sa garde, depuis la prise en charge effective , jusqu’à la livraison effective au destinataire. A contrario, le transporteur échappe à toute responsabilité en cas de dommages subis par la marchandise, dès lors que la marchandise n’est plus, ou n’est pas encore, sous son contrôle et bien que le chargeur ne l’ait pas encore remise au transporteur ou qu’un destinataire n’ait pas encore pris délivrance de celle-ci. Mais qu’en est t-il du régime à appliquer lorsque la marchandise n’est pas sous la garde du transporteur ? B- Les phases exclues de la garde La garde telle que posée à l’article 4 des règles de Hambourg, se situe entre la prise en charge à la livraison. Ainsi, la phase qui précède la prise en charge, et celle succédant à la livraison échappent au domaine d’application du régime du contrat de transport maritime. Dans ce cas quel régime leur appliquer étant donné que ces phases sont en quelque sorte liées au processus des opérations de transports ? Pour résoudre la question, les juges sénégalais comme dans le CMM de 1962 renvoient aux dispositions nationales applicables au port de chargement ou au lieu d’exécution du contrat. Les règles de Hambourg renvoient aux dispositions nationales applicables au port de chargement ou de déchargement ou au contrat. Ce qui peut poser un problème d’uniformité car là où le Sénégal prévoit l’application des dispositions nationales applicables au port de chargement ou au lieu d’exécution du
  • 38. 38 contrat, d’autres Etats prévoient l’application de règles différentes, les usages n’étant pas les mêmes dans chaque port.
  • 39. 39 LA MISE EN ŒUVRE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES AU SENEGAL ET EN FRANCE
  • 40. 40 Le contrat de transport fait peser sur le transporteur maritime, une obligation de résultat que l’on retrouve tant en droit commun qu’en droit maritime. En effet, par ce contrat, le transporteur s’engage « à acheminer une marchandise déterminée d’un port à un autre »32 . Il s’ensuit qu’il est responsable du seul fait de l’inexécution de son obligation. En outre les textes font peser sur le transporteur d’autres obligations à savoir d’abord l’obligation, avant et au début du voyage, de faire diligence pour mettre le navire en état de navigabilité33 . L’obligation de résultat repose en fait sur l’acheminement de la marchandise à bon port et en bon état. Mais le transporteur pourra s’exonérer en faisant la preuve d’un cas excepté prévu par les textes. Il faut cependant préciser qu’une fois que le transporteur aura prouvé l’existence de ce cas excepté et celle du lien de causalité, entre le dommage et le cas excepté, il n’a pas à faire la preuve de l’absence de faute de sa part. C’est dans ce sens que va une décision de chambre commerciale de la cour de cassation du 5 juillet 199434 . Ainsi il faut voir qu’elle sont les conditions de mise en œuvre de cette responsabilité du transporteur maritime de marchandises (I) puis étudier l’action même en responsabilité contre ce transporteur (II) au Sénégal et en France. 32 Article 15 de la loi du juin 1966 33 Article 3§1 des règles de la Haye et article 21 de la loi du 18juin 1966 34 Chambre commerciale de la cour de cassation du 5 juillet 1994, navire AL Hoceima DMF 1994 P 760
  • 41. 41 Chapitre premier : Les conditions de mise en œuvre de responsabilité du transporteur maritime de marchandises En droit commun, quiconque cause un dommage à autrui doit le réparer. De même en droit maritime en cas de dommages à la marchandise les textes posent le principe de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises, avec une particularité, c’est l’introduction du retard par les règles de Hambourg comme condition de responsabilité du transporteur. Ainsi le droit maritime sénégalais et français prévoit chacun les conditions dans lesquelles la responsabilité du transporteur peut être mise en œuvre (Section I). Mais le particularisme des deux droits réside dans les causes d’exonération de cette responsabilité, causes pouvant être neutralisées (Section II). SECTION 1 : LES CONDITIONS PROPREMENT DITES DE MISE EN ŒUVRE DE LA RESPONSABILITE Il faudra voir d’une part les dommages couverts , et d’autre part le cas du retard qui a été introduit par les règles de Hambourg. § 1 : les dommages couverts Selon les textes la responsabilité couvre les pertes ou dommages subis par la marchandise. L’article 27 de la loi de 1966 prévoit que le régime de responsabilité ne couvres que les « pertes ou dommages subis par la marchandise ». A la lecture de ce texte sont visés uniquement les dommages causés à la marchandise elle-même, et non les dommages qui résulteraient de l’opération de transport. Ces dommages n’étant pas couverts par le régime de
  • 42. 42 responsabilité applicable au transporteur, le transporteur pourra être quand même tenu pour responsable de ces dommages autres que ceux causés à la marchandise, mais sous un régime autre que celui de la responsabilité du transporteur maritime de marchandises, les dommages visés par le législateur de 1966 étant donc uniquement les dommages matériels. Le champ d’application est plus large dans la convention de Bruxelles qui étend en effet le régime « aux pertes ou dommages » (article 4§ 1 et 2), et prévoit une application du montant de la limitation « aux pertes ou dommages subis par la marchandise, ou concernant celle-ci » (article 4§5), reste à voir jusqu’où va cette extension. La réponse varie généralement en fonction des juridictions saisies, notamment s’agissant des préjudices commerciaux. Les juridictions anglaises ont tendance à faire une extension à ces domaines, en la soumettant à la condition que le préjudice ait pu être prévisible par le transporteur35 , mais les juridictions françaises ne semblent pas pratiquer une telle extension, comme on nous le souligne dans le traité. L’article 5§1 des règles de Hambourg prévoit aussi une application de son régime de responsabilité pour « pour les préjudices résultant des pertes ou dommages subis par la marchandise….. » Mais il faut aussi déterminer la nature de ses dommages. Le dommage peut se définir comme la dégradation physique de la marchandise. En outre, les règles de Hambourg nous donnent une définition de la perte, à l’article 5.3 qui dispose « L'ayant droit peut considérer les marchandises comme perdues si elles n'ont pas été livrées comme il est prescrit à l'article 4 dans les 60 jours consécutifs qui suivent l'expiration d'un délai de livraison conforme au paragraphe 2 du présent article ». Le principe est qu’en cas de perte ou de dommages, l’ayant droit (chargeur ou destinataire) devra le notifier au transporteur, ce par l’émission de réserves (article 19 des règles de Hambourg). Mais il faudra faire la distinction entre dommage apparent et les dommages non apparents. 35 Pierre Bonassies, Christian Scapel, Traité de droit maritime LGDJ P 681 ? §1069
  • 43. 43 A-Pour les dommages apparents L’article 19.1 des règles Hambourg pose une obligation pour les ayant droits d’émettre un avis de pertes ou de dommage à l’encontre du transporteur « au plus tard le premier jour ouvrable suivant le jour où les marchandises lui ont été remises ». Le texte de la convention de Bruxelles pose quant à lui un délai plus réduit d’émission des réserves à son article 3 « par écrit au transporteur ou à son agent au port de déchargement, avant ou au moment de l'enlèvement des marchandises, et de leur remise sous la garde de la personne ayant droit ». A défaut les marchandises sont présumées être livrées conformément aux énonciations du document de transport, mais ceci est une présomption simple. B-Pour les dommages non apparents Ce sont ceux que l’on ne peut pas déceler à partir de l’extérieur du colis. L’article 19§2 porte le délai des réserves dans ce cas à 15 jours à partir du jour où les marchandises ont été remises, alors que ce délai est de 3 jours ouvrables dans le texte français (article 57 du décret de 31 décembre 1966) et dans la convention de 1924. Le texte sénégalais (CMM de 2002) ne contient aucune disposition analogue sur la question renvoyant toujours aux règles de Hambourg. Il faut aussi noter que la responsabilité du transporteur maritime de marchandises peut être engagée en cas de retard dans la livraison. §2- Le cas du retard Les dommages dus au retard sont une des nouveautés des règles de Hambourg, en effet la notion n’est visée expressément ni par la convention de 1924 ni par le législateur français. Seul, en effet l’article 5.1 des règles de Hambourg énonce le principe suivant lequel le
  • 44. 44 transporteur est responsable non seulement des pertes ou des dommages subis par la marchandise mais aussi du retard à la livraison., notion de retard que le texte définit à son article 5.2 qui dispose que « Il y a retard à la livraison lorsque les marchandises n'ont pas été livrées au port de déchargement prévu par le contrat de transport par mer, dans le délai expressément convenu ou, à défaut d'un tel accord, dans le délai qu'il serait raisonnable d'exiger d'un transporteur diligent compte tenu des circonstances de fait ». Ainsi les règles de Hambourg ont tenté de matérialiser le retard. Quant au délai, il peut être fixé contractuellement. Dans ce cas la responsabilité du transporteur pourra être engagée s’il ne respecte pas le délai prévu au contrat. A défaut de ce délai convenu le transporteur est tenu d’assurer le transport de façon appropriée et de respecter un délai normal d’acheminement. Mais il faut cependant noter que le transporteur maritime de marchandises peut voir sa responsabilité exonérée dans certaines situations prévues par les textes. SECTION 2 : LES CAUSES D’EXONERATION DE RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES ET LEUR NEUTRALISATION Alors que la Convention de Bruxelles a aménagé une liste assez conséquente de cas (17 cas exceptés) qui se veulent, en principe, libératoires de la responsabilité du transporteur, les Règles de Hambourg sont plus restrictives sur la question. Seulement deux (02) cas) y sont pris en compte. Le texte de 1966 a voulu réduire le champ de l’exonération en prévoyant seulement 9 cas. Quant au droit sénégalais, il opère un simple renvoi aux règles de Hambourg sur la question. § 1- Les causes d’exonération prévues par les textes
  • 45. 45 On peut le classer en quatre catégories A- Les cas exceptés tenant à des événements extérieurs au navire et à la cargaison Il s'agit : Des périls de mer : Communément appelés « fortune de mer ». En France, on retrouve la notion à l’article 4.2.C des Règles de la HAYE. On peut citer à titre d’exemple le mauvais temps qui n’est retenu qu’à des conditions très strictes. Ainsi les tribunaux français refusent de la retenir comme cas exceptés si le mauvais temps était prévisible, ou habituel, d’autant plus que les navires modernes sont armés contre ces risques36 . Le transporteur qui invoque ce cas devra donc démontrer l’imprévisibilité de l’événement. D'un «acte de Dieu» : notion ne faisant l’objet d’aucune définition précise, il correspond à l’intervention du hasard comme la foudre37 . Des faits de guerre : qui est apprécié en fonction de l’intensité. Du fait d'ennemis publics : il s’agira par exemple des actes de piraterie en haute mer D'un arrêt ou fait du prince : c’est « tout ce qui peut être la suite de décisions prise par les autorités établies38 . Le transporteur ne peut l’invoquer que s’il s’est vu interdire le déchargement de sa marchandise D’une restriction de quarantaine que l’on, peut assimiler au fait du prince, De grèves ou Lock-out : retenu comme cas excepté sauf qu’ils ne doivent pas être provoqués par la faute du transporteur D'émeutes ou de troubles civils 36 Tribunal de commerce de Marseille 3mars 1995, navire JOLLY Grigio DMF 1996, p 251 n° 69 37 Traité de Rodière tome II n° 760 38 Traité de Rodière tome II n° 760
  • 46. 46 La convention rajoute un cas excepté fourre-tout à l’article 4§2 qui vise les « faits constituant un événement non imputable au transporteur ». Il s’agit des dommages ayant toute autre cause ne provenant pas du fait ou de la faute du transporteur ou des ses agents préposés. La loi de 1966 ne se réfère qu’à trois cas spécifiques à savoir l’incendie, la grève, l’acte ou la tentative de sauvetage et pour le reste elle les regroupe sous la formulation synthétique des faits « constituant un événement non imputable au transporteur » (article 27 d de la loi de 1966). Ce sont des cas que l’on peut qualifier de force majeure, qui se définit comme un événement imprévisible et irrésistible. Cela entraîne une nuance entre les deux textes dans le sens où dans un transport soumis à la loi de 1966, le transporteur qui invoque un cas résultant d’un fait extérieur devra faire la preuve que ce fait ne lui est pas imputable, étant non seulement pour lui extérieur, mais aussi imprévisible et insurmontable, alors que sous le régime de la convention de 1924, le transporteur qui invoque un cas exceptés devra seulement prouver que les circonstances invoqués correspondent bien à la qualification du cas invoqué 39 . B- Les cas exceptés tenant au fait de la marchandise ou à la faute du chargeur L’article 4§2 de la convention de 1924 prévoit que ni le transporteur ni le navire ne seront responsables pour pertes et dommages résultant : (i) D'un acte ou d'une omission du chargeur ou propriétaire des marchandises, de son agent ou représentant; (m) De la freinte en volume ou en poids ou de toute autre perte ou dommage résultant de vice caché, nature spéciale ou vice propre de la marchandise ; (n) D'une insuffisance d'emballages; (o) D'une insuffisance ou imperfection de marques. 39 Chambre commerciale de la cour de cassation du 7 décembre 1999 navire Aydan DMF 2000 P 828
  • 47. 47 La principale faute du chargeur est la faute d’emballage, de marquage ou de conditionnement de la marchandise. Le vice caché de la marchandise ou vice propre est aussi exonératoire de la responsabilité. Dans ce cas le transporteur devra faire la preuve que le dommage résulte bien de ce vice. L’ayant droit de la marchandise peut aussi faire la preuve que le dommage résulte en tout ou partie de la faute du transporteur. Quant à la freinte de route, elle se rapproche légèrement du vice propre, c’est le « fait pour une marchandise de perdre du poids ou du volume du fait de la dessiccation, évaporation ou dispersion due à sa nature »40 . On peut citer en exemple le tabac, le vin, …, le taux de perte varie selon les ports et selon la nature de la marchandise transportée. C- Les cas exceptés tenant à l’exploitation du navire Il s’agit de : L'incendie: prévue aussi bien par la convention que par la loi de 1966. Mais l’article 27 de la loi de 1966 prévoit la possibilité pour le chargeur de prouver que la faute du transporteur a participé à la production du dommage ou est à l’origine même du cas excepté que le transporteur invoque. Le sauvetage ou la tentative de sauvetage : de biens ou de vies. Ce cas nous parait être le cas excepté le plus justifié comme il est souligné dans le traité, et à a loi de 1966 de rajouter le déroutement raisonnable. L’innavigabilité du navire : cas qui peut être invoqué par le transporteur en cas de défaut du navire, mais cette exonération est conditionnée par la preuve par le transporteur de sa DUE DILIGENCE à mettre le navire en état de navigabilité. L faute nautique : Elle est définie par la convention de Bruxelles de 1924 comme : « les actes, négligence ou défaut du capitaine, marin, pilote, ou des préposés du transporteur, dans la navigation ou dans l’administration du navire ». C’est le cas le 40 Pierre Bonassies, Christian Scapel traité de droit maritime LGDJ § 1087
  • 48. 48 plus contesté, les tribunaux tendent plus vers la non exonération de ce cas. La notion est à distinguer de la faute commerciale qui, non visée par les textes, désigne la faute dans l’administration de la cargaison. Elle n’exonère pas le transporteur de sa responsabilité. Quant à la faute nautique, elle désigne la faute dans l’administration du navire. Cependant, la faute nautique ne vaut que si l'acte ou la faute est effectivement imputable aux personnes visées à l'article 4 .2a à savoir « capitaine, marin, pilote, ou des préposés du transporteur ». En outre, cette personne ne doit pas avoir agit sous ordre du transporteur, ce qui semble difficile aujourd’hui car avec le développement des télécommunications, le transporteur pourrait être régulièrement en contact avec les membres de son équipage, et par là, donner des ordres et instructions pour les besoins de l’expédition. D-Les causes exonératoires retenues par les Règles de Hambourg C’est sans doute la modification la plus importante apportée par les règles de Hambourg, en effet les règles viennent réduire considérablement la liste des cas prévus par la convention de 1924 pour n’en retenir que : l’assistance et l’incendie. Pour le cas de l’incendie, les règles de Hambourg disposent que le transporteur est responsable « des pertes ou dommages aux marchandises ou du retard à la livraison, causés par l’incendie. Si le demandeur prouve que l’incendie résulte d’une faute ou d’une négligence du transporteur, de ses préposés ou mandataires » donc l’incendie étant exonératoire pour le transporteur mais le transporteur sera déchu de ce droit dés lors que sa faute ou celle de l’un de ses préposés aura contribué à la survenance du dommage. Par conséquent sous le régime de Hambourg, lorsque l’incendie a causé le dommage, le transporteur ne sera responsable que si cet incendie résulte de sa faute, faute que devra démontrer le demandeur. Cela est particulièrement important, car l’incendie est le plus souvent, d’origine inconnue et la preuve en la matière est particulièrement difficile à apporter. S’agissant de l’assistance l’article 5§6 prévoit que « Le transporteur n'est pas responsable, sauf du chef d'avarie commune, lorsque la perte, le dommage ou le retard à la
  • 49. 49 livraison résulte de mesures prises pour sauver des vies ou de mesures raisonnables prises pour sauver des biens en mer ». Dans ce cas, le transporteur devra démontrer que son capitaine ou lui-même ont agit raisonnablement41 . Pour le reste l’article 5.1 prévoit que le transporteur pour s’exonérer de sa responsabilité devra prouver « que lui-même et ses préposés ou mandataires ont pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées pour éviter l’événement et ses conséquences ». En droit interne sénégalais on retenait sous le régime du CMM de 1962 les mêmes cas d’exonérations que celles de la convention de 1924, cas aujourd’hui abandonnés pour laisser place à ceux prévus par les Règles de Hambourg. Reste que ces cas exceptés peuvent être neutralisés, c'est-à-dire qu’ils n’auront plus d’effet notamment en cas de faute prouvée du transporteur. §2- La neutralisation des cas exceptés : la faute du transporteur maritime Il ne suffit pas que le cas excepté invoqué le soit effectivement (invoqué) pour que le transporteur soit automatiquement exonéré. En effet comme on nous le souligne dans le traité, « même prouvé et approuvé, comme tel par le juge tout cas excepté peut être neutralisé par la faute du transporteur ayant concouru au dommage ». A- En droit français Ce principe est prévu expressément en droit français par l’article 27 de la loi de 1966. Ainsi le chargeur pourra faire sauter le cas excepté en faisant la preuve que le dommage est dû en toute ou partie à la faute du transporteur ou de ses préposés. Mais l’article 27 prévoit que la faute nautique ne peut être invoquée pour écarter un autre cas excepté. La convention de 1924 quant à elle ne prévoit explicitement la possibilité de faire la preuve de la faute du transporteur, même si le cas excepté est établi que pour l’incendie. 41 Colloque IMTM 1993Pierre Bonassies l’entrée en vigueur des règles de Hambourg
  • 50. 50 Si les juges reconnaissent la faute du transporteur, cela aura pour conséquence, la neutralisation du cas excepté. Dans ce cas, le transporteur sera déclaré entièrement responsable et ne pourra plus bénéficier de la limitation de responsabilité prévue par les textes. Mais aussi bien la convention de 1924 que la loi de 1966 prévoient que si le dommage n’est dû que partiellement à la faute du transporteur, le juge pourra opérer un partage de responsabilité, le transporteur ne devant réparation qu’à hauteur de sa contribution au dommage. Les règles de Hambourg, telles que appliqués au Sénégal contiennent des dispositions analogues. B- En droit sénégalais Au Sénégal, l’établissement d’un cas excepté n’est pas libératoire de la responsabilité du transporteur, aussi bien en droit interne qu’en droit international, ce par application des Règles de Hambourg, régime appliqué dans ce pays . En effet l’article 5 alinéa 4 des règles de Hambourg prévoit que : « a) Le transporteur est responsable : (i) des pertes ou dommages aux marchandises ou du retard à la livraison causés par l'incendie, si le demandeur prouve que l'incendie résulte d'une faute ou d'une négligence du transporteur, de ses préposés ou mandataires, (ii) des pertes, dommages ou retard à la livraison dont le demandeur prouve qu'ils résultent de la faute ou de la négligence du transporteur, de ses préposés ou mandataires en ce qui concerne les mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées pour éteindre l'incendie et éviter ou atténuer ses conséquences ». L’alinéa 5 sur le transport d’animaux vivant prévoit la responsabilité du transporteur, si celui ci, ses préposés ou mandataires ont commis une faute ou une négligence en manquant notamment de se conformer aux instructions relatives au transport desdits animaux.
  • 51. 51 L’alinéa 6 concernant l’assistance prévoit aussi une responsabilité du transporteur lorsqu’en vue de sauver des biens en mer, le transporteur a adopté des mesures déraisonnables. A la lecture de ces textes, lorsque le demandeur parvient à établir la faute ou la négligence du transporteur ou celle de ses préposés le caractère déraisonnable des mesures prises dans le dernier cas qu’est l’assistance, le transporteur ne pourra plus échapper à sa responsabilité, le cas excepté étant écarté. Par conséquent, il ne pourra plus bénéficier de la limitation de responsabilité dont il bénéficiait.
  • 52. 52 Chapitre deuxième : La limitation de responsabilité et l’action en responsabilité contre le transporteur maritime de marchandises au Sénégal et en France En droit commun on pose le principe de la réparation intégrale en cas de dommages. Quiconque cause un dommage à autrui doit le réparer, tel est le principe de base de toute responsabilité. Mais en droit maritime le transporteur dispose d’un privilège le faisant bénéficier d’une limitation de sa responsabilité qui est marquée par un certain seuil de réparation du dommage. A l’origine, les transporteurs jouissaient d’une grande liberté contractuelle, ce qui les amenait souvent à prévoir dans les contrats des clauses de non responsabilité ou « négligence clause ». L’insertion de telles clauses a été interdite définitivement par le Harter act, texte américain de 1893, suite à la réaction des chargeurs. Mais le principe de la limitation de responsabilité a été définitivement mis en place par les Règles de la Haye, et sera suivi simultanément par la loi de 1966 et par les règles de Hambourg. Cependant le régime de cette responsabilité diffère selon les textes. A la différence du droit commun, le régime de responsabilité mis en place en matière maritime est un régime impératif, mais le transporteur maritime, lui, se voit accorder une limitation de responsabilité.
  • 53. 53 SECTION 1 : LA LIMITATION DE RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME DE MARCHANDISES Aussi bien en droit sénégalais que français, le transporteur maritime de marchandises bénéficie d’un certain montant de limitation ; limitation pouvant être écartée en cas de renonciation ou de faute de sa part. §1- La détermination du montant de la limitation Il s’agira ici d’analyser la détermination de la limitation successivement en droit français et sénégalais. A- Détermination du montant en droit français Les différentes modifications de la convention de 1924 intervenues à travers les protocoles modificatifs ont créé une certaine pluralité des montants de la limitation. Mais quelque soit le régime appliqué, les montants fixés ne pouvaient être modifiés contractuellement que dans le sens de leur hausse, et non de leur réduction. Ainsi la convention de Bruxelles originaire en son article 4§5 disposait que le transporteur n’est tenu « en aucun cas des pertes ou dommages causés aux marchandises ou les concernant pour une somme dépassant 100 livres Sterling par colis ou unité, ou l’équivalent de cette somme en une autre monnaie ». Ici il s’agissait de valeur or. Le terme colis vise des marchandises individualisées en tant que tel sur le titre de transport et prises comme des entités distinctes ayant leur existence propre La notion d’unité est par contre plus difficile à déterminer, le doyen Rodière propose les quatre conceptions suivantes. Il peut s’agir : - de l’unité matérielle d’usage compte tenu de la nature de la marchandise, dite en anglais (commodity unit), - l’unité matérielle utilisée dans la police (shipping unit),
  • 54. 54 - l’unité idéale de poids ou de mesure utilisée comme paramètre pour la fixation du fret (freight unit), avec une distinction possible entre la mesure utilisée de façon explicite (declared freight unit) et la mesure utilisée de façon courante (customary freight unit). Le doyen Rodière opte pour le second système qui retient l’unité matérielle utilisée dans la police. En effet, selon lui, « Il répond à la sécurité des parties puisqu’elles savent désormais à quoi s’en tenir, et la solution répond au souci de faire du connaissement le titre littéral qui éclaire le porteur sur ses droits »42 . Mais le développement des transports avec notamment l’apparition des conteneurs va poser problème. La solution sera apportée par le protocole de Visby de 1968 qui prévoit que le calcul se fera soit par colis ou unité soit par kilogramme. L’ayant droit ayant le choix entre les deux. Mais le protocole avait maintenu les montants de la limitation calculé en franc et fixé à 10.000 francs par colis ou unité ou 30 francs par kilogramme. Ce protocole règle aussi une difficulté relative aux conteneurs et rajoute de ce fait à l’article 4§5 de la convention les dispositions selon lesquelles « lorsqu’un cadre, une palette ou un engin similaire est utilisé pour grouper des marchandises, tout colis ou unité énuméré au connaissement comme étant inclus dans cet engin sera considéré comme étant inclus dans cet engin sera considéré comme un colis ou unité … ». Ainsi tout dépendra des stipulations du connaissement. En 1978 l’or n’était plus la monnaie de référence, par conséquent il a fallu une réforme qui sera introduite par le protocole de 1979. De ce fait les limitations s’expriment désormais en DTS (droit de tirage spécial) et vont connaître une légère hausse. Les montants sont fixés à 666,67 DTS par colis ou unité, ou à 2 DTS par kilo brut de marchandise perdue. En droit interne français, le législateur de 1936 avait fixé le même taux de limitation que la convention de Bruxelles originaire, taux qui équivalait à 8000 francs. Ce montant atteindra les 100.000, ancien franc qui équivalait à 200 nouveaux francs sous le régime de la loi du 18 juin 1966. 42 René Rodière, traité général de droit maritime tome II page 302
  • 55. 55 Après la réforme du système monétaire mondiale en 1979 et l’adoption du protocole de 1979, le législateur français à voulu s’aligner à la convention de 1924 suite au changement intervenu. C’est dans ce sens que sera adoptée la loi du 23 décembre 1986 qui vient modifier l’article 28 de la loi de 1966 qui dit que désormais « La responsabilité du transporteur est limitée, pour les pertes ou dommages subis par les marchandises, aux montants fixés au a du paragraphe 5 de l'article 4 de la convention internationale pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement signée à Bruxelles le 25 août 1924, modifiée par le protocole signé à Bruxelles le 21 décembre 1979 ». En résumé, la responsabilité du transporteur en France est limitée au montant fixé par la convention internationale telle que modifiée par le protocole de 1979. Par ailleurs quel est le régime de limitation applicable au Sénégal ? B- Détermination du montant en droit sénégalais Sous le régime du CMM de 1962 le Sénégal appliquait bien évidemment le régime de la limitation de la convention de 1924 et a suivi les nombreuses modifications intervenues. Ce n’est qu’après l’adoption du CMM de 2002 que le Sénégal applique désormais les limitations fixées par les règles de Hambourg, qui sont plus favorables aux chargeurs. L’article 6.1.a des règles de Hambourg dispose que « La responsabilité du transporteur pour le préjudice résultant des pertes ou dommages subis par les marchandises conformément aux dispositions de l'article 5 est limitée à une somme équivalant à 835 unités de compte par colis ou autre unité de chargement ou à 2,5 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises ». L’unité de compte étant le DTS, on observe alors une hausse du montant de la limitation. L’autre originalité des Règles de Hambourg se trouve dans les dispositions prévues en cas de retard. Question non traitée par la convention de 1924 et par la loi française. L’article 6.1.b des règles prévoit ainsi qu’en cas de retard, la responsabilité du transporteur maritime est limitée « à une somme correspondant à deux fois et demie le fret payable pour les marchandises ayant subies un retard, mais n’excédant pas le montant total du fret payable en vertu du contrat de transport de marchandise par mer »
  • 56. 56 La convention de Hambourg en son article 6 - 2° règle aussi la question des conteneurs et distingue deux cas de figure. Si le contenu du conteneur est détaillé sur le connaissement, la réparation s’effectue sur la base des colis contenus dans le conteneur. Mais si aucune mention n’a été portée sur le connaissement, les marchandises contenues dans le conteneur sont considérées comme un colis et le conteneur lui même a la valeur d’une unité de chargement indépendamment de son contenu. Le Sénégal ne prévoit aucune disposition relative à la limitation , seul L’article 446 du CMM de 2002 qui concerne les réserves prévoit que « Si la réserve volontairement omise concerne un défaut de la marchandise dont le transporteur avait ou devait avoir connaissance lors de la signature du connaissement, il ne pourra pas se prévaloir du défaut pour éluder sa responsabilité et ne bénéficiera pas de la limitation de responsabilité prévue à l’article 6 de la convention des Nations Unies sur le transport de marchandises par mer de 1978 ». Donc le législateur sénégalais renvoie encore ici aux dispositions des Règles de Hambourg concernant la limitation de responsabilité. Le régime de la limitation est cependant différent si le transporteur a la qualité d’armateur. C- Le cas du transporteur armateur L’armateur , selon l’article 1er de la loi du 3 janvier 1969 est « celui qui exploite le navire en son nom, qu’il en soit ou non propriétaire ».La limitation de responsabilité de l’armateur joue de façon globale « par navire » et par événement alors que celle du transporteur, joue par contrat ou par élément transporté43 . L’armateur, à la différence du transporteur, bénéficie d’un régime spécial de limitation fixé forfaitairement. Cette limitation est fixée par la convention de 1976. 43 Pierre Bonassies, Christian Scapel traité de droit maritime LGDJ §1105