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LA 5EME SAISON (Olivia)
C'est comme ça qu'ils l'appellent : la 5ème saison. Ils auraient pu trouver un nom plus
poétique. Entre nous, on l'appelle « On vous aura prévenu ». C'est pas faute d'avoir partagé les
infos, d'en avoir parlé à tout le monde. Je me dis que c'était inévitable. Il paraitrait que
demain, on verra à Mantes le plus gros nuage violet de France. On ira en barque sur le clocher
de la Collégiale si on arrive assez tôt. Je ne sais plus si c'est une chance. Le dernier nuage vert
avait transformé mes king-cerise en vert pâle, je n'imagine pas mes king-cerise en violet !
Si on part à 26h, on pourra y être pour 27. Eau, herbes, chapeau, est-ce qu'il manque quelque
chose ? Espérons qu'on ne croise pas de méduses ! La dernière fois, Widelyne les trouvait
tellement belles qu'elle s'est penchée et en a touché une. Heureusement, plus de peur que de
mal : son doigt s'est transformé en eau puis est redevenu normal quelques heures après.
J'espère que personne n'essayera de toucher le nuage violet, la dernière fois, avec le nuage
vert...
LA CINQUIEME SAISON (Wydeline)
Notre civilisation vie aujourd’hui en symbiose avec la Terre, mais ça n’a pas toujours été le
cas. Cette cinquième saison est aussi utile voir même plus utile que les quatre autres.
L’homme est un être qui n’apprend pas de ses erreurs passées. Il oublie vite, d’où les Cinq
Guerres Mondiales qui ont causée beaucoup de destructions. La solution que nous avons
trouvée est très ingénieuse. Rien ne vaut le vécu ! En plongeant les êtres d’aujourd’hui dans
les temps passés, on fait en sorte que ces-derniers n’oublient ni ne reproduisent ce qu’ils
auront vécu durant la cinquième saison. Voilà pourquoi annuellement et ce pendant deux
mois, notre monde retrouve son aspect d’avant l’évènement majeur du XXII° siècle.
Hier soir, c’était la fin de l’hiver. A minuit, les sages ont déclenché la cinquième saison. Au
début ça étonne puis après on s’y fait. Cette cinquième saison change tous les ans. L’année
dernière nous avons vécu durant toute cette saison le commerce d’esclave et le triangle de la
honte entre Afrique-Amérique-Europe. Comment peut-on si mal traiter ses semblables ? Pour
moi qui suis née durant cette période de paix et de communion avec notre environnement,
l’instauration de la cinquième saison est une excellente chose. On appelle cela saison mais on
pourrait tout aussi bien l’appeler le « Memorium ».
En effet, durant deux mois on retourne aux temps ancien où notre espèce ne respectait rien, ni
la nature, ni elle-même. Où nous avons failli causer notre perte ainsi que celle de notre
habitat. Au sortir du « Mémorium », tous les concitoyens œuvrent pour ne plus revivre ces
horreurs.
Pour prendre conscience de la valeur d’une chose, rien ne vaut sa perte ! Merci à la cinquième
saison.
SYNDROME JEKYLL ET HYDE (Claire-Marie)
Double jeu.
20 heures, vendredi soir, j'entends Bruno Lemaire faire sa pub électorale au journal télévisé et
déclarer : “ Au lieu de palabrer toute la nuit, ils feraient mieux de s'engager en politique !”
J'éteins la télé, j'enfile de quoi me couvrir chaudement car la nuit va être froide et venteuse, et
me voilà partie à Gassicourt, je suis curieuse de la soirée à venir.
Sur place un mégaphone change de mains et projette les nombreuses interventions vers
l'assistance. Dans la petite foule présente, on se reconnaît, on se salue, on échange des paroles
amicales. Que de têtes connues !
C'est aussi le moment de nouvelles rencontres...et la possibilité de démarrer des projets
constructifs qui vont faire avancer la transition.
Après ce moment d'échanges intenses et exaltants, je rentre chez moi.
En me réveillant, quelques courbatures se font sentir, comme si j'avais tremblé de froid une
partie de la nuit. Pourtant j'ai une bonne couette.
C'est l'heure de partir au boulot. Sur la table un papier sur lequel sont notés quelques prénoms
et numéros de téléphone. Je sors le 4x4 du garage et me lance dans mon embouteillage
quotidien. Invectives d'automobilistes énervés, concert de klaxons et recherche de place de
stationnement. Rien d'extraordinaire.
Le soleil donne sur la façade de la tour et le sigle de la société rutile. Vive Areva !
J'arrive dans mon bureau et imprime la cinquantaine de courriel reçus, je monte la
climatisation et je me présente à la salle de réunion.
Pour manger le midi, je commande un repas chez MacDo. Ma poubelle est pleine, il faudra
que j'en demande une plus grande. Après-midi studieuse sans grand intérêt.
Je passe chercher des pizzas pour le dîner.
Retour à la maison où je me fais couler un bon bain chaud. Puis je m'installe devant le journal
télévisé avec ma pizza.
Une certaine Pauline m'appelle, mais je crois qu'elle a fait une erreur.
Je me prépare pour la soirée en me concoctant une bonne petite salade végétarienne. Et je sors
pour me diriger vers Gassicourt.
LA CINQUIEME SAISON (Hélène)
Quand j’étais enfant, je me souviens, il n’y avait que 4 saisons.
Depuis plus d’une décennie, c’est plus compliqué car, à partir de la fin du mois de février, il
faut déjà commencer à se préparer. Déménager toutes les affaires et les meubles à l’étage.
Protéger les plantes fragiles, tout mettre à l’abri. Parfois, il faut barricader les fenêtres et c’est,
je crois, le plus pénible pour nous. Rester dans le noir des journées entières, pour échapper au
vent qui souffle pendant des heures. Depuis l’arrivée de cette cinquième saison, faite de pluie
et de vent - ou devrais-je dire de déluge et de tornade -, beaucoup de choses ont changé. Ça
peut paraître incohérent mais je trouve que ça a rendu les gens meilleurs. Les maisons
englouties, les jardins ravagés, les arbres arrachés, les voitures retournées, ça permet de
remettre tout le monde au même niveau. Sur un pied d’égalité. Plus de riches ou de pauvres,
seulement des gens démunis avec un grand besoin de chaleur humaine et de solidarité. Ce qui,
au début, a commencé comme un vrai désastre, l’apocalypse annoncée par les climatologues,
qui s’abattait sur nous, a finalement permis à l’humanité de se retrouver. Evidemment, les
premières années n’ont pas été toutes roses. Il a fallu une période de deuil matériel. Il a fallu
apprendre à s’organiser quand on a réalisé que cette saison de dévastations allait revenir tous
les ans et qu’il n’était plus question de tout reconstruire à l’identique entre chaque. Vivre
autrement. En fait ces deux mois d’inondation et de bourrasques sans fin nous ont obligés à
vivre autrement. Ne plus s’attacher aux objets et aux possessions matérielles, qui, si elles
avaient survécu à une saison, ne passeraient pas forcément la suivante. Et le lien social est
devenu la seule chose importante. Le vivant a été recentré au cœur des préoccupations de
tous. On a commencé à avoir peur pour les autres, à vouloir sauver ceux qui avaient tout
perdu. On a du faire des choix et protéger ce qui avait vraiment de la valeur. Du coup, on a
réalisé enfin ce qui en avait. On peut parfois regretter le confort d’antan mais la solidarité et
l’humanité qu’on a gagnée grâce à cette cinquième saison sont bien supérieures.
LE TECHN’HOMME (Constance)
Depuis plus de 30 ans, l'agriculture a changé. Avec l'urbanisation, la chasse aux OGM,
l'hydroponie, l'electroponie... et autres trouvailles, l'agriculture ne se trouve plus seulement
dans les champs, mais aussi dans les villes. Les légumes ne poussent plus seulement à
l'horizon des champs mais aussi à la verticale des immeubles. Des champs verticaux en
quelque sorte.
Parallèlement, les progrès techniques ont permis l'élaboration de prothèses ultra sophistiquées.
Toutes ces recherches, initialement menées pour redonner vie à des membres disparus
(amputation, malformation...), se sont étendues à d'autres utilités.
De sportifs de haut niveau qui, suite à un accident ont bénéficié de pause de prothèses qui leur
ont permis de dépasser leur record, la prothèse s'est banalisée et étendue pour répondre à nos
nouveaux modes de vie.
Comme dans l'agriculture.
Bob Poireau est l'initiateur de ce mouvement. Ancien athlète, il a perdu l'usage de ses jambes
dans un crash de voiture. Suite à son amputation, des prothèses lui ont permis de reprendre le
cours normal de sa vie. Et bien plus encore.
Après s'être reconverti en agriculteur urbain, il a vite trouvé comment ses nouvelles jambes
pouvaient lui être utiles dans son nouveau métier.
Comment accéder aux plantes haut perchées sans les abimer (contrairement aux robots)?
Solution trouvée avec les prothèses qui permettent à la fois précision, qualité et rentabilité.
Depuis, plusieurs agriculteurs ont suivi le mouvement. Une opération douloureuse des
jambes, vite oubliée tant les potentiels sont augmentés.
Cette pratique s'est répandue, avec l'amputation volontaire des bras, pratique que l'on retrouve
dans d'autres domaines.
Le bio'corps est né.
METAMORPHOSES DE LA PEUR (Claire-Marie)
J’ai huit ans, il fait nuit, j’ai peur des ombres. Sombres, elles se mettent en mouvement et
grondent, sourdes, dans ma tête. Plus je les regarde, plus elles s’insinuent partout dans ma
chambre. En fermant les yeux j’essaie de les faire disparaître. Mais c’est impossible. Vite,
j’allume ma lampe, il faut que je voie ! En fait il n’y a rien. Je me sens mieux et je m’endors
tranquillisée.
J’ai dix-huit ans, il fait noir, j’ai peur.
J’ai peur de l’inconnu. Jusque là, ma vie était tracée. Tracée par la succession des classes au
collège et au lycée. Peu d’inconnu pendant ces années passées.
Maintenant, ma vie va devenir ce que je veux, ce que je vais en faire.
Choisir ma vie, choisir ma voie. A moi de construire cet inconnu et de le peupler d’amis, de
projets, d’apprentissages et de voyages.
J’ai quarante-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de cette maladie. Elle te vide de tes forces, elle
suce ton sang et tes chairs. Elle prend mon sommeil et mon esprit.
Comment me rassurer, te rassurer, nous rassurer ?
Je dois tenir, tenir le coup pour toi, pour les enfants.
Cette maladie t’affaiblit mais me rend plus forte. Je puise dans cette épreuve une force
nouvelle qui jaillit.
J’ai soixante-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de vieillir.
Mon corps a moins de force. Je dois ralentir. Pourtant, j’ai encore tant de choses à réaliser.
Mon esprit produit toujours autant de projets et d’envie d’avancer.
J’ai quatre-vingt-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de mourir.
Vite ! Aller à l’essentiel et partir en paix.
METAMORPHOSES DE LA PEUR (Wydeline)
J’ai huit ans, il fait nuit, j’ai peur de ne pas me réveiller. J’ai regardé « La Belle au bois
dormant » avant de me coucher. C’est le prince qui l’a réveillée. Moi, je n’ai pas de prince !
Ce n’est pas le cas de ma copine Claire-Marie. Elle est tellement belle et gentille que tous les
garçons veulent sortir avec elle. Même Jean de CE2B dans la classe de madame Hélène lui a
demandé, alors que je l’aime bien. Ça ne risque pas de m’arriver, je ne suis pas assez belle et
je ne ressemble pas à une princesse comme Claire-Marie ! Je crois que je suis un tout petit
peu jalouse de ma copine.
Bon je dois me dire que « La Belle au bois dormant » n’est qu’une histoire et que moi je suis
dans la réalité. Je vais quand même allumer la lumière pour ne plus être dans le noir.
J’ai dix-huit ans, il fait noir, j’ai peur de ne pas avoir vécu mon adolescence. Depuis mes
12 ans je suis baladée de famille d’accueil en famille d’accueil. Sans repère stable, je n’ai pas
pu me construire, je n’ai pas les bases pour construire l’adulte que je voudrais être. Je préfère
en finir aujourd’hui avant qu’il ne soit trop tard.
J’ai vingt-huit ans, il fait noir, j’ai peur d’échouer avec mes trésors. Depuis la mm…
disparition de mon mari je me retrouve seule à tout gérer. Je me sens dépassée par les
évènements.
Cela a beau faire six mois, j’ai l’impression de sentir ta présence. Je crois t’apercevoir dans la
foule. Je crois que tu vas apparaitre au détour d’une rue, dans le couloir menant au salon. Je
sens ta présence dans le lit ! Vivre sans toi m’est insupportable, tu manques à toute la famille.
Mais je me dois d’être forte en la présence de nos enfants, surtout Olivia. Vous étiez si
proches !
Toutes les nuits, lorsque je me retrouve seule dans le noir, je te parle de mes peurs ! Je ne sais
pas si ça m’aide à surmonter le lendemain, mais c’est devenu un rituel dont je ne peux plus
me passer. Tu me manques, tu me manques, tu me manques ! A demain chéri.
J’ai 48 ans, il fait noir, j’ai peur d’atteindre la cinquantaine. J’ai la vie que tout le monde
rêverait d’avoir. J’ai tout pour être heureuse, une famille formidable, un mari aimant, des
enfants adorables, une maison impeccable, un travail dans lequel je m’épanouis. Je me
demande donc ce qui ce qui cloche chez moi !
Depuis toute petite, j’ai peur de ces deux chiffres ensemble, un cinq suivi d’un zéro, qui forme
le chiffre cinquante. Plus les années passent, plus j’angoisse. Il ne me reste plus que deux
années. Je ne m’explique pas cette peur. Personne n’est au courant, même pas mon mari
Christian, qui est très terre à terre. Il ne comprendrait pas. Personne ne peut comprendre ce
que je traverse !
J’ai soixante-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de me réincarner en papillon. Les papillons sont
libres, ils représentent vraiment la liberté de mouvement. Ils sont libres comme l’air.
Contrairement à l’homme, ils peuvent se mouvoir dans les trois dimensions.
Paradoxalement, c’est leur beauté, leurs magnifiques couleurs qui causent leur perte. Ils sont
capturés par des collectionneurs qui les enferment dans des tableaux pour mieux les admirer.
Ils deviennent de simples objets qu’on admire. Quel triste sort !
A choisir, je préfère la chenille, sont aspect disgracieux la protège de toutes les convoitises.
Sa liberté est préservée ! Ho liberté chérie, tant que je t’ai, ça me convient !
J’ai quatre-vingt-huit ans, il fait nuit, j’ai peur d’avoir passé ma vie à avoir peur. C’est
décidé, je me libère de cette angoisse permanente. Je vais vivre à fond le peu de temps qui
m’est encore accordé.
METAMORPHOSE DU CORPS (Olivia)
Maintenant, je suis habituée. J'essaye en général de prévoir quand ÇA va arriver mais mes
amis commencent à s'en douter, surtout Flora. Plus jeune, je n'aimais pas les soirées déguisées
alors pourquoi avoir changé d'avis si brusquement ? Je ne suis pas sûre qu'ils
comprendraient… Cela fait maintenant trois ans et ÇA arrive de plus en plus fréquemment
malheureusement.
Hier soir, on se retrouvait pour l'anniversaire de Flora. La thématique : notre animal de
compagnie. J'ai réussi à changer le thème au dernier moment quand j'ai appris sur BFM que la
dernière girafe d'Afrique avait été tuée lors d'un safari. Je me doutais que ÇA allait arriver
dans la soirée. En général ÇA commence par un picotement là où ça va arriver, souvent, c'est
l'avant-bras ou l'épaule. Pas le plus simple à cacher ! Au début, j'annulais les soirées, je partais
plus tôt dès que ça commençait à me bruler; mais maintenant, j'organise des soirées déguisées
!
Hier matin, je sentais donc des picotements sur l'épaule, puis comme d'habitude mon corps
devient chaud, froid, chaud, froid jusqu'à ce qu'une forme se déploie. La girafe était belle,
bien proportionnée avec des tâches bien dessinées ! Elle faisait 30 centimètres de hauteur
donc son cou au moins une quinzaine. J'ai expliqué à Flo que je militais contre les safaris. Elle
a l'habitude, le mois dernier une araignée m'étais poussée sur la main, le mois d'avant c'était
un tournesol jaune, le dernier avait été cueilli en Hollande par un collectionneur.
Ma première fois était la plus importante : un requin blanc était arrivé sur ma cuisse pendant
que je dormais. Il venait d'être tué à la Réunion par des surfeurs en colère. Il y a un an, j'ai
essayé de chercher si je n'étais pas seule, mais quoi chercher ? « Animal poussant sur
épaule », « Plante grandissant sur genoux », « Extinction apparaissant sur un corps », « Corps
de métamorphosant en extinction animale » ? Je n'ai pas osé en parler à ma famille ni à mes
amis, jusqu'à hier soir.
Flora avait aussi une girafe sur la main, ce qui m'a interpelée. La semaine dernière, elle avait
un edelweiss tout comme moi, ça tombait bien, ou pas, c'était le début du printemps. Après
quelques recherches sur internet, des marcheurs avaient envoyé un message sur facebook avec
la photo de cet edelweiss : « A la recherche de l'Edelweiss du chemin des marmottes, il était
encore là mardi ! ». L'Edelweiss, la girafe, ces coïncidences étaient trop flagrantes, je devais
lui en parler.
Pour elle, ça arrivait toujours de la même façon : la zone devenait rouge, puis verte, puis
clignotait et la chose arrivait cinq heures après. Je comprends pourquoi elle aimait tant mon
idée des soirées déguisées !

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Les Contes du KiMoNo - Dossier artistique
 

Mantois en transition métamorphose

  • 1. LA 5EME SAISON (Olivia) C'est comme ça qu'ils l'appellent : la 5ème saison. Ils auraient pu trouver un nom plus poétique. Entre nous, on l'appelle « On vous aura prévenu ». C'est pas faute d'avoir partagé les infos, d'en avoir parlé à tout le monde. Je me dis que c'était inévitable. Il paraitrait que demain, on verra à Mantes le plus gros nuage violet de France. On ira en barque sur le clocher de la Collégiale si on arrive assez tôt. Je ne sais plus si c'est une chance. Le dernier nuage vert avait transformé mes king-cerise en vert pâle, je n'imagine pas mes king-cerise en violet ! Si on part à 26h, on pourra y être pour 27. Eau, herbes, chapeau, est-ce qu'il manque quelque chose ? Espérons qu'on ne croise pas de méduses ! La dernière fois, Widelyne les trouvait tellement belles qu'elle s'est penchée et en a touché une. Heureusement, plus de peur que de mal : son doigt s'est transformé en eau puis est redevenu normal quelques heures après. J'espère que personne n'essayera de toucher le nuage violet, la dernière fois, avec le nuage vert...
  • 2. LA CINQUIEME SAISON (Wydeline) Notre civilisation vie aujourd’hui en symbiose avec la Terre, mais ça n’a pas toujours été le cas. Cette cinquième saison est aussi utile voir même plus utile que les quatre autres. L’homme est un être qui n’apprend pas de ses erreurs passées. Il oublie vite, d’où les Cinq Guerres Mondiales qui ont causée beaucoup de destructions. La solution que nous avons trouvée est très ingénieuse. Rien ne vaut le vécu ! En plongeant les êtres d’aujourd’hui dans les temps passés, on fait en sorte que ces-derniers n’oublient ni ne reproduisent ce qu’ils auront vécu durant la cinquième saison. Voilà pourquoi annuellement et ce pendant deux mois, notre monde retrouve son aspect d’avant l’évènement majeur du XXII° siècle. Hier soir, c’était la fin de l’hiver. A minuit, les sages ont déclenché la cinquième saison. Au début ça étonne puis après on s’y fait. Cette cinquième saison change tous les ans. L’année dernière nous avons vécu durant toute cette saison le commerce d’esclave et le triangle de la honte entre Afrique-Amérique-Europe. Comment peut-on si mal traiter ses semblables ? Pour moi qui suis née durant cette période de paix et de communion avec notre environnement, l’instauration de la cinquième saison est une excellente chose. On appelle cela saison mais on pourrait tout aussi bien l’appeler le « Memorium ». En effet, durant deux mois on retourne aux temps ancien où notre espèce ne respectait rien, ni la nature, ni elle-même. Où nous avons failli causer notre perte ainsi que celle de notre habitat. Au sortir du « Mémorium », tous les concitoyens œuvrent pour ne plus revivre ces horreurs. Pour prendre conscience de la valeur d’une chose, rien ne vaut sa perte ! Merci à la cinquième saison.
  • 3. SYNDROME JEKYLL ET HYDE (Claire-Marie) Double jeu. 20 heures, vendredi soir, j'entends Bruno Lemaire faire sa pub électorale au journal télévisé et déclarer : “ Au lieu de palabrer toute la nuit, ils feraient mieux de s'engager en politique !” J'éteins la télé, j'enfile de quoi me couvrir chaudement car la nuit va être froide et venteuse, et me voilà partie à Gassicourt, je suis curieuse de la soirée à venir. Sur place un mégaphone change de mains et projette les nombreuses interventions vers l'assistance. Dans la petite foule présente, on se reconnaît, on se salue, on échange des paroles amicales. Que de têtes connues ! C'est aussi le moment de nouvelles rencontres...et la possibilité de démarrer des projets constructifs qui vont faire avancer la transition. Après ce moment d'échanges intenses et exaltants, je rentre chez moi. En me réveillant, quelques courbatures se font sentir, comme si j'avais tremblé de froid une partie de la nuit. Pourtant j'ai une bonne couette. C'est l'heure de partir au boulot. Sur la table un papier sur lequel sont notés quelques prénoms et numéros de téléphone. Je sors le 4x4 du garage et me lance dans mon embouteillage quotidien. Invectives d'automobilistes énervés, concert de klaxons et recherche de place de stationnement. Rien d'extraordinaire. Le soleil donne sur la façade de la tour et le sigle de la société rutile. Vive Areva ! J'arrive dans mon bureau et imprime la cinquantaine de courriel reçus, je monte la climatisation et je me présente à la salle de réunion. Pour manger le midi, je commande un repas chez MacDo. Ma poubelle est pleine, il faudra que j'en demande une plus grande. Après-midi studieuse sans grand intérêt. Je passe chercher des pizzas pour le dîner. Retour à la maison où je me fais couler un bon bain chaud. Puis je m'installe devant le journal télévisé avec ma pizza. Une certaine Pauline m'appelle, mais je crois qu'elle a fait une erreur. Je me prépare pour la soirée en me concoctant une bonne petite salade végétarienne. Et je sors pour me diriger vers Gassicourt.
  • 4. LA CINQUIEME SAISON (Hélène) Quand j’étais enfant, je me souviens, il n’y avait que 4 saisons. Depuis plus d’une décennie, c’est plus compliqué car, à partir de la fin du mois de février, il faut déjà commencer à se préparer. Déménager toutes les affaires et les meubles à l’étage. Protéger les plantes fragiles, tout mettre à l’abri. Parfois, il faut barricader les fenêtres et c’est, je crois, le plus pénible pour nous. Rester dans le noir des journées entières, pour échapper au vent qui souffle pendant des heures. Depuis l’arrivée de cette cinquième saison, faite de pluie et de vent - ou devrais-je dire de déluge et de tornade -, beaucoup de choses ont changé. Ça peut paraître incohérent mais je trouve que ça a rendu les gens meilleurs. Les maisons englouties, les jardins ravagés, les arbres arrachés, les voitures retournées, ça permet de remettre tout le monde au même niveau. Sur un pied d’égalité. Plus de riches ou de pauvres, seulement des gens démunis avec un grand besoin de chaleur humaine et de solidarité. Ce qui, au début, a commencé comme un vrai désastre, l’apocalypse annoncée par les climatologues, qui s’abattait sur nous, a finalement permis à l’humanité de se retrouver. Evidemment, les premières années n’ont pas été toutes roses. Il a fallu une période de deuil matériel. Il a fallu apprendre à s’organiser quand on a réalisé que cette saison de dévastations allait revenir tous les ans et qu’il n’était plus question de tout reconstruire à l’identique entre chaque. Vivre autrement. En fait ces deux mois d’inondation et de bourrasques sans fin nous ont obligés à vivre autrement. Ne plus s’attacher aux objets et aux possessions matérielles, qui, si elles avaient survécu à une saison, ne passeraient pas forcément la suivante. Et le lien social est devenu la seule chose importante. Le vivant a été recentré au cœur des préoccupations de tous. On a commencé à avoir peur pour les autres, à vouloir sauver ceux qui avaient tout perdu. On a du faire des choix et protéger ce qui avait vraiment de la valeur. Du coup, on a réalisé enfin ce qui en avait. On peut parfois regretter le confort d’antan mais la solidarité et l’humanité qu’on a gagnée grâce à cette cinquième saison sont bien supérieures.
  • 5. LE TECHN’HOMME (Constance) Depuis plus de 30 ans, l'agriculture a changé. Avec l'urbanisation, la chasse aux OGM, l'hydroponie, l'electroponie... et autres trouvailles, l'agriculture ne se trouve plus seulement dans les champs, mais aussi dans les villes. Les légumes ne poussent plus seulement à l'horizon des champs mais aussi à la verticale des immeubles. Des champs verticaux en quelque sorte. Parallèlement, les progrès techniques ont permis l'élaboration de prothèses ultra sophistiquées. Toutes ces recherches, initialement menées pour redonner vie à des membres disparus (amputation, malformation...), se sont étendues à d'autres utilités. De sportifs de haut niveau qui, suite à un accident ont bénéficié de pause de prothèses qui leur ont permis de dépasser leur record, la prothèse s'est banalisée et étendue pour répondre à nos nouveaux modes de vie. Comme dans l'agriculture. Bob Poireau est l'initiateur de ce mouvement. Ancien athlète, il a perdu l'usage de ses jambes dans un crash de voiture. Suite à son amputation, des prothèses lui ont permis de reprendre le cours normal de sa vie. Et bien plus encore. Après s'être reconverti en agriculteur urbain, il a vite trouvé comment ses nouvelles jambes pouvaient lui être utiles dans son nouveau métier. Comment accéder aux plantes haut perchées sans les abimer (contrairement aux robots)? Solution trouvée avec les prothèses qui permettent à la fois précision, qualité et rentabilité. Depuis, plusieurs agriculteurs ont suivi le mouvement. Une opération douloureuse des jambes, vite oubliée tant les potentiels sont augmentés. Cette pratique s'est répandue, avec l'amputation volontaire des bras, pratique que l'on retrouve dans d'autres domaines. Le bio'corps est né.
  • 6. METAMORPHOSES DE LA PEUR (Claire-Marie) J’ai huit ans, il fait nuit, j’ai peur des ombres. Sombres, elles se mettent en mouvement et grondent, sourdes, dans ma tête. Plus je les regarde, plus elles s’insinuent partout dans ma chambre. En fermant les yeux j’essaie de les faire disparaître. Mais c’est impossible. Vite, j’allume ma lampe, il faut que je voie ! En fait il n’y a rien. Je me sens mieux et je m’endors tranquillisée. J’ai dix-huit ans, il fait noir, j’ai peur. J’ai peur de l’inconnu. Jusque là, ma vie était tracée. Tracée par la succession des classes au collège et au lycée. Peu d’inconnu pendant ces années passées. Maintenant, ma vie va devenir ce que je veux, ce que je vais en faire. Choisir ma vie, choisir ma voie. A moi de construire cet inconnu et de le peupler d’amis, de projets, d’apprentissages et de voyages. J’ai quarante-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de cette maladie. Elle te vide de tes forces, elle suce ton sang et tes chairs. Elle prend mon sommeil et mon esprit. Comment me rassurer, te rassurer, nous rassurer ? Je dois tenir, tenir le coup pour toi, pour les enfants. Cette maladie t’affaiblit mais me rend plus forte. Je puise dans cette épreuve une force nouvelle qui jaillit. J’ai soixante-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de vieillir. Mon corps a moins de force. Je dois ralentir. Pourtant, j’ai encore tant de choses à réaliser. Mon esprit produit toujours autant de projets et d’envie d’avancer. J’ai quatre-vingt-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de mourir. Vite ! Aller à l’essentiel et partir en paix.
  • 7. METAMORPHOSES DE LA PEUR (Wydeline) J’ai huit ans, il fait nuit, j’ai peur de ne pas me réveiller. J’ai regardé « La Belle au bois dormant » avant de me coucher. C’est le prince qui l’a réveillée. Moi, je n’ai pas de prince ! Ce n’est pas le cas de ma copine Claire-Marie. Elle est tellement belle et gentille que tous les garçons veulent sortir avec elle. Même Jean de CE2B dans la classe de madame Hélène lui a demandé, alors que je l’aime bien. Ça ne risque pas de m’arriver, je ne suis pas assez belle et je ne ressemble pas à une princesse comme Claire-Marie ! Je crois que je suis un tout petit peu jalouse de ma copine. Bon je dois me dire que « La Belle au bois dormant » n’est qu’une histoire et que moi je suis dans la réalité. Je vais quand même allumer la lumière pour ne plus être dans le noir. J’ai dix-huit ans, il fait noir, j’ai peur de ne pas avoir vécu mon adolescence. Depuis mes 12 ans je suis baladée de famille d’accueil en famille d’accueil. Sans repère stable, je n’ai pas pu me construire, je n’ai pas les bases pour construire l’adulte que je voudrais être. Je préfère en finir aujourd’hui avant qu’il ne soit trop tard. J’ai vingt-huit ans, il fait noir, j’ai peur d’échouer avec mes trésors. Depuis la mm… disparition de mon mari je me retrouve seule à tout gérer. Je me sens dépassée par les évènements. Cela a beau faire six mois, j’ai l’impression de sentir ta présence. Je crois t’apercevoir dans la foule. Je crois que tu vas apparaitre au détour d’une rue, dans le couloir menant au salon. Je sens ta présence dans le lit ! Vivre sans toi m’est insupportable, tu manques à toute la famille. Mais je me dois d’être forte en la présence de nos enfants, surtout Olivia. Vous étiez si proches ! Toutes les nuits, lorsque je me retrouve seule dans le noir, je te parle de mes peurs ! Je ne sais pas si ça m’aide à surmonter le lendemain, mais c’est devenu un rituel dont je ne peux plus me passer. Tu me manques, tu me manques, tu me manques ! A demain chéri. J’ai 48 ans, il fait noir, j’ai peur d’atteindre la cinquantaine. J’ai la vie que tout le monde rêverait d’avoir. J’ai tout pour être heureuse, une famille formidable, un mari aimant, des enfants adorables, une maison impeccable, un travail dans lequel je m’épanouis. Je me demande donc ce qui ce qui cloche chez moi ! Depuis toute petite, j’ai peur de ces deux chiffres ensemble, un cinq suivi d’un zéro, qui forme le chiffre cinquante. Plus les années passent, plus j’angoisse. Il ne me reste plus que deux années. Je ne m’explique pas cette peur. Personne n’est au courant, même pas mon mari Christian, qui est très terre à terre. Il ne comprendrait pas. Personne ne peut comprendre ce que je traverse ! J’ai soixante-huit ans, il fait nuit, j’ai peur de me réincarner en papillon. Les papillons sont libres, ils représentent vraiment la liberté de mouvement. Ils sont libres comme l’air. Contrairement à l’homme, ils peuvent se mouvoir dans les trois dimensions. Paradoxalement, c’est leur beauté, leurs magnifiques couleurs qui causent leur perte. Ils sont capturés par des collectionneurs qui les enferment dans des tableaux pour mieux les admirer. Ils deviennent de simples objets qu’on admire. Quel triste sort ! A choisir, je préfère la chenille, sont aspect disgracieux la protège de toutes les convoitises. Sa liberté est préservée ! Ho liberté chérie, tant que je t’ai, ça me convient !
  • 8. J’ai quatre-vingt-huit ans, il fait nuit, j’ai peur d’avoir passé ma vie à avoir peur. C’est décidé, je me libère de cette angoisse permanente. Je vais vivre à fond le peu de temps qui m’est encore accordé. METAMORPHOSE DU CORPS (Olivia) Maintenant, je suis habituée. J'essaye en général de prévoir quand ÇA va arriver mais mes amis commencent à s'en douter, surtout Flora. Plus jeune, je n'aimais pas les soirées déguisées alors pourquoi avoir changé d'avis si brusquement ? Je ne suis pas sûre qu'ils comprendraient… Cela fait maintenant trois ans et ÇA arrive de plus en plus fréquemment malheureusement. Hier soir, on se retrouvait pour l'anniversaire de Flora. La thématique : notre animal de compagnie. J'ai réussi à changer le thème au dernier moment quand j'ai appris sur BFM que la dernière girafe d'Afrique avait été tuée lors d'un safari. Je me doutais que ÇA allait arriver dans la soirée. En général ÇA commence par un picotement là où ça va arriver, souvent, c'est l'avant-bras ou l'épaule. Pas le plus simple à cacher ! Au début, j'annulais les soirées, je partais plus tôt dès que ça commençait à me bruler; mais maintenant, j'organise des soirées déguisées ! Hier matin, je sentais donc des picotements sur l'épaule, puis comme d'habitude mon corps devient chaud, froid, chaud, froid jusqu'à ce qu'une forme se déploie. La girafe était belle, bien proportionnée avec des tâches bien dessinées ! Elle faisait 30 centimètres de hauteur donc son cou au moins une quinzaine. J'ai expliqué à Flo que je militais contre les safaris. Elle a l'habitude, le mois dernier une araignée m'étais poussée sur la main, le mois d'avant c'était un tournesol jaune, le dernier avait été cueilli en Hollande par un collectionneur. Ma première fois était la plus importante : un requin blanc était arrivé sur ma cuisse pendant que je dormais. Il venait d'être tué à la Réunion par des surfeurs en colère. Il y a un an, j'ai essayé de chercher si je n'étais pas seule, mais quoi chercher ? « Animal poussant sur épaule », « Plante grandissant sur genoux », « Extinction apparaissant sur un corps », « Corps de métamorphosant en extinction animale » ? Je n'ai pas osé en parler à ma famille ni à mes amis, jusqu'à hier soir. Flora avait aussi une girafe sur la main, ce qui m'a interpelée. La semaine dernière, elle avait un edelweiss tout comme moi, ça tombait bien, ou pas, c'était le début du printemps. Après quelques recherches sur internet, des marcheurs avaient envoyé un message sur facebook avec la photo de cet edelweiss : « A la recherche de l'Edelweiss du chemin des marmottes, il était encore là mardi ! ». L'Edelweiss, la girafe, ces coïncidences étaient trop flagrantes, je devais lui en parler. Pour elle, ça arrivait toujours de la même façon : la zone devenait rouge, puis verte, puis clignotait et la chose arrivait cinq heures après. Je comprends pourquoi elle aimait tant mon idée des soirées déguisées !