La médecine légale : voici une spécialité, sinon mal connue, tout du moins auréolée d’un certain mystère qui nourrit souvent de nombreux fantasmes tant dans le monde médical qu’au sein de la population générale.
Pour certains d’entre vous, elle évoque un stage plutôt tranquille et original pendant l’externat, pour d’autres, le sujet d’un dossier tombé à l’ECN, pour d’autres enfin, simplement le nom du service dans lequel travaille leur doyen.
Dans la population générale, la simple évocation du médecin légiste rappelle les romans policiers et les fictions américaines avec leur parfum de soufre ou leur odeur de cadavre.
Mais qu’en est-il réellement ? Les médecins légistes sont-ils de curieux personnages de roman, morbides et insensibles ? Vouent-ils une adoration perverse aux cadavres et à la mort ?
La réalité est toute autre. Si en effet la thanatologie représente bien une part de l’activité des légistes au quotidien, elle ne constitue pourtant pas, loin s’en faut, le centre de leur activité.
Si les médecins légistes sont bien parfois des médecins spécialisés « conteurs de la mort sans témoin », ils sont aussi et avant tout les médecins de la violence sous toutes ses formes.
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La médecine légale... une réalité différente de la fiction mais tout aussi exaltante !
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La médecine légale...une réalité dif-
férente de la fiction mais tout aussi
exaltante !
P our certains d’entre vous, elle
évoque un stage plutôt tranquille
et original pendant l’externat, pour
d’autres, le sujet d’un dossier tombé à
l’ECN,pourd’autresenfin,simplement
le nom du service dans lequel travaille
leur doyen.
Dans la population générale, la simple
évocation du médecin légiste rappelle
les romans policiers et les fictions
américaines avec leur parfum de soufre
ou leur odeur de cadavre.
Mais qu’en est-il réellement ? Les
médecins légistes sont-ils de curieux
personnages de roman, morbides et
insensibles ? Vouent-ils une adoration
perverse aux cadavres et à la mort ?
La réalité est toute autre. Si en effet la
thanatologie représente bien une part
de l’activité des légistes au quotidien,
elle ne constitue pourtant pas, loin s’en
faut, le centre de leur activité.
Si les médecins légistes sont bien
parfois des médecins spécialisés
« conteurs de la mort sans témoin »,
ils sont aussi et avant tout les médecins
de la violence sous toutes ses formes.
C’est le médecin légiste qui recevra
et accompagnera, le plus souvent
au sein de véritables équipes
pluridisciplinaires dédiées, toutes les
victimes d’agressions, qu’il s’agisse
de coups et blessures, de violences
sexuelles ou de maltraitance ; qu’il
s’agisse d’enfants ou d’adultes, de
femmes ou d’hommes. Ces victimes
vivantes représentent la grande
majorité des « patients » du médecin
légiste pour qui, malgré ce qu’on
pourrait croire, les cadavres ne
représentent qu’environ le tiers de la
« clientèle ».
Dans chacune de ces situations de
violence, le médecin légiste sera bien
entendu le médecin expert, requis pour
la rédaction des divers certificats, mais
il sera également le pilier chargé de la
coordination et de l’organisation de la
prise en charge globale des victimes.
La médecine légale est ainsi axée
autour de la prise en charge des
victimes comme des agresseurs. De
par cette singulière particularité, les
interactions de la médecine légale avec
le monde judiciaire sont constantes.
Elle est en quelque sorte une discipline
hybride, située à la frontière de la
médecine et du droit. Chez les anglo-
saxons, on l’intègre au vaste champ
des « Forensic sciences », un terme
sans traduction française qui dérive du
mot forum, le centre antique de la vie
publique. On comprend dès lors bien à
travers ce terme, la place particulière
que tient cette discipline au sein de
notre société.
Par extension, de nombreuses
activités connexes s’ouvrent aussi au
médecin légiste : l’expertise médicale
concernant en particulier la réparation
du dommage corporel, la médecine
pénitentiaire, le droit médical et
notamment responsabilité médicale, la
médiation médicale, la bioéthique...
La médecine légale fait aussi le
lien, quand elle ne les héberge pas
directement en son sein, avec des
disciplines plus spécialisées en
criminalistique comme la psychiatrie
médico-légale, l'anthropologie
médico-légale, l'odontologie médico-
légale, la toxicologie clinique et
analytique, l'entomologie médico-
légale, les empreintes génétiques…
Selon les villes françaises, la médecine
légale est organisée de manière
différente avec la mise en avant de
domaines de compétence divers et
d’un certain nombre de spécialités.
Une nouvelle réforme nationale,
entrée en application le 15 janvier
2011, regroupe désormais les activités
de thanatologie dans quelques
grands « instituts médico-légaux »
régionaux alors que la plupart des
structures hospitalières générales se
voient confiées la responsabilité de la
médecine légale clinique du vivant.
L’exercice de la médecine légale est
essentiellement hospitalier mais peut
être également libéral pour ceux qui
choisissent d’exercer dans le domaine
de la réparation du dommage corporel.
Pour l’exercice hospitalier, il est
probable que de nombreux postes
seront à pourvoir dans les années
à venir du fait de la réorganisation
globale de la spécialité.
Pour les internes en cours de cursus,
l'accès à cette discipline se fait par
le DESC de médecine légale et
expertises médicales (voir encadré). Il
s'agit d'un DESC de 4 semestres (dont
2 en post-internat) qui est accessible
à partir de tout DES sur autorisation
du coordonnateur. Parmi les internes
en médecine légale, on retrouve
principalement des DES de médecine
générale, d’anapath, de santé publique,
de psychiatrie ou de médecine du
travail.
M.D., Pharm. D.,
Médecin Légiste
Expert près la Cour d’Appel de Montpellier
Maquette du DESC de médecine légale (arrêté du 22 septembre 2004) :
La formation comprend 4 semestres en services agréés pour le DESC (avec pratique régulière d'autopsies et d'expertises) et un
enseignement théorique portant sur :
- thanatologie générale et pratique
- aspects médico-légaux des agressions
- législation médico-sociale
- expertises médico-légales
- pathologie séquellaire et réparation médicale et juridique du dommage corporel
Ainsi que deux enseignements à choisir parmi les suivants :
- criminologie et psychiatrie légale
- toxicologie médico-légale
- criminalistique
- aspects médico-légaux de la sexualité et de la reproduction
- éthique et santé, médecine et droits de l'homme
- un des enseignements du DES d'anatomie et cytologie pathologiques
Merci à Stéphanie Lemoine, interne en chirurgie dentaire à Strasbourg, pour ses dessins