Politiques familiales, emploi et acteurs
sociaux : regards croisés France-Allemagne
Une journée d’étude qui a permis d’identifier
de nouvelles pistes de recherche
Formation échiquéenne jwhyCHESS, parallèle avec la planification de projet
Psf95 9 J Fagnani A Math C Meilland
1. Compte rendu de colloque
Politiques familiales, emploi et acteurs
sociaux : regards croisés France-Allemagne
Une journée d’étude qui a permis d’identifier
de nouvelles pistes de recherche
Jeanne Fagnani Directrice de recherche CNRS – Laboratoire MATISSE.
Antoine Math * * Institut de recherches économiques et sociales (IRES).
Christèle Meilland *
L enfants (avec des manques, toutefois, encore
e 14 mars 2008, une journée d’étude a été orga-
importants). En Allemagne, la prise en charge
nisée par l’Institut de recherches économiques
collective des enfants âgés de moins de 3 ans est
et sociales (IRES) et le Centre d’économie de la
peu développée et celle des enfants de 3 à 6 ans
Sorbonne de l’université de Paris-I, en collabora-
dans les « Kindergarten » (maintenant quasi géné-
tion avec la Caisse nationale des allocations fami-
rale) est le plus souvent à temps partiel. Mais,
liales. Axée autour de la comparaison des poli-
depuis quelques années, on assiste à un certain
tiques familiales en France et en Allemagne, cette
renversement de tendances entre ces deux pays.
journée a été l’occasion de confrontations entre
Ainsi, l’ampleur des réformes adoptées en
chercheurs des deux pays, mais aussi de rencontres
Allemagne depuis 2006 souligne l’importance
fructueuses avec des acteurs des politiques fami-
accordée aux problèmes de conciliation vie fami-
liales et sociales. L’objectif visait à faire progresser
liale-vie professionnelle dans ce pays. Les diverses
la compréhension mutuelle de chacune des poli-
contributions de la journée d’étude ont permis
tiques familiales au sein de contextes économi-
d’examiner et d’approfondir des questions telles
ques et politiques complexes. Au regard des impor-
que les divergences dans la conduite des réformes
tantes réformes décidées ces dernières années en
et la place accordée aux questions de conciliation
Allemagne, il s’agissait également de s’interroger
et d’emploi des femmes dans des contextes éco-
sur la question de l’éventuelle convergence entre
nomiques différents.
les deux pays dans ces domaines. Cette journée
d’étude a ainsi permis de mieux comprendre les
L’objectif de ce compte rendu ne vise pas à rendre
évolutions en cours, d’en d’identifier les enjeux et
compte de façon exhaustive de cette journée. Il
de mettre en évidence les tensions à l’œuvre dans
tente de retracer les différentes approches origi-
le champ des dispositifs d’aide à la conciliation
nales présentées. Les interrogations, contributions
travail-famille.
et discussions de la journée peuvent être résumées
à travers trois grands axes.
Dans les nombreuses études sur ces deux pays, et
plus généralement sur les pays de l’Union euro-
péenne, les typologies font état d’une certaine
Des modèles convergents de politiques
proximité entre l’Allemagne et la France. Ces
familiales ?
dernières sont classées dans une catégorie que
l’on nomme soit « pays continentaux », soit « pays
Jeanne Fagnani (directrice de recherche, CNRS et
conservateurs-corporatistes » ou encore « pays
Centre d’économie de la Sorbonne – Matisse) a
bismarckiens ». Leurs politiques familiales parta-
resitué la politique familiale allemande et ses évo-
gent de nombreuses caractéristiques : il s’agit, en
lutions récentes dans son contexte culturel, socio-
effet, de politiques familiales explicites, fortement
politique et économique, et souligné les diffé-
institutionnalisées, et enracinées dans une longue
rences et les similitudes avec la France. Tout en
histoire. Mais de grandes disparités demeurent,
pointant les nombreuses similarités entre la France
notamment dans le domaine de la politique
et l’Allemagne (pays caractérisés par une relative
d’accueil du petit enfant. En France, il existe une
générosité financière à l’égard des familles et par
prise en charge par les écoles maternelles, les
la persistance du maternalisme…), la chercheuse
crèches et les assistantes maternelles des jeunes
Politiques sociales et familiales n° 95 - mars 2009
90 Synthèses et statistiques
2. Länder. Au sein de la grande coalition, les députés
a exposé les évolutions récentes de la politique
du SPD (parti socialiste) voudraient faire adopter
familiale allemande qui résultent, d’une part,
une loi consacrant le droit pour chaque enfant
d’une certaine pénurie de main-d’œuvre qualifiée
d’être accueilli à plein temps dans une crèche dès
sur le marché du travail allemand et, d’autre part,
l’âge de un an. À court terme, et malgré l’appui du
d’une forte volonté politique de changement.
patronat et de nombreux employeurs, ces proposi-
Deux volets semblent essentiels parmi l’ensemble
tions semblent avoir peu de chances de se réaliser.
des réformes initiées : le nouveau congé parental
allemand (proche du congé parental suédois) et le
En conclusion, J. Fagnani est revenue sur les simi-
lancement d’une politique ambitieuse en faveur
larités et les divergences entre les deux pays :
de l’accueil du jeune enfant à partir de l’âge de un
priorité politique accordée dans les deux pays à la
an. Depuis 2005, en Allemagne de l’Ouest, la pro-
croissance de l’emploi des femmes et volonté
portion d’enfants de moins de 3 ans accueillis
affirmée d’encourager les hommes à s’investir
dans des structures collectives est passée de 6,9 %
dans l’éducation des enfants, et divergence quand
à 8,1 % en 2007 (37,4 % en Allemagne de l’Est).
on met en perspective la relative cohérence des
Toutefois, les disparités entre les Länder restent
réformes adoptées en Allemagne et le caractère
considérables. En outre, les déductions fiscales
ambivalent des aides à la conciliation en France.
liées aux frais de garde ont été augmentées.
Depuis janvier 2006, les couples biactifs ont droit
L’analyse de Katharina Spiess (professeure à
à des déductions de leur revenu imposable corres-
l’Université libre de Berlin et conseillère de la
pondant aux deux tiers des frais engagés pour une
ministre Ursula von der Leyen) sur le développe-
personne employée à leur domicile, avec un
ment des services d’accueil des jeunes enfants en
maximum de 4 000 euros par an pour un enfant
Allemagne a appuyé les conclusions de J. Fagnani
âgé de moins de 14 ans (pour les couples avec un
tout en mettant l’accent sur le statu quo de la
seul actif, l’enfant doit être âgé de 3 ans à 6 ans
garde des jeunes enfants avant 2008 et sur l’impor-
seulement).
tance des réformes actuelles. Jusqu’en 2007,
le « male breadwinner model » (modèle de
Cette politique engagée sur la voie des réformes a
« Monsieur Gagnepain ») s’imposait en Allemagne,
atteint son point d’orgue avec l’adoption d’un
quelle que soit la catégorie socioprofessionnelle
nouveau congé parental en 2006. Inspiré du mo-
des familles. Le système de garde d’enfants,
dèle suédois et poursuivant les mêmes objectifs,
complexe et décentralisé, s’organisait entre les
entré en vigueur en janvier 2007, le nouveau
« Krippen » pour la garde des enfants de moins de
dispositif accorde une prestation de substitution,
3 ans et les « Kindergarten » pour les enfants âgés
l’« Elterngeld » (EG) qui correspond à 67 % du
de 3 ans à 6,5 ans. Financièrement, les dépenses
dernier salaire net (plafonnée à 1 800 euros nets
se répartissent pour 47,4 % à la charge des muni-
par mois), pendant un an, au parent qui interrompt
cipalités, 31,5 % à la charge de l’État, 14 % à la
son activité professionnelle. Toutefois, les données
charge des parents et 5 % à la charge d’associa-
concernant la population des bénéficiaires de l’EG
tions. À l’instar de la France, le développement
durant l’année 2007 montrent que les objectifs
régional des systèmes de garde d’enfants est inégal
sont pour l’instant loin d’être atteints : parmi les
sur tout le territoire. Toutefois, depuis 2006, on note
511 399 femmes (contre 60 012 hommes) qui ont
un certain fléchissement du « male breadwinner
perçu l’EG durant l’année, 49 % d’entre elles ne
model » avec une fréquence d’utilisation plus
travaillaient pas avant la naissance et ne per-
importante des services de garde d’enfants,
çoivent que le minimum légal (300 euros). Celles
notamment ceux destinés aux enfants de moins
qui ont perçu le maximum (soit 1 800 euros, c’est-
de 3 ans. Il faut souligner que les réformes entre-
à-dire des femmes ayant des salaires relativement
prises ces dernières années visent à augmenter le
élevés – au moins 2 687 euros par mois) ne repré-
taux de fécondité en Allemagne mais aussi à
sentent que 1,84 % du total des bénéficiaires de la
inciter les femmes, et surtout les mères, à rester sur
prestation et 5,2 % des femmes bénéficiaires qui
le marché du travail. Ces réformes, décrites aupa-
travaillaient avant la naissance. Les pères repré-
ravant, mettent l’accent à la fois sur la quantité de
sentent 10,5 % des bénéficiaires (mais 3,3 % des
services de garde d’enfants offerte mais également
pères seulement ont demandé à en bénéficier). Par
sur la qualité déployée lors de la garde.
ailleurs, en février 2007, la ministre Ursula von
der Leyen, ministre fédéral de la Famille, des
Ces analyses précises et détaillées des politiques
Personnes âgées, des Femmes et de la Jeunesse –
menées en France et en Allemagne ces dernières
fort populaire en Allemagne – a proposé le
années soulignent les difficultés auxquelles ces
triplement des places en crèches d’ici 2013
deux pays doivent faire face. Dans le cas de
(750 000 places devraient être disponibles pour
l’Allemagne, la pénurie de main-d’œuvre qua-
les enfants de moins de 3 ans) et la gratuité des
lifiée, le déclin fort de la démographie (avec ses
jardins d’enfants pour les parents, les frais devant
effets sur le système de retraite), le cloisonnement
être pris en charge par les communes et les
Politiques sociales et familiales n° 95 - mars 2009
91 Synthèses et statistiques
3. • dans une majorité des pays étudiés, l’aide tend
géographique de certaines régions sont des
à être proportionnelle au nombre d’enfants. Il
facteurs très importants pour comprendre l’urgence
existe cependant des exceptions. Le soutien aug-
de la situation. Reste le problème du financement
mente beaucoup plus que proportionnellement au
des projets mis en œuvre, qui est loin d’être
nombre d’enfants en France et en Belgique à tous
réglé…
les niveaux de revenus et, pour les couples
monoactifs, en Autriche ;
Les questions de redistribution et de • les prestations familiales sont, sauf exceptions,
ciblage : le soutien financier des familles peu ciblées en fonction des revenus dans les pays
étudiés. Cependant, si on prend en compte l’en-
semble des dispositifs, on constate une modula-
Le deuxième axe développé lors de ces rencontres
tion du montant de l’aide pour charge d’enfant en
concerne la dimension financière des politiques
fonction du revenu dans certains pays européens :
familiales des deux pays. Dans cette optique,
le Royaume-Uni et l’Irlande aident fortement les
l’analyse présentée par Antoine Math et Christèle
familles pauvres, mais davantage les situations de
Meilland (IRES) vise à rendre compte de l’impor-
bas salaires que les familles à l’assistance pourtant
tance de la question du soutien financier des
plus pauvres, à travers des dispositifs spécifiques
familles en Europe. L’objectif de cette présentation
(une prestation sociale en Irlande, un crédit d’impôt
consistait en une comparaison du niveau et des
au Royaume-Uni). Ces dispositifs disparaissent à
modalités du soutien financier des familles au
partir d’un certain niveau de ressources et l’avan-
moyen de la méthode des ménages ou cas types
tage enfant chute fortement, mais sans que les
dans onze pays européens de niveau de déve-
autres familles soient totalement délaissées. Dans
loppement comparable (avec des pays nordiques
les pays nordiques où la fiscalité ne joue aucun
comme le Danemark, la Finlande, la Suède et la
rôle en matière de soutien aux familles, l’avantage
Norvège, des pays insulaires comme le Royaume-
provenant des aides au logement diminue puis
Uni et l’Irlande, et des pays d’Europe continentale
disparaît à mesure que le revenu augmente et
comme la France, l’Allemagne, la Belgique, les
ensuite, au-delà d’un certain niveau, le montant
Pays-Bas et l’Autriche). Soulignant les limites des
de l’avantage enfant se maintient au niveau des
données d’Eurostat sur les dépenses classées dans
prestations familiales, toutes versées sans condi-
la fonction « famille-enfants », l’analyse montre
tion de ressources. En France et en Belgique,
que le soutien aux familles passe par d’autres
l’avantage enfant peut avoir tendance à augmenter
canaux que les seules dépenses de prestations
avec le niveau de revenu en raison de l’effet impu-
familiales, en particulier par la fiscalité et les aides
table à la fiscalité qui vient compenser la baisse
au logement. Les chercheurs utilisent la méthode
des prestations à mesure que les revenus augmen-
des ménages ou cas types qui permet de calculer
tent. On retrouve cet effet plus favorable de la
un « family package » ou « avantage enfant »,
fiscalité pour les couples ayant des revenus plus
défini comme l’aide imputable au fait d’avoir
élevés, mais de manière atténuée, en Autriche et en
des enfants. Ce soutien dû à la seule présence
Allemagne ;
d’enfant(s) est calculé comme le supplément de
• au niveau de la générosité moyenne, l’Autriche
revenu par un ménage avec enfants par rapport
apparaît en tête, suivie du Royaume-Uni, puis d’un
à un ménage sans enfant mais se trouvant dans
groupe de cinq pays dont la France et l’Allemagne,
la même situation de revenu primaire (salaire
mais aussi la Belgique, l’Irlande et le Danemark.
identique).
L’avantage moyen est plus faible en Suède, en
Finlande et en Norvège, et les Pays-Bas apparaissent
L’analyse permet de mettre en évidence quelques
loin derrière. Mais ce classement moyen peut varier
faits saillants :
selon la configuration familiale ou les revenus.
• la France et Allemagne figurent parmi les pays
Ainsi, si l’Allemagne figure parmi les pays les plus
ayant une politique explicite et relativement
généreux, quel que soit le nombre d’enfants, la
importante de soutien financier des familles ;
France apparaît également comparativement très
• l’essentiel du soutien financier des familles
généreuse pour les familles avec trois enfants, mais
passe dans les pays étudiés par les prestations
très peu pour les plus petites familles ;
familiales, les aides au logement et l’impôt sur le
• les parents isolés apparaissent également assez
revenu. Ces deux derniers éléments constituent
mal lotis dans les deux pays ;
des éléments importants des aides aux familles.
• enfin, une extension de l’analyse aux familles
L’impôt sur le revenu ne joue cependant pas un
à l’assistance et bénéficiant de revenus minima
rôle de soutien aux familles dans tous les pays.
garantis montre une autre ressemblance entre les
Dans les pays nordiques, le système fiscal ne
deux pays. Ces derniers consacrent, en compa-
prend pas en compte la présence d’enfant (la
raison avec d’autres pays de niveau économique
Norvège, le Danemark et l’Islande tiennent
comparable, un soutien bien plus faible en direc-
néanmoins compte de la situation d’isolement du
tion des familles les plus pauvres.
parent) ;
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92 Synthèses et statistiques
4. Pour sa part, Katharina Wrohlich, (chercheuse au et l’évolution de la politique familiale en
« DIW » de Berlin), a développé un regard ori- Allemagne, et après avoir largement décrit le
ginal de la dimension financière des politiques tournant radical de la politique familiale alle-
familiales en soulignant les différences dans le mande avec les réformes entreprises, l’écono-
traitement des impôts sur le revenu en Allemagne miste souligne la nouveauté du contexte : la ques-
et en France. Le système fiscal français favorise-t- tion du soutien des parents salariés devient un
il davantage les familles avec enfants ? Et dans ce sujet central pour les entreprises et les partenaires
cas, quels types de familles sont les plus favo- sociaux. L’objectif du gouvernement allemand de
risées ? Le débat récurrent en Allemagne sur le placer ces nouveaux acteurs au cœur des ques-
fait que les familles avec enfants paieraient trop tions d’articulation vie familiale-vie profession-
d’impôts sous-tend qu’un soutien envers les nelle est de répondre aux challenges démographi-
familles (passant, par exemple, par un meilleur ques et de créer une société « family friendly ».
traitement fiscal) pourrait générer une augmenta- Ainsi, la création en 2003 de l’Alliance pour la
tion du taux de fécondité ainsi qu’une hausse de famille consiste à regrouper un vaste ensemble de
l’activité professionnelle. L’analyse économétri- mesures et d’activité afin d’améliorer l’articula-
que du traitement du mariage dans la fiscalité des tion vie familiale-vie professionnelle. Le ministère
deux pays montre que les couples mariés sans de la Famille, avec la collaboration de la Fonda-
enfant ont les mêmes situations fiscales dans les tion Bertelsmann, a été à l’origine de ce projet.
deux pays. En revanche, « l’avantage enfant » s’orga- Un texte commun présente les orientations et les
nise différemment dans les deux pays : en France, il objectifs : le besoin pour la société allemande
existe les prestations familiales auxquelles s’ajou- d’un taux de fécondité plus élevé, le besoin pour
tent, pour les familles imposables, l’effet du l’économie de travailleurs qualifiés et d’une
quotient familial. En Allemagne, les allocations participation plus grande des femmes au marché
familiales (Kindergeld) sont beaucoup plus géné- du travail, et le besoin d’une prise en charge
reuses, mais les familles aux revenus les plus éducative pour les enfants dans leurs premières
élevés peuvent y renoncer pour bénéficier en années. Pour illustrer cette approche, U. Klammer
échange d’une aide fiscale (Kinderfreibetrag). Au cite les alliances locales pour la famille. Créées
final, l’analyse économique et des microsimula- en 2003, ces réseaux visent à rassembler des
tions montrent que les systèmes fonctionnent de acteurs locaux (administration locale, mairies,
manière assez proche en Allemagne et en France. entreprises, représentants syndicaux et patronaux,
Cependant, des différences existent. Les gains etc.) afin d’impulser des actions qui améliorent la
sociofiscaux en France sont nettement supérieurs vie des familles. En janvier 2007, 364 alliances
à ceux procurés en Allemagne pour les familles locales avaient été fondées. Les accords collectifs
avec trois enfants et plus, en particulier pour les dans lesquels apparaissent des éléments liés à
familles du haut de la redistribution. Plus généra- l’égalité professionnelle ou à la conciliation sont
lement, les gains sont supérieurs en France pour essentiellement des accords signés dans les
toutes les familles les plus aisées, en raison non branches les plus féminisées, où les femmes sont
seulement de l’effet joué par le quotient familial très qualifiées, ou dans les entreprises publiques.
mais aussi de la définition différente du revenu Les sujets de négociations les plus souvent
imposable. Les familles à revenus bas ou moyens rencontrés sont la transition du temps plein vers
sont, en revanche, davantage aidées en Allemagne le temps partiel et vice versa, l’adaptation des
en raison d’allocations familiales beaucoup plus horaires, le principe d’égalité de traitement entre
élevées ; ceci est surtout vrai pour les familles les salariés, l’organisation du congé parental et la
avec un ou deux enfants. possibilité de prendre des jours de congé supplé-
mentaires pour soigner un enfant malade ou un
proche.
Autres dimensions de la conciliation
vie familiale-vie professionnelle La présentation de Gisela Erler (présidente de
Familienservice GmbH) a porté sur un dispositif
très peu connu en France, celui des maisons
La question de la « conciliation » vie familiale-
intergénérationnelles que les pouvoirs publics
vie professionnelle est une préoccupation impor-
veulent promouvoir. Ces maisons sont en pleine
tante pour comprendre l’évolution des sociétés
expansion : il en existe déjà plus de 500 en
actuelles et de l’emploi féminin en particulier.
Allemagne. L’objectif est d’offrir localement un
Sur cette question au cœur des problématiques
« welfare mix », en mixant en un même lieu
actuelles des politiques familiales allemandes et
services publics et services fournis par le secteur
françaises, des acteurs inhabituels interviennent :
privé, les associations, les organisations non
les entreprises et les partenaires sociaux. C’est
gouvernementales et des volontaires. L’idée est
sur ce thème qu’est intervenue Ute Klammer
de faciliter les liens entre les personnes âgées et
(Université de Duisburg-Essen) lors de cette journée
les plus jeunes, mais aussi avec les autres catégories,
d’étude. Après être revenue sur la situation politique
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93 Synthèses et statistiques
5. Conclusion et perspectives de recherche
à travers des services intergénérationnels, et en
tentant de supprimer les cloisonnements induits
par les activités et les politiques sectorielles. Ces Mark Pearson (responsable de la division Poli-
maisons fondées sur le partenariat offrent des tiques sociales à l’OCDE) a conclu la journée en
espaces ouverts sept jours sur sept. Elles reposent mettant l’accent sur les différents champs de
sur des principes d’activation (des plus jeunes et réflexion ouverts par la problématique de la compa-
des âgés, mais aussi des salariés, chômeurs, béné- raison des politiques familiales en Allemagne et
voles) et s’appuient beaucoup sur les volontaires en France. Les contributions, les débats avec la
qui offrent leurs services mais qui peuvent aussi y salle et les intervenants ont mis en évidence la
recevoir des formations. Ces volontaires appar- complexité des évolutions en cours, permis d’en
tiennent à toutes les générations mais sont âgés, souligner parfois les ambiguïtés et d’identifier de
très majoritairement, de 45 ans et 70 ans. Un des nouvelles pistes de recherche. L’une des questions
objectifs implicites de ces maisons est d’impli- ouvertes est celle de l’implication (ou non) des
quer davantage les citoyens, les hommes en par- entreprises et autres acteurs sociaux dans le sec-
ticulier, dans les activités à dimension familiale, teur accueil des jeunes enfants dans une optique
d’où leur intérêt au regard des questions de conci- de complémentarité avec les interventions publi-
liation et de partage des temps sociaux entre ques. Depuis quelques années, on assiste à des
hommes et femmes. Ces maisons offrent de tentatives d’élaboration de nouveaux « policy mix »,
nombreux services allant du soutien scolaire aux dont témoignent, par exemple, les mesures visant
visites au domicile des personnes âgées, en à impliquer les entreprises dans le domaine des
passant par des activités culturelles, de l’aide à aides à la conciliation travail-famille. Ces évolutions
l’utilisation des nouvelles technologies, etc. Elles justifient de poursuivre l’examen de cette question.
aident à concevoir de nouveaux services, payants M. Pearson a souligné l’intérêt d’approches compa-
ou gratuits, en ciblant principalement les familles ratives offrant l’occasion aux chercheurs, aux acteurs
actives et les personnes âgées et en favorisant la et aux entrepreneurs de discuter entre eux,
structuration d’une offre de services au plus près d’apporter des pistes de réflexion et de s’ouvrir à
des besoins (garde des enfants, réalisation de repas, d’autres questionnements plus larges. Cette journée
services d’aide ou d’accompagnement pour les d’étude a ainsi permis de souligner l’importance de
courses ou les démarches administratives, etc.). l’actualité des sujets abordés.
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