👉 La sobriété sous contrainte ou comment l'anthropologie stratégique nous aide à mieux comprendre les contraintes qui font obstacle au passage vers une consommation durable.
Un webinaire avec Dominique Desjeux pour mieux analyser en situation pourquoi les "idées", la "morale", les "valeurs" ne suffisent pas le plus souvent à expliquer le changement ou le non-changement. C'est une approche méthodologique qui part de la même question face à tout changement : qu'elles sont les contraintes qui poussent à changer, celles qui empêchent de changer, et qu'elles sont les marges de manœuvres des différents acteurs.
C'est une approche compréhensive du jeu des acteurs et non pas normative sur le bien ou le mal, le beau ou le laid, le juste ou l'injuste, ce qui est souvent déroutant. C'est une approche réaliste, voire optimiste qui n'enchante pas la réalité.
👉L'association Nous Sommes Vivants porte la transition écologique dans les entreprises et collectivités locales via un réseau de 300 consultants en innovation & transformation.
Notre approche pour porter la transition écologique dans les entreprises, c'est la régénération.
L'approche régénérative a pour but de développer les capacités uniques du vivant (humain -social et/ou environnement - nature) à poursuivre son évolution. Sa finalité c'est de permettre à un collectif de contribuer à un service écosystémique.
Au sein de l'association, nous explorons des approches et outils pour enclencher la transition écologique dans les entreprises en réponse au dépassement des limites planétaires et la disparition du vivant. Tu peux contribuer à leur conception.
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La sobriété sous contrainte
1. La sobriété sous contrainte
• Dominique Desjeux, anthropologue
• Professeur émérite à l’université de Paris Cité,
• Sorbonne SHS
• Chercheur international sous contrat
• www.argonautes.fr (mise en ligne des enquêtes sur les consommateurs, les décisions et les innovations)
2022
2. Présentation
• I - Le déclencheur historique de la révolution consumériste au 18e siècle : la pression démographique compensée par
l’usage du charbon
• A – Rappel sur les bioénergies : une consommation/production de quelques kWh
• B - La grande divergence énergétique : la mondialisation occidentale
• C – 2000, La convergence compétitive pour l’accès aux ressources
• II – les objectifs des innovations techniques ou organisationnelles depuis 1750 : simplifier la vie (même si tout le monde
n’est pas gagnant)
• III -Introduction à une anthropologie stratégique centrée sur les pratique, les contraintes et les effets de situation
• A - Qu’est-ce que l’anthropologie stratégique
• B – Les deux méthodes de base de l’anthropologie stratégique
• IV - Il n’existe pas de société sans contrainte
• A - Les 6 crises mondiales qui poussent au changement
• B - Les 11 grandes contraintes matérielles, sociales et symboliques qui organisent les changements de comportement et donc le
passage vers la sobriété
• Conclusion
• Observer la vie quotidienne
• Evaluer les forces qui poussent à être sobres et celles qui poussent à consommer, qu’elles viennent de l’offre ou de la demande, des
tensions entre classes sociales ou entre nations
• Observer les incertitudes géopolitiques, comme la guerre ou le climat, pour se préparer à improviser
3. « Crise énergétique : une sobriété surtout contrainte, difficilement
pérenne »
• Extraits « 65% des ménages ont opéré des changements de comportements pour faire face à la hausse des prix qui
touche le pays depuis l’automne 2021.
• En particulier, les déplacements ont été réduits, le thermostat a été baissé, la diversité alimentaire amoindrie pour 44%
de la population.
• La crise énergétique n’a pas été l’occasion d’une découverte de pratiques alternatives comme la location d’objet ou
des pratiques collaboratives.
• De manière plus minoritaire (21%), quelques reports vers des mobilités douces ont été mis en œuvre par des publics
plus aisés, avec des possibilités de perdurer.
• Les changements observés pour l’instant, surtout subis et mus par la contrainte, semblent donc peu propices à une
société organisée autour du paradigme de la sobriété. »
• Sandra HOIBIAN, Directrice générale du CRÉDOC, 2022/2023
• Après ce constat tout à fait intéressant,
• on peut se demander pourquoi dans nos sociétés la contrainte est perçue comme quelque
chose de négatif, comme s’il pouvait exister des sociétés sans contrainte,
• alors que c’est la légitimité de la contrainte qui peut poser problème, sa nature, ou sur qui elle
s’applique de façon juste ou injuste, efficace ou inefficace
4. Comment l’anthropologie stratégique nous aide à mieux
comprendre les contraintes qui font obstacle au passage
vers la sobriété
Comprendre les contraintes qui poussent ou qui freinent c’est ouvrir les portes du changement potentiel
Comprendre les contraintes signifie prendre en compte la logique des acteurs qui peut paraitre irrationnelle d’un
point de vue économique, scientifique, technique ou moral
Cela veut dire que le sens que les acteurs donnent à leur action se glisse par la voie étroite des contraintes de
situation. C’est ce que les Chinois appellent le Shì 势, les potentialités du cours des choses.
C’est une vision pragmatique, sans messianisme, qui résout les problèmes en avançant.
5. Quatre questions ouvertes et non exclusives pour
comprendre les chemins difficiles de la sobriété
1 - D’où vient la
consommation moderne :
le charbon qui a fait
passer les sociétés des
bioénergies aux énergies
fossiles au 18è siècle
2 - Pourquoi il faut être
plus sobre :
À cause des risques de
guerre du fait de la monté
de la classe moyenne
mondiale, surtout en
Orient , et de la rareté des
ressources
et du réchauffement
climatique qui demande
d’aller vers une sobriété
énergétique fossile
3 - Quelles sont les
contraintes pour être plus
sobre :
Celles qui poussent à
changer
(Les 6 grandes crises
actuelles)
Celles qui freinent parce
qu’elles augmentent la
charge mentale et
l’inconfort
(les 11 contraintes
matérielles, sociales et
symbolique)
4 - l’anthropologie
stratégique, un outil pour
mieux comprendre et agir
collectivement :
par respect pour la
diversité des acteurs
sociaux son but n’est pas
de donner du sens,
d‘enchanter la réalité, ce
qui relève du politique, de
la religion ou de la
philosophie,
L’anthropologie
stratégique déchiffre
l’action collective et les
marges de manœuvres des
acteurs sous contrainte
6. I - Le déclencheur historique de la révolution consumériste
au 18e siècle : la pression démographique compensée par
l’usage du charbon
Le charbon sera suivi par l’électricité, le pétrole et le nucléaire au détriment des
bioénergies et d’une fraction des classes productrices, mais en faveur du confort
et de moins de pénibilité (agriculture, automation)
7. La diversité des bioénergies entre -10 000 et +1750
• 10 000 ans de bioénergie, à
partir de la révolution agricole
• Accompagnés par de nombreux
moments de mondialisation
• XVIIIe siècle : La grande
divergence énergétique du
charbon anglais
7
2007
2011
8. A – Rappel sur les bioénergies : une
consommation/production de quelques kWh
10. 1975-1979, Congo, Pool, énergie humaine féminine
(piler le manioc pour la cuisine)
Photo, D. Desjeux, Sakameso
11. 1976, Mobilité et
énergie animale
• Le transport du sorgho près de
Gorom Gorom, Burkina Faso
• Photo, D. Desjeux
12. B – 1750, La grande divergence énergétique :
la mondialisation occidentale
Elle correspond à la période des colonies occidentales qui fait suite aux divers
empires depuis l’Assyrie entre le 10e et 7e siècle avant notre ère, puis les
empires romains, chinois, mogols, arabes, etc. Tous les empires « pompent » les
richesses des pays environnants sous forme de tribu.
13. Tension entre terre disponible et
augmentation de la population
• Au 18e siècle, en Angleterre
• La demande de textile est supérieure à
l’offre de laine produite par les moutons
du fait de la croissance démographique
• Il faudrait donc plus de terres pour
élever plus de moutons
• En même temps, il faudrait aussi plus de
terres pour faire pousser les forêts afin
de fournir
• du bois de chauffage
• du bois pour la construction des
maisons
• Du bois pour les petites industries
métallurgiques.
• Il y a donc une forte tension entre la terre
disponible et la poussée démographique.
13
14. Le charbon : la condition énergétique de la
révolution industrielle et donc de la consommation
• Le charbon va permettre de développer les capacités de la machine à
vapeur de Watts dont les rendements seront multipliés par 4
(introduction P. Minard, 2009, p. 18).
• La machine à vapeur va permettre de développer la productivité des
métiers à tisser dont l’approvisionnement n’est plus assuré par la laine
anglaise, mais par le coton américain.
• Le charbon et le coton vont faire baisser la pression sur la terre
• Le charbon va compenser le manque de bois
• Le coton va compenser le manque de pâturage qui aurait été nécessaire pour
répondre à la demande de vêtements du fait de la pression démographique.
14
15. L’énergie du charbon est un substitut au
manque de terre et aux bioénergies
• Le charbon a joué un rôle de substitut de la terre et des
énergies humaines, animales et naturelles
• Comme le dit Jancovici, aujourd’hui, tout se passe comme si
chaque terrien faisait bosser, en moyenne, 200 esclaves (en
équivalent/énergie humaine, 600 esclaves pour la France) grâce
aux énergies industrielles dont le charbon et le pétrole
• Jean Marc Jancovici, Blain, 2021, Le monde sans fin, Dargaud
• Il a permis la mise en place du confort qui s’est développé avec
l’électricité
15
16. C – 2000, La convergence compétitive pour
l’accès aux ressources
• Depuis 2000, on assiste à une grande convergence compétitive pour le
contrôle de l’accès aux matières premières, à l’énergie, aux protéines qui
rentre en tension avec la course contre le réchauffement climatique et la
sobriété
17. La montée de la classe moyenne mondiale des consommateurs à
partir de 2000, comme déclencheur de la convergence compétitive
pour l’accès à l’énergie, aux matières premières et à la sobriété
2009, projection sur l’augmentation
des dépenses de consommation
Le basculement de la progression des
émissions de CO2 entre 2000 et 2007
Une partie des classes sociales veulent entrer
dans la consommation
et une autre avoir une consommation plus sobre
18. II – Simplifier la vie : les objectifs des innovations techniques ou
organisationnelles depuis 1750
(même si tout le monde n’est pas gagnant)
Simplifier la vie, augmenter le confort et baisser les coûts
Mais aussi favoriser les gains d’une fraction favorisée de la population
A chaque changement il faut se demander qui va gagner et qui va perdre et donc
qui a intérêt à la sobriété ou qui est menacé par la sobriété
19. Entre 1750 et 2000, les innovations ont été organisées autour de 5
objectifs par rapport aux consommateurs finaux
• Simplifier les usages des biens de consommation grâce à
l’industrie, à la chimie et aux énergies industrielles.
• Augmenter le confort domestique et dépenser moins
d’énergie humaine, grâce aux énergies fossiles et
industrielles
• Augmenter la quantité des biens consommés
• Payer moins cher, baisser les coûts et les prix des biens
consommés
• Gagner du temps, aller plus vite
20. La sobriété remet en cause ces 5 objectifs
• La sobriété énergétique, numérique, consumériste, commerciale et des
loisirs rentre en tension avec ces 5 objectifs
• Pour mémoire ce sont les loisirs qui ont permis de dégager du temps
pour la consommation
• cf. Joffre Dumazedier en 1962, Vers une civilisation des loisirs
• Cela pourrait se traduire par une formule qui parait choquante
aujourd’hui : « avoir moins de loisir » pour consommer moins !
• Cf la Théorie de la classe de loisir de Thorstein Veblen (1899)
•
21. La sobriété, une nouvelles contraintes qui
pèse sur le consommateur
• Aujourd’hui sous contrainte de réchauffement climatique, de pollution, de l’eau
comme ressource rare, et de risques de guerre il faut arriver à limiter la
croissance de la consommation.
• Cela demande :
• de limiter les biens consommés
• d’augmenter leur durabilité
• dans la période de transition, cette durabilité augmentent bien souvent les coûts et les
prix (cf. l’agriculture bio), en période de forte contrainte de pouvoir d’achat
• le fait d’utiliser moins d’énergie industrielle sans avoir encore aujourd’hui l’équivalent
en énergies alternatives demande de plus utiliser l’énergie humaine et donc augmente la
pénibilité
• Cela veut dire qu’aujourd’hui les processus d’innovation vont être encore plus
complexes puisqu’ils vont à l’encontre du confort lié à la modernisation et
augmentent la complexité de la vie quotidienne
22. III -Introduction à une anthropologie stratégique centrée
sur les pratique, les contraintes et les effets de situation
Une analyse du changement qui part des contraintes des acteurs sociaux en situation
par différence avec des approches qui cherchent des explications par des corrélations statistiques hors situation,
ou qui expliquent le changement par les valeurs, le sens et les croyances
Toutes ces approches sont valides en fonction des situations historiques et des problèmes posés
On constate depuis 2020 une acceptation plus forte de l’analyse sous contraintes
Ce ne sont pas les contraintes qui sont nouvelles mais leur intensité et leur perception
24. Une discipline empirique basée sur l’observation et
la description comme outil d’interprétation
• Elle se centre sur des enquêtes concrètes qualitatives des acteurs sociaux en situation
• de façon inductive
• sans savoir où l’on va et sans hypothèse, sinon méthodologiques, sans état de l’art
• avec plusieurs outils de recueil de l’information
• observation, interview, focus groupe, en face à face et en ligne, photo, vidéo; photos et vidéo stimulus
• En utilisant quatre méthodes :
• Les échelles d’observation :
• qui constate qu’il n’y a pas d’approche globale et qu’un découpage n’est pas a priori meilleur qu’un autre.
Tout dépend du problème à résoudre.
• L’approche système
• qui montre les liens entre les éléments d’un système d’action, les interactions entre acteurs, les structures
stables, les incertitudes, les effets de situation, les contraintes
• La méthode des Itinéraires
• L’analyse dynamique des décisions, des changements et des innovation
• La méthode des cycle de vie
• en termes d’étapes liées à l’âge, de filière économique, d’ACV
2018
25. Un des grands constats
tiré des observations est
qu’il existe un écart entre
ce que disent ou pensent
les acteurs et ce qu’ils
font en pratique.
• L’anthropologie recherche les structures
stables sous la diversité des apparences
• L’analyses stratégique observe le
mouvement, les jeux d’acteurs, les
contraintes et ce qui émerge
• On ne peut observer en même temps le
mouvement et la stabilité, ni la chaine des
causalités du micro au macro
• L’anthropologie stratégique explique l’écart
entre les valeurs et les pratiques par les
contraintes qui transforment les intentions
en action et en pratiques différentes.
26. B – Les deux méthodes de base de
l’anthropologie stratégique
Les échelles d’observation
La méthode des itinéraires sous forme de système d’action dynamique
27. Ce que l’on observe à une
échelle disparaît à une autre
échelle
Echelle macro sociale
corrélation
Echelle meso sociale
situation
Échelle micro sociale
situation
L’individu apparaît ou disparaît
en fonction des échelles
Échelle neurobiologique
corrélation
Échelle micro individuelle
Sens et corrélation individu
Interaction sociale
Méthode des itinéraires
Système d’action
Géopolitique
Stratifications
Sociales
Cycles de vie
Genres
Cultures
(religion,
tradition
Politique,
« ethnie »)
Biologie (organoleptique)
La causalité change
en fonction des échelles
- La corrélation (indicateur
de la causalité)
- La situation (système)
- Le sens (la justification)
28. La méthode des itinéraires : un itinéraire de contraintes et
de coopération entre acteurs, un jeu permanent du rugueux
et du fluide (du ménage aux systèmes organisés)
R et D
C & D
(Connexion)
Incubateur
Marketing
Publicité
Packaging
Distribution Achat
Réception
Rangement
Usage
Réception
Déchet
Remise en
circulation
Contestation
Production
Industrie
Logistique
La transsubstantiation publicitaire
L’enchantement du bien ou service
29. Les 6 règles scientifiques des méthodes
qualitatives
• — l’induction, comme moyen d’explorer la réalité sans faire d’hypothèse autre que méthodologique. Nous
présupposons qu’il existe des contraintes matérielles, sociales et symboliques qui influent sur les
comportements des acteurs, ainsi que des effets de cycles de vie ou de division genrée des tâches. De
plus, les prises de décision sont considérées comme relevant d’un processus dans le temps et comme la
résultante d’interactions sociales, au moins à notre échelle d’observation microsociale ;
• — l’ambivalence, qui postule que toute réalité comprend une face négative et une face positive
indissociables (oxymore, paradoxe, « en même temps »)
• — la généralisation de la diversité des usages en fonction de leur occurrence, en évitant toute
interprétation en termes de fréquence, ce qui n’aurait pas de sens sur un échantillon aussi faible ;
• — une approche compréhensive, sans jugement de valeur ou dénonciation. Le point de vue des acteurs
est le point de départ pour comprendre leurs pratiques et le sens qu’ils leur donnent, pour faire
apparaître des logiques sociales sous-jacentes, des enjeux au-delà de leurs seules perceptions ou de leurs
vécus ;
• — un principe de symétrie par rapport à l’efficacité ou l’inefficacité d’une action : la réussite d’une
action va dépendre dans tous les cas des contraintes du jeu social dans lequel elle est encastrée.
• Nous constatons qu’une fréquence quantitative n’est pas plus vraie que la diversité des occurrences
qualitative, mais qu’elle nous apprend autre chose (Desjeux, 2018).
30. IV - Il n’existe pas de société sans contrainte
Ce qui ne veut pas dire que toutes les contraintes sont acceptables
Les contraintes sont la résultante d’un champs de forces
31. Les contraintes : connaitre les contraintes
c’est comprendre où agir pour changer
• Les contraintes font partie de la vie sociales, il n’y a pas de société sans contrainte,
comme il n’y a pas de société sans énergie, sans ambivalence du bien et du mal
• Ce que l’on peut discuter c’est la légitimité de telle ou telle contrainte
• On peut distinguer
• Les contraintes qui poussent à changer (les 6 crises géopolitiques et macrosociales)
• Les contraintes qui poussent à ne pas changer
• Les 11 contraintes du quotidien dont celles qui augmentent la charge mentale ou qui diminuent le
confort
• La simplicité augmente les chances de réception d’un changement
• Or la sobriété augmente la charge mentale
• Les contraintes varient tout au long du cycle de vie d’un produit ou d’une filière, en
fonction des classes sociales et du revenu
• Cela demande d’innover sur le processus de changement et d’innovation
32. Le concept de contraintes est ambivalent puisqu'il peut autant
renvoyer à l'idée de frein que de pression pour changer
• ce qui varie en fonction des situations
• ce sont les marges de manœuvre et donc les atouts des acteurs sociaux face
à ces contraintes
• la légitimité des contraintes
• qui gagne ou perd au changement
• La sobriété du futur va dépendre de la compréhension de deux
grandes catégories de contraintes :
• des 6 grandes crises géopolitiques qui nous obligent à changer
• et de 11 contraintes matérielles, sociales et symboliques, sans que leur
chiffre soit limité, qui freinent le changement
33. A - Les 6
crises
mondiales
qui poussent
au
changement
• Le sens du changement varie en fonction
des appartenances de classe sociale et des
revenus
• 2008, crise monétaire
• 2019, crise sociale avec les gilets
jaunes (correspond à la montée des
populismes dans le monde (Hongrie,
USA, Brésil, Italie, etc.) et des régimes
autoritaires (Chine, Russie)
• 2020, crise sanitaire
• 2021, crise logistique
• 2022, crise militaire
• Crise climatique (innondations et
sécheresses)
34. Les changements
systémiques dus à
la pandémie
La pandémie a désorganisé l’ensemble de la chaine
d’approvisionnement en créant des pénuries dans différents
domaines
Tension globale sur les filières de l’offre du à un transfert de
consommation lié au confinement
Porte-conteneurs à Singapour, 2014,
D. Desjeux
35. La société est un immense système d’action organisée autour des contraintes logistiques
et énergétiques et des changements dans la vie quotidienne
Production
Distribution
Consommation
Environnement, déchets
2021 Crise logistique
entraine
l’arrêt de la mobilité
qui transforme
la consommation
dans le logement
Le logement,
un hub domestique digital
digital et électrique
avec bureau, classe
et aménagement du logement
avec demande d’une
nouvelle consommation
Pénurie de matière
première
d’énergie et de biens
2020 Baisse de 5% de CO2
Inflation
remonté de 5% de CO2
2022 guerre en Ukraine
Le cygne noir imprévu
2020 Crise du Covid
2022 Rapport GIEC
2022/23 Crise
alimentaire
au sud
Économie
de pénurie =
nouveau
comportement
du consommateur
20… Chine, Taiwan, US
35
2022, Inflation
Baisse de 10%
En décembre 2022
36. Les fabricants de cercueil
sont confrontés à la pénurie
de bois
• 2020 : pointe d’activité liée aux
décès du Covid 19 en 2020
• Elle fait passer les stock de un an à
4 mois
• 2021 : Le prix du chêne double du
fait des achats chinois
• Les Echos du 29/11/2021
• et des tension sur le pin qui part
aux Etats Unis où la construction a
repris
• BFM immo, 30/04/2021
Construction d’une maison américaine,
Arizona, 2008, D. Desjeux
37. Pendant l’arrêt de la mobilité la production
de CO2 baisse de 5%
5% est le chiffre de baisse qu’il faudrait réaliser tous les ans
pour atteindre la neutralité Carbonne vers 2050
Cela nous indique la force de la contrainte (mais non la nature
de cette contrainte) qu’il faudrait utiliser pour atteindre la
neutralité carbonne
38. La sobriété énergétique varie en fonction des
étapes du système d’action (filière, ACV) : où agir?
Mission interministérielle numérique écoresponsable pilotée par la direction interministérielle du numérique et le Ministère de la Transition écologique.
CO2 lié à l’étape
de production : la viande
L’usage (cuisine) produit
peut de CO2
Usage : le streaming, les jeux vidéos
semblent gros consommateurs
d’énergie fossile
Etape de production :
les écrans
d’appareils numériques
2018 05, (Dé) penser la consommation
et économiser l’énergie :
une tension entre confort et ascèse.
Desjeux, Galateau, Barbier
https://consommations-et-societes.fr/de-penser-la-consommation-et-economiser-lenergie-une-tension-entre-confort-et-ascese-
le-cas-de-la-consommation-de-viande-et-des-usages-des-tic-comme-analyseur-de-la-consommation-d/ D. Desjeux, E. Galateau, C
Barbier
Stockage :
les data centers
stockage
39. Un exemple de
consommation énergétique
• « Tout cela est climatisé. C’est redondé
électriquement pour la climatisation. Il y
a des couloirs froids et des couloirs
chauds. On refroidit les équipements et
les équipements produisent de la chaleur
qui sort à l’arrière et qui est poussée
vers l’extérieur. Cela demande une
grande quantité d’énergie. C’est une
salle assez bruyante à cause des
ventilateurs des machines qui tournent.
Il y a le bruit de la climatisation. »
(société télévision)
40. B - Les 11 grandes contraintes matérielles, sociales et
symboliques qui organisent les changements de
comportement et donc le passage vers la sobriété
Les 5
contraintes
matérielles
Le temps : Le changement proposé fait-il gagner ou perdre du temps ?
L’espace : est-ce qu’il y a la place physique de faire le changement (salle de bain,
chambre, living dans l’espace domestique, lieux d’achat à l’extérieur)
Le budget : est-ce que le changement est supportable financièrement (bio)
Le système d’objets concrets nécessaire à l’usage du nouveau produit ou service
(dont les compteurs)
L’énergie (dont l’énergie humaine disponible et la division sexuelle et sociale des
tâches) et les risques de panne
Les 4
contraintes
sociales et
psychosociales
L’apprentissage : est-ce complexe à apprendre, contrainte qui peut disparaitre sous forte
contrainte de survie ou de budget ?
La norme de groupe : entre ce qui est prescrit, permis, interdit plus ou moins implicitement
dans un groupe
Les réseaux sociaux « prénumériques » et numériques comme base du jeu des acteurs qui
produisent les normes, des conventions, en faveur ou défaveur du changement
la charge mentale : Le changement aura du mal à se faire si la nouvelle pratique augmente la
charge mentale, si c’est plus compliquer à utiliser ou si cela entraine de l’inconfort
Les 2
contraintes
symboliques
L’identité personnelle ou professionnelle : Est-
ce que le changement va faire « baisser ou
monter la face » de l’autre, 面子 Miànzi comme
on dirait en Chine. Est-ce qu’il touche à l’identité
masculine ou féminine, au statut social ou
professionnel ? (cf. l’enquête sur la viande)
Les risques perçus : pour la santé, le corps ou la
sécurité
40
42. Les 5 crises qui vont déclencher l’émergence de
nouvelles croyances entre -1200 et +400 de notre ère
avec Yahvé, Jésus
La crise climatique et de
l’économie du cuivre (15e-12e
avant notre ère) :
Au cœur du polythéisme la
rencontre avec Yahvé
la crise de la déportation à
Babylone (6e avant notre ère) :
le contact avec la monothéisme
zoroastrien
La montée de la culture
grecque (4e 1e avant notre ère) :
l’unification culturel,
la langue commune grecque,
les débats sur la circoncision et
le prosélytisme
La destruction du temple par
les romains (an 70)
La tension entre deux
stratégies de survie dont l’une
se réfère au « rabbin jésus »
qui est plutôt prosélyte
la crise monétaire de l’empire
romain (4e)
L’institutionnalisation du
christianisme
43. L’itinéraire systémique des lieux d’usage du tertiaire : incertitude de la
continuité énergétique et déplacement de la sobriété entre le bureau et
le logement
• Bureau
Site
Services aide à
Mobilité
Dans la Voiture
Chez le Client
Transport en
commun
logement
Espace de co-working
Jardin
19/01/2023
école
Interférence vie de travail vie de famille
Gestion de la diversité
INTERNET
Débit
Panne, Crises, cygne
noir
IMPROVISATION
Courses
restaurant
Immobilier de bureau
Commerces
Parking : logistique e-commerce,
Vélos, voitures électriques, fermes…
Organisation du travail
Management alternatif
Sécurité
Nettoyage
numérique
Communication
Énergie : bilan carbone
déménagement
Mode de vie et changements invisibles
Enquête 2021/2022 sur le télétravail, D.Desjeux
44. La sobriété est liée à la vie quotidienne et aux changement de
mode de vie : importance des instruments de mesure qui sont aussi
des outils de contrôle social
• Pour changer les comportements et les modes de vie il faut savoir ce que l’on
consomme
• D’où l’importance des instruments de mesure des flux en général et des flux d’eau,
d’électricité ou de bilan carbonne en particulier
• Les usages de l’énergie : Linky, pour savoir comment baisse sa consommation
• Mais faire baisser sa consommation, fait baisser le confort pour ceux qui sont
dedans
• de sèche linge, demande, par exemple de plus ou de ne plus repasser, ou d’occuper un
nouvel espace dans le logement pour faire sécher le linge, ou d’attendre plus longtemps,
etc, et donc de baisser le confort
• ou d’audio visuels demande de limiter les usages du telephone, de la tablette ou de
l’ordinateur, etc.
• Dans certains cas cela ne pose aucun problème, dans d’autres cela en pose
• Certains n’ont pas accès à ces technologies et souhaitent y avoir accès
46. Conclusion
Observer la vie quotidienne
Evaluer les forces qui poussent à être sobres et celles qui poussent à consommer,
qu’elles viennent de l’offre ou de la demande, des tensions entre classes sociales ou
entre nations
Observer les incertitudes géopolitiques, comme la guerre ou le climat, pour se
préparer à improviser
47. Pour changer les comportements il ne suffit
de « dire » ou de « savoir » ce qu’il faut faire
• Comme anthropologue, je voudrais montrer que si l’on souhaite que le
consommateur change de comportement il faut commencer par observer
sa vie quotidienne et comprendre les problèmes qu’ils rencontrent dans
sa vie de tous les jours.
• C’est la même méthode qui s’applique au changement dans les entreprises ou
la grande distribution.
• Sans oublier que l’innovation transforme aussi l’organisation qui l’émet
• L’idée centrale est que si l’on cherche à innover et donc à changer
quelque chose dans la vie des consommateurs, une des méthodes
consiste à observer ses pratiques dans la cuisine, le living, la salle de
bain ou la chambre.
• On se focalise sur l’innovation de réception par rapport à l’innovation
d’invention, mais sans exclusives
48. Les forces qui poussent à la consommation sont aussi
fortes, voire, plus que celles qui poussent à la sobriété
Les data centers
Le développement des grands centres commerciaux
La facilité du charbon et des gaz de schiste
Etc.
49. Les incertitudes militaires : les
conséquences de la compétition pour
l’accès aux matières premières qui
conditionnent la consommation
Taiwan
Les micro-processeurs
L’inde
50. En période d’incertitude la peur augmente
ainsi que la demande sécurité et en même
temps la créativité
• On est peut être face à une immense vague de
« destruction créatrice » à la Schumpeter qui va
ouvrir la voie à la transition énergétique sous
contrainte de pénurie lié aux nombreux « cygnes
noirs » ou « dinde de Thanksgiving » qui ne vont
pas manquer d’émerger.
• Mais cela ne se fera pas sans soubresaut car les
groupes ou les pays qui vont se retrouver
déclasser et en descente sociale, vont faire appel
à des sauveurs, à des gouvernements populistes et
autoritaires, si la solidarité est insuffisante
• C’est donc aussi un moment d’opportunité et
d’invention comme avec les marché de la seconde
main (les voitures d’occasion, les jouets), les
innovations industrielles et la sobriété
• Merci pour votre attention
1972, coup d’Etat à Tananarive, Madagascar.
Un grand moment de rumeurs conspiratoires
D. Desjeux