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vendredi 21 octobre 2011 LE FIGARO
C
ISABELLE ROUGHOL
L’ÉPOPÉE sanglante de Mouammar Kad-
hafi s’est achevée hier pas très loin de
l’endroit où, selon la légende qu’il s’était
forgée, le Guide était né sous une tente
dans le désert de Syrte, il y a 69 ans. C’est
au moment où les forces du Conseil natio-
nal de transition (CNT) parvenaient à dé-
loger les derniers combattants fidèles à
l’ancien régime de leur bas-
tion du centre-ville que le di-
rigeant déchu a succombé.
Aucun ordre de tuer le colonel
n’avait été donné, ont assuré
les responsables du CNT dans
une conférence de presse,
tard hier soir. « Quand il a été
retrouvé, il était en bonne santé
et portait une arme », a décla-
ré Mahmoud Jibril, le chef du nouvel exé-
cutif libyen. Il aurait été capturé sortant
d’une conduite d’évacuation où il s’était
réfugié, puis a ensuite été dirigé vers un
pick-up. « Quand le véhicule a démarré, il
a été pris dans un échange de tirs entre des
combattantspro-Kadhafietdesrévolution-
naires, et il a été tué d’une balle dans la
tête. » Il serait mort à l’hôpital. Et Mah-
moud Jibril d’ajouter : « le médecin légiste
ne peut dire si la balle venait des révolution-
naires ou des forces de Kadhafi ».
Uneversionquinerépondpastoutàfait
aux questions que posent les images tour-
nant en boucle sur les chaînes de télévi-
sion arabes. La vidéo filmée avec un télé-
phone portable montre Kadhafi
ensanglanté, encore vivant, bousculé par
des civils et des hommes en treillis. Les di-
rigeants n’ont pas commenté ces images.
L’un de ses fils, Moatassem, ainsi que
l’ex-ministre de la Défense, Aboubakr
Younès Jaber, ont subi le même sort. Un
convoi transportant le troisième fils du
dictateur, Seïf el-Islam, qui fuyait Syrte,
était encerclé hier en fin de journée par les
forces du CNT. Les dirigeants n’ont pas su
dire s’il avait été capturé ou tué.
Selon des photographes de
l’AFP, les corps du raïs et de son
fils Moatassem ont été transpor-
tés hier après-midi à Misrata,
autre ville conquise par les rebel-
les au prix de très rudes combats,
et déposé dans une maison où se
pressaient les badauds. Les auto-
rités envisageraient un enterre-
ment rapide et dans un lieu secret.
La mort du colonel Kadhafi a été saluée
par le président américan dans une courte
allocution télévisée. Évoquant « la fin d’un
chapitre long et douloureux », il a estimé
que cette mort prouvait que les « régimes
à poigne » de la région sont voués à
l’échec. Alain Juppé a, lui, salué la « fin de
quarante-deux ans de tyrannie » en Libye
et souligné que la France était « fière »
d’avoir aidé le peuple libyen. Selon le mi-
nistre de la Défense Gérard Longuet, c’est
en effet une frappe française qui a stoppé
le convoi de Mouammar Kadhafi fuyant
Syrte, avant que les forces libyennes ne
l’interceptent à terre. À Bruxelles, l’Al-
liance atlantique a bien confirmé hier que
son aviation était entrée en action dans le
secteur, sans donner plus de précision.
Prêt à mourir
les armes à la main
La dernière apparition publique de
Mouammar Kadhafi remontait au
12 juin, deux mois avant la chute de Tri-
poli. Par la suite, le Guide s’est exprimé à
quelques reprises à la radio et dans des
communiqués vindicatifs. Des rumeurs
l’ont, un temps, dit réfugié à l’étranger,
en Tunisie, en Algérie, en Afrique du Sud
ou en Guinée équatoriale. Mouammar
Kadhafi, lui, répétait qu’il ne quitterait
pas le pays et qu’il était prêt à mourir les
armes à la main.
Pour une fois, il a sans doute dit vrai.
Les services de renseignements occi-
dentaux étaient persuadés que le Guide
n’avait pas quitté le pays. L’acharne-
ment des rebelles à prendre Syrte, au-
delà de son importance symbolique, vi-
sait aussi à supprimer l’une des derniè-
res bases de repli dont pouvait disposer
l’ex-dirigeant libyen. En atteignant ce
double objectif, l’insurrection parachè-
ve sa victoire militaire. Le chef de l’exé-
cutif du CNT, Mahmoud Jibril, a annon-
cé que la « libération totale » de la Libye
serait proclamée samedi. Une autre page
de l’histoire du pays s’ouvrira alors, cel-
le des combats politiques qui pourraient
être aussi âpres qu’une guerre. ■
Le premier cliché de l’ex-dirigeant libyen blessé pris par un rebelle avec son téléphone portable. Des images de la chaîne al-Jezira
le montre encore vivant, violemment pris à partie par des combattants. PHILIPPE DESMAZE/AFP
L’un des fils de l’ex-dirigeant, Moatassem,
a également été tué et un deuxième,
Seïf el-Islam, était encerclé par les insurgés.
ISABELLE LASSERRE
C’EST Silvio Berlusconi, le chef du gou-
vernement italien, qui l’a affirmé le pre-
mier : « La guerre est finie. » « Sic transit
gloria mundi », « Ainsi passe la gloire du
monde »,aajoutéceluiquifut,enEurope,
l’un des principaux alliés de Kadhafi. La
disparition du Guide libyen signe la fin de
la partie pour l’Otan, qui avait été autori-
sée à intervenir militairement par les Na-
tions unies le 17 mars, avant de prendre le
contrôle des opérations le 31. Avec une
mission : protéger les populations civiles
desattaquesdurégimelibyen.
Tout en baissant la voilure, l’Otan
avait poursuivi ses opérations militaires
depuis la chute de Tripoli en août der-
nier. Après avoir pendant quatre mois
dégagé la voie aux combattants libyens,
armé et entraîné les rebelles, les pays de
l’Alliance ont continué leurs bombarde-
ments sporadiques près des bastions du
régime et mis leurs moyens de rensei-
gnements et de reconnaissance au servi-
ce de la traque de Kadhafi.
Bombardements sporadiques
Volontiers passé sous silence au début de
la guerre, le départ, et l’arrestation, du
leader libyen est vite devenu l’un des
buts de guerre des leaders occidentaux
et arabes. Mercredi, le Conseil des am-
bassadeurs avait d’ailleurs décidé, sous
l’influence de la France et de la Grande-
Bretagne, les deux pays leaders de l’in-
tervention, de maintenir le dispositif
tant que persistaient des « menaces sur
la population ».
Un grand flou entourait encore hier
soir les circonstances de la mort du raïs
déchu. Selon le Conseil national de tran-
sition libyen, il a reçu une balle dans la
tête lors d’un échange de tir après sa
capture. Un raid aérien mené par l’Otan
aurait empêché sa fuite. À Bruxelles,
l’Alliance a confirmé que ses avions
avaient frappé vers 8 h 30, hier matin,
deux véhicules des forces pro-Kadhafi
dans la région de Syrte. Et selon le mi-
nistre français de la Défense, c’est une
attaque de l’aviation française qui a
stoppé le convoi : une colonne de 80 vé-
hicules qui tentaient de quitter Syrte. Un
drone américain aurait également parti-
cipé à l’attaque.
À Paris, à Bruxelles et à Londres, res-
ponsables politiques et militaires
n’avaient pas attendu la capture de l’an-
cien leader libyen pour tirer un bilan,
positif, de cette intervention militaire
menée par les Européens et soutenue par
les pays arabes de la région. Depuis le
31 mars, les avions de l’Otan ont réalisé
26 089 sorties, dont 9 618dites « offensi-
ves ». Avec un bilan quasiment nul en
dégâts collatéraux. Dans les états-ma-
jors des grands pays ayant participé à la
mission, l’opération libyenne est consi-
dérée comme une réussite, voire même
comme un modèle d’intervention mili-
taire pour le futur. Le secrétaire général
de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen a es-
timé que l’Alliance avait « rempli avec
succès le mandat historique confié par les
Nations unies ». Le Conseil de l’Atlanti-
que nord devrait se réunir aujourd’hui
pour décider de la fin des opérations.
Davantage politique, la nouvelle étape
qui s’est ouverte depuis hier en Libye
risque d’être plus délicate. En renonçant
à envoyer des troupes au sol, les pays de
l’Otan ont évité à la fois l’impopularité
politique et le risque d’enlisement mili-
taire. Mais ils se sont aussi privés d’un
moyen d’influence sur les forces locales.
Or la rébellion, armée par l’Alliance, est
divisée et traversée par des courants is-
lamistes. ■
TANGUY BERTHEMET
ENVOYÉ SPÉCIAL À SYRTE
SYRTE est finalement tombée, de guer-
re lasse. Hier, au petit matin, les révo-
lutionnaires ont enfoncé les ultimes li-
gnes des kadhafistes, mettant fin à leur
résistance que tous trouvaient curieu-
sement obstinée. L’explication de cette
motivation hors du commun est venue
avec l’annonce de l’élimination de
Mouammar Kadhafi non loin de sa ville
natale en ruines. Un mois de combats a
détruit la cité que Kadhafi rêvait en
modèle, la transformant en ville fantô-
me. Dans les rues défoncées et désertes,
les gros tout-terrain des thuwars, les
révolutionnaires, continuent de tour-
ner, leurs mitrailleuses lourdes pointées
sur les façades noircies et creusées
d’impacts de tous calibres.
L’est de Syrte était aux mains des re-
belles depuis plusieurs jours, mais les
snipers, cachés dans les appartements
ou sur les toits, continuaient de semer
la mort. Depuis une semaine, Abdallah
et ses cinq hommes ont traqué ces
combattants. « On cherche à les débus-
quer, mais c’est très dur. Ils bougent
sans arrêt, profitent de la nuit pour
changer de quartier. Ils ne se rendront
pas. Ils préfèrent mourir les armes à la
main, car ils savent que la corde les at-
tend », expliquait-il, sourire au coin
des lèvres.
La plus dure des batailles
Le scénario est à chaque fois le même.
Dès que la patrouille entend parler d’un
tir, elle se précipite et investit la maison
ou l’immeuble suspect. La fouille à tra-
vers les pièces ravagées par les pillards
est rapide. Et le plus souvent vaine. La
faute en revient à la désorganisation de
cette nouvelle armée qui, malgré les
victoires, reste une bande de civils en
armes. Personne ou presque ne signale
la présence des tireurs embusqués, pré-
férant confier sa vie à la grâce de Dieu.
Il faudra sans doute encore quelques
jours pour que Syrte soit totalement
sûre. Et des mois pour que les habitants
y reviennent. La ville n’a plus ni eau, ni
électricité. La plupart des logements
sont inhabitables. Les boutiques, ri-
deaux de fer arrachés, sont béantes.
Avec Misrata, la bataille de Syrte res-
tera comme la plus dure cette guerre.
Mais peu de Libyens pleurent le destin
de cette ville honnie que la rumeur
avait parée de tous les luxes dont le res-
te du pays était privé. Aux abords de ce
qui était, hier matin encore, le front en-
tourant le dernier carré de kadhafistes
reclus depuis quatre jours sur moins
d’un kilomètre carré, les thuwars mau-
dissaient les lieux, se faisant prudents.
Beaucoup sont morts pour prendre ce
dernier bastion.
À l’angle de Dubaï Street et de Cairo
Street, le paysage donne une idée de
l’ampleur des combats. Les bâtiments,
réduits à l’état de masse grisâtre, sem-
blent sur le point de s’effondrer. L’ave-
nue n’est plus qu’un tas de décombres.
« Trop de combattants sont tombés en
martyrs pour ça », confie Mahin, un re-
belle épuisé par les assauts successifs,
priant pour que les avions de l’Otan
viennent « finir le travail ».
Les rares civils qui, ces derniers
jours, sortaient encore, vivants mais at-
terrés, étaient regardés avec une extrê-
me suspicion. Les voitures étaient
fouillées, les hommes sévèrement in-
terrogés. « On redoute que des kadhafis-
tes tentent de fuir avec des familles »,
explique Mahin. Sans l’avouer, c’est
Moatassem Kadhafi, le troisième fils du
Guide, censé être à Syrte à la tête des
troupes fidèles à l’ancien régime, qu’ils
traquent. Jamais les thuwars n’auraient
imaginé Kadhafi lui-même si près
d’eux.
Six mille hommes
pour encercler la ville
La mort du Guide est arrivée comme
une surprise totale. « C’est Moatassem
qui est en ville. Kadhafi lui-même ne peut
pas être là. Il n’est pas assez bête pour
s’enfermer ici », expliquait encore mar-
di Salah al-Jabu, l’un des responsables
militaires de la révolution pour Syrte.
Mais pour les combattants, son élimi-
nation sonne comme un soulagement.
Longtemps la victoire de Syrte est
apparue amère. L’offensive sur la ville,
dernière cité encore fidèle à l’ancien
régime, ne fut pas la guerre éclair dont
ils avaient rêvé, le triomphe facile. Il
aura fallu plus d’un mois de siège pour
circonscrire les jusqu’au-boutistes pro-
tégeant Mouammar Kadhafi. Selon Ra-
madan Zarmar, chef du conseil militai-
re de Misrata, 6 000 thuwars ont été
mobilisés autour de la ville, venus tant
de Misrata que de Benghazi. Le bilan des
combats sera difficile à établir, mais il
s’élève au moins à 300 tués et plus de
1000 blessés.
« Allah u Akbar !, s’exclame un civil
dansant autour de sa voiture. Nous avi-
ons peur qu’avec tout son argent Kadhafi
parvienne à relancer la guerre. Qu’il
coupe l’eau des villes, qu’il sabote les
puits de pétrole. Cette fois c’est fini, les
martyrs ne sont pas morts en vain. » ■
Sa mort est arrivée
comme une surprise
totale. Les combattants
voient son élimination
comme un soulagement
Des soldats fêtent la libération de la ville de Syrte, hier. Il aura fallu plus d’un mois de
siège pour circonscrire les jusqu’au-boutistes protégeant Kadhafi. AL-FETORI/REUTERS
44jours
depuis le dernier
message radiodiffusé
de Kadhafi
2 international Vidéo : la chute de Syrte et la mort
de Kadhafi www.lefigaro.fr/international
«Une nouvelle Libye,
un monde arabe à reconstruire»
L’ÉDITORIAL DE PIERRE ROUSSELIN PAGE UNE
mardi 27 juillet 2010 LE FIGARO
C
6 international
P a r t e n a i r e s d e l a 4 1 è m e
é d i t i o n d e L a S o l i t a i r e
Attentat contre la chaîne
al-Arabiya à Bagdad
Un attentat contre les bureaux de
la populaire chaîne de télévision
arabe al-Arabiya a fait six morts
hier, à Bagdad. Deux autres
attentats, à Kerbala, ont tué
21 policiers et pèlerins, rassemblés
en vue de célébrations chiites.
Yémen : 70 soldats capturés
Les rebelles chiites du Yémen ont
conquis hier une position
militaire stratégique et capturé
70 soldats dans le nord du pays.
Iran : disparition de l’avocat
d’une condamnée à mort
L’avocat qui défendait une
femme condamnée à mort par
lapidation était porté disparu hier
alors que les autorités iraniennes
ont émis un mandat d’arrêt
contre lui.
Huit morts dans un attentat
au Pakistan
Un attentat suicide, revendiqué
par les talibans, a fait au moins
8 morts et 20 blessés hier devant le
domicile d’un ministre provincial
dans le nord-ouest du Pakistan.
Chavez menace de geler
les exportations de pétrole
aux États-Unis
Le président vénézuélien, Hugo
Chavez, a menacé de suspendre
les exportations de pétrole vers
les États-Unis si Washington
soutenait une attaque
de la Colombie contre
son pays.
E N B R E F
ISABELLE ROUGHOL
CAMBODGE Le tribunal international
pour les Khmers rouges, a rendu, hier à
Phnom Penh, son premier verdict,
condamnant à trente-cinq années de
prison Kaing Guek Eav, alias Douch,
l’ancien directeur du terrible centre de
détention S21.
Reconnu coupable de crimes contre
l’humanité et de crimes
de guerre pour la tor-
ture et le meurtre d’au
moins 12 372 person-
nes, il ne purgera que
dix-neuf ans, après dé-
duction de onze années
d’une détention pré-
ventive jugée à peine
légale et de cinq autres
années en violation de
ses droits. L’homme de
67 ans pourrait donc
sortir vivant de prison.
Comme la loi cambod-
gienne autorise une li-
bération pour bonne
conduite aux deux tiers
de la peine, il pourrait
même sortir avant son
80e anniversaire, re-
marque la juriste Anne
Heindel, du Centre de
documentation du
Cambodge.
La sentence est
« tout à fait dans les
clous de la justice inter-
nationale », note Hea-
ther Ryan, qui a suivi
tout le procès pour l’ONG Open Society
Justice Initiative, mais c’est une
conclusion difficile à accepter pour les
parties civiles, qui rêvaient de perpé-
tuité, ou au moins des quarante années
effectives de détention requises par le
parquet. « C’est systématique avec ce
tribunal : il crée des attentes et ne les sa-
tisfait pas », commente Anne Heindel.
Torture et exécutions
Après avoir renversé en 1975 la jeune
république cambodgienne, les Khmers
rouges tentent d’établir une société
agraire utopiste. Le
pays se ferme à l’exté-
rieur, les villes sont vi-
dées, les intellectuels
pourchassés, et la po-
pulation soumise aux
travaux forcés. En cette
année Zéro, Douch est
un jeune professeur de
mathématiques. Effica-
ce et consciencieux, il a
déjà dirigé un centre de
détention et d’« inter-
rogation » dans le ma-
quis communiste et
prend logiquement la
tête de S21, un ancien
lycée de la capitale de-
venu prison pour des
ennemis politiques,
réels ou imaginés, et
leurs familles.
S21, la prison de Tuol
Sleng, offre un témoi-
gnage unique de la
cruauté du régime : les
tortures et les déten-
tions étaient systémati-
quement répertoriées et
les détenus photogra-
phiés. À la libération en 1979, les tor-
tionnaires n’ont pas eu le temps de dé-
truire les archives, qui alimentent
aujourd’hui un musée des horreurs
dans l’ancienne prison. Et le dossier de
l’accusation.
L’objectif des geôliers est d’obtenir
une « confession » écrite de chaque
détenu par tous les moyens : électrocu-
tion, bastonnade, simulation de noya-
de… Quand le prisonnier a tout dit, il
est abattu d’un coup tiré sur la nuque
dans les tristement célèbres killing
fields à l’extérieur de la ville. Les pro-
ches qu’il a dénoncés sous la torture
viennent prendre sa place dans la pri-
son. Les enfants n’y survivent que
quelques jours.
« Regret et chagrin sincère »
Douch vit à deux pas de là. Il a un œil
sur tout, annote les confessions, ordon-
ne les exécutions. Pour le parquet, il
était un bourreau zélé, haut cadre de la
Santebal, la redoutée police politique.
Pour la défense, il n’était au contraire
qu’un exécutant apeuré, « otage autant
qu’acteur d’un régime criminel », qui,
pour protéger sa famille, a suivi les or-
dres de sa hiérarchie.
Douch est un accusé atypique, qui a
toujours reconnu une part de responsa-
bilité. Il n’a opposé aucune résistance
lorsqu’il fut arrêté en 1999, démasqué
par un journaliste. Converti au chris-
tianisme, il vivait alors dans un village
du nord du Cambodge et enseignait
pour une ONG évangélique.
Dès le début du procès, au printemps
2009, il a exprimé son « regret » et son
« chagrin sincère » aux victimes. Mais
coup de théâtre lors du dernier jour
d’audience, il demande l’acquittement.
L’ancien professeur, qui a passé le pro-
cès dans ses notes, pugnace sur chaque
détail, réfléchissait encore hier, tout
comme l’accusation, à déposer un
éventuel appel. La cour s’en passerait
volontiers, pressée d’en venir à son
deuxième dossier, autrement plus
complexe. Si l’ordonnance de renvoi
n’est pas rendue en septembre, elle
sera forcée de libérer le « Frère numéro
deux », Nuon Chea, ancien président
khmer rouge, qui arrive à la limite des
trois ans de détention préventive. Avec
lui, trois autres hauts dirigeants doi-
vent répondre de l’organisation systé-
matique de la mort de 1,7 million de
Cambodgiens, soit un quart de la popu-
lation du pays entre 1975 et 1979.
Le « frère numéro un », Pol Pot, est
mort en 1998 sans être inquiété et le
tribunal, qui ne peut compter sur le
soutien d’un gouvernement mené par
un ancien Khmer rouge, se déchire sur
la question de poursuivre ou non
d’autres suspects. Face à des accusés,
tous octogénaires ou presque, qui se
murent dans le silence, les Cambod-
giens craignent que le temps ne leur
vole une maigre justice. ■
Douch, premier
bourreau khmer rouge
condamné
Reconnu coupable de plus de 12 000 meurtres
dans la prison S21 à Phnom Penh, l’ancien tortionnaire
a été condamné hier à trente-cinq ans de prison.
DATES CLÉS
17 AVRIL 1975
Le mouvement
révolutionnaire des Khmers
rouges prend le pouvoir
au Cambodge. Pol Pot, appuyé
par la Chine, veut construire
une utopie marxiste en
revenant à l’« année zéro ».
7 JANVIER 1979
Les Khmers rouges
sont chassés du pouvoir
par le Vietnam.
Le mouvement s’effondre
au milieu des années 1990.
1997
Le gouvernement cambodgien
demande l’aide de l’ONU pour
juger d’anciens cadres khmers
rouges. Un accord est signé
en 2003 et les Chambres
extraordinaires au sein
des tribunaux cambodgiens
(CETC) sont mises en place
en 2006 à Phnom Penh.
BARACK OBAMA a consenti un nouveau
geste pour rassurer Israël sur sa sécurité.
Les États-Unis vont financer à hauteur
de 100 millions de dollars le développe-
ment d’une nouvelle version d’un systè-
me d’interception de missiles balistiques
surnommé Arrow (la flèche) III.
Ces batteries de missiles antimissiles
destinées à intercepter des engins que
pourrait tirer l’Iran doivent permettre
d’atteindre leur cible à une plus haute alti-
tude et une plus grande distance que le
modèle actuellement déployé par l’armée
israélienne. L’ensemble devrait être opé-
rationnel d’ici deux à trois ans.
Cet investissement américain s’ajoute à
l’aide militaire annuelle des États-Unis de
près de 3 milliards de dollars qui permet à
Israël de financer l’achat d’armes améri-
caines. C’est d’ailleurs ce dossier qui figure
au menu des discussions avec Ehoud Ba-
rak, le ministre de la Défense, en visite à
Washington.
Les Américains font pression sur l’armée
de l’air israélienne pour qu’elle se décide à
être le premier client étranger à comman-
der des F35, une nouvelle génération
d’avions furtifs censés échapper aux ra-
dars. Pour le moment, Ehoud Barak hési-
te. Le coût de chaque appareil pourrait at-
teindre 150 millions de dollars. De plus, les
Américains refusent pour le moment
d’autoriser les Israéliens à introduire leur
propre avionique dans ces appareils hors
de prix.
M. H. (à Jérusalem)
Le geste d’Obama pour rassurer Israël
L’Union européenne veut amener l’Iran à négocier
Téhéran est prêt à discuter, mais sans examen de la nature de son programme nucléaire.
JEAN-JACQUES MÉVEL
CORRESPONDANT À BRUXELLES
SANCTIONS Téhéran perd son fournis-
seur préféré pour les technologies de
pointe : au lendemain d’une décision
unanime à Bruxelles, les Vingt-Sept ap-
pliquent à partir d’aujourd’hui des sanc-
tions inédites contre un secteur énergéti-
que vital pour l’Iran. Avec l’espoir
d’amener Téhéran à discuter enfin de ses
ambitions nucléaires. Ou, à défaut, le
souci de convaincre le reste du monde de
resserrer l’étau avec elle.
L’objectif de cet « arsenal complet »,
comme le décrit Catherine Ashton, est de
réussir d’ici à quelques mois là où toutes
les autres tentatives ont échoué : engager
avec la République islamique une discus-
sion serrée sur ses ambitions nucléaires
militaires. « Il s’agit de trouver une solu-
tion politique, pas d’engager l’escalade »,
insiste Pierre Lellouche, secrétaire d’État
français aux Affaires européennes.
Des deux côtés, une fenêtre diploma-
tique se dessine entre la fin du ramadan,
en septembre, et le début de l’hiver, date
d’un possible et nouveau tour de vis de
l’UE. Effet des sanctions ou simple coïn-
cidence, le chef négociateur iranien, Saïd
Jalili, a déjà accepté ce week-end de ren-
contrer la chef de la diplomatie euro-
péenne, probablement à Istanbul, si l’on
en croit les bons offices de la diplomatie
turque. Bruxelles escomptait hier soir
une confirmation venue de Téhéran. Ca-
therine Ashton, intermédiaire des gran-
des puissances, avait lancé l’invitation
dès le 14 juillet.
Cette convergence sur le lieu et sur le
calendrier ne préfigure en rien une dé-
tente sur le fond. Les six grandes puissan-
ces impliquées (France, Allemagne,
Chine, États-Unis, Grande-Bretagne et
Russie) entendent toujours s’assurer de
« la nature pacifique du programme nu-
cléaire iranien ». Ce qui veut dire qu’elles
sont intimement persuadées du contraire
et que les Occidentaux feront tout pour
empêcher Téhéran de se doter de l’arme
atomique.
Écran de fumée
L’Iran est disposé à discuter, mais pas du
sujet qui intéresse ses interlocuteurs. Ce
week-end, il a proposé de reprendre im-
médiatement les négociations sur un
échange de combustible nucléaire, pro-
posé en mai. Les six puissances persistent
à n’y voir qu’un écran de fumée, et la
continuation d’une diversion « qui dure
depuis des années ».
Un nouveau dialogue de sourds pose-
rait immanquablement la question du
poids politique de l’Europe et de l’effica-
cité de ses sanctions. Comme elle, les
États-Unis et l’Australie - et bientôt le
Canada - ont imposé à Téhéran des sanc-
tions économiques qui vont plus loin que
ce qu’a décidé l’ONU le 9 juin. Mais il ne
s’agit pas d’un embargo, et les risques de
fuites sont manifestes, jusque dans le
groupe des six puissances.
« Plus cela sera hermétique, et plus nous
serons pris au sérieux », disait hier Pierre
Lellouche. Reste à en convaincre la Rus-
sie, longtemps réticente aux sanctions
internationales, la Chine, qui s’est spé-
cialisée dans l’art de les contourner avec
les pays pétroliers, ou encore la Turquie,
qui a déjà claironné qu’elle ne rejoindra
pas l’UE sur ce front. ■
Catherine Ashton espère réussir d’ici
à quelques mois là où toutes les autres
tentatives ont échoué. J. THYS/AFP
Kaing Guek Eav,
alias Douch, 67 ans,
a reconnu son rôle dans
l’organisation de la prison
de Tuol Sleng (S21),
un lycée de la capitale
transformé en centre
de détention. REUTERS
LE FIGARO lundi 27 juin 2011
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Libye : Kadhafi en retrait
des négociations
Alors que les rebelles ont lancé
hier une offensive à 50 km au
sud de Tripoli, le colonel Kadhafi
aurait accepté de ne pas faire
partie des négociations sur la
Libye menées pour mettre un
terme à un conflit qui dure
depuis quatre mois, d’après les
chefs d’État africains médiateurs
dans la crise.
Offensive syrienne
près du Liban
L’armée syrienne a étendu hier
son offensive à Kseir, une
localité proche du Liban,
poussant des centaines de
personnes à se réfugier de l’autre
côté de la frontière, à la veille
d’une réunion inédite d’une
centaine d’opposants à Damas.
Yémen : prochain
retour du président Saleh
Le président Saleh, hospitalisé
en Arabie saoudite depuis le
3 juin, entend revenir
prochainement au Yémen, selon
son entourage. M. Saleh
proposera soit le transfert de ses
pouvoirs au Parlement, soit la
formation d’un gouvernement
de coalition et la tenue d’une
élection présidentielle.
Irak : attentat
en fauteuil roulant
Douze personnes ont été
blessées hier lorsqu’un
kamikaze en fauteuil roulant a
actionné ses explosifs dans un
poste de police près de Bagdad.
Manifestations au Maroc
Des manifestations pacifiques
étaient attendues hier dans les
grandes villes du Maroc pour
protester contre un projet de
révision constitutionnelle
soumis à référendum le
1er juillet.
E N B R E F
ISABELLE ROUGHOL
ASIE DU SUD-EST Une question revient
comme un leitmotiv au Cambodge lors-
que la conversation s’arrête, inexora-
blement, sur le sujet de l’horreur Khmer
rouge : « Pourquoi des Khmers ont-ils tué
d’autres Khmers ? » C’est à cette inter-
rogation de tout un pays, sur ce génocide
qui a vu 2 millions de Cambodgiens tués
par d’autres Cambodgiens, que doivent
répondre les Chambres extraordinaires
au sein des tribunaux cambodgiens, qui
ouvrent aujourd’hui leur second
procès à Phnom-Penh.
Face aux juges comparais-
sent ce matin les quatre plus
hauts dignitaires survivants
du régime, après la mort de
Pol Pot en 1998 : Khieu
Samphan, ancien chef
d’État du Kampuchéa dé-
mocratique (défendu par Jac-
ques Vergès) ; Nuon Chea,
« Frère numéro 2 », adjoint de Pol
Pot, souvent présenté comme l’idéolo-
gue du Parti communiste ; Ieng Sary,
alors ministre des Affaires étrangères ;
et son épouse, Ieng Thirith, ministre des
Affaires sociales. Tous sont accusés de
crimes contre l’humanité, génocide et
crimes de guerre, perpétrés entre 1975
et 1979, lorsqu’ils étaient à la tête du ré-
gime marxiste qui a éliminé, par la fa-
mine, les travaux forcés et les exécu-
tions, un quart de la population du pays.
L’audience préliminaire qui débute
aujourd’hui n’abordera que des ques-
tions de procédure ; il faudra attendre
l’automne pour toucher au fond du dos-
sier.
Un dossier compliqué. « On dit sou-
vent ici que c’est le plus gros procès crimi-
nel depuis Nuremberg », note Anne
Heindl, juriste du Centre de documenta-
tion du Cambodge, qui maintient des ar-
chives sur la période et a versé plus d’un
million de pages au dossier. Alors que le
premier procès, celui du directeur de la
prison S21, Douch, ne concernait qu’une
seule personne et un seul centre de tor-
ture (le verdict de son appel est attendu
en juillet), le second doit examiner des
crimes dans l’ensemble du pays et dé-
cortiquer toute l’organisation du régime
meurtrier. Le parquet doit déterminer
des responsabilités individuelles
dans un système politique
complexe dont toutes les
décisions étaient prises au
nom de l’« Angkar »
(l’Organisation), sinistre
décideur sans visage du
sort de chaque Cambod-
gien. Et ce plus de trente
ans après les faits, alors que
les accusés se murent dans le
silence et que le gouvernement,
dont plusieurs anciens Khmers rouges
sont membres, dit tout haut son espoir
de voir le tribunal échouer.
« Atmosphère toxique »
La cour elle-même est divisée : des dé-
saccords entre magistrats sur la poursui-
te d’autres suspects ont conduit à au
moins six démissions. Dernier en date,
Stephen Heder, l’un des historiens les
plus réputés de la période, a claqué la
porte il y a deux semaines, dénonçant
des enquêtes bâclées et une « atmosphè-
re toxique ». « Si ce dossier est bien mené,
cela pourrait racheter le tribunal », espè-
re Anne Heindl. La mission du tribunal
spécial est aussi, selon ses statuts, de
montrer à quoi ressemble une justice ef-
ficace, dans un Cambodge où l’institu-
tion est considérée comme la plus cor-
rompue.
Quoi qu’il en soit, ce procès sera le
plus emblématique et le plus représenta-
tif de l’histoire personnelle de chaque
Cambodgien. Il aborde les dénoncia-
tions, les tortures et les exécutions ; les
camps de travail où l’on creusait des ca-
naux jusqu’à ce que mort s’en suive ; la
famine et la pseudo-médecine tradi-
tionnelle, qui tuait plus souvent qu’elle
ne guérissait ; les déplacements de po-
pulations et les séparations des familles.
« Ils ont emmené mon père sous mes yeux
et je n’avais pas le droit de pleurer », se
souvient Navy Soth, une fillette alors.
Cinq membres de sa famille immédiate
ont été tués ; les survivants se sont ins-
tallés en France dans les années 1980.
Aujourd’hui, elle est partie civile au pro-
cès de ses bourreaux. « Tout ce qu’on de-
mande, c’est la vérité. Le nombre d’an-
nées en prison, cela ne veut rien dire »,
estime-t-elle. Mais elle sait qu’elle ne
doit pas trop espérer des quatre accusés,
tous octogénaires et apparemment déci-
dés à utiliser chaque voie possible pour
faire durer la procédure. « On est là, en-
tre les Khmers rouges et les morts, à se
battre. Mais je n’attends pas grand-cho-
se. » ■
Deux
survivants
du génocide
se recueillent
devant
l’ossuaire de
Choeung Ek,
dans
les faubourgs
de Phnom-
Penh.
PRING/REUTER
Le second procès des Khmers
rouges s’ouvre à Phnom-Penh
Les quatre plus hauts dignitaires survivants
du régime doivent répondre de la mort
de deux millions de Cambodgiens.
2000personnes
se sont portées partie
civile à ce procès
mardi 23 novembre 2010 LE FIGARO
C
8 international
EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DE LA COUR D’APPEL DE VERSAILLES
Par arrêt en date du 18 avril 2008, de la 9ème
Chambre de la Cour d’appel de Versailles, Mme
COHEN épouse HAIUN Monique, née le 15/01/1957 à VICHY (03) demeurant 78 avenue
Foch à PARIS (75116) a été condamnée à 8 mois d’emprisonnement avec sursis et à une amende
délictuelle de 37.500 €, aux peines complémentaires d’affichage et de publication dans le quo-
tidien LE FIGARO pour avoir à BOULOGNE BILLANCOURT et sur le territoire national
courant 2001 et 2002, frauduleusement et volontairement soustrait la société EDIFIM, dont
elle était la gérante, à l’établissement et au paiement partiel de la TVA exigible au titre de la
période du 01/01 au 31/12/2001, par minoration des déclarations mensuelles, les dissimulations
excédant le 1/10ème
de la somme imposable ou le montant de 153 €, faits prévus et réprimés par
les articles 1741 et 1750 du Code Général des Impôts.
VU AU PARQUET GENERAL - P/LE PROCUREUR GENERAL
POUR EXTRAIT CERTIFIE CONFORME, LE GREFFIER EN CHEF
EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE
DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS
Par jugement contradictoire, rendu par le TRIBUNAL CORRECTIONNEL 11EME CHAM-
BRE/1, le 31 mars 2009. Jugement sur citation Directe devant le Tribunal Correctionnel. Isa-
belle, Blanche, Louise PERUCCA épouse HUBERT, née le 01 mars 1953 à VERT (78) de Rol-
land PERUCCA et de Liliane PICARD, de nationalité française, Président Directeur Général,
demeurant 28, rue des Prévanches 27120 LE PLESSIS HEBERT, libre, a été condamnée à : une
Emprisonnement délictuel - 6 mois avec sursis simple total. Ordonne la publication du présent
jugement, par extrait dans le JOURNAL OFFICIEL, ainsi que dans le quoditien LE FIGARO et
l’AFFICHAGE, également par extrait pendant 3 mois, sur les panneaux réservés à l’affichage
des publications officielles à la mairie de la commune où la contribuable a son domicile, le tout
aux frais de la condamnée. Infraction : SOUSTRACTION FRAUDULEUSE A L’ETABLISSE-
MENT OU AU PAIEMENT DE L’IMPOT par DISSIMULATION DE SOMEMS - FRAUDE
FISCALE - courant 2005 et 2006, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, à
Paris et sur le territoire national, faits prévus par ART. 1741 AL.1, AL.2 C.G.I. et réprimés par
ART. 1741 AL.1, AL.3, AL.4, ART.1750 AL.1 C.G.I., ART.50§I LOI 52-401 DU 14/04/1952.
Pour extrait conforme n’y ayant appel. Pour le Greffier en chef.
PUBLICATIONS JUDICIAIRES
01.49.04.01.85 - annonces@osp.fr
Nouveau coup dur
pour Silvio Berlusconi
Mara Carfagna, ministre italienne
de l’Égalité des chances,
a annoncé qu’elle démissionnera
au lendemain du vote
de confiance au Parlement,
le 14 décembre, et quittera
le PDL, le parti de Berlusconi,
livré désormais, selon elle,
aux rivalités claniques.
Un officier du FSB tué
dans le Caucase russe
Un officier des services spéciaux
russes (FSB) est mort après
l’explosion de sa voiture
au Daguestan, et un policier
a été tué en Kabardino-Balkarie,
deux républiques du Caucase
russe, une région minée
par une rébellion.
E N B R E F
Benoît XVI envisage
l’hypothèse
d’une démission
Benoît XVI n’hésitera pas à
démissionner, ce qu’aucun Pape
n’a fait depuis sept cents ans, s’il
est dans l’incapacité « physique,
psychologique ou spirituelle »
d’accomplir les tâches de sa
fonction. Le souverain pontife,
qui est âgé de 83 ans, le déclare
sans détour dans le livre
d’entretiens qui paraît
aujourd’hui. Les responsables
du Vatican n’aiment guère
aborder cette hypothèse
qui pose de complexes
problèmes doctrinaux.
Z O O M
TANGUY BERTHEMET
JUSTICE INTERNATIONALE Jean-Pierre
Bemba est devant ses juges. Depuis hier,
l’ancien chef du Mouvement de libéra-
tion du Congo (MLC), une milice congo-
laise, doit répondre de crimes de guerre
et crimes contre l’humanité devant la
Cour pénale internationale (CPI) à
La Haye. Pour ses victimes, nombreuses,
c’est déjà une victoire inattendue après
des années d’impunité. Car l’histoire de
Jean-Pierre Bemba, 48 ans, est étroite-
ment mêlée à celle de l’Afrique centrale
au tournant des années 2000. Entre 1994
et 2003, les guerres civiles, les massacres
et les tueries se sont enchaînés au Congo,
au Rwanda et en Centrafrique, faisant
plus de trois millions de morts.
Le procès qui s’ouvre et qui devrait
durer plusieurs mois est fondamental
pour la CPI. La cour joue une partie de sa
crédibilité sur cette procédure. Trois
autres chefs de guerre congolais sont
certes déjà poursuivis à La Haye. Mais
leurs rôles comme leurs personnalités
sont mineurs dans le drame qu’a connu
la région.
Viols, meurtres et pillages
Pour les services du procureur de la CPI,
la tâche ne s’annonce pas simple. Déjà
les critiques fusent. La première est que
Jean-Pierre Bemba n’est pas jugé pour
des crimes commis dans ses fiefs congo-
lais, mais pour ses actions supposées
dans un pays voisin, la Centrafrique. Fin
2002, les miliciens du MLC étaient entrés
à Bangui pour porter secours au prési-
dent centrafricain d’alors, Ange-Félix
Patassé, en butte à un coup d’État. Les
troupes du MLC auraient commis des
centaines de viols, de meurtres ainsi que
des pillages. D’aucuns s’étonnent que les
autres crimes du MLC, notamment ceux
commis à la même époque en Ituri, dans
l’est du Congo, ne soient pas eux aussi
jugés. On avait recensé alors des centai-
nes de morts et des cas de cannibalisme
contre des Pygmées.
La seconde question porte sur le
temps mis à lancer des mandats d’arrêt
contre Jean-Pierre Bemba. Alors que les
faits remontent à 2003, il n’a été arrêté
qu’en 2008. Entre-temps, Bemba, alors
au sommet de sa puissance, fut tran-
quillement candidat à la présidentielle
de 2006 au Congo. Durement battu lors
du scrutin par Joseph Kabila, il s’était
exilé au Portugal en 2007 puis à Bruxel-
les, où il fut interpellé. Pour les avocats
du prévenu, cette chronologie est le si-
gne que ce procès est politique :
« Aurait-on jugé Bemba s’il avait été élu
président ? »
La troisième interrogation est suscitée
par l’absence d’Ange-Félix Patassé du
banc des accusés. Une décision du pro-
cureur, l’Argentin Luis Moreno-Ocam-
po, qui assure manquer de preuves pour
conduire une telle accusation. Ces criti-
ques devraient revenir tout au long des
débats. Hier, Luis Moreno-Ocampo les a
balayées, affirmant que « Jean-Pierre
Bemba a sciemment permis aux 1 500
hommes qu’il commandait de commettre
des centaines de viols, des centaines de
pillages ». Jean-Pierre Bemba a décidé
de plaider non-coupable. ■
Jean-Pierre Bemba, hier, devant la Cour
pénale internationale (CPI) à La Haye. AP
La CPI joue son crédit sur le procès de Jean-Pierre Bemba
L’ancien vice-président du Congo et chef d’une milice doit répondre à La Haye de crimes de guerre et contre l’humanité.
PATRICK SAINT-PAUL
CORRESPONDANT À BERLIN
ALLEMAGNE Six siècles après la condam-
nationàmortdeKlausStörtebeker,lecélè-
bre « Corsaire rouge » décapité avec ses
71 compagnons, Hambourg a entamé, hier,
le procès de dix pirates somaliens. Murés
dans le silence, les accusés ignorent pro-
bablementlesortqueréservaitlacitéhan-
séatique à leurs illustres prédécesseurs,
dont la tête coupée était exposée près du
port. La tradition s’est interrompue il y a
quatre cents ans. En dépit des « preuves
accablantes » citées par l’accusation, les
Somaliens jugés pour l’attaque du cargo
allemand MS Taipan en avril au large de la
Corne de l’Afrique encourent au maxi-
mumquinzeouvingtansderéclusion.
Arrêtés par la marine néerlandaise
avant d’être transférés en Allemagne en
juin, les dix accusés répondent d’attaque
contre le trafic maritime et de tentative de
rapt en vue d’obtenir une rançon. Ils
avaient donné l’assaut au porte-conte-
neurs allemand à 900 km à l’est des côtes
somaliennes. Mais les inculpés n’avaient
pu mettre la main sur les quinze membres
d’équipage, qui s’étaient réfugiés dans un
espace sécurisé dans les cales du navire.
Avant de prendre la fuite, le capitaine
avait lancé un appel au secours à un bâti-
ment néerlandais de la force européenne
antipiraterie Atalante. Trois heures et de-
mie plus tard, la frégate Tromp de la mari-
ne néerlandaise avait donné l’assaut et un
militaire néerlandais avait été légèrement
blessé dans des échanges de coups de feu.
Une vidéo de l’opération, deux lance-ro-
quettes et cinq fusils d’assaut Kalachnikov
saisis aux pirates figurent parmi les preu-
ves. Pour le porte-parole du tribunal de
Hambourg, Conrad Müller-Horn, leur
condamnation ne fait aucun doute. « Ils
doivent s’attendre à des peines de cinq ans
au minimum », estime-t-il. Cela n’arrête-
raprobablementpaslespiratessomaliens,
qui opèrent de plus en plus loin des côtes
pour échapper aux navires de la mission
Atalante. Leur butin est estimé à 100 mil-
lions d’euros par an. Selon le Bureau in-
ternational maritime, 23 navires et plus de
500 membres d’équipage sont actuelle-
ment détenus par des pirates somaliens.
Le nom et l’âge des accusés
La défense a expliqué que les actes de pi-
raterie sont la conséquence des troubles
en Somalie et de la surpêche pratiquée
par les Occidentaux dans la région. La pi-
raterie « ne peut être résolue que par une
solution politique, ont estimé hier les avo-
cats. Un jugement de cette cour n’aura
aucune influence sur la piraterie dans
l’océan Indien. » Les accusés, dont la plu-
part portent une casquette de base-ball et
des vêtements de sport, suivent avec dé-
contraction les débats, traduits par trois
interprètes. La lecture des noms a, à elle
seule, duré près de quarante-cinq minu-
tes, juges, interprètes et accusés cher-
chant à s’accorder sur une orthographe
et une prononciation commune. Les
échanges les plus vifs ont porté sur l’âge
des accusés, l’un d’entre eux affirmant
avoir 13 ans. L’âge légal pour être jugé en
Allemagne est de 14 ans. Cependant, les
experts médicaux estiment que l’accusé
en question a plus de 18 ans.
Le procès doit se poursuivre jusqu’en
janvier. L’un des pirates a déjà déposé
une demande d’asile politique en Alle-
magne. Loin de la chaleur moite du golfe
d’Aden, les pirates disent n’avoir « peur
que d’une chose, a expliqué l’un des avo-
cats, l’hiver allemand ». ■
Les dix
pirates, jugés
depuis hier
à Hambourg,
encourent
au maximum
quinze ou
vingt ans
de réclusion.
AP, AFP
Hambourg juge dix pirates
somaliens
C’est la première affaire
de piraterie devant une cour
allemande en quatre siècles.
Notre blog Allemagne
HTTP://BLOG.LEFIGARO.FR/BERLIN/
Le cargo
allemand
MS Taipan,
en avril
dernier lors
de l’assaut
donné par
la marine
néerlandaise
contre
les pirates
somaliens.
AP
345 morts dans une bousculade tragique à Phnom Penh
La capitale cambodgienne vit son pire drame en plus de trente ans. Le premier ministre a déclaré le deuil national.
ISABELLE ROUGHOL
CAMBODGE Au lieu de célébrations au
dernier soir de la traditionnelle Fête de
l’eau, les habitants de Phnom Penh ont
connu hier soir « la plus grande tragé-
die au Cambodge depuis la fin du régime
de Pol Pot », pour reprendre les mots
du premier ministre, Hun Sen, quand
un mouvement de panique a saisi la
foule des festivaliers sur un pont de la
capitale. La bousculade a fait au moins
345 morts, selon un bilan officiel enco-
re provisoire, et des centaines de bles-
son des pluies et l’inversement du
cours de la rivière Tonlé Sap. Le roi
préside à des joutes dans lesquelles
s’affrontent les meilleurs bateliers du
pays. La population de la capitale fait
plus que doubler et deux à trois mil-
lions de personnes s’amassent sur les
quais du centre de la ville, où l’on peut
voir se rejoindre les quatre bras du
Mékong. Les infrastructures et les ser-
vices d’ordre de la ville, déjà insuffi-
sants en temps normal, sont alors sub-
mergés… ■
(Avec AFP et Reuters)
n’était pas stable. « Cela a déclenché un
mouvement de panique. Il y avait trop de
monde et les gens n’avaient nulle part où
s’échapper », a indiqué le ministre de
l’Information, Khieu Kanharith. Le
premier ministre, s’adressant à la po-
pulation à la télévision dans la nuit, a
promis une enquête et présenté ses ex-
cuses. Il a déclaré une journée de deuil
national pour jeudi.
La tragédie était presque inscrite.
Chaque année, les provinciaux se ruent
vers Phnom Penh pour trois jours de
festivités, qui célèbrent la fin de la sai-
sés. Les victimes, des femmes surtout
et de nombreux jeunes, sont mortes
piétinées par la foule. Beaucoup ont
tenté d’échapper à la mort en se jetant
dans la rivière en contrebas. Le nom-
bre de morts pourrait encore augmen-
ter, alors que les hôpitaux étaient hier
dépassés par l’afflux de blessés.
Le drame a eu lieu sur le pont qui
relie Phnom Penh à l’île de Koh Pich,
où se tenait un concert. « Nous étions
en train de traverser le pont vers Koh
Pich lorsque les gens ont commencé à
pousser de l’autre côté. Il y avait beau-
coup de cris et de panique », a déclaré
à l’AFP Kruon Hay, 23 ans, qui se
trouvait encore sur les lieux. « Les
gens ont commencé à courir et ils tom-
baient les uns sur les autres. Je suis
tombé moi aussi. Je n’ai survécu que
parce que d’autres personnes m’ont re-
levé », a-t-il dit.
Deux à trois millions
de festivaliers
Les causes de la bousculade étaient en-
core floues hier soir : une rumeur se
serait répandue selon laquelle le pont

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  • 1. vendredi 21 octobre 2011 LE FIGARO C ISABELLE ROUGHOL L’ÉPOPÉE sanglante de Mouammar Kad- hafi s’est achevée hier pas très loin de l’endroit où, selon la légende qu’il s’était forgée, le Guide était né sous une tente dans le désert de Syrte, il y a 69 ans. C’est au moment où les forces du Conseil natio- nal de transition (CNT) parvenaient à dé- loger les derniers combattants fidèles à l’ancien régime de leur bas- tion du centre-ville que le di- rigeant déchu a succombé. Aucun ordre de tuer le colonel n’avait été donné, ont assuré les responsables du CNT dans une conférence de presse, tard hier soir. « Quand il a été retrouvé, il était en bonne santé et portait une arme », a décla- ré Mahmoud Jibril, le chef du nouvel exé- cutif libyen. Il aurait été capturé sortant d’une conduite d’évacuation où il s’était réfugié, puis a ensuite été dirigé vers un pick-up. « Quand le véhicule a démarré, il a été pris dans un échange de tirs entre des combattantspro-Kadhafietdesrévolution- naires, et il a été tué d’une balle dans la tête. » Il serait mort à l’hôpital. Et Mah- moud Jibril d’ajouter : « le médecin légiste ne peut dire si la balle venait des révolution- naires ou des forces de Kadhafi ». Uneversionquinerépondpastoutàfait aux questions que posent les images tour- nant en boucle sur les chaînes de télévi- sion arabes. La vidéo filmée avec un télé- phone portable montre Kadhafi ensanglanté, encore vivant, bousculé par des civils et des hommes en treillis. Les di- rigeants n’ont pas commenté ces images. L’un de ses fils, Moatassem, ainsi que l’ex-ministre de la Défense, Aboubakr Younès Jaber, ont subi le même sort. Un convoi transportant le troisième fils du dictateur, Seïf el-Islam, qui fuyait Syrte, était encerclé hier en fin de journée par les forces du CNT. Les dirigeants n’ont pas su dire s’il avait été capturé ou tué. Selon des photographes de l’AFP, les corps du raïs et de son fils Moatassem ont été transpor- tés hier après-midi à Misrata, autre ville conquise par les rebel- les au prix de très rudes combats, et déposé dans une maison où se pressaient les badauds. Les auto- rités envisageraient un enterre- ment rapide et dans un lieu secret. La mort du colonel Kadhafi a été saluée par le président américan dans une courte allocution télévisée. Évoquant « la fin d’un chapitre long et douloureux », il a estimé que cette mort prouvait que les « régimes à poigne » de la région sont voués à l’échec. Alain Juppé a, lui, salué la « fin de quarante-deux ans de tyrannie » en Libye et souligné que la France était « fière » d’avoir aidé le peuple libyen. Selon le mi- nistre de la Défense Gérard Longuet, c’est en effet une frappe française qui a stoppé le convoi de Mouammar Kadhafi fuyant Syrte, avant que les forces libyennes ne l’interceptent à terre. À Bruxelles, l’Al- liance atlantique a bien confirmé hier que son aviation était entrée en action dans le secteur, sans donner plus de précision. Prêt à mourir les armes à la main La dernière apparition publique de Mouammar Kadhafi remontait au 12 juin, deux mois avant la chute de Tri- poli. Par la suite, le Guide s’est exprimé à quelques reprises à la radio et dans des communiqués vindicatifs. Des rumeurs l’ont, un temps, dit réfugié à l’étranger, en Tunisie, en Algérie, en Afrique du Sud ou en Guinée équatoriale. Mouammar Kadhafi, lui, répétait qu’il ne quitterait pas le pays et qu’il était prêt à mourir les armes à la main. Pour une fois, il a sans doute dit vrai. Les services de renseignements occi- dentaux étaient persuadés que le Guide n’avait pas quitté le pays. L’acharne- ment des rebelles à prendre Syrte, au- delà de son importance symbolique, vi- sait aussi à supprimer l’une des derniè- res bases de repli dont pouvait disposer l’ex-dirigeant libyen. En atteignant ce double objectif, l’insurrection parachè- ve sa victoire militaire. Le chef de l’exé- cutif du CNT, Mahmoud Jibril, a annon- cé que la « libération totale » de la Libye serait proclamée samedi. Une autre page de l’histoire du pays s’ouvrira alors, cel- le des combats politiques qui pourraient être aussi âpres qu’une guerre. ■ Le premier cliché de l’ex-dirigeant libyen blessé pris par un rebelle avec son téléphone portable. Des images de la chaîne al-Jezira le montre encore vivant, violemment pris à partie par des combattants. PHILIPPE DESMAZE/AFP L’un des fils de l’ex-dirigeant, Moatassem, a également été tué et un deuxième, Seïf el-Islam, était encerclé par les insurgés. ISABELLE LASSERRE C’EST Silvio Berlusconi, le chef du gou- vernement italien, qui l’a affirmé le pre- mier : « La guerre est finie. » « Sic transit gloria mundi », « Ainsi passe la gloire du monde »,aajoutéceluiquifut,enEurope, l’un des principaux alliés de Kadhafi. La disparition du Guide libyen signe la fin de la partie pour l’Otan, qui avait été autori- sée à intervenir militairement par les Na- tions unies le 17 mars, avant de prendre le contrôle des opérations le 31. Avec une mission : protéger les populations civiles desattaquesdurégimelibyen. Tout en baissant la voilure, l’Otan avait poursuivi ses opérations militaires depuis la chute de Tripoli en août der- nier. Après avoir pendant quatre mois dégagé la voie aux combattants libyens, armé et entraîné les rebelles, les pays de l’Alliance ont continué leurs bombarde- ments sporadiques près des bastions du régime et mis leurs moyens de rensei- gnements et de reconnaissance au servi- ce de la traque de Kadhafi. Bombardements sporadiques Volontiers passé sous silence au début de la guerre, le départ, et l’arrestation, du leader libyen est vite devenu l’un des buts de guerre des leaders occidentaux et arabes. Mercredi, le Conseil des am- bassadeurs avait d’ailleurs décidé, sous l’influence de la France et de la Grande- Bretagne, les deux pays leaders de l’in- tervention, de maintenir le dispositif tant que persistaient des « menaces sur la population ». Un grand flou entourait encore hier soir les circonstances de la mort du raïs déchu. Selon le Conseil national de tran- sition libyen, il a reçu une balle dans la tête lors d’un échange de tir après sa capture. Un raid aérien mené par l’Otan aurait empêché sa fuite. À Bruxelles, l’Alliance a confirmé que ses avions avaient frappé vers 8 h 30, hier matin, deux véhicules des forces pro-Kadhafi dans la région de Syrte. Et selon le mi- nistre français de la Défense, c’est une attaque de l’aviation française qui a stoppé le convoi : une colonne de 80 vé- hicules qui tentaient de quitter Syrte. Un drone américain aurait également parti- cipé à l’attaque. À Paris, à Bruxelles et à Londres, res- ponsables politiques et militaires n’avaient pas attendu la capture de l’an- cien leader libyen pour tirer un bilan, positif, de cette intervention militaire menée par les Européens et soutenue par les pays arabes de la région. Depuis le 31 mars, les avions de l’Otan ont réalisé 26 089 sorties, dont 9 618dites « offensi- ves ». Avec un bilan quasiment nul en dégâts collatéraux. Dans les états-ma- jors des grands pays ayant participé à la mission, l’opération libyenne est consi- dérée comme une réussite, voire même comme un modèle d’intervention mili- taire pour le futur. Le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen a es- timé que l’Alliance avait « rempli avec succès le mandat historique confié par les Nations unies ». Le Conseil de l’Atlanti- que nord devrait se réunir aujourd’hui pour décider de la fin des opérations. Davantage politique, la nouvelle étape qui s’est ouverte depuis hier en Libye risque d’être plus délicate. En renonçant à envoyer des troupes au sol, les pays de l’Otan ont évité à la fois l’impopularité politique et le risque d’enlisement mili- taire. Mais ils se sont aussi privés d’un moyen d’influence sur les forces locales. Or la rébellion, armée par l’Alliance, est divisée et traversée par des courants is- lamistes. ■ TANGUY BERTHEMET ENVOYÉ SPÉCIAL À SYRTE SYRTE est finalement tombée, de guer- re lasse. Hier, au petit matin, les révo- lutionnaires ont enfoncé les ultimes li- gnes des kadhafistes, mettant fin à leur résistance que tous trouvaient curieu- sement obstinée. L’explication de cette motivation hors du commun est venue avec l’annonce de l’élimination de Mouammar Kadhafi non loin de sa ville natale en ruines. Un mois de combats a détruit la cité que Kadhafi rêvait en modèle, la transformant en ville fantô- me. Dans les rues défoncées et désertes, les gros tout-terrain des thuwars, les révolutionnaires, continuent de tour- ner, leurs mitrailleuses lourdes pointées sur les façades noircies et creusées d’impacts de tous calibres. L’est de Syrte était aux mains des re- belles depuis plusieurs jours, mais les snipers, cachés dans les appartements ou sur les toits, continuaient de semer la mort. Depuis une semaine, Abdallah et ses cinq hommes ont traqué ces combattants. « On cherche à les débus- quer, mais c’est très dur. Ils bougent sans arrêt, profitent de la nuit pour changer de quartier. Ils ne se rendront pas. Ils préfèrent mourir les armes à la main, car ils savent que la corde les at- tend », expliquait-il, sourire au coin des lèvres. La plus dure des batailles Le scénario est à chaque fois le même. Dès que la patrouille entend parler d’un tir, elle se précipite et investit la maison ou l’immeuble suspect. La fouille à tra- vers les pièces ravagées par les pillards est rapide. Et le plus souvent vaine. La faute en revient à la désorganisation de cette nouvelle armée qui, malgré les victoires, reste une bande de civils en armes. Personne ou presque ne signale la présence des tireurs embusqués, pré- férant confier sa vie à la grâce de Dieu. Il faudra sans doute encore quelques jours pour que Syrte soit totalement sûre. Et des mois pour que les habitants y reviennent. La ville n’a plus ni eau, ni électricité. La plupart des logements sont inhabitables. Les boutiques, ri- deaux de fer arrachés, sont béantes. Avec Misrata, la bataille de Syrte res- tera comme la plus dure cette guerre. Mais peu de Libyens pleurent le destin de cette ville honnie que la rumeur avait parée de tous les luxes dont le res- te du pays était privé. Aux abords de ce qui était, hier matin encore, le front en- tourant le dernier carré de kadhafistes reclus depuis quatre jours sur moins d’un kilomètre carré, les thuwars mau- dissaient les lieux, se faisant prudents. Beaucoup sont morts pour prendre ce dernier bastion. À l’angle de Dubaï Street et de Cairo Street, le paysage donne une idée de l’ampleur des combats. Les bâtiments, réduits à l’état de masse grisâtre, sem- blent sur le point de s’effondrer. L’ave- nue n’est plus qu’un tas de décombres. « Trop de combattants sont tombés en martyrs pour ça », confie Mahin, un re- belle épuisé par les assauts successifs, priant pour que les avions de l’Otan viennent « finir le travail ». Les rares civils qui, ces derniers jours, sortaient encore, vivants mais at- terrés, étaient regardés avec une extrê- me suspicion. Les voitures étaient fouillées, les hommes sévèrement in- terrogés. « On redoute que des kadhafis- tes tentent de fuir avec des familles », explique Mahin. Sans l’avouer, c’est Moatassem Kadhafi, le troisième fils du Guide, censé être à Syrte à la tête des troupes fidèles à l’ancien régime, qu’ils traquent. Jamais les thuwars n’auraient imaginé Kadhafi lui-même si près d’eux. Six mille hommes pour encercler la ville La mort du Guide est arrivée comme une surprise totale. « C’est Moatassem qui est en ville. Kadhafi lui-même ne peut pas être là. Il n’est pas assez bête pour s’enfermer ici », expliquait encore mar- di Salah al-Jabu, l’un des responsables militaires de la révolution pour Syrte. Mais pour les combattants, son élimi- nation sonne comme un soulagement. Longtemps la victoire de Syrte est apparue amère. L’offensive sur la ville, dernière cité encore fidèle à l’ancien régime, ne fut pas la guerre éclair dont ils avaient rêvé, le triomphe facile. Il aura fallu plus d’un mois de siège pour circonscrire les jusqu’au-boutistes pro- tégeant Mouammar Kadhafi. Selon Ra- madan Zarmar, chef du conseil militai- re de Misrata, 6 000 thuwars ont été mobilisés autour de la ville, venus tant de Misrata que de Benghazi. Le bilan des combats sera difficile à établir, mais il s’élève au moins à 300 tués et plus de 1000 blessés. « Allah u Akbar !, s’exclame un civil dansant autour de sa voiture. Nous avi- ons peur qu’avec tout son argent Kadhafi parvienne à relancer la guerre. Qu’il coupe l’eau des villes, qu’il sabote les puits de pétrole. Cette fois c’est fini, les martyrs ne sont pas morts en vain. » ■ Sa mort est arrivée comme une surprise totale. Les combattants voient son élimination comme un soulagement Des soldats fêtent la libération de la ville de Syrte, hier. Il aura fallu plus d’un mois de siège pour circonscrire les jusqu’au-boutistes protégeant Kadhafi. AL-FETORI/REUTERS 44jours depuis le dernier message radiodiffusé de Kadhafi 2 international Vidéo : la chute de Syrte et la mort de Kadhafi www.lefigaro.fr/international «Une nouvelle Libye, un monde arabe à reconstruire» L’ÉDITORIAL DE PIERRE ROUSSELIN PAGE UNE
  • 2. mardi 27 juillet 2010 LE FIGARO C 6 international P a r t e n a i r e s d e l a 4 1 è m e é d i t i o n d e L a S o l i t a i r e Attentat contre la chaîne al-Arabiya à Bagdad Un attentat contre les bureaux de la populaire chaîne de télévision arabe al-Arabiya a fait six morts hier, à Bagdad. Deux autres attentats, à Kerbala, ont tué 21 policiers et pèlerins, rassemblés en vue de célébrations chiites. Yémen : 70 soldats capturés Les rebelles chiites du Yémen ont conquis hier une position militaire stratégique et capturé 70 soldats dans le nord du pays. Iran : disparition de l’avocat d’une condamnée à mort L’avocat qui défendait une femme condamnée à mort par lapidation était porté disparu hier alors que les autorités iraniennes ont émis un mandat d’arrêt contre lui. Huit morts dans un attentat au Pakistan Un attentat suicide, revendiqué par les talibans, a fait au moins 8 morts et 20 blessés hier devant le domicile d’un ministre provincial dans le nord-ouest du Pakistan. Chavez menace de geler les exportations de pétrole aux États-Unis Le président vénézuélien, Hugo Chavez, a menacé de suspendre les exportations de pétrole vers les États-Unis si Washington soutenait une attaque de la Colombie contre son pays. E N B R E F ISABELLE ROUGHOL CAMBODGE Le tribunal international pour les Khmers rouges, a rendu, hier à Phnom Penh, son premier verdict, condamnant à trente-cinq années de prison Kaing Guek Eav, alias Douch, l’ancien directeur du terrible centre de détention S21. Reconnu coupable de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre pour la tor- ture et le meurtre d’au moins 12 372 person- nes, il ne purgera que dix-neuf ans, après dé- duction de onze années d’une détention pré- ventive jugée à peine légale et de cinq autres années en violation de ses droits. L’homme de 67 ans pourrait donc sortir vivant de prison. Comme la loi cambod- gienne autorise une li- bération pour bonne conduite aux deux tiers de la peine, il pourrait même sortir avant son 80e anniversaire, re- marque la juriste Anne Heindel, du Centre de documentation du Cambodge. La sentence est « tout à fait dans les clous de la justice inter- nationale », note Hea- ther Ryan, qui a suivi tout le procès pour l’ONG Open Society Justice Initiative, mais c’est une conclusion difficile à accepter pour les parties civiles, qui rêvaient de perpé- tuité, ou au moins des quarante années effectives de détention requises par le parquet. « C’est systématique avec ce tribunal : il crée des attentes et ne les sa- tisfait pas », commente Anne Heindel. Torture et exécutions Après avoir renversé en 1975 la jeune république cambodgienne, les Khmers rouges tentent d’établir une société agraire utopiste. Le pays se ferme à l’exté- rieur, les villes sont vi- dées, les intellectuels pourchassés, et la po- pulation soumise aux travaux forcés. En cette année Zéro, Douch est un jeune professeur de mathématiques. Effica- ce et consciencieux, il a déjà dirigé un centre de détention et d’« inter- rogation » dans le ma- quis communiste et prend logiquement la tête de S21, un ancien lycée de la capitale de- venu prison pour des ennemis politiques, réels ou imaginés, et leurs familles. S21, la prison de Tuol Sleng, offre un témoi- gnage unique de la cruauté du régime : les tortures et les déten- tions étaient systémati- quement répertoriées et les détenus photogra- phiés. À la libération en 1979, les tor- tionnaires n’ont pas eu le temps de dé- truire les archives, qui alimentent aujourd’hui un musée des horreurs dans l’ancienne prison. Et le dossier de l’accusation. L’objectif des geôliers est d’obtenir une « confession » écrite de chaque détenu par tous les moyens : électrocu- tion, bastonnade, simulation de noya- de… Quand le prisonnier a tout dit, il est abattu d’un coup tiré sur la nuque dans les tristement célèbres killing fields à l’extérieur de la ville. Les pro- ches qu’il a dénoncés sous la torture viennent prendre sa place dans la pri- son. Les enfants n’y survivent que quelques jours. « Regret et chagrin sincère » Douch vit à deux pas de là. Il a un œil sur tout, annote les confessions, ordon- ne les exécutions. Pour le parquet, il était un bourreau zélé, haut cadre de la Santebal, la redoutée police politique. Pour la défense, il n’était au contraire qu’un exécutant apeuré, « otage autant qu’acteur d’un régime criminel », qui, pour protéger sa famille, a suivi les or- dres de sa hiérarchie. Douch est un accusé atypique, qui a toujours reconnu une part de responsa- bilité. Il n’a opposé aucune résistance lorsqu’il fut arrêté en 1999, démasqué par un journaliste. Converti au chris- tianisme, il vivait alors dans un village du nord du Cambodge et enseignait pour une ONG évangélique. Dès le début du procès, au printemps 2009, il a exprimé son « regret » et son « chagrin sincère » aux victimes. Mais coup de théâtre lors du dernier jour d’audience, il demande l’acquittement. L’ancien professeur, qui a passé le pro- cès dans ses notes, pugnace sur chaque détail, réfléchissait encore hier, tout comme l’accusation, à déposer un éventuel appel. La cour s’en passerait volontiers, pressée d’en venir à son deuxième dossier, autrement plus complexe. Si l’ordonnance de renvoi n’est pas rendue en septembre, elle sera forcée de libérer le « Frère numéro deux », Nuon Chea, ancien président khmer rouge, qui arrive à la limite des trois ans de détention préventive. Avec lui, trois autres hauts dirigeants doi- vent répondre de l’organisation systé- matique de la mort de 1,7 million de Cambodgiens, soit un quart de la popu- lation du pays entre 1975 et 1979. Le « frère numéro un », Pol Pot, est mort en 1998 sans être inquiété et le tribunal, qui ne peut compter sur le soutien d’un gouvernement mené par un ancien Khmer rouge, se déchire sur la question de poursuivre ou non d’autres suspects. Face à des accusés, tous octogénaires ou presque, qui se murent dans le silence, les Cambod- giens craignent que le temps ne leur vole une maigre justice. ■ Douch, premier bourreau khmer rouge condamné Reconnu coupable de plus de 12 000 meurtres dans la prison S21 à Phnom Penh, l’ancien tortionnaire a été condamné hier à trente-cinq ans de prison. DATES CLÉS 17 AVRIL 1975 Le mouvement révolutionnaire des Khmers rouges prend le pouvoir au Cambodge. Pol Pot, appuyé par la Chine, veut construire une utopie marxiste en revenant à l’« année zéro ». 7 JANVIER 1979 Les Khmers rouges sont chassés du pouvoir par le Vietnam. Le mouvement s’effondre au milieu des années 1990. 1997 Le gouvernement cambodgien demande l’aide de l’ONU pour juger d’anciens cadres khmers rouges. Un accord est signé en 2003 et les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC) sont mises en place en 2006 à Phnom Penh. BARACK OBAMA a consenti un nouveau geste pour rassurer Israël sur sa sécurité. Les États-Unis vont financer à hauteur de 100 millions de dollars le développe- ment d’une nouvelle version d’un systè- me d’interception de missiles balistiques surnommé Arrow (la flèche) III. Ces batteries de missiles antimissiles destinées à intercepter des engins que pourrait tirer l’Iran doivent permettre d’atteindre leur cible à une plus haute alti- tude et une plus grande distance que le modèle actuellement déployé par l’armée israélienne. L’ensemble devrait être opé- rationnel d’ici deux à trois ans. Cet investissement américain s’ajoute à l’aide militaire annuelle des États-Unis de près de 3 milliards de dollars qui permet à Israël de financer l’achat d’armes améri- caines. C’est d’ailleurs ce dossier qui figure au menu des discussions avec Ehoud Ba- rak, le ministre de la Défense, en visite à Washington. Les Américains font pression sur l’armée de l’air israélienne pour qu’elle se décide à être le premier client étranger à comman- der des F35, une nouvelle génération d’avions furtifs censés échapper aux ra- dars. Pour le moment, Ehoud Barak hési- te. Le coût de chaque appareil pourrait at- teindre 150 millions de dollars. De plus, les Américains refusent pour le moment d’autoriser les Israéliens à introduire leur propre avionique dans ces appareils hors de prix. M. H. (à Jérusalem) Le geste d’Obama pour rassurer Israël L’Union européenne veut amener l’Iran à négocier Téhéran est prêt à discuter, mais sans examen de la nature de son programme nucléaire. JEAN-JACQUES MÉVEL CORRESPONDANT À BRUXELLES SANCTIONS Téhéran perd son fournis- seur préféré pour les technologies de pointe : au lendemain d’une décision unanime à Bruxelles, les Vingt-Sept ap- pliquent à partir d’aujourd’hui des sanc- tions inédites contre un secteur énergéti- que vital pour l’Iran. Avec l’espoir d’amener Téhéran à discuter enfin de ses ambitions nucléaires. Ou, à défaut, le souci de convaincre le reste du monde de resserrer l’étau avec elle. L’objectif de cet « arsenal complet », comme le décrit Catherine Ashton, est de réussir d’ici à quelques mois là où toutes les autres tentatives ont échoué : engager avec la République islamique une discus- sion serrée sur ses ambitions nucléaires militaires. « Il s’agit de trouver une solu- tion politique, pas d’engager l’escalade », insiste Pierre Lellouche, secrétaire d’État français aux Affaires européennes. Des deux côtés, une fenêtre diploma- tique se dessine entre la fin du ramadan, en septembre, et le début de l’hiver, date d’un possible et nouveau tour de vis de l’UE. Effet des sanctions ou simple coïn- cidence, le chef négociateur iranien, Saïd Jalili, a déjà accepté ce week-end de ren- contrer la chef de la diplomatie euro- péenne, probablement à Istanbul, si l’on en croit les bons offices de la diplomatie turque. Bruxelles escomptait hier soir une confirmation venue de Téhéran. Ca- therine Ashton, intermédiaire des gran- des puissances, avait lancé l’invitation dès le 14 juillet. Cette convergence sur le lieu et sur le calendrier ne préfigure en rien une dé- tente sur le fond. Les six grandes puissan- ces impliquées (France, Allemagne, Chine, États-Unis, Grande-Bretagne et Russie) entendent toujours s’assurer de « la nature pacifique du programme nu- cléaire iranien ». Ce qui veut dire qu’elles sont intimement persuadées du contraire et que les Occidentaux feront tout pour empêcher Téhéran de se doter de l’arme atomique. Écran de fumée L’Iran est disposé à discuter, mais pas du sujet qui intéresse ses interlocuteurs. Ce week-end, il a proposé de reprendre im- médiatement les négociations sur un échange de combustible nucléaire, pro- posé en mai. Les six puissances persistent à n’y voir qu’un écran de fumée, et la continuation d’une diversion « qui dure depuis des années ». Un nouveau dialogue de sourds pose- rait immanquablement la question du poids politique de l’Europe et de l’effica- cité de ses sanctions. Comme elle, les États-Unis et l’Australie - et bientôt le Canada - ont imposé à Téhéran des sanc- tions économiques qui vont plus loin que ce qu’a décidé l’ONU le 9 juin. Mais il ne s’agit pas d’un embargo, et les risques de fuites sont manifestes, jusque dans le groupe des six puissances. « Plus cela sera hermétique, et plus nous serons pris au sérieux », disait hier Pierre Lellouche. Reste à en convaincre la Rus- sie, longtemps réticente aux sanctions internationales, la Chine, qui s’est spé- cialisée dans l’art de les contourner avec les pays pétroliers, ou encore la Turquie, qui a déjà claironné qu’elle ne rejoindra pas l’UE sur ce front. ■ Catherine Ashton espère réussir d’ici à quelques mois là où toutes les autres tentatives ont échoué. J. THYS/AFP Kaing Guek Eav, alias Douch, 67 ans, a reconnu son rôle dans l’organisation de la prison de Tuol Sleng (S21), un lycée de la capitale transformé en centre de détention. REUTERS
  • 3. LE FIGARO lundi 27 juin 2011 A 9international www.samsung.com Love = Aimer. * Constaté au 6 avril 2011. © 2011 - Samsung Electronics France, SAS au capital de 27 000 000 € - RCS Bobigny B 334 367 497. 270 Ave du Président Wilson-93458 La Plaine Saint Denis Cedex. © Crédit photo : Samsung-Visuels non contractuels-Images d’écran simulées. Intel, le Logo Intel, Intel Inside, Intel Core et Core Inside sont des marques de commerced’IntelCorporationauxÉtats-Unisetdansd’autrespays.PourensavoirplussurleclassementdesprocesseursIntel,consultezwww.intel.fr/classement. . Windows®. La vie sans limites. Samsung recommande Windows 7. Libye : Kadhafi en retrait des négociations Alors que les rebelles ont lancé hier une offensive à 50 km au sud de Tripoli, le colonel Kadhafi aurait accepté de ne pas faire partie des négociations sur la Libye menées pour mettre un terme à un conflit qui dure depuis quatre mois, d’après les chefs d’État africains médiateurs dans la crise. Offensive syrienne près du Liban L’armée syrienne a étendu hier son offensive à Kseir, une localité proche du Liban, poussant des centaines de personnes à se réfugier de l’autre côté de la frontière, à la veille d’une réunion inédite d’une centaine d’opposants à Damas. Yémen : prochain retour du président Saleh Le président Saleh, hospitalisé en Arabie saoudite depuis le 3 juin, entend revenir prochainement au Yémen, selon son entourage. M. Saleh proposera soit le transfert de ses pouvoirs au Parlement, soit la formation d’un gouvernement de coalition et la tenue d’une élection présidentielle. Irak : attentat en fauteuil roulant Douze personnes ont été blessées hier lorsqu’un kamikaze en fauteuil roulant a actionné ses explosifs dans un poste de police près de Bagdad. Manifestations au Maroc Des manifestations pacifiques étaient attendues hier dans les grandes villes du Maroc pour protester contre un projet de révision constitutionnelle soumis à référendum le 1er juillet. E N B R E F ISABELLE ROUGHOL ASIE DU SUD-EST Une question revient comme un leitmotiv au Cambodge lors- que la conversation s’arrête, inexora- blement, sur le sujet de l’horreur Khmer rouge : « Pourquoi des Khmers ont-ils tué d’autres Khmers ? » C’est à cette inter- rogation de tout un pays, sur ce génocide qui a vu 2 millions de Cambodgiens tués par d’autres Cambodgiens, que doivent répondre les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens, qui ouvrent aujourd’hui leur second procès à Phnom-Penh. Face aux juges comparais- sent ce matin les quatre plus hauts dignitaires survivants du régime, après la mort de Pol Pot en 1998 : Khieu Samphan, ancien chef d’État du Kampuchéa dé- mocratique (défendu par Jac- ques Vergès) ; Nuon Chea, « Frère numéro 2 », adjoint de Pol Pot, souvent présenté comme l’idéolo- gue du Parti communiste ; Ieng Sary, alors ministre des Affaires étrangères ; et son épouse, Ieng Thirith, ministre des Affaires sociales. Tous sont accusés de crimes contre l’humanité, génocide et crimes de guerre, perpétrés entre 1975 et 1979, lorsqu’ils étaient à la tête du ré- gime marxiste qui a éliminé, par la fa- mine, les travaux forcés et les exécu- tions, un quart de la population du pays. L’audience préliminaire qui débute aujourd’hui n’abordera que des ques- tions de procédure ; il faudra attendre l’automne pour toucher au fond du dos- sier. Un dossier compliqué. « On dit sou- vent ici que c’est le plus gros procès crimi- nel depuis Nuremberg », note Anne Heindl, juriste du Centre de documenta- tion du Cambodge, qui maintient des ar- chives sur la période et a versé plus d’un million de pages au dossier. Alors que le premier procès, celui du directeur de la prison S21, Douch, ne concernait qu’une seule personne et un seul centre de tor- ture (le verdict de son appel est attendu en juillet), le second doit examiner des crimes dans l’ensemble du pays et dé- cortiquer toute l’organisation du régime meurtrier. Le parquet doit déterminer des responsabilités individuelles dans un système politique complexe dont toutes les décisions étaient prises au nom de l’« Angkar » (l’Organisation), sinistre décideur sans visage du sort de chaque Cambod- gien. Et ce plus de trente ans après les faits, alors que les accusés se murent dans le silence et que le gouvernement, dont plusieurs anciens Khmers rouges sont membres, dit tout haut son espoir de voir le tribunal échouer. « Atmosphère toxique » La cour elle-même est divisée : des dé- saccords entre magistrats sur la poursui- te d’autres suspects ont conduit à au moins six démissions. Dernier en date, Stephen Heder, l’un des historiens les plus réputés de la période, a claqué la porte il y a deux semaines, dénonçant des enquêtes bâclées et une « atmosphè- re toxique ». « Si ce dossier est bien mené, cela pourrait racheter le tribunal », espè- re Anne Heindl. La mission du tribunal spécial est aussi, selon ses statuts, de montrer à quoi ressemble une justice ef- ficace, dans un Cambodge où l’institu- tion est considérée comme la plus cor- rompue. Quoi qu’il en soit, ce procès sera le plus emblématique et le plus représenta- tif de l’histoire personnelle de chaque Cambodgien. Il aborde les dénoncia- tions, les tortures et les exécutions ; les camps de travail où l’on creusait des ca- naux jusqu’à ce que mort s’en suive ; la famine et la pseudo-médecine tradi- tionnelle, qui tuait plus souvent qu’elle ne guérissait ; les déplacements de po- pulations et les séparations des familles. « Ils ont emmené mon père sous mes yeux et je n’avais pas le droit de pleurer », se souvient Navy Soth, une fillette alors. Cinq membres de sa famille immédiate ont été tués ; les survivants se sont ins- tallés en France dans les années 1980. Aujourd’hui, elle est partie civile au pro- cès de ses bourreaux. « Tout ce qu’on de- mande, c’est la vérité. Le nombre d’an- nées en prison, cela ne veut rien dire », estime-t-elle. Mais elle sait qu’elle ne doit pas trop espérer des quatre accusés, tous octogénaires et apparemment déci- dés à utiliser chaque voie possible pour faire durer la procédure. « On est là, en- tre les Khmers rouges et les morts, à se battre. Mais je n’attends pas grand-cho- se. » ■ Deux survivants du génocide se recueillent devant l’ossuaire de Choeung Ek, dans les faubourgs de Phnom- Penh. PRING/REUTER Le second procès des Khmers rouges s’ouvre à Phnom-Penh Les quatre plus hauts dignitaires survivants du régime doivent répondre de la mort de deux millions de Cambodgiens. 2000personnes se sont portées partie civile à ce procès
  • 4. mardi 23 novembre 2010 LE FIGARO C 8 international EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DE LA COUR D’APPEL DE VERSAILLES Par arrêt en date du 18 avril 2008, de la 9ème Chambre de la Cour d’appel de Versailles, Mme COHEN épouse HAIUN Monique, née le 15/01/1957 à VICHY (03) demeurant 78 avenue Foch à PARIS (75116) a été condamnée à 8 mois d’emprisonnement avec sursis et à une amende délictuelle de 37.500 €, aux peines complémentaires d’affichage et de publication dans le quo- tidien LE FIGARO pour avoir à BOULOGNE BILLANCOURT et sur le territoire national courant 2001 et 2002, frauduleusement et volontairement soustrait la société EDIFIM, dont elle était la gérante, à l’établissement et au paiement partiel de la TVA exigible au titre de la période du 01/01 au 31/12/2001, par minoration des déclarations mensuelles, les dissimulations excédant le 1/10ème de la somme imposable ou le montant de 153 €, faits prévus et réprimés par les articles 1741 et 1750 du Code Général des Impôts. VU AU PARQUET GENERAL - P/LE PROCUREUR GENERAL POUR EXTRAIT CERTIFIE CONFORME, LE GREFFIER EN CHEF EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS Par jugement contradictoire, rendu par le TRIBUNAL CORRECTIONNEL 11EME CHAM- BRE/1, le 31 mars 2009. Jugement sur citation Directe devant le Tribunal Correctionnel. Isa- belle, Blanche, Louise PERUCCA épouse HUBERT, née le 01 mars 1953 à VERT (78) de Rol- land PERUCCA et de Liliane PICARD, de nationalité française, Président Directeur Général, demeurant 28, rue des Prévanches 27120 LE PLESSIS HEBERT, libre, a été condamnée à : une Emprisonnement délictuel - 6 mois avec sursis simple total. Ordonne la publication du présent jugement, par extrait dans le JOURNAL OFFICIEL, ainsi que dans le quoditien LE FIGARO et l’AFFICHAGE, également par extrait pendant 3 mois, sur les panneaux réservés à l’affichage des publications officielles à la mairie de la commune où la contribuable a son domicile, le tout aux frais de la condamnée. Infraction : SOUSTRACTION FRAUDULEUSE A L’ETABLISSE- MENT OU AU PAIEMENT DE L’IMPOT par DISSIMULATION DE SOMEMS - FRAUDE FISCALE - courant 2005 et 2006, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, à Paris et sur le territoire national, faits prévus par ART. 1741 AL.1, AL.2 C.G.I. et réprimés par ART. 1741 AL.1, AL.3, AL.4, ART.1750 AL.1 C.G.I., ART.50§I LOI 52-401 DU 14/04/1952. Pour extrait conforme n’y ayant appel. Pour le Greffier en chef. PUBLICATIONS JUDICIAIRES 01.49.04.01.85 - annonces@osp.fr Nouveau coup dur pour Silvio Berlusconi Mara Carfagna, ministre italienne de l’Égalité des chances, a annoncé qu’elle démissionnera au lendemain du vote de confiance au Parlement, le 14 décembre, et quittera le PDL, le parti de Berlusconi, livré désormais, selon elle, aux rivalités claniques. Un officier du FSB tué dans le Caucase russe Un officier des services spéciaux russes (FSB) est mort après l’explosion de sa voiture au Daguestan, et un policier a été tué en Kabardino-Balkarie, deux républiques du Caucase russe, une région minée par une rébellion. E N B R E F Benoît XVI envisage l’hypothèse d’une démission Benoît XVI n’hésitera pas à démissionner, ce qu’aucun Pape n’a fait depuis sept cents ans, s’il est dans l’incapacité « physique, psychologique ou spirituelle » d’accomplir les tâches de sa fonction. Le souverain pontife, qui est âgé de 83 ans, le déclare sans détour dans le livre d’entretiens qui paraît aujourd’hui. Les responsables du Vatican n’aiment guère aborder cette hypothèse qui pose de complexes problèmes doctrinaux. Z O O M TANGUY BERTHEMET JUSTICE INTERNATIONALE Jean-Pierre Bemba est devant ses juges. Depuis hier, l’ancien chef du Mouvement de libéra- tion du Congo (MLC), une milice congo- laise, doit répondre de crimes de guerre et crimes contre l’humanité devant la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye. Pour ses victimes, nombreuses, c’est déjà une victoire inattendue après des années d’impunité. Car l’histoire de Jean-Pierre Bemba, 48 ans, est étroite- ment mêlée à celle de l’Afrique centrale au tournant des années 2000. Entre 1994 et 2003, les guerres civiles, les massacres et les tueries se sont enchaînés au Congo, au Rwanda et en Centrafrique, faisant plus de trois millions de morts. Le procès qui s’ouvre et qui devrait durer plusieurs mois est fondamental pour la CPI. La cour joue une partie de sa crédibilité sur cette procédure. Trois autres chefs de guerre congolais sont certes déjà poursuivis à La Haye. Mais leurs rôles comme leurs personnalités sont mineurs dans le drame qu’a connu la région. Viols, meurtres et pillages Pour les services du procureur de la CPI, la tâche ne s’annonce pas simple. Déjà les critiques fusent. La première est que Jean-Pierre Bemba n’est pas jugé pour des crimes commis dans ses fiefs congo- lais, mais pour ses actions supposées dans un pays voisin, la Centrafrique. Fin 2002, les miliciens du MLC étaient entrés à Bangui pour porter secours au prési- dent centrafricain d’alors, Ange-Félix Patassé, en butte à un coup d’État. Les troupes du MLC auraient commis des centaines de viols, de meurtres ainsi que des pillages. D’aucuns s’étonnent que les autres crimes du MLC, notamment ceux commis à la même époque en Ituri, dans l’est du Congo, ne soient pas eux aussi jugés. On avait recensé alors des centai- nes de morts et des cas de cannibalisme contre des Pygmées. La seconde question porte sur le temps mis à lancer des mandats d’arrêt contre Jean-Pierre Bemba. Alors que les faits remontent à 2003, il n’a été arrêté qu’en 2008. Entre-temps, Bemba, alors au sommet de sa puissance, fut tran- quillement candidat à la présidentielle de 2006 au Congo. Durement battu lors du scrutin par Joseph Kabila, il s’était exilé au Portugal en 2007 puis à Bruxel- les, où il fut interpellé. Pour les avocats du prévenu, cette chronologie est le si- gne que ce procès est politique : « Aurait-on jugé Bemba s’il avait été élu président ? » La troisième interrogation est suscitée par l’absence d’Ange-Félix Patassé du banc des accusés. Une décision du pro- cureur, l’Argentin Luis Moreno-Ocam- po, qui assure manquer de preuves pour conduire une telle accusation. Ces criti- ques devraient revenir tout au long des débats. Hier, Luis Moreno-Ocampo les a balayées, affirmant que « Jean-Pierre Bemba a sciemment permis aux 1 500 hommes qu’il commandait de commettre des centaines de viols, des centaines de pillages ». Jean-Pierre Bemba a décidé de plaider non-coupable. ■ Jean-Pierre Bemba, hier, devant la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye. AP La CPI joue son crédit sur le procès de Jean-Pierre Bemba L’ancien vice-président du Congo et chef d’une milice doit répondre à La Haye de crimes de guerre et contre l’humanité. PATRICK SAINT-PAUL CORRESPONDANT À BERLIN ALLEMAGNE Six siècles après la condam- nationàmortdeKlausStörtebeker,lecélè- bre « Corsaire rouge » décapité avec ses 71 compagnons, Hambourg a entamé, hier, le procès de dix pirates somaliens. Murés dans le silence, les accusés ignorent pro- bablementlesortqueréservaitlacitéhan- séatique à leurs illustres prédécesseurs, dont la tête coupée était exposée près du port. La tradition s’est interrompue il y a quatre cents ans. En dépit des « preuves accablantes » citées par l’accusation, les Somaliens jugés pour l’attaque du cargo allemand MS Taipan en avril au large de la Corne de l’Afrique encourent au maxi- mumquinzeouvingtansderéclusion. Arrêtés par la marine néerlandaise avant d’être transférés en Allemagne en juin, les dix accusés répondent d’attaque contre le trafic maritime et de tentative de rapt en vue d’obtenir une rançon. Ils avaient donné l’assaut au porte-conte- neurs allemand à 900 km à l’est des côtes somaliennes. Mais les inculpés n’avaient pu mettre la main sur les quinze membres d’équipage, qui s’étaient réfugiés dans un espace sécurisé dans les cales du navire. Avant de prendre la fuite, le capitaine avait lancé un appel au secours à un bâti- ment néerlandais de la force européenne antipiraterie Atalante. Trois heures et de- mie plus tard, la frégate Tromp de la mari- ne néerlandaise avait donné l’assaut et un militaire néerlandais avait été légèrement blessé dans des échanges de coups de feu. Une vidéo de l’opération, deux lance-ro- quettes et cinq fusils d’assaut Kalachnikov saisis aux pirates figurent parmi les preu- ves. Pour le porte-parole du tribunal de Hambourg, Conrad Müller-Horn, leur condamnation ne fait aucun doute. « Ils doivent s’attendre à des peines de cinq ans au minimum », estime-t-il. Cela n’arrête- raprobablementpaslespiratessomaliens, qui opèrent de plus en plus loin des côtes pour échapper aux navires de la mission Atalante. Leur butin est estimé à 100 mil- lions d’euros par an. Selon le Bureau in- ternational maritime, 23 navires et plus de 500 membres d’équipage sont actuelle- ment détenus par des pirates somaliens. Le nom et l’âge des accusés La défense a expliqué que les actes de pi- raterie sont la conséquence des troubles en Somalie et de la surpêche pratiquée par les Occidentaux dans la région. La pi- raterie « ne peut être résolue que par une solution politique, ont estimé hier les avo- cats. Un jugement de cette cour n’aura aucune influence sur la piraterie dans l’océan Indien. » Les accusés, dont la plu- part portent une casquette de base-ball et des vêtements de sport, suivent avec dé- contraction les débats, traduits par trois interprètes. La lecture des noms a, à elle seule, duré près de quarante-cinq minu- tes, juges, interprètes et accusés cher- chant à s’accorder sur une orthographe et une prononciation commune. Les échanges les plus vifs ont porté sur l’âge des accusés, l’un d’entre eux affirmant avoir 13 ans. L’âge légal pour être jugé en Allemagne est de 14 ans. Cependant, les experts médicaux estiment que l’accusé en question a plus de 18 ans. Le procès doit se poursuivre jusqu’en janvier. L’un des pirates a déjà déposé une demande d’asile politique en Alle- magne. Loin de la chaleur moite du golfe d’Aden, les pirates disent n’avoir « peur que d’une chose, a expliqué l’un des avo- cats, l’hiver allemand ». ■ Les dix pirates, jugés depuis hier à Hambourg, encourent au maximum quinze ou vingt ans de réclusion. AP, AFP Hambourg juge dix pirates somaliens C’est la première affaire de piraterie devant une cour allemande en quatre siècles. Notre blog Allemagne HTTP://BLOG.LEFIGARO.FR/BERLIN/ Le cargo allemand MS Taipan, en avril dernier lors de l’assaut donné par la marine néerlandaise contre les pirates somaliens. AP 345 morts dans une bousculade tragique à Phnom Penh La capitale cambodgienne vit son pire drame en plus de trente ans. Le premier ministre a déclaré le deuil national. ISABELLE ROUGHOL CAMBODGE Au lieu de célébrations au dernier soir de la traditionnelle Fête de l’eau, les habitants de Phnom Penh ont connu hier soir « la plus grande tragé- die au Cambodge depuis la fin du régime de Pol Pot », pour reprendre les mots du premier ministre, Hun Sen, quand un mouvement de panique a saisi la foule des festivaliers sur un pont de la capitale. La bousculade a fait au moins 345 morts, selon un bilan officiel enco- re provisoire, et des centaines de bles- son des pluies et l’inversement du cours de la rivière Tonlé Sap. Le roi préside à des joutes dans lesquelles s’affrontent les meilleurs bateliers du pays. La population de la capitale fait plus que doubler et deux à trois mil- lions de personnes s’amassent sur les quais du centre de la ville, où l’on peut voir se rejoindre les quatre bras du Mékong. Les infrastructures et les ser- vices d’ordre de la ville, déjà insuffi- sants en temps normal, sont alors sub- mergés… ■ (Avec AFP et Reuters) n’était pas stable. « Cela a déclenché un mouvement de panique. Il y avait trop de monde et les gens n’avaient nulle part où s’échapper », a indiqué le ministre de l’Information, Khieu Kanharith. Le premier ministre, s’adressant à la po- pulation à la télévision dans la nuit, a promis une enquête et présenté ses ex- cuses. Il a déclaré une journée de deuil national pour jeudi. La tragédie était presque inscrite. Chaque année, les provinciaux se ruent vers Phnom Penh pour trois jours de festivités, qui célèbrent la fin de la sai- sés. Les victimes, des femmes surtout et de nombreux jeunes, sont mortes piétinées par la foule. Beaucoup ont tenté d’échapper à la mort en se jetant dans la rivière en contrebas. Le nom- bre de morts pourrait encore augmen- ter, alors que les hôpitaux étaient hier dépassés par l’afflux de blessés. Le drame a eu lieu sur le pont qui relie Phnom Penh à l’île de Koh Pich, où se tenait un concert. « Nous étions en train de traverser le pont vers Koh Pich lorsque les gens ont commencé à pousser de l’autre côté. Il y avait beau- coup de cris et de panique », a déclaré à l’AFP Kruon Hay, 23 ans, qui se trouvait encore sur les lieux. « Les gens ont commencé à courir et ils tom- baient les uns sur les autres. Je suis tombé moi aussi. Je n’ai survécu que parce que d’autres personnes m’ont re- levé », a-t-il dit. Deux à trois millions de festivaliers Les causes de la bousculade étaient en- core floues hier soir : une rumeur se serait répandue selon laquelle le pont