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Témoigner de son agression sexuelle sur les réseaux
sociaux : Quelle experience pour les femmes ?
• Chantal Aurousseau et Christine Thoër, professeures au département de
communication sociale et publique – UQAM
Rym Benzaza, étudiante à la maîtrise en communication, UQAM
• Mélanie Sarroino, RQCALACS; Tanya St-Jean, Je suis Indestructible
• Lyne Kurtzman, Service aux collectivités de l’UQAM
Augmentation des témoignages en ligne
d’agressions à caractère sexuel
 Le contexte du mouvement #BeenRapedNeverReported
#AgressionNonDénoncée
 Création d’une page Facebook
BeenRapedNeverReported/AgressionNonDénoncée
 Multiplication et mise en visibilité des témoignages
d’agressions à caractère sexuel sur différentes plateformes
en ligne et hors ligne (Savard-Moisan, 2016).
Études sur le témoignage d’agressions à
caractère sexuel dans l’espace public
 «Sexual stories» (Plummer, 1995) Perspective
interactionnisme symbolique
Montre le caractère performatif du récit, qui articule des
évènements, se construit dans un contexte et un cadre
d’énonciation (plus ou moins favorable)
 Le récit d’agression s’inscrit dans un cheminement
(«a journey») qui peut se dérouler sur de nombreuses
années et nécessite que la personne se reconnaisse
1) comme victime 2) comme survivante
 Un récit nécessaire à la reconstruction de l’identité
Mais la mémoire traumatique est morcelée et fuyante,
jamais figée
(«L’agression comme éclatement du soi», Guérin, 2017)
Le témoignage en ligne
d’agressions à caractère sexuel
Différents projets communautaires visant à réunir des
témoignages individuels pour leur donner une force nouvelle
MAIS peu de travaux sur les témoignages d’agressions à
caractère sexuel en ligne
 Moors et Webber (2012) : Analyse de contenu d’un corpus
de Yahoo Answers
Un espace de parole nécessaire mais est-il sécuritaire?
 Paveau (2015) : Analyse le projet Unbreakable de Grace
Brown
o La pancarte fait parler le corps en l’augmentant d’un artefact
scriptural.
o Modifie l’ordre du discours : la parole honteuse, taboue,
culpabilisatrice de la survivante sort du tabou grâce au
numérique et peut circuler.
Spécificités d’Internet comme espace
d’exposition de soi
 La communication en ligne perçue par les acteurs comme «une
communication privée en public» se déroulant dans «un lieu plus ou
moins clos» (Cardon, 2010, p. 62)
Internet : des espaces connectés et poreux
Travaux sur la construction de l’identité en ligne
o Différentes stratégies de communication des individus selon les plateformes
o Rôle de la validation par autrui de ce que l’on expose (validation qui peut
prendre plusieurs formes : commentaires, likes, etc.)
Le récit numérique comme stratégie
d’intervention
Le partage des histoires en ligne permet d’ouvrir des dialogues à un
niveau micro et macro (Lemelin, 2012)
oreconnaissance de l’expérience individuelle au travers de sa mise en
visibilité, faire sens du vécu grâce au récit
opotentiel d’Internet qui élargit la participation à des formes
d’expression moins exigeantes et permet la mise en commun des
intérêts par le simple partage de l'information (Cardon, 2010)
MAIS importance de réfléchir aux stratégies utilisées pour diffuser les
récits (Lemelin, 2012)
oL’anonymat des personnes qui s’engagent en ligne favorise les points
de vue péremptoires et haineux
oInégalités de la participation (reproduction des inégalités
socioculturelles)
oFaiblesse et volatilité de l’engagement des individus en ligne
Objectifs de la recherche
Cerner les expériences des femmes qui témoignent d’une
agression à caractère sexuel via les médias sociaux
• Documenter les formes, les espaces et les conditions de production
du témoignage en ligne, l’appropriation des dispositifs
• Cerner les motivations des femmes à témoigner en ligne, les
significations de la démarche de témoignage en ligne, comprendre
comment elle s’inscrit dans le parcours des femmes et cerner les
conséquences qu’elles associent à cette démarche
• Offrir des pistes pour ajuster le soutien offert par les partenaires aux
femmes qui témoignent en ligne ou souhaitent témoigner en ligne
Méthodologie
Approche qualitative exploratoire par entretiens semi-dirigés centrés sur la
démarche de témoignage en ligne
o Entretiens réalisés en 2016 (face à face, échanges de courriels, Skype)
o Question de départ : «Comment en êtes vous arrivée à ce témoignage en
ligne?»
o Thèmes de relance : Motivations à témoigner en ligne, contexte de
production du témoignage en ligne, place dans le parcours personnel, choix
de la plateforme, soutien à la production du message, nature du témoignage
livré, conséquences du témoignage, autres démarches de recherche d’aide,
besoin de soutien concernant la démarche de témoignage
Échantillon :
o Femmes 18 ans et +
o Démarche de témoignage sur les médias sociaux au cours des 2 dernières
années
o Recrutement via les réseaux sociaux (plateformes des partenaires)
Annonces renvoyant vers le site de ComSanté
Annonce pour le
recrutement sur
le site de
ComSanté
Présentation de l’échantillon des femmes
participantes
Nombre de personnes qui nous ont contactées : N= 26
Entrevues débutées : 14
Entrevues terminées N= 12 pour plus de 27 témoignages en ligne
Face à face : 7
En ligne : Courriel : 4 (+ 2 interrompues), Skype : 1
Secondaire V
CEGEP en
cours
CEGEP
acquis
Universitaire (bacc ou
maîtrise) en cours
Universitaire (bacc ou
maîtrise) acquis
1 3 1 1 6
Scolarité des participantes (8/12 ont au moins un diplôme post-secondaire)
18-24 ans 25-34 ans 35 et +
4 4 4
Résultats
Différentes formes du témoignage en
ligne
Grandes diversité des formes du témoignage en ligne selon les
plateformes
o Variété des formats textuels : poèmes, messages 140 caractères, billets de
blogues pour certains illustrés de photos, textes de longueur variable sur
Facebook, messages dans des forums, etc.
o Vidéos publiées sur YouTube
Témoignages multiples des femmes + stratégies de publication sur
différentes plateformes connectées par des hyperliens
o 1er temps : Blogues, Twitter (#AgressionNonDenoncée), pages Facebook
communautaires, YouTube
o 2ème temps : partage sur la page Facebook personnelle aux personnes
de l’entourage (le plus souvent choisies) ou via Facebook messenger
Pour la plupart, les femmes témoignent sur
les médias sociaux où elles sont déjà actives
Grande variété des
plateformes utilisées
Témoignages relayés
sur Facebook
Le rapport à l’anonymat
Témoignages anonymes : 6
Témoignages anonymes mais relayés sur la page FB : 5
Témoignages nominatifs dès le départ : 16
L’agresseur n’est pas nommé mais indices souvent accessibles lorsqu’il s’agit
d’une personne de l’entourage : 10
Mon vidéo n'est pas non plus anonyme sur YouTube, surtout que je mentionne
mon nom complet dans mon vidéo. Personnellement, je trouve que les gens qui
ont le plus d'impact sur moi (avec leurs commentaires) sont ceux pour qui j'ai
un minimum d'estime et qui font partie de mon entourage proche. Sachant très
bien que ces personnes allaient respecter ma décision de faire ce vidéo, l'avis
des inconnus ne m'importe peu. Du coup, je n'ai pas ressenti le besoin de rester
anonyme. Au contraire, je suis beaucoup plus fière d'assumer ouvertement ce
qui s'est passé, car je n'ai pas honte de tout ça. (Sylvie, 18-24 ans)
Les conditions de production du
témoignage
Une démarche largement autonome (femmes maîtrisant les médias
sociaux où elles s’expriment)
◦ Peu de sollicitation de l’entourage sauf pour, certaines, pour informer,
prévenir des conséquences anticipée de la diffusion du témoignage
◦ 2 femmes ont bénéficié d’aide pour la construction du témoignage (relecture
orthographe, sélection de la vidéo)
Sentiment - et besoin - de contrôle («Visibilité maîtrisée»,
Lemelin, 2012)
◦ Un discours livré sans interruption
◦ Où et quand elles le veulent
◦ À leur rythme
◦ Qu’elles adressent à qui elles veulent
◦ Où elles abordent ce qu’elles veulent!
Entre la libération de la parole (écriture automatique) et le contrôle
du récit
Ne pas se préparer, «y aller au feeling»
Comme j'en avais long à dire, c'était plus simple et plus
rapide pour moi de me filmer. (…) Faire mon vidéo m'a pris
le temps de le filmer, soit 25 min. Je ne me suis pas trop
préparée d'avance, je voulais y aller au feeling. Les idées
me venaient au fur et à mesure. (Sylvie, 18-24 ans)
C’était vraiment sur un coup de tête, parce que j’ai vu
l’annonce. Mais ça m’a comme donné une occasion de le
faire. Sans occasion je ne pense pas que j’aurais témoigné
sur internet. (Karine, 18-24 ans)
Un texte, une démarche qu’on laisse
murir
J'ai commencé à écrire le texte et je l'ai laissé là. J'ai dû y retourner
quelques fois avant de le terminer. J'ai hésité avant de l'envoyer en
correction. Juste trouver une image pour l'illustrer me semblait dénué de
sens. Tout le monde pourrait savoir maintenant.
Puis, je l'ai fait parvenir à la fondatrice du blog X pour lequel j'écrivais déjà
pour savoir si cette tribune était appropriée et si le texte était adéquat pour
cette plateforme. Après une réponse positive, je lui ai demandé d'attendre
avant de le publier.
Je devais réfléchir à si je voulais me lancer, me dévoiler pour de vrai et
trouver une image pour accompagner le texte. Après un moment de
réflexion sur mes objectifs en voulant partager ce texte, j'en ai parlé à mon
conjoint. Je voulais savoir ce qu'il en pensait et si c'était correct pour lui
comme nous partageons un réseau d'amis, de collègues et de la famille. Je
voulais savoir s'il était à l'aise avec le partage de mon vécu comme il serait
touché par ses impacts lui aussi. (Gabrielle, 25-34 ans)
Significations du
témoignage
en ligne
Quelles significations au témoignage en ligne ?
 Les significations du témoignage en ligne sont multiples et varient
oselon les situations/contexte d’agression et nature du soutien social
au sein de l’entourage
oau fur et à mesure de la progression des femmes dans leur parcours
de reconstruction (plusieurs témoignages dans le parcours et
significations différentes)
oselon les plateformes choisies (différentes fonctions qu’offre le
dispositif)
 Des éléments déclencheurs :
o Le mouvement #AND
o La souffrance et l’urgence de dire
o La présence sur les RSN qui sont perçus comme des espaces naturels
d’expression de soi
Un moyen de canaliser la souffrance,
de libérer la parole
 Déposer/sortir l’agression, les émotions du corps, canaliser
la souffrance, ventiler, libérer la parole
Témoigner m’a permis de sortir l’agression du corps. (…)
Pour relâcher l’événement en tant que tel. Sortir les paroles
qu’il m’avait dîtes. Me rappeler que j’avais dit non (Sophie,
25-34 ans)
J’avais besoin de le dire. J’étais et je suis encore frustrée de
voir que moi, la victime j’ai perdu ma place dans la famille
tandis que mon frère a gardé la sienne. Je me sentais sur le
point d’imploser ou d’exploser. (Caroline, 35 ans et +)
 S’exprimer dans un espace sécuritaire
Facebook m’a permis de dire ce que je pensais publiquement
tout en restant cachée, en sécurité (Caroline, 35 ans et +)
«Écris-toi : il faut que ton
corps se fasse entendre»
(Cixous citée dans Paveau,
2015, p. 1)
Significations
J’ai senti que je laissais
aller une partie de moi.
Comme si un coup de
vent avait emporté avec
lui ‘’le mal’’ qui
l’accompagnait. (Anouk,
18-24 ans)
Un premier geste que l’on pose…
 Un premier geste parce qu’on ne se sent pas le courage, qu’on ne se sent pas la
légitimité ou qu’on n’a pas le temps d’aller vers une ressource spécialisée
Ça faisait 3 ans que je me sentais extrêmement mal par rapport à mon agression, je
n’avais aucune idée quoi en faire, comment en parler, comment ouvrir un dialogue à ce
sujet là, comment recevoir de l’appui et je ne sentais pas que les moyens institutionnels,
soutien médical et psychologique, je ne sentais pas que ça allait m’aider pis dans la vie,
j’ai vraiment besoin de prendre action sur ce que je vis. (Maria, 18-24 ans)
J'ai voulu aller consulter un psychologue en me croyant prête de le faire, mais
finalement, j'ai remis ça (…) Je ne me sentais plus prête. Par contre, l'envie d'en parler
continuait d'être présente, sans que je sache toutefois comment le faire (Sophie, 25-34
ans)
J’ai écrit à un CALACS près de chez moi, mais elles m’ont dit d’appeler, je ne l’ai pas fait.
Je trouve mon cas, bien petit par rapport à une fille qui s’est fait violer alors, je ne sais
pas trop si c’est ma place. Je suis un petit cas. Je les ai rappelées par la suite mais je suis
toujours tombée sur leur répondeur, je ne veux pas laisser de message car elles risquent
de rappeler au mauvais moment. J’aimerais qu’il y ait un lieu comme pour les AA, un lieu
de réunions connus où l’on puisse se rendre sans devoir faire une autre démarche. Juste se
rendre. J’en suis là. (Caroline, 35 et +)
Significations
Une première démarche de recherche
d’aide
Au départ c’était vraiment parce que j’étais dans un processus judiciaire qui était
en cours et je trouvais ça vraiment difficile, j’étais en pleine dégringolade, mes
notes chutaient pis j’avais vraiment besoin de parler et j’avais pas de soutien
autour de moi. Mon chum ne me soutenait pas, avec mes parents c’est un sujet un
peu tabou pis j’étais en attente pour voir le psy mais c’était pas encore là fait
que, c’était en attente là, j’étais sur une liste d’attente.
En attendant, j’ai trouvé ce forum-là qui avait l’air bien parce que je me coupais au
fond à ce moment là et je voyais que ça empirait. (…)
J’ai commencé à écrire pis les gens ont été fins, ça m’a aidé à m’ouvrir. Et là j’ai un
peu témoigné en partant de l’auto-mutilation. Qu’est ce qui m’a amené a l’auto-
mutilation ? C’était le procès et le retour dans les agressions, fait que j’ai témoigné
un peu des agressions. C’était comme pour ventiler dans le fond. (Anouk, 18-24
ans)
(Un besoin de dire quelque part) que c’était arrivé, ce que je vivais, ce que je
ressentais. De retrouver des gens qui vivaient dans le fond un peu les même
choses. J’avais pas eu encore de suivi psychologique à ce moment là fait que je
cherchais une bouée de sauvetage. (Laurianne, 35 ans et +)
Significations
Un moyen sécuritaire pour communiquer avec
l’entourage, de confronter un proche
 Le témoignage comme moyen de communication sécuritaire (mise à distance) avec
les membres de la famille impliqués dans la situation d’agression (confronter le
parent dans un lieu sécuritaire)
On est dans le dévoilement aux proches plus que dans le témoignage public
Facebook m'a permis de dire ce que je pensais publiquement tout en restant
cachée ou en sécurité. Bien que je sache où il habite, je suis morte de peur à l'idée
d'aller le confronter. J'aurais peur qu'il me "sacre une volée". Mon père était de
l'époque des fessées mais ce n'était pas un homme violent mais je pense que si je le
confrontais chez lui, il pourrait perdre le contrôle et me trainer dehors de chez lui.
Alors, oui Facebook m'a permis de le confronter à moitié (Caroline, 35 ans et +)
En même temps, les réseaux sociaux, s’ils avaient réagi de façon négative ils se
seraient fait vraiment ramasser. (…) J’ai beaucoup d’amies féministes qui auraient
été vraiment fâchées. Je ne sais pas si vous êtes au courant du victim blaming. En
tout cas, blâmer les victimes. Je pense qu’ils auraient été vraiment ramassés s’ils
avaient réagi de façon négative. J’y repense après coup, mais je n’y avais même pas
pensé quand j’ai publié ça. (Karine, 18-24 ans)
Significations
Un moyen de dénoncer l’agresseur
 Dénoncer l’agresseur, pour l’empêcher de recommencer
 J’ai découvert qu’il avait fait ça avec une autre femme, je voulais
l’empêcher de recommencer. (Sophie, 25-34 ans)
 Voilà, je me suis sentie abusée mentalement et sexuellement par sa
logique implacable, par son insistance, par sa façon d'outrepasser
subtilement mon consentement. C'était insidieux. C'était des
agressions. X (nom de l’agresseur), tu es un agresseur. Je te le dis, il
faut le prendre. Fais quelque chose de cette affirmation, réfléchis,
change. Je ne veux pas que ça se reproduise, avec personne.
(Maria, 18-25 ans)
Significations
S’inscrire dans un collectif de survivantes
 Le mouvement #AND offre une occasion, un contexte pour dire
j’ai vu arriver ces témoignages-là des femmes… tout l’aspect judiciaire
de l’affaire Gomeshi (…) cette vague de dénonciations avec le hashtag
AgressionNonDenoncee m’a amenée à spontanément, inconsciemment
à dénoncer (Clara, 35 ans et +)
# AgressionNonDenoncee m'a donné un contexte pour placer le
témoignage. (Gabrielle, 25-34 ans)
Mais quand j’ai eu a dénoncer sur AgressionNonDénoncée,
(…) ça, fait que ça faisait du bien d’embarquer dans le
mouvement et dire : « moi aussi je l’ai vécu, moi aussi je
suis là, moi aussi je suis debout » (Julie, 25-34 ans)
Significations
Aider d’autres femmes, redonner,
exprimer la solidarité
Des fois quand tu aides quelqu'un et tu ressens que tu
l’as aidé, ça aide aussi à se sentir mieux, à prendre une
distance sur tes problèmes, parce que des fois eux
vivent aussi des trucs qui sont très similaires à toi, fait
que c’est intéressant de voir ca aussi. (Anouk, 18-24 ans)
J'ai voulu en parler parce que je suis certaine que ce
vidéo pourrait donner espoir à quelques
personnes.(…) Je voulais aussi faire comprendre
qu'il est possible de s'en sortir. (Sylvie, 18-24 ans)
Significations
Se mobiliser au sein d’un mouvement
collectif
oS’inscrire dans un mouvement qui vise une prise de conscience
collective et des actions pour changer les choses
Je pense que j’ai voulu vraiment me rallier à ces femmes à ces
personnes-là qui avaient le courage, puis c’était comme grossir les
rangs, comme rentrer dans une manif, je suis d’accord avec ce
qu’elles revendiquent, c’est exactement ça. (Clara, 35 et +)
j’avais l’objectif d’être avec toutes ces femmes, créer le collectif de
ces femmes qui ont témoigné.(…) Oui de faire partie, faire un nous.
Puis, euh. c’était tellement des témoignages qui venaient de
personnes tellement différentes (Clara, 35 et +)
o Répondre à une demande de témoigner formulée par un
organisme
Parce qu'on en a toutes marre de la culture du silence! On nous a
demandé de partager ce texte anonymement (Maria, 18-24 ans)
Significations
Les conséquences
du témoignage en
ligne
Les conséquences du témoignage
Nombreux avantages associés par les femmes à la
démarche de témoignage en ligne : Le témoignage est un
outil d’empowerment
Les plus souvent mentionnés se situent au niveau individuel
plutôt que collectif (un peu différent des témoignages de
PVVIH, Mensah, 2016)
Certaines femmes témoignent de risques associés à la
démarche du témoignage, notamment lorsque le
témoignage se fait dans un espace en ligne où l’agresseur
est connu
Obtenir du soutien social
Obtenir de l’écoute, de l’empathie, des conseils, de l’entraide, se sentir mons seule
d’avoir le support de tout le monde, c’était incroyable. (Johanne, 35 ans et +)
(dans le forum) C’est vraiment de l’entraide. C’est des gens comme toi et moi qui ont
des problèmes aussi et qui ont ce problème-là aussi. (Anouk, 18-24 ans)
Ah oui, ça a fait beaucoup de bien. On n’était plus toutes seules dans notre coin. On
n’était pas folles, pas fabulatrices. Pas castrantes (…) on avait mal ensemble
(Caroline, 35 ans et +)
Possibilité de lire les commentaires sur le témoignage livré (le plus souvent positifs
mêmes si limités), toutes les marques de l’attention sont bénéfiques
Comment je peux expliquer… je sais que je ne suis pas toute seule, les commentaires,
on le voit qu’on est pas toute seule mais de se faire répondre « je comprends » ça
rajoute un côté plus, comme une petite laine… c’est plus comme ca que je le
vois (Julie, 25-34 ans)
(Ma vidéo) Elle est publiée depuis un mois. Je la laisserai toujours en ligne.
Présentement elle a 880 vues. (Sylvie, 18-24 ans)
Avantages perçus
Gérer, redéfinir les relations avec
l’entourage
 Pouvoir expliquer son parcours, ses actions à l’entourage
Encore aujourd’hui, je suis contente de l’avoir fait. Ça me permet de
partager une partie de moi à des gens qui m’apprécient. (Sophie, 25-34
ans)
Je pense que d’avoir témoigné en ligne, comme ça, et le fait que ma tante
le sache, je pense que ça va me donner le courage de lui parler. (Karine,
18-24 ans)
 Permet aussi d’identifier les personnes de l’entourage sur lesquelles
compter
Au final, je pense que c’est positif parce que ça m’a montré la vraie face de
mon beau-père. Je n’espère plus rien. (Caroline, 35 ans et +)
Avantages perçus
Une brique à la (re)construction de son
récit
 Le témoignage active la mémoire, aide à faire sens d’une mémoire
morcelée et fuyante
je ne connaissais pas mon histoire (…) Je connaissais, j’étais très consciente
que j’avais été violée. Ça je l’avais dénoncé mon violeur (…) mais mes
agressions dans l’enfance ont été complètement enfouies. (…) je savais qu’il
s’était passé quelque chose (…) mais je ne savais pas réellement quoi. Puis
j’ai dénoncé (sur Twitter) puis je suis retournée (…) j’ai fait l’effort de
retourner sur mon twitter et j’ai imprimé le document parce que je me suis
dit: «mais qu’est ce que j’ai dit, qu’est ce que j’ai écrit »? Finalement, j’ai
vraiment écrit deux périodes de ma vie où j’ai vécu des attouchements,
petite enfance et jeune adolescence. (Clara, 35 ans et +)
La première chose qui m’est venue quand je suis arrivée pour dire pourquoi je
me coupais (sur un forum), c’est l’histoire avec mon frère et c’est vraiment
étrange puisque j’en avais pas reparlé depuis plusieurs années. Depuis en fait ,
j’en avais parlé à personne, même les gens avec qui je parle de mon passé un
petit peu (Anouk, 18-25 ans)
Avantages perçus
Progresser dans la reconstruction
identitaire
 Progresser dans la reconstruction de soi et prendre
conscience de cette progression
Quand j’ai décidé d’envoyer le texte ou de le partager par la
suite, j’avais le sentiment de faire la bonne chose. Que ça me
ferait du bien. Que je franchissais un pas important. Et quand
ça a été fait, j’ai eu l’impression d’avoir un poids en moins sur
les épaules. Pas l’impression d’avoir fini mon processus de
guérison, mais plutôt d’avancer dans ce processus, à mon
rythme. (Sophie, 25-34 ans)
Avantages perçus
Témoigner de la reconstruction
identitaire
 Progresser dans la reconstruction de soi, se reconnaître comme victime,
puis survivante : travailler, réécrire son histoire
(Mon témoignage est) un grand apport (dans mon parcours). Il illustre ma
reconstruction à la face du monde. C’est gros comme phrase, mais c’est
un peu ça quand même. (Gabrielle, 25-34 ans)
C’est un autre moment où j’ai changé mon histoire (après la thérapie de
groupe). Tu sais, c’était fini, là. Là, j’étais survivante après ça. Je n’étais
plus victime. Je n’allais plus endurer cette merde-là! […]
Moi, dans ma tête, ce n’était pas juste de changer mon histoire de victime
à survivante. Ça, cet exercice-là, c’était de changer mon histoire de
survivante à thriver ; de survivor à thriver. Quelqu’un qui est épanouie,
qui utilises ses expériences pour pouvoir faire une différence dans la vie
des autres. […] C’est vraiment… powerful de faire ça. (Johanne, 35 ans et
+)
Avantages perçus
Sentiment de fierté à l’égard du
témoignage produit
Pendant que je me filmais, j'ai même ressenti du plaisir à en
parler, car j'étais très fière de pouvoir en parler sans
pleurer, sans être stressée ou avoir honte. (Sylvie, 18-24
ans)
J’étais comme ma propre mère dans ça. C’est la première
fois que j’ai été jusqu’au bout pour moi-même. Parce que
toutes les autres fois, cette peur là, tout ce que j’ai vécu en
le faisant… I would have quit. Mais je ne l’ai pas fait, cette
fois-ci. Fait-que j’étais fière d’être passée au travers et
d’être même capable de le montrer. (Johanne, 35 ans et +)
Avantages perçus
Constater la force d’un mouvement
collectif qui va aider à changer les choses
Ce n’est plus qu’un événement qui m’est arrivé mais aussi
un enjeu de société trop peu discuté sur la place publique.
Je souhaite que nous puissions en parler davantage afin que
les personnes qui vivent une agression soit mieux outillées.
(Gabrielle, 25-34 ans)
Avantages perçus
Le changement d’attitude de l’entourage
Risques plus importants lorsque l’on dénonce dans un milieu ou l’agresseur
est connu : jugement, rejet, isolement
Les gens, on dirait que ça leur faisait un choc à eux aussi de réaliser qu’il y a
quelqu’un qu’ils connaissaient, pour qui ils avaient de l’estime aurait pu faire
quelque chose du genre. Donc ils préféraient le nier, et se dire bah non c’est
pas vrai, elle doit mentir, elle cherche de l’attention (…) Je me souviens
surtout de rumeurs et du fait que des gens qui commençaient de moins en
moins à me parler (Hélène, 25-34 ans)
Le jugement ou le changement de perceptions à notre égard, dans notre
entourage, notre belle famille, notre milieu professionnel (Gabrielle, 25-34
ans)
Comment pourrais-je dire à une femme de se lancer dans la fosse aux lions
consciemment ? Je pense qu’il faut le faire sur un coup de tête. Aussi, si elle
est prête à perdre beaucoup de monde. C’est fou comme on devient la
grosse méchante et on perd l’appui des autres. (Caroline, 35 ans et +)
Risques perçus
Risques associés au dispositif technique
Quand FB propose en ami, expose aux publications, offre un canal
de communication à des personnes qui soutiennent l’agresseur
Tout ce qu’il y a avant janvier cette année a été supprimé parce
que ma mère a fait beaucoup de troubles avec mon FB. Puis à
un moment donné, j’ai décidé que je supprimais tout, j’ai
supprimé toutes les photos, les publications, j’ai tout effacé.
Dans le fond, je me suis refait un nouveau Facebook (…) Mais ,
ma mère, elle s’ouvre un nouveau compte et elle passe par mes
cousines, (Laurianne, 35 ans et +)
j’ai décidé que je n’y allais plus pour un bout parce que
j’avais besoin… je mangeais de la schnoutte d’elle, ma
tante venait me donner de la merde sur Facebook, mais
ma tante n’était pas au courant. Elle disait que ma grand-
mère faisait pitié, elle me voyait plus, en tout cas… bref,
culpabilité a 100 %, (Julie, 25-34 ans)
Risques perçus
Risques associés à la participation au
mouvement #AND
Voir la violence de certains commentaires sur les médias sociaux
Les commentaires étaient aliénants. Tout acabit minimisant le vécu de
ces femmes, pire, niant et insinuant la véracité de ces dénonciations,
avec des propos dénigrants, des injures, des calomnies, de la haine
envers ces femmes dénonçant l’indicible. J’ai écorché mes yeux, meurtri
mon âme en suivant les échanges dans cette presse crasseuse,
sensationnaliste ou sur Facebook. Et j’ai compris qu’il fallait que je me
protège l’âme. (Clara, 35 ans et +)
Caractère volatile de l’attention sur les médias sociaux :
Je trouvais cela brillant de créer un événement dans l'actualité, si fort.
Mon agression a été dénoncée, mais peu discutée par la suite. Après un
an, je trouvais dommage que le mouvement s'essouffle déjà. Ce qui
frappe sur les médias sociaux a un impact court et relatif dans le temps,
il est éphémère. C'est pour cette raison que j'avais envie de le faire
revivre, à ma façon. (Gabrielle, 25-34 ans)
Risques perçus
Risque de perdre la maîtrise…
Je pense que le témoignage en ligne c’est mieux de le faire par après,
quand tu es posée, que tu n’as plus autant d’émotions. Parce que quand
tu écris ça reste et quand tu es sur le coup des émotions tu peux écrire
des affaires que tu ne penses pas vraiment. (…)
Le témoignage en ligne, je dirais de le faire en dernier, après que tu as
eu le temps de respirer. Pour dire aux gens : je m’en suis sortie et on
peut s’en sortir.
Parce que si tu fais juste témoigner en milieu de processus, y va
manquer des infos et les gens vont être trop curieux, je pense. Ils vont
vouloir chercher plus loin, pis justement peut être que tu vas avoir des
commentaires « tu devrais en parler à ci », les gens ne te connaissent
pas sur FB, tu peux avoir des gens qui ne te connaissent pas tellement
et ils sont qui pour te dire où aller ou quoi faire? (Karine, 18-24 ans)
Risques perçus
Conclusion
 Beaucoup d’avantages associés à la démarche de témoignage en ligne
Sentiment de contrôle très fort des femmes qui témoignent en ligne : les médias
sociaux perçus comme des espaces sécuritaires (des variations par rapport aux
témoignages des PVVIH, Mensah, 2016)
o à la différence du témoignage livré dans les médias traditionnels
o à la différence du dévoilement livré à l’entourage, des dénonciations à la
police, à la justice
L’anonymat du témoignage en ligne n’est pas un enjeu pour les femmes, ni
souvent la mention du nom de l’agresseur
Peu de préoccupations des femmes concernant le caractère public et permanent
des traces numériques
Perception de FB comme d’un espace privé et contrôlé, peu de préoccupations
concernant la circulation de l’information ou la difficulté à effacer une
information sur FB
Enjeux pour l’intervention
 Le besoin de parler est sans fin et les espaces en ligne offrent de nombreux
avantages aux survivantes qui sont déjà présentes sur ces espaces, d’où
l’importance de les intégrer dans la stratégie d’intervention
 Les femmes veulent témoigner dans les espaces qu’elles connaissent
Nécessité pour les intervenants de connaître les plateformes, de pouvoir
présenter les avantages/risques de chacune
 Le témoignage en ligne est une porte d’entrée vers les ressources
o Importance pour les organismes d’être visible dans ces espaces
o Importance de permettre aux femmes de cheminer vers d’autres
ressources : Problématique de l’accessibilité aux ressources de suivi
individuel et en groupe, réflexion à mener pour aider les femmes à sentir
qu’elles ont la légitimité de contacter ces ressources
 Avantages des espaces en ligne avec possibilités d’interaction sécurisée
entre les survivantes
Limites de la recherche
oBiais de sélection :
• femmes scolarisées :
• prêtes à participer à une recherche,
• actives sur les médias sociaux puisqu’elles ont vu l’annonce
Témoigner de son expérience de l’agression est un privilège
(Mensah, 2012).
Témoigner de son expérience de l’agression en ligne l’est
encore plus.
Exemples de projets proposant des plateformes
en ligne pour accompagner le témoignage en
ligne d’agressions à caractère sexuel
The Voices and Faces Project : Organisme
à but non lucratif
Merci de votre attention
Aurousseau.chantal@uqam.ca
Thoer.christine@uqam.ca
Karine (18-24 ans)
« Maladie mentale »

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Témoigner sur les médias sociaux de son agression à caractère sexuel : expériences de femmes au Québec

  • 1. Témoigner de son agression sexuelle sur les réseaux sociaux : Quelle experience pour les femmes ? • Chantal Aurousseau et Christine Thoër, professeures au département de communication sociale et publique – UQAM Rym Benzaza, étudiante à la maîtrise en communication, UQAM • Mélanie Sarroino, RQCALACS; Tanya St-Jean, Je suis Indestructible • Lyne Kurtzman, Service aux collectivités de l’UQAM
  • 2. Augmentation des témoignages en ligne d’agressions à caractère sexuel  Le contexte du mouvement #BeenRapedNeverReported #AgressionNonDénoncée  Création d’une page Facebook BeenRapedNeverReported/AgressionNonDénoncée  Multiplication et mise en visibilité des témoignages d’agressions à caractère sexuel sur différentes plateformes en ligne et hors ligne (Savard-Moisan, 2016).
  • 3. Études sur le témoignage d’agressions à caractère sexuel dans l’espace public  «Sexual stories» (Plummer, 1995) Perspective interactionnisme symbolique Montre le caractère performatif du récit, qui articule des évènements, se construit dans un contexte et un cadre d’énonciation (plus ou moins favorable)  Le récit d’agression s’inscrit dans un cheminement («a journey») qui peut se dérouler sur de nombreuses années et nécessite que la personne se reconnaisse 1) comme victime 2) comme survivante  Un récit nécessaire à la reconstruction de l’identité Mais la mémoire traumatique est morcelée et fuyante, jamais figée («L’agression comme éclatement du soi», Guérin, 2017)
  • 4. Le témoignage en ligne d’agressions à caractère sexuel Différents projets communautaires visant à réunir des témoignages individuels pour leur donner une force nouvelle MAIS peu de travaux sur les témoignages d’agressions à caractère sexuel en ligne  Moors et Webber (2012) : Analyse de contenu d’un corpus de Yahoo Answers Un espace de parole nécessaire mais est-il sécuritaire?  Paveau (2015) : Analyse le projet Unbreakable de Grace Brown o La pancarte fait parler le corps en l’augmentant d’un artefact scriptural. o Modifie l’ordre du discours : la parole honteuse, taboue, culpabilisatrice de la survivante sort du tabou grâce au numérique et peut circuler.
  • 5. Spécificités d’Internet comme espace d’exposition de soi  La communication en ligne perçue par les acteurs comme «une communication privée en public» se déroulant dans «un lieu plus ou moins clos» (Cardon, 2010, p. 62) Internet : des espaces connectés et poreux Travaux sur la construction de l’identité en ligne o Différentes stratégies de communication des individus selon les plateformes o Rôle de la validation par autrui de ce que l’on expose (validation qui peut prendre plusieurs formes : commentaires, likes, etc.)
  • 6. Le récit numérique comme stratégie d’intervention Le partage des histoires en ligne permet d’ouvrir des dialogues à un niveau micro et macro (Lemelin, 2012) oreconnaissance de l’expérience individuelle au travers de sa mise en visibilité, faire sens du vécu grâce au récit opotentiel d’Internet qui élargit la participation à des formes d’expression moins exigeantes et permet la mise en commun des intérêts par le simple partage de l'information (Cardon, 2010) MAIS importance de réfléchir aux stratégies utilisées pour diffuser les récits (Lemelin, 2012) oL’anonymat des personnes qui s’engagent en ligne favorise les points de vue péremptoires et haineux oInégalités de la participation (reproduction des inégalités socioculturelles) oFaiblesse et volatilité de l’engagement des individus en ligne
  • 7. Objectifs de la recherche Cerner les expériences des femmes qui témoignent d’une agression à caractère sexuel via les médias sociaux • Documenter les formes, les espaces et les conditions de production du témoignage en ligne, l’appropriation des dispositifs • Cerner les motivations des femmes à témoigner en ligne, les significations de la démarche de témoignage en ligne, comprendre comment elle s’inscrit dans le parcours des femmes et cerner les conséquences qu’elles associent à cette démarche • Offrir des pistes pour ajuster le soutien offert par les partenaires aux femmes qui témoignent en ligne ou souhaitent témoigner en ligne
  • 8. Méthodologie Approche qualitative exploratoire par entretiens semi-dirigés centrés sur la démarche de témoignage en ligne o Entretiens réalisés en 2016 (face à face, échanges de courriels, Skype) o Question de départ : «Comment en êtes vous arrivée à ce témoignage en ligne?» o Thèmes de relance : Motivations à témoigner en ligne, contexte de production du témoignage en ligne, place dans le parcours personnel, choix de la plateforme, soutien à la production du message, nature du témoignage livré, conséquences du témoignage, autres démarches de recherche d’aide, besoin de soutien concernant la démarche de témoignage Échantillon : o Femmes 18 ans et + o Démarche de témoignage sur les médias sociaux au cours des 2 dernières années o Recrutement via les réseaux sociaux (plateformes des partenaires) Annonces renvoyant vers le site de ComSanté
  • 9. Annonce pour le recrutement sur le site de ComSanté
  • 10. Présentation de l’échantillon des femmes participantes Nombre de personnes qui nous ont contactées : N= 26 Entrevues débutées : 14 Entrevues terminées N= 12 pour plus de 27 témoignages en ligne Face à face : 7 En ligne : Courriel : 4 (+ 2 interrompues), Skype : 1 Secondaire V CEGEP en cours CEGEP acquis Universitaire (bacc ou maîtrise) en cours Universitaire (bacc ou maîtrise) acquis 1 3 1 1 6 Scolarité des participantes (8/12 ont au moins un diplôme post-secondaire) 18-24 ans 25-34 ans 35 et + 4 4 4
  • 12. Différentes formes du témoignage en ligne Grandes diversité des formes du témoignage en ligne selon les plateformes o Variété des formats textuels : poèmes, messages 140 caractères, billets de blogues pour certains illustrés de photos, textes de longueur variable sur Facebook, messages dans des forums, etc. o Vidéos publiées sur YouTube Témoignages multiples des femmes + stratégies de publication sur différentes plateformes connectées par des hyperliens o 1er temps : Blogues, Twitter (#AgressionNonDenoncée), pages Facebook communautaires, YouTube o 2ème temps : partage sur la page Facebook personnelle aux personnes de l’entourage (le plus souvent choisies) ou via Facebook messenger
  • 13. Pour la plupart, les femmes témoignent sur les médias sociaux où elles sont déjà actives Grande variété des plateformes utilisées Témoignages relayés sur Facebook
  • 14. Le rapport à l’anonymat Témoignages anonymes : 6 Témoignages anonymes mais relayés sur la page FB : 5 Témoignages nominatifs dès le départ : 16 L’agresseur n’est pas nommé mais indices souvent accessibles lorsqu’il s’agit d’une personne de l’entourage : 10 Mon vidéo n'est pas non plus anonyme sur YouTube, surtout que je mentionne mon nom complet dans mon vidéo. Personnellement, je trouve que les gens qui ont le plus d'impact sur moi (avec leurs commentaires) sont ceux pour qui j'ai un minimum d'estime et qui font partie de mon entourage proche. Sachant très bien que ces personnes allaient respecter ma décision de faire ce vidéo, l'avis des inconnus ne m'importe peu. Du coup, je n'ai pas ressenti le besoin de rester anonyme. Au contraire, je suis beaucoup plus fière d'assumer ouvertement ce qui s'est passé, car je n'ai pas honte de tout ça. (Sylvie, 18-24 ans)
  • 15. Les conditions de production du témoignage Une démarche largement autonome (femmes maîtrisant les médias sociaux où elles s’expriment) ◦ Peu de sollicitation de l’entourage sauf pour, certaines, pour informer, prévenir des conséquences anticipée de la diffusion du témoignage ◦ 2 femmes ont bénéficié d’aide pour la construction du témoignage (relecture orthographe, sélection de la vidéo) Sentiment - et besoin - de contrôle («Visibilité maîtrisée», Lemelin, 2012) ◦ Un discours livré sans interruption ◦ Où et quand elles le veulent ◦ À leur rythme ◦ Qu’elles adressent à qui elles veulent ◦ Où elles abordent ce qu’elles veulent! Entre la libération de la parole (écriture automatique) et le contrôle du récit
  • 16. Ne pas se préparer, «y aller au feeling» Comme j'en avais long à dire, c'était plus simple et plus rapide pour moi de me filmer. (…) Faire mon vidéo m'a pris le temps de le filmer, soit 25 min. Je ne me suis pas trop préparée d'avance, je voulais y aller au feeling. Les idées me venaient au fur et à mesure. (Sylvie, 18-24 ans) C’était vraiment sur un coup de tête, parce que j’ai vu l’annonce. Mais ça m’a comme donné une occasion de le faire. Sans occasion je ne pense pas que j’aurais témoigné sur internet. (Karine, 18-24 ans)
  • 17. Un texte, une démarche qu’on laisse murir J'ai commencé à écrire le texte et je l'ai laissé là. J'ai dû y retourner quelques fois avant de le terminer. J'ai hésité avant de l'envoyer en correction. Juste trouver une image pour l'illustrer me semblait dénué de sens. Tout le monde pourrait savoir maintenant. Puis, je l'ai fait parvenir à la fondatrice du blog X pour lequel j'écrivais déjà pour savoir si cette tribune était appropriée et si le texte était adéquat pour cette plateforme. Après une réponse positive, je lui ai demandé d'attendre avant de le publier. Je devais réfléchir à si je voulais me lancer, me dévoiler pour de vrai et trouver une image pour accompagner le texte. Après un moment de réflexion sur mes objectifs en voulant partager ce texte, j'en ai parlé à mon conjoint. Je voulais savoir ce qu'il en pensait et si c'était correct pour lui comme nous partageons un réseau d'amis, de collègues et de la famille. Je voulais savoir s'il était à l'aise avec le partage de mon vécu comme il serait touché par ses impacts lui aussi. (Gabrielle, 25-34 ans)
  • 19. Quelles significations au témoignage en ligne ?  Les significations du témoignage en ligne sont multiples et varient oselon les situations/contexte d’agression et nature du soutien social au sein de l’entourage oau fur et à mesure de la progression des femmes dans leur parcours de reconstruction (plusieurs témoignages dans le parcours et significations différentes) oselon les plateformes choisies (différentes fonctions qu’offre le dispositif)  Des éléments déclencheurs : o Le mouvement #AND o La souffrance et l’urgence de dire o La présence sur les RSN qui sont perçus comme des espaces naturels d’expression de soi
  • 20. Un moyen de canaliser la souffrance, de libérer la parole  Déposer/sortir l’agression, les émotions du corps, canaliser la souffrance, ventiler, libérer la parole Témoigner m’a permis de sortir l’agression du corps. (…) Pour relâcher l’événement en tant que tel. Sortir les paroles qu’il m’avait dîtes. Me rappeler que j’avais dit non (Sophie, 25-34 ans) J’avais besoin de le dire. J’étais et je suis encore frustrée de voir que moi, la victime j’ai perdu ma place dans la famille tandis que mon frère a gardé la sienne. Je me sentais sur le point d’imploser ou d’exploser. (Caroline, 35 ans et +)  S’exprimer dans un espace sécuritaire Facebook m’a permis de dire ce que je pensais publiquement tout en restant cachée, en sécurité (Caroline, 35 ans et +) «Écris-toi : il faut que ton corps se fasse entendre» (Cixous citée dans Paveau, 2015, p. 1) Significations J’ai senti que je laissais aller une partie de moi. Comme si un coup de vent avait emporté avec lui ‘’le mal’’ qui l’accompagnait. (Anouk, 18-24 ans)
  • 21. Un premier geste que l’on pose…  Un premier geste parce qu’on ne se sent pas le courage, qu’on ne se sent pas la légitimité ou qu’on n’a pas le temps d’aller vers une ressource spécialisée Ça faisait 3 ans que je me sentais extrêmement mal par rapport à mon agression, je n’avais aucune idée quoi en faire, comment en parler, comment ouvrir un dialogue à ce sujet là, comment recevoir de l’appui et je ne sentais pas que les moyens institutionnels, soutien médical et psychologique, je ne sentais pas que ça allait m’aider pis dans la vie, j’ai vraiment besoin de prendre action sur ce que je vis. (Maria, 18-24 ans) J'ai voulu aller consulter un psychologue en me croyant prête de le faire, mais finalement, j'ai remis ça (…) Je ne me sentais plus prête. Par contre, l'envie d'en parler continuait d'être présente, sans que je sache toutefois comment le faire (Sophie, 25-34 ans) J’ai écrit à un CALACS près de chez moi, mais elles m’ont dit d’appeler, je ne l’ai pas fait. Je trouve mon cas, bien petit par rapport à une fille qui s’est fait violer alors, je ne sais pas trop si c’est ma place. Je suis un petit cas. Je les ai rappelées par la suite mais je suis toujours tombée sur leur répondeur, je ne veux pas laisser de message car elles risquent de rappeler au mauvais moment. J’aimerais qu’il y ait un lieu comme pour les AA, un lieu de réunions connus où l’on puisse se rendre sans devoir faire une autre démarche. Juste se rendre. J’en suis là. (Caroline, 35 et +) Significations
  • 22. Une première démarche de recherche d’aide Au départ c’était vraiment parce que j’étais dans un processus judiciaire qui était en cours et je trouvais ça vraiment difficile, j’étais en pleine dégringolade, mes notes chutaient pis j’avais vraiment besoin de parler et j’avais pas de soutien autour de moi. Mon chum ne me soutenait pas, avec mes parents c’est un sujet un peu tabou pis j’étais en attente pour voir le psy mais c’était pas encore là fait que, c’était en attente là, j’étais sur une liste d’attente. En attendant, j’ai trouvé ce forum-là qui avait l’air bien parce que je me coupais au fond à ce moment là et je voyais que ça empirait. (…) J’ai commencé à écrire pis les gens ont été fins, ça m’a aidé à m’ouvrir. Et là j’ai un peu témoigné en partant de l’auto-mutilation. Qu’est ce qui m’a amené a l’auto- mutilation ? C’était le procès et le retour dans les agressions, fait que j’ai témoigné un peu des agressions. C’était comme pour ventiler dans le fond. (Anouk, 18-24 ans) (Un besoin de dire quelque part) que c’était arrivé, ce que je vivais, ce que je ressentais. De retrouver des gens qui vivaient dans le fond un peu les même choses. J’avais pas eu encore de suivi psychologique à ce moment là fait que je cherchais une bouée de sauvetage. (Laurianne, 35 ans et +) Significations
  • 23. Un moyen sécuritaire pour communiquer avec l’entourage, de confronter un proche  Le témoignage comme moyen de communication sécuritaire (mise à distance) avec les membres de la famille impliqués dans la situation d’agression (confronter le parent dans un lieu sécuritaire) On est dans le dévoilement aux proches plus que dans le témoignage public Facebook m'a permis de dire ce que je pensais publiquement tout en restant cachée ou en sécurité. Bien que je sache où il habite, je suis morte de peur à l'idée d'aller le confronter. J'aurais peur qu'il me "sacre une volée". Mon père était de l'époque des fessées mais ce n'était pas un homme violent mais je pense que si je le confrontais chez lui, il pourrait perdre le contrôle et me trainer dehors de chez lui. Alors, oui Facebook m'a permis de le confronter à moitié (Caroline, 35 ans et +) En même temps, les réseaux sociaux, s’ils avaient réagi de façon négative ils se seraient fait vraiment ramasser. (…) J’ai beaucoup d’amies féministes qui auraient été vraiment fâchées. Je ne sais pas si vous êtes au courant du victim blaming. En tout cas, blâmer les victimes. Je pense qu’ils auraient été vraiment ramassés s’ils avaient réagi de façon négative. J’y repense après coup, mais je n’y avais même pas pensé quand j’ai publié ça. (Karine, 18-24 ans) Significations
  • 24. Un moyen de dénoncer l’agresseur  Dénoncer l’agresseur, pour l’empêcher de recommencer  J’ai découvert qu’il avait fait ça avec une autre femme, je voulais l’empêcher de recommencer. (Sophie, 25-34 ans)  Voilà, je me suis sentie abusée mentalement et sexuellement par sa logique implacable, par son insistance, par sa façon d'outrepasser subtilement mon consentement. C'était insidieux. C'était des agressions. X (nom de l’agresseur), tu es un agresseur. Je te le dis, il faut le prendre. Fais quelque chose de cette affirmation, réfléchis, change. Je ne veux pas que ça se reproduise, avec personne. (Maria, 18-25 ans) Significations
  • 25. S’inscrire dans un collectif de survivantes  Le mouvement #AND offre une occasion, un contexte pour dire j’ai vu arriver ces témoignages-là des femmes… tout l’aspect judiciaire de l’affaire Gomeshi (…) cette vague de dénonciations avec le hashtag AgressionNonDenoncee m’a amenée à spontanément, inconsciemment à dénoncer (Clara, 35 ans et +) # AgressionNonDenoncee m'a donné un contexte pour placer le témoignage. (Gabrielle, 25-34 ans) Mais quand j’ai eu a dénoncer sur AgressionNonDénoncée, (…) ça, fait que ça faisait du bien d’embarquer dans le mouvement et dire : « moi aussi je l’ai vécu, moi aussi je suis là, moi aussi je suis debout » (Julie, 25-34 ans) Significations
  • 26. Aider d’autres femmes, redonner, exprimer la solidarité Des fois quand tu aides quelqu'un et tu ressens que tu l’as aidé, ça aide aussi à se sentir mieux, à prendre une distance sur tes problèmes, parce que des fois eux vivent aussi des trucs qui sont très similaires à toi, fait que c’est intéressant de voir ca aussi. (Anouk, 18-24 ans) J'ai voulu en parler parce que je suis certaine que ce vidéo pourrait donner espoir à quelques personnes.(…) Je voulais aussi faire comprendre qu'il est possible de s'en sortir. (Sylvie, 18-24 ans) Significations
  • 27. Se mobiliser au sein d’un mouvement collectif oS’inscrire dans un mouvement qui vise une prise de conscience collective et des actions pour changer les choses Je pense que j’ai voulu vraiment me rallier à ces femmes à ces personnes-là qui avaient le courage, puis c’était comme grossir les rangs, comme rentrer dans une manif, je suis d’accord avec ce qu’elles revendiquent, c’est exactement ça. (Clara, 35 et +) j’avais l’objectif d’être avec toutes ces femmes, créer le collectif de ces femmes qui ont témoigné.(…) Oui de faire partie, faire un nous. Puis, euh. c’était tellement des témoignages qui venaient de personnes tellement différentes (Clara, 35 et +) o Répondre à une demande de témoigner formulée par un organisme Parce qu'on en a toutes marre de la culture du silence! On nous a demandé de partager ce texte anonymement (Maria, 18-24 ans) Significations
  • 29. Les conséquences du témoignage Nombreux avantages associés par les femmes à la démarche de témoignage en ligne : Le témoignage est un outil d’empowerment Les plus souvent mentionnés se situent au niveau individuel plutôt que collectif (un peu différent des témoignages de PVVIH, Mensah, 2016) Certaines femmes témoignent de risques associés à la démarche du témoignage, notamment lorsque le témoignage se fait dans un espace en ligne où l’agresseur est connu
  • 30. Obtenir du soutien social Obtenir de l’écoute, de l’empathie, des conseils, de l’entraide, se sentir mons seule d’avoir le support de tout le monde, c’était incroyable. (Johanne, 35 ans et +) (dans le forum) C’est vraiment de l’entraide. C’est des gens comme toi et moi qui ont des problèmes aussi et qui ont ce problème-là aussi. (Anouk, 18-24 ans) Ah oui, ça a fait beaucoup de bien. On n’était plus toutes seules dans notre coin. On n’était pas folles, pas fabulatrices. Pas castrantes (…) on avait mal ensemble (Caroline, 35 ans et +) Possibilité de lire les commentaires sur le témoignage livré (le plus souvent positifs mêmes si limités), toutes les marques de l’attention sont bénéfiques Comment je peux expliquer… je sais que je ne suis pas toute seule, les commentaires, on le voit qu’on est pas toute seule mais de se faire répondre « je comprends » ça rajoute un côté plus, comme une petite laine… c’est plus comme ca que je le vois (Julie, 25-34 ans) (Ma vidéo) Elle est publiée depuis un mois. Je la laisserai toujours en ligne. Présentement elle a 880 vues. (Sylvie, 18-24 ans) Avantages perçus
  • 31. Gérer, redéfinir les relations avec l’entourage  Pouvoir expliquer son parcours, ses actions à l’entourage Encore aujourd’hui, je suis contente de l’avoir fait. Ça me permet de partager une partie de moi à des gens qui m’apprécient. (Sophie, 25-34 ans) Je pense que d’avoir témoigné en ligne, comme ça, et le fait que ma tante le sache, je pense que ça va me donner le courage de lui parler. (Karine, 18-24 ans)  Permet aussi d’identifier les personnes de l’entourage sur lesquelles compter Au final, je pense que c’est positif parce que ça m’a montré la vraie face de mon beau-père. Je n’espère plus rien. (Caroline, 35 ans et +) Avantages perçus
  • 32. Une brique à la (re)construction de son récit  Le témoignage active la mémoire, aide à faire sens d’une mémoire morcelée et fuyante je ne connaissais pas mon histoire (…) Je connaissais, j’étais très consciente que j’avais été violée. Ça je l’avais dénoncé mon violeur (…) mais mes agressions dans l’enfance ont été complètement enfouies. (…) je savais qu’il s’était passé quelque chose (…) mais je ne savais pas réellement quoi. Puis j’ai dénoncé (sur Twitter) puis je suis retournée (…) j’ai fait l’effort de retourner sur mon twitter et j’ai imprimé le document parce que je me suis dit: «mais qu’est ce que j’ai dit, qu’est ce que j’ai écrit »? Finalement, j’ai vraiment écrit deux périodes de ma vie où j’ai vécu des attouchements, petite enfance et jeune adolescence. (Clara, 35 ans et +) La première chose qui m’est venue quand je suis arrivée pour dire pourquoi je me coupais (sur un forum), c’est l’histoire avec mon frère et c’est vraiment étrange puisque j’en avais pas reparlé depuis plusieurs années. Depuis en fait , j’en avais parlé à personne, même les gens avec qui je parle de mon passé un petit peu (Anouk, 18-25 ans) Avantages perçus
  • 33. Progresser dans la reconstruction identitaire  Progresser dans la reconstruction de soi et prendre conscience de cette progression Quand j’ai décidé d’envoyer le texte ou de le partager par la suite, j’avais le sentiment de faire la bonne chose. Que ça me ferait du bien. Que je franchissais un pas important. Et quand ça a été fait, j’ai eu l’impression d’avoir un poids en moins sur les épaules. Pas l’impression d’avoir fini mon processus de guérison, mais plutôt d’avancer dans ce processus, à mon rythme. (Sophie, 25-34 ans) Avantages perçus
  • 34. Témoigner de la reconstruction identitaire  Progresser dans la reconstruction de soi, se reconnaître comme victime, puis survivante : travailler, réécrire son histoire (Mon témoignage est) un grand apport (dans mon parcours). Il illustre ma reconstruction à la face du monde. C’est gros comme phrase, mais c’est un peu ça quand même. (Gabrielle, 25-34 ans) C’est un autre moment où j’ai changé mon histoire (après la thérapie de groupe). Tu sais, c’était fini, là. Là, j’étais survivante après ça. Je n’étais plus victime. Je n’allais plus endurer cette merde-là! […] Moi, dans ma tête, ce n’était pas juste de changer mon histoire de victime à survivante. Ça, cet exercice-là, c’était de changer mon histoire de survivante à thriver ; de survivor à thriver. Quelqu’un qui est épanouie, qui utilises ses expériences pour pouvoir faire une différence dans la vie des autres. […] C’est vraiment… powerful de faire ça. (Johanne, 35 ans et +) Avantages perçus
  • 35. Sentiment de fierté à l’égard du témoignage produit Pendant que je me filmais, j'ai même ressenti du plaisir à en parler, car j'étais très fière de pouvoir en parler sans pleurer, sans être stressée ou avoir honte. (Sylvie, 18-24 ans) J’étais comme ma propre mère dans ça. C’est la première fois que j’ai été jusqu’au bout pour moi-même. Parce que toutes les autres fois, cette peur là, tout ce que j’ai vécu en le faisant… I would have quit. Mais je ne l’ai pas fait, cette fois-ci. Fait-que j’étais fière d’être passée au travers et d’être même capable de le montrer. (Johanne, 35 ans et +) Avantages perçus
  • 36. Constater la force d’un mouvement collectif qui va aider à changer les choses Ce n’est plus qu’un événement qui m’est arrivé mais aussi un enjeu de société trop peu discuté sur la place publique. Je souhaite que nous puissions en parler davantage afin que les personnes qui vivent une agression soit mieux outillées. (Gabrielle, 25-34 ans) Avantages perçus
  • 37. Le changement d’attitude de l’entourage Risques plus importants lorsque l’on dénonce dans un milieu ou l’agresseur est connu : jugement, rejet, isolement Les gens, on dirait que ça leur faisait un choc à eux aussi de réaliser qu’il y a quelqu’un qu’ils connaissaient, pour qui ils avaient de l’estime aurait pu faire quelque chose du genre. Donc ils préféraient le nier, et se dire bah non c’est pas vrai, elle doit mentir, elle cherche de l’attention (…) Je me souviens surtout de rumeurs et du fait que des gens qui commençaient de moins en moins à me parler (Hélène, 25-34 ans) Le jugement ou le changement de perceptions à notre égard, dans notre entourage, notre belle famille, notre milieu professionnel (Gabrielle, 25-34 ans) Comment pourrais-je dire à une femme de se lancer dans la fosse aux lions consciemment ? Je pense qu’il faut le faire sur un coup de tête. Aussi, si elle est prête à perdre beaucoup de monde. C’est fou comme on devient la grosse méchante et on perd l’appui des autres. (Caroline, 35 ans et +) Risques perçus
  • 38. Risques associés au dispositif technique Quand FB propose en ami, expose aux publications, offre un canal de communication à des personnes qui soutiennent l’agresseur Tout ce qu’il y a avant janvier cette année a été supprimé parce que ma mère a fait beaucoup de troubles avec mon FB. Puis à un moment donné, j’ai décidé que je supprimais tout, j’ai supprimé toutes les photos, les publications, j’ai tout effacé. Dans le fond, je me suis refait un nouveau Facebook (…) Mais , ma mère, elle s’ouvre un nouveau compte et elle passe par mes cousines, (Laurianne, 35 ans et +) j’ai décidé que je n’y allais plus pour un bout parce que j’avais besoin… je mangeais de la schnoutte d’elle, ma tante venait me donner de la merde sur Facebook, mais ma tante n’était pas au courant. Elle disait que ma grand- mère faisait pitié, elle me voyait plus, en tout cas… bref, culpabilité a 100 %, (Julie, 25-34 ans) Risques perçus
  • 39. Risques associés à la participation au mouvement #AND Voir la violence de certains commentaires sur les médias sociaux Les commentaires étaient aliénants. Tout acabit minimisant le vécu de ces femmes, pire, niant et insinuant la véracité de ces dénonciations, avec des propos dénigrants, des injures, des calomnies, de la haine envers ces femmes dénonçant l’indicible. J’ai écorché mes yeux, meurtri mon âme en suivant les échanges dans cette presse crasseuse, sensationnaliste ou sur Facebook. Et j’ai compris qu’il fallait que je me protège l’âme. (Clara, 35 ans et +) Caractère volatile de l’attention sur les médias sociaux : Je trouvais cela brillant de créer un événement dans l'actualité, si fort. Mon agression a été dénoncée, mais peu discutée par la suite. Après un an, je trouvais dommage que le mouvement s'essouffle déjà. Ce qui frappe sur les médias sociaux a un impact court et relatif dans le temps, il est éphémère. C'est pour cette raison que j'avais envie de le faire revivre, à ma façon. (Gabrielle, 25-34 ans) Risques perçus
  • 40. Risque de perdre la maîtrise… Je pense que le témoignage en ligne c’est mieux de le faire par après, quand tu es posée, que tu n’as plus autant d’émotions. Parce que quand tu écris ça reste et quand tu es sur le coup des émotions tu peux écrire des affaires que tu ne penses pas vraiment. (…) Le témoignage en ligne, je dirais de le faire en dernier, après que tu as eu le temps de respirer. Pour dire aux gens : je m’en suis sortie et on peut s’en sortir. Parce que si tu fais juste témoigner en milieu de processus, y va manquer des infos et les gens vont être trop curieux, je pense. Ils vont vouloir chercher plus loin, pis justement peut être que tu vas avoir des commentaires « tu devrais en parler à ci », les gens ne te connaissent pas sur FB, tu peux avoir des gens qui ne te connaissent pas tellement et ils sont qui pour te dire où aller ou quoi faire? (Karine, 18-24 ans) Risques perçus
  • 41. Conclusion  Beaucoup d’avantages associés à la démarche de témoignage en ligne Sentiment de contrôle très fort des femmes qui témoignent en ligne : les médias sociaux perçus comme des espaces sécuritaires (des variations par rapport aux témoignages des PVVIH, Mensah, 2016) o à la différence du témoignage livré dans les médias traditionnels o à la différence du dévoilement livré à l’entourage, des dénonciations à la police, à la justice L’anonymat du témoignage en ligne n’est pas un enjeu pour les femmes, ni souvent la mention du nom de l’agresseur Peu de préoccupations des femmes concernant le caractère public et permanent des traces numériques Perception de FB comme d’un espace privé et contrôlé, peu de préoccupations concernant la circulation de l’information ou la difficulté à effacer une information sur FB
  • 42. Enjeux pour l’intervention  Le besoin de parler est sans fin et les espaces en ligne offrent de nombreux avantages aux survivantes qui sont déjà présentes sur ces espaces, d’où l’importance de les intégrer dans la stratégie d’intervention  Les femmes veulent témoigner dans les espaces qu’elles connaissent Nécessité pour les intervenants de connaître les plateformes, de pouvoir présenter les avantages/risques de chacune  Le témoignage en ligne est une porte d’entrée vers les ressources o Importance pour les organismes d’être visible dans ces espaces o Importance de permettre aux femmes de cheminer vers d’autres ressources : Problématique de l’accessibilité aux ressources de suivi individuel et en groupe, réflexion à mener pour aider les femmes à sentir qu’elles ont la légitimité de contacter ces ressources  Avantages des espaces en ligne avec possibilités d’interaction sécurisée entre les survivantes
  • 43. Limites de la recherche oBiais de sélection : • femmes scolarisées : • prêtes à participer à une recherche, • actives sur les médias sociaux puisqu’elles ont vu l’annonce Témoigner de son expérience de l’agression est un privilège (Mensah, 2012). Témoigner de son expérience de l’agression en ligne l’est encore plus.
  • 44. Exemples de projets proposant des plateformes en ligne pour accompagner le témoignage en ligne d’agressions à caractère sexuel
  • 45.
  • 46.
  • 47. The Voices and Faces Project : Organisme à but non lucratif
  • 48.
  • 49. Merci de votre attention Aurousseau.chantal@uqam.ca Thoer.christine@uqam.ca Karine (18-24 ans) « Maladie mentale »

Hinweis der Redaktion

  1. Christine, tu reprends la parole ici? (ce serait bien)
  2. http://www.jesuisindestructible.com/ (Tumblr) https://www.facebook.com/jesuisindestructible/?fref=ts (Page FB) Plateforme web créée pour accueillir différentes formes de témoignages d’agressions sexuelles Axé sur la libération de la parole Possibilité de consulter les publications sur Tumblr et sur Facebook (sans inscription). Suite à la réception d’un témoignage, accompagnement de la personne et publication sur le fil d’actualité du groupe
  3. Novembre 2014 À la suite de #Been Raped Never Reported
  4. http://www.voicesandfaces.org/ (Site web) https://www.facebook.com/TheVoicesandFacesProject/?fref=ts (Page FB) Basé à Chicago Un site web qui reçoit 2 millions vues (visites) dès les 2 premiers mois de son lancement Des projets créatifs : Ateliers d’écriture en tournée (passage dans 6 villes au Canada) « The stories we tell » Expositions photos Ouvrage de témoignages « Lived through this » Publication « Leap » qui contient témoignages des ateliers d’écriture Documentaire audio L’anonymat n’est pas requis
  5. http://www.pandys.org/ (Site web) https://www.facebook.com/PandorasProject/?fref=ts (FB) http://pandys.org/forums/ (Forum) Groupe de soutien en ligne « Pandora’s aquarium » : forum et chat Chat avec invités spécialistes qui permet aux utilisateurs d’avoir accès à un service expert/professionnel. Une bibliothèque en ligne pour ceux qui ne trouvent pas d’infos sur les agressions sexuelles dans leurs bibliothèques ou qui ont honte de les emprunter « Sexual violence recovery retreat » Retraite de fin de semaine avec ateliers et support professionnel et communautaire. Accès à des articles et essais écrits par des survivantes