Evaluation de l’accord gouvernemental du fédéral : leurs priorités !!!
article RFFP Peut-il y avoir un seul budget public 22.12.11
1. 1
Peut-il y avoir un seul budget public ?
Enseignements des comparaisons allemande, anglaise et
française
Marie Samson, Eric Ginesy, Nicolas Noiriel et Rodolphe Gintz*
La typologie des systèmes de protection sociale mise au point par
l’économiste et sociologue danois Gøsta Esping-Andersen en 1990†
ne peut
suffire à décrire la diversité des systèmes nationaux qui, pour la plupart
d’entre eux, fonctionnent selon des logiques hybrides et variables selon les
risques considérés.
Tableau 1 : typologie des systèmes de protection sociale (Esping Andersen)
modèle
libéral
(beveridgien)
social - démocrate
conservateur
(bismarckien)
couverture universelle universelle
socio-
professionnelle
condition
d’accès
de résidence ou de
ressources
de résidence ou de
ressources
contributivité
financement impôts mixtes
cotisations (sur la
masse salariale)
niveau des
protections
minimal (forfaitaire)
élevé
(forfaitaire)
fonction du revenu
ou du statut
objectif
prévention de
l’indigence
redistribution des
revenus
maintien du revenu
des actifs
exemples
traditionnels
Royaume-Uni,
Irlande
pays scandinaves Europe continentale
Toutefois, en analysant les relations entre les acteurs pouvant jouer un
rôle d’assureur social (les ménages, et plus précisément les familles, le
marché et le secteur public), elle permet de comprendre rapidement les
fondamentaux des modèles types. D’un point de vue maastrichtien, par
exemple, il est facile de comprendre pourquoi dans un système libéral, la
décomposition du solde public n’affiche pas de solde des administrations de
sécurité sociale.
*
de la direction du budget (sous-direction des finances sociales, bureau de la santé et des
comptes sociaux).
†
The Three Worlds of Welfare Capitalism. Cambridge : Polity Press & Princeton :
Princeton University Press, 1990.
2. 2
Comparaison France / Allemagne
Les systèmes français et allemand de protection sociale peuvent sembler
en première analyse très proches. Tous deux caractérisés par un haut niveau
de protection (en 2009 : près de 600 Mds€ soit 31% du PIB en France et
plus de 720 Mds€ soit 29% du PIB en Allemagne) et essentiellement
financés par des cotisations sociales assises sur la masse salariale, ils sont
considérés comme des modèles bismarckiens par excellence.
Tableau 2 : la sécurité sociale au sein du système de protection sociale en
Allemagne
Allocation chômage de
solidarité
(Arbeitlosengeld)
Aide sociale pour les
personnes de plus de 65
ans.
Bureau d’aide sociale
(personnes non
assurées, sans-papiers).
Riester (facultatif) : plans
retraites par
capitalisation, aidés par
l’Etat sous forme de
prestations
complémentaires et de
déductions fiscales (10%
pop).
Retraites d’entreprise
(5% pop.)
Les mutuelles assurent la
couverture primaire des
personnes disposant d’un
certain niveau de revenu
(cf. ci-dessus).
Elles assurent
également, plus
marginalement, une
couverture
complémentaire et
facultative.
Affiliation obligatoire sauf
pour les indépendants
Régimes spécifiques au
secteur public.
La plus jeune des
branches (1995).
Couverture automatique
si affiliation à l’assurance
maladie (condition de
durée d’affiliation
préalable).
Affiliation obligatoire à
l’assurance chômage
légale pour tous les
salariés et indépendants.
Dérogation pour les
fonctionnaires, les
soldats et les personnes
âgées de 65 ans et plus.
Affiliation obligatoire à
l’assurance vieillesse
légale en principe pour
l’ensemble des salariés
et indépendants.
Dérogation pour les
fonctionnaires et les
pers. percevant moins de
400€ par mois.
La population agricole
est couverte par un
régime spécifique
(Alterversicherung der
Landwirte)
Affiliation à l’assurance
maladie légale en
principe obligatoire pour
tous les salariés.
Couverture par
assurances privées
possible pour les
personnes dont le salaire
dépasse un certain
plafond (~10% pop).
Libre choix de la caisse
d’affiliation par l’assuré
(parmi 6 organismes
autogérés)
AT-MPdépendancechômagevieillessemaladie
sécuritésociale
(deutscheSozialversicherung)
protection
complémentaire
assistance
sociale
De fait, comme le montre le tableau 2, seules l’existence d’une branche
« dépendance » formellement identifiée au sein de la protection sociale et
l’absence d’une branche « famille » (dépenses financées directement par le
budget fédéral) distinguent les modèles français et allemand de protection
sociale.
Le financement de la sécurité sociale est également proche dans les deux
pays comme le montrent les tableaux 3 et 4.
3. 3
Tableau 3 : le financement de la sécurité sociale en Allemagne
Prise en charge de
l’Arbeitslosengeld (2) :
21Md€ en 2008
Riester :
1. cotisations
supplémentaires (8% en
2008)
2. incitations fiscales ou
dotations supportées par
le budget fédéral (10
Md€ en 2008)
Aucune recette directe
du budget fédéral.
Suppression d’un jour de
congé.
Prise en charge par le
budget fédéral des
avantages non
contributifs : 44 Md€ en
2008 soit 18% du total.
Subvention fédérale
d’équilibre : 18 Md€
depuis 2004 (1) soit 7%
du total.
Subvention fédérale
d’équilibre :
-4 Md€ en 2008
-7 Md€ en 2009
-16 Md€ en 2010
tarification sectorielle
+
tarification spécifique à
l’entreprise
20 Md€ 2008
Poids / total : 99%
Taux : 1,95%
Assiette plafonnée à
3 750 €
26 Mds€ 2008
Poids / total : 69%
Taux : 2,8%
(3% en 2011)
Assiette plafonnée à
4 650 €
180 Md€ 2008
Poids / total : 74%
Taux : 19,9%
Assiette plafonnée à
4 650 €
156 Mds€ 2008
Poids / total : 96%
Taux : 15,5%
Assiette plafonnée à
3 750 €
AT-MPdépendancechômagevieillessemaladie
cotisationsociales
(382Mds€)
autres
ressources
financementdes
autrespiliers
(1) Transfert fédéral supplémentaire au titre des droits acquis en RDA : 20 Md€/an environ
(2) Allocation d’indemnisation chômage issue de la fusion du RMI allemand et de l’allocation
chômage longe durée, selon logique forfaitaire et universelle
Tableau 4 : le financement de la sécurité sociale en France
Allocation de solidarité
spécifique et allocation
équivalent retraite
(2,5 Md€)
cotisations des assurés
pour les régimes
complémentaires
obligatoires
Transferts FSV au titre des
prestations de solidarité:
14 Md€
Mutuelles : cotisations
des assurés.
Aide médicale d’Etat :
budget de l’Etat (0,6 Md€)
Couverture maladie
universelle : 1,4 Md€ de
ressources fiscales
CSG : 12 Md€ soit
24% dont 8,5 Md€ sur
les revenus d’activité
(17%)
Autres ressources
fiscales : 4 Md€ soit
8%
Autres ressources. fiscales
: 14 Md€ soit 10%
Subventions d’équilibre :
6Md€ en 2008 soit 4,5%
CSG : 59 Md€ en 2008
soit 36% dont 41 Md€ sur
les revenus d’activité
(25%)
Autres ressources
fiscales : 12 Md€ en 2008
soit 12%
tarification sectorielle
+
tarification spécifique à
l’entreprise
31 Md€ en 2008
Poids / total : 99%
Taux : 6,40%
- salariés : 2,40%
- employeurs. : 4,0%
Assiette plafonnée à
11 540 €
33 Md€ en 2008
Poids / total : 64%
Taux : 5,40% (à la
charge de
l’employeur)
Assiette non
plafonnée.
96 Md€ en 2008
Poids / total : 68%
Taux part plafonnée
(déplafonnée) : 14,95%
(1,70%)
- salariés : 6,65% (0,10%)
- employeurs : 8,3% (1,6%)
Assiette plafonnée à
2 885 €
75 Md€ en 2008
Poids / total : 45%
Taux : 13,55%
- salariés : 0,75%
- employeurs. : 12,75%
Assiette non plafonnée.
AT-MPchômagefamillevieillessemaladie
cotisationsociales
(213Mds€)
autres
ressources
financementdes
autrespiliers
En Allemagne, toutes les branches sont financées majoritairement par
les cotisations sociales, acquittées à parts égales par les employeurs et les
salariés. Le taux global de cotisations pour les assurances sociales de base,
4. 4
hors accidents du travail et maladie professionnelles et famille (mais y
compris dépendance et chômage) s’élève à 40,1% dont 19,6% à la charge
des employeurs et 20,5% à la charge des salariés.
En France, l’instauration de la contribution sociale généralisée (CSG)
en 1990 a contribué à diversifier le financement de la sécurité sociale,
notamment des branches maladie et famille. Néanmoins, le poids cumulé
des cotisations sociales et de la CSG sur les revenus d’activité représente
près de 70% des ressources de la branche maladie et près de 80% de celles
de la branche famille. Le taux global de cotisations pour les assurance
sociales de base, hors accident du travail et dépendance (mais y compris
chômage et famille) s’élève à 49,7 % dont 32,3 % à la charge des
employeurs et 17,4% à la charge des salariés.
Les deux modèles de financement présentent des contributions directes
du budget national au budget de la sécurité sociale. Les transferts de l’Etat à
la sécurité sociale ne répondent pas au même objectif qu’en Allemagne :
- le budget de l’Etat n’a pas vocation à assurer l’équilibre des régimes
sociaux. Il intervient à ce titre uniquement sur un nombre circonscrit
de régimes (régimes spéciaux de vieillesse, essentiellement, pour un
montant de 6,6 Mds€) et pour des montants plus limités qu’en
Allemagne,
- les contributions publiques visent en premier lieu à compenser aux
régimes sociaux des charges induites par une politique publique de
l’Etat (cf. tableau 5 infra)
Tableau 5 : le financement de la sécurité sociale française par le budget de
l’Etat
contribution publique dispositifs montants
solidarité Remboursement des prestations
de solidarité gérées pour le compte
de l’Etat par les régimes sociaux
(principalement la branche famille)
Allocation adulte
handicapé, aides
personnalisées
au logement
15 Md€
emploi Compensation par affectation de
recettes fiscales de la perte de
recettes issues des exonérations
de cotisations sociales décidées
par l’Etat (politiques de l’emploi)
1. allégements
généraux (bas
salaires, TEPA)
2. exonérations
ciblées
26 Md€
vieillesse Subvention d’équilibre à certains
régimes spéciaux de sécurité
sociale
SNCF, RATP,
ENIM, etc.
7 Md€
5. 5
Cette différence de nature des contributions des budgets nationaux aux
budgets de la sécurité sociale permet de comprendre que ce qui distingue les
modèles français et allemand réside dans la notion de pilotage financier des
deux systèmes.
En France, les déséquilibres annuels de la sécurité sociale sont financés
sur un horizon défini à l’aide d’une ressource fiscale, exclusivement affectée
à l’amortissement de la dette sociale, la contribution au remboursement de
la dette sociale (CRDS) affectée à un organisme spécialement conçu à cet
effet : la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).
L’horizon d’amortissement de la dette sociale est déterminé
indépendamment du montant à amortir : cet horizon est fixé à 2025. Une
disposition de nature organique prévoit en outre que « tout nouveau transfert
de dette à la CADES est accompagné d’une augmentation du produit
d’impositions de toute nature ou de la réalisation d’actifs affecté à la caisse
permettant de ne pas accroître la durée d’amortissement de la dette
sociale »‡
. Cette disposition, qui s’impose aux lois de financement de
sécurité sociale, vise à éviter le report du financement des prestations
sociales d’aujourd’hui sur les générations futures.
Le besoin de financement frictionnel, résultant du décalage infra annuel
entre encaissements et décaissements, est quant à lui financé par l’agence
centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), chargée de la
mutualisation et de la gestion de la trésorerie du régime général de sécurité
sociale.
En pratique, le respect de cette disposition oblige à augmenter les
prélèvements obligatoires, alors que la pression fiscale en France est déjà
élevée en comparaison de nos voisins européens pour affecter à la CADES
un supplément de dette sociale. Il s’agit donc d’une puissante incitation à
opérer des redressements par les dépenses.
Toutefois, depuis son entrée en vigueur, deux transferts ont eu lieu :
- le premier (2008) s’est accompagné d’un transfert de 0,2 point de
CSG, en provenance du FSV
- le second (2011) s’est affranchi partiellement de la contrainte en
repoussant l’horizon d’amortissement de 4 ans au titre des déficits
dits conjoncturels§
.
En Allemagne, l’absence de « cantonnement » des finances sociales
conduit le budget fédéral à porter l’ensemble de l’impératif de soutenabilité
‡
art. 4 bis de l’ordonnance constitutive du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la
dette sociale
§
cf. analyse de ce transfert par Carole Bousquet dans l’article « Gestion de la dette sociale :
la vertu contrariée par la crise ? » dans le numéro de septembre 2011 de la RFFP
6. 6
des finances publiques (règle de la Schuldbremse). L’Allemagne n’a pas fait
le choix d’un financement cloisonné ni d’un vecteur propre aux finances
sociales comme en France. Elle s’est en contrepartie donné quelques règles
fortes de pilotages des finances sociales. Quelques exemples illustratifs en
sont donnés ci-après.
En matière de risque maladie, les ressources des caisses d’assurance sont
centralisées par le fonds de santé (Gesundheitsfonds) et répartis entre les
caisses en fonction de la structure de la population couverte. L’équilibrage
est opéré en recettes, essentiellement par le prélèvement d’une prime
forfaitaire sur les assurés en cas de déficits de la caisse (Zusatzbeitrag). Les
caisses sont mises en concurrence entre elles.
En matière de risque vieillesse, la soutenabilité est pilotée par une
double règle :
- la loi fixe pour les 20 prochaines années le taux de cotisation
vieillesse maximum à ne pas dépasser : 20% en 2020 et 22% en
2030,
- la loi fixe également un niveau de « retraite nette garantie » (pension
nette des cotisations maladie et dépendance ramenée sur le revenu
moyen d’un actif ayant travaillé 45 ans) : de 54% en 2007, ce niveau
ne doit pas être inférieur à 46% d’ici 2020 et 43% d’ici 2030
(tendance à la baisse).
Au terme de la loi, des éléments de cadrage et des perspectives à moyen
et long terme (5 à 10 ans) sont présentés annuellement dans un rapport sur
l’assurance vieillesse (Rentenversicherungsbericht), déposé au Parlement
avant le 30 novembre. Ce rapport est accompagné au moins une fois par
législature d’un rapport plus large sur la couverture du risque vieillesse
(Alterssicherungsbericht).
Tout risque de non-respect des contraintes fixées en termes de taux de
cotisation et de niveau de retraite doit conduire à la mise en œuvre de
mesures structurelles.
Plus généralement, les dépenses de protection sociale de l’année passée,
au sens de la comptabilité nationale, font l’objet d’une présentation globale
au sein du Sozialbudget présenté par le gouvernement.
Un office fédéral de la sécurité sociale, indépendant mais rattaché au
ministère du travail et des affaires sociales, contrôle la bonne application
des dispositions juridiques applicables à la sécurité sociale et du bon
déroulement des relations financières entre la Fédération et la sécurité
sociale.
7. 7
Que retenir de la comparaison entre la France et l’Allemagne ?
1. Réputés bismarckiens, les systèmes français et allemand ont
pourtant largement recours à la solidarité nationale pour financer - soit par
de la fiscalité affectée, soit par des crédits budgétaires - les prestations non
assurantielles qui représentent des montants significatifs dans les deux
systèmes.
2. La solidarité nationale est également sollicitée dans les deux pays
pour compenser le déséquilibre financier du système :
- une couverture « différée » en France, via de la fiscalité
dédiée (CRDS et une part de CSG)
- une couverture « instantanée » en Allemagne, via une
subvention d’équilibre du budget fédéral ; la contribution
fédérale à l’équilibre des comptes sociaux allemands est
massive, permanente et croissante.
3. Les finances sociales, en France comme en Allemagne, ne sont de
fait pas autonomes.
4. Contrairement à la France, ce constat se traduit dans l’ordre
juridique allemand par l’absence de vecteur propre aux finances sociales :
le débat sur la soutenabilité des finances publiques et les arbitrages
nécessaires peuvent ainsi avoir lieu de façon unifiée dans le cadre de la
discussion du budget fédéral dont la trajectoire est dictée par la règle
constitutionnelle de la Schuldbremse.
Comparaison France / Royaume-Uni
Les dépenses de protection sociale sont financées essentiellement par
l’État. Elles sont retracées au sein du budget au travers de deux catégories
de dépenses :
- les departmental expenditure limits (DEL), qui fixent un plafond
limitatif, et s’apparentent aux crédits budgétaires de la loi de
finances française (exemple : dépenses de santé) ;
- les annually managed expenditure (AME), qui concernent des
dépenses « de guichet » et s’apparentent aux objectifs de dépenses de
la loi de financement de la sécurité sociale (exemple : pensions).
A l’inverse de la situation française, les dépenses de santé (103 Md£)
relèvent des dépenses limitatives (DEL) et non évaluatives (AME).
Il n’y a pas de « reste à charge » pour les patients, ou de partage du coût
avec d’autres organismes : la régulation pèse entièrement sur les offreurs de
soins.
8. 8
L’exécution budgétaire et la maîtrise des dépenses s’effectuent de
manière déconcentrée. Dès le vote du budget, les crédits sont
immédiatement déconcentrés en bloc aux organismes payeurs locaux, les
primary care trusts (PCT). Ces organisations administratives déconcentrées
reçoivent l’essentiel du budget destiné à financer les dépenses de santé et
sont l’unique financeur de soins au niveau local à la fois pour l’hôpital, la
médecine de ville et le médicament. Le reste du budget est consacré au
financement du ministère de la santé et des différentes agences nationales
ainsi que des missions de planification des agences régionales de santé.
Les outils budgétaires à la disposition du PCT pour mettre en œuvre la
régulation sont multiples étant donné la grande marge de manœuvre laissée
à la négociation locale dans l’application des mécanismes nationaux, tant en
médecine de ville qu’à l’hôpital. En tenant compte des directives nationales
et de la stratégie arrêtée au niveau régional, le PCT établit son budget
prévisionnel d’achat de soins primaires et secondaires comme il l’entend, et
a toute latitude pour mettre en place des mécanismes destinés à assurer le
respect de son exécution. Chaque PCT est tenu par la loi de clôturer ses
comptes à l’équilibre en fin d’exercice. Si tel n’est pas le cas, la
responsabilité de son équipe dirigeante est recherchée par la strategic health
authority (SHA), agence régionale de santé, ce qui peut se traduire, par son
licenciement. Dans ces conditions, on peut comprendre que le PCT exerce
sa mission avec diligence et que le budget soit généralement tenu !
Cette responsabilité très identifiée crédibilise et renforce les décisions du
PCT, puisque l’ensemble des acteurs locaux sait que les décisions prises
seront appliquées – la survie de l’équipe dirigeante étant en jeu. Elle place
également le PCT en position de force pour résister aux demandes
financières qui pourraient lui être transmises par le niveau central – le
directeur du PCT étant seul responsable d’un éventuel déficit.
Les prestations sociales sont servies par un guichet unique, Jobcentre
Plus, pour la quasi-totalité des allocations (chômage, prestations familiales,
pensions, minima sociaux) dans un objectif de gains de productivité, de
facilité des démarches des démarches et de renforcement de la lutte contre
les erreurs et la fraude. Elles sont financées par le budget de l’Etat.
Elles sont aujourd’hui composées d’un nombre important de prestations
compensant généralement les obstacles au travail (cf. tableau 6).
9. 9
Tableau 6 : principales prestations sociales au Royaume-Uni
188TOTAL
aide aux aidants (> 35 heures par semaine)1,50,5career’s allowance
prestations compensatrice pour les plus de 65 ans5,11,6T, Mattendance allowance
prestation compensatrice : composante « soins » et « mobilité »11,53,1Disability living allowance
personnes dont le handicap altère leur capacité au travail1,30,5T, C, Memployement and support allowance
équivalent de l’allocation adulte handicapé6,11,9T, C, Mincapacity benefit
28,6… invalidité et incapacité
aide au chauffage pour les bénéficiaires du pension credit2,712,6winter fuel payments
allocation différentielle associée à un mécanisme incitatif à
l’épargne des retraités (savings crédit)
8,22,7Mpension credit
complémentaire pour les personnes n’ayant accès aux fonds de
pension
13,25,7T, Cpensions sous conditions de revenus dont state
second pension
pension publique de base53,712,4T, Cbasic state pension
78,4… pour les personnes âgées
crédit impôt en fonction des revenus, du patrimoine4,75,8Mconcil tax benefit
aide au logement en fonction des revenus, du patrimoine, de la
localisation et du logement
20,04,8Mhousing benefit
personnes travaillant à temps plein (> 30 heures par semaines) et
percevant de faibles revenus ; fonction de la composition du foyer
(notamment frais de garde des enfants)
7,82,5Mworking tax credit
complément de revenu pour les personnes ne percevant pas
d’allocation chômage
8,31,9Mincome support
41,3… pour les personnes ayant de faibles revenus
allocation chômage conditionnée au versement préalable de
cotisations
1,11,3C, Mcontribution based jobseekers’ allowance
allocation chômage non contributive3,61,2Mincome based jobseekers’ allowance
4,9… pour les personnes sans emploi
allocation contributive versée pendant 39 semaines par
l’employeur
1,8ndCStatutory maternity, paternity, adoption pay
allocation complémentaire au child benefit qui s’impute sur
l’income tax
19,05,8Mchild tax credit
équivalent aux allocations familiales11,97,8child benefit
34,1… pour familles avec enfants
commentairescoûtnombretypeprestations…
catégories de prestations : taxables (T), contributives (C), sous conditions de ressources. Lorsqu’une
prestation relève de plusieurs catégories, les catégories principales sont soulignées.
nombre de bénéficiaires en millions
montants des allocations en Md£. Seules les principales allocations sont présentées.
Le système anglais et financé par l’impôt ; les cotisations (cf. tableau 7)
représentent 18% des recettes de l’État (99 Md£ sur un total de 548 Md£ en
2010-11)
Tableau 7 : les cotisations au Royaume-Uni
salariales patronales
salariés
11% jusqu’à 845 £ / semaine
1% au-delà du plafond
franchise de 110£ / semaine
12,8 % au dessus du plancher
(110£ / semaine)
non salariés
franchise de cotisations si les revenus sont inférieurs à
5.075 £ / an
Contribution forfaitaire de 125 £ /an si les revenus annules sont
compris entre 5.075 £ et 5.715 £ (5.900€ et 6.645€).
Taux de 8% entre 5.715 £ et 43.890 £ / an (+ 1%
supplémentaire au-delà).
autres cas contribution forfaitaire de 625 £ / an.
10. 10
Le produit de 99 Md£ en 2010-2011 provient en grande partie (85 Md£)
des contributions des salariés.
Ce produit est un calcul théorique. En effet, l'impôt sur le revenu est
également recouvré à la source en même temps que les contributions
(système pay as you earn) et, dans un nombre important de cas, les
versements effectués au fisc par les employeurs ne distinguent pas les
contributions sociales et les acomptes d'impôt sur le revenu.
Que retenir de la comparaison entre la France et le Royaume-
Uni ?
1. Système beveridgien, le système britannique de protection sociale
est financé essentiellement par l’impôt. Les cotisations sociales, de niveau
modéré, ne sont pas affectées au financement d’un risque social particulier.
2. L’organisation du système de soins repose, pour des raisons
historiques, sociologiques et d’organisation sur une structuration totalement
différente de l’organisation française.
3. Le budget regroupe l’essentiel des ressources et des dépenses
publiques, y compris les dépenses de santé (dépenses limitatives) et les
prestations sociales (dépenses évaluatives). Cette présentation unifiée
simplifie les arbitrages en dépenses et facilite ainsi le suivi du respect des
engagements du Gouvernement « toutes APU », par exemple dans le cadre
du fiscal Mandate (retour à l’équilibre courant structurel en 2014-15,
accompagné d’un objectif de baisse du niveau de la dette publique en
pourcentage du PIB).
4. La crédibilité des annonces gouvernementales est renforcée par
l’existence d’une évaluation externe des hypothèses initiales grâce à la mise
en place de l’office for budget responsability. L’évaluation ex ante des
effets redistributifs des politiques publiques est conduite de façon
systématique.
5. Les dépenses de santé ont fortement crû au cours de la dernière
décennie, et restent préservées à horizon 2014-15 ; toutefois, une remise en
cause profonde de la gouvernance actuelle est à l’ordre du jour. A l’inverse,
les autres dépenses sociales contribuent fortement à l’effort de
redressement, tout en se recentrant sur la lutte contre la pauvreté des
enfants et la préservation du pouvoir d’achat des retraités, dans le cadre
d’une politique d’activation des dépenses sociales au service du retour à
l’emploi.
11. 11
Quels enseignements pour nos budgets publics ?
Les liens entre les deux lois financières (projet de loi de finances ; projet
de loi de financement de la sécurité sociale) sont nombreux. Depuis la loi
organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS),
la forme des lois financières et la nature du débat parlementaire ont été
rapprochées.
Les engagements européens en matière de déficit public englobent
l’ensemble des administrations publiques.
Les recettes de l’Etat et de la sécurité sociale sont des prélèvements
obligatoires qui reposent in fine sur des entreprises et des ménages. Il existe
des relations financières importantes entre l’Etat et la sécurité sociale : une
annexe spécifique du projet de loi de finances lui est consacrée chaque
année**
!
Bien que partageant des objectifs, une forme et un cadre organique
largement commun, les lois financières diffèrent sur de nombreux aspects.
Tableau 8 : caractéristiques des PLF et des PLFSS
projets de lois de finances (PLF) projets de lois de financement (PLFSS)
Cadre organique ◼ loi organique relative aux lois de finances (2001) faisant
suite à l’ordonnance organique de 1959
◼ loi organique relative aux lois de financement de la
sécurité sociale (2005), suite à la loi organique de 1996
objectifs ◼ fixer la nature, le montant et l’affectation des ressources
et des charges
◼ définir l’équilibre financier qui en résulte
◼ définir les objectifs et les résultats des programmes
◼ en tenant compte d’un objectif économique défini
(pas de définition dans la LOLFSS des objectifs)
◼ définition des objectifs de recettes, de dépenses et de
solde par risque
◼ importance de l’équilibre (portée différente PLF)
◼ présentation des objectifs de qualité et d’efficience
forme ◼ une loi (article), accompagnée de nombreuses annexes,
essentiellement thématiques par politique publique (PAP)
◼ une loi (articles) et 9 annexes présentant des axes
d’analyse (recettes, comptes, PQE, etc.)
année(s)
couverte(s)
◼ année n+1
◼ les années n-1 et n sont couvertes par des textes
spécifiques (resp. loi de règlement, loi de finances
rectificative)
◼ année n-1 : arrêté des comptes
◼ année n : rectification du PLFSS n
◼ année n+1
◼ années n+2 à n+4 (tendanciel), glissantes
principes ◼ universalité (l’affectation est une exception)
◼ non contraction recettes et dépenses
◼ limitativité des crédits
◼ principe général d’affectation des recettes (pas
d’équivalent du BG) porosité entre recettes et dépenses
◼ vote d’objectifs de dépenses
pilotage / outils ◼ pluriannualité : plafond de dépense par mission,
◼ norme de dépense, charte de budgétisation
◼ détail des dépenses : justification premier euro
◼ pluriannualité : dépense totale des ROBSS, ONDAM,
mesures nouvelles, niches
◼ pilotage par le solde
◼ dépenses définies en Md€ (1 décimale)
comptabilité ◼ comptabilité budgétaire : caisse
◼ croisement destination, nature
◼ comptabilité générale (distinction des risques)
type de dépenses ◼ masse salariale, charge de la dette, PSR, interventions
dont guichets, fonctionnement, investissements
◼ dépenses de guichet, essentiellement : retraites, AF,
maladie (sauf hôpital : appareil productif)
projets de lois de finances (PLF) projets de lois de financement (PLFSS)
Cadre organique ◼ loi organique relative aux lois de finances (2001) faisant
suite à l’ordonnance organique de 1959
◼ loi organique relative aux lois de financement de la
sécurité sociale (2005), suite à la loi organique de 1996
objectifs ◼ fixer la nature, le montant et l’affectation des ressources
et des charges
◼ définir l’équilibre financier qui en résulte
◼ définir les objectifs et les résultats des programmes
◼ en tenant compte d’un objectif économique défini
(pas de définition dans la LOLFSS des objectifs)
◼ définition des objectifs de recettes, de dépenses et de
solde par risque
◼ importance de l’équilibre (portée différente PLF)
◼ présentation des objectifs de qualité et d’efficience
forme ◼ une loi (article), accompagnée de nombreuses annexes,
essentiellement thématiques par politique publique (PAP)
◼ une loi (articles) et 9 annexes présentant des axes
d’analyse (recettes, comptes, PQE, etc.)
année(s)
couverte(s)
◼ année n+1
◼ les années n-1 et n sont couvertes par des textes
spécifiques (resp. loi de règlement, loi de finances
rectificative)
◼ année n-1 : arrêté des comptes
◼ année n : rectification du PLFSS n
◼ année n+1
◼ années n+2 à n+4 (tendanciel), glissantes
principes ◼ universalité (l’affectation est une exception)
◼ non contraction recettes et dépenses
◼ limitativité des crédits
◼ principe général d’affectation des recettes (pas
d’équivalent du BG) porosité entre recettes et dépenses
◼ vote d’objectifs de dépenses
pilotage / outils ◼ pluriannualité : plafond de dépense par mission,
◼ norme de dépense, charte de budgétisation
◼ détail des dépenses : justification premier euro
◼ pluriannualité : dépense totale des ROBSS, ONDAM,
mesures nouvelles, niches
◼ pilotage par le solde
◼ dépenses définies en Md€ (1 décimale)
comptabilité ◼ comptabilité budgétaire : caisse
◼ croisement destination, nature
◼ comptabilité générale (distinction des risques)
type de dépenses ◼ masse salariale, charge de la dette, PSR, interventions
dont guichets, fonctionnement, investissements
◼ dépenses de guichet, essentiellement : retraites, AF,
maladie (sauf hôpital : appareil productif)
Une fusion des lois financières serait logique compte tenu des éléments
avancés supra notamment l’interpénétration croissante des finances de
l’Etat et de celles de la sécurité sociale même si la genèse des LFSS résulte
d’une volonté de mieux maîtriser recettes et dépenses : ce n’est que depuis
1996 que le Parlement vote les décisions de financement de la sécurité
sociale. Il s’agit de l’option de rapprochement des lois financières présentant
la logique d’intégration maximale.
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Bilan des relations entre l'État et la protection sociale
12. 12
D’autres options sont également envisageables :
- l’amélioration de la coordination entre lois financières qui
garderaient leur autonomie, déjà largement mise en œuvre par les
directions en charge de l’élaboration de ces lois,
- la mise en place d’une discussion parlementaire commune : un
débat unique sur l’objectif de finances publiques, éventuellement
assorti de la définition d’objectifs de dépenses et de recettes
précéderait le vote du PLF et du PLFSS (deux parties distinctes).
Cette option semble toutefois perdre de son intérêt avec les lois de
programmation des finances publiques.
- la mise en commun des recettes : un vote unique serait organisé sur
l’ensemble des prélèvements obligatoires, précédant un vote sur les
dépenses de l’Etat, limitatives pour l’essentiel, puis un vote sur
celles de la sécurité sociale, éventuellement évaluative. Ce schéma
est proche du modèle anglais.
Quelle que soit l’option envisagée, un rapprochement des lois
financières, surtout s’il est mise en œuvre dans une perspective d’unification
des outils de pilotage des finances publiques, posera la question de
l’intégration des dépenses publiques de sécurité sociale dont la trajectoire
n’est aujourd’hui prévue dans aucun texte financier (il s’agit notamment des
régimes conventionnels : régimes d’assurance chômage et régimes de
retraite complémentaire).