1. Berlin, Budapest, Cologne, Vienne et Munich, le 23 septembre 2012.
Cher Monsieur le Borgn´,
Cher Monsieur le Député,
Nous vous addressons une deuxième lettre ouverte en cette rentrée
parlementaire chargée, sur le Traité sur la Stabilité, la Coordination et la
Gouvernance de l’Union Economique et Monétaire (TSCG), le Mécanisme
Européen de Stabilité (MES).
En reprenant votre profession de foi du 2ème tour des législatives 2012, nous
avons noté que vous ne preniez pas alors position pour ou contre le TSCG, ni
pour ou contre le MES. Nous sommes remontés jusqu’au 17 août 2011, pour
trouver - suite à une nouvelle rencontre entre Madame Merkel et Monsieur
Sarkozy -, la déclaration suivante1 :
« Reste la fameuse « règle d’or ». L’obligation de rigueur budgétaire
incombant aux Etats ne saurait être contestée. Sans pour autant que cela prenne
la forme d’une bien médiocre opération électoraliste par Nicolas Sarkozy.
Opération d’autant plus consternante qu’elle semble, dans le chef de la droite
française, détachée de tout souci de relance de la croissance. »
La seule différence majeure depuis plus d’un an et votre déclaration au sujet de
« la règle d’or », est le changement de gouvernement en France. De nombreux
évènements financiers et politiques ont changé à la marge les paramètres de la
crise financière en Europe, qui n’en finit pas de servir de prétexte à des
politiques d’austérité sans imagination, ni véritable offensive face aux marchés
financiers dérégulés, et encore moins un bilan des prêts généreux aux banques
faits par la Banque Centrale Européenne en 2011.
Comme vous siégez à la Commission des Lois, vous ferez partie des premiers à
lire une loi « organique » qui semble promise à la discussion fin septembre début
octobre, pour intégrer ce traité dans le droit français.
Que dit le TSCG – qui n’a pas changé depuis sa négociation entre Nicolas
Sarkozy et Angela Merkel - ? Il soumet les États européens à l’austérité et
renforce les sanctions :
1
http://www.pyleborgn.eu/2011/08/loccasion-manquee/
1
2. Article 3 : « La situation budgétaire […] d’une partie contractante est en
équilibre ou en excédent […] avec une limite inférieure de déficit structurel
de 0,5 % du produit intérieur brut […] Les règles énoncées prennent effet
dans le droit national […] au moyen de dispositions contraignantes et
permanentes, de préférence constitutionnelles».
La règle d’or est inscrite en toutes lettres avec un déficit structurel maximal de
0,5% du PIB (3% jusqu’à présent). La définition de ce déficit structurel est elle-
même déjà très contreversée et son interprétation varie en fonction des
institutions comme le précise cet exemple : „en 2011, le déficit structurel de la
France était évalué à 3,4 % du PIB par le FMI, à 3,7 % par Bercy, à 3,9 % par la
Cour des comptes et à 4,1 % par la Commission européenne2.“ Pour atteindre les
3%, 30 milliards d’euros doivent être trouvés. L’obligation est également faite
aux États de réduire leur dette à un rythme imposé si elle excède 60% du PIB.
Ces mesures doivent être traduites dans le droit national. L’inscription dans la
Constitution n’est certes pas obligatoire mais, en tout état de cause, l’État doit
s’engager à cette hauteur :
Article 3 encore : «Un mécanisme de correction est déclenché
automatiquement si des écarts importants sont constatés par rapport à
l’objectif (…). Ce mécanisme comporte l’obligation (…) de mettre en œuvre
des mesures visant à corriger ces écarts. (…) Le calendrier de cette
convergence (vers l’objectif de déficit fixé à chaque État) sera proposé par
la Commission européenne»
En France, les médias rapportent pour l’heure – et seul le texte définitif
permettra d’y voir plus clair – que la Cour des Comptes jouerait un rôle plus
important dans l’automaticité des rappels à l’ordre à la règle d’or. Si tel est le
cas, pourquoi alors continuer à discuter des volumes des dépenses et des
recettes publiques à l’Assemblée Nationale ? Ne prendriez-vous pas le risque de
réduire votre propre rôle ?
L’automaticité des mesures coercitives permettra d’éviter tout débat. Non
seulement la Commission Européenne décide du calendrier et des mesures,
forcément libérales, imposées aux États, mais assure aussi le service après-
vente. En outre, l’article 7 engage les États à soutenir les recommandations de la
Commission sauf si «une majorité qualifiée» est opposée à la décision.
Article 8 : « Si […] la partie contractante n’a pas respecté l’article 3 (déficit
à 0,5% du PIB), la Cour de justice de l’Union européenne sera saisie […].
Lorsque […] une partie contractante considère qu’une autre n’a pas pris
les mesures nécessaires […], elle peut demander que des sanctions
financières soient infligées».
La Commission européenne ou l’un des États peut, en cas de non-respect des
objectifs, saisir la Cour de justice et demander des sanctions, « une somme
forfaitaire ou une astreinte adaptée aux circonstances et ne dépassant pas
0,1%» du PIB. Un verrou supplémentaire.
2
http://blogs.mediapart.fr/blog/pierre-khalfa/090912/les-contre-verites-et-tours-de-passe-passe-de-m-besset
2
3. Le TSCG, s’il est adopté, sera central pour automatiser contre les peuples les
politiques austéritaires en Europe. Si un Etat l’applique, celui-ci pourra solliciter
le MES, et bénéficier dans certaines circonstances des nouvelles mesures
adoptées par la banque centrale européenne le 6 septembre dernier3.
Cet axe de la rigueur automatique en Europe, semble devoir concerner aussi les
Français de l’étranger qui tout en attendant les arbitrages budgétaires en France,
s’inquiètent à juste titre de lire dans la presse, que le Ministère des Affaires
étrangères4 ne fera pas partie des Ministères prioritaires. Nous attendons encore
après le correctif budgétaire le futur nouveau budget.
Dans ce cadre d’austérité annoncé par le gouvernement, nous voyons mal
comment vous pourrez soutenir les vœux – même en cinq ans - que vous aviez
exprimés dans votre profession de foi concernant le « développement du réseau
consulaire » - notamment en Allemagne -, le soutien au réseau des Instituts
culturels ou la transformation de l’Assemblée des Français de l’Etranger (AFE) en
collectivité publique.
Nos questions :
- Allez-vous joindre votre voix à la nôtre et réclamer que vos concitoyens
puissent s’exprimer par référendum sur ce traité TSCG si controversé et
développer des alternatives56?
- Demanderez-vous en commission des lois, à ce que toute proposition
législative soit rendue publique le plus vite possible?
Nous vous souhaitons une agréable rentrée parlementaire. Nous serons au plaisir
de vous accueillir à nouveau à Munich le 5 octobre lors de la soirée anniversaire
de l’ADFM. En attendant votre réponse.
Notre lettre et votre réponse seront communiquées à la presse francophone de la
7ème circonscription.
Nous vous adressons nos salutations amicales et respectueuses.
Signataires :
Pierre Macudzinski – Front de Gauche (Budapest) ; Katia Fuchey - Front
de Gauche (Budapest) ; Marie Barbara Schimmel – Front de Gauche
(Berlin) ; Philippe Carnoy – Front de Gauche (Cologne) ; Pierrick
Nussbaum - Front de Gauche (Bavière) ; Eric Bourguignon - Front de
Gauche (Munich)
Jérôme Segal, universitaire français à Vienne
7ème circonscription des Français de l´Etranger
3
http://www.ecb.int/press/pressconf/2012/html/is120906.en.html
4
http://www.gouvernement.fr/premier-ministre/discours-du-premier-ministre-a-la-conference-des-
ambassadeurs-0
5
http://www.humanite.fr/politique/petition-pour-un-referendum-sur-le-pacte-budgetaire-europeen-501187?x
6
http://www.france.attac.org/articles/non-lausterite-permanente-refusons-le-pacte-budgetaire-ouvrons-le-
debat-en-europe
3