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Parution Double Sens dans le magazine Marie France - Août 2014
- 1. V
août 2014 - www.mariefrance.fr - 445
© david lefranc.
TEN
DAN
CES
ivre le quotidien d’une île
sur le Mékong, ne plus se
contenter de passer en tou-riste
lambda, voyager autre-ment…
C’est devenu possible avec l’essor
récent du tourisme solidaire, qui associe
balade et aide au développement. Au
Cambodge, en acceptant de se doucher
au seau, de dormir sans ventilo ni clim,
de suivre le soleil – coucher avec les
poules, lever au chant du coq –, on peut
alors décaper ses habitudes, se dépayser
avec âme. L’expérience, passionnante, se
déroule à Koh Phdao, hameau aussi ra-vissant
que perdu sur l’île de Roungeav,
à plus de 300 km des ruines d’Angkor. Pas
d’eau courante ni d’électricité, mais de-puis
plus d’un an, un vrai coup de pouce
donné aux habitants grâce aux initiatives
d’une équipe de développement rural lo-cal
(CRDT, Cambodian Rural Develop-ment
Team), relayées par une agence
française de voyage solidaire, Double
Sens. Si l’on veut résider à Koh Phdao
pour quelques jours, on s’engage à aider
à construire poulailler, toilettes, réservoir
d’eau, etc. Chaque groupe de voyageurs
est associé à l’achèvement d’un projet
choisi par son bénéficiaire : en mai
dernier, 21 avaient déjà abouti.
Une nature toute-puissante
Il s’agissait donc de découvrir le séjour
proposé aux lectrices de marie france (voir
encadré). À l’identique ou presque. Faute
de temps et d’autres touristes, il n’y a pas
eu de chantier. Atterrissage à Siem Reap,
à côté du site archéologique d’Angkor,
classé depuis vingt ans au patrimoine
mondial de l’Unesco. Du IXe jusqu’à leur
chute au XVe siècle, les souverains d’un
vaste empire khmer firent édifier près de
200 monuments dans une zone où la na-ture
affiche sa toute-puissance. Dès
l’arrivée, son envahissante luxuriance
fascine. Dans les jardins, les frangipa-niers
s’épanouissent dans la moiteur du
jour, les feuilles des palmiers jouent le
gigantisme. À l’étal des marchés, fruits
du jacquier, mangoustans, ramboutans
AU CAMBODGE EN VOYAGE SOLIDAIRE
participer À un mode
de vie traditionnel
dans des paYs du bout
du monde, et mÊme
donner un coup
de pouce sur place :
ce nouveau tourisme
a le vent en poupe.
eXpérience au bord
du méKonG, avec
une balade conÇue
pour MF et
ses lectrices.
par MartIne azouLaI
- 2. particulière des voyageurs. Un peu
août 2014 - www.mariefrance.fr - 447
TEN
DAN
CES
© david lefranc, pierre-étienne vincent/double sens, martine azoulai.
et mangues se pavanent. Sur l’immense
site où l’on circule en tuk-tuk (carriole
motorisée), la forêt étale sa force specta-culaire.
Pour accorder aux visiteurs
(3 millions prévus cette année) le plaisir
d’un décor romantique, les archéologues
ont laissé d’immenses fromagers écheve-ler
leurs racines autour des temples du
Ta Prohm. Cet ensemble de sanctuaires
et de monastères, bâtis au XIIe siècle,
s’éparpille sur 60 hectares.
Le passé omniprésent
Même lors d’une visite éclair, il faut
s’accorder le temps de rêver, d’écouter les
oiseaux, de contempler les pierres
affaissées piégées par les arbres. On
visitera aussi le célèbre Bayon, temple
royal aux cinquante-quatre tours ornées
chacune de quatre immenses visages
presque identiques. Plus de deux cents
sourires bouddhiques cernent le visiteur.
L’un des attraits du Bayon réside dans ses
bas-reliefs. Ils mettent en scène la guerre,
mais aussi un quotidien parfois inchangé
depuis le XIIe siècle : paysans qui cuisinent
leur riz, pêchent, vendent au marché.
Construit à la gloire du bouddhisme, le
Bayon comporte aussi de nombreuses
références hindouistes, tout comme le
gigantesque Angkor Vat, lieu de culte si
emblématique de la gloire de l’empire
khmer qu’il figure sur le drapeau du pays.
Cette présence religieuse éclectique a
traversé le temps, comme on l’a constaté
à Koh Phdao.
Poisson à la citronnelle et au galanga,
soupe de crevettes au lait de coco… Les
dîners sont exquis à Siem Reap, en crois-sance
exponentielle avec ses 100 000 habi-tants,
plus de 150 hôtels et des marchés à
foison. Ensuite, au lit. Demain, la route
sera longue. Compter huit heures pour
atteindre Sambor, village au bord du
Mékong d’où l’on embarque pour l’île de
Roungeav. On devine l’approche des villes
à la densité soudaine de motos et vespas.
Souvent flanquées de bananiers et de
manguiers, les maisons sur pilotis de bois
ou de béton se coiffent de tuiles, de tôle
ou de palmes. Un décor bucolique que
À vélo, cernés par une végétation
luxuriante, on prend le temps de sentir et
d’écouter l’histoire des temples d’Angkor.
l’on retrouvera sur l’île. La route cahote
le long de plantations d’hévéas, de
champs de manioc et de rizières. Partout
des chantiers, parfois des vaches, des
zébus, et des bâches pour attraper les cri-quets.
Attirés la nuit par des lampes, ils
se cognent au plastique avant de tomber
dans des bacs plein d’eau et finissent
grillés en en-cas croustillants.
La découverte du village
De Sambor, le Mékong se traverse en
barque à moteur. Le beige de l’eau
tranche avec le ciel couleur vert orage.
On longe des berges très érodées où s’ac-crochent
des arbres aux racines à vif. La
vie du fleuve se dévoile : pose des nasses
d’osier pour la pêche dans la mangrove,
lessive faite au fil de l’eau, baignades…
Après l’accostage, grimpette jusqu’au
« homestay », une grande maison sur pilo-tis.
Deux escaliers de bois, l’un à l’est,
côté route, l’autre plein ouest face au
fleuve et au soleil couchant, la desservent.
Parois en latanier, sol en lattes de bam-bou
très douces à la plante des pieds et
découverte de la chambre, délimitée par
un rideau dans l’un des angles d’une
vaste pièce à vivre. Une moustiquaire se
déploie en dais au-dessus d’un matelas
fin qui couvre presque tout l’espace. Pré-voir
un drap léger et une lampe de poche.
Les toilettes sont côté ouest, en bas, comme
la douche, installée côté est, où l’on
s’ébroue en s’arrosant à la bassinette.
Savri, la propriétaire, une dame aux che-veux
courts et gris, menue comme une
souris, est originaire de Sambor. Elle s’est
installée en 1998 à Koh Phdao pour suivre
son mari. Son fils vit tout près, sa fille
travaille au centre de formation du CRDT
à Kratié où elle s’est instruite.
Le village compte huit autres familles d’ac-cueil,
il y en a cinq de plus à Samphin, le
bourg voisin. Pour plus d’équité, chacune
prend son tour pour loger les touristes,
comme le signale un panneau. Ce que ne
comprennent pas toujours les quelques
routards en vadrouille qui voudraient
choisir leur chambre et se faire servir des
repas à leur gré. Or on s’attable à heures
fixes et il faut du temps pour préparer les
repas. À eux seuls, ils valent l’escale à Koh
Phdao. Les plats mêlent avec virtuosité le
sucré, le salé et l’acidulé, associant porc
ou poisson à l’ananas, au tamarin et au
prahok, du poisson fermenté, ingrédient
de base des plats khmers. Le CRDT a ini-tié
les six cuisinières qui travaillent en
binôme à l’hygiène et aux goûts occiden-
Ici, on n’attend aucune compétence
de coeur et de volonté suffisent.
Ces voyageurs Double
Sens participent
à la construction
d’un poulailler pour
une famille khmère.
Le jour de la fête
des morts,
les offrandes
sont déposées au
Temple de
Banteay Srei,
aussi appelé
la Citadelle
des femmes.
Sur le site
d’Angkor,
le Temple
du Bayon se
compose d’une
cinquantaine
de tours à quatre
visages, chacun
tourné vers un
point cardinal.
Près de la ville
de Kampong
Chnang, la pêche
sur le lac Tonlé
Sap est une
tradition
ancestrale.
Une mère et sa
petite fille vendent
des poissons
fermentés au
marché de Sambor.
La technique
du tamisage du riz
demeure immuable.
Instants de lecture
et de recueillement sur
le site d’Angkor Vat.
- 3. août 2014 - www.mariefrance.fr - 449
taux (pas trop d’arêtes ni de piment).
L’équipe de développement rural a minu-tieusement
balisé le terrain en formant
guides, marins, etc. dans les familles enga-gées
dans le projet touristique.
Protéger les dauphins
Pourquoi s’être implanté à Koh Phdao ?
Pour les dauphins. De Kratié, à 40 km au
sud de Sambor, jusqu’à la frontière lao-tienne
au nord, le Mékong n’abrite plus
que 85 dauphins d’eau douce (selon le
comptage du WWF), qui s’ébattent là où
le fleuve est plus profond. L’une de ces
piscines naturelles fait face à Koh Phdao.
Aider les pêcheurs à diversifier leurs re-venus,
avec l’écotourisme notamment,
contribue ainsi à limiter la surpêche et
protéger les dauphins. Néanmoins, ils
restent menacés par la pollution crois-sante
du Mékong et le recours clandestin
à des filets maillants qui les étranglent.
Partis les observer en barque, au soleil
déclinant, on a raté toutes les photos tant
ils surgissent n’importe où et filent vite !
Mais ils sont bien là, formes luisantes au
museau rond. Il y en aurait huit.
Retour au village. La chaleur est un peu
tombée. Il y a encore assez de lumière
pour une virée à vélo. Griserie de pédaler
sur les étroits chemins de rizières, de
franchir des ponts de bambou, de pouvoir
discuter grâce aux deux jeunes guides,
Vibol et Ravi, enthousiastes et inlassables
X « Voyage et partage »,
c’est le mot d’ordre
de Double Sens.
Spécialisée dans le
tourisme solidaire,
cette agence a travaillé
avec marie france pour
vous proposer un
périple exclusif au
Cambodge. Le voyage
d’une vie. Passez
douze jours
inoubliables entre
excursions et visites,
notamment des
célèbres temples
d’Angkor, immersion
dans la vie locale
sur une petite île
du Mékong et
participation au
quotidien de la
communauté (petits
travaux divers
– construction de
poulaillers, de
douches, etc.).
Une expérience
passionnante et rare,
à la portée de tou(te)s,
à vivre seule, en couple
ou en famille (groupes
de 10 personnes
maximum).
X 4 dates au choix :
– du 27 Septembre
au 08 Octobre 2014
– du 04 Octobre
au 15 Octobre 2014
– du 22 Novembre
au 03 Décembre 2014
– du 29 Novembre
au 10 Décembre 2014
X Prix : 2 800 € par
personne tout compris
– voyage Paris-Paris,
hébergement, repas,
eau, excursions,
traducteurs. Chaque maison possède son
histoire. On papote, assis sur les marches,
accoudés à l’enclos, depuis les hamacs
accrochés près des pilotis. On en oublie
qu’on est touriste. Les projets réalisés par
les précédents voyageurs ont amélioré la
vie, expliquent les intéressés. Même si
des toilettes en dur et à l’abri d’une porte
ont d’abord désorienté… Chaque ouvrage
a été baptisé. Cocotte minute ou Au coq
hardi pour des poulaillers dont les enclos
couverts limitent la mortalité de la vo-laille
pendant la saison des pluies.
Copains comme cochons annonce une
porcherie. Le jardin magique désigne un
enclos de liserons d’eau, courgettes et
citronnelle avec son coin compost, amé-nagé
près du Mékong. Un pro a guidé
l’effort collectif lors des aménagements.
Le travail est décomposé en étapes
simples : creuser une tranchée, planter
des piquets, préparer du ciment… Nul
besoin d’un BTS maçon. Un peu de coeur
à l’ouvrage suffit.
visites, transports
locaux. (Ce prix
ne comprend pas :
visa, assurances,
vaccinations, boissons
extras et dépenses
personnelles).
X Santé : pas de
vaccins obligatoires.
X Renseignements
et réservations :
01 48 03 92 38.
Par email : cambodge.
mariefrance@
doublesens.fr
Détails du séjour
sur mariefrance.fr/
evasion/
voyages-solidaires
partez avec nous !
Le temps s’écoule doucement. Des motos
sillonnent la rue centrale. Des portables
sonnent, que l’on vient recharger dans
l’échoppe très fréquentée de Hang Neang,
pendant que la maîtresse des lieux pèle
des mangues ou explique les secrets du
trapae, un dessert de riz noir gluant.
Le séjour réconcilie avec un quotidien
plus simple, et doublement béni. La visite
à la maison des esprits de Koh Phdao
nous a fourni protection et autorisation
de séjourner. Peu après, on s’est fait
copieusement doucher avec un baquet
d’eau lors d’une cérémonie bouddhiste
avec offrandes au bonze… C’était juste
avant cette fête d’inspiration chamanique
où, dans une pénombre accueillante, une
femme est entrée en transes au son sourd
des tambours pour en émerger dix mi-nutes
plus tard avec le plus grand natu-rel.
L’alcool de riz circule, les gamins
courent sur le plancher en bambou.
Instant partagé, tout simplement. On est
là, avec et pour les autres.
Une cérémonie, une fête,
une simple rencontre sont autant
d’occasions d’être ensemble.
© pierre-étienne vincent/double sens