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UNIVERSITE DE NICE SOPHIA-ANTIPOLIS
                     Faculté de Droit, des Sciences Politiques, Economiques et de Gestion



                                              CEMAFI
               Centre d’Etudes en Macroéconomie et Finance Internationale




                                               THÈSE
                                  Pour obtenir le grade de
                              Docteur en Sciences Economiques




  Gouvernance et croissance économique

                      Présentée et soutenue publiquement par

                                       Ouidade CHATTI

                                  Le 11 mars 2010 devant le jury :


Directeurs :
                M. BERTHOMIEU Claude, Professeur à l’Université de Nice
                M. CHTOUROU Nouri, Professeur à l’Université de Sfax, Tunisie
Rapporteurs :
               M. ARCAND Jean Louis, Professeur à l’Institut des Hautes Etudes
                  Internationales et du Développement, Genève
                M. FEKI Rochdi, Professeur à l’Université de Sfax, ESC, Tunisie
Examinateurs :
                Mme. GLORIA-PALERMO Sandye, Professeur à l’Université de Nice
                M. MAROUANI Albert, Président de l’Université de Nice
Remerciements


       Je voudrais avant tout remercier chacun des membres de Jury pour l’honneur qu’ils
m’ont fait de s’intéresser à ce travail et d’avoir accepté de l’évaluer.
       Mes remerciements s’adressent :
       A mes directeurs de thèse, Monsieur le professeur Claude BERTHOMIEU et
Monsieur le professeur Nouri CHTOUROU qui ont accepté de co-encadrer ce travail. Je leur
suis très reconnaissante pour la confiance qu’ils ont eue en moi et le temps qu’ils m’ont
consacré tout au long de l’élaboration de ce travail de recherche. Leurs conseils et suggestions
ont amplement contribué à l’aboutissement de ce travail ;
       A monsieur Jean Louis ARCAND et Monsieur Rochdi FEKI pour avoir rapporté sur
ma thèse ;
       A monsieur Albert MAROUANI et Madame Sandye GLORIA-PALERMO pour avoir
accepté de participer au jury ;
       A tous les membres du CEMAFI pour leur accueil et leur disponibilité,
particulièrement, Monsieur Jean-Charles Briquet-Laugier et Mademoiselle Diane Gauffridy.
       Mes remerciements s’adressent également aux membres de ma famille qui ont
toujours cru en moi et m’ont soutenue durant ces longues années d’études, pour tous les
sacrifices qu’ils ont faits, l’amour et le soutien qu’ils m’ont apportés : mon frère Mohamed,
ma sœur Nissaf, et particulièrement ma mère pour qui je n’ai pas été très disponible ces
dernières années, et finalement mon fiancé à qui j’exprime ma reconnaissance et mon amour
infini et qui a été à mes cotés pendant les moments les plus durs de cette thèse.




                                                                                           -2-
Dédicace




A l’âme de mon père
Sommaire

Introduction Générale ........................................................................................................................................................................................ 6
Chapitre 1: La Notion de Gouvernance : Emergence, Significations, et Mesures. ........................................................................................... 20
    Section 1. La Gouvernance : une notion difficile à définir ......................................................................................................................... 23
    Section 2. L’Emergence d’une « Nouvelle économie du développement » : la bonne gouvernance .......................................................... 38
    Section 3. Les Mesures de la gouvernance................................................................................................................................................. 58
Chapitre 2: La relation entre la gouvernance et la croissance économique : de la théorie à la pratique............................................................ 83
    Section 1. La place de la gouvernance et des institutions dans la théorie de la croissance ......................................................................... 87
    Section 2. «Repères théoriques sur la gouvernance » : la nouvelle économie institutionnelle (NEI).......................................................... 97
    Section 3. Une synthèse des travaux empiriques sur la relation entre gouvernance et performances économiques.................................. 124
Chapitre 3: Analyse de la qualité de la gouvernance dans le monde : une approche multidimensionnelle..................................................... 153
    Section 1. Aperçus de quelques méthodes classiques d’agrégations et de classification .......................................................................... 156
    Section 2. L’analyse en composantes principales (ACP) appliquée aux données de la gouvernance ....................................................... 164
    Section 3. Analyse de la gouvernance à l’aide des cartes auto-organisatrices de Kohonen ...................................................................... 174
Chapitre 4: Évaluation empirique de la relation entre la qualité de la gouvernance et les performances économiques .................................. 210
    Section 1. Évaluation des effets directs et indirects de la gouvernance sur le niveau du revenu : approche comptable de la croissance .. 214
    Section 2. Évaluation des effets de la gouvernance par l’approche économétrique.................................................................................. 237
    Section 3. Evaluation des effets direct et indirects de la gouvernance sur la croissance économique....................................................... 249
Conclusion Générale...................................................................................................................................................................................... 272
Annexes ......................................................................................................................................................................................................... 286
La     faculté     n’entend     donner
aucune approbation ni improbation aux
opinions émises dans les thèses : ces
opinions doivent être considérées comme
Introduction Générale

La relation entre la gouvernance et la croissance économique est un thème qui suscite un
grand intérêt depuis deux décennies tant dans la science économique qu’au sein de la
communauté internationale.
Depuis le début des années 1990, on assiste à un regain d’intérêt pour la notion de
gouvernance. Aujourd’hui, elle est largement utilisée par les organisations internationales,
régionales, des agences de développement, des gouvernements mais aussi des économistes.
Cette thèse porte sur la gouvernance des Etats, par opposition à la gouvernance globale ou à la
gouvernance d’entreprise (corporate governance). Dans ce sens, la gouvernance se réfère à
l’expression « bonne gouvernance » soutenue par la Banque Mondiale (BM) dés le début des
années 1990. Pour cette organisation internationale, la gouvernance correspond à la capacité
de l’Etat de fournir des institutions soutenant les marchés. Elle entend par « bonne
gouvernance » la fourniture effective de telles institutions. Selon la Banque Mondiale, la «
bonne gouvernance » inclut la création, la protection et le respect des droits de propriété, une
réglementation qui encourage la concurrence, mais aussi des politiques macroéconomiques
saines et l’absence de corruption (Banque Mondiale, 2002). Depuis, la notion de gouvernance
ouvre la voie à plusieurs définitions proposées par les organisations internationales. Chacune
a développé sa propre définition de la gouvernance. Malgré l’absence d’une approche
commune de la notion de gouvernance, l’ensemble des définitions adoptées par ces
institutions convergent vers un point qui est de lier la notion de la gouvernance à une certaine
efficacité de l’Etat dans la gestion des affaires publiques. C'est selon cette conception, plus
liée à l'idée de gestion qu'à celle de pouvoir, que la notion de gouvernance a eu un succès au
sein des Institutions Financières Internationales. Plus précisément, c’est la définition proposée
par Kaufmann et Kraay (2002) qui est le plus souvent utilisée dans les travaux traitant de la
«bonne gouvernance ». Les auteurs la définissent comme le processus et les institutions par
lesquels l’autorité est exercée dans le pays pour le bien commun. Cela recouvre : le processus
par lequel les gouvernements sont sélectionnés, tenus redevables, surveillés et remplacés ; les


                                                                                             6
capacités des gouvernements à gérer les ressources et à fournir les services efficacement, ainsi
qu’à formuler et mettre en œuvre de bonnes politiques et réglementations, le respect des
institutions qui gouvernent les interactions économiques et sociales. Cette définition donne un
caractère multidimensionnel à la notion de gouvernance dans la mesure où elle recouvre
plusieurs aspects : le caractère démocratique des institutions politiques, l’instabilité politique
et la violence, l’efficacité des pouvoirs publics, le poids des réglementations, la primauté du
droit, et enfin la lutte contre la corruption.
La notion de gouvernance est devenue alors un élément clé des politiques de développement
et de réduction de la pauvreté, principalement suite aux premières évaluations des
programmes d’ajustement structurels. En effet, depuis cinquante ans, les politiques de
développement passent d’un paradigme à un autre. Les théories du développement ont, selon
les époques, mis l’accent sur les carences et les succès du marché, présenté l’Etat comme un
acteur volontariste ou un acteur passif, et encouragé tour à tour les mérites de l’ouverture au
commerce extérieur, de l’épargne et de l’investissement, de l’éducation et de la diffusion du
savoir, de la stabilité financière et macroéconomique. Les développements précédents se sont
inscrits essentiellement sur l’axe Etat-marché en supposant que ce sont les deux seules formes
de coordinations dans les économies. Comme l’une et l’autre ont rencontré des limites, voire
des échecs dans leur application, une façon de réconcilier ces deux approches consiste à
rechercher une combinaison optimale entre mécanismes de marché et coordination par les
pouvoirs publics (Boyer 2001) : la gouvernance. Cette notion apparait dans l’économie du
développement pour renouveler le débat existant entre Etat et marché, tout en tenant en
compte d’un nouveau facteur, les institutions et du niveau de leur application. Au cours de
leur développement, les courants de pensée n’ont pas pris en considération les facteurs non
économiques du développement et se sont plus concentré sur des aspects techniques et
physiques du développement comme le capital physique et humain. Les échecs des stratégies
de développement passées sont imputés aux carences de la gouvernance et le rôle des
organisations internationales, chargées de promouvoir le développement, devraient
encourager la mise en place de « bonnes institutions» et de leur application effective. La
notion de gouvernance se trouve donc au cœur des débats sur les stratégies de développement
et fortement liée à la question des institutions.
La théorie de la croissance qui a été élaborée dans les années 50 et 60, souligne la nécessité
d’accumuler des facteurs de production (capital et travail) et d’accroître la productivité avec
laquelle ces facteurs sont utilisés. En effet, l’accumulation des facteurs de production ne peut
plus être considérée comme le principal moteur de croissance, mais il existe un autre élément


                                                                                            -7-
qui peut être le véritable moteur de la croissance : la productivité totale des facteurs (PTF). Il
semble alors que ce qui importe pour la croissance, ce n’est pas seulement la quantité des
facteurs de production accumulés par le pays mais c’est surtout la manière avec laquelle il
combine ces facteurs. Parallèlement, les estimations empiriques des déterminants de la
croissance ont montré l’insuffisance des seules variables économiques pour expliquer les
différentiels de performances économiques entre pays. Ce qui a poussé les politistes et les
économistes à porter leur réflexion sur la qualité de la gouvernance et des institutions pour
expliquer la croissance. Si l’augmentation des quantités de capital et de travail a un impact
positif sur la croissance, qu’est ce qui permet (ou non) la mobilisation de ces facteurs de
production et qu’est ce qui rend cette mobilisation efficace (ou non) à long terme ? La
Nouvelle Economie Institutionnelle (NEI) est alors intervenue principalement avec les
travaux de North (1990) pour apporter une réponse à ces questions. On parle aujourd’hui d’un
nouveau consensus au sein de l’économie du développement et de la croissance économique.
C’est un consensus qui est plus large que les anciens et qui va prendre en compte dans
l’analyse du développement et de la croissance, des facteurs non seulement économiques mais
des facteurs politiques et institutionnels.
L’intérêt pour les institutions et leur rôle dans la croissance économique s’est développé avec
les travaux de la Nouvelle Economie Institutionnelle. On assiste aujourd’hui à une nouvelle
version de l’économie standard néoclassique (Clague 1997), notamment avec la prise en
compte des notions de coûts de transaction et d’information imparfaite en économie. La
question de recherche principale que se pose North est la suivante : qu’est ce qui permet à une
économie, à une époque donnée, de connaître la croissance économique ? Sa thèse est que ce
sont les institutions qui garantissent cette croissance économique, car elles permettent de
réduire les coûts de transaction entre les individus et assurent donc le bon fonctionnement des
marchés : “I wish to assert a much more fundamental role for institutions in societies; they
are the underlying determinant of the long-run performance of economies” (North 1990,
p.20). Le modèle de North a pour point de départ théorique la microéconomie, mais dans un
cadre qui diverge sensiblement de celui de l’économie néoclassique. North s’inspire en
particulier de trois champs théoriques qui constituent aujourd’hui les fondements de la NEI.
La première théorie que North reprend à son compte est celle des coûts de transaction. Il
explique que la baisse des coûts de transaction est un des facteurs principaux d’augmentation
de la croissance économique. De ce fait, l’étude de la mise en place des institutions s’impose.
Pour cela, North utilise la théorie économique des droits de propriété. Il s’inspire donc et en
second lieu, de la théorie économique du droit de propriété qu’il emprunte à des auteurs


                                                                                              8
comme Alchian et Demsetz (1972). North montre qu’un système de droits de propriété bien
défini peut être un facteur de croissance économique. Une société sera d’autant plus
innovatrice et portée sur la croissance que son système de droits de propriété précise les droits
d’exclusivité de chacun, en assure la protection effective, et réduit le degré d’incertitude qui
pèse sur les possibilités de gains supplémentaires offerts par l’innovation. Pour affiner son
analyse, North introduit les sciences politiques dans son modèle. Il démontre notamment que
certains régimes politiques favorisent plus que d’autre la croissance économique, et cela par
l’intermédiaire d’institutions complexes qu’il convient d’étudier précisément.
L’analyse de North de l’importance des institutions pour la croissance a beaucoup marqué les
économistes de la période. Aujourd’hui, il est largement admis que ce sont les institutions qui
déterminent les performances des économies nationales. Les institutions entrent dans la
catégorie des facteurs qualitatifs de la croissance et du développement. North (1990) affirme
que : "les pays du tiers monde sont pauvres parce que les contraintes institutionnelles qui
définissent un ensemble de coûts pesants sur les politiques économiques n’encouragent pas
l'activité productive1 ». Cette découverte de la dimension institutionnelle du processus de
croissance, et donc du rôle conséquent des institutions, ne saurait être négligée. Les
institutions ne peuvent plus être écartées de l’analyse de la croissance. Les Institutions
Financières Internationales, et plus précisément la Banque Mondiale apportent une réponse à
la question de l’importance des institutions pour les performances économiques en proposant
un cadre opérationnel : la « bonne gouvernance ». La gouvernance est présentée comme
solution permettant d’assurer la sécurité des transactions nécessaire à la croissance
économique. La Nouvelle Economie Institutionnelle et les travaux de North (1990)
fournissent alors un cadre théorique et analytique à l’étude du rôle de la gouvernance dans
l’amélioration des performances économiques. Ces travaux constituent donc la principale
base théorique à partir de laquelle s’inspire le modèle de bonne gouvernance tel qu’il est
proposé par la Banque Mondiale. L’importance de la NEI a été confirmée par l’attribution du
prix Nobel d’économie d’abord en 1991 à Ronald Coase puis à Douglas North, en 1993 et
récemment à Olivier Williamson en 2009.
Cette nouvelle doctrine des Organisations Internationales se fonde sur de nombreux travaux
empiriques qui mettent en évidence les conséquences positives de la « bonne gouvernance »
sur les performances économiques. On retrouve, d’une part, les travaux empiriques sous
formes d’études en coupes transversales de la croissance qui cherchent à établir une relation
1
    Dans North (1990) page 20, “Third world countries are poor because the institutional constraints define a set of payoffs to
    political/economic activity that do not encourage productive activity…”.




                                                                                                                        -9-
entre la gouvernance et la croissance économique. La majorité de ces travaux concluent à un
lien positif et significatif entre la gouvernance et les performances économiques. Toutefois, la
majorité de ces travaux traitent l’effet global de la gouvernance sur la croissance et ne
montrent pas comment elle peut affecter la croissance. Ces travaux traitent les institutions
comme une « boite noire » et ne mettent pas en lumière les mécanismes exacts à travers
lesquels les institutions affectent réellement la croissance. La majorité des études empiriques
utilisent des modèles de croissance de forme réduite qui ne permettent pas de détecter les
différents canaux d’influence. D’autre part, des travaux empiriques utilisant des modèles de
croissance de type Solow (1956) et Mankiw, Romer et Weil (1992) ont permis en quelque
sorte de détecter certains canaux. En effet, les canaux à travers lesquels la bonne (mauvaise)
gouvernance entraine une forte (faible) croissance économique sont probablement trop
nombreux mais pas totalement identifiés.
Le premier type de travaux que nous appelons « études de première génération » vise à
expliquer pourquoi la qualité des institutions varie selon les pays, et quel type de facteurs peut
être responsable d'une telle disparité. Plus précisément, ils visent à tester l’hypothèse de North
1990 sur l’importance des droits de propriété et des coûts de transactions dans la
détermination des performances économiques. Une caractéristique commune à l’ensemble de
ces travaux, est d’étudier l’impact des institutions sur les performances économiques sans
faire explicitement référence au concept de gouvernance. En effet, dans ces études de «
première génération », on ne parlait pas encore de gouvernance mais d’institutions et ce n’est
qu’à partir des travaux de Kaufmann et al. (1999) qu’on a commencé à parler de relation
gouvernance et croissance. La plupart des travaux introduisent un large éventail d’indicateurs
de la qualité des institutions comme variables proxys de la gouvernance dans un pays (la
garantie des droits de propriété chez Knack et Keefer (1995), le risque d’expropriation chez
Acemoglu, Johnson et Robinson (2001), l’instabilité politique chez Scully (1988), Fosu
(1992), Olson (1996), la corruption chez Mauro (1995), la démocratie chez Barro (1996)).
Malheureusement, certaines dimensions de la gouvernance sont ignorées dans les études sur
les déterminants de la croissance et, quand elles sont représentées par des variables proxys,
elles sont probablement incapables de représenter pleinement la notion de gouvernance. La
deuxième catégorie d’études que nous appelons « études de seconde génération », est
consacrée à la façon dont la gouvernance et les variables institutionnelles affectent la
croissance économique et le revenu par tête ; en d’autres termes, elles visent à déterminer les
canaux à travers lesquels la gouvernance affecte la croissance. Ce qui caractérise cette
littérature c’est qu’elle va chercher à combler la limite des travaux de première génération en


                                                                                             10
introduisant d’une manière explicite le concept de gouvernance comme hypothèse de base de
leur travail économétrique et donc une tentative d’introduction explicite des indices
synthétiques pour aborder la notion de gouvernance dans sa totalité. Toutefois, ces travaux
arrivent souvent à des conclusions hétérogènes et qui ne vont pas dans le même sens. Cela
pourrait être dû aux indicateurs agrégés utilisés dans ces travaux qui sont souvent construits
d’une manière arbitraire sans pour autant étudier les difficultés de construction des indicateurs
composites. Cela pourrait être dû également à la diversité des mesures institutionnelles que les
auteurs cherchent à intégrer dans leur indicateur de gouvernance. Cela pose alors la question
de la construction des indicateurs composites.
Justement, ce travail tente de combler cette lacune toute en accordant un intérêt particulier à
l’analyse des interactions entre la gouvernance et la croissance économique. Les articles
académiques consacrés aux relations entre la gouvernance et la croissance économique
s’organisent autour de trois problématiques.
La première s’intéresse à l’impact direct de la qualité de la gouvernance sur la croissance
économique. D’une part, la gouvernance est supposée avoir des conséquences positives sur le
niveau du revenu (Hall and Jones (1999), Acemoglu, Johnson, et Robinson (2001), Easterly
and Levine (2003), et Rodrik, Subramanian, et Trebbi (2002)), sur le taux de croissance de
l’économie (Knack et Keefer (1995), Acemoglu, Johnson, et Robinson (2001), Gwartney,
Holcombe et Lawson (2004) et Weede (2006)). D’autre part, certains montrent qu’elle n’a
aucun impact sur la croissance, mais uniquement sur le niveau du revenu (Meiseil et Ould
Aoudia 2007), voire un impact négatif (Quiberia 2002).
La deuxième problématique est liée aux effets indirects de la gouvernance, plus précisément
aux canaux de transmission de la gouvernance sur la croissance qui ne sont pas toujours
clairement identifiés. Hall et Jones (1999) trouvent que les institutions ont un impact
quantitatif sur de l’accumulation des facteurs limité par rapport à celui de la productivité
totale des facteurs. Au contraire, Rodrik et al (2002) trouvent que les institutions ont un
impact quantitatif beaucoup plus important sur l’accumulation du capital physique que sur la
productivité totale des facteurs. Eicher et al (2006) trouvent que le principal rôle des
institutions est d’encourager l’accumulation des facteurs de production.
La troisième problématique porte sur la mesure de la gouvernance et sur les tentatives
d’agrégation des critères rattachés à cette notion pour pouvoir l’analyser et l’intégrer dans les
modèles de croissance. L’attention croissante portée à la bonne gouvernance depuis le début
des années 1990 a donné naissance à un grand nombre de tentatives visant à quantifier et à
mesurer cette notion multidimensionnelle, notamment dans le but d’aider à la conception des


                                                                                           -11-
réformes mais surtout de déterminer ses conséquences économiques. Aujourd’hui, il est
possible de compter près de 160 bases de données ou d’indicateurs permettant d’éclairer
divers aspects de la gouvernance. Il s’agit généralement d’évaluations subjectives produites
par des agences privées de notation du risque, des organisations multilatérales, des centres de
recherche ou encore des organisations non gouvernementales. Toutefois, la gouvernance est
un concept large et multidimensionnel et elle ne peut pas être réduite à une seule de ses
dimensions. L’élaboration d'indicateurs composites de gouvernance nécessite alors le recours
à des méthodes d’agrégation et de classification. Le concept de gouvernance a déjà fait l’objet
de plusieurs tentatives d’agrégation pour construire un indice synthétique. Certains auteurs
utilisent une moyenne simple pour construire un indice de gouvernance global, à l’image des
travaux de Knack et Keefer (1995), élargis par Hall et Jones (1999) par la suite. Kauffman,
Kraay et Mastruzzi (2005) utilisent le modèle à composantes inobservables pour construire
leur indicateur global de gouvernance. Scully (1992), Alesina et Perotti (1994) utilisent la
méthode d’Analyse en Composantes Principales (ACP) pour construire des indices de libertés
politiques et économiques. Toutefois, ces techniques d’agrégation présentent de nombreuses
difficultés méthodologiques et des erreurs de mesure. La majorité de ces techniques
d’agrégation sont souvent à l’origine de pertes d’informations, lors de l’agrégation, ce qui
rend les indicateurs obtenus peu pertinents pour représenter le concept de gouvernance. De
même, il faut noter la question liée au choix de la pondération des variables qui forment
l’indicateur composite pose des problèmes très délicats. Le choix du vecteur de pondération
des sous variables qui forment l’indicateur composite est une étape très importante dans sa
construction. Il reflète la contribution de chaque variable dans l’indicateur composite. Le
problème qui se pose ici est lié aux choix des poids relatifs des différentes variables mais
aussi de l’homogénéité ou de l’hétérogénéité de ces pondérations pour tous les individus. En
règle générale, les composantes de la gouvernance sont simplement considérées avoir le
même poids pour tout l’échantillon, ce qui peut constituer un réel problème de sa pertinence
et de sa crédibilité. Nous sommes alors dans le besoin de disposer d’outils pertinents de
l’analyse des données pour pouvoir étudier, résumer et représenter les différentes dimensions
de la gouvernance.
L’une des caractéristiques de cette thèse est l’importance qu’elle accorde à la quantification
de la gouvernance et à sa relation empirique avec la croissance économique. En outre, une
attention particulière a été accordée à la construction d’un indicateur composite capable de
résumer l’ensemble des volets de la gouvernance et de l’intégrer dans une régression de
croissance pour pouvoir distinguer les effets directs et indirects de la gouvernance sur la


                                                                                          12
croissance économique. Nous accordons également une importance particulière à l’analyse de
la robustesse de nos résultats en effectuant différents tests, allant du test de Belsley-Kuh-
Welsch (1980) qui proposent de mesurer l’influence de chaque observation sur l’estimation
des paramètres d’une régression, jusqu’aux régressions quantiles, en passant par la méthode
des limites extrêmes ou encore de « l’Extreme Bound Analysis » (EBA). L'objet de cette
dernière méthode est de mener à bien les régressions dans le but de tester la sensibilité de la
variable dépendante (le taux de croissance du PIB par habitant) aux petits changements
introduits dans les différentes spécifications du modèle avec différentes combinaisons des
variables indépendantes. Le recours aux régressions quantiles permet de prendre en compte
l’hétérogénéité de la relation « gouvernance-croissance » suivant le niveau même du taux de
croissance. Cette technique est employée, à notre connaissance, pour la première fois dans
l’étude de la relation entre gouvernance et croissance.
La thèse se compose de quatre chapitres. Dans le premier chapitre, nous nous intéresserons à
la définition de la notion de gouvernance et à ses différentes mesures. En effet, la notion de
gouvernance se présente aujourd’hui comme un « buzzwords » (mots à la mode) qui fait appel
à diverses disciplines des sciences sociales et des sciences humaines : philosophie, économie,
science politique, administration publique, étude des organisations, étude du développement,
relations internationales etc.… Elle peut être définie de différentes manières, et sa
signification diffère certainement quand on parle de gouvernance locale, de gouvernance
urbaine, de gouvernance d'entreprise, de gouvernance nationale ou encore de gouvernance
mondiale. Cette multitude de définitions fait de la gouvernance un terme polysémique. Le
terme est en effet défini et entendu aujourd’hui de manière diverse et parfois contradictoire,
chaque entité lui donnant un contenu en fonction de ses orientations et de ses objectifs
propres. Il n’existe pas de définition unique de la gouvernance qui fasse l’objet d’un
consensus. Pour mieux appréhender le sens donné à la gouvernance, il est utile de remonter à
l’origine du concept ainsi qu’à ses différentes significations, tout en faisant la distinction entre
les différents concepts de gouvernance qui existent, à savoir la gouvernance d’entreprise, la
gouvernance mondiale, et se concentrer sur la gouvernance publique. Ensuite, les raisons pour
lesquelles la notion de gouvernance est devenue présente dans l’économie du développement
seront exposées. En effet, jusqu'au début des années 1990, le terme de gouvernance était
rarement utilisé par économistes du développement et les décideurs politiques. Depuis, il y a
eu une prise de conscience que la structure de la qualité de la gouvernance d’un pays est un
facteur déterminant de sa capacité à assurer un développement économique et sociale
soutenable. La notion de gouvernance pose, en quelque sorte, d’une manière nouvelle, la


                                                                                             -13-
problématique des liens entre Etat et marché. L'augmentation spectaculaire de l’intérêt pour la
gouvernance et ses conséquences économiques, a accompagné le besoin d'évaluer ses
différentes dimensions. De nombreuses agences nationales et internationales ont cherché à
mesurer la qualité de la gouvernance dans le monde. Aujourd'hui, mesurer la gouvernance est
important, tant au niveau de la politique nationale qu’à celui des relations économiques
internationales ou encore pour les chercheurs spécialistes du développement et de la
croissance. Ceci a entrainé une progression remarquable des bases de données ou
d'indicateurs permettant d'éclairer divers aspects de la gouvernance. Les indicateurs les plus
utilisés, parmi les centaines qui sont apparus, sont des indicateurs composites et sont
construits à partir d’enquête ou de sondages d’experts. Ces données sont, en général fondées
sur des perceptions et sont donc subjectives. Elles sont principalement critiqués en tant que
telles. Nous présenterons donc une revue des indicateurs de gouvernance les plus utilisés dans
la recherche académique, tout en relevant leurs différentes limites auxquelles les utilisateurs
se trouvent confrontés.
Dans le deuxième chapitre, nous proposerons une synthèse de la littérature théorique et
empirique qui existe sur la relation entre la gouvernance et la croissance économique. Depuis
Smith (1776) la question de la croissance des économies constitue l’une des préoccupations
centrales de la recherche économique. Les modèles théoriques auxquels on se réfère
généralement lorsqu’on aborde les questions de la croissance économique, sont ceux de
Solow (1956) et Swan (1956). Ces derniers s’inscrivent dans le cadre du corpus de la théorie
néoclassique, qui fera de nombreux concurrents (Koepmans (1956), Cass (1965)), jusqu’au
milieu des années 60. Nous montrons que la question des institutions n'est pas abordée dans
l’analyse néoclassique de la croissance. L’hypothèse que la production est donnée par la
disponibilité des facteurs de production et la technologie, fait que l’on suppose implicitement
qu’il y a optimalité des institutions et de la gouvernance. Il n’y a pas de place pour la
contradiction ou le conflit, ni pour une quelconque forme d’organisation collective des agents.
En effet, la théorie néoclassique standard néglige les rapports sociaux et toute forme de
disposition institutionnelle et s’attache à identifier les mécanismes spécifiquement
économiques du processus de croissance, rejetant ainsi à la marge de la réflexion économique
les dimensions politiques et institutionnelles. Nous verrons par la suite, que ce n’est qu’avec
la nouvelle théorie de la croissance endogène qu’on commence à avoir une « reconnaissance »
des facteurs institutionnels dans le processus de croissance, notamment avec la
reconnaissance du rôle de l’Etat. Toutefois, le paradigme de la croissance endogène accorde
une attention réduite aux institutions qui accompagnent le processus de croissance. En effet,


                                                                                          14
les institutions n’ont pas fait l’objet d’une modélisation, mais les théoriciens confortent la
proposition de la pertinence d’un environnement institutionnel de l’activité économique, en
particulier en considérant, que l’effet de l’accumulation des facteurs productifs est porté par
un environnement institutionnel implicite. Les facteurs institutionnels et politiques ne sont pas
intégrés d’une manière formelle dans les modèles de croissance. Nous accorderons ensuite
une attention particulière à la théorie de la Nouvelle Economie Institutionnelle et en
particulier à l’apport des travaux de North dans l’économie de la croissance. Nous montrerons
que ces recherches constituent la principale base théorique à partir de laquelle s’inspire le
modèle de bonne gouvernance tel qu’il est proposé par la Banque Mondiale. Enfin nous
présenterons une synthèse des travaux empiriques qui se sont intéressés à la relation entre la
qualité des instituions ou encore de la gouvernance et la croissance économique. Le but est
d’examiner les résultats de la littérature empirique sur la relation entre la gouvernance et la
croissance économique, tout en discutant de leur validité et de leurs limites. En effet, les
travaux empiriques sur la relation entre la gouvernance et la croissance se sont multipliés au
cours des années 1990, notamment avec l’apparition d'un nombre croissant d’indicateurs
subjectifs sur les mesures des différentes dimensions de la gouvernance. Nous avons choisi de
classer des travaux en deux types bien qu’il soit difficile de le faire en raison de l'utilisation de
méthodes et de bases de données rarement semblables. Deux types de travaux sont
distingués : les « études de première génération » et les « études de deuxième génération ». Le
premier type de travaux a permis d’apporter de nombreux résultats qui ont appuyé les
principales conclusions des travaux théoriques sur l’importance de la gouvernance et des
institutions pour le développement économique. On ne manquera pas de soulever les limites
de ces travaux. Ces limites portent, d’une part, sur les méthodes économétriques utilisées et la
nature des données de la gouvernance utilisées, mais aussi sur le manque d’identification des
mécanismes exacts à travers lesquels la gouvernance affecte la croissance. Les effets de la
gouvernance doivent être repérés par l'intermédiaire de leur impact sur l'accumulation des
facteurs (effet indirecte/quantitatif) et/ou sur la productivité (effet directe/qualitatif). Une
nouvelle génération d’études empiriques tente d’étudier la façon dont les institutions affectent
la croissance. Les conclusions de cette littérature sont souvent identiques sur le rôle positif de
la gouvernance sur les performances économiques mais souvent hétérogènes quant à
l’identification des canaux de transmission.
Nous soulignerons également que, malgré une littérature relativement abondante sur les effets
positifs de la gouvernance sur la croissance, des critiques ont étés soulevées sur l’existence
effective de cette relation, notamment quand il s’agit de citer des économies telles que celles


                                                                                              -15-
de la Chine ou l’Inde qui ne cessent de croitre malgré une qualité de gouvernance faible. En
effet, hormis l’approche de la bonne gouvernance défendue par la Banque Mondiale, il existe
une seconde approche, qui n’est pas très populaire dans le milieu académique, appelée «
approche hétérodoxe de la gouvernance ». Elle examine la relation entre la gouvernance et les
performances économiques et s’intéresse principalement à l’analyse des systèmes
économiques relatifs à chaque pays. Face à cette approche, nous proposerons alors une vision
de la gouvernance qui va permettre de concilier les deux approches : « la gouvernance
effective ». Nous adopterons une approche flexible de la gouvernance libérale qui suggère
qu'il n'existe pas de modèle universel qui permette d'assurer une gouvernance efficace pour le
développement économique. Les décideurs politiques doivent s’engager à appliquer
effectivement les programmes de gouvernance et à formuler des politiques tournées vers la
croissance en fonction du contexte de chaque pays, de son niveau de développement, de ses
capacités existantes, du contexte international dans lequel ils se situent. Il faut qu’il y ait un
engagement effectif de l’Etat pour tenir ses engagements politiques. Nous proposerons notre
propre définition de gouvernance ainsi que la structure de gouvernance qui en découle.
Dans le troisième chapitre, nous nous intéresserons à la quantification de la notion de
gouvernance. Notre objectif principal est la construction d’un indicateur composite de
gouvernance afin de l’intégrer dans les régressions de croissance. Un travail préliminaire à la
construction de cet indicateur, s’impose. Il serait utile de visualiser la gouvernance, entre les
pays, par le biais d’une projection dans l’espace de l’ensemble des composantes de la
gouvernance qui forment notre indicateur composite. Cette étape est essentielle pour avoir
une idée sur la nature des systèmes de gouvernance dans le monde mais aussi pour identifier
les facteurs institutionnels qui participent à l’amélioration ou à la détérioration de ces
systèmes de gouvernance. Pour synthétiser des données multidimensionnelles, nous
disposons, en général, de deux grands groupes de techniques classiques : les méthodes
factorielles (l’Analyse en Composantes Principales (ACP) et l’Analyse Factorielle des
Correspondances (AFC), l’Analyse des Correspondances Multiples (ACM)) et les méthodes
de classification (la Classification Hiérarchique et la Méthode des Centres Mobiles (cf.
Cottrell et al (2003)). Depuis les années 80, de nouvelles méthodes, basées sur l’intelligence
artificielle, sont apparues pour compléter ces techniques, elles sont connues sous le nom de
« méthodes neuronales ». Ces méthodes seraient capables de traiter des bases de données de
grande taille, ayant une structure non linéaire et par conséquent mal exploitées par les outils
traditionnels. Pour conduire notre approche multidimensionnelle, nous appliquerons deux
types d’outils : l’Analyse en Composante Principale (ACP) et les réseaux de neurones, plus


                                                                                             16
précisément les cartes auto-organisatrices de Kohonen (Self Organisation Maps : SOM) pour
125 pays observés en 2006. Cette dernière méthode permet une meilleure visualisation de la
qualité de la gouvernance à travers le monde mais également de déterminer les dimensions de
la gouvernance qui importent le plus dans chaque région du monde. L’application de l’ACP
va nous permettre, dans un premier temps, d’avoir une projection des pays selon leurs
ressemblances en matière de gouvernance, et donc de pouvoir constituer des groupements de
pays ; dans un deuxième temps, de déterminer les variables de gouvernance les plus
prépondérantes pour expliquer les différences des systèmes de gouvernance entre pays ; dans
un troisième temps, de déterminer un indicateur synthétique à partir de la première
composante principale. La détermination de l’indicateur agrégé nous permettra d’avoir un
classement des pays selon la qualité de leur gouvernance. Nous poursuivrons notre
exploration des données moyennant les réseaux de neurone et plus précisément les Cartes
Auto Organisatrices de Kohonen. L’initialisation de l’algorithme de Kohonen va nous
permettre d’obtenir, dans un premier temps, une première projection des pays sous forme de
carte composée de neurones ou de cellules que nous appellerons « Carte Optimale de la
Gouvernance ». Cette projection s’effectue de telle sorte que les pays qui présentent des
caractéristiques semblables soient regroupés dans la même classe. Dans un deuxième temps,
nous exploiterons ces résultats pour avoir un regroupement plus spécifique des pays, en
appliquant un algorithme de classification appelé K-MEANS (K-MOYENNES). Nous irons
encore plus loin dans l’exploitation des résultats de notre SOM en essayant de repérer pour
chaque région de la carte, les variables qui ont le plus participé au développement de la
gouvernance et celles qui sont à l’origine de son retard, en utilisant la carte des poids
synaptiques. Une dernière méthode d’exploitation des Cartes Auto Organisatrices est due au
travail de Chtourou et Féfki (2008). Ces derniers font une extension judicieuse des cartes
auto-organisatrices pour en tirer une nouvelle méthode d’agrégation baptisée «Chtourou-Feki
Aggregation and Ranking method: C-FARm© 2 » ; l’originalité de cette méthode réside dans
l’utilisation de pondérations spécifiques et déterminées d’une manière objective grâce à un
processus d’apprentissage itératif pour construire un indicateur composite de gouvernance.
Cette méthode présente un avantage majeur, par rapport aux méthodes classiques
d’agrégation, dans la mesure où les pondérations de chaque variable qui forment l’indicateur
vont être spécifiques à chaque pays. Le classement des pays selon leur qualité de gouvernance
obtenu par cette méthode sera comparé avec celui obtenu par l’ACP.
2
    Modèle ayant obtenu l’Attestation d’Acceptation de Dépôt (n°298/2008) de l’Organisme de Protection des Droits de Propriété (WIPO-
    OTPDA) : CHTOUROU-FEKI AGGREGATION AND RANKING method (C-FARm) ©




                                                                                                                             -17-
Enfin, dans le quatrième chapitre, nous effectuerons une étude économétrique de la relation
entre la gouvernance et la croissance économique. Notre démarche empirique est motivée par
une tentative de dépassement des carences des anciens travaux empiriques sur la relation entre
gouvernance et croissance. Nous allons pouvoir vérifier s’il existe bien une relation entre la
gouvernance et le taux de croissance économique. Nous accordons un intérêt particulier à
l’identification des mécanismes à travers lesquels la gouvernance affecte la croissance
économique. La gouvernance toute seule ne peut pas promouvoir la croissance et ses effets
doivent opérer par l'intermédiaire de leur impact sur l'accumulation des facteurs (effets
indirects) et/ou sur la productivité (effets directs). En effet, la spécification des modèles
empiriques utilisés dans les travaux ignore souvent l’effet sur l’accumulation des facteurs
dans la mesure où les régressions sont le plus souvent spécifiées dans le cadre de la forme
simple du modèle de Solow augmenté. Cela capture uniquement l’effet marginal des variables
institutionnelles sur la croissance, effet appelé dans la littérature « effet direct ». Plus
précisément, cet effet traduit l’effet de la gouvernance (institutions) sur la productivité des
facteurs ou encore l’efficacité productive, souvent noté comme suit « A » dans le modèle de
croissance de Solow. En général, les effets indirects ne sont pas toujours pris en compte, voire
sont ignorés la plupart du temps. Nous insisterons sur le fait que l’étude du rôle de la
gouvernance dans la croissance économique doit être affinée et traitée avec précaution,
notamment à travers l’utilisation de méthodes adéquates. C’est sur cette voie que nous nous
baserons pour traiter de cette relation. L’objectif de ce quatrième chapitre est d’essayer d'aller
de l'avant en termes d'une meilleure compréhension de la gouvernance et de son rôle dans
l’amélioration des performances économiques, tout en adoptant les mesures économétriques
nécessaires pour contourner les limites déjà soulevées. Notre travail empirique se distingue
largement des anciens travaux et ceci à plusieurs niveaux. Premièrement, au niveau de la prise
en compte des effets indirects de la gouvernance sur la croissance et au niveau de la mesure
de la gouvernance utilisée. La gouvernance est mesurée par deux indicateurs composites
construits à partir de deux méthodes différentes, à savoir l’ACP et CFAR. Deuxièmement, au
niveau de la vérification de l’existence de cette relation, en faisant la distinction entre une
étude entre la gouvernance et le niveau du revenu et entre la gouvernance et le taux de
croissance économique. Troisièmement, au niveau l’approche empirique employée : afin de
déterminer les effets directs et indirects de la gouvernance, nous combinons deux méthodes, à
savoir, l’approche comptable de la croissance et l’approche économétrique. Quatrièmement,
au niveau de la robustesse des résultats : afin d’avoir des résultats robustes, nous appliquons
plusieurs tests de robustesse, par exemple, la méthode des limites extrêmes ou encore de «


                                                                                             18
l’Extreme Bound Analysis », la régression quantile permet de prendre en compte
l’hétérogénéité de l’échantillon étudié. Cela va nous permettre de savoir si les effets de la
gouvernance sont hétérogènes suivant le niveau même du taux de croissance économique.




                                                                                       -19-
Chapitre 1: La Notion de
Gouvernance :       Emergence,
Significations, et Mesures.




                            -20-
Introduction
L'objectif de cette thèse étant la relation entre la gouvernance et la croissance économique, il
semble opportun d'amorcer ce travail par une présentation de la notion de gouvernance ainsi
que de ses différentes mesures. Un tel exercice est essentiel, dans la mesure où il va nous
permettre de justifier le type de gouvernance à laquelle on fait référence dans ce travail. Une
étude des différentes significations et mesures de ce concept apporte un premier éclairage
nécessaire à une meilleure compréhension de la problématique étudiée.
La notion de gouvernance se présente aujourd’hui comme un terme « fourre-tout » qui fait
appel à diverses disciplines des sciences sociales et des sciences humaines : philosophie,
économie, science politique, administration publique, étude des organisations, étude du
développement, relations internationales etc.… Elle peut être définie de différentes manières,
et sa signification diffère certainement quand on parle de gouvernance locale, de gouvernance
urbaine, de gouvernance d'entreprise, de gouvernance nationale ou encore de gouvernance
mondiale. Cette multitude de définitions fait de la gouvernance un terme polysémique. Le
terme est en effet défini et entendu aujourd’hui de manière diverse et parfois contradictoire,
chaque entité lui donnant un contenu en fonction de ses orientations et de ses objectifs
propres.
En effet, cette notion de gouvernance est devenue, depuis peu, l’un des vocables les plus
employés sur la scène internationale en général et dans les questions portant sur la
coopération et le développement, en particulier. Pour certains spécialistes, elle serait même
entrée dans la fameuse catégorie des « mots-valises » ou encore buzzwords (mots à la mode)
qui animent les débats et fondent les actions portant sur le développement. Pierre et Peters
(2000) avancent plusieurs raisons explicatives à ce grand intérêt : les crises financières des
Etats, le changement idéologique du politique vers la sphère marchande comme espace de
régulation, la globalisation, avec le développement des institutions transnationales et la
montée en puissance d’acteurs non étatiques, les critiques envers l’Etat et ses échecs dans la
gestion des problèmes collectifs, l’émergence d’une nouvelle gestion de l’action publique, le
changement social et les complexités croissantes, l’importance grandissante accordée aux
modes de régulation à l’échelon régional et international.
Faisant partie du vocabulaire usuel des institutions financières multilatérales depuis le milieu
des années 90, la « bonne gouvernance » s’appuie essentiellement sur l’introduction de


                                                                                          -21-
nouvelles réformes non plus économiques et financières mais institutionnelles, visant non
seulement la réforme de l’Etat mais aussi le mode de fonctionnement des marchés. Cette
notion de gouvernance n’est devenue véritablement opératoire et n’a été effectivement
introduite dans l’analyse du fonctionnement des pays en développement qu'à la suite des
premières évaluations des programmes d’ajustement structurel (PAS). Depuis, elle est devenu
un concept dominant dans la gestion des affaires publiques.
L'augmentation sensible de l’intérêt pour la gouvernance et ses conséquences économiques
dans les pays en développement, a alimenté le besoin d'évaluer ses différentes dimensions.
Fidèles au principe que l’on ne peut gérer ou contrôler que ce que l’on peut quantifier, de
nombreuses agences nationales et internationales ont cherché à mesurer la qualité de la
gouvernance dans le monde surtout après l’initiative prise dans ce sens par l’Institut de la
Banque Mondiale. Aujourd’hui, la mesure de la gouvernance est importante, tant du point de
vue de la politique nationale que de celui des relations économiques internationales ou encore
de la recherche en sciences économiques et politiques. Une large gamme d'indicateurs
internationaux a été développée pour essayer d'éclairer divers aspects de la gouvernance.
Aujourd’hui, il est possible de compter près de 160 bases de données ou d’indicateurs
permettant d’évaluer divers aspects de la gouvernance. Il s’agit généralement d’évaluations
subjectives produites par des agences privées de notation du risque, des organisations
multilatérales, des centres de recherche ou encore des organisations non gouvernementales.
Les données les plus utilisées dans le milieu académique et par les organisations
internationales sont celles de l’agence privée de notation du risque, The Political Risk Service
Group (PRS) et celles de la Banque Mondiale (World Wide Governance Research Indicators).
Les opinions sont trop peu optimistes quant à l’utilisation de ces indicateurs. En effet, selon
une étude du centre de développement (OCDE 2006) intitulée « les indicateurs de
gouvernance : usages et abus », élaborée par Christiane Arndt et Charles Oman, il est peu
vraisemblable qu’existe un jour un indicateur de gouvernance parfait. Même les indicateurs
les mieux construits présentent de graves inconvénients que les utilisateurs ne semblent pas
percevoir : subjectivité, opacité, impossibilité de procéder à des comparaisons dans le temps,
biais d’échantillonnage et utilité réduite pour aider les pays en développement à identifier
correctement des solutions qui leur permettraient d’améliorer la qualité de la gouvernance.
Deux principales difficultés sont alors mises en avant dans ce chapitre, celle liée à la
définition de la gouvernance et celle liée à sa mesure. En effet, il n’existe pas de définition
unique de la gouvernance qui fasse l’objet d’un consensus : «There are almost as many ideas
of governance as there are researchers in the field» (Hufty 2007). Pour mieux appréhender le


                                                                                          -22-
sens donné à la gouvernance, il est utile de remonter à l’origine de cette notion ; c’est ce qui
va faire l’objet de la première section de ce chapitre. Cette dernière vise à donner un éclairage
sur les différentes significations de la notion de gouvernance, tout en faisant la distinction
entre la gouvernance d’entreprise, la gouvernance mondiale et la gouvernance publique. Dans
une deuxièmement section, nous présenterons les principales raisons pour lesquelles la notion
de gouvernance a émergé dans « l’économie du développement ». En effet, jusqu'au début des
années 1990, le terme de gouvernance était rarement utilisé par les économistes du
développement et les décideurs politiques. Depuis, il y a eu une prise de conscience que la
structure de la qualité de la gouvernance d’un pays est un facteur déterminant de sa capacité à
assurer un développement économique et social soutenable. La notion de gouvernance pose
en quelque sorte, d’une manière nouvelle, la problématique des liens entre Etat et marché.
Enfin, dans la troisième section, nous ferons une revue des indicateurs de gouvernance les
plus populaires dans la recherche académique tout en relevant leurs différentes limites. Le but
est de clarifier les limites auxquelles les utilisateurs de ces indicateurs se trouvent confrontés



Section 1. La Gouvernance : une notion difficile à définir
Par sa genèse et son évolution, la gouvernance se présente aujourd’hui comme une notion
complexe qui fait appel à diverses disciplines des sciences sociales et des sciences humaines.
En revanche, une définition claire et opérationnelle n’a pas encore été formulée. A présent, il
y a une diversité extravagante de définitions de ce terme qui diffèrent selon les questions, les
problèmes ou encore les objectifs qui sont pris en compte.
Selon Hufty (2007), il existe aujourd’hui trois manières d’approcher le concept de
gouvernance. La première est celle qui voit la gouvernance comme synonyme de
gouvernement. La deuxième approche la considère comme un outil d’observation, c’est à dire
un cadre analytique pour les systèmes de coordination non-hiérarchiques (gouvernance
d’entreprise, gouvernance mondiale). La troisième est celle qui l’assimile à un cadre normatif
(approche de la Banque Mondiale). Afin de mieux comprendre la signification de la notion de
gouvernance, il semble important de distinguer de ces différentes appellations pour finir par
se concentrer uniquement sur la gouvernance nationale ou encore la « bonne gouvernance »,
telle qu’elle est popularisée depuis le début des années 1990 au sein des études sur les pays en
développement.




                                                                                             -23-
Par ailleurs, la « bonne gouvernance » a fait l’objet d’interprétations différentes selon
l'institution qui l’adopte. Pour la Banque Mondiale par exemple, il s’agit de la gestion efficace
des biens publics. Pour d’autres analystes, c’est le problème de la corruption qui est va être le
point de blocage du développement. Pour avoir une compréhension plus claire de ces
différentes définitions, on fera une synthèse des définitions adoptées par les grandes
Institutions Financières Internationales (BM, FMI, PNUD, BAD, OCDE, CE…).


           I- Les différents contenus de la gouvernance

            I-1 ) La gouvernance nationale et le concept de « gouvernement »
Utiliser le terme gouvernance comme un synonyme de gouvernement correspond à son usage
historique (Hufty 2007). En effet, Gaudin (2002) parle de « trois vies successives » de la
notion de gouvernance : médiévale, classique et moderne. Le terme a une origine grecque : «
kubernân », signifie l’action de piloter « l’action de piloter quelque chose », un navire ou un
char. Il est utilisé pour la première fois par Platon (Oliveira 2002) de façon métaphorique,
pour parler des hommes. En latin, il est exprimé par le terme « gubernare », avec son sens
premier. Il fait son apparition dans la langue française au début du XIIIème siècle comme
équivalent du terme de gouvernement3. Selon Campbell4, les origines françaises du terme de «
gouvernance » ne font aucun doute. Au XIVème siècle, il désigne certains territoires, les
bailliages de l’Artois et de la Flandre (Hufty2007). Au même moment, au XIVème siècle, le
terme passe dans la langue anglaise avec le même sens qu’en français.
Au XIVème siècle, la réflexion sur l’Etat et le pouvoir a conduit à une distinction entre
gouvernement et gouvernance. Dans la théorie politique anglo-américaine, le mot
gouvernement se réfère aux institutions officielles de l’Etat et au pouvoir coercitif légitime
dont elles ont le monopole. Le gouvernement se caractérise par la capacité de prendre des
décisions et le pouvoir de les appliquer. Ce mot signifie en particulier les processus formels et
institutionnels qui, au niveau de l’Etat-nation, ont pour but d’assurer le maintien de l’ordre
public et de faciliter l’action collective (Stoker 1998), alors que la gouvernance devient la
manière de gérer adéquatement la chose publique indépendamment de la question du pouvoir
(Canet, 2004). Aujourd’hui la gouvernance implique une nouvelle définition du
gouvernement qui correspond à un nouveau processus de gouvernement, ou encore, une
nouvelle façon de gouverner la société (Rhodes, 1996).
3
    Le Robert, Dictionnaire Historique de la Langue française, Paris 1992, opt cité Campbell.
4
    Communication pour la table ronde : «Quel modèle politique est sous-jacent au concept apolitique de gouvernance », Séminaire d’été du
     Haut Conseil de la coopération Internationale, Dourdan, France, Août 2000.




                                                                                                                                -24-
Pour Rosenau (1992) : «…La gouvernance n’est pas synonyme de gouvernement. Les deux
notions se référent à des comportements exprimant une volonté, à des activités guidées par un
but, à des systèmes de règles. Mais l’idée de gouvernement implique une autorité officielle,
dotée de capacité de police garantissant la bonne exécution de la politique adoptée. La
gouvernance, elle, couvre des activités sous-tendues par des objectifs communs ; ces objectifs
peuvent s’inscrire ou non dans des mécanismes légaux et formels de responsabilité, ils ne
requièrent pas nécessairement des pouvoirs de police pour surmonter les méfiances et obtenir
l’application de la norme. En d’autres mots, la gouvernance est un phénomène plus large que
le gouvernement. Elle inclut les mécanismes gouvernementaux, dans le sens strict du terme,
mais elle s’étend à des dispositifs informels, non gouvernementaux, par lesquels, au sein de ce
cadre, individus et organisations poursuivent leurs propres intérêts. La gouvernance est donc
un système de règles reposant tant sur le jeu des relations interpersonnelles que sur des lois et
des sanctions explicites… », Rosenau (1992).
Pour Hewitt De Alcantara, le concept de gouvernance a permi aux Institutions Financières
Internationales d’abandonner l’économisme et de revenir aux questions sociales et politiques
essentielles que posait le calendrier des restructurations économiques. Il permettait de surcroit
de ne pas s’opposer trop ouvertement à des gouvernements qui, en général, n’aimeraient guère
que des préteurs leur donnent des leçons sur des points sensibles de politique intérieure et
d’administration. En parlant de « gouvernance » plutôt que de réforme de l’Etat ou de
changement politique ou social, les banques multilatérales et les organismes de
développement, ont pu aborder des questions délicates susceptibles d’être ainsi amalgamées
sous une rubrique relativement inoffensive, et d’être libellées en termes techniques, évitant de
la sorte à ces organismes d’être soupçonnés d’outrepasser leurs compétences statutaires en
intervenant dans les affaires politiques d’Etats souverains (Hewitt de Alcantara 1998).
Dans une acceptation large, la gouvernance peut être définie comme le mode par lequel
chaque type de gouvernement, démocratique ou autocratique, exerce le pouvoir, conçu selon
la formule du président. Cette gouvernance est alors un mode de gestion du pouvoir et renvoie
à l’organisation de l’Etat, de la société et de l’économie. Cette notion de gouvernance
nationale apparaît aujourd’hui pour montrer que l’Etat n’est plus une entité fermée et
souveraine ne rendant pas de compte à leur population ni à la communauté internationale. Les
Etats sont largement considérés comme des institutions au service de leur peuple et doivent
bénéficier d’une bonne gouvernance.
C’est dans cette conception, plus proche de la notion de gestion que de celle de pouvoir, que
le terme de gouvernance s’est développé. Plus précisément, c’est sous l’impulsion des


                                                                                           -25-
Institutions Financières Internationales que le concept de gouvernance est aujourd’hui
largement utilisé pour désigner les modes de gestion politique et économique. Les différentes
définitions de la gouvernance adoptées par ces institutions seront abordées ultérieurement.


             I-2 ) La gouvernance d’entreprise : « corporate governance »
Le courant lié à la « corporate governance », apparait aux Etats-Unis avec l’essor des sciences
de gestion. Il se développe à partir de l’analyse du pilotage des organisations et constate que
ce pilotage ne doit plus être uniquement hiérarchique. Il s’agit dès lors d’observer et de
théoriser les mécanismes concrets et les institutions qui permettent la coordination entre les
unités d’une organisation, l’arbitrage des divergences, le maintien de la cohésion de
l’ensemble et la gestion des coûts de transaction entrainée par un pilotage davantage
horizontal que vertical (Hufty 2007).
De nombreux auteurs attribuent l'introduction de la notion de gouvernance dans l’analyse
économique à Ronald Coase. La principale référence citée est l'article "The nature of the firm"
(Coase, 1937). Ronald Coase remet en question l'hypothèse de la régulation des échanges par
les seuls prix du marché et introduit, en économie, l'idée qu'il puisse exister différents modes
de régulation et de gestion. Le système formé par ces différents modes de régulation propres à
une entreprise a été, par la suite, conceptualisé sous le terme de « corporate governance ». Ce
concept étant propre à l'analyse économique d'une firme, il représente l'ensemble des «
dispositifs mis en œuvre par la firme pour mener des coordinations efficaces qui relèvent de
deux registres : protocoles internes lorsque la firme est intégrée (hiérarchie) ou contrats,
partenariats, usage de normes lorsqu'elle s'ouvre à des sous-traitants » (Lorrain, 1998).
Dans les années 1970, ce concept devient central dans le courant de l'économie néo-
institutionnaliste. Pour un des auteurs clés de ce courant, Williamson prix Nobel d’économie
en 2009 (1979, 1984, 1996) qui prend appui sur les travaux de Coase, la structure des
institutions, par exemple la firme ou le marché, donne lieu à des approches et mécanismes de
gouvernance variés. Elles représentent des structures de gouvernance distinctes, qui
connaissent des problèmes de coûts de transaction et de contractualisation spécifiques,
auxquels s’adresse précisément l’étude la gouvernance : « l’étude de la gouvernance concerne
l’identification, l’explication et l’atténuation de toutes formes de risques liés à la
contractualisation 5 » Williamson (1996).



5
    Traduction de « The study of governance is concerned with identification, explication, and mitigation of all forms of contractual hazards».




                                                                                                                                        -26-
Selon cette approche, la notion de gouvernance dans le champ de l'économie, est alors fixée
pour désigner un ensemble de processus de coordination qui peuvent s'inscrire dans un
système hiérarchisé. La gouvernance d’entreprise vient d’abord de l’existence d’un pouvoir,
celui des actionnaires. Les entreprises qui se développent ne peuvent plus appartenir à une
seule famille ou même à une seule nation. En effet, l’entreprise, si elle reste dirigée par un
groupe restreint, s’épuise surtout si ce groupe est tenté de privilégier le maintien de son
contrôle et finit souvent par disparaitre. L’entreprise devient l’enjeu d’une partie complexe
entre dirigeants et actionnaires, alors que les salariés et les clients passent au second plan.
Comment assurer un contrôle pertinent des entreprises ? Quel équilibre entre les parties
prenantes : hauts dirigeants, salariés, actionnaires, pouvoirs publics ? La gouvernance
d’entreprise s’inscrit dans des rapports de force. La gouvernance d’entreprise vise à introduire
des règles : transparence des comptes, contrôle par des instances indépendantes, recours et
sanctions contre les responsables.
Ainsi, divers usages du terme de gouvernance dépassent l'analyse des systèmes regroupant
uniquement des agents productifs (la firme) pour s'intéresser à des systèmes rassemblant des
acteurs mais aussi des nations. On parle alors de la gouvernance nationale et de la
gouvernance globale.


       I-3 ) La gouvernance mondiale
La notion de gouvernance globale est employée dès la seconde moitié du 20ème siècle avec le
développement du phénomène de la mondialisation. La gouvernance globale dépasse la
gouvernance nationale et confirme la disparition des frontières entre la dimension nationale et
la dimension internationale : « la gouvernance mondiale, c’est gouverner sans autorité
souveraine des relations transcendant les frontières nationales » [Finkelstein (1995. p368)].
La gouvernance a fait son entrée dans le champ des relations internationales à travers les
notions de gouvernance mondiale et de gouvernance globale. La construction d’un système de
gouvernance mondial permettrait de pallier l’incapacité des Etats-nation et des organisations
internationales actuelles à faire face aux demandes de la société. C’est en réponse à la crise
de la gouvernabilité au niveau supranational que se sont développés des travaux et des
réflexions autour de la notion de gouvernance globale. Cette notion a suscité un grand nombre
de travaux qui s’inscrivent dans le prolongement des études sur les régimes politiques et les
institutions internationales. Ces travaux relèvent de deux catégories : soit d’une réflexion
analytique sur le système international présent, soit d’une réflexion normative sur un système
de gouvernance mondiale qu’il conviendrait de construire.


                                                                                          -27-
Dans ce cadre, la gouvernance est interprétée de deux façons différentes. Certains auteurs
assimilent la gouvernance à un système de normes et non à un processus. La gouvernance
surgirait d’un accord ou d’un consensus sur des valeurs communes, des objectifs communs
dégagés au cours de négociations transnationales associant l’Etat mais aussi des acteurs privés
et associatifs. Pour d’autres, dans des domaines tels que le contrôle du système monétaire
international ou la gestion de la dette des pays en développement, qui sont des questions qui
peuvent être analysées en termes de gouvernance, il n’y a pas de normes et de règles vers
lesquelles les attentes des acteurs convergent mais des mécanismes de dialogue qui assurent la
participation des acteurs principaux. La gouvernance consiste alors à regarder comment se
déroule le mécanisme de « régulation conjointe » par un jeu permanent d’échanges,
d’ajustements mutuels, plutôt que de regarder comment les acteurs ont la capacité de définir
les règles du jeu et déterminent les résultats d’une négociation dans des secteurs clés de la vie
internationale. La gouvernance est alors considérée comme un processus d’accommodement
entre de multiples parties défendant chacune leurs intérêts.
La Commission sur la Gouvernance Globale, créée au début des années 90 à l’initiative du
chancelier Brandt pour penser le monde de l’après-guerre froide, fournit en 1995 une
définition qui mérite d’être mentionnée : au niveau mondial « la gouvernance a été vue
comme une relation essentiellement entre gouvernement. Désormais, il faut la penser comme
impliquant aussi les ONG, les mouvements des citoyens, les entreprises multinationales et le
marché mondial. Tout cela en interaction avec les médias dont l’influence s’est accrue de
                                   6
façon spectaculaire »                  (CGG 1995). La gouvernance globale, constituerait la réponse à
apporter à la crise de la gouvernabilité que rencontre le système international. Cependant, la
vie politique telle qu'elle est envisagée par la Commission se résume à une gestion
technocratique des affaires publiques. La Commission considère la politique internationale
comme une entreprise dans laquelle tous les acteurs apportent leur contribution, en vue de
finalités utilitaires.


          II- « La bonne gouvernance »

            II-1 ) Origine du concept
L’expression « good governance » est due à Ismail Serageldin (Mills et Serageldin,1991),
vice-président de la BM. Dans son rapport de 1994 « Gestion des affaires publiques », la
bonne gestion des affaires publiques s’incarne dans une prise de décision politique prévisible,
6
    Traduction à partir du CGG (Commision on Global Governance). (1995), Our Global Neighbourhood, Oxford, Oxford University Press.




                                                                                                                              -28-
ouverte et éclairée (c’est-à-dire dans des processus transparents) dans une bureaucratie
imprégnée d’une éthique professionnelle, dans un gouvernement exécutif responsable de ses
actions; et dans une société civile forte, participant aux affaires publiques et où tous obéissent
à la loi 7.
Aujourd’hui, la BM entend, par gouvernance, la capacité de l’Etat à fournir les institutions
apportant leur appui aux activités marchandes et par « bonne gouvernance » la fourniture
réussie de telles institutions8. La bonne gouvernance inclut la création, la protection et le
respect des droits de propriété, un système de réglementation soutenant la concurrence, de
saines politiques macroéconomiques créant un environnement stable pour les activités
marchandes. La bonne gouvernance signifie aussi l’absence de corruption, dans la mesure où
celle-ci peut altérer les objectifs des politiques et affaiblir la légitimité des institutions
publiques (World Bank, 2002, p 99).
La Banque Mondiale élabore une série de critères de qualité de la gouvernance destinés à
évaluer les normes et les pratiques de gouvernement et d’organisation. Bien qu’il n’existe pas
de liste définitive et homogène de ces pratiques dans les organisations qui prônent la bonne
gouvernance, l’Institut de la BM fournit un exemple de ces critères : écoute et imputabilité
(accountability)9, stabilité politique et absence de violence, efficacité du gouvernement,
qualité de la réglementation, État de droit et maîtrise de la corruption.
La BM analyse la gouvernance dans un cadre fondé sur des valeurs universelles qui sont
l’inclusion et la responsabilité. Pour elle, ces deux critères doivent être remplis pour que l'on
puisse parler de "bonne gouvernance".
    − L'inclusivité : cette notion renvoie à l'idée d'égalité des droits civils et politiques
        présente dans toutes les démocraties libérales. Cela signifie que tous les citoyens se
        voient garantir de façon égale certains droits fondamentaux, notamment l’égalité devant
        la loi et le droit de participer au processus de gouvernance sur un pied d’égalité. Elle
        signifie aussi l’absence d’exclusion et de discrimination dans toute relation entre les
        citoyens et l’Etat. Elle renvoie à la notion d’égalité qui signifie que tous ceux qui sont
        concernés par le processus de gouvernance et souhaitent y participer peuvent le faire
        comme tous les autres. Selon la BM, une gouvernance inclusive entretient les
        mécanismes qui définissent et qui protègent les droits fondamentaux de tous et assure la
        garantie de l’autorité de la loi. La bonne gouvernance signifie alors que les droits sont
7
  http://www.worldbank.org/publicsector/overview.htm
8
  La définition adoptée est celle des institutions de North (1994).
9
  Selon la Banque Mondiale, la notion d’imputabilité est synonymes de responsabilité publique et renvoie à la l’obligation des dirigeants de
rendre compte de leurs actions devant la population.




                                                                                                                                   -29-
protégés et que l’Etat traite tout le monde de la même façon devant la loi, sans
      discrimination et assure l’égalité des opportunités d’accès aux services publics. Toute
      personne concernée par l'exercice de l'autorité (en somme l'ensemble du corps électoral
      en situation de suffrage universel) doit pouvoir y participer, directement ou
      indirectement, sur un pied d'égalité avec les autres membres du corps social. L'Etat de
      droit constitue le corollaire de "la gouvernance inclusive", puisqu'elle nécessite la mise
      en œuvre de mécanismes de recours permettant de faire respecter ces droits, de garantir
      de facto l'égalité des citoyens devant la loi et l'égal accès aux services publics (Rapport
      sur le développement au Moyen Orient et en Afrique du Nord, 2005).
   − La responsabilisation : elle dérive de la notion de représentation. Cela signifie que les
      personnes qui sont choisies pour agir au nom du peuple, ont à répondre devant lui de
      leurs échecs comme de leurs sucès. En d’autres termes, ces personnes sont responsables
      devant le peuple. Cette responsabilité repose sur la connaissance et sur l’information et
      donc sur la transparence. Elle recouvre deux notions: la transparence et la contestabilité.
      L'idée de transparence renvoie à la nécessité que les citoyens accèdent à toute
      l'information concernant le fonctionnement et les modes d'organisation des institutions
      publiques et politiques afin qu'il soient réellement en mesure d'exercer de façon
      effective…la contestabilité, c’est-à-dire le caractère concurrentiel du processus de
      désignation des responsables politiques (le pluralisme) et des prétendants à la gestion
      publique (désignation équitable des agents de l'Etat). Concrètement, l'exercice de la
      contestabilité a lieu notamment lors d'un processus électoral libre, où l'on peut
      sanctionner ses dirigeants, ou lors d'un recours devant une juridiction administrative qui
      permet de condamner les manquements à la loi par les autorités publiques.


La responsabilisation peut également être interne (lorsque sont institués des mécanismes de
contrôle entre ou bien au sein même des institutions administratives et politiques) et externe
(lorsque le citoyen demande des comptes à un dépositaire de l'autorité publique).
Les deux valeurs universelles sur lesquelles se base la Banque Mondiale pour définir la bonne
gouvernance, à savoir l’inclusion et la responsabilité, apparaissent comme des éléments
essentiels de tout programme destiné à améliorer la gouvernance. Il faut, d’une part, que les
droits fondamentaux, notamment le droit de participer au processus de gouvernance, l’égalité
devant la loi et un traitement égal, soient garantis dans tous les éléments du programme.
D’autre part, pour que ce programme soit sur le bon chemin, une transparence accrue et la
possibilité de contestation sont exigées.


                                                                                           -30-
Le programme pour améliorer la gouvernance peut être élaboré selon cinq voies conduisant à
la bonne gouvernance : des mesures pour renforcer l’inclusion, des actions au niveau national
pour renforcer la responsabilité externe, des actions au niveau local pour renforcer la
responsabilité externe, un système national de contrôle pour renforcer la responsabilité interne
et des réformes administratives pour améliorer la responsabilité interne10.
      − Le renforcement de l’inclusion : pour renforcer l’inclusion, la première étape consiste à
           adopter des lois et des règlements pour garantir l’accès à des droits fondamentaux et
           principalement le droit de participer au processus de gouvernance sur un même pied
           d’égalité. Il y a également d’autres mesures pour garantir l’inclusion comme une
           consultation publique élargie, une plus grande liberté des médias, moins de restrictions
           imposées aux organisations de la société civile, un accès plus équitable à la santé et à
           l’éducation.
      − Le renforcement de la responsabilité externe au niveau national : ce sont des mesures
           qui permettent de voir si le contexte institutionnel global d’un pays est favorable ou non
           à une bonne gouvernance. Par exemple, faire circuler assez l’information qui est un
           vecteur de transparence sur les actions du gouvernement, accroitre les possibilités de
           contestation grâce à des élections ouvertes, loyales et régulières des responsables des
           affaires publiques, permettre davantage à la société civile de se faire écouter et de
           participer, notamment au moyen de groupes de défense des citoyens, instaurer un
           meilleur contrôle de la qualité de la gouvernance et faire en sorte que soient mieux
           diffusées les statistiques qui mesurent cette qualité selon les divers aspects (contrôle de
           la corruption, autorité de la loi, liberté de la presse, ect) ; et enfin favoriser
           l’indépendance et la responsabilisation des médias.
      − Le renforcement de la responsabilité externe au niveau local : pour faire progresser la
           responsabilité externe, il faut veiller à une plus grande participation citoyenne et
           notamment en assurant une information plus fiable sur les performances des services
           publics par des enquêtes ou encore des consultations, en renforçant la concurrence entre
           les prestataires de services en donnant à la clientèle une plus grande liberté de choix , en
           prenant des mesures pour renforcer les autorités locales qui sont les plus proches de la
           population et donc capables de l’impliquer directement dans les décisions publiques, et
           enfin en facilitant l’implication des associations qui donnent du pouvoir aux


10
     Rapport sur le Développement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (2005), « Vers une meilleure gouvernance au Moyen-Orient et en
     Afrique du Nord », la Banque Mondiale, Washington, DC, pp.18-23




                                                                                                                             -31-
collectivités, surtout en ce qui concerne la gestion des services publics qui doivent être
     adaptés à des collectivités spécifiques.
  − Le renforcement de la responsabilité interne par un système national de contrôle : elle
     vise à accroitre les possibilités de contestations dans l’exercice du pouvoir de l’Etat. Il
     s’agit de renforcer l’autorité et la capacité du pouvoir parlementaire, de renforcer le
     pouvoir judicaire pour qu’il soit plus indépendant et avec une capacité renforcée, et de
     donner des pouvoirs de contrôle et de médiation à d’autres organismes publics
     indépendants.
  − Le renforcement de la responsabilité interne à travers des réformes administratives : un
     certain nombre de réformes peuvent renforcer la responsabilité au sein des organismes
     prestataires de services publics : réformer la fonction publique pour la responsabiliser
     davantage, décentraliser les fonctions de l’Etat pour les rapprocher des citoyens, assurer
     l’indépendance des organismes régulateurs afin d’éviter que des intérêts particuliers ou
     que de hauts fonctionnaires puissent profiter du système à des fins personnelles, et enfin
     promouvoir une éthique du service public et de la responsabilité vis-à-vis des ressources
     publiques afin de renforcer l’implication des fonctionnaires dans la recherche de
     meilleurs performances.
  − L’Etat de droit est ici au cœur de la bonne gouvernance. Il s’agit de mettre en place « un
     système de règles qui soient réellement appliquées et d’institutions qui fonctionnent
     vraiment et assurent une application appropriée de ces règles. Il est alors nécessaire que
     les dirigeants politiques soient responsables de leurs actes devant les citoyens et qu’ils
     soient engagés dans la lutte contre la corruption. Il convient alors de relever que le
     concept de gouvernance reste tributaire de la conception de l’Etat et renvoie aux
     rapports des classes au sein de sociétés (Rapport sur le développement au Moyen Orient
     et en Afrique du Nord, 2005).


      II-2 ) Les éléments de la bonne gouvernance
Daniel Kaufmann, ancien directeur du programme gouvernance à l’Institut de la Banque
Mondiale, et Aart Kraay, économiste principal dans le Groupe de recherche de la Banque,
définissent la gouvernance comme « les traditions et les institutions à travers lesquelles
l’autorité est exercée dans un pays pour le bien commun ». Cela recouvre le processus par
lequel les gouvernements sont choisis, contrôlés et remplacés, la capacité du gouvernement à
formuler et à appliquer de manière efficace des politiques saines et enfin cela recouvre le




                                                                                          -32-
respect des citoyens et de l’Etat pas les institutions régissant leurs interactions économiques et
sociales [Kaufman et Kraay (2002)].
Cette définition recouvre plusieurs aspects de la gouvernance qui touchent les éléments
suivants :
-       le caractère démocratique des institutions politiques ;
-       la stabilité politique, l’absence de violence et l’efficacité des pouvoirs publics ;
-       la lutte contre la corruption et l’exigence de la transparence et de la responsabilité

              II-2-1 ) La démocratie
La démocratie est présentée, par la Banque Mondiale, comme un élément très important de la
bonne gouvernance. Elle fait partie du volet politique de la définition de la Banque Mondiale
et rend compte généralement de la nécessité de l’existence d’un Etat de droit dans le pays.
Le concept de démocratie a fait l’objet de plusieurs définitions. Ce concept met en avant
l’idée d’égalité entre toutes les personnes à l’intérieur d’un pays. Cette légalité juridique leur
attribue un droit égal de participation dans le domaine de la politique. La démocratie vise
ainsi à protéger les gouvernés contre toute autorité arbitraire par le respect des procédures
régulières dans l’exercice du pouvoir. Ce système qui est centré sur l’homme, exige de lui une
manifestation concrète et claire de sa volonté. Ceci est facilité par la consécration des libertés
de penser, de la presse, de réunion, de posséder et de choix des représentants dans un contexte
pluraliste.
Un régime politique démocratique limite les leaders politiques par des institutions électorales,
législatives et judiciaires (Kauffmann, 2001). Ces limites que les institutions placent sur les
actions arbitraires des leaders politiques, des fonctionnaires et des juges, impliquent que l’Etat
de droit soit opérationnel dans la sphère politique. Les leaders politiques n’ont pas le droit de
déclarer illégales des organisations politiques, de limiter la liberté d’expression, de harceler
les opposants politiques ni d’annuler les élections.

              II-2-2 ) L’instabilité politique
Le concept d’instabilité politique est un concept qui rassemble plusieurs facteurs qui ne se
regroupent pas nécessairement et qui doivent être pris simultanément. En effet, c’est un
concept ambigu qui nécessite une clarification : il recouvre deux réalités distinctes qui ont des
effets différenciés en termes de développement économique.
Il est nécessaire de distinguer entre les changements de régime ou de pouvoir politique
réalisés à la suite d’actions violentes des changements opérés dans le respect des formes
légales. Il est généralement attribué au premier phénomène, les vocables d’ « instabilité


                                                                                               -33-
politique » et d’ « alternance politique » pour le second phénomène. Cependant, la distinction
entre les deux n’est pas toujours établie explicitement dans la littérature et elle s’intéresse
principalement à l’instabilité politique plutôt qu’à l’alternance.
L’instabilité politique recouvre l’ensemble des événements violents d’origine politique, cela
regroupe les manifestations agressives, les émeutes, les assassinats politiques.
Sur le plan théorique, l’étude des effets de l’instabilité politique sur la croissance se concentre
sur la façon dont certains événements rendent incertains les droits de propriété et se trouvent
donc menacés. En effet, les coups d’Etat réussis sont dangereux et ont, en général, pour
conséquence la destruction de la propriété privée. Cela va supposer des doutes sur la mise en
application des droits de propriété dans l’avenir.

             II-2-3 ) La corruption : un aspect fondamental de la gouvernance
La lutte contre la corruption est un élément central de la promotion de la bonne gouvernance,
elle fait l’objet d’attentions et de préconisations particulières. En fait, depuis le milieu des
années 90, un certain nombre de projets internationaux ont été élaborés en vue de lutter contre
les abus de fonctionnaires publics pour des gains personnels. Par exemple, on peut citer la
Convention des Nations Unies contre la corruption, signée en Décembre 2003, la Convention
sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales, adoptée par l'OCDE, le 21 Novembre 1997, ou la Convention de l'Union
africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption, adoptée par les chefs d'État et des
gouvernements de l'Union africaine le 12 Juillet 2003.
L’action de la BM en matière de corruption a deux volets : un volet opérationnel et un volet
de recherche. En effet, depuis 1996, la Banque Mondiale a lancé plus de 600 programmes
anti-corruption dans environ cent pays. Les initiatives vont des juges, des fonctionnaires à des
cours pour les journalistes d’investigation. La BM s’est aussi engagée à mesurer si les projets
qu’elle finance ne sont pas entachés par la corruption. Les actions de la BM en matière de
corruption portent également sur la recherche. Le groupe de recherche de la BM consacré à la
corruption est très actif. La plupart des articles publiés sur le sujet le sont par des membres de
ce groupe de recherche, ou des personnes y ayant collaboré ou appartenu (Kaufmann, Kraay
et Mastruzzi).
Depuis 1997, le FMI qui a fait de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption un
de ses objectifs principaux, a considérablement développé son rôle dans ce domaine. Les
principaux instruments qu’il utilise dans ce champ sont le développement et la promotion de




                                                                                             -34-
codes relatifs aux bonnes pratiques, à la transparence, à la responsabilité et à la gestion des
fonds publics11.
La corruption constitue l’un des piliers du concept de gouvernance les plus souvent débattus.
Si intuitivement, l’idée générale reçue est qu’elle peut constituer un handicap pour la
croissance économique d’un grand nombre de pays, la littérature témoigne également d’un
effet positif possible de la corruption sur les performances économiques.
Comme le concept de gouvernance, le terme de corruption est également un terme flou dont
l’établissement d’une définition stricte parait difficile. En effet, plusieurs définitions sont
attribuées à la corruption dans ses différents types et formes. Selon Bardhan (1997), la
corruption consiste dans l’utilisation du service public pour des gains privés. Pour Shleifer et
Vishney (1993), la corruption désigne l’échange d’éléments de propriété gouvernementale par
les officiers publics contre leur gain personnel. Selon Leff (1964), la corruption est un moyen
qui peut être entre les mains des entrepreneurs cherchant à faire des affaires avec un
gouvernement indifférent et peut stimuler le développement économique.
Bien qu'il soit difficile de s'entendre sur une définition précise, il y a un consensus qui fait
référence à toutes les formes d’abus de fonctions et de comportements commis par des
hommes politiques, des fonctionnaires ou au sein d’entreprises privées ou publiques pour
définir la corruption. Selon ce consensus, certains actes illégaux tels que la fraude, le
blanchiment d'argent, la drogue et les opérations de marché noir, ne constituent pas des actes
de corruption en eux-mêmes, car ils n'impliquent pas l'utilisation de la puissance publique.
Cela renvoie à la distinction entre deux formes de corruption : la grande corruption qui se
situe à un haut niveau où les décideurs politiques créant et appliquant les lois utilisent leur
position officielle pour promouvoir leur bien-être, leur statut ou leur pouvoir personnel ; alors
que la petite corruption renvoie principalement à la corruption bureaucratique dans
l’administration publique.
Toutefois, personne ne peut nier que certains de ces phénomènes sont étroitement liés à la
corruption. Vogl (1998), par exemple, met en évidence l'importance de la lutte contre le
blanchiment d'argent. Naylor (1987, 1996) étudie les liens du commerce de la drogue et la
corruption.
Depuis les années 1970, l’étude de la corruption, en sciences économiques et en sciences
politiques s’est centrée sur la corruption des agents publics et la définition de la corruption
adoptée est généralement axée sur les devoirs de l’administration. Aujourd’hui, dans la

11
     Site du Fonds Monétaire International : http://www.imf.org/external/np/exr/facts/fre/govf.htm




                                                                                                     -35-
plupart des travaux, la corruption est définie comme l’utilisation des pouvoirs que confère
une charge publique pour en retirer les avantages privés (BM, 1997). Cette définition exclut la
corruption observée dans le secteur privé.


            II-3 ) Les différentes compréhensions de la bonne gouvernance selon
                   les autres institutions internationales
L’expression de « bonne gouvernance » apparue pour la première fois dans le vocabulaire de
la BM est aujourd’hui reprise par les agences de développement, par les différentes
organisations internationales ou régionales (PNUD, CEE, FMI, BAD, OCDE…). Chacune a
développé sa propre définition de la gouvernance.
Le PNUD 12 définit la gouvernance de la façon suivante : « la gouvernance est l’exercice de
l’autorité administrative (la mise en œuvre de politiques), politique (la formulation de
politiques) et économique (la prise de décision à caractère économique) aux fins de gérer les
affaires d’un pays. Elle repose sur des mécanismes, des processus et des institutions qui
permettent aux citoyens et aux groupes d’articuler leurs intérêts, exercer leurs droits légaux,
remplir leurs obligations légales et négocier leurs différences ». Le PNUD a, de plus, cerné les
trois paliers de gouvernance, à savoir l’Etat (soit le pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire, les
services publics et l’armée) qui créée un environnement politique et légal propice ; le secteur
privé (la petite, la moyenne et la grande entreprise) qui crée emplois et revenus, et la société
civile (ONG, les associations professionnelles, les groupes religieux, les organisations
féminines et tous les citoyens) qui facilitent les interactions politiques et sociales. L’Etat a un
rôle de défendre les intérêts pour le bien public, favorise un climat propice au développement
humain, veille au respect de la loi, au maintien de l’ordre et de la sécurité, crée une identité et
une vision nationales, définit une politique et des programmes publics, génère des recettes
pour financer les services et les infrastructures publics, élabore un budget qu’il applique
ensuite, et réglemente et encourage le marché.
                                                                                13
La Commission des Communautés Européennes (CEE)                                      définit la gouvernance de la façon
suivante : « la gouvernance concerne les règles, les processus et les comportements par
lesquels les intérêts sont organisés, les ressources générées et le pouvoir exercé dans la
société. La manière dont les services publics fonctionnent, les ressources publiques sont
gérées et les pouvoirs réglementaires publics sont exercés, constitue le principal problème à
traiter dans ce contexte. La valeur réelle de la notion de gouvernance est qu’elle propose une

12
     PNUD. About the Democratic Governance Practice. www.undp.org/governance/about.htm consulté le 18 décembre 2009.
13
     Commission des Communautés Européennes (CEE) (2000), Livre blanc, La gouvernance européenne, Bruxelles, COM (2000) 366 final.




                                                                                                                           -36-
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Thèse - CFAR-m - Français

  • 1. UNIVERSITE DE NICE SOPHIA-ANTIPOLIS Faculté de Droit, des Sciences Politiques, Economiques et de Gestion CEMAFI Centre d’Etudes en Macroéconomie et Finance Internationale THÈSE Pour obtenir le grade de Docteur en Sciences Economiques Gouvernance et croissance économique Présentée et soutenue publiquement par Ouidade CHATTI Le 11 mars 2010 devant le jury : Directeurs : M. BERTHOMIEU Claude, Professeur à l’Université de Nice M. CHTOUROU Nouri, Professeur à l’Université de Sfax, Tunisie Rapporteurs : M. ARCAND Jean Louis, Professeur à l’Institut des Hautes Etudes Internationales et du Développement, Genève M. FEKI Rochdi, Professeur à l’Université de Sfax, ESC, Tunisie Examinateurs : Mme. GLORIA-PALERMO Sandye, Professeur à l’Université de Nice M. MAROUANI Albert, Président de l’Université de Nice
  • 2. Remerciements Je voudrais avant tout remercier chacun des membres de Jury pour l’honneur qu’ils m’ont fait de s’intéresser à ce travail et d’avoir accepté de l’évaluer. Mes remerciements s’adressent : A mes directeurs de thèse, Monsieur le professeur Claude BERTHOMIEU et Monsieur le professeur Nouri CHTOUROU qui ont accepté de co-encadrer ce travail. Je leur suis très reconnaissante pour la confiance qu’ils ont eue en moi et le temps qu’ils m’ont consacré tout au long de l’élaboration de ce travail de recherche. Leurs conseils et suggestions ont amplement contribué à l’aboutissement de ce travail ; A monsieur Jean Louis ARCAND et Monsieur Rochdi FEKI pour avoir rapporté sur ma thèse ; A monsieur Albert MAROUANI et Madame Sandye GLORIA-PALERMO pour avoir accepté de participer au jury ; A tous les membres du CEMAFI pour leur accueil et leur disponibilité, particulièrement, Monsieur Jean-Charles Briquet-Laugier et Mademoiselle Diane Gauffridy. Mes remerciements s’adressent également aux membres de ma famille qui ont toujours cru en moi et m’ont soutenue durant ces longues années d’études, pour tous les sacrifices qu’ils ont faits, l’amour et le soutien qu’ils m’ont apportés : mon frère Mohamed, ma sœur Nissaf, et particulièrement ma mère pour qui je n’ai pas été très disponible ces dernières années, et finalement mon fiancé à qui j’exprime ma reconnaissance et mon amour infini et qui a été à mes cotés pendant les moments les plus durs de cette thèse. -2-
  • 4. Sommaire Introduction Générale ........................................................................................................................................................................................ 6 Chapitre 1: La Notion de Gouvernance : Emergence, Significations, et Mesures. ........................................................................................... 20 Section 1. La Gouvernance : une notion difficile à définir ......................................................................................................................... 23 Section 2. L’Emergence d’une « Nouvelle économie du développement » : la bonne gouvernance .......................................................... 38 Section 3. Les Mesures de la gouvernance................................................................................................................................................. 58 Chapitre 2: La relation entre la gouvernance et la croissance économique : de la théorie à la pratique............................................................ 83 Section 1. La place de la gouvernance et des institutions dans la théorie de la croissance ......................................................................... 87 Section 2. «Repères théoriques sur la gouvernance » : la nouvelle économie institutionnelle (NEI).......................................................... 97 Section 3. Une synthèse des travaux empiriques sur la relation entre gouvernance et performances économiques.................................. 124 Chapitre 3: Analyse de la qualité de la gouvernance dans le monde : une approche multidimensionnelle..................................................... 153 Section 1. Aperçus de quelques méthodes classiques d’agrégations et de classification .......................................................................... 156 Section 2. L’analyse en composantes principales (ACP) appliquée aux données de la gouvernance ....................................................... 164 Section 3. Analyse de la gouvernance à l’aide des cartes auto-organisatrices de Kohonen ...................................................................... 174 Chapitre 4: Évaluation empirique de la relation entre la qualité de la gouvernance et les performances économiques .................................. 210 Section 1. Évaluation des effets directs et indirects de la gouvernance sur le niveau du revenu : approche comptable de la croissance .. 214 Section 2. Évaluation des effets de la gouvernance par l’approche économétrique.................................................................................. 237 Section 3. Evaluation des effets direct et indirects de la gouvernance sur la croissance économique....................................................... 249 Conclusion Générale...................................................................................................................................................................................... 272 Annexes ......................................................................................................................................................................................................... 286
  • 5. La faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses : ces opinions doivent être considérées comme
  • 6. Introduction Générale La relation entre la gouvernance et la croissance économique est un thème qui suscite un grand intérêt depuis deux décennies tant dans la science économique qu’au sein de la communauté internationale. Depuis le début des années 1990, on assiste à un regain d’intérêt pour la notion de gouvernance. Aujourd’hui, elle est largement utilisée par les organisations internationales, régionales, des agences de développement, des gouvernements mais aussi des économistes. Cette thèse porte sur la gouvernance des Etats, par opposition à la gouvernance globale ou à la gouvernance d’entreprise (corporate governance). Dans ce sens, la gouvernance se réfère à l’expression « bonne gouvernance » soutenue par la Banque Mondiale (BM) dés le début des années 1990. Pour cette organisation internationale, la gouvernance correspond à la capacité de l’Etat de fournir des institutions soutenant les marchés. Elle entend par « bonne gouvernance » la fourniture effective de telles institutions. Selon la Banque Mondiale, la « bonne gouvernance » inclut la création, la protection et le respect des droits de propriété, une réglementation qui encourage la concurrence, mais aussi des politiques macroéconomiques saines et l’absence de corruption (Banque Mondiale, 2002). Depuis, la notion de gouvernance ouvre la voie à plusieurs définitions proposées par les organisations internationales. Chacune a développé sa propre définition de la gouvernance. Malgré l’absence d’une approche commune de la notion de gouvernance, l’ensemble des définitions adoptées par ces institutions convergent vers un point qui est de lier la notion de la gouvernance à une certaine efficacité de l’Etat dans la gestion des affaires publiques. C'est selon cette conception, plus liée à l'idée de gestion qu'à celle de pouvoir, que la notion de gouvernance a eu un succès au sein des Institutions Financières Internationales. Plus précisément, c’est la définition proposée par Kaufmann et Kraay (2002) qui est le plus souvent utilisée dans les travaux traitant de la «bonne gouvernance ». Les auteurs la définissent comme le processus et les institutions par lesquels l’autorité est exercée dans le pays pour le bien commun. Cela recouvre : le processus par lequel les gouvernements sont sélectionnés, tenus redevables, surveillés et remplacés ; les 6
  • 7. capacités des gouvernements à gérer les ressources et à fournir les services efficacement, ainsi qu’à formuler et mettre en œuvre de bonnes politiques et réglementations, le respect des institutions qui gouvernent les interactions économiques et sociales. Cette définition donne un caractère multidimensionnel à la notion de gouvernance dans la mesure où elle recouvre plusieurs aspects : le caractère démocratique des institutions politiques, l’instabilité politique et la violence, l’efficacité des pouvoirs publics, le poids des réglementations, la primauté du droit, et enfin la lutte contre la corruption. La notion de gouvernance est devenue alors un élément clé des politiques de développement et de réduction de la pauvreté, principalement suite aux premières évaluations des programmes d’ajustement structurels. En effet, depuis cinquante ans, les politiques de développement passent d’un paradigme à un autre. Les théories du développement ont, selon les époques, mis l’accent sur les carences et les succès du marché, présenté l’Etat comme un acteur volontariste ou un acteur passif, et encouragé tour à tour les mérites de l’ouverture au commerce extérieur, de l’épargne et de l’investissement, de l’éducation et de la diffusion du savoir, de la stabilité financière et macroéconomique. Les développements précédents se sont inscrits essentiellement sur l’axe Etat-marché en supposant que ce sont les deux seules formes de coordinations dans les économies. Comme l’une et l’autre ont rencontré des limites, voire des échecs dans leur application, une façon de réconcilier ces deux approches consiste à rechercher une combinaison optimale entre mécanismes de marché et coordination par les pouvoirs publics (Boyer 2001) : la gouvernance. Cette notion apparait dans l’économie du développement pour renouveler le débat existant entre Etat et marché, tout en tenant en compte d’un nouveau facteur, les institutions et du niveau de leur application. Au cours de leur développement, les courants de pensée n’ont pas pris en considération les facteurs non économiques du développement et se sont plus concentré sur des aspects techniques et physiques du développement comme le capital physique et humain. Les échecs des stratégies de développement passées sont imputés aux carences de la gouvernance et le rôle des organisations internationales, chargées de promouvoir le développement, devraient encourager la mise en place de « bonnes institutions» et de leur application effective. La notion de gouvernance se trouve donc au cœur des débats sur les stratégies de développement et fortement liée à la question des institutions. La théorie de la croissance qui a été élaborée dans les années 50 et 60, souligne la nécessité d’accumuler des facteurs de production (capital et travail) et d’accroître la productivité avec laquelle ces facteurs sont utilisés. En effet, l’accumulation des facteurs de production ne peut plus être considérée comme le principal moteur de croissance, mais il existe un autre élément -7-
  • 8. qui peut être le véritable moteur de la croissance : la productivité totale des facteurs (PTF). Il semble alors que ce qui importe pour la croissance, ce n’est pas seulement la quantité des facteurs de production accumulés par le pays mais c’est surtout la manière avec laquelle il combine ces facteurs. Parallèlement, les estimations empiriques des déterminants de la croissance ont montré l’insuffisance des seules variables économiques pour expliquer les différentiels de performances économiques entre pays. Ce qui a poussé les politistes et les économistes à porter leur réflexion sur la qualité de la gouvernance et des institutions pour expliquer la croissance. Si l’augmentation des quantités de capital et de travail a un impact positif sur la croissance, qu’est ce qui permet (ou non) la mobilisation de ces facteurs de production et qu’est ce qui rend cette mobilisation efficace (ou non) à long terme ? La Nouvelle Economie Institutionnelle (NEI) est alors intervenue principalement avec les travaux de North (1990) pour apporter une réponse à ces questions. On parle aujourd’hui d’un nouveau consensus au sein de l’économie du développement et de la croissance économique. C’est un consensus qui est plus large que les anciens et qui va prendre en compte dans l’analyse du développement et de la croissance, des facteurs non seulement économiques mais des facteurs politiques et institutionnels. L’intérêt pour les institutions et leur rôle dans la croissance économique s’est développé avec les travaux de la Nouvelle Economie Institutionnelle. On assiste aujourd’hui à une nouvelle version de l’économie standard néoclassique (Clague 1997), notamment avec la prise en compte des notions de coûts de transaction et d’information imparfaite en économie. La question de recherche principale que se pose North est la suivante : qu’est ce qui permet à une économie, à une époque donnée, de connaître la croissance économique ? Sa thèse est que ce sont les institutions qui garantissent cette croissance économique, car elles permettent de réduire les coûts de transaction entre les individus et assurent donc le bon fonctionnement des marchés : “I wish to assert a much more fundamental role for institutions in societies; they are the underlying determinant of the long-run performance of economies” (North 1990, p.20). Le modèle de North a pour point de départ théorique la microéconomie, mais dans un cadre qui diverge sensiblement de celui de l’économie néoclassique. North s’inspire en particulier de trois champs théoriques qui constituent aujourd’hui les fondements de la NEI. La première théorie que North reprend à son compte est celle des coûts de transaction. Il explique que la baisse des coûts de transaction est un des facteurs principaux d’augmentation de la croissance économique. De ce fait, l’étude de la mise en place des institutions s’impose. Pour cela, North utilise la théorie économique des droits de propriété. Il s’inspire donc et en second lieu, de la théorie économique du droit de propriété qu’il emprunte à des auteurs 8
  • 9. comme Alchian et Demsetz (1972). North montre qu’un système de droits de propriété bien défini peut être un facteur de croissance économique. Une société sera d’autant plus innovatrice et portée sur la croissance que son système de droits de propriété précise les droits d’exclusivité de chacun, en assure la protection effective, et réduit le degré d’incertitude qui pèse sur les possibilités de gains supplémentaires offerts par l’innovation. Pour affiner son analyse, North introduit les sciences politiques dans son modèle. Il démontre notamment que certains régimes politiques favorisent plus que d’autre la croissance économique, et cela par l’intermédiaire d’institutions complexes qu’il convient d’étudier précisément. L’analyse de North de l’importance des institutions pour la croissance a beaucoup marqué les économistes de la période. Aujourd’hui, il est largement admis que ce sont les institutions qui déterminent les performances des économies nationales. Les institutions entrent dans la catégorie des facteurs qualitatifs de la croissance et du développement. North (1990) affirme que : "les pays du tiers monde sont pauvres parce que les contraintes institutionnelles qui définissent un ensemble de coûts pesants sur les politiques économiques n’encouragent pas l'activité productive1 ». Cette découverte de la dimension institutionnelle du processus de croissance, et donc du rôle conséquent des institutions, ne saurait être négligée. Les institutions ne peuvent plus être écartées de l’analyse de la croissance. Les Institutions Financières Internationales, et plus précisément la Banque Mondiale apportent une réponse à la question de l’importance des institutions pour les performances économiques en proposant un cadre opérationnel : la « bonne gouvernance ». La gouvernance est présentée comme solution permettant d’assurer la sécurité des transactions nécessaire à la croissance économique. La Nouvelle Economie Institutionnelle et les travaux de North (1990) fournissent alors un cadre théorique et analytique à l’étude du rôle de la gouvernance dans l’amélioration des performances économiques. Ces travaux constituent donc la principale base théorique à partir de laquelle s’inspire le modèle de bonne gouvernance tel qu’il est proposé par la Banque Mondiale. L’importance de la NEI a été confirmée par l’attribution du prix Nobel d’économie d’abord en 1991 à Ronald Coase puis à Douglas North, en 1993 et récemment à Olivier Williamson en 2009. Cette nouvelle doctrine des Organisations Internationales se fonde sur de nombreux travaux empiriques qui mettent en évidence les conséquences positives de la « bonne gouvernance » sur les performances économiques. On retrouve, d’une part, les travaux empiriques sous formes d’études en coupes transversales de la croissance qui cherchent à établir une relation 1 Dans North (1990) page 20, “Third world countries are poor because the institutional constraints define a set of payoffs to political/economic activity that do not encourage productive activity…”. -9-
  • 10. entre la gouvernance et la croissance économique. La majorité de ces travaux concluent à un lien positif et significatif entre la gouvernance et les performances économiques. Toutefois, la majorité de ces travaux traitent l’effet global de la gouvernance sur la croissance et ne montrent pas comment elle peut affecter la croissance. Ces travaux traitent les institutions comme une « boite noire » et ne mettent pas en lumière les mécanismes exacts à travers lesquels les institutions affectent réellement la croissance. La majorité des études empiriques utilisent des modèles de croissance de forme réduite qui ne permettent pas de détecter les différents canaux d’influence. D’autre part, des travaux empiriques utilisant des modèles de croissance de type Solow (1956) et Mankiw, Romer et Weil (1992) ont permis en quelque sorte de détecter certains canaux. En effet, les canaux à travers lesquels la bonne (mauvaise) gouvernance entraine une forte (faible) croissance économique sont probablement trop nombreux mais pas totalement identifiés. Le premier type de travaux que nous appelons « études de première génération » vise à expliquer pourquoi la qualité des institutions varie selon les pays, et quel type de facteurs peut être responsable d'une telle disparité. Plus précisément, ils visent à tester l’hypothèse de North 1990 sur l’importance des droits de propriété et des coûts de transactions dans la détermination des performances économiques. Une caractéristique commune à l’ensemble de ces travaux, est d’étudier l’impact des institutions sur les performances économiques sans faire explicitement référence au concept de gouvernance. En effet, dans ces études de « première génération », on ne parlait pas encore de gouvernance mais d’institutions et ce n’est qu’à partir des travaux de Kaufmann et al. (1999) qu’on a commencé à parler de relation gouvernance et croissance. La plupart des travaux introduisent un large éventail d’indicateurs de la qualité des institutions comme variables proxys de la gouvernance dans un pays (la garantie des droits de propriété chez Knack et Keefer (1995), le risque d’expropriation chez Acemoglu, Johnson et Robinson (2001), l’instabilité politique chez Scully (1988), Fosu (1992), Olson (1996), la corruption chez Mauro (1995), la démocratie chez Barro (1996)). Malheureusement, certaines dimensions de la gouvernance sont ignorées dans les études sur les déterminants de la croissance et, quand elles sont représentées par des variables proxys, elles sont probablement incapables de représenter pleinement la notion de gouvernance. La deuxième catégorie d’études que nous appelons « études de seconde génération », est consacrée à la façon dont la gouvernance et les variables institutionnelles affectent la croissance économique et le revenu par tête ; en d’autres termes, elles visent à déterminer les canaux à travers lesquels la gouvernance affecte la croissance. Ce qui caractérise cette littérature c’est qu’elle va chercher à combler la limite des travaux de première génération en 10
  • 11. introduisant d’une manière explicite le concept de gouvernance comme hypothèse de base de leur travail économétrique et donc une tentative d’introduction explicite des indices synthétiques pour aborder la notion de gouvernance dans sa totalité. Toutefois, ces travaux arrivent souvent à des conclusions hétérogènes et qui ne vont pas dans le même sens. Cela pourrait être dû aux indicateurs agrégés utilisés dans ces travaux qui sont souvent construits d’une manière arbitraire sans pour autant étudier les difficultés de construction des indicateurs composites. Cela pourrait être dû également à la diversité des mesures institutionnelles que les auteurs cherchent à intégrer dans leur indicateur de gouvernance. Cela pose alors la question de la construction des indicateurs composites. Justement, ce travail tente de combler cette lacune toute en accordant un intérêt particulier à l’analyse des interactions entre la gouvernance et la croissance économique. Les articles académiques consacrés aux relations entre la gouvernance et la croissance économique s’organisent autour de trois problématiques. La première s’intéresse à l’impact direct de la qualité de la gouvernance sur la croissance économique. D’une part, la gouvernance est supposée avoir des conséquences positives sur le niveau du revenu (Hall and Jones (1999), Acemoglu, Johnson, et Robinson (2001), Easterly and Levine (2003), et Rodrik, Subramanian, et Trebbi (2002)), sur le taux de croissance de l’économie (Knack et Keefer (1995), Acemoglu, Johnson, et Robinson (2001), Gwartney, Holcombe et Lawson (2004) et Weede (2006)). D’autre part, certains montrent qu’elle n’a aucun impact sur la croissance, mais uniquement sur le niveau du revenu (Meiseil et Ould Aoudia 2007), voire un impact négatif (Quiberia 2002). La deuxième problématique est liée aux effets indirects de la gouvernance, plus précisément aux canaux de transmission de la gouvernance sur la croissance qui ne sont pas toujours clairement identifiés. Hall et Jones (1999) trouvent que les institutions ont un impact quantitatif sur de l’accumulation des facteurs limité par rapport à celui de la productivité totale des facteurs. Au contraire, Rodrik et al (2002) trouvent que les institutions ont un impact quantitatif beaucoup plus important sur l’accumulation du capital physique que sur la productivité totale des facteurs. Eicher et al (2006) trouvent que le principal rôle des institutions est d’encourager l’accumulation des facteurs de production. La troisième problématique porte sur la mesure de la gouvernance et sur les tentatives d’agrégation des critères rattachés à cette notion pour pouvoir l’analyser et l’intégrer dans les modèles de croissance. L’attention croissante portée à la bonne gouvernance depuis le début des années 1990 a donné naissance à un grand nombre de tentatives visant à quantifier et à mesurer cette notion multidimensionnelle, notamment dans le but d’aider à la conception des -11-
  • 12. réformes mais surtout de déterminer ses conséquences économiques. Aujourd’hui, il est possible de compter près de 160 bases de données ou d’indicateurs permettant d’éclairer divers aspects de la gouvernance. Il s’agit généralement d’évaluations subjectives produites par des agences privées de notation du risque, des organisations multilatérales, des centres de recherche ou encore des organisations non gouvernementales. Toutefois, la gouvernance est un concept large et multidimensionnel et elle ne peut pas être réduite à une seule de ses dimensions. L’élaboration d'indicateurs composites de gouvernance nécessite alors le recours à des méthodes d’agrégation et de classification. Le concept de gouvernance a déjà fait l’objet de plusieurs tentatives d’agrégation pour construire un indice synthétique. Certains auteurs utilisent une moyenne simple pour construire un indice de gouvernance global, à l’image des travaux de Knack et Keefer (1995), élargis par Hall et Jones (1999) par la suite. Kauffman, Kraay et Mastruzzi (2005) utilisent le modèle à composantes inobservables pour construire leur indicateur global de gouvernance. Scully (1992), Alesina et Perotti (1994) utilisent la méthode d’Analyse en Composantes Principales (ACP) pour construire des indices de libertés politiques et économiques. Toutefois, ces techniques d’agrégation présentent de nombreuses difficultés méthodologiques et des erreurs de mesure. La majorité de ces techniques d’agrégation sont souvent à l’origine de pertes d’informations, lors de l’agrégation, ce qui rend les indicateurs obtenus peu pertinents pour représenter le concept de gouvernance. De même, il faut noter la question liée au choix de la pondération des variables qui forment l’indicateur composite pose des problèmes très délicats. Le choix du vecteur de pondération des sous variables qui forment l’indicateur composite est une étape très importante dans sa construction. Il reflète la contribution de chaque variable dans l’indicateur composite. Le problème qui se pose ici est lié aux choix des poids relatifs des différentes variables mais aussi de l’homogénéité ou de l’hétérogénéité de ces pondérations pour tous les individus. En règle générale, les composantes de la gouvernance sont simplement considérées avoir le même poids pour tout l’échantillon, ce qui peut constituer un réel problème de sa pertinence et de sa crédibilité. Nous sommes alors dans le besoin de disposer d’outils pertinents de l’analyse des données pour pouvoir étudier, résumer et représenter les différentes dimensions de la gouvernance. L’une des caractéristiques de cette thèse est l’importance qu’elle accorde à la quantification de la gouvernance et à sa relation empirique avec la croissance économique. En outre, une attention particulière a été accordée à la construction d’un indicateur composite capable de résumer l’ensemble des volets de la gouvernance et de l’intégrer dans une régression de croissance pour pouvoir distinguer les effets directs et indirects de la gouvernance sur la 12
  • 13. croissance économique. Nous accordons également une importance particulière à l’analyse de la robustesse de nos résultats en effectuant différents tests, allant du test de Belsley-Kuh- Welsch (1980) qui proposent de mesurer l’influence de chaque observation sur l’estimation des paramètres d’une régression, jusqu’aux régressions quantiles, en passant par la méthode des limites extrêmes ou encore de « l’Extreme Bound Analysis » (EBA). L'objet de cette dernière méthode est de mener à bien les régressions dans le but de tester la sensibilité de la variable dépendante (le taux de croissance du PIB par habitant) aux petits changements introduits dans les différentes spécifications du modèle avec différentes combinaisons des variables indépendantes. Le recours aux régressions quantiles permet de prendre en compte l’hétérogénéité de la relation « gouvernance-croissance » suivant le niveau même du taux de croissance. Cette technique est employée, à notre connaissance, pour la première fois dans l’étude de la relation entre gouvernance et croissance. La thèse se compose de quatre chapitres. Dans le premier chapitre, nous nous intéresserons à la définition de la notion de gouvernance et à ses différentes mesures. En effet, la notion de gouvernance se présente aujourd’hui comme un « buzzwords » (mots à la mode) qui fait appel à diverses disciplines des sciences sociales et des sciences humaines : philosophie, économie, science politique, administration publique, étude des organisations, étude du développement, relations internationales etc.… Elle peut être définie de différentes manières, et sa signification diffère certainement quand on parle de gouvernance locale, de gouvernance urbaine, de gouvernance d'entreprise, de gouvernance nationale ou encore de gouvernance mondiale. Cette multitude de définitions fait de la gouvernance un terme polysémique. Le terme est en effet défini et entendu aujourd’hui de manière diverse et parfois contradictoire, chaque entité lui donnant un contenu en fonction de ses orientations et de ses objectifs propres. Il n’existe pas de définition unique de la gouvernance qui fasse l’objet d’un consensus. Pour mieux appréhender le sens donné à la gouvernance, il est utile de remonter à l’origine du concept ainsi qu’à ses différentes significations, tout en faisant la distinction entre les différents concepts de gouvernance qui existent, à savoir la gouvernance d’entreprise, la gouvernance mondiale, et se concentrer sur la gouvernance publique. Ensuite, les raisons pour lesquelles la notion de gouvernance est devenue présente dans l’économie du développement seront exposées. En effet, jusqu'au début des années 1990, le terme de gouvernance était rarement utilisé par économistes du développement et les décideurs politiques. Depuis, il y a eu une prise de conscience que la structure de la qualité de la gouvernance d’un pays est un facteur déterminant de sa capacité à assurer un développement économique et sociale soutenable. La notion de gouvernance pose, en quelque sorte, d’une manière nouvelle, la -13-
  • 14. problématique des liens entre Etat et marché. L'augmentation spectaculaire de l’intérêt pour la gouvernance et ses conséquences économiques, a accompagné le besoin d'évaluer ses différentes dimensions. De nombreuses agences nationales et internationales ont cherché à mesurer la qualité de la gouvernance dans le monde. Aujourd'hui, mesurer la gouvernance est important, tant au niveau de la politique nationale qu’à celui des relations économiques internationales ou encore pour les chercheurs spécialistes du développement et de la croissance. Ceci a entrainé une progression remarquable des bases de données ou d'indicateurs permettant d'éclairer divers aspects de la gouvernance. Les indicateurs les plus utilisés, parmi les centaines qui sont apparus, sont des indicateurs composites et sont construits à partir d’enquête ou de sondages d’experts. Ces données sont, en général fondées sur des perceptions et sont donc subjectives. Elles sont principalement critiqués en tant que telles. Nous présenterons donc une revue des indicateurs de gouvernance les plus utilisés dans la recherche académique, tout en relevant leurs différentes limites auxquelles les utilisateurs se trouvent confrontés. Dans le deuxième chapitre, nous proposerons une synthèse de la littérature théorique et empirique qui existe sur la relation entre la gouvernance et la croissance économique. Depuis Smith (1776) la question de la croissance des économies constitue l’une des préoccupations centrales de la recherche économique. Les modèles théoriques auxquels on se réfère généralement lorsqu’on aborde les questions de la croissance économique, sont ceux de Solow (1956) et Swan (1956). Ces derniers s’inscrivent dans le cadre du corpus de la théorie néoclassique, qui fera de nombreux concurrents (Koepmans (1956), Cass (1965)), jusqu’au milieu des années 60. Nous montrons que la question des institutions n'est pas abordée dans l’analyse néoclassique de la croissance. L’hypothèse que la production est donnée par la disponibilité des facteurs de production et la technologie, fait que l’on suppose implicitement qu’il y a optimalité des institutions et de la gouvernance. Il n’y a pas de place pour la contradiction ou le conflit, ni pour une quelconque forme d’organisation collective des agents. En effet, la théorie néoclassique standard néglige les rapports sociaux et toute forme de disposition institutionnelle et s’attache à identifier les mécanismes spécifiquement économiques du processus de croissance, rejetant ainsi à la marge de la réflexion économique les dimensions politiques et institutionnelles. Nous verrons par la suite, que ce n’est qu’avec la nouvelle théorie de la croissance endogène qu’on commence à avoir une « reconnaissance » des facteurs institutionnels dans le processus de croissance, notamment avec la reconnaissance du rôle de l’Etat. Toutefois, le paradigme de la croissance endogène accorde une attention réduite aux institutions qui accompagnent le processus de croissance. En effet, 14
  • 15. les institutions n’ont pas fait l’objet d’une modélisation, mais les théoriciens confortent la proposition de la pertinence d’un environnement institutionnel de l’activité économique, en particulier en considérant, que l’effet de l’accumulation des facteurs productifs est porté par un environnement institutionnel implicite. Les facteurs institutionnels et politiques ne sont pas intégrés d’une manière formelle dans les modèles de croissance. Nous accorderons ensuite une attention particulière à la théorie de la Nouvelle Economie Institutionnelle et en particulier à l’apport des travaux de North dans l’économie de la croissance. Nous montrerons que ces recherches constituent la principale base théorique à partir de laquelle s’inspire le modèle de bonne gouvernance tel qu’il est proposé par la Banque Mondiale. Enfin nous présenterons une synthèse des travaux empiriques qui se sont intéressés à la relation entre la qualité des instituions ou encore de la gouvernance et la croissance économique. Le but est d’examiner les résultats de la littérature empirique sur la relation entre la gouvernance et la croissance économique, tout en discutant de leur validité et de leurs limites. En effet, les travaux empiriques sur la relation entre la gouvernance et la croissance se sont multipliés au cours des années 1990, notamment avec l’apparition d'un nombre croissant d’indicateurs subjectifs sur les mesures des différentes dimensions de la gouvernance. Nous avons choisi de classer des travaux en deux types bien qu’il soit difficile de le faire en raison de l'utilisation de méthodes et de bases de données rarement semblables. Deux types de travaux sont distingués : les « études de première génération » et les « études de deuxième génération ». Le premier type de travaux a permis d’apporter de nombreux résultats qui ont appuyé les principales conclusions des travaux théoriques sur l’importance de la gouvernance et des institutions pour le développement économique. On ne manquera pas de soulever les limites de ces travaux. Ces limites portent, d’une part, sur les méthodes économétriques utilisées et la nature des données de la gouvernance utilisées, mais aussi sur le manque d’identification des mécanismes exacts à travers lesquels la gouvernance affecte la croissance. Les effets de la gouvernance doivent être repérés par l'intermédiaire de leur impact sur l'accumulation des facteurs (effet indirecte/quantitatif) et/ou sur la productivité (effet directe/qualitatif). Une nouvelle génération d’études empiriques tente d’étudier la façon dont les institutions affectent la croissance. Les conclusions de cette littérature sont souvent identiques sur le rôle positif de la gouvernance sur les performances économiques mais souvent hétérogènes quant à l’identification des canaux de transmission. Nous soulignerons également que, malgré une littérature relativement abondante sur les effets positifs de la gouvernance sur la croissance, des critiques ont étés soulevées sur l’existence effective de cette relation, notamment quand il s’agit de citer des économies telles que celles -15-
  • 16. de la Chine ou l’Inde qui ne cessent de croitre malgré une qualité de gouvernance faible. En effet, hormis l’approche de la bonne gouvernance défendue par la Banque Mondiale, il existe une seconde approche, qui n’est pas très populaire dans le milieu académique, appelée « approche hétérodoxe de la gouvernance ». Elle examine la relation entre la gouvernance et les performances économiques et s’intéresse principalement à l’analyse des systèmes économiques relatifs à chaque pays. Face à cette approche, nous proposerons alors une vision de la gouvernance qui va permettre de concilier les deux approches : « la gouvernance effective ». Nous adopterons une approche flexible de la gouvernance libérale qui suggère qu'il n'existe pas de modèle universel qui permette d'assurer une gouvernance efficace pour le développement économique. Les décideurs politiques doivent s’engager à appliquer effectivement les programmes de gouvernance et à formuler des politiques tournées vers la croissance en fonction du contexte de chaque pays, de son niveau de développement, de ses capacités existantes, du contexte international dans lequel ils se situent. Il faut qu’il y ait un engagement effectif de l’Etat pour tenir ses engagements politiques. Nous proposerons notre propre définition de gouvernance ainsi que la structure de gouvernance qui en découle. Dans le troisième chapitre, nous nous intéresserons à la quantification de la notion de gouvernance. Notre objectif principal est la construction d’un indicateur composite de gouvernance afin de l’intégrer dans les régressions de croissance. Un travail préliminaire à la construction de cet indicateur, s’impose. Il serait utile de visualiser la gouvernance, entre les pays, par le biais d’une projection dans l’espace de l’ensemble des composantes de la gouvernance qui forment notre indicateur composite. Cette étape est essentielle pour avoir une idée sur la nature des systèmes de gouvernance dans le monde mais aussi pour identifier les facteurs institutionnels qui participent à l’amélioration ou à la détérioration de ces systèmes de gouvernance. Pour synthétiser des données multidimensionnelles, nous disposons, en général, de deux grands groupes de techniques classiques : les méthodes factorielles (l’Analyse en Composantes Principales (ACP) et l’Analyse Factorielle des Correspondances (AFC), l’Analyse des Correspondances Multiples (ACM)) et les méthodes de classification (la Classification Hiérarchique et la Méthode des Centres Mobiles (cf. Cottrell et al (2003)). Depuis les années 80, de nouvelles méthodes, basées sur l’intelligence artificielle, sont apparues pour compléter ces techniques, elles sont connues sous le nom de « méthodes neuronales ». Ces méthodes seraient capables de traiter des bases de données de grande taille, ayant une structure non linéaire et par conséquent mal exploitées par les outils traditionnels. Pour conduire notre approche multidimensionnelle, nous appliquerons deux types d’outils : l’Analyse en Composante Principale (ACP) et les réseaux de neurones, plus 16
  • 17. précisément les cartes auto-organisatrices de Kohonen (Self Organisation Maps : SOM) pour 125 pays observés en 2006. Cette dernière méthode permet une meilleure visualisation de la qualité de la gouvernance à travers le monde mais également de déterminer les dimensions de la gouvernance qui importent le plus dans chaque région du monde. L’application de l’ACP va nous permettre, dans un premier temps, d’avoir une projection des pays selon leurs ressemblances en matière de gouvernance, et donc de pouvoir constituer des groupements de pays ; dans un deuxième temps, de déterminer les variables de gouvernance les plus prépondérantes pour expliquer les différences des systèmes de gouvernance entre pays ; dans un troisième temps, de déterminer un indicateur synthétique à partir de la première composante principale. La détermination de l’indicateur agrégé nous permettra d’avoir un classement des pays selon la qualité de leur gouvernance. Nous poursuivrons notre exploration des données moyennant les réseaux de neurone et plus précisément les Cartes Auto Organisatrices de Kohonen. L’initialisation de l’algorithme de Kohonen va nous permettre d’obtenir, dans un premier temps, une première projection des pays sous forme de carte composée de neurones ou de cellules que nous appellerons « Carte Optimale de la Gouvernance ». Cette projection s’effectue de telle sorte que les pays qui présentent des caractéristiques semblables soient regroupés dans la même classe. Dans un deuxième temps, nous exploiterons ces résultats pour avoir un regroupement plus spécifique des pays, en appliquant un algorithme de classification appelé K-MEANS (K-MOYENNES). Nous irons encore plus loin dans l’exploitation des résultats de notre SOM en essayant de repérer pour chaque région de la carte, les variables qui ont le plus participé au développement de la gouvernance et celles qui sont à l’origine de son retard, en utilisant la carte des poids synaptiques. Une dernière méthode d’exploitation des Cartes Auto Organisatrices est due au travail de Chtourou et Féfki (2008). Ces derniers font une extension judicieuse des cartes auto-organisatrices pour en tirer une nouvelle méthode d’agrégation baptisée «Chtourou-Feki Aggregation and Ranking method: C-FARm© 2 » ; l’originalité de cette méthode réside dans l’utilisation de pondérations spécifiques et déterminées d’une manière objective grâce à un processus d’apprentissage itératif pour construire un indicateur composite de gouvernance. Cette méthode présente un avantage majeur, par rapport aux méthodes classiques d’agrégation, dans la mesure où les pondérations de chaque variable qui forment l’indicateur vont être spécifiques à chaque pays. Le classement des pays selon leur qualité de gouvernance obtenu par cette méthode sera comparé avec celui obtenu par l’ACP. 2 Modèle ayant obtenu l’Attestation d’Acceptation de Dépôt (n°298/2008) de l’Organisme de Protection des Droits de Propriété (WIPO- OTPDA) : CHTOUROU-FEKI AGGREGATION AND RANKING method (C-FARm) © -17-
  • 18. Enfin, dans le quatrième chapitre, nous effectuerons une étude économétrique de la relation entre la gouvernance et la croissance économique. Notre démarche empirique est motivée par une tentative de dépassement des carences des anciens travaux empiriques sur la relation entre gouvernance et croissance. Nous allons pouvoir vérifier s’il existe bien une relation entre la gouvernance et le taux de croissance économique. Nous accordons un intérêt particulier à l’identification des mécanismes à travers lesquels la gouvernance affecte la croissance économique. La gouvernance toute seule ne peut pas promouvoir la croissance et ses effets doivent opérer par l'intermédiaire de leur impact sur l'accumulation des facteurs (effets indirects) et/ou sur la productivité (effets directs). En effet, la spécification des modèles empiriques utilisés dans les travaux ignore souvent l’effet sur l’accumulation des facteurs dans la mesure où les régressions sont le plus souvent spécifiées dans le cadre de la forme simple du modèle de Solow augmenté. Cela capture uniquement l’effet marginal des variables institutionnelles sur la croissance, effet appelé dans la littérature « effet direct ». Plus précisément, cet effet traduit l’effet de la gouvernance (institutions) sur la productivité des facteurs ou encore l’efficacité productive, souvent noté comme suit « A » dans le modèle de croissance de Solow. En général, les effets indirects ne sont pas toujours pris en compte, voire sont ignorés la plupart du temps. Nous insisterons sur le fait que l’étude du rôle de la gouvernance dans la croissance économique doit être affinée et traitée avec précaution, notamment à travers l’utilisation de méthodes adéquates. C’est sur cette voie que nous nous baserons pour traiter de cette relation. L’objectif de ce quatrième chapitre est d’essayer d'aller de l'avant en termes d'une meilleure compréhension de la gouvernance et de son rôle dans l’amélioration des performances économiques, tout en adoptant les mesures économétriques nécessaires pour contourner les limites déjà soulevées. Notre travail empirique se distingue largement des anciens travaux et ceci à plusieurs niveaux. Premièrement, au niveau de la prise en compte des effets indirects de la gouvernance sur la croissance et au niveau de la mesure de la gouvernance utilisée. La gouvernance est mesurée par deux indicateurs composites construits à partir de deux méthodes différentes, à savoir l’ACP et CFAR. Deuxièmement, au niveau de la vérification de l’existence de cette relation, en faisant la distinction entre une étude entre la gouvernance et le niveau du revenu et entre la gouvernance et le taux de croissance économique. Troisièmement, au niveau l’approche empirique employée : afin de déterminer les effets directs et indirects de la gouvernance, nous combinons deux méthodes, à savoir, l’approche comptable de la croissance et l’approche économétrique. Quatrièmement, au niveau de la robustesse des résultats : afin d’avoir des résultats robustes, nous appliquons plusieurs tests de robustesse, par exemple, la méthode des limites extrêmes ou encore de « 18
  • 19. l’Extreme Bound Analysis », la régression quantile permet de prendre en compte l’hétérogénéité de l’échantillon étudié. Cela va nous permettre de savoir si les effets de la gouvernance sont hétérogènes suivant le niveau même du taux de croissance économique. -19-
  • 20. Chapitre 1: La Notion de Gouvernance : Emergence, Significations, et Mesures. -20-
  • 21. Introduction L'objectif de cette thèse étant la relation entre la gouvernance et la croissance économique, il semble opportun d'amorcer ce travail par une présentation de la notion de gouvernance ainsi que de ses différentes mesures. Un tel exercice est essentiel, dans la mesure où il va nous permettre de justifier le type de gouvernance à laquelle on fait référence dans ce travail. Une étude des différentes significations et mesures de ce concept apporte un premier éclairage nécessaire à une meilleure compréhension de la problématique étudiée. La notion de gouvernance se présente aujourd’hui comme un terme « fourre-tout » qui fait appel à diverses disciplines des sciences sociales et des sciences humaines : philosophie, économie, science politique, administration publique, étude des organisations, étude du développement, relations internationales etc.… Elle peut être définie de différentes manières, et sa signification diffère certainement quand on parle de gouvernance locale, de gouvernance urbaine, de gouvernance d'entreprise, de gouvernance nationale ou encore de gouvernance mondiale. Cette multitude de définitions fait de la gouvernance un terme polysémique. Le terme est en effet défini et entendu aujourd’hui de manière diverse et parfois contradictoire, chaque entité lui donnant un contenu en fonction de ses orientations et de ses objectifs propres. En effet, cette notion de gouvernance est devenue, depuis peu, l’un des vocables les plus employés sur la scène internationale en général et dans les questions portant sur la coopération et le développement, en particulier. Pour certains spécialistes, elle serait même entrée dans la fameuse catégorie des « mots-valises » ou encore buzzwords (mots à la mode) qui animent les débats et fondent les actions portant sur le développement. Pierre et Peters (2000) avancent plusieurs raisons explicatives à ce grand intérêt : les crises financières des Etats, le changement idéologique du politique vers la sphère marchande comme espace de régulation, la globalisation, avec le développement des institutions transnationales et la montée en puissance d’acteurs non étatiques, les critiques envers l’Etat et ses échecs dans la gestion des problèmes collectifs, l’émergence d’une nouvelle gestion de l’action publique, le changement social et les complexités croissantes, l’importance grandissante accordée aux modes de régulation à l’échelon régional et international. Faisant partie du vocabulaire usuel des institutions financières multilatérales depuis le milieu des années 90, la « bonne gouvernance » s’appuie essentiellement sur l’introduction de -21-
  • 22. nouvelles réformes non plus économiques et financières mais institutionnelles, visant non seulement la réforme de l’Etat mais aussi le mode de fonctionnement des marchés. Cette notion de gouvernance n’est devenue véritablement opératoire et n’a été effectivement introduite dans l’analyse du fonctionnement des pays en développement qu'à la suite des premières évaluations des programmes d’ajustement structurel (PAS). Depuis, elle est devenu un concept dominant dans la gestion des affaires publiques. L'augmentation sensible de l’intérêt pour la gouvernance et ses conséquences économiques dans les pays en développement, a alimenté le besoin d'évaluer ses différentes dimensions. Fidèles au principe que l’on ne peut gérer ou contrôler que ce que l’on peut quantifier, de nombreuses agences nationales et internationales ont cherché à mesurer la qualité de la gouvernance dans le monde surtout après l’initiative prise dans ce sens par l’Institut de la Banque Mondiale. Aujourd’hui, la mesure de la gouvernance est importante, tant du point de vue de la politique nationale que de celui des relations économiques internationales ou encore de la recherche en sciences économiques et politiques. Une large gamme d'indicateurs internationaux a été développée pour essayer d'éclairer divers aspects de la gouvernance. Aujourd’hui, il est possible de compter près de 160 bases de données ou d’indicateurs permettant d’évaluer divers aspects de la gouvernance. Il s’agit généralement d’évaluations subjectives produites par des agences privées de notation du risque, des organisations multilatérales, des centres de recherche ou encore des organisations non gouvernementales. Les données les plus utilisées dans le milieu académique et par les organisations internationales sont celles de l’agence privée de notation du risque, The Political Risk Service Group (PRS) et celles de la Banque Mondiale (World Wide Governance Research Indicators). Les opinions sont trop peu optimistes quant à l’utilisation de ces indicateurs. En effet, selon une étude du centre de développement (OCDE 2006) intitulée « les indicateurs de gouvernance : usages et abus », élaborée par Christiane Arndt et Charles Oman, il est peu vraisemblable qu’existe un jour un indicateur de gouvernance parfait. Même les indicateurs les mieux construits présentent de graves inconvénients que les utilisateurs ne semblent pas percevoir : subjectivité, opacité, impossibilité de procéder à des comparaisons dans le temps, biais d’échantillonnage et utilité réduite pour aider les pays en développement à identifier correctement des solutions qui leur permettraient d’améliorer la qualité de la gouvernance. Deux principales difficultés sont alors mises en avant dans ce chapitre, celle liée à la définition de la gouvernance et celle liée à sa mesure. En effet, il n’existe pas de définition unique de la gouvernance qui fasse l’objet d’un consensus : «There are almost as many ideas of governance as there are researchers in the field» (Hufty 2007). Pour mieux appréhender le -22-
  • 23. sens donné à la gouvernance, il est utile de remonter à l’origine de cette notion ; c’est ce qui va faire l’objet de la première section de ce chapitre. Cette dernière vise à donner un éclairage sur les différentes significations de la notion de gouvernance, tout en faisant la distinction entre la gouvernance d’entreprise, la gouvernance mondiale et la gouvernance publique. Dans une deuxièmement section, nous présenterons les principales raisons pour lesquelles la notion de gouvernance a émergé dans « l’économie du développement ». En effet, jusqu'au début des années 1990, le terme de gouvernance était rarement utilisé par les économistes du développement et les décideurs politiques. Depuis, il y a eu une prise de conscience que la structure de la qualité de la gouvernance d’un pays est un facteur déterminant de sa capacité à assurer un développement économique et social soutenable. La notion de gouvernance pose en quelque sorte, d’une manière nouvelle, la problématique des liens entre Etat et marché. Enfin, dans la troisième section, nous ferons une revue des indicateurs de gouvernance les plus populaires dans la recherche académique tout en relevant leurs différentes limites. Le but est de clarifier les limites auxquelles les utilisateurs de ces indicateurs se trouvent confrontés Section 1. La Gouvernance : une notion difficile à définir Par sa genèse et son évolution, la gouvernance se présente aujourd’hui comme une notion complexe qui fait appel à diverses disciplines des sciences sociales et des sciences humaines. En revanche, une définition claire et opérationnelle n’a pas encore été formulée. A présent, il y a une diversité extravagante de définitions de ce terme qui diffèrent selon les questions, les problèmes ou encore les objectifs qui sont pris en compte. Selon Hufty (2007), il existe aujourd’hui trois manières d’approcher le concept de gouvernance. La première est celle qui voit la gouvernance comme synonyme de gouvernement. La deuxième approche la considère comme un outil d’observation, c’est à dire un cadre analytique pour les systèmes de coordination non-hiérarchiques (gouvernance d’entreprise, gouvernance mondiale). La troisième est celle qui l’assimile à un cadre normatif (approche de la Banque Mondiale). Afin de mieux comprendre la signification de la notion de gouvernance, il semble important de distinguer de ces différentes appellations pour finir par se concentrer uniquement sur la gouvernance nationale ou encore la « bonne gouvernance », telle qu’elle est popularisée depuis le début des années 1990 au sein des études sur les pays en développement. -23-
  • 24. Par ailleurs, la « bonne gouvernance » a fait l’objet d’interprétations différentes selon l'institution qui l’adopte. Pour la Banque Mondiale par exemple, il s’agit de la gestion efficace des biens publics. Pour d’autres analystes, c’est le problème de la corruption qui est va être le point de blocage du développement. Pour avoir une compréhension plus claire de ces différentes définitions, on fera une synthèse des définitions adoptées par les grandes Institutions Financières Internationales (BM, FMI, PNUD, BAD, OCDE, CE…). I- Les différents contenus de la gouvernance I-1 ) La gouvernance nationale et le concept de « gouvernement » Utiliser le terme gouvernance comme un synonyme de gouvernement correspond à son usage historique (Hufty 2007). En effet, Gaudin (2002) parle de « trois vies successives » de la notion de gouvernance : médiévale, classique et moderne. Le terme a une origine grecque : « kubernân », signifie l’action de piloter « l’action de piloter quelque chose », un navire ou un char. Il est utilisé pour la première fois par Platon (Oliveira 2002) de façon métaphorique, pour parler des hommes. En latin, il est exprimé par le terme « gubernare », avec son sens premier. Il fait son apparition dans la langue française au début du XIIIème siècle comme équivalent du terme de gouvernement3. Selon Campbell4, les origines françaises du terme de « gouvernance » ne font aucun doute. Au XIVème siècle, il désigne certains territoires, les bailliages de l’Artois et de la Flandre (Hufty2007). Au même moment, au XIVème siècle, le terme passe dans la langue anglaise avec le même sens qu’en français. Au XIVème siècle, la réflexion sur l’Etat et le pouvoir a conduit à une distinction entre gouvernement et gouvernance. Dans la théorie politique anglo-américaine, le mot gouvernement se réfère aux institutions officielles de l’Etat et au pouvoir coercitif légitime dont elles ont le monopole. Le gouvernement se caractérise par la capacité de prendre des décisions et le pouvoir de les appliquer. Ce mot signifie en particulier les processus formels et institutionnels qui, au niveau de l’Etat-nation, ont pour but d’assurer le maintien de l’ordre public et de faciliter l’action collective (Stoker 1998), alors que la gouvernance devient la manière de gérer adéquatement la chose publique indépendamment de la question du pouvoir (Canet, 2004). Aujourd’hui la gouvernance implique une nouvelle définition du gouvernement qui correspond à un nouveau processus de gouvernement, ou encore, une nouvelle façon de gouverner la société (Rhodes, 1996). 3 Le Robert, Dictionnaire Historique de la Langue française, Paris 1992, opt cité Campbell. 4 Communication pour la table ronde : «Quel modèle politique est sous-jacent au concept apolitique de gouvernance », Séminaire d’été du Haut Conseil de la coopération Internationale, Dourdan, France, Août 2000. -24-
  • 25. Pour Rosenau (1992) : «…La gouvernance n’est pas synonyme de gouvernement. Les deux notions se référent à des comportements exprimant une volonté, à des activités guidées par un but, à des systèmes de règles. Mais l’idée de gouvernement implique une autorité officielle, dotée de capacité de police garantissant la bonne exécution de la politique adoptée. La gouvernance, elle, couvre des activités sous-tendues par des objectifs communs ; ces objectifs peuvent s’inscrire ou non dans des mécanismes légaux et formels de responsabilité, ils ne requièrent pas nécessairement des pouvoirs de police pour surmonter les méfiances et obtenir l’application de la norme. En d’autres mots, la gouvernance est un phénomène plus large que le gouvernement. Elle inclut les mécanismes gouvernementaux, dans le sens strict du terme, mais elle s’étend à des dispositifs informels, non gouvernementaux, par lesquels, au sein de ce cadre, individus et organisations poursuivent leurs propres intérêts. La gouvernance est donc un système de règles reposant tant sur le jeu des relations interpersonnelles que sur des lois et des sanctions explicites… », Rosenau (1992). Pour Hewitt De Alcantara, le concept de gouvernance a permi aux Institutions Financières Internationales d’abandonner l’économisme et de revenir aux questions sociales et politiques essentielles que posait le calendrier des restructurations économiques. Il permettait de surcroit de ne pas s’opposer trop ouvertement à des gouvernements qui, en général, n’aimeraient guère que des préteurs leur donnent des leçons sur des points sensibles de politique intérieure et d’administration. En parlant de « gouvernance » plutôt que de réforme de l’Etat ou de changement politique ou social, les banques multilatérales et les organismes de développement, ont pu aborder des questions délicates susceptibles d’être ainsi amalgamées sous une rubrique relativement inoffensive, et d’être libellées en termes techniques, évitant de la sorte à ces organismes d’être soupçonnés d’outrepasser leurs compétences statutaires en intervenant dans les affaires politiques d’Etats souverains (Hewitt de Alcantara 1998). Dans une acceptation large, la gouvernance peut être définie comme le mode par lequel chaque type de gouvernement, démocratique ou autocratique, exerce le pouvoir, conçu selon la formule du président. Cette gouvernance est alors un mode de gestion du pouvoir et renvoie à l’organisation de l’Etat, de la société et de l’économie. Cette notion de gouvernance nationale apparaît aujourd’hui pour montrer que l’Etat n’est plus une entité fermée et souveraine ne rendant pas de compte à leur population ni à la communauté internationale. Les Etats sont largement considérés comme des institutions au service de leur peuple et doivent bénéficier d’une bonne gouvernance. C’est dans cette conception, plus proche de la notion de gestion que de celle de pouvoir, que le terme de gouvernance s’est développé. Plus précisément, c’est sous l’impulsion des -25-
  • 26. Institutions Financières Internationales que le concept de gouvernance est aujourd’hui largement utilisé pour désigner les modes de gestion politique et économique. Les différentes définitions de la gouvernance adoptées par ces institutions seront abordées ultérieurement. I-2 ) La gouvernance d’entreprise : « corporate governance » Le courant lié à la « corporate governance », apparait aux Etats-Unis avec l’essor des sciences de gestion. Il se développe à partir de l’analyse du pilotage des organisations et constate que ce pilotage ne doit plus être uniquement hiérarchique. Il s’agit dès lors d’observer et de théoriser les mécanismes concrets et les institutions qui permettent la coordination entre les unités d’une organisation, l’arbitrage des divergences, le maintien de la cohésion de l’ensemble et la gestion des coûts de transaction entrainée par un pilotage davantage horizontal que vertical (Hufty 2007). De nombreux auteurs attribuent l'introduction de la notion de gouvernance dans l’analyse économique à Ronald Coase. La principale référence citée est l'article "The nature of the firm" (Coase, 1937). Ronald Coase remet en question l'hypothèse de la régulation des échanges par les seuls prix du marché et introduit, en économie, l'idée qu'il puisse exister différents modes de régulation et de gestion. Le système formé par ces différents modes de régulation propres à une entreprise a été, par la suite, conceptualisé sous le terme de « corporate governance ». Ce concept étant propre à l'analyse économique d'une firme, il représente l'ensemble des « dispositifs mis en œuvre par la firme pour mener des coordinations efficaces qui relèvent de deux registres : protocoles internes lorsque la firme est intégrée (hiérarchie) ou contrats, partenariats, usage de normes lorsqu'elle s'ouvre à des sous-traitants » (Lorrain, 1998). Dans les années 1970, ce concept devient central dans le courant de l'économie néo- institutionnaliste. Pour un des auteurs clés de ce courant, Williamson prix Nobel d’économie en 2009 (1979, 1984, 1996) qui prend appui sur les travaux de Coase, la structure des institutions, par exemple la firme ou le marché, donne lieu à des approches et mécanismes de gouvernance variés. Elles représentent des structures de gouvernance distinctes, qui connaissent des problèmes de coûts de transaction et de contractualisation spécifiques, auxquels s’adresse précisément l’étude la gouvernance : « l’étude de la gouvernance concerne l’identification, l’explication et l’atténuation de toutes formes de risques liés à la contractualisation 5 » Williamson (1996). 5 Traduction de « The study of governance is concerned with identification, explication, and mitigation of all forms of contractual hazards». -26-
  • 27. Selon cette approche, la notion de gouvernance dans le champ de l'économie, est alors fixée pour désigner un ensemble de processus de coordination qui peuvent s'inscrire dans un système hiérarchisé. La gouvernance d’entreprise vient d’abord de l’existence d’un pouvoir, celui des actionnaires. Les entreprises qui se développent ne peuvent plus appartenir à une seule famille ou même à une seule nation. En effet, l’entreprise, si elle reste dirigée par un groupe restreint, s’épuise surtout si ce groupe est tenté de privilégier le maintien de son contrôle et finit souvent par disparaitre. L’entreprise devient l’enjeu d’une partie complexe entre dirigeants et actionnaires, alors que les salariés et les clients passent au second plan. Comment assurer un contrôle pertinent des entreprises ? Quel équilibre entre les parties prenantes : hauts dirigeants, salariés, actionnaires, pouvoirs publics ? La gouvernance d’entreprise s’inscrit dans des rapports de force. La gouvernance d’entreprise vise à introduire des règles : transparence des comptes, contrôle par des instances indépendantes, recours et sanctions contre les responsables. Ainsi, divers usages du terme de gouvernance dépassent l'analyse des systèmes regroupant uniquement des agents productifs (la firme) pour s'intéresser à des systèmes rassemblant des acteurs mais aussi des nations. On parle alors de la gouvernance nationale et de la gouvernance globale. I-3 ) La gouvernance mondiale La notion de gouvernance globale est employée dès la seconde moitié du 20ème siècle avec le développement du phénomène de la mondialisation. La gouvernance globale dépasse la gouvernance nationale et confirme la disparition des frontières entre la dimension nationale et la dimension internationale : « la gouvernance mondiale, c’est gouverner sans autorité souveraine des relations transcendant les frontières nationales » [Finkelstein (1995. p368)]. La gouvernance a fait son entrée dans le champ des relations internationales à travers les notions de gouvernance mondiale et de gouvernance globale. La construction d’un système de gouvernance mondial permettrait de pallier l’incapacité des Etats-nation et des organisations internationales actuelles à faire face aux demandes de la société. C’est en réponse à la crise de la gouvernabilité au niveau supranational que se sont développés des travaux et des réflexions autour de la notion de gouvernance globale. Cette notion a suscité un grand nombre de travaux qui s’inscrivent dans le prolongement des études sur les régimes politiques et les institutions internationales. Ces travaux relèvent de deux catégories : soit d’une réflexion analytique sur le système international présent, soit d’une réflexion normative sur un système de gouvernance mondiale qu’il conviendrait de construire. -27-
  • 28. Dans ce cadre, la gouvernance est interprétée de deux façons différentes. Certains auteurs assimilent la gouvernance à un système de normes et non à un processus. La gouvernance surgirait d’un accord ou d’un consensus sur des valeurs communes, des objectifs communs dégagés au cours de négociations transnationales associant l’Etat mais aussi des acteurs privés et associatifs. Pour d’autres, dans des domaines tels que le contrôle du système monétaire international ou la gestion de la dette des pays en développement, qui sont des questions qui peuvent être analysées en termes de gouvernance, il n’y a pas de normes et de règles vers lesquelles les attentes des acteurs convergent mais des mécanismes de dialogue qui assurent la participation des acteurs principaux. La gouvernance consiste alors à regarder comment se déroule le mécanisme de « régulation conjointe » par un jeu permanent d’échanges, d’ajustements mutuels, plutôt que de regarder comment les acteurs ont la capacité de définir les règles du jeu et déterminent les résultats d’une négociation dans des secteurs clés de la vie internationale. La gouvernance est alors considérée comme un processus d’accommodement entre de multiples parties défendant chacune leurs intérêts. La Commission sur la Gouvernance Globale, créée au début des années 90 à l’initiative du chancelier Brandt pour penser le monde de l’après-guerre froide, fournit en 1995 une définition qui mérite d’être mentionnée : au niveau mondial « la gouvernance a été vue comme une relation essentiellement entre gouvernement. Désormais, il faut la penser comme impliquant aussi les ONG, les mouvements des citoyens, les entreprises multinationales et le marché mondial. Tout cela en interaction avec les médias dont l’influence s’est accrue de 6 façon spectaculaire » (CGG 1995). La gouvernance globale, constituerait la réponse à apporter à la crise de la gouvernabilité que rencontre le système international. Cependant, la vie politique telle qu'elle est envisagée par la Commission se résume à une gestion technocratique des affaires publiques. La Commission considère la politique internationale comme une entreprise dans laquelle tous les acteurs apportent leur contribution, en vue de finalités utilitaires. II- « La bonne gouvernance » II-1 ) Origine du concept L’expression « good governance » est due à Ismail Serageldin (Mills et Serageldin,1991), vice-président de la BM. Dans son rapport de 1994 « Gestion des affaires publiques », la bonne gestion des affaires publiques s’incarne dans une prise de décision politique prévisible, 6 Traduction à partir du CGG (Commision on Global Governance). (1995), Our Global Neighbourhood, Oxford, Oxford University Press. -28-
  • 29. ouverte et éclairée (c’est-à-dire dans des processus transparents) dans une bureaucratie imprégnée d’une éthique professionnelle, dans un gouvernement exécutif responsable de ses actions; et dans une société civile forte, participant aux affaires publiques et où tous obéissent à la loi 7. Aujourd’hui, la BM entend, par gouvernance, la capacité de l’Etat à fournir les institutions apportant leur appui aux activités marchandes et par « bonne gouvernance » la fourniture réussie de telles institutions8. La bonne gouvernance inclut la création, la protection et le respect des droits de propriété, un système de réglementation soutenant la concurrence, de saines politiques macroéconomiques créant un environnement stable pour les activités marchandes. La bonne gouvernance signifie aussi l’absence de corruption, dans la mesure où celle-ci peut altérer les objectifs des politiques et affaiblir la légitimité des institutions publiques (World Bank, 2002, p 99). La Banque Mondiale élabore une série de critères de qualité de la gouvernance destinés à évaluer les normes et les pratiques de gouvernement et d’organisation. Bien qu’il n’existe pas de liste définitive et homogène de ces pratiques dans les organisations qui prônent la bonne gouvernance, l’Institut de la BM fournit un exemple de ces critères : écoute et imputabilité (accountability)9, stabilité politique et absence de violence, efficacité du gouvernement, qualité de la réglementation, État de droit et maîtrise de la corruption. La BM analyse la gouvernance dans un cadre fondé sur des valeurs universelles qui sont l’inclusion et la responsabilité. Pour elle, ces deux critères doivent être remplis pour que l'on puisse parler de "bonne gouvernance". − L'inclusivité : cette notion renvoie à l'idée d'égalité des droits civils et politiques présente dans toutes les démocraties libérales. Cela signifie que tous les citoyens se voient garantir de façon égale certains droits fondamentaux, notamment l’égalité devant la loi et le droit de participer au processus de gouvernance sur un pied d’égalité. Elle signifie aussi l’absence d’exclusion et de discrimination dans toute relation entre les citoyens et l’Etat. Elle renvoie à la notion d’égalité qui signifie que tous ceux qui sont concernés par le processus de gouvernance et souhaitent y participer peuvent le faire comme tous les autres. Selon la BM, une gouvernance inclusive entretient les mécanismes qui définissent et qui protègent les droits fondamentaux de tous et assure la garantie de l’autorité de la loi. La bonne gouvernance signifie alors que les droits sont 7 http://www.worldbank.org/publicsector/overview.htm 8 La définition adoptée est celle des institutions de North (1994). 9 Selon la Banque Mondiale, la notion d’imputabilité est synonymes de responsabilité publique et renvoie à la l’obligation des dirigeants de rendre compte de leurs actions devant la population. -29-
  • 30. protégés et que l’Etat traite tout le monde de la même façon devant la loi, sans discrimination et assure l’égalité des opportunités d’accès aux services publics. Toute personne concernée par l'exercice de l'autorité (en somme l'ensemble du corps électoral en situation de suffrage universel) doit pouvoir y participer, directement ou indirectement, sur un pied d'égalité avec les autres membres du corps social. L'Etat de droit constitue le corollaire de "la gouvernance inclusive", puisqu'elle nécessite la mise en œuvre de mécanismes de recours permettant de faire respecter ces droits, de garantir de facto l'égalité des citoyens devant la loi et l'égal accès aux services publics (Rapport sur le développement au Moyen Orient et en Afrique du Nord, 2005). − La responsabilisation : elle dérive de la notion de représentation. Cela signifie que les personnes qui sont choisies pour agir au nom du peuple, ont à répondre devant lui de leurs échecs comme de leurs sucès. En d’autres termes, ces personnes sont responsables devant le peuple. Cette responsabilité repose sur la connaissance et sur l’information et donc sur la transparence. Elle recouvre deux notions: la transparence et la contestabilité. L'idée de transparence renvoie à la nécessité que les citoyens accèdent à toute l'information concernant le fonctionnement et les modes d'organisation des institutions publiques et politiques afin qu'il soient réellement en mesure d'exercer de façon effective…la contestabilité, c’est-à-dire le caractère concurrentiel du processus de désignation des responsables politiques (le pluralisme) et des prétendants à la gestion publique (désignation équitable des agents de l'Etat). Concrètement, l'exercice de la contestabilité a lieu notamment lors d'un processus électoral libre, où l'on peut sanctionner ses dirigeants, ou lors d'un recours devant une juridiction administrative qui permet de condamner les manquements à la loi par les autorités publiques. La responsabilisation peut également être interne (lorsque sont institués des mécanismes de contrôle entre ou bien au sein même des institutions administratives et politiques) et externe (lorsque le citoyen demande des comptes à un dépositaire de l'autorité publique). Les deux valeurs universelles sur lesquelles se base la Banque Mondiale pour définir la bonne gouvernance, à savoir l’inclusion et la responsabilité, apparaissent comme des éléments essentiels de tout programme destiné à améliorer la gouvernance. Il faut, d’une part, que les droits fondamentaux, notamment le droit de participer au processus de gouvernance, l’égalité devant la loi et un traitement égal, soient garantis dans tous les éléments du programme. D’autre part, pour que ce programme soit sur le bon chemin, une transparence accrue et la possibilité de contestation sont exigées. -30-
  • 31. Le programme pour améliorer la gouvernance peut être élaboré selon cinq voies conduisant à la bonne gouvernance : des mesures pour renforcer l’inclusion, des actions au niveau national pour renforcer la responsabilité externe, des actions au niveau local pour renforcer la responsabilité externe, un système national de contrôle pour renforcer la responsabilité interne et des réformes administratives pour améliorer la responsabilité interne10. − Le renforcement de l’inclusion : pour renforcer l’inclusion, la première étape consiste à adopter des lois et des règlements pour garantir l’accès à des droits fondamentaux et principalement le droit de participer au processus de gouvernance sur un même pied d’égalité. Il y a également d’autres mesures pour garantir l’inclusion comme une consultation publique élargie, une plus grande liberté des médias, moins de restrictions imposées aux organisations de la société civile, un accès plus équitable à la santé et à l’éducation. − Le renforcement de la responsabilité externe au niveau national : ce sont des mesures qui permettent de voir si le contexte institutionnel global d’un pays est favorable ou non à une bonne gouvernance. Par exemple, faire circuler assez l’information qui est un vecteur de transparence sur les actions du gouvernement, accroitre les possibilités de contestation grâce à des élections ouvertes, loyales et régulières des responsables des affaires publiques, permettre davantage à la société civile de se faire écouter et de participer, notamment au moyen de groupes de défense des citoyens, instaurer un meilleur contrôle de la qualité de la gouvernance et faire en sorte que soient mieux diffusées les statistiques qui mesurent cette qualité selon les divers aspects (contrôle de la corruption, autorité de la loi, liberté de la presse, ect) ; et enfin favoriser l’indépendance et la responsabilisation des médias. − Le renforcement de la responsabilité externe au niveau local : pour faire progresser la responsabilité externe, il faut veiller à une plus grande participation citoyenne et notamment en assurant une information plus fiable sur les performances des services publics par des enquêtes ou encore des consultations, en renforçant la concurrence entre les prestataires de services en donnant à la clientèle une plus grande liberté de choix , en prenant des mesures pour renforcer les autorités locales qui sont les plus proches de la population et donc capables de l’impliquer directement dans les décisions publiques, et enfin en facilitant l’implication des associations qui donnent du pouvoir aux 10 Rapport sur le Développement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (2005), « Vers une meilleure gouvernance au Moyen-Orient et en Afrique du Nord », la Banque Mondiale, Washington, DC, pp.18-23 -31-
  • 32. collectivités, surtout en ce qui concerne la gestion des services publics qui doivent être adaptés à des collectivités spécifiques. − Le renforcement de la responsabilité interne par un système national de contrôle : elle vise à accroitre les possibilités de contestations dans l’exercice du pouvoir de l’Etat. Il s’agit de renforcer l’autorité et la capacité du pouvoir parlementaire, de renforcer le pouvoir judicaire pour qu’il soit plus indépendant et avec une capacité renforcée, et de donner des pouvoirs de contrôle et de médiation à d’autres organismes publics indépendants. − Le renforcement de la responsabilité interne à travers des réformes administratives : un certain nombre de réformes peuvent renforcer la responsabilité au sein des organismes prestataires de services publics : réformer la fonction publique pour la responsabiliser davantage, décentraliser les fonctions de l’Etat pour les rapprocher des citoyens, assurer l’indépendance des organismes régulateurs afin d’éviter que des intérêts particuliers ou que de hauts fonctionnaires puissent profiter du système à des fins personnelles, et enfin promouvoir une éthique du service public et de la responsabilité vis-à-vis des ressources publiques afin de renforcer l’implication des fonctionnaires dans la recherche de meilleurs performances. − L’Etat de droit est ici au cœur de la bonne gouvernance. Il s’agit de mettre en place « un système de règles qui soient réellement appliquées et d’institutions qui fonctionnent vraiment et assurent une application appropriée de ces règles. Il est alors nécessaire que les dirigeants politiques soient responsables de leurs actes devant les citoyens et qu’ils soient engagés dans la lutte contre la corruption. Il convient alors de relever que le concept de gouvernance reste tributaire de la conception de l’Etat et renvoie aux rapports des classes au sein de sociétés (Rapport sur le développement au Moyen Orient et en Afrique du Nord, 2005). II-2 ) Les éléments de la bonne gouvernance Daniel Kaufmann, ancien directeur du programme gouvernance à l’Institut de la Banque Mondiale, et Aart Kraay, économiste principal dans le Groupe de recherche de la Banque, définissent la gouvernance comme « les traditions et les institutions à travers lesquelles l’autorité est exercée dans un pays pour le bien commun ». Cela recouvre le processus par lequel les gouvernements sont choisis, contrôlés et remplacés, la capacité du gouvernement à formuler et à appliquer de manière efficace des politiques saines et enfin cela recouvre le -32-
  • 33. respect des citoyens et de l’Etat pas les institutions régissant leurs interactions économiques et sociales [Kaufman et Kraay (2002)]. Cette définition recouvre plusieurs aspects de la gouvernance qui touchent les éléments suivants : - le caractère démocratique des institutions politiques ; - la stabilité politique, l’absence de violence et l’efficacité des pouvoirs publics ; - la lutte contre la corruption et l’exigence de la transparence et de la responsabilité II-2-1 ) La démocratie La démocratie est présentée, par la Banque Mondiale, comme un élément très important de la bonne gouvernance. Elle fait partie du volet politique de la définition de la Banque Mondiale et rend compte généralement de la nécessité de l’existence d’un Etat de droit dans le pays. Le concept de démocratie a fait l’objet de plusieurs définitions. Ce concept met en avant l’idée d’égalité entre toutes les personnes à l’intérieur d’un pays. Cette légalité juridique leur attribue un droit égal de participation dans le domaine de la politique. La démocratie vise ainsi à protéger les gouvernés contre toute autorité arbitraire par le respect des procédures régulières dans l’exercice du pouvoir. Ce système qui est centré sur l’homme, exige de lui une manifestation concrète et claire de sa volonté. Ceci est facilité par la consécration des libertés de penser, de la presse, de réunion, de posséder et de choix des représentants dans un contexte pluraliste. Un régime politique démocratique limite les leaders politiques par des institutions électorales, législatives et judiciaires (Kauffmann, 2001). Ces limites que les institutions placent sur les actions arbitraires des leaders politiques, des fonctionnaires et des juges, impliquent que l’Etat de droit soit opérationnel dans la sphère politique. Les leaders politiques n’ont pas le droit de déclarer illégales des organisations politiques, de limiter la liberté d’expression, de harceler les opposants politiques ni d’annuler les élections. II-2-2 ) L’instabilité politique Le concept d’instabilité politique est un concept qui rassemble plusieurs facteurs qui ne se regroupent pas nécessairement et qui doivent être pris simultanément. En effet, c’est un concept ambigu qui nécessite une clarification : il recouvre deux réalités distinctes qui ont des effets différenciés en termes de développement économique. Il est nécessaire de distinguer entre les changements de régime ou de pouvoir politique réalisés à la suite d’actions violentes des changements opérés dans le respect des formes légales. Il est généralement attribué au premier phénomène, les vocables d’ « instabilité -33-
  • 34. politique » et d’ « alternance politique » pour le second phénomène. Cependant, la distinction entre les deux n’est pas toujours établie explicitement dans la littérature et elle s’intéresse principalement à l’instabilité politique plutôt qu’à l’alternance. L’instabilité politique recouvre l’ensemble des événements violents d’origine politique, cela regroupe les manifestations agressives, les émeutes, les assassinats politiques. Sur le plan théorique, l’étude des effets de l’instabilité politique sur la croissance se concentre sur la façon dont certains événements rendent incertains les droits de propriété et se trouvent donc menacés. En effet, les coups d’Etat réussis sont dangereux et ont, en général, pour conséquence la destruction de la propriété privée. Cela va supposer des doutes sur la mise en application des droits de propriété dans l’avenir. II-2-3 ) La corruption : un aspect fondamental de la gouvernance La lutte contre la corruption est un élément central de la promotion de la bonne gouvernance, elle fait l’objet d’attentions et de préconisations particulières. En fait, depuis le milieu des années 90, un certain nombre de projets internationaux ont été élaborés en vue de lutter contre les abus de fonctionnaires publics pour des gains personnels. Par exemple, on peut citer la Convention des Nations Unies contre la corruption, signée en Décembre 2003, la Convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, adoptée par l'OCDE, le 21 Novembre 1997, ou la Convention de l'Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption, adoptée par les chefs d'État et des gouvernements de l'Union africaine le 12 Juillet 2003. L’action de la BM en matière de corruption a deux volets : un volet opérationnel et un volet de recherche. En effet, depuis 1996, la Banque Mondiale a lancé plus de 600 programmes anti-corruption dans environ cent pays. Les initiatives vont des juges, des fonctionnaires à des cours pour les journalistes d’investigation. La BM s’est aussi engagée à mesurer si les projets qu’elle finance ne sont pas entachés par la corruption. Les actions de la BM en matière de corruption portent également sur la recherche. Le groupe de recherche de la BM consacré à la corruption est très actif. La plupart des articles publiés sur le sujet le sont par des membres de ce groupe de recherche, ou des personnes y ayant collaboré ou appartenu (Kaufmann, Kraay et Mastruzzi). Depuis 1997, le FMI qui a fait de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption un de ses objectifs principaux, a considérablement développé son rôle dans ce domaine. Les principaux instruments qu’il utilise dans ce champ sont le développement et la promotion de -34-
  • 35. codes relatifs aux bonnes pratiques, à la transparence, à la responsabilité et à la gestion des fonds publics11. La corruption constitue l’un des piliers du concept de gouvernance les plus souvent débattus. Si intuitivement, l’idée générale reçue est qu’elle peut constituer un handicap pour la croissance économique d’un grand nombre de pays, la littérature témoigne également d’un effet positif possible de la corruption sur les performances économiques. Comme le concept de gouvernance, le terme de corruption est également un terme flou dont l’établissement d’une définition stricte parait difficile. En effet, plusieurs définitions sont attribuées à la corruption dans ses différents types et formes. Selon Bardhan (1997), la corruption consiste dans l’utilisation du service public pour des gains privés. Pour Shleifer et Vishney (1993), la corruption désigne l’échange d’éléments de propriété gouvernementale par les officiers publics contre leur gain personnel. Selon Leff (1964), la corruption est un moyen qui peut être entre les mains des entrepreneurs cherchant à faire des affaires avec un gouvernement indifférent et peut stimuler le développement économique. Bien qu'il soit difficile de s'entendre sur une définition précise, il y a un consensus qui fait référence à toutes les formes d’abus de fonctions et de comportements commis par des hommes politiques, des fonctionnaires ou au sein d’entreprises privées ou publiques pour définir la corruption. Selon ce consensus, certains actes illégaux tels que la fraude, le blanchiment d'argent, la drogue et les opérations de marché noir, ne constituent pas des actes de corruption en eux-mêmes, car ils n'impliquent pas l'utilisation de la puissance publique. Cela renvoie à la distinction entre deux formes de corruption : la grande corruption qui se situe à un haut niveau où les décideurs politiques créant et appliquant les lois utilisent leur position officielle pour promouvoir leur bien-être, leur statut ou leur pouvoir personnel ; alors que la petite corruption renvoie principalement à la corruption bureaucratique dans l’administration publique. Toutefois, personne ne peut nier que certains de ces phénomènes sont étroitement liés à la corruption. Vogl (1998), par exemple, met en évidence l'importance de la lutte contre le blanchiment d'argent. Naylor (1987, 1996) étudie les liens du commerce de la drogue et la corruption. Depuis les années 1970, l’étude de la corruption, en sciences économiques et en sciences politiques s’est centrée sur la corruption des agents publics et la définition de la corruption adoptée est généralement axée sur les devoirs de l’administration. Aujourd’hui, dans la 11 Site du Fonds Monétaire International : http://www.imf.org/external/np/exr/facts/fre/govf.htm -35-
  • 36. plupart des travaux, la corruption est définie comme l’utilisation des pouvoirs que confère une charge publique pour en retirer les avantages privés (BM, 1997). Cette définition exclut la corruption observée dans le secteur privé. II-3 ) Les différentes compréhensions de la bonne gouvernance selon les autres institutions internationales L’expression de « bonne gouvernance » apparue pour la première fois dans le vocabulaire de la BM est aujourd’hui reprise par les agences de développement, par les différentes organisations internationales ou régionales (PNUD, CEE, FMI, BAD, OCDE…). Chacune a développé sa propre définition de la gouvernance. Le PNUD 12 définit la gouvernance de la façon suivante : « la gouvernance est l’exercice de l’autorité administrative (la mise en œuvre de politiques), politique (la formulation de politiques) et économique (la prise de décision à caractère économique) aux fins de gérer les affaires d’un pays. Elle repose sur des mécanismes, des processus et des institutions qui permettent aux citoyens et aux groupes d’articuler leurs intérêts, exercer leurs droits légaux, remplir leurs obligations légales et négocier leurs différences ». Le PNUD a, de plus, cerné les trois paliers de gouvernance, à savoir l’Etat (soit le pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire, les services publics et l’armée) qui créée un environnement politique et légal propice ; le secteur privé (la petite, la moyenne et la grande entreprise) qui crée emplois et revenus, et la société civile (ONG, les associations professionnelles, les groupes religieux, les organisations féminines et tous les citoyens) qui facilitent les interactions politiques et sociales. L’Etat a un rôle de défendre les intérêts pour le bien public, favorise un climat propice au développement humain, veille au respect de la loi, au maintien de l’ordre et de la sécurité, crée une identité et une vision nationales, définit une politique et des programmes publics, génère des recettes pour financer les services et les infrastructures publics, élabore un budget qu’il applique ensuite, et réglemente et encourage le marché. 13 La Commission des Communautés Européennes (CEE) définit la gouvernance de la façon suivante : « la gouvernance concerne les règles, les processus et les comportements par lesquels les intérêts sont organisés, les ressources générées et le pouvoir exercé dans la société. La manière dont les services publics fonctionnent, les ressources publiques sont gérées et les pouvoirs réglementaires publics sont exercés, constitue le principal problème à traiter dans ce contexte. La valeur réelle de la notion de gouvernance est qu’elle propose une 12 PNUD. About the Democratic Governance Practice. www.undp.org/governance/about.htm consulté le 18 décembre 2009. 13 Commission des Communautés Européennes (CEE) (2000), Livre blanc, La gouvernance européenne, Bruxelles, COM (2000) 366 final. -36-