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✅ Chers membres, notre groupe comprenant de nombreux professionnels de santé, je vous propose un sujet de fond autour de la régionalisation de notre système de santé.
⏩ Le collectif d'acteurs de santé pointe le manque de d'adaptation de l'Ondam à la spécificité de chaque territoire.
Déserts médicaux, inégalité d'accès aux soins, manque de financement de la prévention et de l'innovation en santé, etc.
Il estime que les conseils régionaux (ou apparentés) sont légitimes pour piloter les questions de santé dans le cadre d'une feuille de route (un accord-cadre) avec chaque ARS.
1. LE MONDE ·SCIENCE & MÉDECINE
MERCREDI 16 SEPTEMBRE 2020
Les conseils régionaux sont légitimes
pour s’emparer des questions de santé
TRIBUNE - Un collectif d’acteurs de la santé appelle à une accentuation
de la régionalisation du système afin d’assurer un maillage territorial plus pertinent
L’hôpital public souffre, et la
crise sanitaire liée à la pandé
mie de Covid19 n’a fait qu’ag
graver la situation. Audelà du plan
d’urgence présenté en novembre 2019,
ou des 33 mesures du Ségur de la santé
de juillet 2020, les réponses gouverne
mentalesapparaissentencoretropsou
vent calibrées selon une vision jaco
binedusystèmedesanté,sansconsidé
rationdelaréellehétérogénéitédester
ritoires français, à la fois sur l’état
sanitaire de la population et sur l’orga
nisation de l’offre de soins.
En France, alors que six hôpitaux sur
dix sont en déficit, les 1300 établisse
ments publics recensés par la direc
tion de la recherche, des études, de
l’évaluation et des statistiques (Drees),
en 2017, se différencient par leurs mis
sions, prodiguant des soins plus ou
moins spécialisés en courts ou longs
séjours, mais aussi par leur implanta
tion, depuis le CHU jusqu’au petit hô
pital de proximité. S’y ajoutent les éta
blissements privés, de tailles et spécia
lités très variées, notamment plus de
1000 cliniques, qui réalisent chaque
année près des deux tiers des actes de
chirurgie ambulatoire. Or chaque ter
ritoire diffère par ses caractéristiques
géographiques, démographiques, so
ciales et épidémiologiques, rendant
nécessaireunepriseencomptefinede
ces spécificités et besoins associés.
Alors que l’exigence de la perti
nence des soins est réaffirmée, visant
à réduire les délais de prise en charge,
les actes médicaux inutiles ou le non
respect des prescriptions, se pose si
multanément la question des déserts
médicaux et de l’égalité d’accès aux
soins. Dans les territoires ruraux, les
hôpitaux de proximité luttent pour
leur survie dans un contexte de sta
gnation, voire de baisse de la popula
tiondesservie,desonvieillissementet
deladifficultéàconserverdesservices
ouverts faute de médecins.
Les agences régionales à la peine
En élaborant, au sein d’un territoire
donné,unestratégiemédicosoignante
collective entre établissements de
santé, les groupements hospitaliers de
territoire (GHT) s’inscrivent dans cette
recherche d’adaptation aux caractéris
tiqueslocales.Maisleurmiseenœuvre
s’avère lente et complexe, d’autant que
les établissements privés n’y sont que
peu associés, confirmant ainsi que
d’autres pistes doivent être explorées.
Sur le plan régional, les agences ré
gionales de santé (ARS) sont chargées
de piloter le système de santé, en défi
nissantetenmettantenœuvrelapoli
tique de santé en région, au plus près
des besoins de la population locale et
de ses spécificités. Accaparées par la
créationdesGHTetdescommunautés
professionnelles territoires de santé
(CPTS), dans un contexte d’élargisse
ment de leur périmètre d’action lié
aux nouvelles régions, les ARS sem
blent aujourd’hui à la peine.
L’une des raisons est probablement
la fracture entre le volet décisionnel
confié aux ARS, chargées de décliner
en région une politique de santé na
tionale, et un volet budgétaire ina
dapté, piloté de manière très centrali
sée avec peu d’adaptations régionales.
A cela s’ajoute le pilotage exclusif par
l’Assurancemaladie de la totalité du
secteur libéral et de la médecine de
ville, selon un modèle de financement
delaSécuritésocialequin’apasévolué
depuis sa création, en 1945, restant
basé sur un financement à l’acte (et
non à l’activité), et ne prenant en
chargenilapréventionnil’innovation.
Evaluation des besoins
Or la pertinence des soins passe aussi
par la justesse de leur financement,
domaine sur lequel l’ARS n’a pas suffi
samment la main… Pourquoi ne pas
transformer l’Objectif national des dé
penses d’Assurancemaladie (Ondam),
votéchaqueannéedanslaloidefinan
cement de la Sécurité sociale, en une
approche régionale englobant l’en
semble des professionnels de santé, et
conçue sur la base d’une évaluation
des besoins régionaux, en concerta
tion avec les différents acteurs?
En effet, les conseils régionaux ont
une vraie légitimité à s’emparer des
questions de santé, audelà de leurs
traditionnellescompétencesquesont,
notamment, la recherche et l’innova
tion, l’emploi, la formation et le déve
loppement économique – autant de
thématiques par ailleurs très présen
tes et cruciales dans le domaine de la
santé. De plus, si l’ARS a compétence à
décliner des priorités de santé publi
que sur son territoire, la Région a tout
intérêt à agir, elle aussi, pour l’amélio
ration de l’état sanitaire de sa popula
tion. Sorte d’accordcadre entre l’ARS
etleconseilrégional,lafeuillederoute
de santé ainsi élaborée pour chaque
région serait sans aucun doute plus
réaliste et mieux adaptée aux besoins
locaux. Un déficit d’acteurs de santé
pourrait ainsi, par exemple, devenir
une priorité de l’action régionale,
misant sur le déploiement du numéri
que, l’aménagement du territoire et le
développement des mobilités.
Une feuille de route unique (et non
plus déclinée, comme l’actuel Ondam,
en un volet «médecine de ville» et un
volet «hôpital») permettrait ainsi une
ventilationsoupleparl’ARSdesprojets
enfonctiondesbesoinslocaux,identi
fiés en commun avec la Région dans le
cadre d’une véritable politique sani
taire régionale.
¶
Anne Albert-Cromarias, enseignante-
chercheuse HDR à l’ESC Clermont
Business School; Malik Albert, direc-
teur d’hôpital; Christian Fillatreau,
président du TIC Santé Nouvelle-
Aquitaine; Khaled Meflah, ancien
directeur général du Centre de lutte
contre le cancer, à Caen.
LA PERTINENCE DES
SOINS PASSE AUSSI
PAR LA JUSTESSE DE
LEUR FINANCEMENT,
DOMAINE SUR
LEQUEL L’ARS N’A
PAS ASSEZ LA MAIN