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Master 1 Information et Communication
!
Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015
TIRET Théo N° étudiant : 21309201
Sous la direction de M. Jamil DAKHLIA Rendu : 11 mai 2015
Mémoire de Master 1
« 2008, une campagne disruptive ? »
2008$ 2012$
Master 1 Information et Communication
Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 2
Remerciements
Premièrement, je souhaiterais remercier Monsieur Dakhlia, qui a accepté d’encadrer ce
mémoire et m’a accompagné dans la réalisation de ce travail. Les séances de suivi m’ont été
d’une grande et précieuse aide, utile pour cerner et délimiter mon travail.
Ensuite, je tiens à remercier chaleureusement d'une part Francis Poézévara, d'autre part
Valérie H. et Camille P. (qui ont souhaité gardé l'anonymat) ; tous trois ont pris le temps de
répondre à mes questions. Je remercie également toutes les personnes ayant participé à mon
questionnaire.
Je remercie Stella, ma compagne. Elle m’a été d’un grand soutien tout au long de cette
année en m’apportant la sérénité dont j’avais besoin dans les périodes de travail soutenu.
Enfin, mes remerciements sont adressés tout naturellement à mes parents qui me
soutiennent depuis toujours. Ils trouvent systématiquement les mots qui m'encouragent et me
réconfortent lorsque j’en éprouve le besoin. Leur confiance et leur soutien me sont très chers.
Encore merci à vous tous !
Master 1 Information et Communication
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SOMMAIRE :
!
Présentation générale...............................................................................................................4
Préambule : la digitalisation de la société ..................................................................................4
Choix du sujet et objectifs de recherche.....................................................................................4
Problématique et hypothèses......................................................................................................5
Méthodologie .............................................................................................................................6
État de l’art.................................................................................................................................7
!
Internet : genèse d’un nouveau média de masse .................................................................11
Historique d’Internet ................................................................................................................11
Internet : un média de masse ? .................................................................................................12
!
Première partie : analyse de la campagne de Barack Obama 2008 ..................................15
I - Contexte..............................................................................................................................15
II - Internet, le cheval de Troie d’Obama ............................................................................16
Une volonté de créer une véritable communauté autour d’une cause commune : le
changement...............................................................................................................................16
Une campagne politique menée sur le mode « Téléthon ».......................................................19
III - Internet comme levier d’activation de la mobilisation................................................21
Une formidable « revitalisation citoyenne » ............................................................................21
Quand les sympathisants s’emparent de la Toile .....................................................................23
!
Deuxième partie : analyse de la campagne de François Hollande 2012............................26
I - Contexte..............................................................................................................................26
II - Le Parti Socialiste et l’inspiration américaine ..............................................................27
Blue State Digital .....................................................................................................................28
Liegey-Muller-Pons, les « Bostoniens » ..................................................................................30
III – Spécificités françaises....................................................................................................32
Facteurs juridiques ...................................................................................................................33
Analyse des résultats du questionnaire « Les français et la politique » ...................................34
!
Conclusion...............................................................................................................................37
Matériaux :..............................................................................................................................40
Bibliographie : ........................................................................................................................40
Annexes ...................................................................................................................................44
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Présentation générale
Préambule : la digitalisation de la société
Trois milliards et 10 millions. C’est le nombre d’internautes en 2015, ce qui représente 42%
de la population mondiale. Ce chiffre, en croissance de 21% en comparaison avec 20141
,
suffit à lui-seul à souligner que nous faisons face à une digitalisation considérable de notre
société. Pour certains, à l’image de Gilles Babinet (Digital Champion français et auteur de
l’ouvrage intitulé "L’ère numérique, un nouvel âge de l’humanité"), il s’agit même de la plus
importante mutation de l’histoire dans le sens où « nous sommes aujourd’hui à l’aune d’une
révolution d’une ampleur unique : la révolution numérique. Il s’agit d’une véritable rupture
de paradigme qui va bouleverser durablement et profondément nos sociétés contemporaines,
aussi bien dans la forme que dans le fond »2
. Ce phénomène se répand et s’étend à tous les
secteurs économiques, à tous les pans de notre société : politique, santé, éducation,
connaissance, production et concerne l'ensemble des institutions, des entreprises ou chacun
d'entre nous.
Choix du sujet et objectifs de recherche
Cette révolution digitale, qui débute réellement au début des années 2000 bouleverse, nous
l’avons dit, tous les pans de notre société. Pour ce travail de recherche, j’ai voulu me
concentrer sur l’aspect politique, plus particulièrement sur la digitalisation des campagnes
électorales. En effet, il s’avère que les nouvelles technologies ouvrent un extraordinaire
champ de nouvelles opportunités. Les hommes et femmes politiques ainsi que leurs équipes
apprivoisent tout naturellement ces nouveaux outils qui deviennent peu à peu incontournables
en terme de stratégie électorale et plus largement de communication politique. Si les
prémisses de cette relation entre communication politique et nouvelles technologies remontent
au début des années 2000 au sein du Parti Démocrate américain, nous aurons l’occasion d’y
revenir, c’est réellement à partir de 2007 que le monde s’aperçoit des potentialités
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Source : étude « Digital, Social and Mobile 2015 », réalisée par l’agence de communication We Are
Social.
2
BABINET Gilles, Transition numérique – Enjeux et opportunités dans un monde en mutation,
www.gillesbabinet.com, 05/12/2014.
!
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stratégiques des technologies numériques. En effet, lors de la campagne présidentielle
américaine de 2008, Obama et ses équipes se sont largement appuyés sur ces dernières et nous
pouvons aujourd’hui affirmer, avec le recul des dernières années, que sa victoire est en grande
partie due à ce parti-pris stratégique. L’objectif de ce travail est donc d’étudier ce que
Clémence Pène appelle la « nouvelle science électorale américaine »1
et de voir en quoi cette
dernière tend à s’imposer internationalement. Ce mémoire traitera également de la campagne
victorieuse de François Hollande en 2012 et s'attachera à identifier si certaines
caractéristiques de cette « nouvelle science électorale » ont bel et bien traversé l’Atlantique.
Cette recherche se situe ainsi à la croisée de plusieurs disciplines : la science politique, la
communication politique, le marketing politique, la sociologie politique et les sciences de
l’information et de la communication avec l'usage d’Internet et des réseaux sociaux. « Internet
est aujourd’hui devenu un objet pour la science politique »2
dans la mesure où il bouleverse
les processus démocratiques. La communication politique se trouve quant à elle également
bouleversée par cette évolution car Internet casse des distances, notamment la distance entre
les politiques et les citoyens, mais aussi les rapports au temps et à l’image. La sociologie
politique permet alors de s’intéresser à la réceptions par les citoyens de ces nouvelles
pratiques et paradigmes. Enfin, les sciences de l’information et de la communication sont
nécessaires dans l’étude d’Internet et des réseaux sociaux, en termes de pratiques, d’usages et
de perceptions.
Problématique et hypothèses
La problématique essentielle de ce mémoire est de déterminer dans quelle(s)
mesure(s) la campagne présidentielle de François Hollande en 2012 s’est inspirée de la
stratégie et des outils utilisés par Barack Obama lors de sa campagne de 2008.
Autour de cette problématique centrale, se posent des questions connexes auxquelles
nous tenterons de répondre : en quoi Internet constitue-t-il un véritable bouleversement et une
modernisation dans la façon de mener une campagne politique ? Peut-on raisonnablement
parler de campagne disruptive lorsqu’on analyse la campagne de Barack Obama en 2008 ?
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
PÈNE Clémence, La nouvelle « science électorale » américaine, Politique étrangère, 2013/2 Eté, p.
127-139.
2
VEDEL Thierry, Conclusion. L'internet, continuation de la (science) politique sous d'autres formes,
in Fabienne Greffet Presses de Sciences Po « Académique », 2011 p. 281-293.
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Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 6
Lorsque j'ai commencé à réfléchir à la place que pourraient occuper les technologies
numériques dans les stratégies de campagnes électorales, il m'était difficile d'imaginer que les
équipes de campagne de François Hollande dont certaines caractéristiques ressemblaient
fortement à ceux développés par celles de Barack Obama (le « changement », le choix du
porte-à-porte) n'aient pas été influencées par le travail des équipes américaines. Ma première
hypothèse était que cette convergence n'était pas le fait du hasard mais résultait d'une
inspiration outre-Atlantique.
Par ailleurs, le cadre légal français encadrant les campagnes électorales n'est pas le
même que celui en cours aux Etats-Unis. Ma seconde hypothèse a donc été que cette
différence a sans doute eu des conséquences sur le transfert des méthodes américaines en
France. De fait, nous verrons que la campagne américaine a été bien plus loin dans
l’utilisation et l’optimisation de ces nouveaux outils. Il conviendra alors de réfléchir aux
facteurs expliquant cette différence, parmi lesquels les contraintes juridiques entourant d'une
part le plafonnement du financement des campagnes et d'autre part l’utilisation des données
utiles aux politiques à des fins de communication hyper-ciblée.
Méthodologie
Afin de réaliser ce travail, j’ai eu recours à un certain nombre d’ouvrages et articles
scientifiques issus de disciplines diverses et qui m'ont permis d’avancer dans ma recherche. Je
me suis également appuyé sur le rapport de la mission d’étude réalisé par le « think tank »
français Terra Nova sur les techniques de campagne américaines. En complément, ce
mémoire est étayé d’articles de presse, de ressources diverses (vidéos, présentations, etc) mais
également d’un certain nombre d’entretiens avec des acteurs de la communication politique et
de la stratégie électorale. Enfin, j'ai rédigé un questionnaire, rempli par un panel d'internautes,
qui n'avait pas vocation à fournir une information scientifique mais m'a nénamoins permis de
faire ressortir quelques informations supplémentaires et tendances permettant d’enrichir ce
travail.
Master 1 Information et Communication
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État de l’art
Après la radio puis la télévision, voici Internet.
« La campagne de Barack Obama en 2008 marque indiscutablement un tournant. Mais
la nature et l’ampleur de cette discontinuité restent à déterminer »1
. C’est ainsi que François
Heinderyckx considère la campagne de Barack Obama tout en ouvrant la porte à des
perspectives de recherche. Si on retrouve effectivement une manne importante de travaux sur
l’analyse de la campagne d’Obama, c’est moins le cas concernant ses effets postérieurs.
Cependant, nous pouvons dès lors établir un condensé – bien que non exhaustif – de la
recherche relative à la campagne Obama 2008. Toujours selon François Heinderyckx, si « la
présidence de Franklin D. Roosevelt fut remarquée par l’utilisation innovante de la radio »
tandis que « l’élection de John F. Kennedy en 1960 fut marquée par un recours appuyée à la
télévision et aux techniques marketing », on peut bel et bien considérer que « l’élection de
Barack Obama en 2008 semble constituer l’avènement, en marketing politique, des
technologies de l’information et de la communication, et tout particulièrement des médias
sociaux ». L’influence d’Internet dans cette campagne est ainsi d’ores et déjà soulignée. Selon
le chercheur, Internet s’est révélé « d’une efficacité inédite dans un champ d’actions
stratégiques que nous pouvons structurer en cinq axes : recruter des militants, les motiver, les
informer, les organiser et récolter des fonds ».
Les « netcampagnes », vers une numérisation de la politique ?
La thématique de « netcampagnes » électorales émergent alors et devient un objet
d’étude. Frédérick Bastien et Fabienne Greffet identifient ainsi « les trois dimensions
essentielles des netcampagnes »2
. La première d’entre elles correspond à la dimension
« informationnelle », soit le « contenu habituellement diffusé par les partis politiques en
campagne électorale sur des supports traditionnels ». Par supports traditionnels, ils entendent
notamment « tracts, presse du parti et spots officiels à la télévision ». La deuxième dimension
« met l’accent sur des pratiques interactives spécifiques à Internet », comme l’envoi de mail,
la création de forum de discussion, etc. Toutefois, cette dimension n’implique pas
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
HEINDERYCKX François, Obama 2008 : L’inflexion numérique, Hermès, n° 59, 2011.
2
BASTIEN Frédérick et GREFFET Fabienne, Les campagnes électorales sur Internet : une
comparaison entre la France et le Québec, Hermès, n° 54, 2009.
Master 1 Information et Communication
Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 8
nécessairement « un soutien de l’internaute à l’organisation ». C’est justement cette nuance
qui justifie la nécessite d’établir une troisième dimension qui, quant à elle, « répertorie des
modalités de mobilisation de l’électorat, impliquant un engagement de la part des
internautes ». Par engagement, entendez le fait « d’adhérer au parti en ligne, de faire un don,
de mobiliser ses amis », etc. Or, il apparaît qu’Obama et ses équipes aient clairement mis
l’accent sur cette troisième dimension, où les notions d’engagement et de mobilisation sont
prépondérantes. En effet, François Heinderyckx stipule qu’il ne faut pas voir en la campagne
d’Obama une « virtualisation de la campagne électorale » et qu’il « serait bien imprudent
d’attribuer la victoire d’Obama au seul fait qu’il ait recouru abondamment à ces
technologies »1
. La force et la réussite de cette campagne ont justement résidé dans « une
utilisation intelligente et extraordinairement efficace des technologies modernes au service de
modalités très traditionnelles de campagne ». Il parle ainsi d’ « inflexion numérique ».
François Vergniolle de Chantal abonde dans le même sens en indiquant qu’il est possible de
« résumer l’apport d’Internet sur la scène publique américaine en avançant qu’il permet de
rationaliser des pratiques traditionnelles »2
. Ainsi, le porte-à-porte a par exemple pu bénéficier
des nouveaux outils numériques afin d’être optimisé. Ces nouveaux outils sont à l’origine de
ce que Clémence Pène appelle la « nouvelle science électorale américaine »3
. Au cœur de
cette science, on retrouve l’importance des données, des datas. Ainsi, toujours selon
Clémence Pène, l’innovation de la campagne américaine réside également quant à
« l’utilisation politique des données » qui se traduit d’une part par « la constitution et la
qualification d’une base de données politique exploitable » et d’autre part par « l’analyse de
ces données ».
L’optimisation des méthodes traditionnelles.
Si ces outils numériques ont été déterminants quant à la récolte et au traitement des
données, c’est qu’ils ont de fortes répercussions sur le terrain. En effet, comme l’indique
Clémence Pène, « le succès de la campagne Obama tient avant tout à un incroyable
déploiement sur le terrain » et non à l’utilisation d’Internet à proprement parler. Internet avait
justement pour objectif d’engendrer une mobilisation sur le terrain. Pour favoriser cet
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
HEINDERYCKX François, op. cit.
2
VERGNIOLLE DE CHANTAL François, La voix des outsiders ? Internet dans les partis
politiques américains, Presse de Sciences Po, Académique, 2011.
3
PÈNE Clémence, op. cit.
Master 1 Information et Communication
Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 9
engagement, Dominique Cardon affirme qu’Obama et ses équipes se sont attachés à « faire
converser la société américaine »1
. Il souligne alors leur « utilisation très agile des réseaux
sociaux » ayant « permis de capter et de canaliser ces conversations pour en faire un outil de
mobilisation locale ». Cette mobilisation locale qui, mit bout à bout s’est transformée en
mobilisation nationale, « a été galvanisée par l’atmosphère de changement radical, de moment
historique, mais aussi par une gestion sophistiquée des objectifs de campagne à l’aide
d’indicateurs ciblés par région, voire par quartier » (François Heinderyckx)2
. Pour revenir
brièvement à cette atmosphère de changement, il apparaît en effet que Barack Obama a
adopté une rhétorique semblable à la mobilisation communautaire. Ainsi, le changement a été
érigé telle une cause nationale, telle une « campagne caritative ». Qui dit campagne caritative
dit financement. La campagne de 2008 a vu son financement littéralement explosé et Obama
n’y est pas étranger. Internet a ici eu un rôle central en permettant de générer énormément de
dons. En effet, 6.5 millions de dons ont été effectués en ligne ; et pour six millions d’entre
eux, il s’agissait de dons inférieurs à 100 dollars, d’où le rapprochement ici aussi avec une
campagne de type caritative (François Heinderyckx). Enfin, dans cette dynamique
communautaire, les militants ont été pleinement investis et désignés « comme acteurs à part
entière de cette rupture, et pas seulement comme promoteurs des promesses d’un candidat.
L’ « américanisation » de la communication politique3
.
Cette expression utilisée par Philippe Riutort s’explique par le fait que depuis la
naissance et le « développement rapide de l’activité de conseil en communication politique
aux États-Unis dès la première moitié du XXème
siècle », ce modèle professionnel a été érigé
« en norme d’excellence revendiquée par divers « importateurs » jouant de la connivence avec
la « modernité » d’outre-Atlantique ». Le sociologue indique alors que le « devoir
d’américanisation repéré par Luc Boltanski dans Les Cadres (1982), à propos de
l’acculturation au management « à l’américaine », se vérifie pleinement ici ». Pour confirmer
cette influence américaine dans l’activité de conseil en communication politique à travers le
monde, Fritz Plasser a réalisé, à la fin des années 1990, une enquête comparative sur 500
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
CARDON Dominique, La démocratie Internet. Promesses et limites, Paris, co-Éd. Seuil – La
République des idées, 2010, p. 93.
2
HEINDERYCKX François, op. cit.
3
RIUTORT Philippe, Sociologie de la communication politique, Repères, 2007, p. 70.
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consultants en communication américains exerçant sur les cinq continents1
. Plasser souligne
alors l’ « ampleur de la diffusion des techniques en provenance des États-Unis »2
. La France
n’échappe pas à cette tendance et Philippe Riutort rappelle qu’en 1977, l’ancien maire de
Lyon Michel Noir, considéré comme un « pionnier du conseil en communication », avait
publié l’un « des premiers « manuels » pratiques au titre évocateur : Comment réussir une
campagne électorale ? Suivre l’exemple américain ». Trente-cinq ans après la parution de cet
ouvrage, il semble que ce soit toujours le cas. Ainsi, Clémence Pène souligne que la
« nouvelle science électorale » américaine inspire « les professionnels du Web politique
français »3
. Cette inspiration s’est notamment traduite « à travers des échanges entre experts,
lors de conférences » mais également par une collaboration directe entre les responsables de
la campagne de François Hollande et Blue State Digital, l’agence qui s’est véritablement
révélée en 2008 et qui apparaît aujourd’hui « comme la figure de proue du mouvement »
Obama.
À partir de cette base de recherche, il convient désormais de faire appel à de la
production extérieure, qu’elle soit journalistique, issue de réflexions de think tank ou encore
personnelle (entretiens, questionnaire, etc) afin de détailler et de préciser l’ampleur de cette
« américanisation » des pratiques de stratégie électorale et de communication politique lors de
la campagne présidentielle de François Hollande en 2012.
Mots-clés :
Internet, démocratie, politique, communication, société, stratégie électorale, réseaux sociaux
!
!
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
PLASSER Fritz, American campaign techniques worldwide, Harvard, 2000, p. 33-54.
2
RIUTORT Philippe, op. cit.
3
PÈNE Clémence, op. cit.
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Internet : genèse d’un nouveau média de masse
!
!
Pour commencer ce mémoire, il est important au préalable d’établir un bref rappel
historique de l’essor d’Internet en tant que média et plus particulièrement en tant que « mass
media »1
. En effet, ce sont ces « mass media » qui occupent une place prépondérante en
politique puisque de par leur définition, ils permettent d’atteindre et d’influencer une audience
importante. C’est au travers de ces médias que les politiques communiquent, débattent et
tentent de faire adhérer l’opinion publique à leur programme. Ces médias constituent donc un
vecteur de communication pour les politiciens mais ils redéfinissent également la notion
d’espace public, définie par le sociologue allemand Jürgen Habermas comme « le processus
au cours duquel le public constitué d'individus faisant usage de leur raison s'approprie la
sphère publique contrôlée par l'autorité et la transforme en une sphère où la critique s'exerce
contre le pouvoir de l'État »2
.
Historique d’Internet
L’origine d’Internet remonte à 1969 et émerge suite aux travaux de la DARPA
(Defense Advanced Research Projects Agency), une agence américaine rattachée au
département américain de la défense. Le réseau, appelé ARPANET (Advanced Research
Projects Agency Network), tend à favoriser les transmissions de données entre plusieurs
centres de recherche. Les premières connexions s’établissent entre l’Université de Californie à
Los Angeles (UCLA) et l’Institut de recherche de Stanford. Le développement fut rapide au
point qu’en 1972, soit trois ans après la mise en route du réseau, une quarantaine de sites se
trouvèrent interconnectées. C’est en 1974 que Vint Cerf et Robert Kahn, considérés comme
les pères fondateurs d’Internet, publient un ouvrage3
dans lequel ils inventent le protocole
TCP/IP. Ce dernier permet l’interconnexion de plusieurs réseaux hétérogènes. En 1983, un
virage est pris puisque l’ARPANET est scindé en deux entités : MILNET, l’entité militaire et
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Le sociologue Marshall McLuhan dans son ouvrage Understanding Media publié en 1964, présente
le phénomène « des médias de masse » sous quatre caractéristiques principales :
- la communication de un vers plusieurs ;
- l’unilatéralité du message : le public n'interagit pas avec le véhicule du message ;
- l'information est indifférenciée : tout le monde reçoit la même information au même moment ;
- l'information est linéaire et présentée selon des séquences prédéfinies.
2
HABERMAS Jürgen, L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de
la société bourgeoise, 1962.
3
CERF Vint et KAHN Robert, A Protocol for Packet Network Intercommunication, 1974.
Master 1 Information et Communication
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ARPANET, devenant donc l’entité civile, bien que pour l’heure, cet aspect dit civil concerne
essentiellement la communication entre centres de recherche. A cette époque, on estime à
environ un millier1
le nombre de postes utilisateurs. En 1983 toujours, l’instauration du
système de noms de domaines, appelé plus communément DNS, permet de trouver une
information à l’aide d’un nom de domaine, et non plus d’une adresse IP, cela facilitant
grandement les recherches sur le réseau. C’est à partir de 1989 que le réseau s’ouvre aux
particuliers ainsi qu’aux entreprises privées. Mais c’est réellement à partir de 1991, soit la
date de création par Tim Berners-Lee, un informaticien britannique, du World Wide Web,
qu’Internet s’ouvre au grand public. L’avancée majeure réside dans la possibilité de naviguer
d’une page à une autre, via les liens hypertextes. C’est une véritable révolution dans la
manière de naviguer ou de « surfer » comme cela est actuellement énoncé. En 1992, un
million de machines sont connectées, ce qui engendre la création de l’Internet Society
(ISOC), ayant pour mission le développement du réseau à l’international. Depuis, Internet se
veut en constante évolution, celle que l’on connaît, avec les améliorations récurrentes en
terme de vitesse de navigation (ADSL, fibre optique), en terme d’échange et de partage de
données (« Peer-to-peer » en 1997), ou encore en terme de communication entre les
utilisateurs du réseau (les blogs et bien sur, les réseaux sociaux, Facebook en tête). Internet a
pris au fil du temps une place centrale dans nos sociétés occidentales, que l’on appelle
régulièrement aujourd’hui « société 2.0 » ; société de l’hyper-connexion entre les membres
qui la compose, d’autant plus après la création du WAP (Wireless Application Protocol) en
1997. Il a permis de se connecter à Internet depuis un appareil de transmission sans fil,
principalement les téléphones portables. Ont suivi les réseaux GPRS, EDGE, 3G et
maintenant 4G, augmentant systématiquement la vitesse de navigation.
Internet : un média de masse ?
La question de l’appartenance d’Internet à la famille des « mass media » - composée
en premier lieu de la télévision et de la radio, mais également de la presse écrite, de
l’affichage ou encore du cinéma - a pendant plusieurs années divisé et continue encore de le
faire aujourd’hui. Je constate une double division sur ce sujet. Premièrement, la question était
de savoir si Internet était un hors média ou bien un média de masse. Aux débuts des années
2000, bien que commençant à se démocratiser, Internet nécessitait tout de même un
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Source : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/d000512-internet-dans-le-
monde/historique-du-reseau!!
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Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 13
équipement qui ne permettait pas encore de pouvoir parler de diffusion de masse, comme cela
était le cas pour les médias plus traditionnels comme la télévision, la radio ou encore la presse
écrite. Je pense qu’à présent, cette question de classification entre hors média et média de
masse, du moins en terme de diffusion, a trouvé sa réponse. En 2006, Manuel Castells classait
alors Internet comme un média de masse, en partant du constat qu’à cette époque, plus d’un
milliard de personnes s’avéraient être des utilisateurs d’Internet et environ deux milliards
possédaient un téléphone portable1
. L’évolution exponentielle qu’a connu Internet en terme de
nombre d’utilisateurs ne fait que renforcer la thèse du sociologue. En effet, au premier
trimestre 2013, le nombre d’internautes dans le monde est évalué à 2,749 milliards, soit
38,8% de la population mondiale2
. Pour rappel, en 1995, soit quatre ans après la création du
Web, le nombre d’internautes s’élevait à 16 millions, soit seulement 0,4% de la population
mondiale.
La deuxième division concerne les caractéristiques propres que se doivent d’avoir les
médias de masse, celles définies par Marshall McLuhan. Sur ce point, il s’avère effectivement
que la question est plus complexe et plus sujette à débat. Tout d’abord, si l’on se base sur la
première caractéristique d’un média de masse donnée par le sociologue canadien,
l’information véhiculée par un média de masse est poussée par un émetteur à destination de
plusieurs destinataires. C’est ce qu’on appelle également la logique « push ». Or, s’agissant
d’Internet, nous sommes dans un cas de figure où ce sont plusieurs émetteurs qui
communiquent à plusieurs destinataires. On sort donc du schéma « un/plusieurs » pour
adopter un modèle « plusieurs/plusieurs ». Également, pour Guillaume Canton, directeur des
stratégies digitales de l’agence de communication corporate Burson Marsteller3
, le Web est
loin d’être un média de masse puisque ce sont les internautes qui vont chercher l’information,
et non le contraire. De ce fait, peut-on réellement parler d’information de masse, puisque
chaque individu possède sa propre utilisation du Web, s’oriente vers un contenu plus
personnalisé, plus ciblé. Francis Balle, sociologue français indiquait : « Les gens regardent, à
la télévision, et ils lisent, dans les journaux, ce qu’ils ont appris à apprécier et à comprendre
en d’autres lieux […]. Ce qui explique le fait que les médias, plutôt que d’œuvrer vers une
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
CASTELLS Manuel, Emergence des « médias de masse individuels », Le Monde Diplomatique,
août 2006.
2
Selon les derniers chiffres communiqués par l’UIT (Union Internationale des Télécommunications)
3
CANTON Guillaume, Internet n'est pas un média de masse, ou les illusions du buzz,
http://strategies.fr, septembre 2011.
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plus grande égalité, reproduisent et accentuent les inégalités devant la culture. Ce qui confère
son ultime signification à l’adage selon lequel les gens n’ont jamais que les journaux ou les
programmes qu’ils méritent »1
. Au-delà de cette remise en cause de l’impact réel des médias
de masse sur les foules, que je ne commenterai pas ici car ce n’est pas l’objet, je dirai
cependant que c’est d’autant plus vrai pour les internautes. Libre à nous de nous orienter vers
tel ou tel contenu, de plus ou moins bonne qualité, encore faut-il pouvoir dissocier le bon du
moins bon, le vrai du faux. Néanmoins, cette orientation est fonction de ce que Pierre
Bourdieu appelle le « capital culturel »2
, découlant de « l’habitus culturel ». Ainsi, Bourdieu
et Balle soulignent tout les deux l’importance et le rôle joué par la « socialisation primaire et
secondaire » de l’individu, qui va déterminer ses comportements, ses opinions et ses modes de
vie. Pour conclure, on peut bel et bien affirmer qu’Internet entre dans la famille des médias de
masse, au vu du nombre d’internautes potentiellement atteignables. De plus, si on se base sur
la définition des médias de masse qui veut que ce soient « des médias capables d'atteindre et
d'influencer une large audience et que par le recours à ces moyens, les annonceurs peuvent
diffuser leurs messages en direction d'un très vaste public, répartis sur des espaces élargis
pour un coût relativement raisonnable »3
, on peut maintenir cette thèse selon laquelle Internet
est effectivement un média de masse. Néanmoins, il faut avoir conscience que les spécificités
et les caractéristiques de ce média ne sont pas tout à fait similaires à celles des « mass media »
historiques, ce qui peut nous faire dire qu’Internet est un média de masse doté d’un statut
particulier et unique. En effet, c’est le seul média de masse qui répond pleinement au schéma
« plusieurs/plusieurs ».
Ainsi, après la presse écrite, la radio puis la télévision, la « Toile » devient le
quatrième média de masse aux réels enjeux politiques. Ces quatre médias ont comme point
commun d’être des lieux fictifs sur lesquels les politiques communiquent et débattent, pour ne
pas dire s’affrontent. Mais Internet élargit de ce fait l’espace public4
et devient ainsi une
nouvelle « agora planétaire »5
.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
BALLE Francis, « Le triangle du civisme », La Revue Civique, numéro 6, automne 2011.
2
BOURDIEU Pierre, La Distinction : Critique sociale du jugement, Éditions de Minuit, 1979, 670 p.
3
Source : www.wikipedia.fr
4
À cet égard, voir L’élargissement de l’espace public dans La Démocratie Internet. Promesses et
limites, Dominique Cardon, p. 35-52.
5
LEVY Pierre, Cyberdémocratie, Éd. Odile Jacob, 2002, 256 p.
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Première partie : analyse de la campagne de Barack Obama 2008
I - Contexte
Le 10 février 2007, Barack Obama présente officiellement, à Springfield, sa
candidature à la présidence américaine. À ce jour, il fait véritablement office d’outsider et les
prévisions le prédisent perdant aux primaires face à Hillary Clinton. Or, le 4 novembre 2008,
c’est bel et bien le candidat d’origine kenyane qui s’impose face à John McCain et devient
ainsi le nouveau président des États-Unis. Comment expliquer son succès ? Tout d’abord, il
est important de rappeler que le contexte de l’époque jouait en sa faveur. En effet, l’annonce
de la faillite de Lehman Brothers et ainsi du début de krach ne fait que renforcer les
américains dans l’idée que le pays se trouve sur une pente descendante. De plus, les
républicains sont fortement pénalisés par l’impopularité de George W. Bush qui, après deux
mandats à la tête du pays et des actions très fortement contestées (la guerre en Irak par
exemple), atteint un taux historiquement bas de 27% d’opinions positives. Il faut remonter au
scandale du Watergate pour retrouver un niveau aussi bas aux États-Unis. Également, le
facteur démographique est lui aussi à prendre en considération. Il s’avère effectivement que le
poids des minorités – majoritairement démocrates – ne cesse d’augmenter 1
. Voici,
rapidement, les axes principaux faisant que le contexte général est, dès le départ, favorable
aux démocrates et donc par la suite à Barack Obama.
Cependant, la victoire d’Obama trouve sa source avant tout dans la campagne qui a été
menée par le candidat et son équipe. Rappelons en effet qu’au début de la campagne, le
candidat démocrate accusait un retard de douze points sur le candidat républicain John
McCain. Ainsi, cette campagne, qualifiée par Barak Obama de « meilleure campagne
électorale jamais menée »2
, a fait d’Internet son cheval de Troie. Aux débuts des années 2000
déjà, le Parti démocrate et notamment Howard Dean lors de sa campagne de 2004 avaient
perçu l’impact et l’influence d’Internet. Mais c’est réellement « après la défaite de John Kerry
face à George W. Bush » lors des présidentielles de 2004 que le Parti démocrate a décidé de
se reconstruire et s’est « transformé en laboratoire d’expérimentation d’une « nouvelle science
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Les minorités ont un poids électoral croissant – 26% en 2008 contre 15% en 1988. En 2040, d’après
les estimations, les États-Unis seront un pays majoritairement « non-blanc ».
2
Rapport de la mission d’étude de Terra Nova sur les techniques de campagne américaines :
« Moderniser la vie politique : innovations américaines, leçons pour la France », Janvier 2009.
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électorale », misant sur les nouvelles technologies et la maîtrise des bases de données »1
. Le
Parti a ainsi instauré quelques outils, à l’image du réseau social MeetUp ou encore du site
Democracy Bonds, sur lesquels Obama a pu s’appuyer. Sa grande réussite a été de les
exploiter de façon optimale de sorte à gagner les élections, là où ses prédécesseurs avaient
échoué depuis la fin de l’investiture de Bill Clinton en 2001.
II - Internet, le cheval de Troie d’Obama
Obama adopte une stratégie visant à fédérer autour de lui, à se poser comme LE
candidat du peuple. Ancien organisateur communautaire, il est fortement inspiré par des
idéologues tels que Saul Alinsky ou encore Martin Luther King. C’est avec ce vécu que
Barack Obama transpose le discours et les pratiques communautaires en politique. C’est alors
qu’Internet va occuper un rôle central, rôle qui sera développé au sein de cette partie.
Une volonté de créer une véritable communauté autour d’une cause
commune : le changement
À bien des égards, la campagne d’Obama est considérée comme LA campagne de la
mobilisation. Mobilisation militante dans un premier temps, puis électorale dans un second
temps. Nous étudierons cette mobilisation plus en détails au sein de la troisième partie de ce
mémoire. Qui dit mobilisation, dit cause. Ainsi, afin de rallier un maximum de personnes,
Obama et son équipe axent leur campagne sur un message fort : le changement. Obama
adopte alors « le discours et les caractéristiques du mouvement social au lieu de s’en tenir à la
campagne politique classique »2
. La cohérence, la pertinence3
et la force de ce message – qui
sera conservé, décliné, renforcé tout au long de la campagne – constituent la grande réussite
de cette dernière. Tout d’abord, Obama incarne lui-même le changement, principalement en
tant qu’afro-américain. De plus, il ne faut pas oublier qu’Obama, avant d’être un politicien,
était organisateur communautaire à Chicago. Il est fortement influencé par Saul Alinsky,
idéologue américain. Comme le rapporte Manuel Castells, Alinsky proposait en 1995 une
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
PÈNE Clémence, op. cit.
2
VASQUEZ-PARRA Adeline, La stratégie du réseau social pendant la campagne présidentielle de
Barack Obama, août-novembre 2008 : discours et symboles du mouvement social, Signes, discours &
sociétés, juillet 2010.
3
Rappelons que le contexte socio-politico-économique évoqué en introduction fait que le changement
devient une nécessité ou du moins une volonté partagée par un nombre important d’américains.
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nouvelle définition du rôle du leader politique, étonnamment proche du discours du candidat
démocrate treize ans plus tard :
« It’s time for politicians and other leaders to take the next stop and to see voters, residents or
citizens as producers of this change. What if a politician were to see his job as that of an
organizer, as part teacher and part advocate, one who does not sell voters short but who educates
them about the real choices before them? »1
Le changement va donc être porté au rang de grande cause nationale. Obama se porte comme
le garant, comme le porteur de cette cause. Il est l’homme qui représente l’espoir2
. Certains
s’inquiètent alors de l’hyperpersonnalisation, de la peopolisation du candidat. Son opposant
républicain, John McCain l’attaque en indiquant que c’est « Obama first » et non « Country
first »3
. Certains reprochent alors une confusion entre marketing et politique4
. Pour Valérie H.,
« la peopolisation est le fait d’une certaine presse, c’est une pratique de l’intime qui est
montrée (...). Il y a beaucoup d’élus qui publient sur Facebook ou Twitter des photos de leurs
réunions, des gens qu’ils rencontrent mais pas de leur famille. La peopolisation, ça serait ça ».
Elle concède toutefois une petite part de peopolisation avec certaines photos familiales ou
amicales, mais nous considérons qu’il n’y a rien de nouveau dans ces pratiques qui sont
fortement ancrées aux États-Unis depuis John Fitzgerald Kennedy5
. Ainsi, il n’y a peut-être
pas peopolisation mais il y a bien un rapprochement avec le marketing, même si, toujours
selon Valérie H., « le marketing politique a toujours existé ». De plus, comme l’indique Keith
Reinhard, président de DDB Worldwide – un important groupe de communication – « Obama
a les trois choses que vous attendez d’une marque : il est nouveau, attractif et différent »6
.
Valérie H. ira même jusqu’à dire qu’ « on a vendu le personnage, il est certain qu’il n’a pas
été élu à 100% sur ses idées mais beaucoup sur lui-même, sur ce qu’il a réussi à incarner ».
Face à ces critiques, la stratégie consista alors à faire basculer la rhétorique. Ainsi,
cette dernière est passée du « vote for Obama » au « vote for change », le candidat s’efface
complètement derrière la cause fédératrice qu’est le changement. Ainsi, adhérer – en
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
CASTELLS Manuel (2009), Communication Power, Oxford University Press, New York.
2
Cf. en annexe les affiches « Hope » et « Believe ».
3
Rapport Terra Nova, p. 20.
4
Cette année là, Obama sera même élu personnalité marketing de l’année.
5
LHERAULT Marie et DAKHLIA Jamil, Les États-Unis, patrie de la peopolisation politique ?,
entretien avec Divina Frau-Meigs et Jacques Portes, Le Temps des médias, 2008/1 n° 10, p. 197-208.
6
MCGIRT Ellen, The Brand Called Obama, www.fastcompany.com, avril 2008.
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répondant à l’invitation « join us » – à la cause du changement est fortement valorisant pour
les individus ; cela leur donne une bonne estime d’eux-mêmes et leur procure un sentiment
d’appartenance à la communauté. Les militants vont alors s’approprier la cause et devenir des
acteurs du changement. C’est ce qu’on appelle une stratégie d’ « empowerment ». Ainsi,
lorsque l’on interroge des militants sur la campagne, ils parlent avant tout du changement
ainsi que d’eux-mêmes, passant sous silence Barack Obama et même la politique en général.
De plus, le slogan de la campagne – « yes we can » – induit lui-même, à travers l’utilisation et
la rhétorique du « we », cette dimension collective. L’utilisation du « nous » devient alors
centrale, notamment sur la page Facebook du candidat1
. Le « eux », bien que non utilisé
directement, représenterant sans hésitations les républicains, alors au pouvoir depuis 2001
avec George W. Bush.
Obama, toujours dans une logique que nous qualifierons d’ « alinskyienne », justifie
cette nécessaire implication citoyenne par le fait que le changement peut provenir d’en haut,
mais doit bien partir d’en bas, c’est-à-dire du peuple2
(« Change does not come from the top
down. It comes from the bottom up »3
). C’est à ce niveau qu’Internet va jouer un rôle crucial.
En diffusant de nombreux contenus sur les réseaux sociaux notamment, les américains se les
approprient, les discutent, les partagent. De plus, Obama va à plusieurs reprises s’adresser
directement au peuple. Par exemple, sur le réseau social professionnel Linkedin, il sollicite les
chefs d’entreprise quant à d’éventuelles mesures à prendre en faveur des PME. Il reçoit alors
pas moins de 1500 réponses4
. Cette stratégie a le mérite de ré-intéresser les américains à la
politique, ces derniers se sentant alors écoutés. C’est ainsi que se crée la communauté Obama,
communauté qui, nous le verrons, sera prépondérante dans la victoire d’Obama quelques mois
plus tard.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Cf. en annexe plusieurs copies écran.
2
On appelle ce phénomène le « grassroot networking ».
3
Rapport Terra Nova, p. 24.
4
BENILDE Marie, Barack Obama, candidat des réseaux sociaux sur Internet, Le blog du Monde
Diplomatique, 21 avril 2008.
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Une campagne politique menée sur le mode « Téléthon »
« Barack Obama innove en important dans le monde politique le modèle des
campagnes de cause caritative. C’est la première campagne politique de type
Téléthon »1
.
Après avoir réussi à constituer une véritable « communauté Obama »2
, le candidat va
capitaliser sur cette dernière afin de lever des fonds et ce, de façon exponentielle. Sur ce point
réside une nouvelle grande innovation dans la façon de faire campagne en politique.
Effectivement, l’explosion du financement est une autre grande caractéristique de la
spécificité de cette campagne présidentielle, primaires inclues. Pour preuve, au cours de cette
dernière, les candidats ont soulevé au total 1.63 milliard de dollars. Par comparaison, ce
montant était de 880 millions en 2004 et de 530 millions en 20003
. Nous pouvons donc
constater qu’en seulement quatre ans, le financement a doublé. Comment expliquer cela ?
Tout au long de la campagne, Obama va se tourner vers le financement populaire, capitalisant
ainsi sur ses très nombreux sympathisants. C’est alors que nous pouvons parler de
l’application du « modèle de financement du Téléthon appliqué à la politique »4
, en atteste le
fait que « les deux-tiers de son financement proviennent de petits dons de moins de 200
dollars »5
. Ainsi lors de l’élection générale, Obama ayant renoncé « au système public de
financement » au détriment du « financement privé illimité »6
, il réussit à lever 742 millions
de dollars. Il convient de préciser qu’Obama fut le premier candidat américain a opté pour
cette stratégie ; stratégie qui s’est avérée payante pour le candidat démocrate puisque dans le
même temps, John McCain, limité par le plafond du système public de financement, levait
seulement 367 millions de dollars. Concernant ce mode de financement, on pourrait alors se
poser la question de l’autonomie politique, vis-à-vis des lobbies notamment. Effectivement, il
est vrai que le système public de financement est à priori gage d’autonomie, en
s’affranchissant de ces lobbies. Pour autant, comme nous l’avons évoqué, une très grande
majorité du montant total des fonds soulevés par Obama provient des américains eux-mêmes.
Ainsi, il s’agirait davantage d’une forme de lobby public. Selon Jean-Dominique Giuliani,
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Rapport Terra Nova, p. 11.!
2
Rapport Terra Nova, p. 11.
3
Cf. graphique en annexe.
4
Rapport Terra Nova, p. 13.
5
Rapport Terra Nova, p. 13.
6
Rapport Terra Nova, p. 59.
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« le lobby caché fait la part belle aux plus forts et affaiblit la démocratie. Le lobby public et
transparent, ouvert à tous, est un signe de force de la démocratie, où le pouvoir de décision
retrouve toute la noblesse de la politique, c'est-à-dire son indépendance et son sens de l'intérêt
général »1
.
Si Obama a réussi à lever autant de fonds, c’est grâce au positionnement stratégique de
sa campagne, que nous avons évoqué précédemment. Il adopte un discours basé sur
l’émotion, à l’image encore une fois du Téléthon. Or, l’émotion est l’un des principaux
facteurs permettant l’adhésion. Il est bien connu des professionnels du marketing et de la
communication puisqu’on considère que 75% des décisions d’achat seraient prises de manière
inconsciente, guidées justement par nos émotions2
. De plus, les travaux de Murray Edelman
abondent dans ce sens. En effet, après avoir étudié les trois débats télévisés de la campagne
présidentielle de 1992, il constate que derrière les discours prétendument rationnels, ces
derniers sont en réalité remplis d’appels aux émotions. « En campagne électorale, l’astuce
consiste donc à disséminer les appels aux émotions dans la discussion des questions de
fond »3
. Cela étant, pour en revenir à Obama, il s’efface alors derrière la cause du
changement, bien plus fédératrice qu’un politicien. Ainsi, les sympathisants ne donnent pas
pour Obama, ils donnent pour le changement. De la sorte, le donateur devient un véritable
« acteur du changement »4
. Ce phénomène de financement populaire a également le mérite de
renforcer encore davantage le caractère communautaire de sa campagne. Effectivement, faire
une donation au candidat renforce le sentiment d’appartenance du sympathisant, appartenance
à cette « communauté Obama » ou faudrait-il plutôt dire « communauté du changement »5
.
Internet apporte alors l’outil nécessaire à ces donations. En effet, il est très facile à travers le
site mybarackobama.com de faire un don, en seulement « quelques secondes et quelques
clicks »6
. Cette accessibilité, cette facilité d’utilisation a probablement été un facteur
important dans le succès de cette levée de fonds.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
GIULIANI Jean-Dominique, Marchands d’influence, les lobbies en France, Le Seuil, 1991, 260 p.
2
Selon HÄUSEL Hans-Georg, docteur en neuromarketing.
3
EDELMAN Murray, The Symbolic Use of Politics, Urbana, University of Illinois Press, 1980, p.135
- 137.
4
Rapport Terra Nova, p. 13.
5
Rapport Terra Nova, p. 24.
6
Rapport Terra Nova, p. 13.
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III - Internet comme levier d’activation de la mobilisation
« En fait, la stratégie de communication adoptée par Obama a reposé sur une
indifférence affichée vis à vis des grands médias traditionnels et sur
l’exploitation maximale des nouvelles technologies comme modes de
communication instantanés et interactifs », Virginie Picquet1
.
La campagne présidentielle de 2008 est caractérisée par l’utilisation massive d’Internet
à des fins mobilisatrices. Pour autant, le caractère stratégique du réseau avait déjà été descellé
par le Parti démocrate – principalement à partir de 2004 – date à laquelle Howard Dean est
devenu président du Parti. Il impulsa alors une réelle dynamique afin de bénéficier au
maximum du potentiel d’Internet, à travers plusieurs outils. Ainsi, le Parti créa « Party
Builder » ou encore « Meet up », des réseaux sociaux. MyBO, le site central de la campagne
d’Obama, en est l’héritier. Howard Dean avait également perçu l’importance des réseaux
sociaux émergents2
et il avait pris l’initiative de les investir. Les outils de financement en
ligne, ceux du porte-à-porte ainsi que la base de données Catalist ont tous été mis en place
avant l’arrivée d’Obama. Nous verrons que la victoire de l’actuel président des États-Unis
trouve sa source dans le développement et l’optimisation de ces outils.
Une formidable « revitalisation citoyenne »
Pour commencer, l’expression « revitalisation citoyenne » est utilisée afin de souligner
la mobilisation militante sans précédent, suivie tout naturellement d’une mobilisation
électorale record3
. La question est donc de savoir en quoi Internet a contribué à ce
phénomène? Internet, comme nous l’avons vu, va ainsi faire en sorte de créer une véritable
communauté et d’impliquer les acteurs (nombre record de militants)4
. Afin de recruter ces
militants, le principal outil va être les réseaux sociaux. Ils constituent le point de départ de la
mobilisation. L’objectif est d’aller à la rencontre des gens, et non d’attendre qu’ils intègrent la
campagne ; « go where the people are »5
. Or, en 2008, les réseaux sociaux représentent
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
PICQUET Virginie (2010), L’image du président de John Kennedy à Barack Obama, Paris, éditions
Ophrys, 365 p.
2
MySpace (2003) ; Facebook (2004) ; YouTube (2005).
3
Le taux de participation a atteint 63%, contre 55% en 2004. Pour retrouver un tel score, il faut
remonter en 1960
4
En effet, Barack Obama aurait ainsi réussi à mobiliser « une armée de 1,2 millions de militants ».
5
Rapport Terra Nova, p. 25.
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désormais un lieu incontournable sur la toile1
. Ainsi, la campagne d’Obama va inonder les
réseaux sociaux, les plus traditionnels comme les plus ciblés, notamment les réseaux
communautaires (BlackPlanet, AsianAve, MiGente, etc). De par leur caractère « viral », les
réseaux sociaux permettent de toucher des millions de personnes en un temps record. De plus,
comme l’indique Dominique Cardon, cette « utilisation très agile des réseaux sociaux (...) a
permis de capter et de canaliser ces conversations pour en faire un outil de mobilisation »2
.
Au-delà de récupérer des données sur ce qui était dit par les américains sur la Toile, Obama et
ses équipes se sont attachés des sympathisants « en leur permettant de valoriser auprès de
leurs réseaux sociaux leurs contributions à la campagne »3
.
Toute cette stratégie digitale a comme plateforme le site mybarackobama.com –
MyBO. Ainsi, les pages sur les réseaux sociaux constituent une sorte de produit d’appel. Sur
MyBO, les sympathisants pouvaient très aisément faire des dons, même de quelques dollars4
(d’où la logique de la campagne caritative et du financement populaire) mais également, pour
ceux qui souhaitent s’investir davantage, obtenir de véritables « kits de formation »5
à
l’intérieur desquels on pouvait trouver une documentation de la campagne, un programme de
porte-à-porte, des listes téléphoniques afin de faire du phoning, etc. L’efficacité des militants
va alors être optimisée. Par exemple, un outil de reporting est créé, le « Dashboard »6
.
Précisons que les militants étaient au préalable formés dans des « Obama camps »7
puis
encadrés par le staff. Malgré tout, une relative confiance leur était accordée. Hormis le
reporting demandé régulièrement par le staff aux militants, pas moins de 2 700 salariés
(appelés les « field organizers »), accompagnés de 5 000 bénévoles, parcouraient dans tout le
pays afin de former les militants et ainsi, de contrôler leurs actions. Cela étant, à partir de
MyBo, plus de 35 000 groupes de volontaires ont été créés et 200 000 évènements « offline »
ont été mis en place8
. Cette mobilisation record va avoir une influence considérable et elle va
ensuite se répercuter sur la mobilisation électorale. En effet, si l’on reprend les travaux du
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Aux États-Unis, selon Médiamétrie Netratings, Facebook comptait à la fin de l’année 2007
22,7 millions d’utilisateurs, soit une pénétration sur 13,7% des foyers.
2
CARDON Dominique, op. cit. p. 93.
3
CARDON Dominique, op. cit., p. 94.
4
Cette stratégie va s’avérer extrêmement profitable puisque Barack Obama va ainsi réussir à soulever
environ 500 millions de dollars (pour trois millions de donateurs).
5
Cf. en annexe.
6
Cf. copie écran en annexe.
7
Rapport Terra Nova, p. 14.
8
Rapport Terra Nova, p. 39.
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sociologue américain Paul Lazarsfeld1
, on comprend que l’entourage a une plus grande
influence sur les choix politiques que les discours traditionnels du candidat. C’est ce qu’il
nomme le modèle du « two step flow of communication », soulignant l’influence des leaders
d’opinion. Ainsi, tous ces militants vont, en faisant du porte-à-porte, en discutant avec leurs
proches, recruter un nombre important de nouveaux sympathisants. En effet, le fait que ce soit
quelqu’un de votre voisinage qui vienne vous parler s’avère extrêmement efficace puisqu’il
existe un lien de confiance entre ces personnes. Ils sont encouragés à adopter un discours
narratif personnalisé, c’est-à-dire d’expliquer pourquoi ils soutiennent Obama, et non de se
contenter d’exposer le programme du candidat. Ainsi, « l’armée militante »2
d’Obama va être
en contact direct avec 68 millions d’Américains, soit plus de la moitié des électeurs. De plus,
un outil va être déterminant dans la réussite de cette street-campaign : la base de données
Catalist. Il s’agit de la plus grande base de données jamais réalisée. C’est un fichier unique
sur lequel 220 millions d’américains sont répertoriés à l’aide d’informations spécifiques. Le
nombre d’informations par personne peut aller jusqu’à 600 (Big Brother is watching you) ! La
communication va ainsi pouvoir être ciblée, personnalisée. Les militants, lorsqu’ils iront faire
du porte-à-porte, pourront adapter leur message en fonction de l’habitant. Il s’agit là de micro-
targeting (le ciblage est en quelque sorte poussé à l’extrême). C’est également le cas des e-
mails envoyés aux sympathisants, qui adoptent un ton résolument cordial, donnant une
impression de réelle proximité3
. Au total, plus d’un milliard d’e-mails ont été envoyés4
.
Quand les sympathisants s’emparent de la Toile
Comme nous l’avons évoqué, Internet centralise l’activité militante. C’est à travers le
« online » que s’organisent les actions « offline ». Via MyBo, les sympathisants font des dons,
récupèrent de l’information, s’organisent en groupes, etc. Sur les réseaux sociaux, ils suivent
le candidat en temps réel, postent des messages d’encouragement, partagent de l’information,
etc. Mais au-delà des outils mis à disposition par Obama et son équipe, il y a eu une réelle
volonté de laisser la possibilité aux américains de s’approprier la campagne, à leur manière.
Par exemple, afin de favoriser l’appropriation citoyenne, elle valorise ce qu’on appelle les
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
LAZARSFELD, P.F., BERELSON, B. & GAUDET, H. (1944), The People’s Choice : How The
Voter Makes Up His Mind in a Presidential Campaign, New York, Columbia University Press.
2
Cf. en annexe quelques images de militants.
3
Cf. en annexe un exemple de mail, récupéré via une sympathisante de l’époque.
4
Cf. Rapport Terra Nova, p. 37.
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contenus générés par les sympathisants, les « user-generated contents ». Ainsi, le logo1
de la
campagne est volontairement non-personnifié, permettant aux personnes de se l’approprier en
le détournant. Ce logo sera alors très largement repris et fera ainsi le tour de la toile, sous
diverses formes. En effet, la viralité – permise par le réseau et par le fait que les
sympathisants deviennent eux-mêmes des médias – est un facteur sur lequel le candidat
démocrate peut s’appuyer, toujours selon une logique fédératrice. Également, le candidat et
ses équipes jouent sur la créativité des sympathisants en reprenant les meilleures inspirations.
Le slogan « yes we can » provient d’ailleurs des militants, prononcé spontanément lors d’un
meeting2
.
En outre, de nombreuses pages de soutien se créent sur les réseaux sociaux, à l’image
de « Student for Obama »3
. En effet, lorsque Barack Obama annonce sa candidature,
« Facebook comptait déjà plus de 500 groupes qui discutaient et commentaient sa
campagne »4
. En faisant des recherches, on s’aperçoit que ce type de pages n’existe pas du
côté de John McCain. Une preuve supplémentaire attestant la forte domination du candidat
démocrate sur la Toile. Rappelons également que lorsque McCain dépensait environ 4.5
millions de dollars pour sa campagne Internet, Obama quant à lui en dépensait plus de 14
millions. Cet écart a notamment permis au candidat démocrate de s’offrir les services des
meilleurs, comme Chris Hugues, 24 ans alors et qui n’est autre que l’un des cofondateurs de
Facebook. Il convient néanmoins de noter qu’il existe tout de même un facteur sociologique à
prendre en considération. En effet, l’électorat démocrate est généralement plus jeune que
l’électorat républicain. De plus, à travers sa stratégie de faire d’Internet le cœur de sa
campagne, Obama affiche sa volonté de cibler un électorat relativement jeune. Or, les jeunes
sont bien plus impliqués sur Internet, d’où cette formidable dynamique. Obama va plus loin
dans sa stratégie de séduction des jeunes en adoptant régulièrement une rhétorique
humoristique, fortement inspirée d’Internet. On se souvient alors de cette réplique qu’il a
lancé lors du troisième débat télévisé face à Mitt Romney : « Les années quatre-vingt
viennent d’appeler, elles veulent récupérer leur politique étrangère »5
.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Cf. en annexe le logo en question suivi de diverses reprises.
2
VASQUEZ-PARRA Adeline, La stratégie du réseau social pendant la campagne présidentielle de
Barack Obama, op. cit.
3
Cf. copies écran en annexe.
4
VERGNIOLLE DE CHANTAL François, op. cit.
5
COSTA Elise, Barack Obama, le seul président de l'internet, www.leplus.nouvelobs.com, novembre
2012.
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Autre élément important, le soutien affiché de nombreuses célébrités, notamment afro-
américaines. On pourrait alors citer la présentatrice Oprah Winfrey, élue en 2013 par le
magazine Forbes et pour la deuxième année consécutive, personnalité la plus influente des
États-Unis. Présente à plusieurs reprises lors de meetings, des photos d’elle et du candidat
font le tour du web1
. Des chercheurs estiment à un million le nombre de votes gagnés par
Obama grâce à la présentatrice2
. Autre personnalité, le chanteur Will I Am, qui écrit même
une chanson de soutien au président, chanson qu’il diffuse sur Internet3
. Le couple de
chanteurs Jay-Z et Beyoncé4
, dont la popularité outre-manche n’est plus à prouver, est
également proche du candidat. Obama cultive une image d’homme relativement simple,
‘cool’. De nombreux clichés allant dans ce sens sont désormais célèbres5
. Cette stratégie
d’image ajoutée au soutien des ‘peoples’ fait que sa popularité augmente en flèche,
notamment chez les jeunes. Internet joue ici un rôle important en tant que véhicule de ces
clichés, qui ne font que renforcer l’image d’Obama ainsi que sa côte de popularité.
« L’audace de l'espoir. Voilà le meilleur de l'esprit américain ; avoir l'audace
de croire, malgré toutes les indications contraires, que nous pouvions
restaurer un sens de la communauté au sein d'une nation déchirée ; l’audace
de croire que, malgré les revers personnels, la perte d’un emploi, un malade
dans la famille ou une enfance empêtrée dans la pauvreté, nous avions
quelque emprise - et par conséquent, une responsabilité - sur notre propre
destin », Barack Obama6
.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Cf. photos en annexe.
2
GARTHWAITE Craig, MOORE Tim (2008), The Role of Celebrity Endorsements in Politics:
Oprah, Obama, and the 2008 Democratic Primary, University of Maryland.
3
Vidéo « Yes we can », disponible sur YouTube est vue plus de 25 millions de fois.
4
Cf. photo en annexe.
5
Cf. quelques photos en annexe.
6
OBAMA Barack, L’audace d’espérer, Presses de la Cité, 2007, 372 p., p. 356.
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Deuxième partie : analyse de la campagne de François Hollande
2012
I - Contexte
Le 16 octobre 2011, François Hollande remporte la primaire socialiste avec 56,57%
des voix face à Martine Aubry (43,43%) et devient le candidat officiel du Parti Socialiste à la
présidentielle de 2012. Cette primaire était d’ailleurs innovante puisque c’était la première
fois qu’elle n’était pas réservée aux militants mais ouverte à chaque citoyen se reconnaissant
« dans les valeurs de la gauche et de la République »1
. Comme Barack Obama, François
Hollande faisait initialement office d’outsider. En effet, un an avec la primaire, Martine
Aubry et surtout Dominique Strauss-Kahn avaient la faveur des sondages. Mais le 14 mai
2011 éclate le scandale du Sofitel, écartant irrémédiablement Strauss-Kahn de la course.
À présent, la campagne présidentielle de 2012 est marquée par la crise économique.
Après une première fois en 2008, la France entre une seconde fois en récession fin 2011. Si la
situation de la France est inquiétante, c’est surtout de la situation européenne dont il s’agit
avec des pays comme la Grèce, l’Espagne ou encore l’Italie qui sont encore davantage en
difficulté. Ainsi, à quelques mois de la présidentielle, les principales préoccupations des
français sont toutes d’ordre économique, à savoir l’emploi (45%), le pouvoir d’achat (36%) et
les retraites (32%)2
. Ce climat rend les français « particulièrement critiques à l’égard de la
classe politique et désillusionnés sur le pouvoir des hommes politiques face à la finance
internationale »3
.
Dès lors, l’exécutif et donc Nicolas Sarkozy se retrouvent en première ligne face aux
critiques. De fait, en décembre 2011, François Hollande arrive en tête des souhaits de victoire
avec 27%, contre 20% pour Nicolas Sarkozy. Autre chiffre intéressant, 56% des français
expriment de l’inquiétude vis-à-vis du Président sortant tandis que 58% considèrent que
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Cf. la « Charte d'adhésion aux valeurs de la gauche », que les électeurs devaient signés en bureau de
vote pour pouvoir participer à cette primaire.
2
Sondage CSA / BFM TV / RMC / 20 Minutes, Les préoccupations des Français, le contexte
économique et financier et les intentions de vote pour 2012, novembre 2011.
3
BRÉCHON Pierre, Questions à Pierre Bréchon, dans dossier L'élection présidentielle française de
2012, www.ladocumentationfrancaise.fr, avril 2012.
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François Hollande comprend les problèmes des français1
. En terme d’image, on s’aperçoit
ainsi que François Hollande a un avantage certain sur Nicolas Sarkozy. La campagne va
d’ailleurs reposer essentiellement sur « le rejet de Nicolas Sarkozy »2
. Sentiment partagé par
Francis Poézévara qui nous indiquait que la présidentielle française de 2012 a été une
campagne « contre Sarkozy ».
II - Le Parti Socialiste et l’inspiration américaine
!
En 2006, à l’aube de la présidentielle française de 2007, la candidate du Parti
Socialiste Ségolène Royal met en place une plateforme web « Désirs d’avenir », qui se
présente comme un « laboratoire d’idées, citoyen et participatif »3
. Par la suite, l’ex-candidate
déclarait : « oui, j'ai inspiré Obama et ses équipes nous ont copiés »4
et rappelait qu’Obama
avait envoyé une équipe à Paris afin d’étudier le fonctionnement de cette plateforme. La
France serait-elle donc en avance sur les États-Unis en terme de stratégie électorale ? Cela
paraît peu crédible tant les « États-Unis ont clairement une longueur d’avance »5
. Plus tard,
l’ex-candidate aurait d’ailleurs fait machine arrière en indiquant qu’elle avait ainsi « répondu
de façon humoristique », avant de poursuivre et d’affirmer à contrario que « sur la campagne
et l'utilisation d'Internet, c'est sans doute nous qui aurons à nous inspirer de Barack Obama, et
peut-être même, ici ou là, à le copier »6
. Quoi qu’il en soit, l’objet n’est pas ici de se lancer
dans une opération de fact-checking afin de vérifier si Ségolène Royal a effectivement inspiré
Obama. En revanche, il est question de déterminer dans quelles mesures, au-delà de la
thématique commune du changement, peut-on faire un rapprochement entre les méthodes de
stratégie électorale de Barack Obama et de François Hollande. Dès lors, deux acteurs ont leur
importance. Il s’agit de l’agence américaine Blue State Digital et de la startup française
Liegey Muller Pons.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Enquête TNS Sofres / TriÉlec de décembre 2011.
2
ROUCHEUX Marion, interview de Luc Rouban, dans Enjeux de la présidentielle 2012 : « 30% des
électeurs restent sceptiques », www.terrafemina.com, février 2012.
3
www.desirs-davenir.eu
4
CYPEL Sylvain, Ségolène Royal : « J'ai inspiré Obama et ses équipes nous ont copiés »,
www.lemonde.fr, janvier 2009.
5
D’après Francis Poézévara qui rejoint ainsi Philippe Riutort.
6
Obama « inspiré » par Royal : c'était de l'humour, explique la socialiste, www.lemonde.fr, janvier
2009.
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Blue State Digital
Créée en 2004 par Joe Rospars, Jascha Franklin-Hodge, Clay Johnson et Ben Self,
« quatre anciens employés de la campagne de Howard Dean »1
, Blue State Digital est une
agence de stratégie digitale. Son credo, « build and galvanize communities »2
. Parmi ses
clients, on retrouve en premier lieu le Parti Démocrate américain, mais également des
organisations sans but lucratif (Partners in Health, National Association for the Advancement
of Colored People) ou encore de grandes entreprises (Google, Ford, Vogue). Les outils
numériques politiques que l’agence a développés lui ont permis de devenir l’un des leaders
mondial en terme de stratégie digitale.
Dès 2004, l’agence, suite à l’inspiration d’Howard Dean, lance une campagne visant à
réintroduire les citoyens au cœur du mouvement politique.
« We’ve just finished working our hearts out for the Howard Dean campaign,
where our candidate had an idea we loved: to run a campaign that would
bring people back to the political process by asking them to take ownership of
it. And we found a way to do it—by building up an email list and asking people
to invest in a grassroots organization, $5 or $10 at a time »3
.
Si cette campagne s’est avérée être un échec, la dynamique était quand à elle bien lancée. En
février 2005, Howard Dean prend la tête du Parti Démocrate et entame d’importants
changements structurels. Ainsi, il embauche deux des quatre fondateurs de Blue State Digital,
à savoir Joe Rospars en tant qu’Internet Director et Ben Self en tant que Technology Director.
Cette collaboration permettra la création d’outils numériques qui s’avèreront déterminants
quelques années plus tard et notamment lors de la campagne victorieuse de Barack Obama :
Party Builder, l’héritier de MyBO et Catalist, la base de données. De cette manière, Blue
State Digital – qui « a joué un rôle dans la rénovation du parti et dans la diffusion des
nouvelles techniques de campagne à l’intérieur du camp démocrate »4
– apparaît, nous l’avons
dit, « comme la figure de proue du mouvement ».
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
PÈNE Clémence, op. cit.
2
www.bluestatedigital.com
3
Our Story, www.bluestatedigital.com
4
PÈNE Clémence, op. cit.
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Mais qu’en est-il de l’influence de Blue State Digital sur la campagne de François
Hollande ? Tout d’abord, Francis Poézévara nous apprend qu’ « en 2008, une équipe de
socialistes a été envoyée sur place pour observer la campagne d’Obama ». À son retour,
convaincue de la force de cette stratégie électorale, cette équipe aurait milité pour l’adoption
d’une stratégie similaire. Des liens se sont alors créés entre le Parti Socialiste, le Parti
Démocrate et donc Blue State Digital. À cet égard, il convient de souligner le rôle du think
tank français Terre Nova, proche du Parti Socialiste, qui a notamment invité, en 2009,
Howard Dean pour deux séminaires révélateurs : « Le modèle Obama » et « Les
rapprochements entre la gauche américaine et la gauche française »1
.
En décembre 2011, Vincent Feltesse, alors responsable de la campagne web de
François Hollande, se rend à New-York pour rencontrer les fondateurs de Blue State Digital,
les « Obama Boys »2
. Des échanges réguliers ont alors lieu entre l’agence américaine et les
équipes de François Hollande. Fin janvier 2012, soit quelques mois avant l’élection, ces
échanges se matérialisent par la venue de plusieurs membres de Blue State Digital à Paris,
dans les locaux de campagne du candidat socialiste. Parmi les membres de cette « big team »,
selon les dires de Steve Jacobs, expert en stratégie de communication online, on retrouve
Ryan Davis, responsable des réseaux sociaux d’Obama en 2008, Sam Jeffers, directeur
stratégique de Blue State Digital. Quelques jours auparavant, c’était Matt Ipcar, designer du
site de campagne de Barack Obama, qui prodiguait ses conseils. Début février, Joe Rospars,
l’un des co-fondateurs, s’est à son tour rendu auprès des équipes de François Hollande. Ces
nombreux échanges avaient pour objectif de partager les « best practices » américaines, qu’il
s’agisse de la rédaction des e-mails, de l’utilisation des réseaux sociaux ou encore de
l’optimisation du site participatif de François Hollande, www.toushollande.fr, lui-même
largement inspiré par le site de Barack Obama www.mybarackobama.com. Tous ces conseils
visent à optimiser l’utilisation du Web dans une logique de mobilisation, dans une logique
terrain. En effet, « en 2008, Obama a gagné parce qu’il a su utiliser l’outil numérique pour
organiser et mobiliser ses troupes »3
dixit Vincent Feltesse. C’est ainsi qu’entre en jeu le
second acteur sur lequel il convient à présent de nous arrêter.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
BAROTTE Nicolas, Quand le Parti socialiste se met à l'heure d'Obama, www.lefigaro.fr, avril
2009.
2
HACQUEMAND Eric, Les spécialistes du Net d'Obama conseillent Hollande, www.leparisien.fr,
janvier 2012.
3
HACQUEMAND Eric, op. cit.
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Liegey-Muller-Pons, les « Bostoniens »
En 2008, Guillaume Liegey, Arthur Muller et Vincent Pons se rencontrent à Boston.
Ils sont tous les trois militants du Parti Socialiste à la section bostonienne. Le premier,
diplômé d’HEC, poursuit ses études à Harvard. Les deux autres, amis d’enfance, sont
normaliens. Arthur Muller est également à Harvard tandis que Vincent Pons étudie au MIT.
Tous trois « passionnés de politique et de nouvelles technologies »1
, ils se prennent d’intérêt
pour la campagne de Barack Obama. Arthur Muller a même participé à la campagne de porte-
à-porte. Si, en France, « les médias insistaient surtout sur l’usage inédit du numérique dans
cette campagne », les trois jeunes amis présents sur place sont surtout marqués par « le retour
à des techniques militantes « classiques », principalement le porte-à-porte »2
. Lors de cette
campagne, ils ont également eu l’opportunité de rencontrer certains cadres de l’équipe de
campagne de Barack Obama. De cette expérience, ils ont ensuite eu l’envie de déployer ce
type de pratiques en France. « Nous ne pouvions pas rentrer comme si rien ne s’était passé »,
confessent-ils3
.
À leur retour en France, ils suscitent l’intérêt de Jean-Paul Huchon, l’actuel président
de la région Ile-de-France. Ainsi, lors des élections régionales de 2010, ils engagent « une
étude, construite sur une démarche scientifique, qui consistait à analyser l’impact du porte-à-
porte dans 8 zones de l’Île-de-France »4
. Ils réussissent alors à démontrer la plus-value de
cette méthode. En 2011, ils se retrouvent engagés dans l’équipe de campagne de François
Hollande avec la mission d’organiser et de piloter la campagne terrain de porte-à-porte.
L’objectif ? Avant le 22 avril 2012, soit la date du premier tour, « ouvrir entre 5 et 12 millions
de porte »5
, dixit Vincent Feltesse – le responsable de la campagne numérique de François
Hollande. Guillaume Liegey, Arthur Muller et Vincent Pons se retrouvent ainsi à la tête d’une
équipe composée « d’une quinzaine de personnes à Paris, 120 formateurs nationaux, 6000
mobilisateurs dans les sections et 80 000 volontaires »6
. Pour atteindre cet objectif, l’appui
d’Internet est nécessaire. Dès lors, ils participent à la création du site www.toushollande.fr7
,
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Qui sommes-nous ?, www.liegeymullerpons.fr
2
Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, www.politic-arts.fr, juin 2014.
3
ROTMAN Charlotte, Europe ? Yes, we can, www.liberation.fr, mai 2014.
4
Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, op. cit.
5
HACQUEMAND Eric, op.cit.
6
Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, op. cit.
7
Cf. capture écran du site en annexe.
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lancé en février 2012. Ce « site de mobilisation » est alors défini comme « une machine
destinée à tous ceux qui ont envie que ça change »1
et vise à soulever des fonds (si Obama
avait systématiser les petits dons – trois dollars minimum –, Hollande en a fait de même – à
partir de deux euros –, calquant ainsi le « modèle Téléthon ») mais aussi et surtout, à travers
le module « Mobilisation 2012 », à « faciliter tout ce qui était reporting de porte-à-porte »2
.
En effet, chaque volontaire pouvait ainsi « donner les statistiques sur son dernier porte-à-
porte, raconter sa rencontre en appartement ou encore importer la liste des emails récoltés »3
.
Au final, cinq millions de portes ont été ouvertes. La plus-value électorale de cette opération
s’élève à « l’ordre de 2.7 à 3.1 points »4
. Ces résultats sont calculés en étudiant la différence
entre les bureaux de vote prioritaires couverts par le porte-à-porte et les bureaux de vote
prioritaires non couverts. Les abstentionnistes étaient particulièrement ciblés. Or, il s’avère
que le porte-à-porte est le moyen le plus efficace pour réussir à remobiliser ces personnes là.
Rappelons que près de trois millions de citoyens ne sont pas inscrits sur les listes électorales,
ce qui représente 7% de la population en âge de voter. De plus, il s’avèrerait qu’une majorité
de cette population aurait tendance à voter à gauche. Il s’agit donc d’un réel enjeu stratégique
pour le Parti Socialiste. Ainsi, au premier tour, cette différence est de 3.1% tandis qu’au
second tour, elle s’élève à 2.7%. Pour le second tour, ces 2.7% correspondent ainsi à 280 000
voix, soit un quart de l’écart entre François Hollande et Nicolas Sarkozy5
. Autre fait
intéressant, cette opération a fait perdre 3.3 points à Marine Le Pen. En effet, 20% des
électeurs potentiels (sur les cinq millions de portes ouvertes) du Front National, soit 100 000
citoyens, ont été convaincus de ne pas voter pour la candidate et ont reporté leur voix sur
François Hollande. Le porte-à-porte, un moyen efficace de lutter contre la montée des
extrêmes ? C’est tout à fait envisageable même si ça mérite d’être vérifié lors des élections à
venir. Cela étant, pour en revenir à François Hollande, nous ne pouvons pas dire que le porte-
à-porte l’ait fait gagner. Porte-à-porte ou pas, le candidat socialiste aurait quoi qu’il arrive
gagné les élections présidentielles. Pour autant, l’influence de cette méthode de stratégie
électorale reste importante. Cette opération s’est avérée être un réel succès.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
LÉCHENET Alexandre, Avec son nouveau site, François Hollande veut ouvrir 5 millions de portes,
www.lemonde.fr, février 2012.
2
Entretien avec Francis Poézévara.
3
LÉCHENET Alexandre, op. cit.
4
Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, op. cit.
5
Les nouvelles technologies sauveront-elles la politique ?, conférence de Francis Poézévara et Siméon
Starck (Liegey Muller Pons), Sorbonne-Nouvelle, 22 janvier 2015.!
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Forts de cette expérience, les trois « Bostoniens » ont alors décidé de poursuivre cette
démarche et cette aventure collective. En 2012, ils ont ainsi créé Liegey Muller Pons, le
« premier cabinet de conseil en stratégie électorale en France »1
. Cette création s’accompagne
de la publication de leur ouvrage Porte-à-Porte, reconquérir la démocratie sur le terrain2
. Ils
y retracent l’opération de porte-à-porte lors de la campagne de 2012, soit « la plus grande
campagne de terrain jamais organisée en Europe ». De plus, ils s’attachent à démontrer
comment le porte-à-porte, optimisé grâce à l’apport des nouvelles technologies, peut apporter
des solutions à certains « dysfonctionnements de notre démocratie » 3
, principalement
l’abstention et le manque de mobilisation citoyenne.
Pour ce faire, ils ont développé un outil numérique visant à optimiser les campagnes
de porte-à-porte : le « Cinquante plus 1 ». Ce dernier, qui s’inspire du logiciel américain
Dashboard, permet d’analyser un certain nombre de données géolocalisées, de cibler les
zones prioritaires grâce à un modèle prédictif, d’organiser les actions de terrain ou encore de
dialoguer avec les électeurs4
. Depuis le lancement de cet outil, 67 équipes de campagne l’ont
utilisé en vue des élections municipales de 2014 (exclusivement dans des villes de plus de 5
000 habitants), dont l’équipe de l’actuelle Maire de Paris Anne Hidalgo. Selon toute
vraisemblance, cet outil devrait être utilisé par le futur candidat socialiste aux présidentielles
de 2017.
III – Spécificités françaises
Nous venons de le voir, la campagne de François Hollande s’est concrètement
inspirée de certaines méthodes utilisées par Obama et ses équipes quatre ans auparavant. Pour
autant, certains facteurs différenciant entrent en jeu et nécessitent d’être soulevés.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
LIEGEY Guillaume et MULLER Arthur, Comment gagner une élection aujourd’hui ?,
www.femmesetpouvoir.fr, 2013.
2
LIEGEY Guillaume, MULLER Arthur et PONS Vincent, Porte-à-Porte, reconquérir la démocratie
sur le terrain, Calmann-Lévy, 2013, 350 p.
3
Notre livre, www.liegeymullerpons.fr
4
Cf. le document de présentation du logiciel en annexe.
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Facteurs juridiques
Suite à mes échanges avec Camille P., experte en stratégie électorale, il apparaît
effectivement que certaines lois françaises ne permettent pas d’aller aussi loin que les
américains, notamment dans le traitement des données personnelles. En effet, l’article 8 de la
loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés stipule
notamment qu’il « est interdit de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui
font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions
politiques, philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale des personnes, ou qui
sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci »1
. Par rapport aux équipes d’Obama
qui pouvaient jouir de la base de données Catalist qui pouvait comprendre jusqu’à 600
informations pour une seule et même personne, en France, la juridiction limite grandement la
marche de manœuvre. Cela étant, les primaires avaient permis au Parti Socialiste de récupérer
un nombre importants de contacts et de « constituer un fichier de près de 500.000
sympathisants »2
. Dès lors, l’UMP avait saisi la CNIL afin de dénoncer cette collecte de
« données à caractère personnel qui font apparaître (...) des opinions politiques », d’après l’élu
UMP Arnaud Julien3
. Pour autant, la loi stipule que cette collecte peut avoir lieu s’il y a eu
consentement de la part des citoyens, ce qui était le cas. Le recours de l’UMP n’avait alors
pas abouti. Pour autant, suite aux multiples pressions de l’UMP, le PS a détruit les données
récoltées à l’issue de l’investiture. Toutes ces données n’ont donc pas pu être réutilisées lors
de la campagne présidentielle. Francis Poézévara indique dès lors que l’utilisation des
données en France « reste anecdotique par rapport aux États-Unis ». En effet, les « seules
données en France, c’est soit au niveau du bureau de vote!pour tout ce qui est électoral, soit
les données INSEE ». Ce sont donc des données accessibles à tous.
Autre loi importante, la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à « la limitation des
dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques »4
, dite « loi
Rocard ». Ainsi, lorsqu’Obama levait 742 millions de dollars pour sa campagne en 2008,
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
www.legifrance.gouv.fr
2
BAROTTE Nicolas, François Hollande tisse son réseau sur Internet, www.lefigaro.fr, décembre
2011.
3
LAURENT Samuel, Les accusations de l'UMP contre la primaire PS sont-elles fondées ?,
www.lemonde.fr, juin 2011.
4
www.legifrance.gouv.fr!
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Hollande dépensait, en 2012, un peu moins de 22 millions d’euros. La différence est tout de
même considérable, bien que la taille des deux pays ait son importance. Forcément, les
moyens d’action ne sont pas comparables. Par exemple, lorsque le budget consacré à la
campagne web d’Obama (porte-à-porte compris) était de 300 millions de dollars (soit environ
230 millions d’euros, ce qui représente approximativement 30% du budget global de la
campagne), ce budget n’était que de deux millions d’euros pour François Hollande, soit
environ 10% du budget total de la campagne. Enfin, cette loi interdit également aux partis
politiques tout achat d’espaces publicitaires dans les médias, contrairement aux États-Unis. Si
dans le cadre de ce mémoire, cela ne revêt pas d’importance particulière, il fallait tout de
même le souligner. En résumé, concernant ces législations, Francis Poézévara concédait
qu’ « en France, on a plus de contraintes ; donc à la fois c’est plus bloquant, mais d’un autre
côté, ça oblige à jouer un peu plus et à trouver des choses innovantes ». Pour autant, on ne
peut pas réellement dire que les campagnes françaises soient particulièrement innovantes. Les
méthodes traditionnelles (meetings, plateaux télévisés, etc) restent fortement ancrées et
l’insertion progressive des nouvelles technologies s’opère avec un retard certain sur les États-
Unis.
Analyse des résultats du questionnaire « Les français et la politique »
Avant toute chose, il convient de souligner quelques biais de ce questionnaire. Tout
d’abord, il a été administré via Internet. De ce fait, les personnes ayant participé sont en
grande majorité des internautes confirmés. De plus, la population n’est pas réellement
représentative dans le sens où elle est majoritairement jeune (moins de 30 ans) et étudiante.
Cela étant, de ces 170 réponses ressort tout de même des éléments intéressants1
. En effet, ce
questionnaire permet notamment de mettre en lumière certaines caractéristiques de l’électorat
jeune et peut donc apporter quelques éléments quant à l’évolution de certaines pratiques
politiques. Pour cette analyse, j’ai ciblé certaines questions pour lesquelles j’ai comparé les
résultats entre les personnes de moins et de plus de trente ans.
Tout d’abord, concernant l’intérêt à la politique, on constate que les résultats sont
relativement similaires. En effet, si 64% des personnes de plus de trente ans considèrent la
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
Voir le résumé global des 170 réponses en annexe.
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politique comme quelque chose d’important, voire même en sont passionnés, ce même
résultat s’élève à 60% chez les moins de trente ans. Ces résultats ne vont donc pas dans le
sens du baromètre CEVIPOF de janvier 2015 selon lequel 58% des français se disent « pas
intéressés » par la politique. Les biais que je soulignais entrent dès lors probablement en
considération. Ensuite, concernant le média privilégié en terme d’information politique, on
remarque que pour 50% des moins de 30 ans, il s’agit d’Internet. Les trentenaires révolus sont
quant à eux 36% à privilégier la Toile pour s’informer en politique. Si les scores de la
télévision et de la presse sont quasiment similaires, c’est au niveau de la radio que les
résultats sont plus significatifs. En effet, 19% des plus de trente ans font de la radio leur
média de prédilection, contre seulement 8% pour les moins de trente ans. Selon Francis
Poézévara, « la télévision reste le média le plus important en politique », notamment au
travers d’émissions comme Des paroles et des actes sur France 2, ou encore le grand débat
d’entre-deux tours. Pour autant, Internet tend progressivement à devenir le média de référence
en terme d’information. Après, information ne signifie pas influence. Il faudra peut-être
distinguer ces deux dimensions.
Concernant l’utilisation des données personnelles, on remarque que les moins de trente
ans sont plus enclins à permettre leur traitement en contrepartie d’une communication plus
ciblée et en adéquation avec leurs attentes et préoccupations politiques (36%, contre 23%
pour les plus de trente ans). C’est un élément qui peut paraître surprenant tant on connaît la
propension de la jeunesse à s’opposer à toute démarche potentiellement liberticide. Or, le
récent débat sur la loi de renseignement a souligné la question épineuse de la collecte et du
traitement des données personnelles.
À présent, on constate également que 46% des plus de trente ans souhaiteraient
s’engager plus activement auprès du candidat qu’ils soutiennent, ce qui semble considérable
et ouvre des perspectives, notamment pour des opérations de porte-à-porte où le besoin en
volontaires est important. En revanche, seuls 28% des moins de trente ans partagent ce
sentiment.
Pour ce qui est de l’utilisation des réseaux sociaux, on relève sans surprise que les
moins de trente ans y passent plus de temps (96% y vont au moins une fois par jour).
Néanmoins, ce chiffre est également élevé chez les plus de trente ans et atteint les 76%,
preuve que les réseaux sociaux sont désormais utilisés par une très grande majorité de la
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population. Sur les réseaux sociaux, 41% des moins de trente ans partagent de l’information à
caractère politique au moins de temps en temps, contre 50% pour les plus de trente ans. Si les
plus de trente ans partagent plus de contenus, ils débattent également davantage de questions
politiques que les moins de trente ans (35% contre 29%).
Pour ce qui est de la pratique du porte-à-porte, sur les 170 réponses, nous avons une
égalité parfaite. 50% approuvent cette démarche et prennent alors le temps de discuter avec
les militants tandis que l’autre moitié des répondants se trouve quant à elle importunée. En
revanche, on constate une disparité entre les plus et les moins de trente ans. En effet, si 59%
des plus de trente ans répondent positivement au porte-à-porte, les moins de trente ans sont
moins enthousiastes et se trouvent donc majoritairement importunés (54%). Quoi qu’il en soit,
les résultats du porte-à-porte sont plus satisfaisants que ceux de la pratique du mailing,
appréciée par seulement 24.1% des répondants.
Pour conclure, nous pouvons relever que 78.2% favoriseraient un activisme
communautaire au détriment d’un activisme politique. Ce résultat permet de souligner
l’aspect stratégique de la démarche de Barack Obama et ses équipes, à savoir de mener une
campagne politique sur un mode davantage communautaire que politique. Enfin, il est
également intéressant de constater qu’en France, la plateforme www.mybarackobama.com est
plus connue que la plateforme www.toushollande.fr (25.9% contre 15.9%, soit tout de même
dix points d’écart).
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Conclusion
« Une élection, c’est une mini-PME et surtout pas une multinationale »,
Jacques Séguéla1
.
Ces propos de Jacques Séguéla, publicitaire et communicant influent, peuvent ici être
quelque peu contredit concernant la campagne de Barack Obama. Par multinationale, il faut
entendre bien évidemment la dimension quantitative, et non internationale à proprement
parler. En effet, Obama a mobilisé autour de lui un nombre extraordinaire de personnes. S’il y
avait forcément une équipe plus restreinte en amont, il y avait tout de même 2 700 salariés qui
couvraient le pays, accompagnés de 5 000 bénévoles, dans le but de former les militants.
Rappelons que le nombre total de militants est estimé à 1.2 millions, d’où l’utilisation du
terme d’ « armée militante ». Concernant la campagne de François Hollande, ces propos
s’avèrent davantage pertinents. Ne serait-ce qu’en terme de moyens, financiers et humains, la
« disproportion entre la multinationale Obama et la PME Hollande »2
est flagrante.
À présent, rappelons brièvement les caractéristiques de la campagne de Barack
Obama. Tout d’abord, on retrouve l’importation des codes de la mobilisation communautaire
en politique. Obama, en tant qu’ancien organisateur communautaire, adopte la stratégie de
mener une campagne de cause sociale, en l’occurrence le changement. Ce type de
mobilisation est alors caractérisé par les aspects suivants : sensibilisation, organisation et
mobilisation et pour finir, action / réaction. C’est ainsi que cette mobilisation d’abord
militante, s’est ensuite muée en mobilisation électorale. Les observateurs parlaient alors d’une
« formidable revitalisation citoyenne ». Autre caractéristique centrale, l’explosion du
financement. Comme nous l’avons vu, en seulement quatre ans, le financement total de la
campagne américaine a été multiplié par deux. Enfin, la dernière caractéristique centrale
réside bien évidemment dans l’utilisation transversale d’Internet. Internet a effectivement été
le liant entre toutes les autres caractéristiques précédemment nommées et jouait, avant toute
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
1
SEGUELA Jacques, « Internet dessert la politique », L’Express, Immédias n°6, mars 2012, 23:54
minutes.
Il convient de préciser que Jacques Séguéla a travaillé sur 20 campagnes présidentielles à travers le
monde, dont 19 victorieuses. En France, il a été le conseiller de François Mitterrand et est à l’origine
du slogan « La force tranquille » ; puis de Lionel Jospin (son unique défaite). A l’étranger, il a
travaillé pour Ehud Barak en Israël, Ricardo Lagos au Chili, Aleksander Kwasniewski en Pologne,
Janesz Drnovsek en Slovénie ou encore pour Simeon II en Bulgarie.
2
HACQUEMAND Eric, op.cit.
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Mémoire - "2008, une campagne politique disruptive"

  • 1. Master 1 Information et Communication ! Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 TIRET Théo N° étudiant : 21309201 Sous la direction de M. Jamil DAKHLIA Rendu : 11 mai 2015 Mémoire de Master 1 « 2008, une campagne disruptive ? » 2008$ 2012$
  • 2. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 2 Remerciements Premièrement, je souhaiterais remercier Monsieur Dakhlia, qui a accepté d’encadrer ce mémoire et m’a accompagné dans la réalisation de ce travail. Les séances de suivi m’ont été d’une grande et précieuse aide, utile pour cerner et délimiter mon travail. Ensuite, je tiens à remercier chaleureusement d'une part Francis Poézévara, d'autre part Valérie H. et Camille P. (qui ont souhaité gardé l'anonymat) ; tous trois ont pris le temps de répondre à mes questions. Je remercie également toutes les personnes ayant participé à mon questionnaire. Je remercie Stella, ma compagne. Elle m’a été d’un grand soutien tout au long de cette année en m’apportant la sérénité dont j’avais besoin dans les périodes de travail soutenu. Enfin, mes remerciements sont adressés tout naturellement à mes parents qui me soutiennent depuis toujours. Ils trouvent systématiquement les mots qui m'encouragent et me réconfortent lorsque j’en éprouve le besoin. Leur confiance et leur soutien me sont très chers. Encore merci à vous tous !
  • 3. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 3 SOMMAIRE : ! Présentation générale...............................................................................................................4 Préambule : la digitalisation de la société ..................................................................................4 Choix du sujet et objectifs de recherche.....................................................................................4 Problématique et hypothèses......................................................................................................5 Méthodologie .............................................................................................................................6 État de l’art.................................................................................................................................7 ! Internet : genèse d’un nouveau média de masse .................................................................11 Historique d’Internet ................................................................................................................11 Internet : un média de masse ? .................................................................................................12 ! Première partie : analyse de la campagne de Barack Obama 2008 ..................................15 I - Contexte..............................................................................................................................15 II - Internet, le cheval de Troie d’Obama ............................................................................16 Une volonté de créer une véritable communauté autour d’une cause commune : le changement...............................................................................................................................16 Une campagne politique menée sur le mode « Téléthon ».......................................................19 III - Internet comme levier d’activation de la mobilisation................................................21 Une formidable « revitalisation citoyenne » ............................................................................21 Quand les sympathisants s’emparent de la Toile .....................................................................23 ! Deuxième partie : analyse de la campagne de François Hollande 2012............................26 I - Contexte..............................................................................................................................26 II - Le Parti Socialiste et l’inspiration américaine ..............................................................27 Blue State Digital .....................................................................................................................28 Liegey-Muller-Pons, les « Bostoniens » ..................................................................................30 III – Spécificités françaises....................................................................................................32 Facteurs juridiques ...................................................................................................................33 Analyse des résultats du questionnaire « Les français et la politique » ...................................34 ! Conclusion...............................................................................................................................37 Matériaux :..............................................................................................................................40 Bibliographie : ........................................................................................................................40 Annexes ...................................................................................................................................44
  • 4. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 4 Présentation générale Préambule : la digitalisation de la société Trois milliards et 10 millions. C’est le nombre d’internautes en 2015, ce qui représente 42% de la population mondiale. Ce chiffre, en croissance de 21% en comparaison avec 20141 , suffit à lui-seul à souligner que nous faisons face à une digitalisation considérable de notre société. Pour certains, à l’image de Gilles Babinet (Digital Champion français et auteur de l’ouvrage intitulé "L’ère numérique, un nouvel âge de l’humanité"), il s’agit même de la plus importante mutation de l’histoire dans le sens où « nous sommes aujourd’hui à l’aune d’une révolution d’une ampleur unique : la révolution numérique. Il s’agit d’une véritable rupture de paradigme qui va bouleverser durablement et profondément nos sociétés contemporaines, aussi bien dans la forme que dans le fond »2 . Ce phénomène se répand et s’étend à tous les secteurs économiques, à tous les pans de notre société : politique, santé, éducation, connaissance, production et concerne l'ensemble des institutions, des entreprises ou chacun d'entre nous. Choix du sujet et objectifs de recherche Cette révolution digitale, qui débute réellement au début des années 2000 bouleverse, nous l’avons dit, tous les pans de notre société. Pour ce travail de recherche, j’ai voulu me concentrer sur l’aspect politique, plus particulièrement sur la digitalisation des campagnes électorales. En effet, il s’avère que les nouvelles technologies ouvrent un extraordinaire champ de nouvelles opportunités. Les hommes et femmes politiques ainsi que leurs équipes apprivoisent tout naturellement ces nouveaux outils qui deviennent peu à peu incontournables en terme de stratégie électorale et plus largement de communication politique. Si les prémisses de cette relation entre communication politique et nouvelles technologies remontent au début des années 2000 au sein du Parti Démocrate américain, nous aurons l’occasion d’y revenir, c’est réellement à partir de 2007 que le monde s’aperçoit des potentialités !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Source : étude « Digital, Social and Mobile 2015 », réalisée par l’agence de communication We Are Social. 2 BABINET Gilles, Transition numérique – Enjeux et opportunités dans un monde en mutation, www.gillesbabinet.com, 05/12/2014. !
  • 5. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 5 stratégiques des technologies numériques. En effet, lors de la campagne présidentielle américaine de 2008, Obama et ses équipes se sont largement appuyés sur ces dernières et nous pouvons aujourd’hui affirmer, avec le recul des dernières années, que sa victoire est en grande partie due à ce parti-pris stratégique. L’objectif de ce travail est donc d’étudier ce que Clémence Pène appelle la « nouvelle science électorale américaine »1 et de voir en quoi cette dernière tend à s’imposer internationalement. Ce mémoire traitera également de la campagne victorieuse de François Hollande en 2012 et s'attachera à identifier si certaines caractéristiques de cette « nouvelle science électorale » ont bel et bien traversé l’Atlantique. Cette recherche se situe ainsi à la croisée de plusieurs disciplines : la science politique, la communication politique, le marketing politique, la sociologie politique et les sciences de l’information et de la communication avec l'usage d’Internet et des réseaux sociaux. « Internet est aujourd’hui devenu un objet pour la science politique »2 dans la mesure où il bouleverse les processus démocratiques. La communication politique se trouve quant à elle également bouleversée par cette évolution car Internet casse des distances, notamment la distance entre les politiques et les citoyens, mais aussi les rapports au temps et à l’image. La sociologie politique permet alors de s’intéresser à la réceptions par les citoyens de ces nouvelles pratiques et paradigmes. Enfin, les sciences de l’information et de la communication sont nécessaires dans l’étude d’Internet et des réseaux sociaux, en termes de pratiques, d’usages et de perceptions. Problématique et hypothèses La problématique essentielle de ce mémoire est de déterminer dans quelle(s) mesure(s) la campagne présidentielle de François Hollande en 2012 s’est inspirée de la stratégie et des outils utilisés par Barack Obama lors de sa campagne de 2008. Autour de cette problématique centrale, se posent des questions connexes auxquelles nous tenterons de répondre : en quoi Internet constitue-t-il un véritable bouleversement et une modernisation dans la façon de mener une campagne politique ? Peut-on raisonnablement parler de campagne disruptive lorsqu’on analyse la campagne de Barack Obama en 2008 ? !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 PÈNE Clémence, La nouvelle « science électorale » américaine, Politique étrangère, 2013/2 Eté, p. 127-139. 2 VEDEL Thierry, Conclusion. L'internet, continuation de la (science) politique sous d'autres formes, in Fabienne Greffet Presses de Sciences Po « Académique », 2011 p. 281-293.
  • 6. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 6 Lorsque j'ai commencé à réfléchir à la place que pourraient occuper les technologies numériques dans les stratégies de campagnes électorales, il m'était difficile d'imaginer que les équipes de campagne de François Hollande dont certaines caractéristiques ressemblaient fortement à ceux développés par celles de Barack Obama (le « changement », le choix du porte-à-porte) n'aient pas été influencées par le travail des équipes américaines. Ma première hypothèse était que cette convergence n'était pas le fait du hasard mais résultait d'une inspiration outre-Atlantique. Par ailleurs, le cadre légal français encadrant les campagnes électorales n'est pas le même que celui en cours aux Etats-Unis. Ma seconde hypothèse a donc été que cette différence a sans doute eu des conséquences sur le transfert des méthodes américaines en France. De fait, nous verrons que la campagne américaine a été bien plus loin dans l’utilisation et l’optimisation de ces nouveaux outils. Il conviendra alors de réfléchir aux facteurs expliquant cette différence, parmi lesquels les contraintes juridiques entourant d'une part le plafonnement du financement des campagnes et d'autre part l’utilisation des données utiles aux politiques à des fins de communication hyper-ciblée. Méthodologie Afin de réaliser ce travail, j’ai eu recours à un certain nombre d’ouvrages et articles scientifiques issus de disciplines diverses et qui m'ont permis d’avancer dans ma recherche. Je me suis également appuyé sur le rapport de la mission d’étude réalisé par le « think tank » français Terra Nova sur les techniques de campagne américaines. En complément, ce mémoire est étayé d’articles de presse, de ressources diverses (vidéos, présentations, etc) mais également d’un certain nombre d’entretiens avec des acteurs de la communication politique et de la stratégie électorale. Enfin, j'ai rédigé un questionnaire, rempli par un panel d'internautes, qui n'avait pas vocation à fournir une information scientifique mais m'a nénamoins permis de faire ressortir quelques informations supplémentaires et tendances permettant d’enrichir ce travail.
  • 7. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 7 État de l’art Après la radio puis la télévision, voici Internet. « La campagne de Barack Obama en 2008 marque indiscutablement un tournant. Mais la nature et l’ampleur de cette discontinuité restent à déterminer »1 . C’est ainsi que François Heinderyckx considère la campagne de Barack Obama tout en ouvrant la porte à des perspectives de recherche. Si on retrouve effectivement une manne importante de travaux sur l’analyse de la campagne d’Obama, c’est moins le cas concernant ses effets postérieurs. Cependant, nous pouvons dès lors établir un condensé – bien que non exhaustif – de la recherche relative à la campagne Obama 2008. Toujours selon François Heinderyckx, si « la présidence de Franklin D. Roosevelt fut remarquée par l’utilisation innovante de la radio » tandis que « l’élection de John F. Kennedy en 1960 fut marquée par un recours appuyée à la télévision et aux techniques marketing », on peut bel et bien considérer que « l’élection de Barack Obama en 2008 semble constituer l’avènement, en marketing politique, des technologies de l’information et de la communication, et tout particulièrement des médias sociaux ». L’influence d’Internet dans cette campagne est ainsi d’ores et déjà soulignée. Selon le chercheur, Internet s’est révélé « d’une efficacité inédite dans un champ d’actions stratégiques que nous pouvons structurer en cinq axes : recruter des militants, les motiver, les informer, les organiser et récolter des fonds ». Les « netcampagnes », vers une numérisation de la politique ? La thématique de « netcampagnes » électorales émergent alors et devient un objet d’étude. Frédérick Bastien et Fabienne Greffet identifient ainsi « les trois dimensions essentielles des netcampagnes »2 . La première d’entre elles correspond à la dimension « informationnelle », soit le « contenu habituellement diffusé par les partis politiques en campagne électorale sur des supports traditionnels ». Par supports traditionnels, ils entendent notamment « tracts, presse du parti et spots officiels à la télévision ». La deuxième dimension « met l’accent sur des pratiques interactives spécifiques à Internet », comme l’envoi de mail, la création de forum de discussion, etc. Toutefois, cette dimension n’implique pas !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 HEINDERYCKX François, Obama 2008 : L’inflexion numérique, Hermès, n° 59, 2011. 2 BASTIEN Frédérick et GREFFET Fabienne, Les campagnes électorales sur Internet : une comparaison entre la France et le Québec, Hermès, n° 54, 2009.
  • 8. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 8 nécessairement « un soutien de l’internaute à l’organisation ». C’est justement cette nuance qui justifie la nécessite d’établir une troisième dimension qui, quant à elle, « répertorie des modalités de mobilisation de l’électorat, impliquant un engagement de la part des internautes ». Par engagement, entendez le fait « d’adhérer au parti en ligne, de faire un don, de mobiliser ses amis », etc. Or, il apparaît qu’Obama et ses équipes aient clairement mis l’accent sur cette troisième dimension, où les notions d’engagement et de mobilisation sont prépondérantes. En effet, François Heinderyckx stipule qu’il ne faut pas voir en la campagne d’Obama une « virtualisation de la campagne électorale » et qu’il « serait bien imprudent d’attribuer la victoire d’Obama au seul fait qu’il ait recouru abondamment à ces technologies »1 . La force et la réussite de cette campagne ont justement résidé dans « une utilisation intelligente et extraordinairement efficace des technologies modernes au service de modalités très traditionnelles de campagne ». Il parle ainsi d’ « inflexion numérique ». François Vergniolle de Chantal abonde dans le même sens en indiquant qu’il est possible de « résumer l’apport d’Internet sur la scène publique américaine en avançant qu’il permet de rationaliser des pratiques traditionnelles »2 . Ainsi, le porte-à-porte a par exemple pu bénéficier des nouveaux outils numériques afin d’être optimisé. Ces nouveaux outils sont à l’origine de ce que Clémence Pène appelle la « nouvelle science électorale américaine »3 . Au cœur de cette science, on retrouve l’importance des données, des datas. Ainsi, toujours selon Clémence Pène, l’innovation de la campagne américaine réside également quant à « l’utilisation politique des données » qui se traduit d’une part par « la constitution et la qualification d’une base de données politique exploitable » et d’autre part par « l’analyse de ces données ». L’optimisation des méthodes traditionnelles. Si ces outils numériques ont été déterminants quant à la récolte et au traitement des données, c’est qu’ils ont de fortes répercussions sur le terrain. En effet, comme l’indique Clémence Pène, « le succès de la campagne Obama tient avant tout à un incroyable déploiement sur le terrain » et non à l’utilisation d’Internet à proprement parler. Internet avait justement pour objectif d’engendrer une mobilisation sur le terrain. Pour favoriser cet !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 HEINDERYCKX François, op. cit. 2 VERGNIOLLE DE CHANTAL François, La voix des outsiders ? Internet dans les partis politiques américains, Presse de Sciences Po, Académique, 2011. 3 PÈNE Clémence, op. cit.
  • 9. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 9 engagement, Dominique Cardon affirme qu’Obama et ses équipes se sont attachés à « faire converser la société américaine »1 . Il souligne alors leur « utilisation très agile des réseaux sociaux » ayant « permis de capter et de canaliser ces conversations pour en faire un outil de mobilisation locale ». Cette mobilisation locale qui, mit bout à bout s’est transformée en mobilisation nationale, « a été galvanisée par l’atmosphère de changement radical, de moment historique, mais aussi par une gestion sophistiquée des objectifs de campagne à l’aide d’indicateurs ciblés par région, voire par quartier » (François Heinderyckx)2 . Pour revenir brièvement à cette atmosphère de changement, il apparaît en effet que Barack Obama a adopté une rhétorique semblable à la mobilisation communautaire. Ainsi, le changement a été érigé telle une cause nationale, telle une « campagne caritative ». Qui dit campagne caritative dit financement. La campagne de 2008 a vu son financement littéralement explosé et Obama n’y est pas étranger. Internet a ici eu un rôle central en permettant de générer énormément de dons. En effet, 6.5 millions de dons ont été effectués en ligne ; et pour six millions d’entre eux, il s’agissait de dons inférieurs à 100 dollars, d’où le rapprochement ici aussi avec une campagne de type caritative (François Heinderyckx). Enfin, dans cette dynamique communautaire, les militants ont été pleinement investis et désignés « comme acteurs à part entière de cette rupture, et pas seulement comme promoteurs des promesses d’un candidat. L’ « américanisation » de la communication politique3 . Cette expression utilisée par Philippe Riutort s’explique par le fait que depuis la naissance et le « développement rapide de l’activité de conseil en communication politique aux États-Unis dès la première moitié du XXème siècle », ce modèle professionnel a été érigé « en norme d’excellence revendiquée par divers « importateurs » jouant de la connivence avec la « modernité » d’outre-Atlantique ». Le sociologue indique alors que le « devoir d’américanisation repéré par Luc Boltanski dans Les Cadres (1982), à propos de l’acculturation au management « à l’américaine », se vérifie pleinement ici ». Pour confirmer cette influence américaine dans l’activité de conseil en communication politique à travers le monde, Fritz Plasser a réalisé, à la fin des années 1990, une enquête comparative sur 500 !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 CARDON Dominique, La démocratie Internet. Promesses et limites, Paris, co-Éd. Seuil – La République des idées, 2010, p. 93. 2 HEINDERYCKX François, op. cit. 3 RIUTORT Philippe, Sociologie de la communication politique, Repères, 2007, p. 70.
  • 10. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 10 consultants en communication américains exerçant sur les cinq continents1 . Plasser souligne alors l’ « ampleur de la diffusion des techniques en provenance des États-Unis »2 . La France n’échappe pas à cette tendance et Philippe Riutort rappelle qu’en 1977, l’ancien maire de Lyon Michel Noir, considéré comme un « pionnier du conseil en communication », avait publié l’un « des premiers « manuels » pratiques au titre évocateur : Comment réussir une campagne électorale ? Suivre l’exemple américain ». Trente-cinq ans après la parution de cet ouvrage, il semble que ce soit toujours le cas. Ainsi, Clémence Pène souligne que la « nouvelle science électorale » américaine inspire « les professionnels du Web politique français »3 . Cette inspiration s’est notamment traduite « à travers des échanges entre experts, lors de conférences » mais également par une collaboration directe entre les responsables de la campagne de François Hollande et Blue State Digital, l’agence qui s’est véritablement révélée en 2008 et qui apparaît aujourd’hui « comme la figure de proue du mouvement » Obama. À partir de cette base de recherche, il convient désormais de faire appel à de la production extérieure, qu’elle soit journalistique, issue de réflexions de think tank ou encore personnelle (entretiens, questionnaire, etc) afin de détailler et de préciser l’ampleur de cette « américanisation » des pratiques de stratégie électorale et de communication politique lors de la campagne présidentielle de François Hollande en 2012. Mots-clés : Internet, démocratie, politique, communication, société, stratégie électorale, réseaux sociaux ! ! !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 PLASSER Fritz, American campaign techniques worldwide, Harvard, 2000, p. 33-54. 2 RIUTORT Philippe, op. cit. 3 PÈNE Clémence, op. cit.
  • 11. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 11 Internet : genèse d’un nouveau média de masse ! ! Pour commencer ce mémoire, il est important au préalable d’établir un bref rappel historique de l’essor d’Internet en tant que média et plus particulièrement en tant que « mass media »1 . En effet, ce sont ces « mass media » qui occupent une place prépondérante en politique puisque de par leur définition, ils permettent d’atteindre et d’influencer une audience importante. C’est au travers de ces médias que les politiques communiquent, débattent et tentent de faire adhérer l’opinion publique à leur programme. Ces médias constituent donc un vecteur de communication pour les politiciens mais ils redéfinissent également la notion d’espace public, définie par le sociologue allemand Jürgen Habermas comme « le processus au cours duquel le public constitué d'individus faisant usage de leur raison s'approprie la sphère publique contrôlée par l'autorité et la transforme en une sphère où la critique s'exerce contre le pouvoir de l'État »2 . Historique d’Internet L’origine d’Internet remonte à 1969 et émerge suite aux travaux de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency), une agence américaine rattachée au département américain de la défense. Le réseau, appelé ARPANET (Advanced Research Projects Agency Network), tend à favoriser les transmissions de données entre plusieurs centres de recherche. Les premières connexions s’établissent entre l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) et l’Institut de recherche de Stanford. Le développement fut rapide au point qu’en 1972, soit trois ans après la mise en route du réseau, une quarantaine de sites se trouvèrent interconnectées. C’est en 1974 que Vint Cerf et Robert Kahn, considérés comme les pères fondateurs d’Internet, publient un ouvrage3 dans lequel ils inventent le protocole TCP/IP. Ce dernier permet l’interconnexion de plusieurs réseaux hétérogènes. En 1983, un virage est pris puisque l’ARPANET est scindé en deux entités : MILNET, l’entité militaire et !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Le sociologue Marshall McLuhan dans son ouvrage Understanding Media publié en 1964, présente le phénomène « des médias de masse » sous quatre caractéristiques principales : - la communication de un vers plusieurs ; - l’unilatéralité du message : le public n'interagit pas avec le véhicule du message ; - l'information est indifférenciée : tout le monde reçoit la même information au même moment ; - l'information est linéaire et présentée selon des séquences prédéfinies. 2 HABERMAS Jürgen, L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, 1962. 3 CERF Vint et KAHN Robert, A Protocol for Packet Network Intercommunication, 1974.
  • 12. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 12 ARPANET, devenant donc l’entité civile, bien que pour l’heure, cet aspect dit civil concerne essentiellement la communication entre centres de recherche. A cette époque, on estime à environ un millier1 le nombre de postes utilisateurs. En 1983 toujours, l’instauration du système de noms de domaines, appelé plus communément DNS, permet de trouver une information à l’aide d’un nom de domaine, et non plus d’une adresse IP, cela facilitant grandement les recherches sur le réseau. C’est à partir de 1989 que le réseau s’ouvre aux particuliers ainsi qu’aux entreprises privées. Mais c’est réellement à partir de 1991, soit la date de création par Tim Berners-Lee, un informaticien britannique, du World Wide Web, qu’Internet s’ouvre au grand public. L’avancée majeure réside dans la possibilité de naviguer d’une page à une autre, via les liens hypertextes. C’est une véritable révolution dans la manière de naviguer ou de « surfer » comme cela est actuellement énoncé. En 1992, un million de machines sont connectées, ce qui engendre la création de l’Internet Society (ISOC), ayant pour mission le développement du réseau à l’international. Depuis, Internet se veut en constante évolution, celle que l’on connaît, avec les améliorations récurrentes en terme de vitesse de navigation (ADSL, fibre optique), en terme d’échange et de partage de données (« Peer-to-peer » en 1997), ou encore en terme de communication entre les utilisateurs du réseau (les blogs et bien sur, les réseaux sociaux, Facebook en tête). Internet a pris au fil du temps une place centrale dans nos sociétés occidentales, que l’on appelle régulièrement aujourd’hui « société 2.0 » ; société de l’hyper-connexion entre les membres qui la compose, d’autant plus après la création du WAP (Wireless Application Protocol) en 1997. Il a permis de se connecter à Internet depuis un appareil de transmission sans fil, principalement les téléphones portables. Ont suivi les réseaux GPRS, EDGE, 3G et maintenant 4G, augmentant systématiquement la vitesse de navigation. Internet : un média de masse ? La question de l’appartenance d’Internet à la famille des « mass media » - composée en premier lieu de la télévision et de la radio, mais également de la presse écrite, de l’affichage ou encore du cinéma - a pendant plusieurs années divisé et continue encore de le faire aujourd’hui. Je constate une double division sur ce sujet. Premièrement, la question était de savoir si Internet était un hors média ou bien un média de masse. Aux débuts des années 2000, bien que commençant à se démocratiser, Internet nécessitait tout de même un !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Source : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/d000512-internet-dans-le- monde/historique-du-reseau!!
  • 13. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 13 équipement qui ne permettait pas encore de pouvoir parler de diffusion de masse, comme cela était le cas pour les médias plus traditionnels comme la télévision, la radio ou encore la presse écrite. Je pense qu’à présent, cette question de classification entre hors média et média de masse, du moins en terme de diffusion, a trouvé sa réponse. En 2006, Manuel Castells classait alors Internet comme un média de masse, en partant du constat qu’à cette époque, plus d’un milliard de personnes s’avéraient être des utilisateurs d’Internet et environ deux milliards possédaient un téléphone portable1 . L’évolution exponentielle qu’a connu Internet en terme de nombre d’utilisateurs ne fait que renforcer la thèse du sociologue. En effet, au premier trimestre 2013, le nombre d’internautes dans le monde est évalué à 2,749 milliards, soit 38,8% de la population mondiale2 . Pour rappel, en 1995, soit quatre ans après la création du Web, le nombre d’internautes s’élevait à 16 millions, soit seulement 0,4% de la population mondiale. La deuxième division concerne les caractéristiques propres que se doivent d’avoir les médias de masse, celles définies par Marshall McLuhan. Sur ce point, il s’avère effectivement que la question est plus complexe et plus sujette à débat. Tout d’abord, si l’on se base sur la première caractéristique d’un média de masse donnée par le sociologue canadien, l’information véhiculée par un média de masse est poussée par un émetteur à destination de plusieurs destinataires. C’est ce qu’on appelle également la logique « push ». Or, s’agissant d’Internet, nous sommes dans un cas de figure où ce sont plusieurs émetteurs qui communiquent à plusieurs destinataires. On sort donc du schéma « un/plusieurs » pour adopter un modèle « plusieurs/plusieurs ». Également, pour Guillaume Canton, directeur des stratégies digitales de l’agence de communication corporate Burson Marsteller3 , le Web est loin d’être un média de masse puisque ce sont les internautes qui vont chercher l’information, et non le contraire. De ce fait, peut-on réellement parler d’information de masse, puisque chaque individu possède sa propre utilisation du Web, s’oriente vers un contenu plus personnalisé, plus ciblé. Francis Balle, sociologue français indiquait : « Les gens regardent, à la télévision, et ils lisent, dans les journaux, ce qu’ils ont appris à apprécier et à comprendre en d’autres lieux […]. Ce qui explique le fait que les médias, plutôt que d’œuvrer vers une !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 CASTELLS Manuel, Emergence des « médias de masse individuels », Le Monde Diplomatique, août 2006. 2 Selon les derniers chiffres communiqués par l’UIT (Union Internationale des Télécommunications) 3 CANTON Guillaume, Internet n'est pas un média de masse, ou les illusions du buzz, http://strategies.fr, septembre 2011.
  • 14. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 14 plus grande égalité, reproduisent et accentuent les inégalités devant la culture. Ce qui confère son ultime signification à l’adage selon lequel les gens n’ont jamais que les journaux ou les programmes qu’ils méritent »1 . Au-delà de cette remise en cause de l’impact réel des médias de masse sur les foules, que je ne commenterai pas ici car ce n’est pas l’objet, je dirai cependant que c’est d’autant plus vrai pour les internautes. Libre à nous de nous orienter vers tel ou tel contenu, de plus ou moins bonne qualité, encore faut-il pouvoir dissocier le bon du moins bon, le vrai du faux. Néanmoins, cette orientation est fonction de ce que Pierre Bourdieu appelle le « capital culturel »2 , découlant de « l’habitus culturel ». Ainsi, Bourdieu et Balle soulignent tout les deux l’importance et le rôle joué par la « socialisation primaire et secondaire » de l’individu, qui va déterminer ses comportements, ses opinions et ses modes de vie. Pour conclure, on peut bel et bien affirmer qu’Internet entre dans la famille des médias de masse, au vu du nombre d’internautes potentiellement atteignables. De plus, si on se base sur la définition des médias de masse qui veut que ce soient « des médias capables d'atteindre et d'influencer une large audience et que par le recours à ces moyens, les annonceurs peuvent diffuser leurs messages en direction d'un très vaste public, répartis sur des espaces élargis pour un coût relativement raisonnable »3 , on peut maintenir cette thèse selon laquelle Internet est effectivement un média de masse. Néanmoins, il faut avoir conscience que les spécificités et les caractéristiques de ce média ne sont pas tout à fait similaires à celles des « mass media » historiques, ce qui peut nous faire dire qu’Internet est un média de masse doté d’un statut particulier et unique. En effet, c’est le seul média de masse qui répond pleinement au schéma « plusieurs/plusieurs ». Ainsi, après la presse écrite, la radio puis la télévision, la « Toile » devient le quatrième média de masse aux réels enjeux politiques. Ces quatre médias ont comme point commun d’être des lieux fictifs sur lesquels les politiques communiquent et débattent, pour ne pas dire s’affrontent. Mais Internet élargit de ce fait l’espace public4 et devient ainsi une nouvelle « agora planétaire »5 . !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 BALLE Francis, « Le triangle du civisme », La Revue Civique, numéro 6, automne 2011. 2 BOURDIEU Pierre, La Distinction : Critique sociale du jugement, Éditions de Minuit, 1979, 670 p. 3 Source : www.wikipedia.fr 4 À cet égard, voir L’élargissement de l’espace public dans La Démocratie Internet. Promesses et limites, Dominique Cardon, p. 35-52. 5 LEVY Pierre, Cyberdémocratie, Éd. Odile Jacob, 2002, 256 p.
  • 15. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 15 Première partie : analyse de la campagne de Barack Obama 2008 I - Contexte Le 10 février 2007, Barack Obama présente officiellement, à Springfield, sa candidature à la présidence américaine. À ce jour, il fait véritablement office d’outsider et les prévisions le prédisent perdant aux primaires face à Hillary Clinton. Or, le 4 novembre 2008, c’est bel et bien le candidat d’origine kenyane qui s’impose face à John McCain et devient ainsi le nouveau président des États-Unis. Comment expliquer son succès ? Tout d’abord, il est important de rappeler que le contexte de l’époque jouait en sa faveur. En effet, l’annonce de la faillite de Lehman Brothers et ainsi du début de krach ne fait que renforcer les américains dans l’idée que le pays se trouve sur une pente descendante. De plus, les républicains sont fortement pénalisés par l’impopularité de George W. Bush qui, après deux mandats à la tête du pays et des actions très fortement contestées (la guerre en Irak par exemple), atteint un taux historiquement bas de 27% d’opinions positives. Il faut remonter au scandale du Watergate pour retrouver un niveau aussi bas aux États-Unis. Également, le facteur démographique est lui aussi à prendre en considération. Il s’avère effectivement que le poids des minorités – majoritairement démocrates – ne cesse d’augmenter 1 . Voici, rapidement, les axes principaux faisant que le contexte général est, dès le départ, favorable aux démocrates et donc par la suite à Barack Obama. Cependant, la victoire d’Obama trouve sa source avant tout dans la campagne qui a été menée par le candidat et son équipe. Rappelons en effet qu’au début de la campagne, le candidat démocrate accusait un retard de douze points sur le candidat républicain John McCain. Ainsi, cette campagne, qualifiée par Barak Obama de « meilleure campagne électorale jamais menée »2 , a fait d’Internet son cheval de Troie. Aux débuts des années 2000 déjà, le Parti démocrate et notamment Howard Dean lors de sa campagne de 2004 avaient perçu l’impact et l’influence d’Internet. Mais c’est réellement « après la défaite de John Kerry face à George W. Bush » lors des présidentielles de 2004 que le Parti démocrate a décidé de se reconstruire et s’est « transformé en laboratoire d’expérimentation d’une « nouvelle science !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Les minorités ont un poids électoral croissant – 26% en 2008 contre 15% en 1988. En 2040, d’après les estimations, les États-Unis seront un pays majoritairement « non-blanc ». 2 Rapport de la mission d’étude de Terra Nova sur les techniques de campagne américaines : « Moderniser la vie politique : innovations américaines, leçons pour la France », Janvier 2009.
  • 16. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 16 électorale », misant sur les nouvelles technologies et la maîtrise des bases de données »1 . Le Parti a ainsi instauré quelques outils, à l’image du réseau social MeetUp ou encore du site Democracy Bonds, sur lesquels Obama a pu s’appuyer. Sa grande réussite a été de les exploiter de façon optimale de sorte à gagner les élections, là où ses prédécesseurs avaient échoué depuis la fin de l’investiture de Bill Clinton en 2001. II - Internet, le cheval de Troie d’Obama Obama adopte une stratégie visant à fédérer autour de lui, à se poser comme LE candidat du peuple. Ancien organisateur communautaire, il est fortement inspiré par des idéologues tels que Saul Alinsky ou encore Martin Luther King. C’est avec ce vécu que Barack Obama transpose le discours et les pratiques communautaires en politique. C’est alors qu’Internet va occuper un rôle central, rôle qui sera développé au sein de cette partie. Une volonté de créer une véritable communauté autour d’une cause commune : le changement À bien des égards, la campagne d’Obama est considérée comme LA campagne de la mobilisation. Mobilisation militante dans un premier temps, puis électorale dans un second temps. Nous étudierons cette mobilisation plus en détails au sein de la troisième partie de ce mémoire. Qui dit mobilisation, dit cause. Ainsi, afin de rallier un maximum de personnes, Obama et son équipe axent leur campagne sur un message fort : le changement. Obama adopte alors « le discours et les caractéristiques du mouvement social au lieu de s’en tenir à la campagne politique classique »2 . La cohérence, la pertinence3 et la force de ce message – qui sera conservé, décliné, renforcé tout au long de la campagne – constituent la grande réussite de cette dernière. Tout d’abord, Obama incarne lui-même le changement, principalement en tant qu’afro-américain. De plus, il ne faut pas oublier qu’Obama, avant d’être un politicien, était organisateur communautaire à Chicago. Il est fortement influencé par Saul Alinsky, idéologue américain. Comme le rapporte Manuel Castells, Alinsky proposait en 1995 une !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 PÈNE Clémence, op. cit. 2 VASQUEZ-PARRA Adeline, La stratégie du réseau social pendant la campagne présidentielle de Barack Obama, août-novembre 2008 : discours et symboles du mouvement social, Signes, discours & sociétés, juillet 2010. 3 Rappelons que le contexte socio-politico-économique évoqué en introduction fait que le changement devient une nécessité ou du moins une volonté partagée par un nombre important d’américains.
  • 17. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 17 nouvelle définition du rôle du leader politique, étonnamment proche du discours du candidat démocrate treize ans plus tard : « It’s time for politicians and other leaders to take the next stop and to see voters, residents or citizens as producers of this change. What if a politician were to see his job as that of an organizer, as part teacher and part advocate, one who does not sell voters short but who educates them about the real choices before them? »1 Le changement va donc être porté au rang de grande cause nationale. Obama se porte comme le garant, comme le porteur de cette cause. Il est l’homme qui représente l’espoir2 . Certains s’inquiètent alors de l’hyperpersonnalisation, de la peopolisation du candidat. Son opposant républicain, John McCain l’attaque en indiquant que c’est « Obama first » et non « Country first »3 . Certains reprochent alors une confusion entre marketing et politique4 . Pour Valérie H., « la peopolisation est le fait d’une certaine presse, c’est une pratique de l’intime qui est montrée (...). Il y a beaucoup d’élus qui publient sur Facebook ou Twitter des photos de leurs réunions, des gens qu’ils rencontrent mais pas de leur famille. La peopolisation, ça serait ça ». Elle concède toutefois une petite part de peopolisation avec certaines photos familiales ou amicales, mais nous considérons qu’il n’y a rien de nouveau dans ces pratiques qui sont fortement ancrées aux États-Unis depuis John Fitzgerald Kennedy5 . Ainsi, il n’y a peut-être pas peopolisation mais il y a bien un rapprochement avec le marketing, même si, toujours selon Valérie H., « le marketing politique a toujours existé ». De plus, comme l’indique Keith Reinhard, président de DDB Worldwide – un important groupe de communication – « Obama a les trois choses que vous attendez d’une marque : il est nouveau, attractif et différent »6 . Valérie H. ira même jusqu’à dire qu’ « on a vendu le personnage, il est certain qu’il n’a pas été élu à 100% sur ses idées mais beaucoup sur lui-même, sur ce qu’il a réussi à incarner ». Face à ces critiques, la stratégie consista alors à faire basculer la rhétorique. Ainsi, cette dernière est passée du « vote for Obama » au « vote for change », le candidat s’efface complètement derrière la cause fédératrice qu’est le changement. Ainsi, adhérer – en !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 CASTELLS Manuel (2009), Communication Power, Oxford University Press, New York. 2 Cf. en annexe les affiches « Hope » et « Believe ». 3 Rapport Terra Nova, p. 20. 4 Cette année là, Obama sera même élu personnalité marketing de l’année. 5 LHERAULT Marie et DAKHLIA Jamil, Les États-Unis, patrie de la peopolisation politique ?, entretien avec Divina Frau-Meigs et Jacques Portes, Le Temps des médias, 2008/1 n° 10, p. 197-208. 6 MCGIRT Ellen, The Brand Called Obama, www.fastcompany.com, avril 2008.
  • 18. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 18 répondant à l’invitation « join us » – à la cause du changement est fortement valorisant pour les individus ; cela leur donne une bonne estime d’eux-mêmes et leur procure un sentiment d’appartenance à la communauté. Les militants vont alors s’approprier la cause et devenir des acteurs du changement. C’est ce qu’on appelle une stratégie d’ « empowerment ». Ainsi, lorsque l’on interroge des militants sur la campagne, ils parlent avant tout du changement ainsi que d’eux-mêmes, passant sous silence Barack Obama et même la politique en général. De plus, le slogan de la campagne – « yes we can » – induit lui-même, à travers l’utilisation et la rhétorique du « we », cette dimension collective. L’utilisation du « nous » devient alors centrale, notamment sur la page Facebook du candidat1 . Le « eux », bien que non utilisé directement, représenterant sans hésitations les républicains, alors au pouvoir depuis 2001 avec George W. Bush. Obama, toujours dans une logique que nous qualifierons d’ « alinskyienne », justifie cette nécessaire implication citoyenne par le fait que le changement peut provenir d’en haut, mais doit bien partir d’en bas, c’est-à-dire du peuple2 (« Change does not come from the top down. It comes from the bottom up »3 ). C’est à ce niveau qu’Internet va jouer un rôle crucial. En diffusant de nombreux contenus sur les réseaux sociaux notamment, les américains se les approprient, les discutent, les partagent. De plus, Obama va à plusieurs reprises s’adresser directement au peuple. Par exemple, sur le réseau social professionnel Linkedin, il sollicite les chefs d’entreprise quant à d’éventuelles mesures à prendre en faveur des PME. Il reçoit alors pas moins de 1500 réponses4 . Cette stratégie a le mérite de ré-intéresser les américains à la politique, ces derniers se sentant alors écoutés. C’est ainsi que se crée la communauté Obama, communauté qui, nous le verrons, sera prépondérante dans la victoire d’Obama quelques mois plus tard. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Cf. en annexe plusieurs copies écran. 2 On appelle ce phénomène le « grassroot networking ». 3 Rapport Terra Nova, p. 24. 4 BENILDE Marie, Barack Obama, candidat des réseaux sociaux sur Internet, Le blog du Monde Diplomatique, 21 avril 2008.
  • 19. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 19 Une campagne politique menée sur le mode « Téléthon » « Barack Obama innove en important dans le monde politique le modèle des campagnes de cause caritative. C’est la première campagne politique de type Téléthon »1 . Après avoir réussi à constituer une véritable « communauté Obama »2 , le candidat va capitaliser sur cette dernière afin de lever des fonds et ce, de façon exponentielle. Sur ce point réside une nouvelle grande innovation dans la façon de faire campagne en politique. Effectivement, l’explosion du financement est une autre grande caractéristique de la spécificité de cette campagne présidentielle, primaires inclues. Pour preuve, au cours de cette dernière, les candidats ont soulevé au total 1.63 milliard de dollars. Par comparaison, ce montant était de 880 millions en 2004 et de 530 millions en 20003 . Nous pouvons donc constater qu’en seulement quatre ans, le financement a doublé. Comment expliquer cela ? Tout au long de la campagne, Obama va se tourner vers le financement populaire, capitalisant ainsi sur ses très nombreux sympathisants. C’est alors que nous pouvons parler de l’application du « modèle de financement du Téléthon appliqué à la politique »4 , en atteste le fait que « les deux-tiers de son financement proviennent de petits dons de moins de 200 dollars »5 . Ainsi lors de l’élection générale, Obama ayant renoncé « au système public de financement » au détriment du « financement privé illimité »6 , il réussit à lever 742 millions de dollars. Il convient de préciser qu’Obama fut le premier candidat américain a opté pour cette stratégie ; stratégie qui s’est avérée payante pour le candidat démocrate puisque dans le même temps, John McCain, limité par le plafond du système public de financement, levait seulement 367 millions de dollars. Concernant ce mode de financement, on pourrait alors se poser la question de l’autonomie politique, vis-à-vis des lobbies notamment. Effectivement, il est vrai que le système public de financement est à priori gage d’autonomie, en s’affranchissant de ces lobbies. Pour autant, comme nous l’avons évoqué, une très grande majorité du montant total des fonds soulevés par Obama provient des américains eux-mêmes. Ainsi, il s’agirait davantage d’une forme de lobby public. Selon Jean-Dominique Giuliani, !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Rapport Terra Nova, p. 11.! 2 Rapport Terra Nova, p. 11. 3 Cf. graphique en annexe. 4 Rapport Terra Nova, p. 13. 5 Rapport Terra Nova, p. 13. 6 Rapport Terra Nova, p. 59.
  • 20. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 20 « le lobby caché fait la part belle aux plus forts et affaiblit la démocratie. Le lobby public et transparent, ouvert à tous, est un signe de force de la démocratie, où le pouvoir de décision retrouve toute la noblesse de la politique, c'est-à-dire son indépendance et son sens de l'intérêt général »1 . Si Obama a réussi à lever autant de fonds, c’est grâce au positionnement stratégique de sa campagne, que nous avons évoqué précédemment. Il adopte un discours basé sur l’émotion, à l’image encore une fois du Téléthon. Or, l’émotion est l’un des principaux facteurs permettant l’adhésion. Il est bien connu des professionnels du marketing et de la communication puisqu’on considère que 75% des décisions d’achat seraient prises de manière inconsciente, guidées justement par nos émotions2 . De plus, les travaux de Murray Edelman abondent dans ce sens. En effet, après avoir étudié les trois débats télévisés de la campagne présidentielle de 1992, il constate que derrière les discours prétendument rationnels, ces derniers sont en réalité remplis d’appels aux émotions. « En campagne électorale, l’astuce consiste donc à disséminer les appels aux émotions dans la discussion des questions de fond »3 . Cela étant, pour en revenir à Obama, il s’efface alors derrière la cause du changement, bien plus fédératrice qu’un politicien. Ainsi, les sympathisants ne donnent pas pour Obama, ils donnent pour le changement. De la sorte, le donateur devient un véritable « acteur du changement »4 . Ce phénomène de financement populaire a également le mérite de renforcer encore davantage le caractère communautaire de sa campagne. Effectivement, faire une donation au candidat renforce le sentiment d’appartenance du sympathisant, appartenance à cette « communauté Obama » ou faudrait-il plutôt dire « communauté du changement »5 . Internet apporte alors l’outil nécessaire à ces donations. En effet, il est très facile à travers le site mybarackobama.com de faire un don, en seulement « quelques secondes et quelques clicks »6 . Cette accessibilité, cette facilité d’utilisation a probablement été un facteur important dans le succès de cette levée de fonds. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 GIULIANI Jean-Dominique, Marchands d’influence, les lobbies en France, Le Seuil, 1991, 260 p. 2 Selon HÄUSEL Hans-Georg, docteur en neuromarketing. 3 EDELMAN Murray, The Symbolic Use of Politics, Urbana, University of Illinois Press, 1980, p.135 - 137. 4 Rapport Terra Nova, p. 13. 5 Rapport Terra Nova, p. 24. 6 Rapport Terra Nova, p. 13.
  • 21. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 21 III - Internet comme levier d’activation de la mobilisation « En fait, la stratégie de communication adoptée par Obama a reposé sur une indifférence affichée vis à vis des grands médias traditionnels et sur l’exploitation maximale des nouvelles technologies comme modes de communication instantanés et interactifs », Virginie Picquet1 . La campagne présidentielle de 2008 est caractérisée par l’utilisation massive d’Internet à des fins mobilisatrices. Pour autant, le caractère stratégique du réseau avait déjà été descellé par le Parti démocrate – principalement à partir de 2004 – date à laquelle Howard Dean est devenu président du Parti. Il impulsa alors une réelle dynamique afin de bénéficier au maximum du potentiel d’Internet, à travers plusieurs outils. Ainsi, le Parti créa « Party Builder » ou encore « Meet up », des réseaux sociaux. MyBO, le site central de la campagne d’Obama, en est l’héritier. Howard Dean avait également perçu l’importance des réseaux sociaux émergents2 et il avait pris l’initiative de les investir. Les outils de financement en ligne, ceux du porte-à-porte ainsi que la base de données Catalist ont tous été mis en place avant l’arrivée d’Obama. Nous verrons que la victoire de l’actuel président des États-Unis trouve sa source dans le développement et l’optimisation de ces outils. Une formidable « revitalisation citoyenne » Pour commencer, l’expression « revitalisation citoyenne » est utilisée afin de souligner la mobilisation militante sans précédent, suivie tout naturellement d’une mobilisation électorale record3 . La question est donc de savoir en quoi Internet a contribué à ce phénomène? Internet, comme nous l’avons vu, va ainsi faire en sorte de créer une véritable communauté et d’impliquer les acteurs (nombre record de militants)4 . Afin de recruter ces militants, le principal outil va être les réseaux sociaux. Ils constituent le point de départ de la mobilisation. L’objectif est d’aller à la rencontre des gens, et non d’attendre qu’ils intègrent la campagne ; « go where the people are »5 . Or, en 2008, les réseaux sociaux représentent !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 PICQUET Virginie (2010), L’image du président de John Kennedy à Barack Obama, Paris, éditions Ophrys, 365 p. 2 MySpace (2003) ; Facebook (2004) ; YouTube (2005). 3 Le taux de participation a atteint 63%, contre 55% en 2004. Pour retrouver un tel score, il faut remonter en 1960 4 En effet, Barack Obama aurait ainsi réussi à mobiliser « une armée de 1,2 millions de militants ». 5 Rapport Terra Nova, p. 25.
  • 22. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 22 désormais un lieu incontournable sur la toile1 . Ainsi, la campagne d’Obama va inonder les réseaux sociaux, les plus traditionnels comme les plus ciblés, notamment les réseaux communautaires (BlackPlanet, AsianAve, MiGente, etc). De par leur caractère « viral », les réseaux sociaux permettent de toucher des millions de personnes en un temps record. De plus, comme l’indique Dominique Cardon, cette « utilisation très agile des réseaux sociaux (...) a permis de capter et de canaliser ces conversations pour en faire un outil de mobilisation »2 . Au-delà de récupérer des données sur ce qui était dit par les américains sur la Toile, Obama et ses équipes se sont attachés des sympathisants « en leur permettant de valoriser auprès de leurs réseaux sociaux leurs contributions à la campagne »3 . Toute cette stratégie digitale a comme plateforme le site mybarackobama.com – MyBO. Ainsi, les pages sur les réseaux sociaux constituent une sorte de produit d’appel. Sur MyBO, les sympathisants pouvaient très aisément faire des dons, même de quelques dollars4 (d’où la logique de la campagne caritative et du financement populaire) mais également, pour ceux qui souhaitent s’investir davantage, obtenir de véritables « kits de formation »5 à l’intérieur desquels on pouvait trouver une documentation de la campagne, un programme de porte-à-porte, des listes téléphoniques afin de faire du phoning, etc. L’efficacité des militants va alors être optimisée. Par exemple, un outil de reporting est créé, le « Dashboard »6 . Précisons que les militants étaient au préalable formés dans des « Obama camps »7 puis encadrés par le staff. Malgré tout, une relative confiance leur était accordée. Hormis le reporting demandé régulièrement par le staff aux militants, pas moins de 2 700 salariés (appelés les « field organizers »), accompagnés de 5 000 bénévoles, parcouraient dans tout le pays afin de former les militants et ainsi, de contrôler leurs actions. Cela étant, à partir de MyBo, plus de 35 000 groupes de volontaires ont été créés et 200 000 évènements « offline » ont été mis en place8 . Cette mobilisation record va avoir une influence considérable et elle va ensuite se répercuter sur la mobilisation électorale. En effet, si l’on reprend les travaux du !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Aux États-Unis, selon Médiamétrie Netratings, Facebook comptait à la fin de l’année 2007 22,7 millions d’utilisateurs, soit une pénétration sur 13,7% des foyers. 2 CARDON Dominique, op. cit. p. 93. 3 CARDON Dominique, op. cit., p. 94. 4 Cette stratégie va s’avérer extrêmement profitable puisque Barack Obama va ainsi réussir à soulever environ 500 millions de dollars (pour trois millions de donateurs). 5 Cf. en annexe. 6 Cf. copie écran en annexe. 7 Rapport Terra Nova, p. 14. 8 Rapport Terra Nova, p. 39.
  • 23. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 23 sociologue américain Paul Lazarsfeld1 , on comprend que l’entourage a une plus grande influence sur les choix politiques que les discours traditionnels du candidat. C’est ce qu’il nomme le modèle du « two step flow of communication », soulignant l’influence des leaders d’opinion. Ainsi, tous ces militants vont, en faisant du porte-à-porte, en discutant avec leurs proches, recruter un nombre important de nouveaux sympathisants. En effet, le fait que ce soit quelqu’un de votre voisinage qui vienne vous parler s’avère extrêmement efficace puisqu’il existe un lien de confiance entre ces personnes. Ils sont encouragés à adopter un discours narratif personnalisé, c’est-à-dire d’expliquer pourquoi ils soutiennent Obama, et non de se contenter d’exposer le programme du candidat. Ainsi, « l’armée militante »2 d’Obama va être en contact direct avec 68 millions d’Américains, soit plus de la moitié des électeurs. De plus, un outil va être déterminant dans la réussite de cette street-campaign : la base de données Catalist. Il s’agit de la plus grande base de données jamais réalisée. C’est un fichier unique sur lequel 220 millions d’américains sont répertoriés à l’aide d’informations spécifiques. Le nombre d’informations par personne peut aller jusqu’à 600 (Big Brother is watching you) ! La communication va ainsi pouvoir être ciblée, personnalisée. Les militants, lorsqu’ils iront faire du porte-à-porte, pourront adapter leur message en fonction de l’habitant. Il s’agit là de micro- targeting (le ciblage est en quelque sorte poussé à l’extrême). C’est également le cas des e- mails envoyés aux sympathisants, qui adoptent un ton résolument cordial, donnant une impression de réelle proximité3 . Au total, plus d’un milliard d’e-mails ont été envoyés4 . Quand les sympathisants s’emparent de la Toile Comme nous l’avons évoqué, Internet centralise l’activité militante. C’est à travers le « online » que s’organisent les actions « offline ». Via MyBo, les sympathisants font des dons, récupèrent de l’information, s’organisent en groupes, etc. Sur les réseaux sociaux, ils suivent le candidat en temps réel, postent des messages d’encouragement, partagent de l’information, etc. Mais au-delà des outils mis à disposition par Obama et son équipe, il y a eu une réelle volonté de laisser la possibilité aux américains de s’approprier la campagne, à leur manière. Par exemple, afin de favoriser l’appropriation citoyenne, elle valorise ce qu’on appelle les !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 LAZARSFELD, P.F., BERELSON, B. & GAUDET, H. (1944), The People’s Choice : How The Voter Makes Up His Mind in a Presidential Campaign, New York, Columbia University Press. 2 Cf. en annexe quelques images de militants. 3 Cf. en annexe un exemple de mail, récupéré via une sympathisante de l’époque. 4 Cf. Rapport Terra Nova, p. 37.
  • 24. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 24 contenus générés par les sympathisants, les « user-generated contents ». Ainsi, le logo1 de la campagne est volontairement non-personnifié, permettant aux personnes de se l’approprier en le détournant. Ce logo sera alors très largement repris et fera ainsi le tour de la toile, sous diverses formes. En effet, la viralité – permise par le réseau et par le fait que les sympathisants deviennent eux-mêmes des médias – est un facteur sur lequel le candidat démocrate peut s’appuyer, toujours selon une logique fédératrice. Également, le candidat et ses équipes jouent sur la créativité des sympathisants en reprenant les meilleures inspirations. Le slogan « yes we can » provient d’ailleurs des militants, prononcé spontanément lors d’un meeting2 . En outre, de nombreuses pages de soutien se créent sur les réseaux sociaux, à l’image de « Student for Obama »3 . En effet, lorsque Barack Obama annonce sa candidature, « Facebook comptait déjà plus de 500 groupes qui discutaient et commentaient sa campagne »4 . En faisant des recherches, on s’aperçoit que ce type de pages n’existe pas du côté de John McCain. Une preuve supplémentaire attestant la forte domination du candidat démocrate sur la Toile. Rappelons également que lorsque McCain dépensait environ 4.5 millions de dollars pour sa campagne Internet, Obama quant à lui en dépensait plus de 14 millions. Cet écart a notamment permis au candidat démocrate de s’offrir les services des meilleurs, comme Chris Hugues, 24 ans alors et qui n’est autre que l’un des cofondateurs de Facebook. Il convient néanmoins de noter qu’il existe tout de même un facteur sociologique à prendre en considération. En effet, l’électorat démocrate est généralement plus jeune que l’électorat républicain. De plus, à travers sa stratégie de faire d’Internet le cœur de sa campagne, Obama affiche sa volonté de cibler un électorat relativement jeune. Or, les jeunes sont bien plus impliqués sur Internet, d’où cette formidable dynamique. Obama va plus loin dans sa stratégie de séduction des jeunes en adoptant régulièrement une rhétorique humoristique, fortement inspirée d’Internet. On se souvient alors de cette réplique qu’il a lancé lors du troisième débat télévisé face à Mitt Romney : « Les années quatre-vingt viennent d’appeler, elles veulent récupérer leur politique étrangère »5 . !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Cf. en annexe le logo en question suivi de diverses reprises. 2 VASQUEZ-PARRA Adeline, La stratégie du réseau social pendant la campagne présidentielle de Barack Obama, op. cit. 3 Cf. copies écran en annexe. 4 VERGNIOLLE DE CHANTAL François, op. cit. 5 COSTA Elise, Barack Obama, le seul président de l'internet, www.leplus.nouvelobs.com, novembre 2012.
  • 25. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 25 Autre élément important, le soutien affiché de nombreuses célébrités, notamment afro- américaines. On pourrait alors citer la présentatrice Oprah Winfrey, élue en 2013 par le magazine Forbes et pour la deuxième année consécutive, personnalité la plus influente des États-Unis. Présente à plusieurs reprises lors de meetings, des photos d’elle et du candidat font le tour du web1 . Des chercheurs estiment à un million le nombre de votes gagnés par Obama grâce à la présentatrice2 . Autre personnalité, le chanteur Will I Am, qui écrit même une chanson de soutien au président, chanson qu’il diffuse sur Internet3 . Le couple de chanteurs Jay-Z et Beyoncé4 , dont la popularité outre-manche n’est plus à prouver, est également proche du candidat. Obama cultive une image d’homme relativement simple, ‘cool’. De nombreux clichés allant dans ce sens sont désormais célèbres5 . Cette stratégie d’image ajoutée au soutien des ‘peoples’ fait que sa popularité augmente en flèche, notamment chez les jeunes. Internet joue ici un rôle important en tant que véhicule de ces clichés, qui ne font que renforcer l’image d’Obama ainsi que sa côte de popularité. « L’audace de l'espoir. Voilà le meilleur de l'esprit américain ; avoir l'audace de croire, malgré toutes les indications contraires, que nous pouvions restaurer un sens de la communauté au sein d'une nation déchirée ; l’audace de croire que, malgré les revers personnels, la perte d’un emploi, un malade dans la famille ou une enfance empêtrée dans la pauvreté, nous avions quelque emprise - et par conséquent, une responsabilité - sur notre propre destin », Barack Obama6 . !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Cf. photos en annexe. 2 GARTHWAITE Craig, MOORE Tim (2008), The Role of Celebrity Endorsements in Politics: Oprah, Obama, and the 2008 Democratic Primary, University of Maryland. 3 Vidéo « Yes we can », disponible sur YouTube est vue plus de 25 millions de fois. 4 Cf. photo en annexe. 5 Cf. quelques photos en annexe. 6 OBAMA Barack, L’audace d’espérer, Presses de la Cité, 2007, 372 p., p. 356.
  • 26. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 26 Deuxième partie : analyse de la campagne de François Hollande 2012 I - Contexte Le 16 octobre 2011, François Hollande remporte la primaire socialiste avec 56,57% des voix face à Martine Aubry (43,43%) et devient le candidat officiel du Parti Socialiste à la présidentielle de 2012. Cette primaire était d’ailleurs innovante puisque c’était la première fois qu’elle n’était pas réservée aux militants mais ouverte à chaque citoyen se reconnaissant « dans les valeurs de la gauche et de la République »1 . Comme Barack Obama, François Hollande faisait initialement office d’outsider. En effet, un an avec la primaire, Martine Aubry et surtout Dominique Strauss-Kahn avaient la faveur des sondages. Mais le 14 mai 2011 éclate le scandale du Sofitel, écartant irrémédiablement Strauss-Kahn de la course. À présent, la campagne présidentielle de 2012 est marquée par la crise économique. Après une première fois en 2008, la France entre une seconde fois en récession fin 2011. Si la situation de la France est inquiétante, c’est surtout de la situation européenne dont il s’agit avec des pays comme la Grèce, l’Espagne ou encore l’Italie qui sont encore davantage en difficulté. Ainsi, à quelques mois de la présidentielle, les principales préoccupations des français sont toutes d’ordre économique, à savoir l’emploi (45%), le pouvoir d’achat (36%) et les retraites (32%)2 . Ce climat rend les français « particulièrement critiques à l’égard de la classe politique et désillusionnés sur le pouvoir des hommes politiques face à la finance internationale »3 . Dès lors, l’exécutif et donc Nicolas Sarkozy se retrouvent en première ligne face aux critiques. De fait, en décembre 2011, François Hollande arrive en tête des souhaits de victoire avec 27%, contre 20% pour Nicolas Sarkozy. Autre chiffre intéressant, 56% des français expriment de l’inquiétude vis-à-vis du Président sortant tandis que 58% considèrent que !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Cf. la « Charte d'adhésion aux valeurs de la gauche », que les électeurs devaient signés en bureau de vote pour pouvoir participer à cette primaire. 2 Sondage CSA / BFM TV / RMC / 20 Minutes, Les préoccupations des Français, le contexte économique et financier et les intentions de vote pour 2012, novembre 2011. 3 BRÉCHON Pierre, Questions à Pierre Bréchon, dans dossier L'élection présidentielle française de 2012, www.ladocumentationfrancaise.fr, avril 2012.
  • 27. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 27 François Hollande comprend les problèmes des français1 . En terme d’image, on s’aperçoit ainsi que François Hollande a un avantage certain sur Nicolas Sarkozy. La campagne va d’ailleurs reposer essentiellement sur « le rejet de Nicolas Sarkozy »2 . Sentiment partagé par Francis Poézévara qui nous indiquait que la présidentielle française de 2012 a été une campagne « contre Sarkozy ». II - Le Parti Socialiste et l’inspiration américaine ! En 2006, à l’aube de la présidentielle française de 2007, la candidate du Parti Socialiste Ségolène Royal met en place une plateforme web « Désirs d’avenir », qui se présente comme un « laboratoire d’idées, citoyen et participatif »3 . Par la suite, l’ex-candidate déclarait : « oui, j'ai inspiré Obama et ses équipes nous ont copiés »4 et rappelait qu’Obama avait envoyé une équipe à Paris afin d’étudier le fonctionnement de cette plateforme. La France serait-elle donc en avance sur les États-Unis en terme de stratégie électorale ? Cela paraît peu crédible tant les « États-Unis ont clairement une longueur d’avance »5 . Plus tard, l’ex-candidate aurait d’ailleurs fait machine arrière en indiquant qu’elle avait ainsi « répondu de façon humoristique », avant de poursuivre et d’affirmer à contrario que « sur la campagne et l'utilisation d'Internet, c'est sans doute nous qui aurons à nous inspirer de Barack Obama, et peut-être même, ici ou là, à le copier »6 . Quoi qu’il en soit, l’objet n’est pas ici de se lancer dans une opération de fact-checking afin de vérifier si Ségolène Royal a effectivement inspiré Obama. En revanche, il est question de déterminer dans quelles mesures, au-delà de la thématique commune du changement, peut-on faire un rapprochement entre les méthodes de stratégie électorale de Barack Obama et de François Hollande. Dès lors, deux acteurs ont leur importance. Il s’agit de l’agence américaine Blue State Digital et de la startup française Liegey Muller Pons. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Enquête TNS Sofres / TriÉlec de décembre 2011. 2 ROUCHEUX Marion, interview de Luc Rouban, dans Enjeux de la présidentielle 2012 : « 30% des électeurs restent sceptiques », www.terrafemina.com, février 2012. 3 www.desirs-davenir.eu 4 CYPEL Sylvain, Ségolène Royal : « J'ai inspiré Obama et ses équipes nous ont copiés », www.lemonde.fr, janvier 2009. 5 D’après Francis Poézévara qui rejoint ainsi Philippe Riutort. 6 Obama « inspiré » par Royal : c'était de l'humour, explique la socialiste, www.lemonde.fr, janvier 2009.
  • 28. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 28 Blue State Digital Créée en 2004 par Joe Rospars, Jascha Franklin-Hodge, Clay Johnson et Ben Self, « quatre anciens employés de la campagne de Howard Dean »1 , Blue State Digital est une agence de stratégie digitale. Son credo, « build and galvanize communities »2 . Parmi ses clients, on retrouve en premier lieu le Parti Démocrate américain, mais également des organisations sans but lucratif (Partners in Health, National Association for the Advancement of Colored People) ou encore de grandes entreprises (Google, Ford, Vogue). Les outils numériques politiques que l’agence a développés lui ont permis de devenir l’un des leaders mondial en terme de stratégie digitale. Dès 2004, l’agence, suite à l’inspiration d’Howard Dean, lance une campagne visant à réintroduire les citoyens au cœur du mouvement politique. « We’ve just finished working our hearts out for the Howard Dean campaign, where our candidate had an idea we loved: to run a campaign that would bring people back to the political process by asking them to take ownership of it. And we found a way to do it—by building up an email list and asking people to invest in a grassroots organization, $5 or $10 at a time »3 . Si cette campagne s’est avérée être un échec, la dynamique était quand à elle bien lancée. En février 2005, Howard Dean prend la tête du Parti Démocrate et entame d’importants changements structurels. Ainsi, il embauche deux des quatre fondateurs de Blue State Digital, à savoir Joe Rospars en tant qu’Internet Director et Ben Self en tant que Technology Director. Cette collaboration permettra la création d’outils numériques qui s’avèreront déterminants quelques années plus tard et notamment lors de la campagne victorieuse de Barack Obama : Party Builder, l’héritier de MyBO et Catalist, la base de données. De cette manière, Blue State Digital – qui « a joué un rôle dans la rénovation du parti et dans la diffusion des nouvelles techniques de campagne à l’intérieur du camp démocrate »4 – apparaît, nous l’avons dit, « comme la figure de proue du mouvement ». !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 PÈNE Clémence, op. cit. 2 www.bluestatedigital.com 3 Our Story, www.bluestatedigital.com 4 PÈNE Clémence, op. cit.
  • 29. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 29 Mais qu’en est-il de l’influence de Blue State Digital sur la campagne de François Hollande ? Tout d’abord, Francis Poézévara nous apprend qu’ « en 2008, une équipe de socialistes a été envoyée sur place pour observer la campagne d’Obama ». À son retour, convaincue de la force de cette stratégie électorale, cette équipe aurait milité pour l’adoption d’une stratégie similaire. Des liens se sont alors créés entre le Parti Socialiste, le Parti Démocrate et donc Blue State Digital. À cet égard, il convient de souligner le rôle du think tank français Terre Nova, proche du Parti Socialiste, qui a notamment invité, en 2009, Howard Dean pour deux séminaires révélateurs : « Le modèle Obama » et « Les rapprochements entre la gauche américaine et la gauche française »1 . En décembre 2011, Vincent Feltesse, alors responsable de la campagne web de François Hollande, se rend à New-York pour rencontrer les fondateurs de Blue State Digital, les « Obama Boys »2 . Des échanges réguliers ont alors lieu entre l’agence américaine et les équipes de François Hollande. Fin janvier 2012, soit quelques mois avant l’élection, ces échanges se matérialisent par la venue de plusieurs membres de Blue State Digital à Paris, dans les locaux de campagne du candidat socialiste. Parmi les membres de cette « big team », selon les dires de Steve Jacobs, expert en stratégie de communication online, on retrouve Ryan Davis, responsable des réseaux sociaux d’Obama en 2008, Sam Jeffers, directeur stratégique de Blue State Digital. Quelques jours auparavant, c’était Matt Ipcar, designer du site de campagne de Barack Obama, qui prodiguait ses conseils. Début février, Joe Rospars, l’un des co-fondateurs, s’est à son tour rendu auprès des équipes de François Hollande. Ces nombreux échanges avaient pour objectif de partager les « best practices » américaines, qu’il s’agisse de la rédaction des e-mails, de l’utilisation des réseaux sociaux ou encore de l’optimisation du site participatif de François Hollande, www.toushollande.fr, lui-même largement inspiré par le site de Barack Obama www.mybarackobama.com. Tous ces conseils visent à optimiser l’utilisation du Web dans une logique de mobilisation, dans une logique terrain. En effet, « en 2008, Obama a gagné parce qu’il a su utiliser l’outil numérique pour organiser et mobiliser ses troupes »3 dixit Vincent Feltesse. C’est ainsi qu’entre en jeu le second acteur sur lequel il convient à présent de nous arrêter. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 BAROTTE Nicolas, Quand le Parti socialiste se met à l'heure d'Obama, www.lefigaro.fr, avril 2009. 2 HACQUEMAND Eric, Les spécialistes du Net d'Obama conseillent Hollande, www.leparisien.fr, janvier 2012. 3 HACQUEMAND Eric, op. cit.
  • 30. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 30 Liegey-Muller-Pons, les « Bostoniens » En 2008, Guillaume Liegey, Arthur Muller et Vincent Pons se rencontrent à Boston. Ils sont tous les trois militants du Parti Socialiste à la section bostonienne. Le premier, diplômé d’HEC, poursuit ses études à Harvard. Les deux autres, amis d’enfance, sont normaliens. Arthur Muller est également à Harvard tandis que Vincent Pons étudie au MIT. Tous trois « passionnés de politique et de nouvelles technologies »1 , ils se prennent d’intérêt pour la campagne de Barack Obama. Arthur Muller a même participé à la campagne de porte- à-porte. Si, en France, « les médias insistaient surtout sur l’usage inédit du numérique dans cette campagne », les trois jeunes amis présents sur place sont surtout marqués par « le retour à des techniques militantes « classiques », principalement le porte-à-porte »2 . Lors de cette campagne, ils ont également eu l’opportunité de rencontrer certains cadres de l’équipe de campagne de Barack Obama. De cette expérience, ils ont ensuite eu l’envie de déployer ce type de pratiques en France. « Nous ne pouvions pas rentrer comme si rien ne s’était passé », confessent-ils3 . À leur retour en France, ils suscitent l’intérêt de Jean-Paul Huchon, l’actuel président de la région Ile-de-France. Ainsi, lors des élections régionales de 2010, ils engagent « une étude, construite sur une démarche scientifique, qui consistait à analyser l’impact du porte-à- porte dans 8 zones de l’Île-de-France »4 . Ils réussissent alors à démontrer la plus-value de cette méthode. En 2011, ils se retrouvent engagés dans l’équipe de campagne de François Hollande avec la mission d’organiser et de piloter la campagne terrain de porte-à-porte. L’objectif ? Avant le 22 avril 2012, soit la date du premier tour, « ouvrir entre 5 et 12 millions de porte »5 , dixit Vincent Feltesse – le responsable de la campagne numérique de François Hollande. Guillaume Liegey, Arthur Muller et Vincent Pons se retrouvent ainsi à la tête d’une équipe composée « d’une quinzaine de personnes à Paris, 120 formateurs nationaux, 6000 mobilisateurs dans les sections et 80 000 volontaires »6 . Pour atteindre cet objectif, l’appui d’Internet est nécessaire. Dès lors, ils participent à la création du site www.toushollande.fr7 , !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Qui sommes-nous ?, www.liegeymullerpons.fr 2 Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, www.politic-arts.fr, juin 2014. 3 ROTMAN Charlotte, Europe ? Yes, we can, www.liberation.fr, mai 2014. 4 Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, op. cit. 5 HACQUEMAND Eric, op.cit. 6 Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, op. cit. 7 Cf. capture écran du site en annexe.
  • 31. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 31 lancé en février 2012. Ce « site de mobilisation » est alors défini comme « une machine destinée à tous ceux qui ont envie que ça change »1 et vise à soulever des fonds (si Obama avait systématiser les petits dons – trois dollars minimum –, Hollande en a fait de même – à partir de deux euros –, calquant ainsi le « modèle Téléthon ») mais aussi et surtout, à travers le module « Mobilisation 2012 », à « faciliter tout ce qui était reporting de porte-à-porte »2 . En effet, chaque volontaire pouvait ainsi « donner les statistiques sur son dernier porte-à- porte, raconter sa rencontre en appartement ou encore importer la liste des emails récoltés »3 . Au final, cinq millions de portes ont été ouvertes. La plus-value électorale de cette opération s’élève à « l’ordre de 2.7 à 3.1 points »4 . Ces résultats sont calculés en étudiant la différence entre les bureaux de vote prioritaires couverts par le porte-à-porte et les bureaux de vote prioritaires non couverts. Les abstentionnistes étaient particulièrement ciblés. Or, il s’avère que le porte-à-porte est le moyen le plus efficace pour réussir à remobiliser ces personnes là. Rappelons que près de trois millions de citoyens ne sont pas inscrits sur les listes électorales, ce qui représente 7% de la population en âge de voter. De plus, il s’avèrerait qu’une majorité de cette population aurait tendance à voter à gauche. Il s’agit donc d’un réel enjeu stratégique pour le Parti Socialiste. Ainsi, au premier tour, cette différence est de 3.1% tandis qu’au second tour, elle s’élève à 2.7%. Pour le second tour, ces 2.7% correspondent ainsi à 280 000 voix, soit un quart de l’écart entre François Hollande et Nicolas Sarkozy5 . Autre fait intéressant, cette opération a fait perdre 3.3 points à Marine Le Pen. En effet, 20% des électeurs potentiels (sur les cinq millions de portes ouvertes) du Front National, soit 100 000 citoyens, ont été convaincus de ne pas voter pour la candidate et ont reporté leur voix sur François Hollande. Le porte-à-porte, un moyen efficace de lutter contre la montée des extrêmes ? C’est tout à fait envisageable même si ça mérite d’être vérifié lors des élections à venir. Cela étant, pour en revenir à François Hollande, nous ne pouvons pas dire que le porte- à-porte l’ait fait gagner. Porte-à-porte ou pas, le candidat socialiste aurait quoi qu’il arrive gagné les élections présidentielles. Pour autant, l’influence de cette méthode de stratégie électorale reste importante. Cette opération s’est avérée être un réel succès. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 LÉCHENET Alexandre, Avec son nouveau site, François Hollande veut ouvrir 5 millions de portes, www.lemonde.fr, février 2012. 2 Entretien avec Francis Poézévara. 3 LÉCHENET Alexandre, op. cit. 4 Liegey-Muller-Pons : rénover le militantisme avec le numérique, op. cit. 5 Les nouvelles technologies sauveront-elles la politique ?, conférence de Francis Poézévara et Siméon Starck (Liegey Muller Pons), Sorbonne-Nouvelle, 22 janvier 2015.!
  • 32. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 32 Forts de cette expérience, les trois « Bostoniens » ont alors décidé de poursuivre cette démarche et cette aventure collective. En 2012, ils ont ainsi créé Liegey Muller Pons, le « premier cabinet de conseil en stratégie électorale en France »1 . Cette création s’accompagne de la publication de leur ouvrage Porte-à-Porte, reconquérir la démocratie sur le terrain2 . Ils y retracent l’opération de porte-à-porte lors de la campagne de 2012, soit « la plus grande campagne de terrain jamais organisée en Europe ». De plus, ils s’attachent à démontrer comment le porte-à-porte, optimisé grâce à l’apport des nouvelles technologies, peut apporter des solutions à certains « dysfonctionnements de notre démocratie » 3 , principalement l’abstention et le manque de mobilisation citoyenne. Pour ce faire, ils ont développé un outil numérique visant à optimiser les campagnes de porte-à-porte : le « Cinquante plus 1 ». Ce dernier, qui s’inspire du logiciel américain Dashboard, permet d’analyser un certain nombre de données géolocalisées, de cibler les zones prioritaires grâce à un modèle prédictif, d’organiser les actions de terrain ou encore de dialoguer avec les électeurs4 . Depuis le lancement de cet outil, 67 équipes de campagne l’ont utilisé en vue des élections municipales de 2014 (exclusivement dans des villes de plus de 5 000 habitants), dont l’équipe de l’actuelle Maire de Paris Anne Hidalgo. Selon toute vraisemblance, cet outil devrait être utilisé par le futur candidat socialiste aux présidentielles de 2017. III – Spécificités françaises Nous venons de le voir, la campagne de François Hollande s’est concrètement inspirée de certaines méthodes utilisées par Obama et ses équipes quatre ans auparavant. Pour autant, certains facteurs différenciant entrent en jeu et nécessitent d’être soulevés. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 LIEGEY Guillaume et MULLER Arthur, Comment gagner une élection aujourd’hui ?, www.femmesetpouvoir.fr, 2013. 2 LIEGEY Guillaume, MULLER Arthur et PONS Vincent, Porte-à-Porte, reconquérir la démocratie sur le terrain, Calmann-Lévy, 2013, 350 p. 3 Notre livre, www.liegeymullerpons.fr 4 Cf. le document de présentation du logiciel en annexe.
  • 33. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 33 Facteurs juridiques Suite à mes échanges avec Camille P., experte en stratégie électorale, il apparaît effectivement que certaines lois françaises ne permettent pas d’aller aussi loin que les américains, notamment dans le traitement des données personnelles. En effet, l’article 8 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés stipule notamment qu’il « est interdit de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci »1 . Par rapport aux équipes d’Obama qui pouvaient jouir de la base de données Catalist qui pouvait comprendre jusqu’à 600 informations pour une seule et même personne, en France, la juridiction limite grandement la marche de manœuvre. Cela étant, les primaires avaient permis au Parti Socialiste de récupérer un nombre importants de contacts et de « constituer un fichier de près de 500.000 sympathisants »2 . Dès lors, l’UMP avait saisi la CNIL afin de dénoncer cette collecte de « données à caractère personnel qui font apparaître (...) des opinions politiques », d’après l’élu UMP Arnaud Julien3 . Pour autant, la loi stipule que cette collecte peut avoir lieu s’il y a eu consentement de la part des citoyens, ce qui était le cas. Le recours de l’UMP n’avait alors pas abouti. Pour autant, suite aux multiples pressions de l’UMP, le PS a détruit les données récoltées à l’issue de l’investiture. Toutes ces données n’ont donc pas pu être réutilisées lors de la campagne présidentielle. Francis Poézévara indique dès lors que l’utilisation des données en France « reste anecdotique par rapport aux États-Unis ». En effet, les « seules données en France, c’est soit au niveau du bureau de vote!pour tout ce qui est électoral, soit les données INSEE ». Ce sont donc des données accessibles à tous. Autre loi importante, la loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative à « la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques »4 , dite « loi Rocard ». Ainsi, lorsqu’Obama levait 742 millions de dollars pour sa campagne en 2008, !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 www.legifrance.gouv.fr 2 BAROTTE Nicolas, François Hollande tisse son réseau sur Internet, www.lefigaro.fr, décembre 2011. 3 LAURENT Samuel, Les accusations de l'UMP contre la primaire PS sont-elles fondées ?, www.lemonde.fr, juin 2011. 4 www.legifrance.gouv.fr!
  • 34. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 34 Hollande dépensait, en 2012, un peu moins de 22 millions d’euros. La différence est tout de même considérable, bien que la taille des deux pays ait son importance. Forcément, les moyens d’action ne sont pas comparables. Par exemple, lorsque le budget consacré à la campagne web d’Obama (porte-à-porte compris) était de 300 millions de dollars (soit environ 230 millions d’euros, ce qui représente approximativement 30% du budget global de la campagne), ce budget n’était que de deux millions d’euros pour François Hollande, soit environ 10% du budget total de la campagne. Enfin, cette loi interdit également aux partis politiques tout achat d’espaces publicitaires dans les médias, contrairement aux États-Unis. Si dans le cadre de ce mémoire, cela ne revêt pas d’importance particulière, il fallait tout de même le souligner. En résumé, concernant ces législations, Francis Poézévara concédait qu’ « en France, on a plus de contraintes ; donc à la fois c’est plus bloquant, mais d’un autre côté, ça oblige à jouer un peu plus et à trouver des choses innovantes ». Pour autant, on ne peut pas réellement dire que les campagnes françaises soient particulièrement innovantes. Les méthodes traditionnelles (meetings, plateaux télévisés, etc) restent fortement ancrées et l’insertion progressive des nouvelles technologies s’opère avec un retard certain sur les États- Unis. Analyse des résultats du questionnaire « Les français et la politique » Avant toute chose, il convient de souligner quelques biais de ce questionnaire. Tout d’abord, il a été administré via Internet. De ce fait, les personnes ayant participé sont en grande majorité des internautes confirmés. De plus, la population n’est pas réellement représentative dans le sens où elle est majoritairement jeune (moins de 30 ans) et étudiante. Cela étant, de ces 170 réponses ressort tout de même des éléments intéressants1 . En effet, ce questionnaire permet notamment de mettre en lumière certaines caractéristiques de l’électorat jeune et peut donc apporter quelques éléments quant à l’évolution de certaines pratiques politiques. Pour cette analyse, j’ai ciblé certaines questions pour lesquelles j’ai comparé les résultats entre les personnes de moins et de plus de trente ans. Tout d’abord, concernant l’intérêt à la politique, on constate que les résultats sont relativement similaires. En effet, si 64% des personnes de plus de trente ans considèrent la !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 Voir le résumé global des 170 réponses en annexe.
  • 35. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 35 politique comme quelque chose d’important, voire même en sont passionnés, ce même résultat s’élève à 60% chez les moins de trente ans. Ces résultats ne vont donc pas dans le sens du baromètre CEVIPOF de janvier 2015 selon lequel 58% des français se disent « pas intéressés » par la politique. Les biais que je soulignais entrent dès lors probablement en considération. Ensuite, concernant le média privilégié en terme d’information politique, on remarque que pour 50% des moins de 30 ans, il s’agit d’Internet. Les trentenaires révolus sont quant à eux 36% à privilégier la Toile pour s’informer en politique. Si les scores de la télévision et de la presse sont quasiment similaires, c’est au niveau de la radio que les résultats sont plus significatifs. En effet, 19% des plus de trente ans font de la radio leur média de prédilection, contre seulement 8% pour les moins de trente ans. Selon Francis Poézévara, « la télévision reste le média le plus important en politique », notamment au travers d’émissions comme Des paroles et des actes sur France 2, ou encore le grand débat d’entre-deux tours. Pour autant, Internet tend progressivement à devenir le média de référence en terme d’information. Après, information ne signifie pas influence. Il faudra peut-être distinguer ces deux dimensions. Concernant l’utilisation des données personnelles, on remarque que les moins de trente ans sont plus enclins à permettre leur traitement en contrepartie d’une communication plus ciblée et en adéquation avec leurs attentes et préoccupations politiques (36%, contre 23% pour les plus de trente ans). C’est un élément qui peut paraître surprenant tant on connaît la propension de la jeunesse à s’opposer à toute démarche potentiellement liberticide. Or, le récent débat sur la loi de renseignement a souligné la question épineuse de la collecte et du traitement des données personnelles. À présent, on constate également que 46% des plus de trente ans souhaiteraient s’engager plus activement auprès du candidat qu’ils soutiennent, ce qui semble considérable et ouvre des perspectives, notamment pour des opérations de porte-à-porte où le besoin en volontaires est important. En revanche, seuls 28% des moins de trente ans partagent ce sentiment. Pour ce qui est de l’utilisation des réseaux sociaux, on relève sans surprise que les moins de trente ans y passent plus de temps (96% y vont au moins une fois par jour). Néanmoins, ce chiffre est également élevé chez les plus de trente ans et atteint les 76%, preuve que les réseaux sociaux sont désormais utilisés par une très grande majorité de la
  • 36. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 36 population. Sur les réseaux sociaux, 41% des moins de trente ans partagent de l’information à caractère politique au moins de temps en temps, contre 50% pour les plus de trente ans. Si les plus de trente ans partagent plus de contenus, ils débattent également davantage de questions politiques que les moins de trente ans (35% contre 29%). Pour ce qui est de la pratique du porte-à-porte, sur les 170 réponses, nous avons une égalité parfaite. 50% approuvent cette démarche et prennent alors le temps de discuter avec les militants tandis que l’autre moitié des répondants se trouve quant à elle importunée. En revanche, on constate une disparité entre les plus et les moins de trente ans. En effet, si 59% des plus de trente ans répondent positivement au porte-à-porte, les moins de trente ans sont moins enthousiastes et se trouvent donc majoritairement importunés (54%). Quoi qu’il en soit, les résultats du porte-à-porte sont plus satisfaisants que ceux de la pratique du mailing, appréciée par seulement 24.1% des répondants. Pour conclure, nous pouvons relever que 78.2% favoriseraient un activisme communautaire au détriment d’un activisme politique. Ce résultat permet de souligner l’aspect stratégique de la démarche de Barack Obama et ses équipes, à savoir de mener une campagne politique sur un mode davantage communautaire que politique. Enfin, il est également intéressant de constater qu’en France, la plateforme www.mybarackobama.com est plus connue que la plateforme www.toushollande.fr (25.9% contre 15.9%, soit tout de même dix points d’écart).
  • 37. Master 1 Information et Communication Université Sorbonne-Nouvelle – Année universitaire 2014-2015 37 Conclusion « Une élection, c’est une mini-PME et surtout pas une multinationale », Jacques Séguéla1 . Ces propos de Jacques Séguéla, publicitaire et communicant influent, peuvent ici être quelque peu contredit concernant la campagne de Barack Obama. Par multinationale, il faut entendre bien évidemment la dimension quantitative, et non internationale à proprement parler. En effet, Obama a mobilisé autour de lui un nombre extraordinaire de personnes. S’il y avait forcément une équipe plus restreinte en amont, il y avait tout de même 2 700 salariés qui couvraient le pays, accompagnés de 5 000 bénévoles, dans le but de former les militants. Rappelons que le nombre total de militants est estimé à 1.2 millions, d’où l’utilisation du terme d’ « armée militante ». Concernant la campagne de François Hollande, ces propos s’avèrent davantage pertinents. Ne serait-ce qu’en terme de moyens, financiers et humains, la « disproportion entre la multinationale Obama et la PME Hollande »2 est flagrante. À présent, rappelons brièvement les caractéristiques de la campagne de Barack Obama. Tout d’abord, on retrouve l’importation des codes de la mobilisation communautaire en politique. Obama, en tant qu’ancien organisateur communautaire, adopte la stratégie de mener une campagne de cause sociale, en l’occurrence le changement. Ce type de mobilisation est alors caractérisé par les aspects suivants : sensibilisation, organisation et mobilisation et pour finir, action / réaction. C’est ainsi que cette mobilisation d’abord militante, s’est ensuite muée en mobilisation électorale. Les observateurs parlaient alors d’une « formidable revitalisation citoyenne ». Autre caractéristique centrale, l’explosion du financement. Comme nous l’avons vu, en seulement quatre ans, le financement total de la campagne américaine a été multiplié par deux. Enfin, la dernière caractéristique centrale réside bien évidemment dans l’utilisation transversale d’Internet. Internet a effectivement été le liant entre toutes les autres caractéristiques précédemment nommées et jouait, avant toute !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 SEGUELA Jacques, « Internet dessert la politique », L’Express, Immédias n°6, mars 2012, 23:54 minutes. Il convient de préciser que Jacques Séguéla a travaillé sur 20 campagnes présidentielles à travers le monde, dont 19 victorieuses. En France, il a été le conseiller de François Mitterrand et est à l’origine du slogan « La force tranquille » ; puis de Lionel Jospin (son unique défaite). A l’étranger, il a travaillé pour Ehud Barak en Israël, Ricardo Lagos au Chili, Aleksander Kwasniewski en Pologne, Janesz Drnovsek en Slovénie ou encore pour Simeon II en Bulgarie. 2 HACQUEMAND Eric, op.cit.