1. 1/61
Blog Déjà Vu
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Les origines d’un “genre immonde”,
le cinéma de nazisploitation
Patrick Peccatte
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Séminaire
Cinémas de genre :
formes, usages, étiquetages
12 janvier 2018
IRCAV
Institut de recherche sur le cinéma et
l'audiovisuel
Université Sorbonne Nouvelle
Paris 3
2. 2/61
Nazisploitation, selon Wikipedia/FR
●
« La nazisploitation ou nazi porn est un type de film
d'exploitation et de sexploitation incluant des nazis
commettant des actes criminels de nature sexuelle,
souvent dans des camps de concentration. La majorité de
ces films met en scène des femmes en prison, souvent
dans des camps d'extermination ou des maisons closes
nazies, avec des traits sadique et gore. »
●
« Selon Fabrice d'Almeida, le film initiateur du genre serait,
après Portier de nuit de Liliana Cavani (1973), Ilsa, la louve
des SS de Don Edmonds (1975). Des producteurs
européens, majoritairement d'Italie, ont ensuite produit une
douzaine de films similaires. »
3. 3/61
Références limitées à deux films
Portier de nuit [Il Portiere di notte], Liliana Cavani, 1974 Ilsa, She Wolf of the SS [Ilsa la louve des SS],
Don Edmonds, 1974
4. 4/61
Nazisploitation, selon Wikipedia/EN
●
« The most infamous and influential title (which set the
standards of the genre) is a Canadian production, Ilsa, She
Wolf of the SS (1974). Its surprise success and sequels led
European film-makers, mostly in Italy, to produce dozens of
similar films. »
●
« In Italy, these films are known as part of the "il
sadiconazista" cycle, which were inspired by such art-
house films as Liliana Cavani's The Night Porter (1974),
Pier Paolo Pasolini's Salò, or the 120 Days of Sodom
(1975), and Tinto Brass's Salon Kitty (1976). »
5. 5/61
Deux autres films mentionnés...
Salò o le 120 giornate di Sodoma [Salò ou les 120 Journées de
Sodome], Pier Paolo Pasolini, 1975
Salon Kitty, Tinto Brass, 1976
6. 6/61
Nazisploitation, selon les critiques
(à l’occasion de la ressortie de Portier de Nuit en 2011)
●
« Portier de nuit a inauguré toute une vague répugnante de
nazisploitation, de porno-nazi, notamment Ilsa, la louve des
SS, film érotique sadomaso et fétichiste de très mauvais
goût entre les prisonniers et les officiers d’un camp de
concentration. »
Jean-Nicolas Berniche, Grand Écart, 12/11/2011
●
« Si Portier de nuit a été classé X aux États-Unis, et s’il a
fortement contribué à la vague du "porno nazi" qui sévit
dans les années 1970, ce n’est pas sans raison. »
Anne-Violaine Houcke, Critikat, 2/10/2012
7. 7/61
Nazisploitation, selon les critiques
(en 2017)
●
« La Nazisploitation est un courant limité à quelques films
apparus dans le sillage de Salo, les 120 journées de
Sodome de Pier Paolo Pasolini, Portier de nuit de Liliana
Cavani, et de Salon Kitty de Tinto Brass. »
kinoscript, 5 mars 2017
●
« Durant les années 70, et assez précisément entre 76 et
79 éclot en Italie une vague de films initiant la
nazisploitation locale. Celle-si se fait en réaction à la sortie
du film Ilsa la Louve des SS, un film américain de Don
Edmonds sorti en 1975. »
faispasgenre.com, 23 mars 2017
8. 8/61
Bilan de ces définitions et références
●
Erreurs
✔
aucun des films mentionnés n’est initiateur du genre
✔
Salò n’est pas un film sur les nazis
●
Simplifications
✔
toujours les mêmes films mentionnés
●
Approximations
✔
Assimilation entre nazisploitation et nazi sexploitation
✔
les films de nazisploitation ne sont pas uniquement italiens et
américains
●
Et surtout :
aucune approche historique, aucune contextualisation,
aucune référence à d’autres médias qui ont diffusé une
imagerie similaire
9. 9/61
Une petite parenthèse justificatrice
ou comment je me suis intéressé à ce sujet
(et pour ne pas laisser croire que je suis fan de ce type de cinéma...)
●
À l’occasion de recherches en culture visuelle, j’ai effectué plusieurs
investigations sur les premiers comic books et les illustrations des pulp
magazines [périodiques bon marché édités à partir de la fin du 19ème
siècle]...
●
… et découvert les Men’s adventure magazines (1950-1975),
considérés comme les derniers des pulps, qui figuraient très souvent
des nazis sadiques.
●
Un question s’est alors posée : quels étaient les rapports entre cette
imagerie et les affiches de films de nazi sexploitation que l’on pouvait
voir lorsque j’étais étudiant dans les années 1970 ?
●
(Parenthèse dans la parenthèse) : par ailleurs, je m’intéresse à
l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Plus précisément, je suis le
co-responsable du projet PhotosNormandie qui a pour objectif
d’améliorer les légendes de plus de 4700 photos et 300 films
historiques de la bataille de Normandie.
10. 10/61
L’étude du cinéma de nazisploitation
est un sujet sérieux…
(petite bibliographie universitaire)
●
Elizabeth Bridges (dir.), Kristin T. Vander Lugt (dir.), Daniel H. Magilow
(dir.), Nazisploitation!: The Nazi Image in Low-Brow Cinema and
Culture, Continuum Publishing Corporation, 2012
●
Graeme Krautheim, Desecration Repackaged: Holocaust Exploitation
and the Marketing of Novelty, Cinephile Volume 5 No. 1, Spring 2009
●
[Mesnard] Philippe Mesnard, Des affinités cinématographiques entre
sexe et nazisme, in Témoigner. Entre Histoire et Mémoire, n° 103
(avril-juin 2009) : Crimes et génocides nazis à l’écran
●
Marcus Stiglegger, Sadiconazista – Sexualität und Faschismus im
Film, St Augustin: Gardez! Verlag, 1999
●
Simon Whitechapel, Kamp Kulture: A History of Nazi Exploitation,
Creation Books, 2003
11. 11/61
Au menu...
●
Nazisploitation, nazi sexploitation, sadiconazista
●
Les premiers films
●
Les films italiens (sadiconazista)
●
Autres films (français, etc.)
●
Hybridation avec d’autres genres et films récents
●
Influences sur le cinéma mainstream
●
Les fumetti italiens et petits formats français (années 1970)
●
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
●
Les Stalag fiction en Israël (1961-1964)
●
Les récits pseudo-historiques et les romans érotiques (1950-1970)
●
Les comics américains (1940-1980)
●
Les pulp magazines durant la Seconde Guerre mondiale
●
Les Weird menace pulps avant la Seconde Guerre mondiale
Cinéma
Origines
Autres
médias
Par ordre
chronologique
Par ordre
chronologique
inverse
12. 12/61
Nazisploitation, nazi sexploitation, sadiconazista
●
Film d’exploitation (budget très réduit, faible qualité artistique)
✔
blackploitation, mexploitation, nunsploitation, sexploitation, shockexploitation…
✔
cannibales, WIP (Women in Prison), gore, splatter, slasher, giallo...
●
Sexploitation
✔
Films d’exploitation montrant des scènes de nudité et des situations sexuelles
●
Nazisploitation
✔
films d’exploitation mettant en scène des nazis et une imagerie nazie
✔
ils ne sont pas nécessairement axés sur des scènes sexuelles
●
Nazi sexploitation
✔
films de sexploitation mettant en scène des nazis et leurs victimes
(croisement des deux genres précédents)
●
Sadiconazista
✔
films de nazi sexploitation produits en Italie et en italien dans les années 1970-1980
L’exposé traitera essentiellement des deux derniers genres
13. 13/61
Les premiers films
Prémisses dans le cinéma mainstream (1948-1961)
Kapò, Gillo Pontecorvo, 1961 Les Fiancées d’Hitler [Lebensborn],
Werner Klingler, 1961
Women in the Night [aka When Men are Beasts],
William Rowland, 1948
Photogramme : Tala Birell and Beal Wong
14. 14/61
Les premiers films
Prémisses dans le cinéma mainstream (1963-1967)
Le Vice et la Vertu, Roger Vadim, 1963
[affiche américaine]
The Night of the Generals [La Nuit des généraux],
Anatole Litvak, 1967
15. 15/61
Les premiers films
Les premiers films de nazi sexploitation sont
américains (1969-1970)
Love Camp 7, Lee Frost, 1969 Torture Me, Kiss Me, David R. Friedberg, 1970
16. 16/61
Les premiers films
1973 - premier film hardcore, premier film non américain
Hitler’s Harlots, Hy Del, 1973
[couvertures de rééditions récentes]
Eine Armee Gretchen, Erwin C. Dietrich, 1973 (érotique)
Réalisateur suisse, en allemand.
Autres titres : Fraüleins in Uniform, Fraüleins Without a
Uniform, She-Devils of the SS, etc.
17. 17/61
Les premiers films
La série Ilsa (puis Greta), avec Dyanne Thorne
Seul le premier de la série est un film de nazi sexploitation
Ilsa, She Wolf of the SS
[Ilsa la louve des SS],
Don Edmonds, 1974
Ilsa, Harem Keeper of the Oil Sheiks
[lsa, gardienne du harem], Don
Edmonds, 1976
Ilsa, the Tigress of Siberia
[Ilsa, la tigresse du goulag], Jean
LaFleur, 1976 [affiche espagnole] Greta, Haus ohne Männer
[Ilsa, Ultime Perversion], Jesús
Franco, 1977
18. 18/61
Les premiers films - résumé
●
Prémisses - le cinéma mainstream habituel a parfois représenté
des relations sexuelles ambiguës ou de furtives scènes de
nudité dans des camps nazis
●
Excepté un seul (Eine Armee Gretchen, 1973), les premiers
films sont tous américains
●
Les "standards" de promotion de la nazisploitation (affiches et
extraits provocants, multiplicité des titres, usage de
pseudonymes pour les acteurs et réalisateurs, etc.) sont
apparus très tôt
●
La nazi sexploitation est un genre opportuniste, utilisant le
contexte nazi pour accentuer le choc des images sadiques et
érotiques proposées. Cette imagerie "immonde" (?) peut être
aisément remplacée par une autre comme les différentes suites
d’Ilsa le montrent.
19. 19/61
Les films italiens
Lager SSadis Kastrat Kommandantur [SS
Experiment Love Camp, SS Camp 5],
Sergio Garrone, 1976
Apogée de la production vers 1976-1977
Titres multiples
L’ultima orgia del III Reich [La ultima orgia
de la Gestapo, Last Orgy of the Third Reich,
Des filles pour le bourreau, Bourreaux SS],
Cesare Canevari, 1977
La svastika nel ventre [Nazi Love Camp
27], Mario Caiano, 1977
20. 20/61
Les films italiens
Portier de nuit [Il Portiere di notte], Liliana
Cavani, 1974
Trois films d’auteur déjà rencontrés…
Problème taxinomique : sont-ils réellement en
marge de la nazisploitation ?
Salò o le 120 giornate di Sodoma
[Salò ou les 120 Journées de Sodome],
Pier Paolo Pasolini, 1975
Rappel : pas de nazis dans ce film
Salon Kitty, Tinto Brass, 1976
21. 21/61
Autres films (français)
Bordel SS, José Bénazéraf, 1976,
avec Brigitte Lahaie
Les réalisateurs français de films
pornographiques ont également produits
quelques titres
Elsa Fräulein SS, Patrice Rhomm, 1977 Nathalie rescapée de l’enfer [Nathalie
Escape from Hell, Campo de perversion],
Alain Payet aka James Gartner, 1978
[affiche espagnole]
22. 22/61
Autres films (américains)
Prisoner of Paradise [Nazi Love Island], Bob
Chinn, 1980, avec John Holmes et Seka
Les derniers films américains du genre sont
explicitement pornographiques
Stalag 69, Selrahc Detrevrep (Perverted Charles à
l’envers), 1982, avec Angelique Pettyjohn (actrice
dans Star Trek) [couverture d’une réédition récente]
23. 23/61
Hybridation avec d’autres genres et films récents
Puppet Master III : Toulon's
Revenge, David DeCoteau,
1991
nazisploitation + horreur
Død snø [Dead Snow],
Tommy Wirkola, 2009
nazisploitation +
zombies/horreur Iron Sky, Timo Vuorensola,
2012
Nazis sur la Lune
Nazis at the Center of the
Earth, Joseph Lawson,
2012
The Black Gestapo
[Ghetto Warriors], Lee
Frost, 1975
nazisploitation +
blacksploitation
Films de nazisploitation
(pas de nazi sexploitation) :
Horreur, zombies, gore,
autres tropes SF
[nazis réfugiés en Amazonie,
nazis dans l’espace,
nazis au centre de la terre]
24. 24/61
Influences sur le cinéma mainstream
Indiana Jones and the Last Crusade, Steven Spielberg,
1989, Dr. Elsa Schneider (Alison Doody)
[femme fatale nazie, « version présentable d’Ilsa »
selon Alicia Kozm] Inglourious Basterds, Quentin Tarantino, 2009,
Aldo Raine sur le point de scarifier Hans Landa
Zwartboek [Black Book], Paul Verhoeven, 2006,
Carice van Houten and Sebastian Koch
25. 25/61
Les films de nazisploitation - résumé
●
Les films italiens sont apparus après les films américains.
Leur grand nombre explique probablement que l’on estime
parfois que le genre est essentiellement italien.
●
L’apogée du genre se situe vers 1976-1977, ce qui correspond à
la fin de la censure envers les films pornographiques
●
Quelques films d’auteurs se démarquent la cette production
pléthorique
●
Une production française a existé
●
Produits au début des années 1980, les derniers films de cette
époque sont explicitement pornographiques
●
Le genre a été hybridé avec d’autres films d’exploitation, puis
"moqué" à l’époque contemporaine
●
Certains thèmes du cinéma mainstream puisent leurs racines
dans les films de nazisploitation
26. 26/61
●
Ediperiodici est un éditeur italien de bandes dessinées (fumetti)
spécialisé dans le domaine érotique
●
Dans les années 1970, Ediperiodici se fait connaître avec des
titres comme Isabella, Lucifera, Maghella
●
Son concurrent Edifumetto publie Zora la Vampira, Jacula,
Zokia, etc.
●
Ces publications ont été adaptées en France par Elvifrance et
sont connues sous le nom de petits formats (PF pour les
collectionneurs)
●
En octobre 1970, donc bien avant les premiers films
sadiconazista, le dessinateur Nevio Zeccara crée pour
Ediperiodici le personnage de Hessa, une nazie combattante et
sadique, dont les aventures seront publiées sur 47 numéros
Origines – analyses d’autres médias
(par ordre chronologique inverse)
Fumetti italiens et petits formats français (années 1970)
27. 27/61
Fumetti italiens et petits formats français (années 1970)
Hessa #1, 1970 – Hessa #2, 1970 – Hessa #9 (édition espagnole), c. 1970
Goldrake Playboy #41, c.1970 – Goldrake Playboy #51, c. 1970 – Goldrake Playboy #64, c. 1970
Terror, I gemelli di Hitler, #100,
Ediperiodici, c. 1972
Shatane #11, La mousse tâche, Adolf,
Elvifrance, août 1977
Rare
adaptation
en
français
28. 28/61
●
Les pulp magazines (pulps) sont des périodiques bon marché, imprimés
sur du papier de mauvaise qualité (pulp), édités à partir de la fin du 19e
siècle. Ces magazines comportent des couvertures illustrées et des
dessins en pages intérieures.
●
Considérés comme les derniers des pulps, les Men’s adventure
magazines sont des publications périodiques destinées aux hommes et
publiées aux États-Unis, du début des années 1950 jusqu’au milieu des
années 1970 ; ils disparaîtront progressivement avec l’essor des
"magazines de charme".
●
Leurs titres comportent très souvent les mots Man ou Men:
Action for Men, All Man, For Men Only, Man’s Action, Man’s Life, etc.
●
Leurs couvertures étaient réalisées par des artistes peintres. Cela
permettait de mettre en scène des jeunes femmes dénudées, car le nu
en peinture bénéficiait d’une tolérance plus grande qu’en photo en raison
de la tradition de la peinture et de la sculpture classique.
●
Sujets de prédilection des Men’s adventure magazines:
histoires de femmes pirates, aventures exotiques, conflits avec des
tribus autochtones, luttes avec des animaux sauvages, actes de guerre
héroïques, récits de bataille, etc.
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
29. 29/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Story, September 1962 – All Man, December 1965 – Man’s Story, October 1969
Man’s Story, November 1962 – Wildcat Adventures, July 1963 – New Man, May 1965
Tortionnaires
nazis
30. 30/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Wildcat Adventures, February 1961 – Men Today, December 1961 – All Man, January 1962
Man’s Action, December 1963 – Man’s Epic, November 1965 – Man’s Book, April 1968
Tortionnaires
japonais
31. 31/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Story, March 1961
Tortionnaires russes,
chinois ou coréens,
cubains, vietnamiens
[Tous les ennemis des
États-Unis durant la
guerre froide]
Man’s Exploits, February 1963
Man’s Story, June 1966
Real Men, January 1973
32. 32/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Daring, January 1962 – Men Today, February 1963 – Man’s Action, May 1963
Men Today, June 1961 – Rugged Men, June 1961 – Man’s Story, August 1966
Autres thèmes
Animaux
féroces
Demoiselle en
détresse et
sauveteur
(stéréotype très
fréquent)
33. 33/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Story, February 1964 – Man’s Adventure, August 1965 – Man’s Daring, March 1966
Man’s Story, July 1962 – Man’s Story, September 1963 – Man’s Story, March 1964
Autres thèmes
Médecins nazis
fous et
criminels
Occultistes
nazis,
satanistes
34. 34/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Battle Cry, January 1965 – Men, December 1967 – Male, June 1968
Stag, June 1959 – Big Adventure, March 1961 – Man’s Best, July 1962
Autres thèmes
Prostituées
Dominatrices
nazis, femmes
tortionnaires
35. 35/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Exploits, April 1963 – Men Today, August 1963 – All Man, May 1967
Battle Cry, August 1961 – Man’s Best, September 1961 – Men in Conflict, February 1962
Autres thèmes
Autres
dominatrices et
femmes
tortionnaires
(russes,
japonaises,
cubaines, etc.)
Amazones
guerrières
nazies
36. 36/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Book, June 1963, cover by Bruce Minney – World of Men, February 1964 –
All Man, November 1964 – Man’s Action, November 1965
Autres thèmes
Amazones résistantes
(parfois sadiques...)
37. 37/61
Les Men’s adventure magazines (1950-1975)
Man’s Book, December 1968 – Man’s Conquest, August 1971 – Men Today, March 1973
True Men, May 1962 – Man’s Epic, April 1964 – Man’s Book, February 1970
Autres thèmes
Représentation
des camps
Jeunes nazillons
modernes
38. 38/61
●
La série de livres Stalag fiction a été publiée en Israël de 1961 à
1964, au moment du procès Eichmann
●
Ces fascicules aux couvertures illustrées décrivent les abus
sexuels et les sévices infligés par de jeunes femmes SS à des
prisonniers de guerre alliés
●
Les actions relatées se déroulent dans des camps de
prisonniers (stalags) et non dans des camps de concentration.
Les captifs sont presque toujours des soldats anglo-américains,
non juifs, très rarement des femmes.
●
À la fin de la plupart des histoires, les prisonniers se révoltent,
violent et tuent les gardiennes SS.
●
Ces publications rencontraient un grand succès auprès des
jeunes israéliens. Jugées scandaleuses, leurs éditeurs ont
finalement été poursuivis par la police, puis elles ont disparu;
certains titres ont alors circulé clandestinement.
Les Stalag fiction en Israël (1961-1964)
39. 39/61
Les Stalag fiction en Israël (1961-1964)
True Men Stories, September 1962,
cover painting by Earl Norem
Couvertures de Stalag fiction, circa 1962
Les couvertures
des Stalag fiction
sont copiées de
couvertures de
Men’s adventure
magazines
True Men Stories, October 1959,
cover painting by Wil Hulsey
40. 40/61
Les Stalag fiction en Israël (1961-1964)
(haut) Deux couvertures de Stalag fiction, circa 1962
(bas) Man’s Magazine, June 1960 – Man’s Life, May 1963
Autres exemples
41. 41/61
●
The House of Dolls (Ka-Tzetnik, 1955), publié initialement en
hébreu, est considéré comme le premier a décrire les Joy
Divisions, ces soi-disant unités composées de femmes juives
chargées de satisfaire les besoins sexuels des gardiens SS
dans les camps
●
Des spécialistes israéliens estiment que ce livre pourrait être à
l’origine des magazines Stalag fiction
●
Dans les années 1950-1970, quelques romans bon marché
américains (pulp novels) ont aussi raconté des histoires
érotiques ou SM entre des tortionnaires nazis et des
prisonnières
Les récits pseudo-historiques et les romans érotiques
(1950-1970)
42. 42/61
Les récits pseudo-historiques (années 1950)
The House of Dolls, by Ka-tzetnik 135633
[pseudonyme de Yehiel De-Nur, né Yehiel Feiner],
translated by Moshe M. Kohn, Simon & Schuster (first
English edition, 1955)
Femmes de Varsovie, Natan Mendelson, Couverture illustrée
par Jef de Wulf, Éditions de la Pensée Moderne, collection
Tropique N°5, 1954
43. 43/61
Les romans érotiques (1950-1970)
Gestapo, Edward Crankshaw,
Cover art by Harry Schaare,
Pyramid Books r-281, 1957
Hate, Hank Janson, Alexander
Moring ed., 1958
Carnal Countess, Don
Bellmore, A Pleasure Reader,
PR 122, 1967
Chained Women, Jim Kent, Col
Cameron cover, 1969
Surtout américains
44. 44/61
●
Durant la Seconde Guerre mondiale, les superhéros des comics
américains se sont mis au service de l’armée américaine pour
soutenir le moral des troupes et l’effort de guerre
●
Les comics américains des années 1940-1970 étaient plutôt
destinés aux enfants et adolescents. À partir de 1954, ils étaient
soumis au contrôle du Comics Code Authority et ne représentent
donc pas de scènes érotiques aussi explicites que les Men’s
adventure magazines.
●
Plusieurs bandes dessinées de guerre (war comics) ont pourtant
utilisé divers stéréotypes que l’on retrouve dans les Men’s
adventure magazines, comme les animaux féroces, les
amazones guerrières sexy (résistantes ou nazies).
Les comics américains (1940-1980)
45. 45/61
Les comics américains (1940-1980)
Action Comics #43,
December 1941
[entrée en guerre des États-Unis]
Sub-Mariner #14,
Automne 1944
[débarquement en Normandie]
Amazing Man Comics #22,
May 1941
Boy King, in Clue Comics #4,
June 1943 (Merci à Claude
Estèbe pour le signalement)
Animaux féroces nazis (déjà nazisploitation)
Superhéros (hors nazisploitation...)
46. 46/61
Les comics américains (1940-1980)
Suspense Comics #3,
April 1944,
cover art by Alex
Schomburg
The American Air Forces
#11, 1953, 1951 Series
Star Spangled War
Stories #84, August 1959
Sgt. Rock #322,
November 1978
Tortionnaire nazi
Amazone guerrière
Amazone résistante
Amazone nazie
Invaders #17, June 1977,
Warrior Woman. Art by
Gil Kane
47. 47/61
Les comics américains (1940-1980)
Air Fighters Comics, November 1943, couverture et extraits des pages 7, 10, 12, art by Fred Kida
Valkyrie,
sexy,
cruelle,
amazone nazie
puis résistante
48. 48/61
●
Avant l’apparition des Men’s Adventure magazines, les pulp
magazines américains publiaient déjà des récits d’atrocités
japonaises ou allemandes
●
Durant la guerre et même un peu auparavant, les couvertures
de ces magazines affichent des japonais patibulaires qui s’en
prennent à des jeunes femmes en tenues légères
●
À partir de l’entrée en guerre des États-Unis (décembre 1941),
les couvertures des pulp magazines montrent surtout des
tortionnaires nazis
Les pulp magazines
durant la Seconde Guerre mondiale
49. 49/61
Les pulp magazines
durant la Seconde Guerre mondiale
Spicy Adventure Stories,
December 1938
Spicy Adventure Stories,
August 1939
Argosy v314 #1
August 1942
Speed Adventure Stories,
May 1943
Spicy Adventure Stories,
March 1938
Tortionnaires
japonais
50. 50/61
Speed Adventure Stories, February 1943 & January 1945
Detective Fiction (True Crime Mysteries), February 21, 1942 - Spicy Adventure Stories, April 1942 - Argosy v314 #3, October 1942
Les pulp magazines
durant la Seconde Guerre mondiale
Tortionnaires
nazis
Picture Scoop n’est pas un
pulp, mais un magazine de
photos d’actualités.
En dessin de couverture,
une allégorie de l’Europe
asservie aux Nazis
Picture Scoop, December 1942
51. 51/61
Phantom Detective, April 1941
Phantom Detective, July 1941
Crack Detective, November 1942
Speed Adventure Stories,
November 1944
Stéréotypes habituels :
Amazone guerrière
Amazone résistante
Les pulp magazines
durant la Seconde Guerre mondiale
52. 52/61
●
Les Weird menace magazines des années 1930, encore
appelés Shudder pulps, sont des pulps racontant des histoires
horrifiques
●
Le premier titre du genre, Dime Mystery, est créé en 1933 par
deux éditeurs de New York, Henry Steeger et Harold Goldsmith.
Steeger a raconté qu’il s’était alors inspiré du théâtre du Grand-
Guignol parisien.
●
Ces publications deviennent très populaires et leurs couvertures
rivalisent de scènes de torture ou d’épouvante
●
La période érotico-sadique des Weird menace pulps commence
vers le milieu de 1937. Les couvertures sont alors peuplées de
monstres sadiques qui torturent des femmes peu vêtues.
●
Il existe une forme de continuité entre les Weird menace
magazines et l’imagerie érotico-sadique représentant des nazis
Les Weird menace pulps
avant la Seconde Guerre mondiale
53. 53/61
Dime Mystery Magazine, March 1938 – Double Action Detective, November 1939 – Mystery Novels, December 1939 (couv. William F. Soare)
Satanistes,
Médecins fous,
Demoiselle en détresse et sauveteur
Les Weird menace pulps
avant la Seconde Guerre mondiale
54. 54/61
Thrilling Mystery, October 1936 – Spicy Adventure Stories, August 1937 – Horror Stories, August 1939
Dominatrices sadiques
Amazones guerrières déshabillées
Les Weird menace pulps
avant la Seconde Guerre mondiale
55. 55/61
Saucy Movie Tales, June 1936 – Dime Detective Magazine, February 1937 – Dime Detective Magazine, June 1937
Sadiques japonais (et chinois)
Les Weird menace pulps
avant la Seconde Guerre mondiale
56. 56/61
Thrilling Mystery, September 1941, November 1941, January 1942
Trois numéros successifs de Thrilling Mystery, un Weird menace pulp existant depuis 1935
Le numéro de novembre 1941 représente des nazis avant même l’entrée en guerre des États-Unis
Continuité entre les représentations érotico-sadiques des
Weird menace pulps et les représentations ultérieures des
tortionnaires nazis
Les Weird menace pulps
avant la Seconde Guerre mondiale
57. 57/61
Weird menace pulps
(1930-1945)
Pulp magazines
généralistes
durant la 2GM
(1939-1945)
Comics américains
(1940-1980)
Fumetti italiens
(1970-1980)
Récits pseudo-historiques et
romans érotiques
(1950-1970)
Stalag fiction
israéliens
(1961-1964)
Men’s adventure magazines
(1950-1975)
Prémisses dans le
cinéma mainstream
(1948-1967)
Premiers films
de nazi
sexploitation
(1969-1970)
Film italiens sadiconazista
(1974-1980)
Films de nazi sexploitation hardcore
(1973-1982)
Influences sur le cinéma
mainstream
(depuis les années 1980)
Films français
(1976-1980)
Théâtre du
Grand-Guignol ?
(depuis 1896)
Illustrations
de pulps et
récits
BD
Cinéma
mainstream
Cinéma de
nazi
sexploitation
Résumé du contexte d’apparition du cinéma de nazi sexploitation
1930 1940 1950 1960 1970 1980
58. 58/61
●
Pour un spectateur moderne, la représentation des actes de torture et
d’avilissement dans un contexte nazi et dans un but de divertissement est
devenu inacceptable. Pourtant, ce n’est pas l’émergence de ce point de
vue qui a précipité le déclin de ces représentations. Les protestations
contre les outrances des Men’s adventure magazines et les films de nazi
sexploitation ont toujours été individuelles. Il n’y a jamais eu de
mouvement d’opinion organisé contre cette presse et ce cinéma.
●
Une explication au déclin :
la presse et le cinéma pornographiques ont pris le relais et rendu
caduque l’imagerie érotico-sadique mettant en scène des nazis
En effet :
✔
Les Men’s adventure magazines qui subsistaient à la fin des années 1970 et au début
des années 1980 sont tous devenus des magazines pornographiques
✔
Les derniers films américains de nazi sexploitation étaient des films hardcore
✔
Les réalisateurs français de films de nazi sexploitation au début des années 1970 ont
ensuite réalisé des films pornographiques
Pourquoi la nazi sexploitation a-t-elle disparu
au début des années 1980 ?
59. 59/61
●
L’amalgame nazisme/sadisme/érotisme dans les productions graphiques
de la culture populaire américaine a émergé dès la Seconde Guerre
mondiale
●
Cette association a évolué sous de nombreuses formes jusqu’à son
expression dans le cinéma de nazi sexploitation (qui est d’origine
américaine)
●
Lorsque l’on se focalise uniquement sur le cinéma d’exploitation des
années 1970 en ignorant cette réalité, on s’interdit de comprendre que la
culture populaire américaine, traversée durant près de trente années par
des imageries extrêmement puissantes, a construit un véritable mythe
érotico-sadique du nazisme
●
Ce mythe est un assemblage de plusieurs stéréotypes: les sadiques et
les femmes martyrisées dénudées, mais aussi les prostituées et bordels,
les demoiselles en détresse et leurs sauveteurs, les médecins fous et
criminels, les tortures à l’aide d’animaux féroces, les femmes
dominatrices, les amazones guerrières, la collusion avec l’occultisme ou
le satanisme, etc.
En résumé [1/2]
60. 60/61
●
Ces stéréotypes sont malléables. Ils ont été adaptés très tôt aux
ennemis japonais et allemands à partir des figurations érotico-sadiques
des Weird menace pulps. Et tout au long de la longue histoire des
Men’s adventure magazines, ils ont été appliqués à d’autres ennemis
des États-Unis (Coréens, Chinois, Russes, Cubains, etc.).
●
Mais ce sont les nazis comme méchants (villains) facilement
reconnaissables et anciens ennemis vaincus, les nazis en tant
qu’icônes d’un mal absolu écrasé, qui sont devenus les modèles
indiscutables de ces stéréotypes fabriqués et ressassés par les
industries culturelles populaires: pulps, comics, et pour finir cinéma
●
Le cinéma de nazi sexploitation est une version tardive et exacerbée
de ce mythe. Ce n’est pas une singularité déconcertante dans l’histoire
du cinéma mais un paroxysme dans une succession ininterrompue
d’imageries fortes.
●
C’est bien l’histoire longue de ce mythe dans toutes ses composantes
de la culture populaire que l’on doit mobiliser afin de comprendre la
nazi sexploitation, et au-delà, certains aspects ambigus de la
représentation des nazis dans le cinéma mainstream
En résumé [2/2]