Les 5 principaux marchés de l'électricité de l'Afrique de l'Ouest (WAF) sont dans l’ordre le Nigeria, le Ghana, la Côte-d'Ivoire, le Cameroun et le Sénégal avec une consommation cumulée de 44,5 Térawattheures. Ces marchés sont tous en pleine mutation et se trouvent à différents stades de leur processus de libéralisation.
Cette fiche présente les principales informations relatives à ces marchés pour l'année 2014.
Principaux marches ouest-africains de l’électricité en 2014
1. Par Patrick Hervé BABOGA, Ingénieur polytechnicien 1/2
principaux marches ouest-africains de l’électricité –
2014
En 2014, les 5 principaux marchés de
l'électricité de l'Afrique de l'Ouest (WAF)
étaient dans l’ordre le Nigeria, le Ghana, la
Côte-d'Ivoire, le Cameroun et le Sénégal
avec une consommation cumulée de 44,5
Térawattheures. Ces marchés sont tous en
pleine mutation et se trouvent à différents
stades de leur processus de libéralisation.
Néanmoins, ils continuent de faire face aux
mêmes difficultés, notamment :
Un déficit structurel de l'offre qui
conduit généralement à des
délestages ;
Des difficultés d'approvisionnement
en énergie fossile ;
Des réseaux de transports vétustes
et obsolètes résultant en :
o des effondrements partiels
ou totaux fréquents du
réseau national ;
o Des pertes importantes, en
particulier dans la
distribution.
Des tarifs peu élevés qui mettent en
péril la santé financière des
compagnies d'électricité.
Pour résoudre ces problèmes, les
gouvernements de ces pays ont tous fait le
choix de la réforme, afin de stimuler
l'investissement privé dans le secteur de
l’électricité.
La Côte-d'Ivoire est considérée par
beaucoup d’experts comme un exemple de
libéralisation du secteur de l’électricité. Ce
pays est l'un des premiers de la zone WAF à
lancer la libéralisation de son marché de
l’électricité. Ce processus a commencé en
1985 avec une nouvelle loi régissant le
secteur de l’électricité qui a libéralisé la
production. La privatisation de la Société
nationale EECI en 1990, le contrat de
concession signé avec la CIE la même année
et le début de la production de la CIPREL,
le premier producteur indépendant ivoirien,
en 1994, sont parmi les étapes importantes
de ce processus. Ce pays compte désormais
3 producteurs indépendants, mais demeure
dominé par la CIE qui a bénéficié d'un
monopole dans le transport et la
distribution. Néanmoins, avec l'ouverture
du transport et de la distribution à la
concurrence, conformément au nouveau
code de l'électricité de 2014, cette
situation devrait évoluer à court terme. Le
principal défi auquel ce marché devra
faire face à l'avenir est la sécurisation
du gaz pour sa production thermique.
Le deuxième pays à avoir lancé le processus
de la libéralisation de son marché de
l'électricité était le Ghana, avec les Actes
538 et 541 de 1997. Quelques jalons de ce
processus sont: le début de la production
de TICO, premier producteur indépendant
du Ghana, en 2000 et la création d'une
société de transport en 2008. En 2014, le
Ghana comptait de nombreuses sociétés
dans la production (5) et la distribution (3)
d’électricité, le transport étant un
monopole, conformément à la loi. Bien que
sur de nombreux aspects le marché de
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l'électricité du Ghana peut être considéré
comme le marché le plus mature de la zone
d’Afrique de l’Ouest, il continue d'être
dominé par des entreprises appartenant à
l'Etat, à savoir la VRA, la BPA, la GRIDCO, la
ECG et la NEDCO. Le principal défi de ce
marché pour l'avenir sera de fixer les
tarifs qui permettront de rétablir la
santé financière du secteur sans mettre
en péril la demande.
Le Sénégal est le troisième des 5 plus
importants marchés de la zone WAF à
s’engager à réformer son secteur de
l’électricité avec une loi publiée en 1998.
Ce processus a conduit en 1999 à un accord
de privatisation qui a été annulé en 2000 et
à ce jour la SENELEC est toujours une
société d'État. Malgré cette privatisation
interrompue, les producteurs indépendants
ont commencé la production dès 1999, avec
la mise en service de la centrale GTI de
Dakar. Le Sénégal comptait en 2014, 2
producteurs indépendants d'électricité,
deux capacités dédiées dans des barrages
maliens et louait des moteurs additionnels
pour satisfaire sa demande. La SENELEC
reste l'acteur dominant de ce marché et est
présente dans la production, le transport et
la distribution. Le principal défi auquel ce
secteur sera confronté à l'avenir est
l’accès à moindre coût à l’énergie
primaire ou à de l'électricité (les projets
mauritanien Banda Gas et d’usine
flottante sont des opportunités
intéressantes).
Le quatrième marché à s’engager dans le
processus de libéralisation dans la zone
WAF était le Cameroun avec le code de
l'électricité de 1998 et la vente en 2001 par
l'État de 56 % de participation dans la
Compagnie nationale SONEL. Quelques
jalons de ce processus sont: le début de la
production de DPDC, premier producteur
indépendant, en 2009 et la mise en service
en 2013 de la plus grande capacité de
production depuis plus de 30 ans (la
centrale thermique de Kribi 216 MW). Bien
qu'ayant deux producteurs indépendants, le
marché de l'électricité camerounais
continue d'être dominé par ENEO le
successeur de la SONEL qui a bénéficié d'un
monopole dans le transport et la
distribution et exploite également des
centrales hydroélectriques et thermiques.
Ce monopole a pris fin avec le nouveau
code de l'électricité de 2011 et la création
d'une société de transport en 2015. Compte
tenu de la capacité de production
importante en construction, le défi
majeur de ce marché sera de développer
et mettre à niveau le réseau national
(Raccorder les trois réseaux existants).
La mauvaise performance de son marché de
l'électricité a obligé le Nigeria à
commencer la libéralisation de ce secteur
avec l'octroi d'une approbation express à
certaines entreprises. Cette approche a
abouti à la mise en service en 2001 de la
barge d'AES, le premier producteur
indépendant du Nigeria, et en 2005 de la
centrale d’Agip Okpai. En parallèle, le
Nigeria a démarré la révision de sa
réglementation, afin de stimuler le
financement privé. Cette option a conduit à
l'adoption en 2005 de la réforme du secteur
de l'énergie électrique. Le principal résultat
de cette réforme a eu lieu en 2013 avec la
création de 5 sociétés de production
d'électricité, une société de transport et 11
sociétés de distribution, toutes héritières
de la Power Holding Company of Nigeria.
Cette réforme a également favorisé
l'arrivée de plusieurs producteurs
indépendants supplémentaires depuis 2005.
Ainsi, à la fin de l'année 2014, le Nigeria
comptait, plus de 30 sociétés d’électricité
et était le plus grand marché de la zone
WAF. Dans les prochaines années, ce
marché sera confronté à deux principaux
défis : la diminution des pertes de
transport et de distribution (46 % en
2014) et la fixation des tarifs
d'électricité appropriés.
Ci-après une fiche qui présente plus en
détail les principales informations relatives
à ces marchés pour l’année 2014.
3. N° Pays Principaux indicateurs Production Transport Distribution Consommation Observations
1 Nigéria
Population : 177 500 000
PIB : 568 500 millions de USD
Superficie : 923 768 km2
Capacité installée : 11,732 GW
Capacité disponible : 7,485 GW
Production nette : 29 244 GWh
Facteur de charge : 28,5 %
Energies primaires : gaz naturel, hydro
Producteurs : 5 héritiers de la PHCN +
producteurs indépendants (IPP, NIPP, IOC)
Charge maximum : 4,144 GW
longueur du réseau : 15 022 km
Type de lignes : 330/132 kV
Pertes : 9,7 %
Nombre de réseau : 1
Opérateur : TCN (Société d'Etat)
15 effondrements totaux ou partiels du
réseau
Longueur des lignes : 356 363 km
MT : 33/11 kV
BT: 415/220 V
18 % de Pertes réseau + 28 % de
pertes de recouvrement
Opérateurs : 11 sociétés de
distribution
Consommation : 21 654 GWh
nombre d'abonnés : 8 645 000
Consommation par habitant : 126 kWh
prix moyen : 144,60 USD/MWh
taux d'accès à l'électricité 45 %
L'opérateur historique, la PHCN, a été privatisé en 2013
La seconde phase des tarifs pluriannuels (MYTO 2) est en cours d'
implentation et les tarifs reflètent mieux les coûts
Agence de régulation : NERC, ECN
L'indisponibilité du gaz, une pluviométrie incertaine et des
contraintes de transport et de distribution affectent fortement ce
secteur d'activités
Exporte l'électricité vers le Togo, le Bénin et le Niger
Coût du gaz naturel : 3,3 USD/MMBTU
2 Ghana
Population : 26 790 000
PIB : 38 620 millions de USD
Superficie : 238 535 km2
Capacité installée : 2,830 GW
Production nette : 12 963 GWh
Facteur de charge : 52,3 %
Energies primaires : Hydro, gaz naturel,
pétrole brut léger, solaire
Producteurs : VRA, BPA (Société d'Etat), TICO,
CEL, SAPP (producteurs indépendants)
Charge maximum : 2,061 GW
longueur du réseau : 4 450 km
Type de lignes : 330/225/161/65 kV
Pertes : 4,3 %
Nombre de réseau : 1
Opérateur : GRIDCO (Société d'Etat)
Longueur des lignes : 91 382 km
MT : 34,5/33/30/20/11 kV
BT: 415/220 V
Pertes : 25,2 %
Opérateurs : ECG, NEDCO (Sociétés
d'Etat) and EPC (Société privée)
Consommation : 10 182 GWh
nombre d'abonnés : 2 658 6021
Consommation par habitant : 380 kWh
prix moyen : 158,07 USD/MWh
taux d'accès à l'électricité 80 %
SAIDI : 215/106 hrs par consommateur1
SAIFI : 135 par consommateur1
L'opérateur historique la VRA reste une société d'Etat
La Formule Automatique d'Ajustement (AAF) est en cours
d'implémentation et les tarifs reflètent mieux les coûts
Agence de régulation : PURC, EC
La faible performance récurrente du WAGP oblige le Ghana à
dépendre du pétrole brut pour sa production thermique
Exporte l'électricité vers le Togo, le Benin et le Burkina
Coût du gaz naturel : 8,7 USD/MMBTU
Coût du pétrole : 110,2 USD/bbl
3
Côte
d'Ivoire
Population : 22 160 000
PIB : 34 250 millions de USD
Superficie : 322 463 km2
Capacité installée : 1,632 GW
Production nette : 8 152 GWh
Facteur de charge 57,0 %
Energies primaires : Gaz naturel, Hydro,
fioul, diesel
Producteurs : CIE (15 % des parts detenus par
l'Etat) CIPREL, AZITO, AGGREKO (producteurs
indépendants)
Charge maximum : 1,148 GW
longueur du réseau : 4 697 km
Type de lignes : 225/90 kV
Pertes : 6,4 %
Nombre de réseau : 1
Opérateur : CIE
Longueur des lignes : 37 961 km
MT : 30/11 kV
BT: 380/220 V
Pertes : 17,6 %
Opérateur : CIE
Consommation : 5 563 GWh
nombre d'abonnés : 1 311 741
Consommation par habitant : 251 kWh
prix moyen : 138,70 USD/MWh
taux d'accès à l'électricité 77 %
SAIDI : 40 hrs par consommateur
L'opérateur historique EECI a été privatisé en 1990
Les tarifs sont régulés, ne reflètent pas les coûts et ne sont que
rarement modifiés
Agence de régulation : ANARE
Exporte l'électricité vers le Togo, le Benin, le Burkina, le Mali et
dans une moindre mesure le Ghana
Coût du gaz naturel : 5,3 USD/MMBTU
coût du fioul : 972,2 USD/TM
4 Cameroun
Population : 22 770 000
PIB : 32 050 millions de USD
Superficie : 475 440 km2
Capacité installée : 1,249 GW
Production nette : 6 080 GWh
Facteur de charge 55,6 %
Energies primaires : Hydro, gaz naturel,
fioul, diesel, solaire, bio-méthane
Producteurs : ENEO (44 % de part Etat),
KPDC, DPDC (producteurs indépendants)
Charge maximum : 0,790 GW
longueur du réseau : 2 232 km
Type de lignes : 225/110/90 kV
Pertes : 5,6 %
Nombre de réseaux : 3
Opérateur : ENEO
Longueur des lignes : 34 358 km
MT : 30/15 kV
BT: 380/220 V
Pertes : 30,9 %
Opérateur : ENEO
Consommation : 4 360 GWh
nombre d'abonnés : 951 496
Consommation par habitant : 191 kWh
prix moyen : 129,40 USD/MWh
taux d'accès à l'électricité : 50 %
SAIDI : 105,2 hrs par consommateur
SAIFI : 305 par consommateur
L'opérateur historique SONEL a été privatisé en 2001
Les tarifs sont régulés et ne sont que rarement modifiés
Agence de régulation : ARSEL
Société de transport créé en 2015
coût du fioul : 476,2 USD/TM
Coût du diesel : 1 213,2 USD/TM
5 Sénégal
Population : 14 670 000
PIB : 15 660 Millions de USD
Superficie : 196 190 km2
Capacité installée : 0,828 GW
Production nette : 3 227 GWh
Facteur de charge 44,0 %
Energies primaires : fioul, hydro, gaz
naturel, diesel
Producteurs : SENELEC (Société d'Etat), GTI
KONOUNE (producteurs indépendants),
MANANTALI, FELOU (Capacité dédiée)
AGGREKO, APR Energy (Capacité louée)
Charge maximum : 0,466 GW1
longueur du réseau : 511 km1
Type de lignes : 225/90 kV
Pertes : 2,4 %
Nombre de réseaux : 3
Opérateur : SENELEC
Longueur des lignes : 16 466 km1
MT : 30/6,6 kV
BT: 380/220/127 V
Pertes : 18,4 %
Opérateur : SENELEC
Consommation : 2 565 GWh
nombre d'abonnés : 1 050 228
Consommation par habitant : 194 kWh
prix moyen : 237,69 USD/MWh
Taux d'accès à l'électricité : 60 %
END = 21 GWh
Le processus de privatisation de la SENELEC a été annulé en 2000
par l'Etat du Sénégal
Les tarifs sont régulés, ne reflètent pas les coûts et ne sont que
rarement modifiés
Agence de régulation : CRSE
Le Sénégal dispose de 60 et 15 MW de capacité dédiée dans les
barrages hydroélectriques de Manantali et de Felou (Mali)
coût du fioul : 710,0 USD/TM
Coût du diesel : 1 083,1 USD/TM
Coût du gaz naturel : 8,9 USD/MMBTU
1
Données de 2012
Source : Régulateurs, Sociétés d'Electricité, Ministères de l'Energie, Agence Internationale de l'Energie, Banque Mondiale, Banque Africaine de développement
Par Patrick BABOGA, Ingénieur polytechnicien 3/3