La SNCM, une entreprise déjà socialement réformée, depuis peu, contrairement aux idées reçues. Une entreprise à l'avenir incertain et à l'actionnariat instable.
1. restruah,wufimù
SINCM: la cure d'austérité
suffflr&-t-elÏeP
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Un ferry de la SNGM
dans le port de
Marseille. La compagnie
compte aujourd,hui
huit navires. 4)
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Liaisons sociales i jui;:.
magazine r,'1,53 i 7-ü-tj,
es avantages sociaux extravagants, une
CGT toute-puissante et immobiliste,
des conflits à répétition..., autant
d'images qui collent à la peau de la
Société nationale maritime Corse Méditerranée,
dont 1es nar.ires blancs opèrent principalement
à partir de larsei11e .ers la Corse et le Maghreb.
. ous sommes rictimes d'un bashing médiatique
incessant, alors que nous avons accepté de pro-fondes
réformes sociales pour moderniser la
æM
compagnie », déplore l'officier Pierre Maupoint
de Vandeul, déIégué syndical CFE-CGC. « On
nous caricature, mais on peut discuter avec nous,
renchérit Frédéric Alpozzo,le leader CGT (59olo
des voix chez les marins, 48olo toutes catégories
confondues). La nous avons signé en janvier
un pacte de responsabilité avec la direction. "
Les quatre représentants des salariés au conseil
de surveillance, dont les deux CGI ont même
voté le 12 mai pour la reconduction du directeur
général et la poursuite du plan industriel. Ini-maginable
il y a deux ans, ce qui n'a pas empêché
le directoire d'être débarqué par Transdev, l,ac-tionnaire
principal (détenu à parité par Veolia
et Ia Caisse des dépôts et consignations), avec
le soutien décisif de l'État, puisque ses trois re-présentants
ont choisi de s'abstenir.
Pourtant, la transformation sociale de la SNCM
évoquée depuis des années, est très lurgem"rri
entamée. Temps de travail, effectifs, primes, droit
syndical..., depuis deux ans, tout ou presque a
été revu ou est en passe de l'être. Non sans mal !
uAprès la privatisation en 2006 et la prise de
contrôle par Veolia, il ne fallait pas faire de va-gues,
note un observateur. Donc, la CGT a conti-nué
à faire la pluie et le beau temps. Entreiens
d'évaluation en main, les élus convoquaient les
directeurs aux commissions paritaires d,avance-ment
pour qu'ils justifient leurs appréciations
individuelles . » En 2007 , pour faire face aux dif-ficultés
financières et à la concurrence très parti-culière
de Corsica Ferries (voir l'encadré page 34),
l'équipage des bateaux est réduit et un plan de
départs volontaires mis en æuwe. Puis le siège
parisien et trois navires sont vendus. Mais pas
d'investissement pour renouveler la flotte vieil-lissante
: «une inaction. déroutante » de l,action-naire,
écrit Ie député PRG Paul Giacobbi dans
son rapport de juin 2013 sur les conditions de
la privatisation.
Quarante-sept jours de blocage.
Lorsque Marc Dufour, ancien P-DG d'Air Littôral,
prend les rênes de l'entreprise en septembre 2010,
il veut tailler dans les coûts et investir. En jan-vier
2011, Ie nouveau DG décide de supprimer
un navire sur Nice, sans licenciement à la clé,
après que le conseil général des Alpes-Maritimes
a annoncé la réducüon du nombre de traversées
durant la période estivale pour préserver les ri-verains.
S'ensuit la plus longue grève de l'histoire
de la compagnie, née en 1969 sous le sigle CGTM
(Compagnie générale transméditerranéenne) et
devenue SNCM en1976. Résultat, quarante-sept
iours de blocage initié par la CGI qui en ressort
affaiblie, sans paiement des jours de grève.
DébutZOlZ, nouveau conflit durant trois semai-nes:
ferry bloqué à Toulon, multiples constats
d'huissiers et référés..., la direction entame une
procédure de licenciement pour blocage illégal
contre les deux principaux responsables CGT.
En mars, elle présente au CE son plan stratégique,
qui passe par de nouvelles économies et l'acqui-sition
de navires mixtes (plus rapides, moins )
(ae
27A
C'est, selon Ies syndicats,
S" T.,]lio".l d'-euros,
le chrtlre d'aftâlres
en 2013 de la SNCM,
pour 40 millions
d'euros de pertes.
26A0
SATARIÉS
dont 1 700 CDi
(2/3 d,e navigants) et
2 000 emplois indirects.
1103
million de passagers
transportés
en 2013 entre la Corse
et Ie continent.
Source: SNCM.
&è
Par Nicolas Lagrange
3. '. .''.' .' ,'
l énergivores et moins gourmands en effectifs)
mais aussi par une refonte sociale. « La compa_
gnie comptait 71 accords d,entreprise navigants
et des centaines d'usages et de protocoles de fin
de conflit, relate le DRH, Thierry Le Carpentier.
Je les ai dénoncés, pour appuyer le projet de
transformation économique et sociale. " En mai,
nouvelle grève de quelques jours, entre les deux
tours de la présidentielle. «Un sabordage suici_
daire
", vitupère Marc Dufour dans une lèttre ou_
verte aux responsables de la CGf,, «une insulte
aux salariés de la compagnie, un crachat au vi_
sage des clients"...
Les négociations sociales démarrent dans un cli-mat
très tendu mais finissent par déboucher, en
novembre 201.2, sur deux premiers compromis,
signés par la CGT: un accord de droit wndicai
qui ramène notamment le nombre de ierma-nents
de 35 à 17 pour tous les syndicats et un
accord d'alerte sociale qui prévoit une concer-juin
I Liaisons sociales
2ût4 I magazine n. 153
tation sous les quarante-huit heures avant le dé_
pôt de tout préavis de grève. En décembre, di_
rection et syndicats commencent à plancher sur
un nouveau pacte social pour les navigants. Six
mois plus tard, le plan de modemisation «Chan_
geons » reçoit l'aval du conseil de surveillance.
Il détaille les pistes d,économies industrielles,
valide la commande de quatre nouveaux navires
et entérine une réduction de 25o/o de la masse
salariale grâce à 515 suppressions de postes sans
licenciement et à des efforts de productivité via
les négociations en cours. Objectif: un retour à
l'équilibre à l'horizon ZO17 .
Présenté comme hautement improbable, un ac_
cord est trouvé fin ZOl3 avec cinq syndicats de
navigants sur huit, dont la CG! mais sans le
Syndicat des travailleurs corses (STC). Le pacte
social est approuvé par référendum par 590/o des
marins et 75o/o des officiers. principale conces_
sion: la forte réduction du nombre de congés.
« Cette année, les navigants vont travaillei en
moyenne cent quatre-vingt_seize jours, soit dix_
huit jours de plus sans hausse de salaire», ex-plique
le DRH. . C'est un effort assumé par la
CGT pour accroître la productivité
", 5euligns
son leader, Frédéric Alpozzo..Nous avonsàc_
cepté de passer de 14, 15 officiers auiourd,hui à
10 sur les nouveaux navires, ajoute pierre Mau_
point de Vandeul pour la CFE-CGC. Avec la stan-dardisation
de la flotte, l,ensemble des navigants
poufia aussi plus facilement travailler sur tous
les navires. "
timOgea$ê. Les primes en haute saison
ont également été revues à la baisse. pour autant,
le pouvoir d'achat a été globalement maintenu
et les rémunérations restent généreuses. Selon
un rapport confidentiel réalisé cet automne, un
« assistant chef de cuisine » gagneraitainsi
3619 euros net par mois. .Le terme d,assistant
est trompeur, il s'agit en fait du chef comman_
dant les brigades de cuisine des restaurants, jus-tifie
Pierre Maupoint de Vandeul. En outre, ce
niveau de salaire correspond à une fin de car-rière.
" «La rémunération annuelle moyenne des
navigants de la SNCM (marins et officiers) est de
l'ordre de 40000 euros, indique le DRH, un ni-veau
comparable à celui de La Méridionale. »
Au total, les efforts des navigants pourraient gé-nérer
10 millions d'euros d,économies dès 20i4,
üa le non-renouvellement de plusieurs centaines
de CDD. S'y ajoutent le non-remplacement des
départs à la retraite et un plan de départs vo-lontaires
parmi les personnels sédentalres. Une
profonde refonte sociale finalement engagée en
pure perte? La plupart des syndicats se posent
la question depuis le limogeage de Marc Dufour
par Transdev. "Nous avons fait notre part du
chemin contre la promesse de nouveaux naüres,
avec le soutien écrit de l,État; nous lui deman-dons
de respecter ses engagements », insiste Fré- .g
déric Alpozzo É
"Le principal problème de la SNCM, c,est l,avenir !
de son actionnariat et le projet industriel associé, §
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4. Liaisons sociales i jr:.i::.
magazine n' 153 i 2ü14
alors que les médias montent en épingle un suiet
secondaire, celui des avantages sociaux, juge
Alain Verdi, journaliste spécialiste des transports
à France 3 Corse. Depuis des années, Veolia et
Tiansdev refusent d'investir dans de nouveaux
navires et privilégient un scénario de démantè-lement
de la compagnie pour se désengager à
moindres trais. Un scénario catastrophique so-cialement,
mais qui aurait I'avantage d'effacer
tout ou partie du passif. "
DéS pipéS. Un passif trop lourd pour tour
nouvel investisseur, à l'instar du groupe norvé-gien
Siem, qui a renoncé. Sur plainte de Corsica
Ferries, Bruxelles a infligé deux amendes à la
SNCM, de 220 millions d'euros chacune, pour
des subventions publiques perçues ces dix der-nières
années et iugées illégales a posteriori. Sauf
que la première amende relative à la privatisa-tion,
payable à terme par la compagnie, pourrait
donner Iieu à un recours contre l'État français
puis au remboursement de Ia SNCM, et la se-conde
devrait conduire à verser à la compagnie
des dommages et intérêts à peu près équivalents
au montant des pénalités, estime Ie député UMP
Didier Quentin dans un rapport de la commis-sion
des Affaires européennes de février. nArrê-tons
de présenter la situaüon de la SNCM cornme
désespérée, s'insurge Maurice Perrin, autre délé-gué
syndical CFE-CGC. D'autant qu,il y a de
nombreux recours suspensifs possibles qui pren-dront
des années, avec la possibilité d,annuler
certaines amendes ou d'en réduire considérable-ment
le montant. »
Reste que la trésorerie ne serait assurée que jusqu,au
début 2015 et que Veolia et Tlansdev ne sont pas
les seuls à anüciper la fin de la SNCM dans sa forme
actuelle. Soutenu par les nationalistes du STC, le
président du Conseil exécutif de Corse, paul Gia-cobbi,
étudie la faisabilité d'une compagnie régio-nale
avec quatre navires au lieu de huit et moins
de 500 emplois. «Dans cette affaire, les dés sont
pipés depuis des années, analyse Alain Verdi. La
grille de lecture n'est pas rationnelle, le dossier
SNCM fait intervenir des réseaux qui s,affairent
pour parvenir à la mort de la compagnie. » Une
chose est sûre, l'attitude de l'État sera déterminante.
Avec ses 25o/o et les 330/o de la Caisse des dépôts
au sein de Transdev, il est de facto maioritaire et
se montre souvent interventionniste. Il assure tout
faire pour lever l'hypothèque des pénalités euro-péennes
et trouver un financement pour les nou-veaux
navires. Mais le temps presse, car la situation
actuelle plombe les réservations estivales. ê
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Le Conseil
exécutif
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