Université d'Aix-en-Provence, Institut d'Etudes Politiques, Marie-Reine Hassen développait les conditions nécessaires pour la restauration de l'Etat de droit et le traitement des causes sous-jacentes de l'instabilité chronique. La sonneuse d'alarme avertissait: " Le pays est totalement à la dérive, le territoire est devenu un sanctuaire pour les groupes terroristes islamistes, un paradis pour toutes sortes de militants djihadistes: Djanjawids du Darfour, Shababs de Somalie, Boko Haram du Nigéria, Salafistes du Mali..." Elle expose ses solutions.
Conférence HEC Aix en-Provence avril 2014: "Pour arrêter l'anarchie et rétablir un Etat de droit en République centrafricaine"
1. POUR ARRÊTER L’ANARCHIE ET RETABLIR UN ETAT DE DROIT
EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence
mercredi 2 avril 2014 à 18h15
Marie-Reine Hassen
Ancien Ministre, Présidente du MRC-Centrafrique
1 - TABLEAU GEOGRAPHIQUE ET HISTORIQUE
La République centrafricaine, est un pays d'Afrique centrale enclavé, sans accès
à la mer. Sa population est estimée à 3 500 000 habitants, pour une superficie
d'environ 623 000 km². Ce pays est entouré par le Cameroun à l'ouest,
le Tchad au nord, le Soudan et le Soudan du Sud à l'est, la République
démocratique du Congo et la République du Congo au sud. Le pays est membre
de l'Union africaine, de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique
centrale (CEMAC) et de la Communauté des États sahélo-sahariens. Il est
partagé entre savane sèche au Nord, savane boisée au Centre et forêt
équatoriale au Sud, et connaît pour l'essentiel un climat tropical. La République
centrafricaine dispose par ailleurs de nombreuses ressources naturelles,
notamment l'uranium, l'or et les diamants. Le pétrole et l'énergie hydroélectrique
sont d'autres ressources potentiellement importantes mais inexploitées à ce jour.
L'agriculture représente 55 % du PIB. Il faut noter d'importantes ressources
en bois qui font que l'exploitation forestière contribue largement au PIB. Le
Centrafrique est le 2ème pays le plus riche d'Afrique après la RDC en
Ressources naturelles (pétrole, bois, diamant, or, uranium etc...). Le Centrafrique
fait partie des 5 pays les plus riches du monde en ressources naturelles
demeurant inexploitées.
Les principales religions en RCA sont le Christianisme à plus de 80%, l’Islam à
10 %, l’animisme à presque 10%. Il est à noter que la coexistence entre toutes
les communautés était pacifique jusqu’en 2012.
Cette ancienne colonie française d'Oubangui-Chari, faisait partie de l'Afrique-
Équatoriale française de 1910 à 1960. Depuis l’indépendance il y a cinquante
ans, ce pays a une histoire jalonnée de soubresauts politiques. Il n’a connu que
dictatures, déstabilisations, coups d’Etat, crises politico militaires à répétition,
rebellions et guerres civiles, qui ont fortement perturbé la paix civile et la sécurité
intérieure, entraînant une instabilité institutionnelle et conjoncturelle défavorable
à son développement. Le premier chef de l'État, Barthélemy Boganda, est
considéré comme le père de la nation centrafricaine. Il meurt le 29 mars 1959,
peu après son élection, dans un accident d'avion dont les causes n'ont jamais
été élucidées.
Le pays a eu à sa tête différents régimes autoritaires, notamment celui de Jean-
Bédel Bokassa, président, puis empereur auto-proclamé. En 1965 Jean-Bedel
Bokassa renverse son cousin David Dacko et prend le pouvoir. David Dacko lui
succède encore brièvement. Il sera chassé du pouvoir le 1er
septembre 1981 par
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2. le général André Kolingba, qui établit un régime militaire. Les premières élections
libres avec multipartisme ont lieu en 1993, et portent au pouvoir Ange-Félix
Patassé. Celui-ci est renversé en 2003 par François Bozizé qui, réélu en 2005 et
2010, est à son tour renversé en mars 2013 par la Séléka, une alliance très
hétéroclite de différentes rébellions.
Michel Djotodia et son Premier Ministre Nicolas Tiangaye se sont montrés
incapables en 10 mois de remettre de l’ordre et d’empêcher les violations
généralisées des droits humains. Le 10 janvier 2014 ils sont poussés à la
démission par la Communauté Internationale. Un Conseil National de Transition,
qui avait été mis en place de manière très opaque par Djotodia afin de lui donner
un vernis de légitimité, désigne Catherine Samba-Panza, une novice,
comme Chef de l'État de transition de la République centrafricaine.
Alors que l'urgence de la situation, impose des mesures énergiques et de grande
ampleur, il n’y a aucun début de solution pendant que les Centrafricains
continuent à souffrir le martyre. Non seulement le départ de la Seleka du pouvoir
n’a pas mis fin aux violences, mais la situation est devenue apocalyptique.
Les violences se poursuivent malgré la présence des forces militaires françaises
Sangaris et des troupes africaines de la Mission Internationale de Soutien à
la Centrafrique MISCA. Un mandat explicite qui leur avait été donné le 5
décembre dernier par le Conseil de Sécurité de l'ONU pour la neutralisation des
groupes armés et la protection des populations civiles, mais de toute évidence,
ces forces ont failli dans leur mission. Les partenaires européens restent très
frileux pour l'envoi de troupes en RCA. L’Union européenne peine à rassembler
le millier d'hommes devant participer à l'opération Eufor-RCA qui devrait venir en
appui des forces françaises de Sangaris et des forces africaines de la Misca
pour une durée de six mois seulement, en attendant le déploiement d'une
éventuelle mission de maintien de la paix des Nations unies. Elle ne sécuriserait
que l'aéroport et deux arrondissements de la capitale.
Rappelons que la RCA est entourée de pays dont les tensions se répercutent sur
son territoire L'ancienne puissance coloniale continue d'y jouer un rôle important.
La République centrafricaine est une république présidentielle où le
président détient tous les pouvoirs : il est à la fois chef de l'État et chef
du gouvernement. En RCA le gouvernement détient le pouvoir exécutif mais
partage aussi le pouvoir législatif avec le parlement.
Par la faiblesse des gouvernements dans ses régimes successifs, la RCA
est restée un pays fragile que de nombreux observateurs qualifient d’ « Etat
Fantôme ». Les violations des droits humains, la dégradation de la situation
humanitaire et les violences restent constantes. La moitié de la population était
déjà affectée de manière constante par les violences cumulées des rebelles, des
bandits et des forces gouvernementales. Et tout cela avec une impunité totale.
Même la capitale Bangui n’était pas épargnée. Les infrastructures essentielles,
routes, réseaux d'eau, d'électricité et d’assainissement, avaient tout simplement
2
3. disparu faute d'entretien et d'investissements. La santé et l’éducation étaient en
ruine. La situation politique et socioéconomique, ainsi que les conditions de
sécurité étaient des plus alarmantes. Enfin, le pays sert de base arrière à
des groupes de trafiquants et de braconniers.
1 - SITUATION ACTUELLE
La RCA fait partie des Pays les Moins Avancés (PMA). Elle figurait déjà au
dernier rang du classement mondial du climat des affaires par la revue « Doing
Business » de la Banque mondiale de manière constante depuis 2008 (183è sur
183). En 2011 le PNUD l’a reléguée au 179è rang sur 185 à l'indice de
développement humain. Selon Action pour la faim, 70% de la population vivait
sous le seuil de pauvreté. C’est le premier pays en Afrique Centrale pour le taux
de prévalence du VIH/SIDA et c’était le 10è dans le monde. L’espérance de vie
des Centrafricains n’était plus que de 39 ans. C’est l’un des pays au monde où
l’on meurt le plus vite. Ca c’était avant l’invasion de Séléka.
Ce désastre est le résultat de décennies d’incurie. C’est pourtant un pays qui
a des ressources immenses, un territoire qui s’étend sur 623.000km2, et une
langue nationale, le sango. C’est un pays qui possède des terres arables qui
peuvent nourrir toute la population, des minerais et des terres rares : uranium,
diamant, or etc…sans compter les réserves de pétrole. Il a par ailleurs reçu de
nombreuses aides financières et un soutien sans relâche de la communauté
internationale, y compris de la sous-région.
Au moment où je vous parle, la situation à Bangui est devenue dramatique et
tragique. Après avoir été livré depuis décembre 2012 aux mains de criminels
pendant une année, durant laquelle le coup de grâce a été administré à ce qui
restait d’un pays déjà à genoux, durant laquelle même l’état-civil et les archives
administratives ont été détruits, la situation est encore pire à l’heure actuelle.
Car en 2013, face aux exactions multiples commises par les petits seigneurs de
guerre principalement musulmans, des groupes d’auto défense se sont
constitués, les anti-balakas ("anti-machettes"), majoritairement animistes et
chrétiens. Ces nombreux groupes, également hétéroclites, se sont révoltés
contre Séléka. Le territoire entier est plongé dans une tragédie profonde et vit
dans l’anarchie la plus totale. Malgré la présence des forces armées
internationales, à Bangui la capitale les affrontements, attaques, lynchages,
exactions et représailles sont quotidiens. Le bilan de cette dernière prise de
pouvoir par la force a été désastreux. Le remplacement d’un Président auto-
proclamé par une Présidente de transition désignée par un Conseil
National de Transition mis en place par ceux qui sont arrivés par la
violence un an plus tôt n‘a pas calmé la situation qui empire. L’intensité
de la haine s’est accrue. On tue pour tuer, sans se poser la question de la
raison de la tuerie. La RCA est devenue un véritable désastre. Les
populations centrafricaines sont profondément traumatisées. Des centaines de
milliers de personnes sont déplacées. Les personnes survivent dans de très
mauvaises conditions sanitaires : eau impropre à la consommation, absence de
3
4. douches, de savon, de sanitaires. La crise médicale est devenue chronique, les
pathologies augmentent énormément, et il y a des risques d’épidémies. Les
problèmes d’alimentation et de nutrition sont en train de créer cette année une
crise humanitaire sans précédent. Bien entendu l’administration est à l’arrêt,
et l’économie est inexistante.
Le régime actuel de transition est en train de laisser cette situation empirer. Les
tensions sont exacerbées. Les milices anti-balaka, en réaction aux exactions
perpétrées pendant des mois par la Séléka essentiellement musulmane, s’en
prennent aux civils musulmans. Les violences ont provoqué un exode massif
des musulmans. Pour ceux qui restent, la situation est insupportable. Les
tensions, la haine et la spirale de violence entre les communautés vont
s’accroître encore davantage.
Le chaos qui persiste en RCA continue à déstabiliser le pays et finira par
déstabiliser la région toute entière. La situation est si catastrophique que
Genocide Watch a publié une alerte au genocide pour la RCA depuis avril 2012
(Genocide Watch’s Country Report of 2012).
Tout un peuple est en train de disparaître. Le pays est totalement à la dérive
2 - COMMUNAUTE INTERNATIONALE
La Communauté Internationale, après avoir laissé le pays sombrer dans le
chaos sans réagir pendant 10 mois, s’est finalement mobilisée.
Depuis 2008 la Communauté des Etats de l’Afrique Centrale avait installé des
troupes de la Force Multinationale des Etats d’Afrique Centrale (FOMAC) pour le
maintien de la paix. Mais elles n’ont pas pu maintenir une paix qui par ailleurs
n’existait pas. En 2013 le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la
résolution 2121 qui entre autre a créé une Mission Internationale de Soutien à la
Centrafrique (Misca) dirigée par l’Union africaine en remplacement de la
FOMAC, qui compte 6000 hommes. Alors que les forces françaises de Sangaris
(2.000 hommes) en Centrafrique ne suffisent pas à la tâche, le millier de soldats
promis par l’Union européenne en février pour aider à rétablir l’ordre n’arrive
toujours pas. Les difficiles négociations sur la question de la taille et du
financement du projet visant à déployer des milliers de Casques bleus en
Centrafrique se poursuivent.
Il est à noter qu’aujourd’hui même se tient à Bruxelles un mini-sommet sur la
République Centrafricaine organisé par l’Union Européenne.
En décembre dernier le Conseil de Sécurité de l'ONU a donné un mandat
explicite aux forces africaines Misca et françaises Sangaris, pour la
neutralisation des groupes armés et la protection des populations civiles,
mais aucun de ces objectifs n'est aujourd'hui atteint.
3 - JOSEPH KONY, le leader de la rebellion ougandaise Lord’s Resistance
Army, commet des atrocités dans l’Est de la RCA depuis 2008. L’armée
ougandaise et des conseillers militaires américains le traquent, mais jusque là
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5. ils n’ont pas réussi à le trouver. Il est beaucoup plus sûr de lui et ses exactions
sont devenues plus fréquentes.
Pour la majorité des Centrafricains, l’année 2013 a été l’enfer sur terre, et
l’enfer se poursuit en 2014. Les civils, comme toujours, sont les principales
victimes de ce conflit, en particulier les femmes et les enfants. Les pertes
humaines sont extrêmement lourdes. La situation est pire qu’elle ne l’a jamais
été dans toute l’histoire du pays, et elle s’aggrave de jour en jour. Les attaques
des milices Anti-Balaka se sont amplifiées dans la capitale centrafricaine.
4 - MENACE POUR LE MONDE
Les frontières étant poreuses, si le Centrafrique est destabilisé, il déstabilise les
pays limitrophes par l’incursion de bandes armées. Ce qui se passe en RCA
représente donc une menace sérieuse pour la stabilité de la sous-région. C’est
un no-man's land au coeur de l’Afrique. Le territoire est devenu un sanctuaire
pour les groupes terroristes islamistes, un pôle d’attraction pour les
extrêmistes, et un hub pour les acteurs non étatiques, dont les frontières
poreuses et le terrain ingouvernable en fait un paradis pour toutes sortes de
militants djihadistes (les Djanjawids du Darfour, les Shababs de Somalie, Boko
Haram du Nigéria, les Salafistes du Mali etc…) Ces groupes islamistes
deviennent de plus en plus puissants à travers le continent et menacent la
sécurité de l’Europe et du monde. Même les rebelles non centrafricains ont pu
acquérir des passeports ordinaires et diplomatiques leur permettant de circuler à
travers le monde.
Les ramifications géopolitiques de l’anarchie centrafricaine ont déjà
dépassé les frontières. Les Etats en guerre et les acteurs non étatiques
exploitent le territoire, les caches d’armes et les ressources naturelles pour
leurs interêts personnels. Les diamants de la RCA sont véhiculés aux mains
des milices Janjawids du Darfour, soutenus par Khartoum. Il est clair que le
chaos centrafricain a déjà des implications significatives au delà des frontières.
La situation reste ingérable et il est urgent que la Communauté
internationale prenne immédiatement les bonnes decisions.
En résumé, la RCA était un Etat failli, il reste un Etat failli, et le contexte actuel
laisse très peu d’espoir pour un changement positif dans un futur proche, ou
même à moyen terme.
5 - ENVIRONNEMENT
Les violences ruinent la biodiversité remarquable du pays et alimentent
même le terrorisme global. Les groupes armés sont de plus en plus impliqués
dans le commerce illicite de l’ivoire, notamment en RCA. Il a été constaté que
plus de la moitié du budget de fonctionnement du groupe islamiste somalien al-
Shabab provient de la vente de l’ivoire. La faune est entièrement livrée aux
braconniers et aux rebelles. Les forêts de la RCA sont aussi menacées : le sud
du pays est entièrement couvert de forêt équatoriale et le bois a toujours été la
principale source de revenus et d’emploi pour le pays.
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6. Crise politique, crise sécuritaire et crise humanitaire, la Centrafrique
continue de s’enfoncer dans l’anarchie. Ces trois crises qui se cumulent rendent
l’avenir du Centrafrique bien sombre, si rien n’est véritablement fait pour y mettre
fin. Il est clair qu’aujourd’hui la première priorité est celle qui concerne la
protection de la population, mais si l’Etat n’arrive pas à protéger sa propre
population, il perd sa légitimité, et c’est la responsabilité des autres Etats de
venir les sauver. Mais la force d'occupation internationale assiste, la plupart du
temps sans réaction à des massacres de civils, et de ce fait elle s'en rend
complice.
Les ONG continuent à s’égosiller: Amnesty International, Human Rights Watch
et Médecins sans frontières, Ban Ki Moon n’arrête pas d’être inquiet à propos
de la situation sécuritaire en RCA, et la situation continue de dégénérer face
à un gouvernement impuissant et une communauté internationale
dépassée.
6 - QUE FAUT-IL FAIRE POUR RESOUDRE CE PROBLEME? QUELLES
SONT LES SOLUTIONS POSSIBLES?
D’abord il y a un constat : ni les nombreux sommets, ni les multiples dialogues,
ni les diverses réunions, ni les innombrables appels et suppliques, n’ont ramené
la paix dans le pays et la sécurité au sein des populations de la RCA. Dans mes
nombreuses analyses diffusées auprès des médias audiovisuels ou écrits, j’ai
insisté de manière constante sur l’urgence de s’attaquer très rapidement aux
racines de l'instabilité pour éviter un affrontement armé généralisé. Ce que
je craignais est malheureusement arrivé. Désormais pour en sortir, il convient
d’abord d’enrayer les conditions de l’émergence de nouvelles rébellions. Ensuite,
les dirigeants doivent mettre en œuvre un ensemble de réformes de structure
pour reconstruire le pays sur de nouvelles bases. Pour réussir ces défis, il faut
installer les conditions nécessaires à ce processus à travers la tenue d’une
« conférence nationale souveraine » visant à débattre publiquement,
clairement et ouvertement des maux de la RCA et de leur résolution.
1°) L’instauration de la sécurité est l’élément central de la solution globale et ne
peut être assurée que par des forces internationales d’intervention autour de la
France. Les Forces armées centrafricaines (FACA) et les combattants de la
Séléka sont totalement disqualifiés pour intégrer le dispositif international. Une
refondation urgente des Forces de Défense et de Sécurité est nécessaire. Je
reste persuadée qu’une force multinationale armée nombreuse et
combattante est indispensable pour patrouiller, désarmer et sécuriser
l’ensemble du territoire centrafricain. Je considère que les forces
internationales sont la seule garantie de paix et de sécurité à travers tout le
pays, à condition qu’elles soient nombreuses et combattantes, et qu’il y ait une
bonne chaîne de commandement. Les Forces Armées refondées, républicaines
et professionnelles, poursuivront le processus de sécurisation du territoire.
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7. 2°) Il est urgent qu’un processus politique solide soit mis en place, en
même temps que le processus militaire de sécurisation du territoire, afin
d’apporter une solution durable qui redonne espoir à la population centrafricaine.
La solution politique pourrait être la mise en place d’une administration
provisoire sous l’égide des Nations Unies, de la France, de l’Union Africaine et
de la CEEAC. Cette administration aurait la mission de conduire la gestion du
pays jusqu’aux prochaines élections générales. Son objectif serait de mettre en
place les différentes étapes menant aux élections.
3°) L’organisation d’une Conférence Nationale Souveraine est à mon avis
l’étape cruciale et déterminante pour réussir la transition et jeter les fondations
solides pour la reconstruction. Ce grand débat national devrait rassembler
toutes les strates de la société Centrafricaine, les représentants des différents
acteurs politiques, économiques, sociaux, culturels, cultuels, les représentants
de la jeunesse, de la diaspora, des paysans etc., de la République
centrafricaine. Les Centrafricains devront débattre publiquement,
clairement et ouvertement des maux de la RCA et de leur résolution. Les
décisions issues de cette concertation nationale, tenue sur le territoire
centrafricain, qui s’imposeront à tous, nous permettront de fixer une feuille de
route, d’orienter le pays sur des bases solides dans sa gouvernance et dans la
place que le pays doit accorder à chacun de ses citoyens.
4°) La commission Vérité, Justice et Réconciliation de la Conférence Nationale
est l’un des instruments destinés à mettre fin à l’impunité, aux pillages, aux
destructions, aux tueries, afin de construire un Etat de droit, une paix durable et
les fondements du développement. C’est seulement sur la base de la vérité
assumée et de la justice rendue aux victimes qu’une véritable réconciliation
nationale peut avoir lieu.
5°) Idéalement la Conférence va indiquer les conditions de formation du
Gouvernement de transition. De la qualité des membres de l’équipe
gouvernementale dépendra l’efficacité de toutes les actions à mener. Une
équipe gouvernementale compétente et redynamisée, issue de la volonté de
l’ensemble des citoyens, apaiserait les tensions politiques. Il s’agira d’une
équipe restreinte de 15 à 20 personnes reconnues pour leur intégrité, leur
compétence, leur total engagement à la bonne gestion et à la reconstruction du
pays.
Les principaux responsables ayant été caution de la destruction du pays
et ne bénéficiant pas de la confiance du peuple devraient être disqualifiés
pour mener une transition consensuelle.
L’équipe gouvernementale restreinte sera en charge de mener le processus
conduisant à la réconciliation nationale, à la reconstruction de l’Etat, à la
reconstruction de l’appareil judiciaire, à l’optimisation de l’administration
publique, à l’élaboration de plans sur la réorganisation territoriale, la remise en
service de l’éducation, de la santé et des infrastructures publiques, et à
l’organisation des élections générales.
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8. Ce grand débat national que je souhaite depuis 2010 aurait dû se tenir
pour une transition transparente qui aurait permis l’établissement d’une
meilleure gouvernance du pays, particulièrement dans le domaine de la
lutte contre l’impunité. Car l’impunité est l’une des causes de l’instabilité
en Afrique Centrale.
Nous savons parfaitement qu’autrement, ni la Séléka ni les anti-balakas
n’arrêteront leurs tueries, leurs pillages et leurs exactions, que l’ordre ne sera
pas rétabli, que l’accès à l’assistance humanitaire restera désespérément
difficile.
Tous les acteurs politiques Centrafricains doivent également s’impliquer dans
cet effort pour restaurer la sécurité et l'État de droit, et surtout pour traiter les
causes sous-jacentes de l'instabilité qui persiste.
De mon point de vue, ce sont là les conditions nécessaires pour envisager un
avenir qui assurera à l’ensemble du peuple la paix, la prospérité et la
démocratie.
Date : Mercredi 2 avril 2014 à 18h15
Organisé par : l'Académie des Sciences d’Outre-Mer (Paris)
Présentation : Conférence sur le thème « Situation de la République Centrafricaine et propositions de
solutions
Intervenants :
• Marie-Reine HASSEN, Ancien Ministre du Gouvernement centrafricain, candidate aux élections
présidentielles en République centrafricaine
• Jacques SERRE, Président de l’Académie des Sciences d’Outre-Mer
Lieu de la manifestation : IEP, Amphi Bruno Etienne, Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence.
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