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Allocution du conseiller d'Etat Philippe Perrenoud au congrès de Force démocratique (9.11.2012)
1. Canton de Berne
Le Conseil-exécutif
Délégation pour les affaires jurassiennes (DAJ)
Le temps des divisions est définitivement révolu
Congrès de Force démocratique
Vendredi 9 novembre 2012 à Perrefitte
Allocution de Monsieur Philippe Perrenoud
Conseiller d’État
Président de la Délégation du Conseil-exécutif pour les affaires jurassiennes
Seules les paroles prononcées font foi !
Monsieur le président de Force démocratique
Monsieur le président d’honneur
Madame le maire
Monsieur l’ancien conseiller national
Monsieur l’ancien président de la Confédération
Mesdames et Messieurs les membres du Grand Conseil
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil du Jura bernois
Mesdames et Messieurs les membres d’autorités communales
Chères amies et chers amis du Jura bernois
Mesdames et Messieurs
J’ai l’honneur, et c’est pour moi un plaisir également, de vous adresser ce soir le cordial
salut du Conseil-exécutif du canton de Berne ainsi que l’assurance de sa très attentive
considération.
Et c’est au nom de sa Délégation pour les affaires jurassiennes qu’il m’incombe de vous
apporter le message des autorités cantonales, à un an de la consultation populaire sur
l’avenir institutionnel de notre région, sous réserve de l’approbation par le Grand
Conseil de la révision nécessaire à cette fin de la loi sur le statut particulier.
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Mesdames et Messieurs, il y a une dizaine de générations seulement, jamais un
représentant du gouvernement bernois ne serait venu dans notre région apporter un
message de bienveillance et de ferme appui. Tout au contraire, il y a près de deux
siècles, l’autorité bernoise affirmait sans mâcher ses mots ne pas vouloir de l’ancien
évêché de Bâle – « refus péremptoire et pour toujours ! » fit-elle savoir aux Alliés de
l’époque.
Réunies au Congrès de Vienne, les puissances européennes d’alors n’en ont pas tenu
compte et ont décidé que le dit territoire appartiendrait désormais au canton de Berne,
amputé de ses anciennes possessions vaudoise et argovienne. S’en est suivi une
intégration mouvementée, dont nous ne commettrons pas l’imprudence d’affirmer
qu’elle est achevée à la satisfaction de tous les partenaires concernés.
Il nous faudrait partager une longue veillée pour évoquer l’histoire tourmentée qui nous
a amenés au point où nous en sommes aujourd’hui.
Je pense souvent à celles et ceux qui nous ont précédés et grâce à qui la
Confédération helvétique s’est maintenue et a su prospérer, malgré les
bouleversements terribles qui ont entièrement remodelé l’Europe depuis 1815. Après la
Guerre du Sonderbund, notre pays a mis en place un ordre démocratique exemplaire,
qui s’est maintenu sans discontinuité contre vents et marées et que le peuple a
perfectionné avec constance, conscient que l’État de droit démocratique est la condition
sine qua non de notre liberté.
Au sein de la Confédération, Berne, une des cités-États les plus fortes de l’Europe du
nord des Alpes avant la Révolution française, ville riche et puissance militaire redoutée,
est devenu un canton comme les autres, encore qu’il y tient une place singulière.
En effet, sauf avec la République et Canton de Genève, Berne connaît une frontière
avec chacun des cantons de Suisse romande. Cette proximité avec la région
d’expression française de notre pays est pour nous, Bernoises et Bernois, quelle que
soit la langue de notre enfance, source de stimulations diverses et d’enrichissement
réciproque, mais cette proximité est aussi un facteur de responsabilité.
Nous nous efforçons donc de soigner les relations bilatérales avec chacun des cantons
romands et nous coopérons étroitement avec eux dans de nombreuses enceintes
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012
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politiques et économiques, notamment la Conférence des gouvernements de Suisse
occidentale.
C’est ainsi que, de puissance ambitieuse autant que belliqueuse, Berne est devenu
aujourd’hui, à maints égards, un canton-pont entre les deux régions culturelles
principales de la Suisse, une passerelle entre les espaces francophone et alémanique,
un facilitateur de liens, un facteur de cohésion aussi au sein de notre Confédération.
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Dans cette transformation profonde de l’État bernois, un élément a joué un rôle
considérable : l’affirmation progressive de l’identité jurassienne – les citoyens bernois
reconnaissant au milieu du siècle dernier l’existence d’un « peuple jurassien » par une
révision partielle de la constitution cantonale.
Dans notre région, les dernières décennies du 20e siècle ont été difficiles. Une majorité
d’entre nous en gardent le vif souvenir.
Notre pays a été traversé par une division profonde. Il y avait d’un côté celles et ceux
dont les sentiments patriotiques aspiraient à la création d’un nouveau canton suisse. Il y
avait de l’autre celles et ceux dont les sentiments patriotiques aspiraient à l’intégrité du
canton de Berne dans ses frontières issues du Congrès de Vienne. Ces aspirations se
sont exprimées avec vigueur et se sont révélées inconciliables. Le 1er mars 1970, il a
été décidé que le peuple souverain devait trancher.
Les campagnes précédant les plébiscites des années 1974 et 1975 ont été
douloureuses. Elles ont laissé des blessures durables.
Mesdames et Messieurs, le Conseil-exécutif éprouve une profonde empathie pour
celles et ceux qui, du fait des blessures du passé, abordent avec réticences, voire avec
méfiance, la période qui va nous conduire vers un nouveau scrutin populaire dont la
finalité, aux yeux du Conseil-exécutif du canton de Berne et du gouvernement de la
République et Canton du Jura, est de « régler politiquement le conflit jurassien », selon
les termes de leur commune Déclaration d’intention du 20 février 2012.
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012
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Chères concitoyennes, chers concitoyens, je vous le dis en toute solennité :
– le Conseil-exécutif ne permettra pas que les blessures du passé soient
rouvertes ;
– le Conseil-exécutif entreprendra tout ce qu’il faut pour que de nouvelles
blessures ne soient pas infligées ;
– le Conseil-exécutif s’engagera de toutes ses forces pour que le scrutin prévu
vienne conclure une campagne digne et respectueuse de toutes les
convictions en présence, conformément à notre haute tradition démocratique
et au droit applicable.
– J’en prends l’engagement devant vous et vous pouvez être certains que le
Conseil-exécutif tiendra parole.
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Mais fallait-il, Mesdames et Messieurs, accepter l’organisation d’un nouveau scrutin
populaire ?
Le Conseil-exécutif a longuement réfléchi à cette question. Et il a voulu n’y répondre
qu’une fois que la représentation démocratique de notre région, par la voix du Conseil
du Jura bernois, avait fait entendre qu’elle acceptait la perspective d’une consultation
populaire, tout en se prononçant majoritairement en faveur du « statut quo+ ».
La démarche du Conseil-exécutif s’inscrit dans sa volonté de cohérence et de fidélité
aux décisions rendues depuis vingt ans.
Avec l’accord du 25 mars 1994, les gouvernements bernois et jurassien ont renoncé,
sous l’égide de la Confédération, à la confrontation politique et choisi de miser sur la
promotion d’intérêts communs. Ils se sont engagés aussi à favoriser un dialogue
interjurassien, instituant notamment à cette fin l’Assemblée interjurassienne, l’AIJ.
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012
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Le Conseil-exécutif a donc reconnu la communauté d’intérêts qui lie les deux parties de
la région jurassienne. À ses yeux, cette communauté d’intérêts est le fondement du
dialogue qui doit régler les séquelles politiques des différends antérieurs.
Dans cette ligne, le Conseil-exécutif s’est engagé également à conférer au Jura bernois
la possibilité de s’affirmer et de construire par là son avenir. Le Conseil-exécutif a
finalement proclamé qu’il associerait la minorité autonomiste au processus,
reconnaissant ses droits à l’égale de la majorité.
Chères concitoyennes, chers concitoyens, ce dialogue interjurassien a porté ses fruits !
Aux yeux du Conseil-exécutif, le temps des divisions profondes, irréductibles,
irréconciliables est définitivement révolu.
– Nous vivons aujourd’hui le temps du dialogue, certes pas toujours aisé, mais
confiant.
– Nous vivons aujourd’hui le temps de la coopération, certes pas encore aussi
intensive que ce que les problèmes communs à résoudre exigeraient, mais
constructive autant que durable.
– Nous vivons aujourd’hui le temps des solutions élaborées solidairement,
certes avec des visions différentes, mais ne faisant pas des uns les ennemis
des autres.
– En tant que président de la Délégation du Conseil-exécutif pour les affaires
jurassiennes, je l’affirme sans la moindre réserve :
– Il n’y a plus de conflit jurassien !
– Il y a encore une question, des questions mêmes, certaines séquelles aussi
des affrontements antérieurs qui concernent toutes les Jurassiennes et tous
les Jurassiens.
– Mais le conflit qui nous a opposés au 20e siècle, la crise qui a un temps
menacé de nous entredéchirer, tout cela appartient désormais à notre
histoire commune et ne nous empêche plus d’aller de l’avant, main dans la
main, dans le respect des uns et des autres.
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012
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Dans son rapport final d’avril 2009, l’AIJ a donc pu présenter les deux manières qui, à
ses yeux, permettraient de régler les séquelles politiques subsistant maintenant que le
conflit jurassien a été apaisé. Vous les connaissez bien, Mesdames et Messieurs, je n’y
reviens pas.
Mais je souligne que l’AIJ a conclu sa démarche en expliquant que, je cite, « la solution
politique au conflit jurassien réside dans la capacité des deux régions à respecter leurs
spécificités, à poursuivre le dialogue interjurassien et à mener un débat démocratique
ouvert et serein sur l’avenir de la communauté interjurassienne. Par leur contribution au
débat public et leur sanction démocratique, c’est-à-dire un vote populaire, les citoyens
des deux régions apporteront d’eux-mêmes une solution politique au conflit jurassien ».
Voilà où nous en sommes. C’est la ferme volonté du Conseil-exécutif que de tout faire
pour que ce débat public et sa sanction démocratique aboutissent à la solution politique
que nous appelons de nos vœux. Les temps sont mûrs, j’en suis pleinement
convaincu !
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Chères concitoyennes, chers concitoyens, nous n’avons pas à craindre le débat qui a
commencé et la sanction démocratique qui y sera donnée. Nous sommes Jurassiens
bernois parce qu’une majorité de notre population en a voulu ainsi, la décision de créer
un nouveau canton une fois prise. Et nous nous préparons à confirmer dans la sérénité
que nous ne souhaitons pas changer de cap.
Eh oui, on peut être Jurassien, Romand, s’exprimer en français et se sentir totalement à
l’aise en tant que Bernois.
Cette diversité, c’est aussi cela la Suisse ! La Suisse plurilingue et multiculturelle.
Étant moi-même Jurassien bernois et politicien engagé de toutes mes forces pour le
bien de ce pays, j’explique volontiers à mes visiteurs d’autres cantons, notamment
romands, que :
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012
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– nous sommes Bernois, mais rien de ce qui concerne l’Arc jurassien ne nous
est étranger ;
– nous sommes Romands, de par la langue, la culture, les affinités, le plus
souvent aussi de par la sensibilité politique, mais nous ne sommes pas
opprimés à vivre dans un grand canton à majorité alémanique ;
– nous ne sommes pas tous bilingues, de loin pas, et parfois nous peinons
sous l’effort des traductions et adaptations nécessaires ; mais nous
apprécions la variété culturelle de notre canton et la diversité des identités
régionales qui y cohabitent de leur mieux ;
– nous sommes aussi farouchement attachés à nos spécificités et nous
sommes convaincus que nous pouvons les faire valoir à l’intérieur du statut
particulier que notre canton a voulu pour sa population francophone
minoritaire.
Bien sûr – et je m’adresse ici à nos hôtes de ce soir qui ne vivent pas dans le Jura
bernois – nous ne sommes pas, Jurassiennes bernoises et Jurassiens bernois,
unanimes sur la question de l’avenir institutionnel.
Parmi nous, certains militent pour une nouvelle entité cantonale, qui réunirait les
territoires de l’ancien évêché de Bâle, qu’ils éprouvent comme un Jura historique.
Parmi nous, d’autres estiment que l’existence de deux cantons dans le Jura exprime
une différence identitaire qui n’est pas antagoniste, mais qu’il convient de respecter
pour ce qu’elle est.
Cela étant, toutes et tous, malgré ces divergences fortes et parfois sources de tensions,
nous aimons le pays jurassien dans sa globalité et nous sommes prêts chaque jour à
nous engager de notre mieux en sa faveur.
Cette complexité spécifique du Jura bernois, croyez-moi, le Conseil-exécutif la
comprend bien. Il est convaincu qu’elle enrichit le canton dans son entier et que Berne
ne serait plus vraiment Berne si Berne n’était plus aussi… jurassien !
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012
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C’est pourquoi, chères concitoyennes et chers concitoyens du Jura bernois, le Conseil-
exécutif vous invite à faire, quand le moment de la consultation viendra, le choix de la
continuité.
Il vous invite à prendre dans notre canton toute la place qui est la vôtre !
Il vous assure que toute la population bernoise s’en réjouira et il vous promet qu’il ne
ménagera aucun effort pour que le dialogue interjurassien apaisé se renforce dans
l’intérêt des uns et des autres – objectif que nous poursuivons, pour reprendre les
termes du rapport final de l’AIJ, en suivant la piste du « statut quo+ ».
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Mesdames et Messieurs, chères amies et chers amis, je conclus.
Quelle que soit l’issue de la double votation populaire sur l’avenir institutionnel de la
région jurassienne, nous savons que l’avenir tout court passe par une coopération
renforcée dans tous les domaines possibles, par un dialogue respectueux des
différences et par un renforcement des solidarités. Cela est vrai pour les rapports
interjurassiens comme pour les relations confédérales.
À l’heure où la campagne a commencé, engageons-nous dans cet esprit !
Évitons les excès dégradant au rang d’ennemis celles et ceux dont les sentiments
patriotiques ne coïncident pas avec les nôtres !
Débattons avec franchise, pourquoi pas avec rudesse, mais en n’oubliant jamais,
quelles que puisse être l’ampleur de nos divergences, que nous sommes toutes et tous,
en définitive, des compatriotes autant que les artisans de la démocratie.
– Vive le Jura bernois !
– Vive le canton de Berne !
– Vive la Suisse !
Philippe Perrenoud, conseiller d’État Congrès de Force démocratique, vendredi 9 novembre 2012