1. Vers le Commun
Entre état et marchés : la dynamique du Commun
Vers de nouveaux équilibres
Colloque international
Université de Paris-Sorbonne
Panthéon-Assas
8-9-10 juin 2017
Sylvain Lavelle
sylvain.lavelle@icam.fr
2. Pourquoi le Commun ?
• Les limites des deux grands systèmes politiques :
- Capitalisme / Libéralisme
- Communisme / Socialisme
• Les limites des ‘Troisièmes Voies’ qui proposent une sorte de compromis entre ces systèmes.
• La place et le rôle de la société (‘civile’) en politique, qui rejoint la réflexion sur la démocratie contemporaine.
• Les relations entres élus et citoyens, entre experts et profanes, la possibilité d’une production commune d’un
point de vue épistémique, technique, ou éthique
• Ce qu’est la politique, ou ce qui est politique : les modes d’action, les conditions d’engagement et de sens, les
formes et les expériences du lien social, de l’échange et du partage.
3. Comment le Commun ?
• Le Commun est souvent entendu dans un sens politique / économique / juridique (propriété, gouvernance…).
• Or, il soulève également des questions d’ordre logique - toutes choses qui renvoient à un gradient de la
‘communalité’ (de l’identité à la différence).
• Le problème du vague, d’une définition du Commun : les critères de la ‘communalité’, de ce qui est commun,
ne sont ni évidents, ni fixes.
• Le problème de l’arrière-plan / avant-plan : les conditions d’arrière-plan (culturelles, sociales, matérielles,
institutionnelles,…) qui rendent possibles les accomplissements d’avant-plan (communication, compréhension,
accord, conflit, échange, …).
• Le problème de l’émergence / organisation : les conditions de l’apparition, du développement et de la
pérennité du commun dans ses principes de ‘liberté, égalité, fraternité’.
5. 1. Questions méthodologiques
• Aristote: ‘En général, vivre ensemble et partager tous les biens humains est difficile’ (Politique)
• Qu'est-ce qui est partagé dans le Commun ?
- Une propriété commune
- Un soin commun
- Un lien commun
- Un contexte commun
• Un partage sur quelle base ?
- occasionnelle
- régulière
- permanente
6. Un gradient logique
+ Identité Inclusion Union Intersection Exclusion Différence -
• 'Nous avons le même nom' (Identité)
• 'Mon nom est un nom européen' (Inclusion)
• 'Mon nom et ton nom font un nouveau nom' (Union)
• 'Mon nom et votre nom n'ont que deux lettres en commun' (Intersection)
• 'Votre nom n'est pas un nom européen' (Exclusion)
• ‘Mon nom est complètement différent du vôtre’ (Différence)
7. Un gradient politique
+ Identité Inclusion Partage Coopération Tolérance Exclusion Différence -
• 'Nous avons le même nom' (Identité)
• ‘Mon nom me fait appartenir à la culture européenne’ (Inclusion)
• ’Nous avons des noms différents, mais nous avons les mêmes droits’ (Partage)
• ’Nous avons des noms différents, mais nous pouvons travailler ensemble’ (Coopération)
• ‘J'accepte que ton nom ne soit pas européen’ (Tolérance)
• 'Votre nom fait de vous une personne non européenne' (Exclusion)
• 'Votre nom n'est pas comme les autres noms européens' (Différence)
8. Communication, communauté, communalité
• Dans le commun, on a une identité ou une différence selon :
(1) Ce que nous sommes
(2) Ce que nous avons
(3) Ce que nous sommes et ce que nous avons
(4) Ce que nous pensons
(5) Ce que nous disons
(6) Ce que nous faisons
(7) Ce que nous expérimentons
(8) Ce que nous vivons
(9) Ce que nous supposons (sans toujours en avoir conscience...)
Communication
Communauté
Communalité
9. 2. Questions anthropologiques
• Aristote: ‘En général, vivre ensemble et partager tous les biens humains est difficile’ (Politique)
• Pourquoi est-ce difficile de vivre en commun ?
- En raison des tendances individualistes des personnes qui veulent la liberté et la propriété privée.
- En raison des dangers de l'oppression collectiviste qui imposent à quiconque l'égalité et la propriété publique.
- Ou simplement en raison des différences d'êtres humains.
• Des différences sur quelle base ?
- des intérêts et de fins personnels.
- des milieux ou des cadres culturels, sociaux ou environnementaux.
10. L’avant-plan et l’arrière-plan du Commun
• L’avant-plan de la communalité (par exemple: la communication) peut difficilement être pensé sans le rapporter
à l'arrière-plan de l'acteur (structures, habitus, référentiels…).
• Une discussion avec Vincent Descombes : ‘le Commun est la condition de l’accord et du désaccord’.
• Cette partie est la ‘métaphysique’ du commun, les hypothèses qui forment la ‘grammaire’ et ‘l’architecture’
idéologique, ontologique, cosmologique d'une personne ou d'une communauté.
• Bollier : ‘Les questions (de métaphysique) demeurent quelque peu entourées de mystère, du moins pour ceux
d’entre nous qui sont enfermés dans la conception occidentale, moderne et scientifique du monde…Proposer
une nouvelle métaphysique des communs…entraîne des questions troublantes sur les présupposés
fondamentaux de l’économie de marché et de la démocratie libérale’ (La renaissance des Communs, p. 156)
11. De l’anthropologie à l’écologie (politique)
• Un nouveau défi pour le Common est le passage d'une vision naturaliste occidentale (‘anthropique’ : humain -
humain) à une vision non naturaliste plus globale (‘écouménique’ : humain – non humain).
• La matrice des ontologies (Descola)
‘Sortir de l'ontologie moderne
du naturalisme '
• L'écologie politique (Latour)
Diplomatie ontologique
'Produire un monde commun'
• Question : peut-on négocier une ontologie ?
Ou ne fait-on que tolérer une autre ontologie ?
Similitudes psychiques
(internes)
Différences physiques
(externes)
Animisme Totemisme
Similitudes psychiques
(internes)
Similitudes physiques
(externes)
Différences psychiques
(internes)
Similitudes physiques
(externes)
Naturalisme Analogisme
Différences psychiques
(internes)
Différences physiques
(externes)
Mont Uluru,
Australie
12. Ph. Descola, La composition des mondes
‘On peut considérer que la séparation conceptuelle entre la nature et la culture a conduit à ne pas concevoir le
milieu environnant comme un enjeu véritablement social, autrement que comme un gisement de ressources à
allouer, à s’approprier, à mettre en valeur…L’écologie politique s’est principalement développée comme une prise
en charge des extériorités environnementales de la vie sociale qui perpétue dans une large mesure la séparation
entre humains et non-humains. L’opération qu’il s’agit de faire à présent consiste au contraire à concevoir la
destinée des humains et celle des non-humains comme intrinsèquement mêlée…Il faut maintenant penser sans
(la nature) afin d’imaginer de institutions qui permettraient de réaliser le couplage des humains et des non-
humains, c’est-à-dire de gouverner dans les mêmes termes la vie de l’ensemble des êtres…Il y a donc un travail
considérable à faire pour penser de nouveaux instruments de gouvernement de l’ensemble des composantes des
mondes, et pour que les citoyens animés par le désire de l’action publique puissent rendre acceptables ces
nouveaux instruments en les débattant dans la collectivité. C’est un travail d’autant plus titanesque qu’il est
illusoire de penser qu’on pourra le mener à bien de façon abstraite et universelle’.
13. 3. Problèmes du Commun
• Problèmes I
- la syntonie (la concorde, le ‘parler-ensemble’)
- la synergie (la coopération, le ‘travailler-ensemble’)
- la symbiose (la coexistence, le ‘vivre-ensemble’)
• Problèmes II
- la synthèse (la composition, homogène ou hétérogène)
- la dynamique (le changement, exogène ou endogène)
- le système (la gouvernance, hiérarchie, sous-systèmes)
• Problèmes III
- l’auto-organisation (la capacité de s’organiser soi-même)
- l’autonomie (la capacité de se donner ses propres règles, ou lois)
- l’autarcie (le gouvernement de soi, par soi)
14. 4. Hypothèses sur le Commun
• Hypothèse I : une compréhension correcte de ce qu’est le Commun nécessite de prendre en compte non
seulement les aspects ‘logiques’ (langage, communication, ...), les aspects ‘politiques’ (propriété, organisation,
gouvernance), mais aussi les aspects méthodologiques et anthropologiques ('métaphysique’ - idéologie,
ontologie, cosmologie, ...).
• Hypothèse II : le Commun peut être développé en vue de produire un certain type de relations (liens communs)
entre les humains et aussi avec les non-humains (paysages, plantes, animaux, artefacts, ...) qui promeut en
termes de ‘communalité’ une version particulière du ‘lien social’ et du ‘lien naturel’.
• Hypothèse III : le Commun n'est pas défini uniquement par la nature d'une institution ou d'une organisation
(l'État ou le marché), mais par la dynamique d'action et de sens des acteurs qui appartiennent à cette institution
ou cette organisation.
• Hypothèse IV : le Commun comme ‘troisième voie’ peut être une composante d'une triarchie, un système
triadique de relations, d'actions et de règles qui permet l’interaction des ‘commoneurs’ avec les acteurs de l'État
et du marché.