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Février 2016 - Et d'abord c'est qui ce Uber?
- 1. 30 • vegetable.fr • no
330 / février 2016
GRANDE DISTRIBUTION Regard d’expert
par Bertrand GUÉLY
©FFANG-DREAMSTIME.COM
Comme pour
l’enfant qui
fracasse ses plus
beaux jouets, nous
sommes prompts
à galvauder les
quelques pépites
qui émergent
difficilement
du magma souvent
insipide de
nos rayons... ”
A PRIORI, LES EXPERTS SONTAUSSI
CONFIANTS DANS LEUR MODÈLE
QUE NE L’ÉTAIENT LES GÉNÉRAUX
FRANÇAIS DE L’INFRANCHISSABILITÉ
DE LA LIGNE MAGINOT EN 1940 ET LES
RISQUES PARAISSENT EFFECTIVEMENT
ENCOREASSEZ FAIBLESAVEC
UN PRODUITVOLUMÉTRIQUE
QUIA BESOIN D’ESPACE POUR ÊTRE
CONVENABLEMENT DÉPLOYÉ
ET UNTAUX DE PÉNÉTRATION CLIENT
QUI RESTE ÉLEVÉ.
P
ourtant, il semble bien que les
clients, exaspérés par les lacunes
récurrentes de ce que leur proposent
les canaux traditionnels de mise en
marché (service minimum, mainte-
nance défaillante, prix jugés élevés et, surtout,
opaques, méfiance grandissante vis-à-vis de
la sécurité alimentaire...), ne demandent qu’à
s’échapper vers un nouveau modèle qui com-
blerait tout ou partie de ces vides. J’en veux
pour preuve l’insistance des primeurs à ne pas
disparaître, voire le retour en grâce de ces vrais
spécialistes, l’explosion des chaînes de spécia-
listes du frais, les Amaps, les guitounes de bord
de route pour les fruits d’été…
D’ailleurs, certains des paramètres nécessaires
à une Ubérisation prochaine, même partielle,
sont d’ores et déjà indéniablement réunis :
1 La GMS, même contestée, reste dominante
sur le marché des fl.
2 Les tentatives d’acteurs nouveaux de l’écono-
mie numérique pour redessiner ce marché,
à ce jour pas encore vraiment efficaces,
existent toutefois bel et bien.
3 Celles-ci n’entraînent cependant pas à ce jour de
réveil de la GMS. Au-delà des belles déclara-
tions d’intention, celle-ci reste engluée dans
ses problématiques de rentabilité et sans solu-
tion pérenne face à ses vieux démons.
4 Les aspirations pour une économie du partage
(sites collaboratifs, achats en ligne...) et de
l’innovation sont palpables.
5 Les secteurs déjà ubérisés aujourd’hui
démontrent que les leviers qui l’ont permis
sont multiples : amabilité/service autant que
le prix pour les taxis parisiens (origine du phé-
nomène), discrétion pour l’effeuillage à domi-
cile, rapidité pour les services collaboratifs
entre particulier (crédit, livraison, location...),
prix pour les start-up de conseil intervenant
sur des monopoles abusifs (ex. : juridique)…
6 Les quelques tentatives dans l’alimentation (par-
tage de son dîner, plantation de son potager à
distance, chef à domicile...) sont encore
timides. Elles relèvent d’abord souvent de
l’économie collaborative et illustrent aussi
clairement la volonté (forcée ?) du consom-
mateur de supprimer les intermédiaires.
D’ailleurs, 1 producteur sur 5 vend en circuit
« Et d’abord,
c’est qui ce Uber ? »
- 2. NOUVEAU !
www.vegetable.fr/
blogs/guely
Retrouvez l’humeur
de Bertrand Guely
sur son végéblog :
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©FFANG-DREAMSTIME.COM
FAIRE TOMBER LES BARRIÈRES
Voir, sentir, goûter
avant d’acheter !
Et si même cette barrière-là tombait ? On peut noter au moins
3 bonnes raisons pour ça :
• Même si le client ne le sait pas -ou ne l’accepte pas- encore
et au risque de faire tousser certains (Coffe ! Coffe !), on peut
modéliser une partie des constitutifs fondamentaux du goût.
Comme inscrits sur n’importe quelle fiche de spécifications
qualité, la couleur, la pénétro et un indice mili-équivalents
réfléchi garantissent en partie un fruit à noyau de qualité
(mais pas forcément son arôme...).
• Même en fl, suivant la voie tracée par d’autres pans de
l’agroalimentaire, la tendance est aux fruits typés « ni trop
ni pas assez ». Les pommes Fuji et Royal Gala, parfois taxées
d’être de l’eau sucrée, ont aujourd’hui écarté bon nombre de
concurrentes pourtant plus goûteuses.
• L’inculture produit du client final, et c’est bien notre faute,
ne lui permet pas d’acheter de façon éclairée. L’amateur
d’Orangered, obnubilé par le blush, se fera Pinkotisé à la
première occasion et les volumes de Cœur de bœuf que
s’arrachent fiévreusement les bobos sont bien supérieurs
au potentiel de production provençal... Comme pour l’enfant
qui fracasse ses plus beaux jouets, nous sommes prompts à
galvauder les quelques pépites qui émergent difficilement du
magma souvent insipide de nos rayons...
en bref
L’ubérisation est-elle possible en fl ?
Le mois prochain :
Comment gérer un changement
d’interlocuteur ?
court et les sites se multiplient, à grand ren-
fort de mots magiques pour le consomma-
teur déçu de l’existant (panier, paille, paysan,
producteur, potager, épouvantail, saveur,
direct, local…).
7 Les pouvoirs publics, qui ont compris l’intérêt
politique de taper sur les grands méchants de
la GMS, ferment déjà les yeux sur les normes
sanitaires (cf. mon article sur les marchés « pro-
vençaux ») qui ne sont pas du même niveau
d’exigence pour tous… Le porte-à-faux avec la
loi ne sera donc pas un frein.
Barrières protectrices contre l’ubérisation
1 Beaucoup de clients achètent en GMS car, à part
les retraités, les employés de banque et les
adeptes des 35 h, peu de gens ont le temps (et
surtout l’envie) d’acheter à plusieurs endroits.
Le « Tout sous le même toit » a encore, de
part sa praticité, de beaux jours devant lui.
2 Le côté souvent déceptif du produit induit de
fait une volonté de vérifier avant d’acheter.
Peu importe si les critères de contrôle du
client sont encore majoritairement visuels,
un peu tactiles et rarement gustatifs, on a
encore du mal à franchir le pas. En atteste,
par exemple, le peu de succès de la mise à
disposition des fl achetés sur photo au
drive, même avec des palliatifs comme « on
vous présente le colis et vous choisissez » ou le
« remboursement sans discussion ».
3 La présentation figée des produits sur internet
(photos ou même vidéos) façon catalogue,
ne restitue en rien l’ambiance marché pro-
pice aux achats d’impulsion.
4 L’ubérisation se fait aussi naturellement sur des
secteurs où il y a de l’argent à gagner. Or, n’en
déplaise aux journalistes sensationnalistes
qui matraquent régulièrement les soi-
disant marges abusives de tel ou tel, le fl
est un secteur de passionnés un peu maso-
chistes, prêts à prendre beaucoup de risque
sur des volumes importants de périssables
pour gagner finalement peu d’argent. Pas
vraiment de quoi faire rêver à part des nos-
talgiques ou des idéalistes, convaincus des
effets de la malbouffe…
On peut, sans risquer de beaucoup se tromper,
gager que si l’ubérisation des fl n’a pas encore
eu lieu, c’est pour une raison majeure : l’inca-
pacité actuelle des modèles alternatifs à appor-
ter tout ce qui manque en une fois.
Par exemple, les primeurs sont chers (même si
c’est probablement un frein mineur pour des
clients avides de service/conseil) et ne démo-
cratisent pas la consommation, même les spé-
cialistes du frais ne sont pas irréprochables
tout le temps dans tous leurs points de vente
et l’offre des Amaps reste locale, saisonnière
et courte et s’adressent surtout à des clients
qui acceptent de manger majoritairement des
carottes et des pommes, les ventes directes en
Provence de melon et fruits à noyau durent
naturellement le temps des vacances d’été des
Parisiens…
Gageons que l’ubérisation aurait eu lieu depuis
longtemps si tous les avantages que ces alter-
natives offrent étaient réunis, tant le rayon fl
sort en tête de liste des mécontentements des
clients de la GMS.
On pourrait même envisager de déléguer ces
achats à un « acheteur missionné » : vous lui
confiez une liste de courses et lui se charge,
via l’ensemble des canaux de mise en marché,
d’acheter ce que vous ciblez.
Fruits
et légumes, vin,
même salut ?
Je veux des produits
beaux, bons,
sains, de saison et
français si possible.
Je veux les acheter
au juste prix. J’ai
besoin qu’on me
rassure, qu’on
m’explique, qu’on
me guide, qu’on me
fasse découvrir les
multiples saisons/
variétés/terroirs. Et
si finalement, le fl
était particulièrement
semblable au
vin ? Quand on
voit comment les
vins français se
sont fait tailler des
croupières par ceux
de l’hémisphère
Sud, on a du souci
à se faire… Alors,
à quand le premier
guide Porter des fl ?
Les clients n’hésitent
pas à acheter du vin
en ligne sur la base
de conseils et de
notes…
Partenaire
du 9e
Forum végétable
www.cartononduledefrance.org
PLATEAU EN CARTON ONDULÉ :
S’ASSURER LA PERFORMANCE
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