En cette fin de période de vacances et pour accompagner votre rentrée, la promotion 2017 des élèves du mastère OSE se sont mobilisés pour vous présenter leur dernière édition de l’inf’OSE.
Si l’on se concentre sur le secteur de l’énergie et que l’on exclut de fait l’affaire Benalla, on peut dire que l’actualité est restée calme cet été. C’était sans compter sur cette nouvelle tombée mardi 28 août qui marque la rentrée : la démission surprise de Nicolas Hulot. L’ancien ministre de la transition écologique et solidaire a dit ne plus vouloir se mentir. Qu’en sera-t-il des arbitrages rendus dans le cadre de la PPE dont la première version sera rendue publique au cours de ce mois?
La France, qui comme nous vous le montrons dans ce numéro a pour le moment seulement fait part de ses ambitions, va-t-elle en tirer les enseignements pour enfin se décider à engager les bons moyens pour atteindre ses objectifs climatiques?
Les attentes sont nombreuses, particulièrement pour l’avenir du secteur électrique français, l’occasion pour nous de vous partager une vision du réseau électrique de demain au centre duquel interviendra le stockage.
Nicolas Hulot le martelait constamment : il faut changer de modèle et changer d’échelle. Nous évoquons dans ce numéro l’exemple d’un modèle de transition écologique en Inde ainsi qu’une solution innovante pour le traitement de l’eau.
Enfin, puisque le problème du changement climatique est mondial, nous vous proposons une synthèse du rapport édifiant de l’AIE sur les investissements énergétiques dans le monde en 2017.
Le moment est venu pour nous de passer la main à la prochaine promotion du mastère OSE. Nous la rencontrerons à l’occasion du Congrès OSE 2018 : « L’Hydrogène : Vecteur énergétique du futur ? », auquel vous êtes tous conviés et qui se déroulera le mardi 25 septembre prochain à l’Ecole des Mines de Paris, site de Sophia Antipolis (site d’inscription : https//congresose2018.eventbrite.fr).
Florian ROUOT
1. http://eleves-ose.cma.mines-paristech.fr/
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Dossier :
Le stockage électrique au
service des interconnexions
des réseaux électriques
de demain
>> page 13
Mensuel sur l’énergie et l’environnement
N° 135Août - Septembre 2018
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En cette fin de période de vacances et pour
accompagner votre rentrée, la promotion 2017
des élèves du mastère OSE se sont mobilisés
pour vous présenter leur dernière édition de
l’inf ’OSE.
Si l’on se concentre sur le secteur de l’énergie
et que l’on exclut de fait l’affaire Benalla, on
peut dire que l’actualité est restée calme cet été. C’était sans compter
sur cette nouvelle tombée mardi 28 août qui marque la rentrée : la
démission surprise de Nicolas Hulot. L’ancien ministre de la transi-
tion écologique et solidaire a dit ne plus vouloir se mentir. Qu’en
sera-t-il des arbitrages rendus dans le cadre de la PPE dont la pre-
mière version sera rendue publique au cours de ce mois ?
La France, qui comme nous vous le montrons dans ce numéro a pour
le moment seulement fait part de ses ambitions, va-t-elle en tirer
les enseignements pour enfin se décider à engager les bons moyens
pour atteindre ses objectifs climatiques ?
Les attentes sont nombreuses, particulièrement pour l’avenir du
secteur électrique français, l’occasion pour nous de vous partager
une vision du réseau électrique de demain au centre duquel inter-
viendra le stockage.
Nicolas Hulot le martelait constamment : il faut changer de modèle
et changer d’échelle. Nous évoquons dans ce numéro l’exemple d’un
modèle de transition écologique en Inde ainsi qu’une solution innov-
ante pour le traitement de l’eau.
Enfin, puisque le problème du changement climatique est mondial,
nous vous proposons une synthèse du rapport édifiant de l’AIE sur
les investissements énergétiques dans le monde en 2017.
Le moment est venu pour nous de passer la main à la prochaine
promotion du mastère OSE. Nous la rencontrerons à l’occasion du
Congrès OSE 2018 : « L’Hydrogène : Vecteur énergétique du futur ? »,
auquel vous êtes tous conviés et qui se déroulera le mardi 25 sep-
tembre prochain à l’Ecole des Mines de Paris, site de Sophia Antipolis
(site d’inscription : https//congresose2018.eventbrite.fr).
Florian ROUOT
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
2 ÉDITORIALCONTACTS
3. DOSSIER
ARTICLES
04 - La France, ambitieuse mais en retard
sur ses objectifs climatiques
08 - Et à l’échelle mondiale, quels investiss-
ments dans le secteur énergétique ?
21 - Autoconsommation photovoltaïque en
France
24 - Vers un marché régional de l’électricité
en Afrique de l’ouest
26 - Auroville, un exemple de transition
écologique à taille humaine
28 - Mascara, ou comment produire de
l’eau...avec du soleil
L’Hydrogène, vecteur énergétique du futur ?
Mardi 25 Septembre 2018 à Sophia Antipolis (06)
Le programme de ce colloque s’articulera autour des applications de l’hydrogène les plus prom-
etteuses. Seront détaillées entre autres les caractéristiques de production, stockage et transport,
ainsi que l’évaluation des performances économique et environnementale de ces applications.
Pour plus d’informations, contactez : evenement@mastere-ose.fr
13 - Le stockage de l’électricité au service
des interconnexions des réseaux élec-
triques de demain
Programme ÉVÉNEMENT OSE 2018, page 30
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
3SOMMAIRE
4. La France, ambitieuse mais en retard sur
ses objectifs climatiques
LA FRANCE, CHEF DE FILE DE
LA LUTTE CONTRE LE CHANGE-
MENT CLIMATIQUE
« M a k e o u r p l a n e t g re a t
again ». C’est par cette phrase
un peu moqueuse que le pré-
sident Emmanuel Macron a
réagi à la décision de Donald
Trump de faire sortir les Etats-
Unis des accords de Paris, en
2017. En assénant ce slogan
à de multiples reprises, le
président français entendait
imprimer un message fort dans
les consciences : la France est
résolument engagée dans la
lutte contre le changement
climatique et assume volon-
tiers son rôle de chef de file,
ouvrant la voie vers un monde
plus durable.
Il faut dire que l’hexagone s’est
fixé des objectifs ambitieux,
affichant dès 2003 sa volonté
d e s u i v re u n e t r a j e c to i re
“facteur 4”, visant à diviser par
4 les émissions nationales de
gaz à effet de serre (GES) entre
1990 et 2050 [1]. En 2015,
la Stratégie Nationale Bas
Carbone (SNBC) formalise cet
engagement, pendant qu’est
adoptée en août la loi sur la
transition énergétique pour la
croissance verte (LTECV ), qui
détaille les objectifs du futur
système énergétique français.
En juillet 2017, quinze ans
après l’annonce de l’objectif
“facteur 4”, le ministre Nicolas
Hulot va encore plus loin lors
de la présentation du plan
climat du gouvernement, révé-
lant l’ultime graal à atteindre
à l’horizon 2050 : la neutralité
carbone – c’est-à-dire qu’en
plus de réduire autant que
possible les émissions natio-
nales, il faudra compenser le
reste des GES émis [2].
Pour y parvenir, on s’appuiera
notamment sur la programma-
tion pluriannuelle de l’énergie
(PPE), arme de poids pour
réussir la transition énergé-
tique française. La PPE cor-
respond à la feuille de route
à suivre pour atteindre les
objectifs ambitieux figurant
désormais dans la LTECV [3],
dont :
• la neutralité carbone en
2050,
• la réduction par 2 de la
consommation d’énergie
finale en 2050,
• la réduction de la part des
fossiles de 30% d’ici 2030
• l’augmentation de la part
des renouvelables pour
atteindre 32% d’ici 2030,
• la baisse de la par t du
nucléaire à 50%, à une date
à déterminer.
LES CONSÉQUENCES DRAMA-
TIQUES DU CHANGEMENT CLI-
MATIQUE SONT COMPRISES,
MAIS LA RÉPONSE EST-ELLE
ADAPTÉE ?
Ces ambitions prouvent que
les gouvernements succes-
sifs ont bien saisi les enjeux
du changement climatique, à
l’heure où se succèdent des
événements météorologiques
t o u j o u r s p l u s e x t r ê m e s ,
venant chaque année effacer
les records précédemment
établis : températures canicu-
laires, ouragans destructeurs,
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
4 FRANCE
5. incendies ravageurs, sécher-
esses inédites... Toutefois,
se fixer des objectifs ambi-
tieux pour enrayer le change-
ment climatique ne constitue
qu’une première étape dans la
“bataille des 2°C”, à laquelle
les participants de la COP21
ont promis de prendre part. Le
défi majeur, en réalité, est de
se donner les moyens d’y par-
venir. Et c’est là que les choses
se corsent : la France sera-t-
elle vraiment à la hauteur de
ses prétentions climatiques ?
Pour l’instant, les progrès se
font timides.
DES ÉMISSIONS DE GES EN
HAUSSE
Entre la fin des années 1990 et
2014, la France a globalement
diminué ses émissions de GES
(voir figure ci-dessus).
Cependant, en 2015 puis 2016,
ces émissions sont reparties
à la hausse, pour atteindre
463 MtCO2
eq en 2016. Or, la
SNBC adoptée en 2015 et qui
fixait les niveaux d’émissions
sectoriels à ne pas dépasser
afin de respecter la trajec-
toire “facteur 4”, plaçait le
plafond à 447 MtCO2
eq, soit
3,6% de moins que les émis-
sions avérées. Le secteur des
transports et du bâtiment sont
parmi les plus gros émetteurs,
avec l’agriculture et l’industrie
(voir figure 2) et sont de plus
les 2 secteurs ayant le plus
dévié des objectifs fixés par
la SNBC (+6% et +11%, respec-
tivement). Parmi les causes
avancées pour expliquer cette
hausse en 2015-2016 figurent
“le faible prix des produits
pétroliers, qui incite à la con-
sommation” ou encore les pro-
blèmes rencontrés par cer-
taines centrales nucléaires
ayant entraîné une utilisation
Evolution des émissions globales de gaz à effet de serre en France
et objectifs SNCB [4]
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
5FRANCE
6. accrue des centrales ther-
m i q u e s f o n c t i o n n a n t a u x
énergies fossiles for tement
carbonées [1].
De plus, le 19 juillet dernier
f u r e n t p r é s e n t é e s l e s
dernières projections dans le
cadre du comité de suivi de
la SNBC et de la PPE, et les
chiffres avancés soulignent
un retard conséquent sur les
objectifs affichés. Les scénar-
ios actualisés indiquent que
le “budget carbone” fixé par
la SNBC risque d’être dépassé
jusqu’en 2024, avec des excé-
dents atteignant 24 MtCO2
eq
sur la période 2019-2023 [1].
MAITRISER LA DEMANDE EN
É N E R G I E E T A B A N D O N N E R
LES FOSSILES, DEUX DÉFIS
MAJEURS
La LTEC V vise respec tive -
ment 20% et 50% de réduc-
t i o n d e l a co n s o m m a t i o n
énergétique finale française,
en 2020 et 2050, par rapport
à 2012. Pourtant, les projec-
tions présentées le 19 juillet
n’anticipent qu’une baisse de
17% et 44% pour ces 2 éché-
ances. De plus la pénétration
des renouvelables anticipée
d’ici 2050 est de 31%, contre
les 32% visés par la LTECV.
Critiquer un si faible différen-
tiel peut sembler relever de
l’excès de zèle, pourtant la
France a joué un rôle crucial
pour que soit adopté le chiffre
de 32% au niveau Européen,
jugeant les 27% proposés
par Bruxelles trop modestes
[5]. En parallèle, le Syndicat
des énergies renouvelables
a publié en janvier 2018 un
rapport montrant qu’un objec-
tif de 41% d’énergies renouv-
e l a b l e s à l ’ h o r i z o n 2 0 5 0
était atteignable - à condi-
tion d’une “volonté politique
déterminée” [6].
DES MESURES ENCORE TROP
TIMIDES POUR REMPLIR LES
OBJECTIFS
Au vu des émissions récentes,
d’importants efforts devront
être consentis, en particulier
dans le secteur des transports
et du bâtiment, pour attein-
dre la neutralité carbone fixée
par le plan climat. D’aucuns
jugent les engagements pris
à l’heure actuelle encore trop
timides. Par exemple, le plan
de rénovation énergétique
des bâtiments, présenté en
avril 2018, table sur 500 000
rénovations thermiques annu-
elles au niveau BBC, alors que
700 000 rénovations seraient
nécessaires pour respecter les
budgets carbone définis par
la SNBC, d’après le Réseau
Action Climat [7, 8].
Autre exemple, concernant la
sortie des fossiles : si la loi
adoptée en décembre 2017
sur la fin de la recherche et de
l’exploitation des hydrocar-
bures en France a envoyé un
signal positif, elle est restée
Emissions sectorielles estimées en 2016, en MtCO2
eq [4]
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
6 FRANCE
7. symbolique. Le pétrole et
gaz français représentent en
effet 1% de la consommation
nationale, et la loi n’interdira
l’extraction des hydrocarbures
du sous-sol français qu’en
2040. De surcroît, elle n’a
pas empêché Total d’obtenir
récemment la prolongation de
son permis d’exploration au
large des côtes guyanaises [9].
S u r l e c h a r b o n , e n f i n :
Emmanuel Macron avait fait
de la fermeture de ces cen-
trales une promesse de cam-
pagne. Pourtant, les quatre
centrales à charbon restan-
tes en France (au Havre, à
Cordemais, S aint-Avold et
Gardanne) sont toujours en
état de marche. Si le gouver-
nement a annoncé leur recon-
version ou fermeture défini-
tive en 2022, les modalités
restent à définir, et certaines
questions restent en suspens.
Ces centrales “de pointe” per-
mettent, en effet, de passer
les pics de consommation
hivernaux, et ont ainsi tourné
à plein régime lors des 2 der-
niers hivers. Leur abandon ne
sera donc possible qu’à con-
dition de trouver une alterna-
tive crédible d’ici 2022 [10].
L E C H E M I N S ’A N N O N C E
ENCORE LONG
On le voit, les intentions sont
louables mais les résultats
tangibles de réduction des
impac ts environnementaux
se font toujours attendre.
Tout espoir n’est pourtant pas
perdu d’atteindre la neutral-
ité carbone d’ici 2050, selon
le ministère. Les émissions de
81 MtCO2
eq anticipées pour
2050 par les scénarios actu-
alisés devront alors être com-
pensées par des solutions de
stock age de carbone, sous
terre ou dans les forêts [5].
Une chose est sûre, la transi-
tion énergétique s’annonce
c o m m e l e g r a n d d é f i d e
ce 21e siècle, et le chemin
pour y par venir sera long
et semé d’embûches. Seuls
des engagements forts, des
investissements conséquents
et un suivi rigoureux des
progrès effectués permettront
d’atteindre, peut-être, la neu-
tralité carbone au milieu du
siècle.
Chloé POTIER
Sources :
[1] P. L. Hir, « Gaz à effet de serre : la France sur la mauvaise pente », Le Monde.fr, 23-janv-2018.
[2] Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire, « Plan Climat 2017 », 06-juill-2017. [En ligne]. Disponible sur: https://
www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2017.07.06%20-%20Plan%20Climat_0.pdf.
[3] Ministère de la Transition écologique et solidaire, « Loi de transition énergétique pour la croissance verte », 13-déc-2016.
[En ligne]. Disponible sur: https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/loi-transition-energetique-croissance-verte.
[4] Ministère de la Transition écologique et solidaire, « Suivi de la Stratégie Nationale Bas-Carbone », 02-janv-2018. [En ligne].
Disponible sur: https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/suivi-strategie-nationale-bas-carbone.
[5] P. L. Hir, « La France en retard sur ses objectifs climatiques », Le Monde.fr, 20-juill-2018.
[6] Syndicat des Energies Renouvelables, « Révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie », p. 24, janv. 2018.
[7] Réseau Action Climat, « La France recule sur son action pour le climat et la transition énergétique ? », 09-juill-2018. [En ligne].
Disponible sur: https://reseauactionclimat.org/la-france-recule-climat-transition-energetique/. [Consulté le: 03-août-2018].
[8] Ministère de la Transition écologique et solidaire, « Rénovation énergétique des bâtiments : un plan pour accélérer la mobil-
isation générale », 26-avr-2018. [En ligne]. Disponible sur: https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/renovation-energet-
ique-des-batiments-plan-accelerer-mobilisation-generale. [Consulté le: 03-août-2018].
[9] Service Planète, « Macron : sur l’environnement, une parole forte, mais des gestes faibles », Le Monde.fr, 07-mai-2018.
[10] N. Wakim, « Les centrales à charbon seront difficiles à fermer », Le Monde.fr, 09-juill-2018.
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
7FRANCE
8. Et à l’échelle mondiale, quels
investissements dans le secteur
énergétique ?
L’Agence Internationale de
l’Énergie a publié le 17 juillet
dernier son rapport « World
Energy Investment 2018 » [1]
sur les investissements inter-
nationaux dans le secteur de
l’énergie en 2017. Celui- ci
annonce que l’investissement
global a subi une légère baisse
en 2017, poursuivant ainsi son
déclin depuis trois années
consécutives. La valeur de
ces investissements était de
1800 milliards de dollars en
2017, marquant ainsi 2% de
décroissance par rappor t à
l’année précédente : retour
sur les principales constata-
tions de ce rapport.
A p r è s p l u s i e u r s a n n é e s
d’investissements internation-
aux dans les énergies renouv-
elables, la tendance semble
s’inverser en 2017 avec des
investissements dans les éner-
gies fossiles s’inscrivant en
hausse pour la première fois
depuis 2014. Les dépenses sur
l’exploration et la production
d’hydrocarbures s’est élevé,
en effet, à 59% des inves-
tissements mondiaux dans
les sources de produc tion
d’énergie en 2017, marquant
ainsi une légère progression
par rapport à l’année 2016,
après plusieurs années con-
sécutives de baisse depuis la
chute des prix du pétrole brut
en 2014. Selon le directeur
exécutif de l’AIE Fatih Birol,
le recul des investissements
d a n s l e s s o u rce s d e p ro -
duction renouvelables et la
baisse des investissements
dans l’efficacité énergétique,
pourraient représenter une
réelle menace pour le déploi-
ement des énergies propres
qui demeure indispensable
pour atteindre les objectifs
en termes de sécurité éner-
gétique, de pollution atmo-
sphérique et de changement
climatique. Il a ainsi jugé
« décevant » de voir ces inves-
tissements diminuer alors
qu’ils devaient être en forte
croissance.
Parallèlement à cette aug-
m e nt at i o n d e s i nve s t i s s e -
m e n t s d a n s l e s a c t i v i t é s
d’exploration de pétrole et
de gaz, les investissements
d a n s l e s c e n t r a l e s t h e r -
miques ont baissé de 13% par
rapport à leur niveau de 2016
et ceux des centrales nuclé-
aires ont subi une baisse sig-
nificative de 44% atteignant
ainsi leur niveau le plus bas
depuis 5 ans. Pour les éner-
gies renouvelables, les inves-
tissements ont diminué de
7%, ce qui peut se justifier en
partie par la baisse des coûts.
Malgré cette baisse, les inves-
tissements dans les énergies
renouvelables représentent
deux tiers des dépenses totales
dans le secteur de la produc-
tion d’électricité avec une
valeur d’environ 300 milliards
de dollars. En effet, bien que
les investissements dans les
énergies propres aient légère-
ment baissé, le solaire photo-
voltaïque a, quant à lui, con-
tinué à attirer les investisse-
ments et à battre des records
atteignant 150 milliards de
dollars d’investissements en
2017, dont environ 45% local-
isés en Chine.
C e t t e o b s e r v a t i o n c o n -
stitue un des deux facteurs
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
8 MONDE
9. de satisfaction générale des
résultats des investissements
internationaux en énergie
de cette année selon l’AIE,
le second étant le fait que la
majeure partie de ces inves-
t i s s e m e n t s e s t d é d i é e a u
sec teur élec trique, et ceci
pour la seconde année con-
s é c u t i v e , m o n t r a n t a i n s i
« l’électrification en cours
de l’économie mondiale ». Le
secteur de l’électricité (pro-
duc tion, transpor t et dis -
t r i b u t i o n ) a b é n é f i c i é d e
7 5 0 m i l l i a r d s d e d o l l a r s
d’investissements parmi les
1 8 0 0 m i l l i a rd s d e d o l l a r s
qui ont été investis dans le
secteur de l’énergie.
Par ailleurs, contrairement à
l’éolien onshore qui a vu ses
investissements baisser de
15% et à l’hydroélectricité
dont les investissements ont
chuté en 2017 à leur niveau le
plus bas depuis dix ans, l’éolien
offshore a, quant à lui, attiré
des niveaux d’investissement
records avec l ’installation
d’une capacité totale de 4GW
dont la plupart en Europe.
Sur le plan géographique,
20 % de ces investissements
énergétiques mondiaux ont eu
lieu en Chine où les dépenses
en électricité bas carbone et
en efficacité énergétique con-
tinuent à croître au détriment
des investissements dans de
nouvelles centrales à charbon
qui ont chuté de 55% en 2017.
La Chine occupe ainsi la pre-
mière place du classement
des pays qui investissent dans
l’énergie, suivie par les Etats-
Unis où les dépenses dans le
pétrole et gaz de schiste, les
réseaux électriques et les cen-
trales à gaz sont repartis à la
hausse. En troisième position
vient l’Europe avec de plus
e n p l u s d ’i nve s t i s s e m e nt s
dans l’efficacité énergétique.
En Inde, la part des énergies
renouvelables dans les inves-
tissements a augmenté, venant
dépasser pour la première fois
celle des énergies fossiles.
Investissements globaux en électricité, pétrole et gaz [1]
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
9MONDE
10. La Chine occupe également la
première place, toujours suivie
par les Etats-Unis, en termes
d ’i n v e s t i s s e m e n t d a n s l e
réseau électrique. Bien que la
croissance de l’investissement
mondial dans les réseaux élec-
triques se soit légèrement ral-
entie en 2017, celui-ci a toute-
fois atteint cette année sa
valeur la plus élevée depuis
une dizaine d’année (300 mil-
liards de dollars) représentant
ainsi 40% de l’investissement
total en électricité dans le
monde. En effet, les entre -
prises énergétiques engagent
de plus en plus de dépenses
dans la moder nisation du
réseau électrique par le dével-
oppement de technologies
s m a r t g r i d s , n o t a m m e n t à
travers le déploiement de
compteurs intelligents, de
technologies avancées pour
les équipements de distribu-
tion d’électricité et de sta-
tions de recharge de véhicules
électriques.
Pour ce qui est des véhicules
électriques, le rapport a noté
que leur part de marché pro-
gresse en 2017 avec plus
d’une voiture électrique pour
véhicules achetés, soit une
valeur totale de 43 milliards
de dollars dépensés par les
consommateurs pour l’achat
de voitures électriques. Le
nombre de véhicules élec-
triques vendus a atteint, pour
la première fois, 1 million
de véhicules en 2017. Cela
représente la moitié de la
croissance globale des ventes
de véhicules automobiles.
Cependant, son impact sur la
demande en combustibles fos-
siles demeure faible : elle cor-
respond, en effet, à une réduc-
tion d’environ 30 000 barils de
pétrole par jour, ce qui reste
négligeable au regard de la
croissance de 1,8 millions de
barils dans la demande jour-
nalière de pétrole en 2017.
LE FINANCEMENT DE PROJETS
Pour les énergies fossiles, la
hausse des prix du baril et un
meilleur contrôle des coûts
Investissements globaux, par technologie, entre 2015 et 2017 [1]
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
10 MONDE
11. ont contribué à une amélio-
ration remarquable de la sit-
uation financière des com-
pagnies pétrolières, notam-
m e n t d a n s l e s e c te u r d u
pétrole de schiste, en leur
permettant de lever des fonds
avec de moins en moins de
dettes et d’améliorer leur
auto-financement.
En effet, grâce aux progrès
technologiques et à la hausse
des prix, le secteur du pétrole
de schiste américain est en
voie de réaliser ses premiers
cash flows positifs en 2018.
Depuis 2010, les dépenses
du secteur avaient toujours
été plus importantes que les
revenus qu’il génère. Les cash
flows cumulés ainsi négatifs,
d’une valeur totale de 250 mil-
liards de dollars, l’ont poussé
à recourir à des moyens de
financement externes. Après
deux années de grande insta-
bilité pour le secteur (période
2015/2016), celui-ci semble
enfin profiter des avancées
technologiques et des prix
croissants, ainsi que d’une
politique d ’investissement
plus prudente, pour devenir
de plus en plus rentable [2].
En ce qui concerne le finance-
ment des projets d’énergies
renouvelables, la fiabilité et la
maturité de ces projets ainsi
que la meilleure gestion des
risques ont permis l’extension
des sociétés de développe -
ment de projets en dehors
des Etats-Unis et de l’Europe,
en l’occurrence en Afrique, en
Asie et en Amérique Latine.
Cette tendance est en majeure
partie soutenue par les insti-
t u t i o n s f i n a n c i è r e s p u b -
liques telles que les banques
de développement qui con-
tribuent à la réduction des
risques des banques prêteuses.
En Europe, l’amélioration des
conditions de financement a
permis de réduire d’environ
15% les coûts de produc -
tion pour les nouvelles éoli-
ennes offshore durant les cinq
Investissements publics en R&D en énergies bas carbone,
entre 2012 et 2017 [3]
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
11MONDE
12. dernières années. De même,
pour les projets de petites
tailles, la standardisation et
l’agrégation des traitements
de prêts ainsi que la meil-
leure analyse du risque de
crédit ont facilité l’émission
d’obligations ver tes d’une
valeur de 160 milliards de
dollars. Ceci a facilité l’accès à
des financements, à travers les
marchés de capitaux, notam-
ment pour le développement
du solaire photovoltaïque dis-
tribué et de l’efficacité éner-
gétique, ainsi que l’obtention
de crédits bancaires pour
les acheteurs de véhicules
électriques.
INNOVATION E T NOUVELLES
TECHNOLOGIES
Le s i nv e s t i s s e m e n t s g o u -
v e r n e m e n t a u x e n r e c h e r -
che et développement ont
augmenté de 8% environ en
2017, atteignant un niveau de
27 milliards de dollars. Cette
croissance est essentielle -
ment due à la croissance des
investissements en recherche
sur les énergies bas carbone
(figure 3) qui sont repartis à
la hausse en 2017 (augmenta-
tion d’environ 13%) après plu-
sieurs années de stagnation.
Le rapport a cependant noté
que de nouvelles approches
pour pousser les investisse-
ments dans la capture, le
stockage et la valorisation du
carbone (CCUS) demeurent
nécessaires pour atteindre les
objectifs mondiaux en termes
de changement climatique.
Dhekra BOUSNINA
Sources :
[1] AIE, World Energy Investment 2018, disponible sur https://www.connaissancedesenergies.org/sites/default/files/pdf-actu-
alites/wei2018.pdf
[2] Vincent Collen, Les Echos, Aux Etats-Unis, le pétrole de schiste de plus en plus rentable, disponible sur https://www.lesechos.
fr/07/05/2018/lesechos.fr/0301643208256_aux-etats-unis--le-petrole-de-schiste-de-plus-en-plus-rentable.htm
[3] IEA, World Energy Investment 2018, findings, disponible sur http://www.iea.org/wei2018/
Investissements énergétique mondial en 2017
et changement par rapport à 2016 [3]
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
12 MONDE
13. La loi relative à la transition
énergétique pour la crois-
sance verte du 18 août 2015
établit les engagements de
la France pour lutter contre
le dérèglement climatique.
Parmi les objectifs fixés par
la loi, on retrouve la volonté
de porter la part des éner-
gies renouvelables à 32% de
la consommation finale brute
d’énergie en 2030.
Pour amorcer ce développe-
ment à l’échelle des terri-
toires, la France a, dans un
premier temps, eu recours au
mécanisme des prix d’achat
garantis qui rémunère la pro-
duction d’électricité renouv-
elable à un prix très supérieur
à celui de l’électricité sur le
marché. Les énergies renouv-
elables avaient donc la prior-
ité d’accès sur le marché dont
le fonc tionnement repose
pourtant sur le prin¬cipe du
« merit order ». Une chute
des prix sur le marché de
gros a ainsi été constatée,
entrain¬ant une baisse de la
rentabilité des énergies con-
ventionnelles, allant même
jusqu’à la mise sous cocon de
centrales à gaz [1].
Une des solutions envisa -
gées pour endiguer cet effet
p e r v e r s e s t d ’e n c o u r a g e r
l ’ a u t o c o n s o m m a t i o n . L a
l o i d u 1 5 f é v r i e r 2 0 1 7
pose les bases légales de
l’autoconsommation individu-
elle et collective d’électricité.
La via¬bilité économique de
ce nouveau modèle de con-
sommation, essentielle à son
essor, repose sur l’atteinte de
la parité réseau : lorsqu’il y
a équilibre entre le coût de
pro¬duction de l’électricité
renouvelable et le prix de
l’électricité soutirée au réseau.
Elle devrait être atteinte dans
les années à venir du fait de
la forte baisse du coût des
éner¬gies renouvelables com-
binée à l’augmentation des
prix de vente de l’électricité
sur le marché de détail. Pour
a c c é l é re r s o n d é ve l o p p e -
ment et ainsi limiter les injec-
tions sur le réseau, le gou-
vernement a récemment mis
en place des appels d’offres
dédiés à l’autoconsommation
individuelle et collective. Les
lauréats de ces appels d’offres
perçoivent un complément de
rémunération avec une majo-
ration pour l’électricité auto-
consommée [2].
Mais ce sont les avancées
a t t e n d u e s d a n s l e s t e c h -
n o l o g i e s d e s t o c k a g e d e
l ’é l e c t r i c i t é , a u j o u r d ’ h u i
encore trop coûteuses, qui
c o n ¬ t r i b u e ro n t a u d é ve l -
oppement à grande échelle
de l’autoconsommation.
Le stockage de l’électricité au service
des interconnexions des réseaux
électriques de demain
Cette étude, réalisée dans le cadre du concours CNF CIGRE 2018 qui portait sur les intercon-
nexions des réseaux électriques de demain, a été récompensée par le premier prix des doc-
torants. Le CIGRE est une association internationale dont le but est de favoriser la collabora-
tion entre experts des réseaux électriques.
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
13STOCKAGE
14. Le s a n a l y s e s ré c e n t e s d e
RTE [3] confirment l’existence
d’un espace économique favor-
able à un large développe-
ment de l’autoconsommation
p h o t o v o l t a ï q u e d a n s l e s
années à venir. Par ailleurs,
dans son bilan prévisionnel
2017 [4], l’entreprise identifie
l’autoconsommation comme
« l’un des facteurs pouvant
e n t r a î n e r u n e m u t a t i o n
profonde du système élec-
trique ».
Dans un contexte de développe-
ment de l’autoconsommation
collective, les acteurs se mul-
tiplient et le système élec-
trique « s’ubérise ». Demain,
on pourrait voir éclore une
multitude de systèmes élec-
triques décentralisés organ-
isés en circuits courts, sous
la forme de « microgrids » ou
« cluster énergie » [5], inter-
connectés au réseau national
d e t r a n s p o r t d ’é l e c t r i c i t é
(figure ci-dessous).
Dès lors, comment maintenir
le niveau de fiabilité du réseau
électrique actuel, garant de
la performance économique
et de la solidarité électrique
dans les territoires ?
QUELS ENJEUX POUR LE RÉSEAU ÉLECTRIQUE DE DEMAIN ?
Représentation d’un cluster en autoconsommation collective, interconnecté au
réseau national d’électricité. (Source : B.Metz & F.Rouot)
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
14 STOCKAGE
15. ENJEUX TECHNIQUES
Ac tuellement, l’intégration
des énergies renouvelables
sur le réseau s’accompagne
d’un renforcement des lignes
et des postes électriques afin
de résorber les congestions.
Afin d’éviter ces extensions
coûteuses et de plus en plus
sujettes à contestations, RTE
est à la recherche de solu-
tions flexibles qui permettent
d’utiliser les lignes existan-
tes à leur optimum : c ’est
l’objet du projet « Ringo »
[6] qui utilise des technolo-
gies de stockage pour créer
des « lignes virtuelles ». On
retrouve le même concept
avec les solutions « Vehicle to
Grid » [7].
Par ailleurs, RTE doit assurer
à chaque instant la stabil-
ité en fréquence et la sta-
bilité en tension du réseau
électrique, principalement à
l’aide des services systèmes.
Les énergies renouvelables ne
permettent pas, ou presque,
de répondre à ces services :
elles se comportent comme
des générateurs « passifs »
puisqu’elles ne disposent pas
de réser ves d’énergie ciné -
t i q u e , c o n t r a i r e m e n t a u x
rotors des alternateurs des
centrales conventionnelles, et
n’ont pas la capacité de fournir
ou d’absorber de l’énergie
magnétique [8].
Les systèmes de stock age
intégrés au sein de clusters
co n s t i t u e n t d e s s o l u t i o n s
flexibles qui participeront à
l’ensemble des services sys-
tèmes [9]. De plus, le fait de
consommer sur place tout ou
partie de l’électricité produite
limite le nombre d’injections
et de soutirages sur le réseau,
ce qui minimise la perte de
synchronisme sur le réseau
[10].
ENJEUX ÉCONOMIQUES
La capacité du système de
stockage à réaliser des arbi-
trages économiques permet
tout d’abord une réduction de
la puissance souscrite auprès
du fournisseur ainsi qu’une
d i m i n u t i o n d e l a f a c t u r e
d’électricité.
Par ailleurs, la question qui se
pose est celle de la tarifica-
tion d’accès au réseau. Pour
prendre en compte la dif-
férence des profils d’utilisation
du réseau, le TURPE com-
prend une part « puissance »,
propor tionnelle à la puis-
sance souscrite et une part
« énergie », proportionnelle
au nombre de kWh consom-
més. Cette répartition appa-
raît bien dans la formule de
la composante annuelle de
soutirage des clients raccor-
dés en BT ≤ 36 kVA [11] :
avec Ei
l’ électricité souti-
rée par période temporelle i
[kWh]et P la puissance sous-
crite [kVA].
En France, pour cette même
catégorie de clients, la part
« p u i s s a n c e » re p ré s e n t e
environ 20% du tarif d’accès aux
réseaux et la part « énergie »
80%. Autrement dit, le con-
sommateur paie aujourd’hui
son accès au réseau essen-
tiellement quand il soutire
de l’électricité. Cependant,
l ’ a u t o c o n s o m m a t e u r d e
demain souhaitera conserver
un accès à une puissance
garantie même si la quantité
d’électricité qu’il soutire est
réduite.
D u point de vue du ges-
tionnaire qui dimensionne
le réseau en fonction de la
puissance de pointe, le tarif
« idéal » consisterait à faire
p aye r u n p r i x p a r m é g a -
watt (MW ) [12] ; cette tari-
fication est déjà appliquée
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
15STOCKAGE
16. aux réseaux de transport de
gaz. Un rééquilibrage devrait
donc s’opérer pour assurer le
financement des charges fixes
du réseau électrique [13].
• S a n s d i s p o s i t i f d e
stockage :
Par souci de clarté, nous illus-
trerons les résultats sur la
journée du 30 mars 2015 qui
représente bien le comporte-
ment du système tout au long
de l’année (figure ci-contre,
en haut).
Nous remarquons que la pro-
duction d’énergie n’est pas
nulle durant la nuit, grâce à
la production d’origine éoli-
e n n e. Au l e ve r d u s o l e i l,
vers 7h du matin, la produc-
tion photovoltaïque croît. Le
surplus de production locale
est alors injecté sur le réseau.
En fin d’après-midi, le vent
cesse et le soleil se couche,
ce qui pousse le cluster à
soutirer de l’électricité sur le
Nous considérons un cluster
r é s i d e n t i e l d é j à e x i s t a n t
composé de logements de
tailles variées et de capac-
ités de produc tion photo-
voltaïque et éolienne. Nous
avons développé un modèle
d’optimisation pour mettre
en évidence les échanges
opérés entre ce cluster et le
réseau, avec et sans système
de stockage.
Pour réaliser des simulations
précises, il est nécessaire
d’utiliser des données fiables.
Concernant les données de
consommation, nous avons
utilisé des valeurs mesurées
sur 30 logements localisés en
France, à un pas de temps de 5
secondes [14]. La consomma-
tion annuelle totale du parc
de logements atteint 189 544
kWh.
Pour ce qui est de la produc-
tion, nous avons utilisé des
d o n n é e s m é t é o ro l o g i q u e s
(vitesse du vent et ensoleil-
lement) [15] combinées à des
données techniques de pan-
neaux photovoltaïques [16] et
d’éoliennes [17]. Nous avons
considéré une surface totale
de PV de 300 m² (soit 61 kWc)
ainsi que 2 éoliennes de 10 kW
chacune, de sorte que la pro-
duction d’électricité in-situ
couvre 63% de la consomma-
tion totale du cluster.
S’agissant de la tarification
appliquée à ce dernier, nous
nous sommes basés sur les
tarifs réglementés de vente en
option heures pleines/heures
creuses (HP/ HC) [18]. Nous
avons aussi pris en compte la
rémunération des injections
d’électricité sur le réseau à
par tir du tarif de vente de
surplus de production photo-
voltaïque actuellement défini
par arrêté [19].
Po u r é t u d i e r l ’i nté grat i o n
d ’ u n s y s t è m e d e s t o c k -
age au cluster, nous avons
sélectionné deux batteries.
Chacune possède une capac-
ité de 210 kWh, une puissance
de 50 kW et un rendement
de cycle égal à 89% [20]. Le
système de stockage est ainsi
dimensionné afin de capter
environ 80% des surplus de
production locale.
HYPOTHÈSES DU MODÈLE
ANALYSE DES RÉSULTATS
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
16 STOCKAGE
17. réseau. Le soutirage intervi-
ent donc en période de pointe
entre 18h et 22h pour satis-
faire une demande soutenue.
Pour ce cas d’étude, les taux
d ’ a u t o c o n s o m m a t i o n e t
d’autoproduction sont respec-
tivement de 67% et 42%.
• A v e c d i s p o s i t i f d e
stockage :
Dans ce cas, les batteries
se chargent la nuit durant
la période HC en stock ant
la produc tion éolienne et
en soutirant sur le réseau.
Lorsque la période HC est ter-
minée, les batteries continu-
ent de se charger en captant
les surplus de production, ce
qui supprime les injections
sur le réseau. Vers 14h, la con-
sommation dépasse la pro-
duction. Au lieu de soutirer
de l’électricité sur le réseau,
le système met à contribu-
tion les batteries qui assurent
la fourniture d’électricité au
cluster jusqu’à 23h environ.
Les batteries permettent donc
de limiter l’appel de puis-
sance sur le réseau en période
de pointe. En moyenne sur
l’ensemble de l’année, l’appel
de puissance évité pour la
tranche horaire 19-20h est
de 20kW. Cette valeur peut
m ê m e a t te i n d re 5 6 k W e n
hiver (13/02/2015), lorsque
le réseau est le plus sollicité.
Pour la même tranche horaire,
étant donné que leur puis-
sance maximale cumulée de
décharge est de 100 kW, les
batteries ont la capacité de
répondre aux sollicitations
du réseau, dans le cadre des
services systèmes, à hauteur
de 80 kW (100kW-20kW ) en
Equilibre des flux de puissance, sans stockage.
(Source : B.Metz & F.Rouot)
Equilibre des flux de puissance, avec stockage.
(Source : B.Metz & F.Rouot)
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
17STOCKAGE
18. moyenne. Admettons que le
réseau sollicite les batter-
ies pendant 1h, il faut alors
80 kWh dans celles-ci pour
soutenir le réseau, ce qui cor-
respond à un taux de charge
de 20% environ. Comme le
montre la figure 5, le taux de
charge dans les batteries est
toujours supérieur à 20%, et il
est en moyenne estimé à 59%
[Figure 5].
Sur le plan économique, les
batteries permettent d’une
part de diminuer la puissance
souscrite de 70 kVA à 36 kVA
et d’autre part de diminuer la
quantité d’électricité souti-
rée au réseau. Cela se traduit
par un bénéfice annuel de
2755 €, soit une réduction de
la facture de 20%. De plus,
les taux d’autoconsommation
et d’autoproduction passent
respectivement à 91% et 58%.
Ce p e n d a n t , a u re g a rd d e
l’investissement nécessaire
(210 261,41 € [20]), le temps
de retour brut est de 76 ans ;
de quoi dissuader d’investir
dans un dispositif de stock-
age. Néanmoins, nous venons
de montrer que le stockage a
la capacité de répondre aux
services systèmes, ce qui méri-
terait d’être valorisé. Le coût
du stock age pourrait ainsi
être significativement réduit,
comme le souligne d’ailleurs
une étude de RTE [21].
Pour comparer le coût du
stockage dans le cadre d’un
projet défini, nous pouvons
utiliser le « coût actualisé du
stockage » (« Levelized Cost
Of Storage », LCOS). Ce coût
correspond au prix complet
du stockage, en €/MWh, sur la
durée de vie de l’équipement.
Le calcul intègre le CAPEX de
l’installation de stockage, mais
aussi les coûts d’opération et
de maintenance (O&M), et les
coûts associés à la charge de
la batterie. Le coût de charge
est assez faible dans notre
cas, car la batterie se charge
p r i n c i p a l e m e n t a v e c d e
l’électricité gratuite issue de
la production locale. Comme
ce calcul s’effectue sur toute la
durée de vie de l’installation,
il est nécessaire de prendre
e n co m p te l ’a c t u a l i s a t i o n
des coûts. Nous obtenons un
résultat de 607 €/MWh pour
ce projet. Ces résultats sem-
blent plutôt convaincants en
comparaison du LCOS moyen
Comportement du système de stockage (la charge est comptée négativement).
(Source : B.Metz & F.Rouot)
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
18 STOCKAGE
19. d’une installation de stock-
age résidentiel, qui était de
1028 €/MWh en 2017 [22]. Cet
indicateur permet donc égale-
ment de valider la pertinence
du stockage dans les clusters
énergétiques de demain.
Comportement du système de stockage (la charge est
comptée négativement). (Source : B.Metz & F.Rouot)
Analyse des différentes composantes du LCOS du système étudié.
(Source : B.Metz & F.Rouot)
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
19STOCKAGE
20. Sources :
[1] USINE NOUVELLE [2013], « GDF Suez : les maux du gaz touchent aussi la France », 11 avril 2013.
[2] CRE [2017], « Cahier des charges de l’appel d’offres portant sur la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à
partir d’énergies renouvelables en autoconsommation et situées en métropole continentale », 11 décembre 2017.
[3] RTE [2017], « Analyses économiques sur le développement de l’autoconsommation photovoltaïque dans le secteur résidentiel individuel »
(p.14), 19 septembre 2017.
[4] RTE [2017], « Bilan prévisionnel de l’équilibre offre-demande d’électricité en France » (Edition 2017, Chapitre 10 « Le développement de
l’autoconsommation », partie 1, p.317), 7 novembre 2017.
[5] SCHWAEGERL C., TAO L., STRBAC G., MANCARELLA P., HATZIARGYRION N., BUCHHOLZ B. [2010], « European Roadmap for Microgrids », CIGRE, 2010.
[6] RTE [2017], dossier de présentation « Voyage au coeur du réseau de demain » (Partie 2.2, p.13), mars 2017.
[7] ORLANDO G., SOUVESTRE Q. [2017], « Le Vehicle to Grid, une solution pour réduire l’impact de la mobilité décarbonée sur le système élec-
trique », CIGRE, (« to be published »).
[8] GENERAL ELECTRIC [2017], « Technology capabilities for Fast Frequency Response », 9 mars 2017.
[9] BIGNUCOLO F., CALDON R., CARRADORE L., SACCO A., TURRI R. [2011]: « Role of storage systems and market based ancillary services in active
distribution networks management », CIGRE, 17 décembre 2011.
[10] MAZAURIC V., DROUINEAU M., MAÏZI N. [2014], « Impacts of intermittent sources on the quality of power supply: The key role of reliability
indicators », Mines ParisTech – CMA, 15 janvier 2014.
[11] ENEDIS [2017], « TURPE 5 HTA/BT : Tarifs d’Utilisation des Réseaux Publics de Distribution d’Electricité », août 2017.
[12] CRE [2016], « Consultation publique relative à la structuration des tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité » (Chapitre 1, Partie 3
« Composantes à la puissance et à l’énergie »), mai 2016.
[13] PERCEBOIS J. [2017], « L’autoconsommation d’électricité relancée par la loi ? », Connaissances des énergies, février 2017.
[14] Mines ParisTech – CMA [2015], données de consommation d’électricité de l’année 2015 de logements français, mesurées individuellement
avec un pas de temps de 5 secondes.
[15] PVGIS (European Commission’s Photovoltaic Geographical Information System) [2015], Hourly data for the year 2015 in Sophia Antipolis
(06600), France.
[16] SUNPOWER [2018], modèle E20-327-C-AC, rendement = 20,4%, ratio de performance = 65%.
[17] HOMER ENERGY [2018], courbe de puissance, hauteur du mât = 24m.
[18] EDF [2018], « Grille de prix de l’offre de fourniture d’électricité “Tarif Bleu” », 1 février 2018.
[19] REPUBLIQUE FRANÇAISE [2018], Arrêté du 9 mai 2017 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations implantées
sur bâtiment utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 100 kilowatts telles que visées
au 3° de l’article D. 314-15 du code de l’énergie et situées en métropole continentale, version consolidée au 09 mars 2018.
[20] TESLA [2018], modèle Powerpack 2 ; Coûts associés : 2 batteries 210 kWh : 188 000 $2018, 1 inverseur bidirectionnel 250 kW : 65 000$2018,
frais d’installation et de câblage : 6000$2018, taux de change utilisé : 1 € = 1,2318 $2018.
[21] RTE [2017], Rapport « Réseaux électriques intelligents : Valeur économique, environnementale et déploiement d’ensemble », juin 2017.
[22] Lazard [2017], Rapport « Lazard’s levelized cost of storage analysis – version 3.0 », novembre 2017.
Poussée par la volonté des ter-
ritoires de reprendre la main
sur leur planification énergé-
tique, l’autoconsommation
collective tend à se dévelop-
per et devrait demain favoriser
l ’émergence de « clusters
énergie » interconnectés au
réseau national.
Les résultats de notre modèle
d’optimisation ont démontré
que les dispositifs de stock-
age sont la pierre angulaire de
ce nouveau modèle puisqu’ils
permettront d’intégrer une
par t croissante d ’énergies
renouvelables tout en garan-
tissant la sécurité du réseau.
O u t r e R h i n , l a p r i m e à
l ’autoconsommation a été
supprimée en 2014 en faveur
de subventions au stockage.
La France se donnera-t-elle les
moyens de mettre en place un
cadre réglementaire adapté
pour favoriser le déploiement
du stockage ?
Baptiste METZ
&
Florian ROUOT
CONCLUSION
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
20 STOCKAGE
21. Autoconsommation photovoltaïque en France
L’épuisement des ressources
fo s s i l e s e t l a p e r s p e c t i ve
imminente du changement cli-
matique ont conduit les pays
de l’Union Européenne en
général, et la France en par-
ticulier, à mener une restruc-
turation du secteur électrique
vers un approvisionnement en
énergie fiable, économique et
durable. Dans cette optique,
la loi de la transition énergé-
tique pour la croissance verte
de 2015 (LTECV ) a ouvert la
voie au développement des
énergies renouvelables qui se
présentent comme une solu-
tion potentielle à la réduction
des émissions de gaz à effet
de serre. Parmi les moyens
de production prometteurs,
le photovoltaïque s’affiche
aujourd’hui comme le plus
adapté et le plus approprié
à la production d’électricité
d’origine renouvelable pour
l ’habitat. Nous proposons
dans cet article d’exposer le
contexte dans lequel s’intègre
l’autoconsommation domes-
tique sur le marché français,
ainsi que les problèmes et les
perspectives de développe -
ment de la filière.
L’A g e n c e i n t e r n a t i o n a l e
des énergies renouvelables
(IRENA) considère que les
investissements dans la filière
photovoltaïque sont amenés
à s’intensifier jusqu’en 2020
a v a n t d ’e n t r e r d a n s u n e
phase de maturité attendue
à l’horizon 2030. En effet,
l’Agence prévoit que le coût
du solaire va baisser aux alen-
tours de 0,06 $/kWh. Cette
prévision devrait être accom-
pagnée voire soutenue par
une augmentation des ren-
dements de cellule et module
de 0,4% à 0,8% par an selon
les technologies[1]. De plus,
la réglementation thermique
de 2020 intégrera certaine -
ment de fortes obligations en
ce qui concerne la production
d’énergie par le biais de bâti-
ments à « énergie positive ».
En effet, le rapport de l’ADEME
2015 Bilan, Perspec tive et
Stratégie estime entre 550
et 900 MW/an la puissance
pouvant être installée sur des
bâtiments neufs résidentiels
ou tertiaires[2].
A ces objec tifs s’ajoutent
l e s n o u v e a u x m o d è l e s
d’utilisation et de produc-
tion d’énergie photovolta-
ïque pour lutter contre le coût
élevé de l’énergie produite par
rapport au prix de l’électricité
actuel. Il existe deux modèles
d’autoconsommation pour une
utilisation locale : le premier
concerne les installations clas-
siques raccordées au réseau
pour transpor ter le surplus
de l’énergie produite par les
modules PV via le réseau élec-
trique ; le second les systèmes
isolés du réseau dotés d’un
système de stockage pour réu-
tiliser l’énergie qui n’est pas
consommée. Cette solution
apporte l’avantage majeur de
maîtriser la production photo-
voltaïque domestique surtout
pour un marché libéralisé
qui cherche à déployer des
solutions autant techniques
qu’économiques à l’insertion
du PV sur le réseau électrique.
D i f fé re nt s m é c a n i s m e s d e
soutien à l’autoconsommation
peuvent être mis en place
dans le contexte actuel :
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
21AUTOCONSOMMATION
22. • Net-metering : qui con-
siste à calculer à chaque
période de facturation la
quantité des kWh injec-
tés et soutirés du réseau.
L’autoconsommateur paie
la différence des kWh sup-
plémentaires consommés
et reçoit un crédit de con-
sommation pour la période
suivante dans le cas où
la production dépasse la
consommation[3].
• P r i m e s a u k W h : c e
m é c a n i s m e d e s o u t i e n
r e p o s e s u r u n e p r i m e
à l ’ a u t o c o n s o m m a t i o n
v e r s é e s u r 5 a n s a f i n
d’amortir l’investissement
initial dans l’installation
(CAPEX). Cette subvention
est variable en fonction de
la puissance installée.
La figure ci-dessous montre les
différents tarifs (sous forme
d ’ u n c o n t r a t d ’o b l i g a t i o n
d ’a c h at d ’ u n e d u ré e co n -
tractuelle de 20 ans, dont
les termes font l’objet d’une
approbation par le minis-
tre en charge de l’énergie)
d’achats de l’électricité pho-
tovoltaïque, ainsi que les
primes d’investissement pour
la période du 1 juillet au 30
septembre 2018.
En revanche, le financement
des réseaux se fait via le Tarif
d’Utilisation du Réseau Public
de l’Electricité ( TURPE), qui
rémunère à la fois les ges-
tionnaires du réseau de trans-
port et du réseau de distribu-
tion[4]. La tarification actu-
elle ne permet pas de récu-
pérer tous les coûts engagés
p a r l e s g e s t i o n n a i r e s d e
réseaux auprès des autopro-
d u c te u r s p o u r d i f fé re nte s
raisons. L’autoconsommation
photovoltaïque tend à réduire
les recettes des gestionnaires
de réseaux en absorbant une
par tie non négligeable de
la part variable étant donné
Tarifs Obligation d’Achat pour une autoconsommation avec vente de surplus
(Source : SOLAR Belle Planète)
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
22 AUTOCONSOMMATION
23. que l’électricité soutirée est
plus faible. En effet, la tar-
ification actuelle compor te
une par t propor tionnelle à
l’énergie utilisée, environ 80%
du tarif final contre 20% liée
à la puissance souscrite[2].
Néanmoins, le réseau doit
être capable de servir globale-
ment la même puissance mais
avec un taux d’utilisation plus
faible. En d’autres termes les
coûts de réseau restent con-
stants avec moins de revenus
pour le gestionnaire. Ainsi,
étant donné le système de
tarification actuel, les con-
sommateurs « classiques »
sont amenés à payer pour
l’ensemble des charges des
consommateurs.
Dans ce contexte, la com-
m i s s i o n d e ré g u l at i o n d e
l’énergie CRE a publié une
nouvelle délibération le 7
juin 2018 por tant modifi -
cation de la tarification de
l ’ a u t o c o n s o m m a t i o n . L a
CRE a traité distinctement
l’autoconsommation collective
et l’autoconsommation indi-
viduelle dans la mesure où
leurs impacts sur le réseau dif-
fèrent. Par conséquent, pour
les autoconsommateurs indi-
viduels la CRE a décidé de
supprimer la composante de
soutirage. Dans le cas spéci-
fique de l’autoconsommation
collective, la CRE a décidé
d’introduire une option sur les
tarifs d’utilisation des réseaux
électriques dans les domaines
de tension HTA et BT, en aug-
mentant la différence de tarif
entre les heures de pointes
et celle dites creuses sur le
réseau, af in d ’envoyer u n
signal prix incitant les auto-
consommateurs à ne pas être
présents lors de la pointe[5].
M a l g r é l ’ e n t h o u s i a s m e
général que connaît le pho-
tovoltaïque, la parité réseau
(le niveau auquel le coût
global de production d’une
é n e r g i e r e n o u v e l a b l e y
compris l’investissement et
la somme des coûts opéra-
tionnels annules actualisés
de l’installation égale le prix
moyen de l’électricité sur le
réseau local) est plus difficile-
ment atteignable en France
que chez nos voisins tels que
l’Espagne et l’Allemagne, en
raison du prix peu élevé de
l’électricité dans notre pays.
Néanmoins, le sud de la France
pourrait atteindre la parité
réseau d’ici 2020 grâce à la pro-
fessionnalisation de la filière
et la diminution des coûts
et des taux de production
de l’énergie photovoltaïque,
notamment du fait d’une aug-
mentation attendue du prix de
l’électricité lié à l’évolution
de la Contribution au Service
Public de l’Electricité (CSPE)
à hauteur de 2,5% à 5% par
an[6].
Adnane HATIM
Sources :
[1] IRENA, « Renewable Power Generation Costs in 2017 ». 2017.
[2] ADEME, « Filière Photovoltaïque Française : Bilan, Perspectives et Stratégie ». sept-2015.
[3] SOLER, Groupement français des professionnels du solaire photovoltaïque, « RECOMMANDATIONS RELATIVES À
L’AUTOCONSOMMATION DE L’ÉNERGIE SOLAIRE PHOTOVOLTAÏQUE ». juin-2014.
[4] ENEDIS, « TURPE 5 HTA/BT Tarifs d’Utilisation des Réseaux Publics de Distribution d’Électricité ». 2017.
[5] Commission de régulation de l’énergie (CRE), « Pour un développement de l’autoconsommation facilité et au bénéfice de
tous ». juin-2018.
[6] Sia Partners, « Energie photovoltaïque en France ». nov-2017.
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23AUTOCONSOMMATION
25. Sources :
[1] http://www.ecowapp.org/en/events/press-release-–-launching-ecowas-electricity-market
[2] http://www.ecowas.int/specialized-agencies/ecowas-regional-electricity-regulatory-authority-erera/
[3] http://www.worldbank.org
transport régionale. Le coût
de construction peu élevé de
la centrale (partagé entre les
3 pays) permet de délivrer
une électricité bon marché
et propre. Les principales
interconnexions seront mises
en place d’ici le début des
années 2020 et permettront
de transpor ter l’élec tricité
depuis Lagos, au N igér ia,
jusqu’à Dak ar, au Sénégal.
C e s y s t è m e d ’é c h a n g e
d ’é n e r g i e e n t r e l e s p a y s
d ’Af r i q u e d e l ’O u e s t p e r -
mettrait, selon la Banque
Mondiale, d’économiser entre
5 et 8 milliards de dollars
par an. En effet, l’électricité
produite dans un pays à un
coût élevé pourra être sub-
s t i t u é e p a r d e s i m p o r t s
d’électricité moins onéreux
p r o v e n a n t d e p a y s l i m i -
trophes. Par ailleurs, en rem-
plaçant de cette manière cette
électricité chère et polluante,
l ’Afrique de l ’Ouest pour-
rait connaître un déclin de
ses émissions de gaz à effet
de serre, ce qui permettrait
à cette région, souvent en
proie à des épisodes massifs
de pollution, de lutter contre
le réchauffement climatique.
La Banque Mondiale, avec
de nombreux partenaires, a
déjà investi près de 750 mil-
lions de dollars dans des
projets d’électrification dans
la région. Les investisseurs
publics et/ou privés étrangers
étant généralement attentifs
au développement de vastes
projets voient d’un œil favor-
able la création d’un marché
régional et unifié d’électricité
e n A f r i q u e d e l ’ O u e s t .
N é a n m o i n s, d e n o m b re u x
progrès restent à accomplir,
comme la sécurisation des
co nt rat s e t l ’a m é l i o rat i o n
d e l a co l l a b o rat i o n e nt re
l e s p o l i t i q u e s e t l e s d i f -
férents acteurs de l’énergie.
Haris DJOUBRI
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
25SOLAIRE
28. Parmi toute les matières pre-
mières présentes sur terre,
l ’e a u e s t d e l o i n l a p l u s
précieuse. De la moindre
a c t i o n d e l a v i e q u o t i d i -
enne aux procédés industri-
els les plus complexes, elle
est présente et indispens-
able. Dans notre précédent
numéro, nous présentions un
exposé des problématiques de
la gestion de l’eau et démon-
trions la proximité avec les
enjeux d’accès à l’électricité
[1]. Il est aisé de comprendre
comment, dans les régions
en stress hydrique, l’énergie
nécessaire à l’extraction de
l’eau fait grimper les prix.
Dans les régions où l’accès
à l’électricité est déjà pré -
caire, l’équation devient vite
insoluble pour les popula-
tions. Mascara, une start-up
française, a alors fait le pari de
l’énergie solaire et décentral-
isée pour la production d’eau
en zone reculée.
Intermittentes, peu fiables,
imprévisibles : les mots ne
manquent pas aux détracteurs
des énergies renouvelables
pour justifier leur abandon.
Il faut, en effet, reconnaître
que le stockage est l’unique
moyen d ’assurer la conti-
nuité d’approvisionnement
d’un système isolé et 100 %
renouvelable. Le coût de ces
systèmes dépasse alors très
vite celui de la génération
conventionnelle. La produc-
tion d’eau à partir d’énergie
p h o t o v o l t a ï q u e é c h a p p e
pourtant à ce phénomène :
un produit stockable et rare,
l’eau, est associé à une res-
source abondante mais non
stockable.
Le secret de cette association
réussie réside dans le procédé
de traitement de l’eau (voir
schéma de principe). Une cen-
trale photovoltaïque alimente
les pompes et un procédé de
dessalement ultra flexible
capable de suivre la produc-
tion solaire. L’eau est ainsi
produite uniquement lorsque
le soleil brille. Avec une adap-
tation instantanée de la pro-
duc tion d’eau, l’impac t de
la variation court terme de
l’ensoleillement est inexistant.
Mascara, ou comment produire de l’eau… avec
du soleil
Principe de fonctionnement des unités de traitement OSMOSUN
(Source : Mascara)
I N F ’ O S E | A o û t - S e p t e m b r e 2 0 1 8
28 EAU ÉNERGIE
29. Mascara peut alors proposer
des unités fiables, mobiles et
adaptables par tout dans le
monde. Le dimensionnement
de l’installation est permis par
le seul productible annuel et
économise l’installation d’un
stockage tampon pour com-
penser les chutes brutales. Les
plus gros systèmes de trait-
ement proposés, capables
de produire jusqu’à 1000m³
d’eau par jour, sont alimen-
tés par une ferme photovolta-
ïque de 500kW et donc proche
de l’échelle de consomma-
tion énergétique de petites
industries.
En repensant un procédé aussi
simple que la production d’eau
avec une vue d ’ensemble,
Mascara fait la preuve que
l ’ i n t é g r a t i o n d ’é n e r g i e s
météo-sensibles dans un envi-
ronnement critique est possi-
ble. Une très bonne nouvelle
pour les populations reculées
qui continueront de profiter
de la baisse des prix du solaire
pour un approvisionnement
durable en eau, sans craindre
sans cesse l’augmentation du
prix des carburants.
Louis POLLEUX
Une unité de désalement de 60kWc à Bora Bora
(Source : Mascara)
Sources :
[1] Yacine Alimou, L’eau et l’énergie dans un contexte fragile, Inf ’ose n°134
[2] Site officiel: http://mascara-nt.fr/
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29EAU ÉNERGIE