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THESE PROFESSIONNELLE
dans le cadre d'un Mastère Spécialisé® accrédité par
la Conférence des Grandes Ecoles
Programme : Mastère Spécialisé® (MS) en Management des Ressources Humaines
Promotion : 2014 - 2015
NOM : FEIST
Prénom : Brigitte
Intitulé de la thèse : Comment accélérer l’acquisition des compétences numériques
dans une entreprise en transformation digitale ?
Date de la soutenance : 7 avril 2016
Directeur de thèse : Jean-Luc CERDIN
Thèse : Non confidentielle
2
Remerciements
Je remercie toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de cette thèse professionnelle et en
tout premier lieu :
 Stanislas Chevalet et Claire Creuzot, les deux managers qui ont entendu et compris dès 2014 mon
souhait de tenter l’aventure d’un Mastère Spécialisé en Management des Ressources Humaines et
ont soutenu ma candidature ;
 Sophie Joyat et Marie-Christine Barjolin, responsables RH de BNP Paribas Cardif, qui ont donné
leur feu vert pour que ce souhait se concrétise ;
 Olivier Cortes, mon nouveau manager à compter de 2015 qui m’a laissé poursuivre mes travaux en
m’accordant sa confiance pour organiser mes temps de travail entre mes nouvelles fonctions
professionnelles et mes cours et recherches à l’ESSEC ;
 Jean-Luc Cerdin, mon directeur de thèse à l’ESSEC, pour ses conseils ;
 Régine Belliard, conseil documentaire ESSEC, et Malala Razafindraka, Chargée de Programmes,
qui m’ont prodigué un appui très appréciable.
J’exprime également ma gratitude aux deux co-directeurs du programme MS Management des
Ressources Humaines de l’ESSEC, Jean-Marie Peretti et Jean-Luc Cerdin, ainsi qu’à l’ensemble du
corps professoral qui, au-delà de la qualité de leurs interventions, ont accepté de maintenir un fil
régulier de contact et de conversation à distance.
Je suis très reconnaissante à l’ensemble des interviewés qui m’ont ouvert leur porte et ont accepté de
se prêter au jeu de l’entretien qualitatif pour ma phase terrain. Ce furent de belles rencontres
humaines, fondées sur le partage et la curiosité intellectuelle.
J’ai une pensée particulière pour mes collègues étudiants de la promotion 2014-2015, compagnons
d’aventure … et source inépuisable d’encouragement.
J’associe à mes remerciements mes équipes, managers et collaborateurs du Secrétariat Général ETO
et de la Direction des Achats, des Délégations Stratégiques et de la Logistique, qui ont fait preuve de
compréhension lors de mes jours d’absence pour formation à l’ESSEC et qui ont tenu la ‘boutique’.
Enfin, une telle expérience n’aurait pas été possible sans le soutien et la bienveillance de ma famille
et de mes proches, qui m’ont permis de m’offrir cette parenthèse régénératrice de 18 mois et de me
concentrer sur mon objectif.
Et merci à Vous, Lecteur pour votre intérêt à lire ces pages.
3
Table des matières
REMERCIEMENTS p.02
GLOSSAIRE P.05
INTRODUCTION p.06
1ère PARTIE : revue de littérature
I. De la troisième révolution industrielle à l’économie du quaternaire … de la technologie aux
changements des usages et des modes de vie
I.1 La convergence de trois révolutions technologiques p.10
I.2 L’impact des innovations contemporaines sur le marché du travail et les emplois p.11
I.3 Quelles qualifications requises dans l’économie du quaternaire ? p.15
II. La maturité numérique française
II.1 La performance numérique de la France à l’échelle mondiale sur le Digital p.16
Evolution Index
II.2 Le paradoxe français dans le paysage européen : le décalage particuliers / p.19
entreprises
Focus Assurance n°1 - Maturité numérique du secteur de l’Assurance p.24
II.3 L’accélération de la transformation digitale : un enjeu identifié, un chemin encore p.25
mal balisé, un potentiel salarié sous-exploité
III. Comment définir les compétences numériques ?
III.1 Qu’appelle-t-on une compétence individuelle ? p.28
III.2 La compétence numérique : un concept jeune, mouvant et d’essence politique p.30
III.3 De la compétence numérique à la boite à outils élémentaire du citoyen du XXIème p.35
siècle
IV. Trois menaces relatives à l’acquisition des compétences numériques, trois freins à la
transformation digitale de l’entreprise
IV.1 Le digital divide ou les fractures numériques, le risque de l’e-exclusion p.40
Focus Assurance n°2 - Et si la génération X prenait sa revanche numérique ? p.46
IV.2 Le digital skills shortage ou le déficit de compétences numériques, l’exacerbation p.46
de la guerre des talents
Focus Assurance n°3 - Re-skilling des emplois p.49
4
IV.3 Management 3.0, le malaise de la ligne managériale p.50
V. Quels leviers pour accélérer l’acquisition des compétences numériques ?
V.1 L’apprendre à apprendre dans un cadre informel p.55
V.2 Le développement d’environnements de travail capacitants p.56
V.3 Le design thinking comme méthode de conduite du changement centrée p.57
sur les usages
Focus Assurance n°4 – L’Open Innovation en action p.59
V.4 Les communautés de pratique, collectifs de savoir et d’innovation p.60
2ème PARTIE : analyse des entretiens qualitatifs
I. La construction de l’enquête
I.1 Les personnes ciblées pour l’entretien p.61
I.2 Le guide d’entretien p.64
II. La synthèse et l’analyse des entretiens
II.1 Le paysage de la transformation digitale p.65
Focus Assurance n°5 – Les métiers de l’Assurance à l’ère du numérique p.68
II.2 L’environnement d’acquisition des compétences numériques p.70
II.3 La certification des compétences numériques versus le personal branding p.73
II.4 Coup de projecteur : l’intégration des jeunes et le spleen des managers p.75
III. Trois cas d’études, trois façons d’approcher les compétences numériques
III.1 Le cabinet conseil Magellan Partners > S’approprier le Digital, c’est apprendre p.79
sans connaître chapitre suivant et être prêt à oublier le chapitre précédent aussitôt !
III.2 Le Groupe Orange > Numérique et talent humain vont de pair p.82
III.3 Le Groupe BNP Paribas > Offrir à nos clients la magie du digital tout en assurant p.86
la sécurité et la conformité de leurs opérations
IV. Version finale du livrable ‘référentiel de compétences numériques’
IV.1 Deux référentiels de compétences numériques contemporains de mon livrable p.91
IV.2 Ma représentation d’un modèle de compétences numériques p.92
CONCLUSION p.93
BIBLIOGRAPHIE p.98
5
GLOSSAIRE AUTOUR DU NUMERIQUE
Entreprise numérique : entreprise qui, dans toutes les dimensions de son modèle d’affaires a une
vision et un plan numérique et pour laquelle la dimension numérique se confond souvent avec la
dimension stratégique. Le concept d’entreprise numérique a vocation à être ouvert, dynamique et
collectif. Il s’agit d’une démarche globale pour l’entreprise qui vise à développer la création de valeur
par le numérique, c’est-à-dire par les usages personnels et professionnels des technologies de
l’information. Dans ce cadre, l’entreprise développe avant tout les savoir-faire et les savoir-être qui
vont faire l’entreprise numérique de demain. (1)
Ressources numériques : ressources diverses qui regroupent non seulement le patrimoine
technologique de l’entreprise (les applications, les bases de données, les infrastructures
informatiques), mais également les compétences qu’ont les acteurs de l’entreprise à tirer parti de
toutes les potentialités du numérique pour développer le modèle d’affaires, l’activité ou l’offre de valeur.
Le développement de ces compétences numériques constitue la clé essentielle permettant à
l’entreprise numérique de se déployer de manière pertinente. (1)
Partenaires de l’entreprise numérique : l’entreprise numérique est ouverte, étendue. Son identité est
en pleine mutation. L’entreprise fait partie de la communauté de son écosystème, elle interagit
fortement avec ses partenaires. Dans une étude de 2009, l’Orange Labs de San Francisco fait le
constat suivant : « les frontières traditionnelles des entreprises étant de plus en plus poreuses, celles-
ci sont donc mieux à même d’interagir avec leurs partenaires potentiels ainsi qu’avec leurs clients,
leurs employés et les communautés d’intérêt. » (1)
Littératie numérique :
 aptitude à comprendre et à utiliser le numérique dans la vie courante, à la maison, au travail, dans
la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses compétences et ses
capacités. (2)
 capacité à utiliser les outils numériques, la capacité à comprendre, de façon critique, le contenu
numérique ainsi que la capacité à pouvoir produire des contenus grâce aux outils numériques. (2)
 vaste capacité de participer à une société qui utilise la technologie des communications
numériques dans les milieux du travail, au gouvernement, en éducation, dans les domaines
culturels, dans les espaces civiques, dans les foyers et dans les loisirs. (3)
Sources :
1. « L’entreprise numérique, quelles stratégies pour 2015 ? », Bruno Ménard, CIGREF, 2010 et
« Entreprises 2020 à l’ère du numérique : enjeux et défis », Pascal Buffard, CIGREF, 2014
2. « Littératie à l’ère de l’information », OCDE, 2000
3. « Définir la politique de littératie numérique et la pratique dans le paysage de l’éducation
canadienne », Habilo Medias, 2015
6
INTRODUCTION
Le digital investit à grande vitesse tous les champs de la société : l’éducation, l’économie, le business,
l’entreprise, l’organisation du travail. Il bouscule les frontières entre vie privée et vie professionnelle. Il
nous fait entrer dans un monde dans lequel il faut être capable de s’adapter, de comprendre, de saisir
rapidement les opportunités d’innovation et de faire preuve de vision. Avec le digital, nous accédons à
une nouvelle ère : celle de la société du savoir et de la connaissance.
En quinze ans, trois vagues de transformation numériques se sont succédées.
La première vague a lieu au tournant du millénaire avec la propagation d’internet considéré comme un
canal de vente supplémentaire. Les thématiques tournent alors autour de la distribution, des
transactions et de l’omni-canalité.
La seconde vague se caractérise par l’avènement des réseaux sociaux avec pour point d’orgue
l’arrivée de Facebook en avril 2004.
La troisième et dernière vague est marquée par la déferlante des smartphones avec en 2008 la
commercialisation de l’Iphone 3G qui créée une véritable rupture technologique en autorisant
l’interaction avec des capteurs, notamment des GPS. Cette innovation ouvre la voie à la production de
data par les individus, initiant ainsi le big data.
Ce cycle d’innovations n’est pas fini. Déjà, le numérique nous prépare d’autres évolutions autour de
l’internet des objets (IoT), de la robotique, l’intelligence artificielle et l’informatique cognitive.
Source : Blog Futurs Talents, Jean-Baptiste Audrerie - 11 janvier 2016
L’originalité de ces premières vagues de transformation digitale repose sur le fait que les individus ont
devancé les organisations dans l’appréhension des usages numériques. C’est pourquoi les
entreprises ont trouvé plus de facilité à débuter leur transformation numérique en privilégiant la refonte
du parcours et de l’expérience client.
Aujourd’hui les entreprises abordent un nouveau tournant.
7
Source : Blog Cyberlabe, 20 décembre 2015
Après avoir renouvelé la
relation client, le numérique
attaque le fonctionnement et
les processus mêmes des
organisations. Il modifie
considérablement les
‘business models’ et redéfinit
les équilibres de marché en
faisant tomber les barrières à
l’entrée des nouveaux
entrants, qu’il s’agisse des
ambitieux GAFA (Google,
Amazon, Facebook, Apple),
des jeunes NATU (Netflix,
Airbnb, Tesla, Uber), des
petites startups ou de grands
groupes en cours de
redéploiement sur de
nouveaux axes stratégiques
(IBM).
L’éclosion des plateformes
génère pour les acteurs
historiques d’un secteur un
réel risque de
désintermédiation qui
menace des situations de
rentes établies de longue
date sur des marchés
régulés. C’est la fameuse
‘uberisation’ de l’économie.
Cette menace de la ‘disruption’ (capacité à se faire évincer par un acteur qui ne vient pas du marché),
oblige les entreprises à passer du mode défensif au mode offensif. Cela passe par une remise en
cause et un changement en profondeur des organisations qui se heurtent à trois difficultés :
 La transversalité dans des sociétés organisées classiquement de manière hiérarchisée et en silos ;
 La vitesse avec un rythme de changement technologique qui dépasse de loin le temps de
l’humain ;
 L’absence de culture du risque et d’acceptation du droit à l’échec.
Le rapport Mettling remis en septembre 2015 par le DRH éponyme d’Orange à Myriam EL Khomri,
Ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue Social, présente deux
mérites. Tout d’abord, il établit pour la première fois un lien fort entre transformation digitale et
fonctionnement de l’entreprise. Ensuite, il montre clairement que cette transformation remet en cause
les fondements traditionnels de l’entreprise, en bouleversant l’unité d’action, de temps et de lieu du
travail.
Dans ce rapport intitulé ‘Transformation numérique et vie au travail’, Bruno Mettling pointe (p.7) les
principaux impacts du numérique sur le travail, et notamment sur les métiers et les compétences.
« La modification des conditions d’exercice des activités induites par ces nouveaux outils
(numériques) et ces modes de travail concerne tous les métiers sans exception, manuels ou
8
intellectuels, métiers de la connaissance ou de l’expérience. Elle nécessite souvent de développer ou
d’acquérir de nouvelles compétences (…). Les spécificités mais aussi les difficultés de cette
adaptation par rapport aux évolutions traditionnelles de l’entreprise tiennent à ce que la vitesse
exceptionnelle de diffusion nécessite un très haut degré d’adaptation et d’anticipation pour éviter la
déqualification, facteur de rupture numérique ».
Dans un environnement marqué par l’accélération du temps, les ruptures technologiques irréversibles
et l’exigence accrue des clients en termes de qualité de service, les entreprises ne cherchent pas
seulement des collaborateurs qui agissent digital (Digital Natives), mais aussi des collaborateurs qui
pensent digital (Digit’Experts) avec une nouvelle approche de leur métier et de leur mission.
Ceci implique de mettre en œuvre un nouveau mix de compétences associant des savoir-faire
techniques (hardskills), des savoir-être comportementaux (softskills) et des connaissances sectorielles.
Parmi les compétences recherchées, on peut imaginer une attention particulière apportée par
exemple à l’intelligence sociale, à la pensée informatique, à l’inter-disciplinarité, à la créativité et à
l’adaptation, à la collaboration virtuelle, à l’auto-formation.
Sur le long terme, un collaborateur, quel que soit son département, devra manier avec la même facilité
les enjeux fonctionnels du métier et les enjeux technologiques, en se construisant un profil hybride. De
même, il se construira un parcours hybride, alternant ou cumulant les différentes formes d’emploi,
salariales et entrepreneuriales.
Simultanément, le management passera de l’autorité hiérarchique, de la légitimité d’expérience et
d’expertise à la zone d’influence.
Si les ‘pure players’ (Google, Microsoft, Orange, …) ou start-ups des TIC ont déjà pris une longueur
d’avance dans la composition d’équipes de Digit’Experts, aidés en cela par leur sous-jacent
technologique et leur jeunesse, toutes les entreprises n’en sont pas à ce stade, loin de là. Le défi
majeur pour une compagnie ‘traditionnelle’ (dans l’industrie ou le service, le public ou le privé) réside
aujourd’hui dans l’acquisition de talents digitaux mais surtout dans la réingénierie des compétences de
sa population de salariés.
Donner à chacun l’opportunité d’être un acteur de la transformation digitale de son entreprise, c’est à
la fois l’associer à un projet dynamique et motivant mais aussi l’assurer de maintenir son employabilité
sur le marché du travail. Il s’agit d’un enjeu crucial notamment pour les sociétés qui entretiennent une
longue tradition d’accompagnement à la reconversion de leurs collaborateurs au travers d’un pacte
social, déjà éprouvé lors des précédentes évolutions industrielles ou technologiques.
La présente thèse professionnelle se propose d’étudier comment accélérer l’acquisition des
compétences numériques dans une entreprise en transformation digitale.
Dans un premier temps, une revue de littérature aura pour objectif de camper le cadre de la réflexion
en analysant au travers d’articles académiques et de rapports d’étude récents (tous postérieurs à
2010 pour s’inscrire dans le contexte des vagues de transformation numérique) :
 Les ressorts économiques de cette nouvelle révolution industrielle, son impact sur la structure de
l’emploi, les qualifications requises dans l’ère du quaternaire ;
 Le degré de maturité numérique des entreprises françaises ;
 L’identification et la classification des compétences numériques au travers d’approches
complémentaires issues des institutions politiques ou universitaires ;
 Les menaces et les freins associés à l’acquisition de ces compétences en entreprise ;
 Les conditions de développement et d’épanouissement de ces compétences à l’échelle individuelle
et organisationnelle.
9
Cette partie théorique sera éclairée ici et là de quelques illustrations appliquées au secteur de
l’Assurance. Ces focus donneront des exemples concrets des transformations à l’œuvre dans une
profession financière dans laquelle j’exerce depuis plus de 20 ans et dont j’observe les mutations sous
l’impact du digital.
La résultante de la revue de littérature consistera à produire d’une part une proposition de référentiel
de compétences numériques et d’autre part un guide d’entretien permettant de conduire une enquête
qualitative auprès de 17 interviewés issus d’horizons variés : DRH, responsables pédagogiques des
grandes écoles, responsable de formation, responsable d’observatoire des métiers, influenceur sur
réseaux sociaux professionnels, représentant de syndicat de dirigeants, acteur de la FING, expert en
cabinet conseil RH …
A l’issue de ces rencontres, au-delà de l’analyse des témoignages des uns et des autres sur les
pratiques, l’objectif consistera à stabiliser la proposition de référentiel de compétences numériques en
intégrant toute la richesse de ces regards croisés.
10
1ère PARTIE : revue de littérature
I. De la troisième révolution industrielle à l’économie du quaternaire … de la technologie aux
changements des usages et des modes de vie
I.1 La convergence de trois révolutions technologiques
Un nouveau monde émerge affirme Jérémy Rifkin, économiste américain, au travers de ses deux
derniers ouvrages : ‘La troisième révolution industrielle’ (2012) et ‘La nouvelle société du coût
marginal zéro’ (2014). Nos sociétés sont bouleversées par la conjonction de trois révolutions
technologiques :
 la révolution des technologies de l’information et de la communication (TIC), qui permet l’échange
de milliards d’informations de manière totalement décentralisée entre des milliards d’ordinateurs,
de smartphones, de GPS, de capteurs, de compteurs, de collecteurs d’information ;
 la révolution énergétique, qui substitue aux systèmes de production d’énergie centralisés, à partir
de combustibles fossiles ou nucléaires, des formes nouvelles et totalement décentralisées de
production d’énergie renouvelable, chaque logement se transformant en une petite centrale de
production grâce à son architecture bioclimatique, ses capteurs solaires, voire son éolienne de
poche ;
 la révolution du stockage de l’électricité, qui devrait permettre d’ici quelques années de pallier le
principal défaut des énergies éolienne et solaire qui est leur caractère aléatoire, et donc de
recueillir les petites quantités d’énergie produites par chacun de ces millions de capteurs à des
moments creux pour les utiliser au moment et dans le lieu où l’on en aura besoin.
Considérées et articulées ensemble, ces trois révolutions débouchent sur la conceptualisation d’un
énorme réseau d’échange d’informations et d’énergie, un « smart grid » (un « réseau intelligent »)
géant, permettant la création d’une plateforme d’opération unique pour l’économie.
Aujourd’hui, l’internet de l’information, déjà largement répandue, commence à converger avec
le très jeune internet de l’énergie, et un début d’internet des logistiques : « trois internets en
un » aboutissant à l’internet des objets.
Cette grande mutation s’accompagne de deux incidences majeures :
1. l’approche du coût marginal zéro sur la production de nombreux biens et services, les rendant
virtuellement gratuits et abondants ;
2. l’avènement de l’économie du partage avec la transformation des comportements individuels.
C’est bien historiquement la concomitance du progrès sur le trinôme ‘communications-
énergie-transports’ qui génère les plus grandes mutations économiques. Ainsi si l’on remonte à
la révolution hydraulique, puis aux révolutions de la vapeur et de l'électricité, on constate que l'on
assiste à chaque fois à la conjonction d'une révolution des communications (facilitation des échanges),
d'une révolution énergétique (le « moteur » de l'économie) et d'une révolution des transports et de la
logistique (fluidification de la circulation des biens à l'intérieur de cette économie). Au XIXe siècle,
l'impression (de journaux, notamment) par des presses à vapeur remplace l'impression manuelle.
Arrive le télégraphe. Ces deux moyens de communication profitent de la profusion de charbon à coût
modéré, et l'invention de la locomotive permet d'élargir le marché et de fluidifier le commerce. Au XXe
siècle, une nouvelle révolution se produit avec le téléphone et la radio, qui convergent avec l'arrivée
du pétrole et de la voiture, et provoquent, couplées avec la construction du réseau routier, le boom de
la grande mutation urbaine et « suburbaine ».
11
Le coût marginal de production – coût de production additionnel d’un objet ou d’un service une fois les
coûts fixes absorbés – s’est considérablement réduit dans les économies traditionnelles ces quarante
dernières années, avec une forte accentuation du phénomène sur la dernière décennie.
Les industries musicale, de la presse, de l’édition, des divertissements ont vu ainsi leur business
model se reconfigurer. L’industrie du savoir connait elle aussi de grandes mutations avec la montée
en puissance des nouvelles formes d’encyclopédies universelles (Wkipedia) dont les contenus sont
produits gratuitement par des millions d’internautes. Sans parler des MOOCs (Massive On-Line Open
Courses) : en deux ans (2012-2014), 6 millions d'étudiants se sont mis à suivre gratuitement des
cours online, issus des meilleures universités du monde.
L’illustration ne s’arrête pas à des biens et services numériques. Longtemps il a été considéré que la
réduction à zéro du coût marginal ne toucherait pas les industries traditionnelles. Cette croyance est
tombée avec l’avènement de l’impression 3D notamment, autorisant chacun à fabriquer et produire
soit même de nombreux produits.
A ce titre les comportements individuels sont bouleversés : l’une des manifestations les plus évidentes
est l’estompage de l’idée de possession ou de propriété d’un bien ou d’un service au profit d’une
expérience vécue à laquelle on accède pour un temps donné, et que l’on partage avec les autres. A la
« valeur d’échange » sur le marché se substitue la « valeur partageable » sur des « communaux »
collaboratifs. Prenons l’exemple du transport : au concept de voiture, objet témoin de richesse et de
statut pour toute une génération, se substitue peu à peu le concept de mobilité : j’emprunte une
autolib pour me rendre à une gare multimodale, je finis mon parcours en transport en commun et je
rentre en co-voiturage après avoir consulté la plateforme blablacar …
L’internet des objets est le pendant technologique des « communaux » collaboratifs émergents. La
culture du partage permet aux individus de s’engager dans des réseaux de pairs à pairs et de
transférer des marchés capitalistes aux « communaux » collaboratifs (groupes, associations,
coopératives, communautés …) de petits fragments de leur vie économique (transport, hébergement,
divertissements, usages d’outils, etc…).
Parfois taxés de rêves ou de prédictions, les travaux de Jérémy Rifkin inspirent les Etats (Angela
Merkel), les collectivités locales (villes de San Antionio au Texas, Rome, Utrecht), les dirigeants
publics ou privés. Ils présentent le mérite de bien identifier les enjeux économiques de demain et de
cerner les nouveaux nerfs de la guerre sur lesquels s’activent déjà les cablo-opérateurs, les
fournisseurs d’énergie, les géants d’internet, à savoir :
 le financement et la possession des réseaux d’infrastructures internet et des plateformes d’objets
connectés ;
 la gestion, la circulation et le traitement des flux de données ou Big Data.
I.2 L’impact des innovations contemporaines sur le marché du travail et les emplois
A la sortie de la grande crise de 1929, John Maynard Keynes exprimait son optimisme dans son essai
Economic Possibilities for our Grandchildren (1930), dans lequel il explorait une voie intermédiaire
entre la révolution et la stagnation. Mais il avertissait également que cette voie comportait elle-même
des risques, dont celui d’un sous-emploi technologique résultant d’une accélération des innovations :
la découverte de moyens d’économiser le recours au travail humain pourrait être plus rapide que la
découverte de nouvelles façons d’utiliser ce travail.
12
La phase des innovations contemporaines, qualifiée de troisième révolution industrielle ou d’ère
numérique, remet en cause cette croyance et suscite des inquiétudes en raison de deux contre-
performances :
1. le ralentissement des gains de productivité, accompagné d’un taux de chômage important et
persistant ;
2. la bipolarisation des emplois selon le caractère routinier ou non routinier, marquée par un solde
négatif entre les destructions massives d’activités automatisées ou codifiables sur le plan
numérique et les créations d’activités manuelles ou cognitives. De ce fait, l’impact des nouvelles
technologies numériques serait important dans la crise actuelle de l’emploi.
Contrairement aux innovations de la deuxième et de la troisième révolution industrielle, qui ont
introduit un biais en faveur du travail non qualifié en remplaçant le travail qualifié des artisans par du
travail non qualifié d’ouvriers grâce au travail posté sur les chaines de production, les innovations
contemporaines introduisent des phénomènes totalement nouveaux :
 l’automatisation des tâches menace les activités « routinières » ;
 le développement de l’intelligence artificielle, en particulier les algorithmes d’apprentissage,
transforme aussi les professions plus qualifiées, fondées sur la maîtrise de grandes bases de
connaissances ;
 le report sur l’utilisateur final : les technologies numériques permettent d’équiper les utilisateurs des
outils nécessaires pour exécuter eux-mêmes certaines tâches, faisant disparaître les professions
correspondantes ;
 le report sur la multitude : dans certains cas, ce n’est pas le consommateur lui-même qui prend en
charge la production, mais la communauté des internautes (exemples de Wikipedia et
TripAdvisor) ;
 la concurrence des amateurs : les technologies numériques permettent d’équiper des individus
pour qu’ils puissent offrir un produit souvent moins cher et d’une qualité supérieure par rapport aux
professionnels (exemple de la plateforme AirBnB).
Ces phénomènes affectent les catégories socio-professionnelles intermédiaires de la population active,
celles-là même qui sont au cœur de notre modèle social.
Cet avertissement est resté largement méconnu dans le milieu économique, focalisé sur la conviction
que le progrès technique était toujours pourvoyeur de prospérité et d’emplois. Cette croyance a
largement été alimentée par l’observation des conséquences des deux premières révolutions
industrielles. Deux idées importantes concernant les relations entre innovation, croissance et emploi
ont ainsi été forgées :
1. par son effet sur la productivité, l’innovation est le moteur de la croissance économique :
2. par la demande de nouveaux produits qu’elle induit et les gains de productivité qui permettent un
pouvoir d’achat accru, l’innovation est à terme globalement favorable à l’emploi pour peu que
le système éducatif et le système de formation des compétences répondent de manière
satisfaisante aux nouveaux besoins de l’économie.
En France, entre 1990 et 2013, la part des emplois intermédiaires dans l’emploi total a diminué de
8.6% (Goos M., Manning A., Salomons A., 2014)
13
L’inquiétude grandit donc s’agissant de l’effet du numérique sur l’emploi, avec deux constats majeurs :
1. la modification structurelle de la répartition des emplois entre peu qualifiés, intermédiaires et très
qualifiés ;
2. le coup d’arrêt à la tendance longue de l’expansion du salariat et le spectre de la ‘gig economy’ ou
économie des ‘petits boulots’ (renouveau du freelance et du travailleur indépendant), posant de
nouveaux défis à la régulation et à la protection sociale.
Dans leur article « Innovations contemporaines : contre-performances ou étapes transitoires » (2014),
Michèle Dubonneuil et David Encaoua posent la problématique suivante : « les forces de l’économie
de marché, dont l’innovation est une composante essentielle, deviendraient-elles les fossoyeurs de
l’emploi ? Ou bien ne s’agirait-il que d’une phase transitoire à la recherche de nouvelles perspectives
permettant aux innovations contemporaines d’être porteuses d’une prospérité économique retrouvée,
comme l’ont été celles des deux révolutions industrielles antérieures ? ».
Leur analyse débute sur la distinction de trois types d’innovation, selon la logique de finalité :
1. les innovations de remplacement, incorporant des améliorations techniques ou de nouvelles
fonctionnalités ;
2. les innovations de rationalisation, permettant d’abaisser les coûts de production et/ou distribution
des biens et services arrivés à maturité ;
3. les innovations d’autonomisation, qualifiées de créatrices de nouveaux usages, remplissant trois
propriétés : i) ce sont des innovations de rupture, ii) à l’origine d’une demande nouvelle, iii)
initiatrices de transformations sociales dans les modes de vie.
Ces trois types d’innovations coexistent à tout moment dans une économie. Les innovations
autonomisantes seraient à l’origine de créations nettes d’emplois, tandis que les deux autres types
d’innovations auraient des effets plus ambigus. Ainsi, les combinaisons d’investissements en capital
qu’elles engendrent peuvent conduire à des configurations globales différentes.
Cette « courbe en U » est la signature du
phénomène de polarisation.
Contrairement aux autres pays occidentaux,
la France se distingue toutefois par sa
difficulté à créer des emplois peu qualifiés,
en raison :
1. Du coût élevé du travail, pour les
entreprises au niveau du SMIC (en
particulier dans les zones où la
productivité est plus faible),
2. D’une rigidité du droit du travail qui
fait de la décision d’embauche en
contrat à durée indéterminée (CDI)
une décision risquée, notamment
dans le cas d’un travailleur sans
diplôme et sans expérience.
Source : Nicolas Colin et al., « Économie numérique »,
Notes du conseil d’analyse économique 2015/7 (n°
26), p. 1-12.
14
Période Cycles économiques Effets de report du capital Incidences
1945 - 1973 Cycles d’activité
courts
Report du capital libéré par
des innovations de
rationalisation sur des
innovations autonomisantes
 Renouvellement de la
demande
 Croissance économique
 Solde net positif de
créations d’emplois
 Baisse du taux de
chômage
1973 - 2015 Durée des périodes
de récession plus
longues
Report du capital libéré par
des innovations de
rationalisation sur des
innovations de rationalisation
ou de remplacement
 Créations d’emplois durant
les phases d’expansion
insuffisantes pour
compenser les destructions
d’emplois durant les
phases de récession
 Hausse du taux de
chômage
Que faire pour que les innovations autonomisantes redeviennent prédominantes ? Quelles conditions
réunir pour permette aux innovations technologiques contemporaines de déployer leur potentiel ?
Dubonneuil et Encaoua développent l’idée que (p.73) : « les potentialités de transformations sociales
ouvertes par les technologies numériques contemporaines n’ont pas encore été suffisamment
exploitées. Autrement dit, même si certaines de ces technologies ont bien un caractère d’innovations
de rupture, elles n’ont pas encore entraîné les nécessaires transformations sociales pour acquérir le
statut de véritables innovations autonomisantes. Leur potentiel se révélera autant à travers la
transformation des modes de vie et la réinvention des usages qu’elles appellent que par leur contenu
technologique à proprement dit ».
Source : TheFamily Papers #002, Nicolas Colin, Another 100 Days : a digital Neaw deal for Workers, 28 octobre 2015
15
I.3 Quelles qualifications requises dans l’économie du quaternaire ?
Une des transformations sociales les plus radicales apportées par les technologies numériques
consiste à passer de la situation actuelle d’une production de biens, séparée des conditions de leur
usage, à une production nouvelle de « solutions», consistant en une mise à disposition sur les lieux de
vie des utilisateurs, tout à la fois, du bien, d’équipements associés, de services qui l’accompagnent et
de personnel dédié à cet accompagnement. La vente séparée de biens et de services cède ainsi la
place à une mise à disposition sous forme locative des conditions d’usage du produit intégré, évitant à
l’utilisateur de devoir être propriétaire des composantes intermédiaires que sont le bien et les services
correspondants.
De plus en plus d’entreprises prennent conscience qu’il est possible de créer des « solutions » en
combinant internet, le téléphone mobile et les capteurs. Pour faire de l’internet des objets une réalité,
elles mettent en œuvre des plateformes pour faciliter et standardiser l’échange de données entre les
différents composants : par exemple, on voit se développer des offres mettant à disposition des
personnes dépendantes des capteurs permettant d’assurer les fonctions de téléassistance, de pilulier
électronique, de contrôle de paramètres médicaux à distance. En outre, le progrès technologique
pourrait déboucher sur l’interconnexion de différentes « solutions », autorisant des rebonds, la mise à
disposition d’une « solution » en appelant une autre. Reprenons le cas de la perte d’autonomie : une
solution de télésurveillance permettant de détecter une chute et d’envoyer le cas échéant un
intervenant pour s’occuper de la personne … débouchera sur une autre solution consistant à
photographier une blessure et à l’envoyer à un médecin pour un diagnostic à distance et une décision
d’hospitalisation.
La distinction habituelle entre biens et services s’estompe pour donner lieu à des « solutions », voire à
des bouquets de « solutions » construits autour d’un lieu de vie (domicile, mobilité), d’un âge de la vie
(silver économie), d’un besoin spécifique (se loger, se déplacer, se nourrir, se soigner). Selon
Dubonneuil (2007, 2010, 2014), le « secondaire et le tertiaire se marient pour donner naissance à
l’économie quaternaire ».
Cette économie du quaternaire crée de nouvelles formes d’emplois satisfaisant des besoins
d’interaction humaine et de service.
En effet, deux types de qualifications émergent :
1. un travail de conception technologique, autour des fonctions de conception, de prototypage, de test
et d’industrialisation de nouveaux biens et services dont la production sera de plus en plus
automatisée ;
2. un travail d’interaction, consistant en une intervention humaine pour assurer la maintenance sur
site des biens durant leur cycle de vie ainsi qu’un accompagnement à distance ou en face-à-face
des utilisateurs. Ces emplois possèdent deux attributs importants : ils sont à la fois non
délocalisables par nature et non substituables par des technologies numériques, dans la mesure
où les interactions qu’ils comportent sont de nature humaine, non routinière, et donc non codifiable
par essence. Ils nécessitent de nouvelles formes de spécialisations, notamment celle de pouvoir
réagir rapidement à des situations inédites et de communiquer des informations précises à d’autres
interlocuteurs.
Dans l’ère du numérique et de la mondiatlisation, l’éducation, la formation et l’apprentissage
sont cruciaux dès le plus jeune âge et tout au long de la vie, non seulement pour s’adapter aux
transformations technologiques induites par les innovations contemporaines, mais également
aux usages de ces innovations qui doivent conduire à une perception renouvelée des modes
de vie.
16
II. La maturité numérique française
II.1 La performance numérique de la France à l’échelle mondiale sur le Digital Evolution Index
Sponsorisé par MasterCard et DataCash, l’institut ‘for Business in the Global Context’ de la Fletcher
School (Tufts University, Medford USA) s’est penché sur la composition d’un indice visant à
positionner une cinquantaine de pays dans le cadre d’une maturité et d’une trajectoire numérique.
L’échantillon de pays retenus associe des pays développés et émergents représentant les 3/4 de la
population mondiale.
Le Digital Evolution Index (DEI) intègre les leviers mais aussi les freins que rencontre chaque nation
dans son parcours d’évolution digitale. L’indice repose sur la compilation de données relatives à
quatre piliers :
1. le facteur d’offre se focalise sur les infrastructures technologiques, logistiques, transactionnelles
(accès internet, complétude des réseaux, …) permettant de soutenir le e-commerce et les
transactions en ligne ;
2. le facteur de demande incorpore les comportements des consommateurs, leur appétence pour les
paiements en ligne, ainsi que leur capacité à maîtriser les outils internet et les réseaux sociaux ;
3. le facteur institutionnel se penche sur l'efficacité des gouvernements dans le soutien à l'innovation,
leur rôle dans le secteur privé et le cadre législatif pour favoriser l’émergence de l’écosystème
digital ;
4. le facteur innovation inclut l'état de l'écosystème entrepreneurial, le financement de l'innovation, la
présence d'un esprit et d'une culture start-up.
Il en résulte un classement indicatif d’une maturité digitale. La dernière séquence de données
enregistrées en 2013 fait figurer la France dans le second quartile, en 19
ème
position avec un score
global de 44.07/100, là où le pays ‘best-in-class’, Singapour, caracole avec un score de 56.21/100.
Average 34.67 39.99 22.98 49.25
17
La France offre un tableau contrasté : si le levier de la demande progresse positivement avec 78% de
sa population utilisant régulièrement internet et un accroissement rapide (+97% entre 2012 et 2013)
de son e-commerce au travers des smartphones et tablettes, trois constats peuvent se révéler
inquiétants :
1. son point fort, le levier de l’offre, lié à la qualité de ses infrastructures, est en décélération de -6.6%
sur la période de référence 2008-2013 ;
2. le levier institutionnel donnant l’impulsion politique et réglementaire reste insuffisant ;
3. le levier innovation n’est pas suffisamment décisif pour donner un avantage comparatif.
Singapour, le bon élève, n’a cessé quant à lui de progresser dans le développement d’une
infrastructure numérique de calibre mondial, grâce à des partenariats public-privé, à l’exemple du
projet Next Gen II sur le projet de création d’une infrastructure d’autoroute digitale. Il consolide encore
davantage son statut de centre de communication régional. Grâce à des investissements en cours (les
institutionnels locaux Temasek & GIC ont injecté en 2013-2014 3 milliards de $ dans les secteurs des
technologies, des telecom et du eCommerce), Singapour demeure une destination attrayante pour les
start-ups, pour le private equity et le capital risque.
L’enseignement principal du classement est qu’il n’existe pas de configuration digitale type, car selon
les pays, les 4 leviers ne connaissent pas le même degré de corrélation ni la même vitesse d’évolution.
Au mieux, peut-on noter des similarités par zones géographiques (Pays nordiques, Europe Centrale,
Europe du Sud, membres de l’ASEAN …) en raison d’une communauté d’environnements culturel,
social, politique et économique.
Source : Digital Planet : readying for the rise of the e-consumer, a report of the state and trajectory of global digital evolution,
september 2014,
L’étude de la Fletcher School analyse par ailleurs le taux de croissance – positif ou négatif - de l’indice
(DEI) de chaque pays en regardant sa variation entre 2008 et 2013. Il en résulte un tableau de
trajectoire numérique, ayant pour axe vertical le score de l’indice en 2013 et pour axe horizontal son
taux de variation sur 5 ans. Chaque pays se voit ainsi affecté dans une zone d’évolution numérique.
18
Comment analyser les positionnements respectifs des pays sur la matrice de trajectoire digitale ?
19
La France figure dans le cadran des ‘stall out countries’, c’est-à-dire le cadran des pays ayant atteint
un niveau de développement numérique élevé, mais qui accusent une perte de vitesse et s’exposent
donc au risque de rester à la traine. Cette décélération, comme dans de nombreux pays d’Europe du
Nord et de l’Ouest, s’explique par une croissance économique atone depuis la crise financière de
2008 et reflète les incidences des restrictions budgétaires que les états ont été contraints d’adopter.
La conclusion de l’étude de la Fletcher School est que ces ‘stall out countries’ ne pourront se relancer
dans la course qu’en redoublant d’effort sur l’innovation et en recherchant des marchés en dehors de
leurs frontières nationales.
II.2 Le paradoxe français dans le paysage européen : le décalage particuliers / entreprises
Le numérique pèse ainsi aujourd’hui 5,5 % de notre PIB, et participe pour 25 % à la croissance
française. La contribution à la richesse nationale pourrait atteindre 6 % en 2016 (135 milliards d’euros)
et 7 % en 2020 (180 milliards d’euros). 880 milliards d’euros, c’est la gigantesque valeur économique
que pourrait engendrer, d’ici 2025 – et selon le cabinet McKinsey France dans son rapport “Accélérer
la mutation numérique des entreprises : un gisement de croissance et de compétitivité pour la France”
-, le plein déploiement du numérique et des technologies, des produits et des services associés en
France.
La diffusion au grand public du numérique s’est accélérée ces dernières années dans l’hexagone. Mis
à jour régulièrement, les Chiffres Clés de l’Observatoire du Numérique traduisent ce succès. Ils
dressent un panorama synthétique du numérique dans notre pays, qui permet d’en caractériser le
développement et le poids au niveau national comme à l’échelle européenne.
Comparés aux résultats de l’enquête communautaire sur les TIC en 2013 (source Eurostat), les
Chiffres Clés de l’Observatoire du Numérique 2014 font apparaître un contraste saisissant entre
particuliers et entreprises.
Les particuliers en France ont désormais un équipement adéquat et un usage élevé de l’internet.
 82% des français ont un accès à internet depuis leur domicile. La progression est fulgurante,
comparé à 2002 où seulement 22% des foyers étaient équipés. L’usage régulier de l’internet (au
moins 1 fois par semaine) concerne 78% des Français, et l’usage quotidien d’internet touche 66%
des Français.
 L’internet mobile confirme sa percée : 30% des particuliers de 16 ans et plus en France utilisent
une connexion via un réseau de téléphonie mobile pour connecter leur appareil mobile à internet,
vs 23% dans l’UE. Près de 40% des Français possèdent un smartphone (75% dans la tranche
d’âge des 18-24 ans).
20
 Pour les infrastructures du numérique, la France occupe une très bonne position sur les
connexions à haut débit : elle se situe au 5
ème
rang européen pour le ratio abonnements à haut
débit par 100 habitants, soit 37% vs 28% dans l’UE.
 L’administration numérique progresse bien en France, puisque 60% des particuliers utilisent
internet dans leurs relations avec l’administration, vs 41% dans l’UE.
 59% des particuliers français ont acheté des biens ou services en ligne sur la période étudiée, vs
47% des particuliers européens de l’UE.
Les usages en entreprises sont plus contrastés, avec une ségrégation entre quelques usages
numériques de base omniprésents, comme l’utilisation d’e-mails ou la présence sur le web, et des
usages plus avancés (fonctions interactives avec le client, outils collaboratifs internes, ...) qui ne sont
adoptés que par une faible proportion d’entreprises.
L’enquête récurrente INSEE sur les TIC (2012, 2013), conduite sur les entreprises d’au moins 10
salariés, illustre ce clivage entre usages simples et usages avancés. En voici les principaux résultats :
21
 toutes les entreprises françaises disposent d’un accès à internet, et environ les deux tiers d’entre
elles ont une page web ; 61% des entreprises utilisent l’EDI (Echange de Données Informatisées) ;
 une minorité d’entreprises se sert des outils avancés de gestion des processus de l’entreprise :
33% ont un ERP (outil de gestion intégré), 26% un CRM (outil de gestion de la relation client), 13%
un outil de partage d’information sur leur supply chain (chaîne logistique) ;
 moins d’une entreprise sur sept a développé une interface web avancée : seules 14% vendent en
ligne, 13% proposent un suivi de commande et 14% offrent un contenu personnalisé.
Le constat est similaire en ce qui concerne les outils de communication et de collaboration : si l’email
est incontournable (97% des entreprises l’utilisent en interne, 93% vers leurs clients), l’utilisation de
nouveaux outils de communication reste encore minoritaire :
 la visio-conférence est utilisée par 47% des entreprises et les outils collaboratifs (de type
Sharepoint) par un peu plus d’un tiers d’entre-elles (37%).
 le chat (23%), le réseau social interne (13%) et l’exploitation des réseaux sociaux grand public
pour gérer la relation client (17.1%) décollent à peine.
Source : Nicolas Colin et al., « Économie numérique », Notes du conseil d’analyse économique 2015/7 (n° 26), p. 1-12.
Les entreprises françaises ne semblent pas tirer pleinement parti du potentiel de la demande en
matière de services numériques.
Selon la note du Conseil d’Analyse Economique (CAE) présentée au cabinet du Premier Ministre le
6/10/2015, plusieurs facteurs expliquent ce retard :
1. les compétences relativement faibles des actifs : l’enquête PIAAC 2013 (Program for the
International Assessment of Adult Competencies) de l’OCDE mesure les compétences des adultes
âgés de 16 à 65 ans et l’utilisation de ces compétences dans le cadre
professionnel (compréhension écrite, mathématiques, nouvelles technologies). Elle donne à la
France un score médiocre (258/500), légèrement inférieur à l’Espagne (260/500), et loin derrière
les USA (267/500) et la Suède (282/500). Ce retard complique l’investissement dans le numérique,
la mise en œuvre des changements organisationnels qui lui sont liés et l’appropriation des
technologies par les salariés ;
22
2. l’inadaptation des réglementations sur les marchés des biens et services et sur le marché du travail,
qui entrave le déploiement des modèles d’affaires numériques, freine le renouvellement des
entreprises et dissuade les fonds d’investissement ;
3. le manque de fonds d’investissement de grande taille capable de prendre des risques importants
sur des durées longues, ainsi que le nombre insuffisant de « business angels ».
Une étude conduite par le cabinet McKinsey en 2014 sur un échantillon représentatif de 500
entreprises françaises (dont 325 PME) explore également les raisons de ce retard. Différents facteurs
endogènes apparaissent :
1. les rigidités organisationnelles englobent une structuration compartimentée en silos, un manque
d’agilité, de transversalité et de fluidité ;
2. la sur-spécialisation des compétences engendre un réel manque de polyvalence, ce qui constitue
un comble sur le champ numérique dans un pays reconnu pour la qualité de ces mathématiciens,
statisticiens et ingénieurs ;
3. la faiblesse caractéristique en France des marges commerciales (28% tous secteurs confondus
contre 38% en moyenne en Europe) impacte directement les capacités d’investissement des
entreprises et donc leur aptitude à se transformer ;
4. la crainte des dirigeants sur l’ampleur de la tâche à accomplir s’exprime tant sur le plan humain
que financier. Si la prise de conscience de la transition numérique est actée, il manque encore la
vision, la maturité et la déclinaison sur le business model ;
5. un rapport faussé au digital l’assimile trop souvent à l’informatique et à la technologie alors qu’il
s’agit avant tout d’une révolution des services et des usages ;
6. les freins culturels incluent la défiance vis-à-vis du changement ainsi que l’individualisme qui laisse
peu de place à l’esprit collectif qui est cœur de l’économie du quaternaire.
Avec un décalage prononcé entre l’appétence et les usages des particuliers et ceux des entreprises,
La France est un cas assez unique dans le paysage européen. Les usages internet des particuliers
sont ainsi entre 6 et 19 points au-dessus de la moyenne de l’UE, là où les usages internet des
entreprises sont quant à eux 10 points en dessous de la moyenne de l’UE.
23
Dans un contexte économique incertain, la transformation digitale représentant en quelque sorte un
saut vers l’inconnu, les entreprises manquent cruellement de visibilité quant au retour sur
investissement qu’elles en dégageront, tant en termes de valeur que d’échéance.
24
Focus Assurance n°1 – Maturité numérique du secteur de l’Assurance
« Plus nous serons digitaux, plus nous serons dans l’efficience du service
et les attendus en termes de qualité de service ».
Stanislas Chevalet, Directeur Général Adjoint de BNP Paribas Cardif, Expansion Managment Review,
septembre 2014.
Le digital est un levier crucial pour les assureurs : il peut leur permettre de reconquérir une part plus
importante du profit dans la chaine de valeur, aujourd’hui principalement capté par les assurés et les
distributeurs.
Au-delà des objectifs de vente en ligne qui restent anecdotiques et stagnent globalement à 5% des
primes collectées en France, les enjeux de la transformation digitale se concentrent sur :
1. la redéfinition et le ré-enchantement de la relation client, concomitants avec la « retailisation » des
services et l’avènement de l’hyper-usage ;
2. le questionnement sur l’évaluation et la mutualisation des risques à l’heure de la migration du big
au smart data, avec une révision du modèle de pricing et une meilleure analyse des sinistres ;
3. l’industrialisation des opérations au travers de l’automatisation et de la dématérialisation des
processus.
Source : MIT Sloan Management : Capgemini, “The digital advantage : how digital leaders outperform their peers in every
industry”, 2015
25
II.3 L’accélération de la transformation digitale : un enjeu identifié, un chemin encore mal balisé, un
potentiel salarié sous-exploité
Dans son livre blanc paru en novembre 2014 sous le titre « le Change Digital : l’intégration du sujet
digital au sein des entreprises en 2014 », la chaire ESSEC du changement note un écart entre la prise
de conscience élevée des enjeux du digital (86% des participants aux Rencontres Internationales du
Changement organisées sur ce thème les 24 et 25 septembre 2014) et le niveau de maturité digitale,
jugé insuffisant (60% des participants) et en construction.
Ce constat rejoint les conclusions de l’étude Callson – Roland Berger, déjà mentionnée au 1.2.2 : la
transformation numérique est très largement reconnue comme :
1. Un facteur de performance économique sur 2 axes :
 le développement du chiffre d’affaires grâce à une approche centrée sur l’utilisateur final, une
culture de la réinvention permanente du business model et de la chaîne de valeur, l’extensibilité
(« scalability ») des solutions, la diminution de barrières géographiques et culturelles,
l’ouverture de l’entreprise sur son écosystème extérieur ;
 la baisse ou la maîtrise des coûts grâce à la mise en réseau de l’ensemble de la chaîne de
production et de logistique, la mise en œuvre d’une maintenance prédictive des actifs de
production, la dématérialisation des échanges et des processus, l’optimisation des plateformes
de type cloud, l’utilisation du big data… qui rendent les environnements plus flexibles et
génèrent des économies d’échelle par mutualisation, tout en convertissant de lourds
investissements (CapEx) en charges récurrentes (OpEx) plus supportables.
2. Un facteur d’innovation : le numérique est à la fois le fond et la forme de l’innovation. Il est source
de disruption mais également catalyseur ou facilitateur de solutions à partir de démarches inédites
(capacité de mise sur le marché sous forme de lancements rapides ‘launch & iterate’ et d’essais
successifs ‘trial & error’, incubateurs de start-ups, organigrammes aplatis, etc…)
3. Un facteur d’efficacité : l’étude INSEE/Eurostat de décembre 2013 « Analysing ICT Impact for
Different Units Of Observation » trouve une corrélation positive significative entre la productivité du
travail ou du capital au sein d’une entreprise et les variables de maturité numérique suivantes : 1)
automatisation des canaux de vente, 2) volumes de vente en ligne, 3) gestion numérique de la
chaîne logistique, 4) présence d’un ERP (outil de gestion intégré).
4. Un facteur de cohésion sociale : la diffusion des outils, des usages et de la culture numériques
dans l’entreprise apparaît comme un facteur de transformation positive des relations de travail pour
37% des entreprises (vs 6% comme un facteur de transformation négative) grâce à un sentiment
renforcé d’implication et une capacité de dialogue renouvelée. De même, elle renforce la
satisfaction et le bien-être au travail pour 43% des entreprises (vs 5% qui ont un avis négatif).
Avec autant de bénéfices reconnus, comment expliquer dès lors la frilosité des entreprises à accélérer
leur transformation numérique ? Pourquoi cela constitue-t-il un tel défi ?
Les freins les plus communément évoqués sont :
 les coûts induits par l’immobilisation des capitaux permettant de financer la mise en place des
nouveaux outils et process, les investissements en temps et moyens de R&D, la compétitivité des
prix … sans être en mesure de générer un ROI direct ;
 la gestion de l’héritage informatique et la redéfinition du rôle de la fonction de DSI (Direction des
Systèmes d’Information) : la mise en place des outils de gestion s’est faite en France avec
beaucoup plus d’adaptations spécifiques que dans les autres pays de l’UE, créant des strates et
des couches spécifiques de développement. Il en a résulté des SI difficiles à faire évoluer,
mutuellement dépendants, avec des déploiements lourds nécessitant un amortissement sur longue
période. L’évolution des outils numériques se traduit dans l’entreprise par une attente des
collaborateurs et du management, en rupture par rapport aux infrastructures mises en place :
alternative SaaS (software as a service), tendance du BYOD (Bring Your Own Device), utilisation
26
des réseaux sociaux et des outils collaboratifs mélangeants des usages professionnels et
personnels. Le DSI fait face à une situation délicate : il doit gérer l’héritage (‘legacy’) tout en ne
freinant pas les nouveaux usages ;
 la résistance au changement dans une culture d’entreprise française historiquement fondée sur un
modèle de grande entreprise solidement structurée et hiérarchique, hors des modèles plus
flexibles et réactifs qui apparaissent aujourd’hui plus performants, car plus innovants, agiles et
participatifs.
Ces chiffres corroborent ceux du livre blanc de la chaire ESSEC du changement qui indiquent que 2/3
des dirigeants ont intégré le digital dans leurs projets stratégiques, mais que seulement 30% des
entreprises disposent d’une stratégie digitale, formalisée, claire, robuste et partagée.
Les initiatives numériques se déploient généralement top down du senior management ou de la DSI
vers les collaborateurs. Les 19% d’entreprises françaises qui ont concrétisé une initiative numérique
dont les employés sont à l’origine font figurent d’exception.
TNS Sofres, en lien avec Abilways Digital, a conduit de novembre à décembre 2013 une enquête de
terrain intitulée « la transformation digitale en entreprise, vécu, perceptions et attentes – regards
croisés RH et salariés ». L’échantillon représentatif des entreprises de plus de 200 salariés était
composé de 275 interviewés, 40% appartenant à une fonction RH (DRH, responsable formation, …) et
60% relevant de fonctions opérationnelles.
La très grande majorité des répondants anticipent un impact très fort du digital dans les années à
venir sur :
 leur propre fonction : 63% ;
 la manière de travailler au sein de leur entreprise : 66% ;
 le business model de leur entreprise : 55%.
La transformation digitale est vécue par les salariés comme une formidable opportunité tant pour leur
entreprise (87%) que pour leur propre carrière (70%). Ce qui est frappant de constater, c’est le
décalage dans la dramatisation de la fonction RH relativement à la perception par les collaborateurs
de la transformation numérique.
Plus étonnant encore, si 57% des entreprises déclarent que la transformation numérique fait partie de
leurs axes stratégiques à moyen terme, elles ne s’engagent que très peu dans une stratégie concrète
de transformation :
 36% des entreprises ont une stratégie numérique formalisée ;
 20% des entreprises ont un responsable dédié au numérique (CDO : Chief Digital Officer) ;
 30% des entreprises ont communiqué des objectifs liés au numérique à leurs managers.
Cet engagement limité est particulièrement visible dans l’investissement en compétences.
 52% des entreprises n’ont recruté à ce jour aucun spécialiste du numérique ;
 dans 60% des entreprises, moins de 10% des salariés a suivi une formation numérique ;
 lorsqu’elles existent, ces formations sont centrées sur la simple prise en main d’outils (60%), et très
peu sur des compétences plus larges, comme la culture numérique (13%) ou les nouvelles
méthodes de travail comme le processus d’innovation ouverte (10%).
Les entreprises sous-exploitent le potentiel numérique de leurs salariés, en oubliant que la plupart ont
développé une expérience et une culture numériques à titre personnel. Les consommateurs sont en
avance par rapport aux entreprises, et parmi les consommateurs, les salariés sont les plus grands
utilisateurs du numérique (ainsi 1 salarié sur 3 utilisait l’internet mobile en 2013 vs 1 sur 4 pour
l’ensemble des Français).
27
Source TNS Sofres – Transformation digitale, 2014
Si 27% des salariés interrogés (22% dans les fonctions RH, 30% dans les fonctions opérationnelles)
se disent tout à fait à l’aise avec les nouvelles pratiques liées au digital, et 56% plutôt à l’aise, ils
réclament d’acquérir au travers d’un plan de formation adapté un savoir-faire mais aussi (et surtout !)
un savoir-être digital.
Source TNS Sofres – Transformation digitale, 2014
Les entreprises disposent donc en leur sein d’un puissant potentiel : s’appuyer sur des salariés
enthousiastes, impatients, déjà acculturés à titre privé, comme moteurs de la transformation
numérique.
La transformation digitale ne peut être considérée comme une option : « disrupt or you will be
disrupted ! ». Pour autant, la dichotomie entre usages numériques des particuliers et des
entreprises, le décalage de perception entre RH et salariés, l’investissement encore limité en
formations et compétences digitales … positionnent la France et ses entreprises en retrait de
la dynamique de leurs voisins de l’UE.
28
III. Comment définir les compétences numériques ?
III.1 Qu’appelle-t-on une compétence individuelle ?
Dans le dictionnaire des ressources humaines (6
ème
édition Vuibert 2011), Jean-Marie Peretti définit
ainsi le concept de compétence :
« La compétence rassemble trois types de savoir :
 un savoir théorique ;
 un savoir-faire (expérience) ;
 une dimension comportementale (savoir-être) …
… mobilisés ou mobilisables qu’un salarié met en œuvre pour mener à bien la mission qui lui est
confiée. On distingue divers types de compétences : utilisées / utilisables, validées / potentielles,
opérationnelles / personnelles.
La compétence individuelle est le savoir-faire opérationnel d’une personne, validé dans son activité.
Elle est fortement contingente à une situation professionnelle donnée et correspond donc à un
contexte. La caractérisation de la compétence individuelle se considère selon quatre niveaux :
 les compétences requises par un emploi ou un métier ;
 les compétences mobilisées par un individu dans l’exercice de sa fonction ;
 les compétences détenues par un individu à un moment donné ;
 les compétences potentielles d’un individu (non encore mises en œuvre), qui sont souvent
envisagées comme transversales, transférables, de prospective (domaine privilégié de la gestion
des potentiels et des carrières) ».
Il peut être intéressant de compléter cette définition d’un professeur chercheur émérite des RH de
celle de psychologues, sociologues ou acteurs économiques et sociaux afin de croiser différents
prismes et d’aboutir à une proposition de synthèse sur les caractéristiques principales de la
compétence et de son activation.
« La compétence peut être saisie au travers de quatre caractéristiques qui permettent de rendre
compte de sa complexité :
« La compétence est « l’intelligence pratique des situations » qui se manifeste par trois types de
comportements : 1) l’autonomie, 2) la prise de responsabilité, 3) la communication.
1. elle est opératoire et finalisée : la compétence n’a de sens que par rapport à l’action, elle est
toujours compétence à agir et est indissociable des activités par lesquelles elle se manifeste et au
but que poursuit cette action ;
2. elle est apprise : on n’est pas naturellement compétent, on le devient par une construction
personnelle et sociale qui marie apprentissages théoriques et issus de l’expérience ;
3. elle est structurée : la compétence combine de façon dynamique les éléments qui la constituent
(savoirs, savoir-faire pratiques, raisonnements …) pour répondre à des exigences d’adaptation ;
4. elle est abstraite et hypothétique : la compétence est inobservable. Seules ses manifestations
(comportements et performances) sont constatables ».
Approche du psychologue : Jacques Leplat (1988), « Les habilités cognitives dans le travail »
Approche du sociologue : Philippe Zarifian (1999), « Objectif compétences »
29
L’autonomie et la responsabilité font partie de la définition « de base » de la compétence : il s’agit
d’attitudes sociales qui ne peuvent réellement s’apprendre et se développer qu’en assumant des
situations professionnelles qui les sollicitent. Le contenu et l’organisation de travail ne sont pas
seulement des dimensions dans lesquelles les compétences sont mobilisées, ce sont aussi celles
dans lesquelles elles se développent ».
« La compétence consiste à savoir mobiliser des ressources d’une double nature : d’une part des
ressources personnelles (savoirs théoriques, savoir-faire opérationnels, savoir-faire sociaux) et d’autre
part des ressources extérieures à l’individu (installations, outils de travail, documentations,
informations, réseaux relationnels). Ainsi, la compétence est cette capacité d’intégrer des savoirs
divers et hétérogènes pour les finaliser sur la réalisation d’activités. »
« La compétence professionnelle est la mise en œuvre de capacités en situation professionnelle qui
permettent d’exercer convenablement une fonction ou une activité. »
« La compétence professionnelle est une combinaison de connaissances, savoir-faire, expériences et
comportements s’exerçant dans un contexte précis. Elle se constate lors de sa mise en œuvre en
situation professionnelle à partir de laquelle elle est validable. C’est donc à l’entreprise qu’il appartient
de la repérer, de l’évaluer, de la valider et de la faire évoluer. »
« La qualification serait la boîte à outils qu’un individu se forge en formation initiale, par la formation
professionnelle, au travail, dans ses activités hors du travail. La qualification donne des repères
collectifs. Les compétences seraient les différentes « capacités à », les savoirs et les savoir-faire mis
en œuvre dans une situation de travail. La compétence serait une combinaison entre les ressources
d’une personne et les moyens fournis par l’organisation. C’est « la manière » : deux individus peuvent
avoir des boîtes à outils proches, mais chacun manie ses outils à sa façon. C’est dans cet apport
individuel que réside la compétence ».
En synthèse, nous retiendrons la définition proposée par Antoine Masson et Michel Parlier (2004) :
« Etre compétent signifie savoir combiner et savoir mobiliser des ressources de façon pertinente au
regard des finalités poursuivies dans l’activité de travail et en prenant en compte les caractéristiques
de la situation du travail.
La compétence s’entend comme une capacité à agir, on est « compétent dans et pour » un ensemble
de situations professionnelles, dans un contexte donné et avec un niveau d’exigence donné. La
compétence suppose l’action, l’adaptation à l’environnement comme à la modification de cet
environnement. »
Approche du consultant : Guy Le Boterf (1997), « De la compétence à la navigation professionnelle»
Approche du normateur : AFNOR (2008), norme NF X 50-750 »
Approche du patronat : MEDEF
Approche des syndicats : convention cadre entre l’ANACT et les confédérations syndicales CFDT,
CFE-CGC, CFTC, CGT-FO (2000) : « Développement, reconnaissance des compétences et des
qualifications »
30
La compétence, la résultante de trois conditions
III.2 La compétence numérique : un concept jeune, mouvant et d’essence politique
Depuis la seconde moitié des années 2000, nous assistons à l’émergence du concept de compétence
numérique, sans pour autant disposer d’une définition stabilisée. Van Deursen et Van Dijk (2009)
notent que la plupart des études et papiers de recherche restent limités dans leurs définitions, dans la
taille d’échantillonnage et dans la collecte de données, insistant sur le manque de données
empiriques permettant de valider les structures et le contenu des compétences numériques.
Ilomäki, Kantosalo et Lakkala (2011) tentent de cerner les origines du concept de compétence
numérique en le resituant dans un paysage de disciplines et de concepts proches. Elles soulignent un
périmètre très large couvrant les medias, la communication, la technologie, l’informatique, l’éducation
et les sciences de l’information.
La
compétence
 Savoir agir : Ai-je les
ressources adaptées à la
situation ?
- Savoirs, savoir-faire, savoir-être
- Outils et méthodes de travail
 Vouloir agir : suis-je d’accord et
motivé pour engager ces ressources ?
- Compréhension des enjeux et des finalités de travail
- Correspondance avec mes valeurs
- Intérêt du travail
- Reconnaissance de ma contribution
 Pouvoir agir : ai-je les
moyens d’engager ces
ressources ?
- Autonomie
- Coopération
- Conditions de travail
31
En synthèse, elles proposent la définition suivante : « la compétence numérique rassemble :
1. des savoir-faire techniques permettant l’usage de technologies numériques ;
2. des capacités à utiliser les technologies numériques de façon significative et pertinente dans le
travail, les études, la vie quotidienne ;
3. des capacités à utiliser les technologies numériques de manière critique et réfléchie ;
4. une motivation à participer à une culture digitale ».
Outre le fait de mettre l’accent sur le caractère récent et encore en formation du concept de
compétence numérique, Ilomäki, Kantosalo et Lakkala pointent un phénomène intéressant ; la
compétence numérique est en premier lieu un concept politique, porté essentiellement par des
institutions telles :
 l’UE (Ala-Mutka, framework for key competences for lifelong learning in a knowledge society, 2011)
 l’OCDE ( Program Definition and Selection of Competencies, 2005)
 l’UNESCO.(ICT Competency Standards for Teachers, 2010)
La compétence numérique apparaît comme le reflet des croyances et des projections sur les besoins
du futur et prend ses racines dans l’environnement de compétition économique dans lequel les
nouvelles technologies sont vues comme une opportunité et une solution.
Ainsi le Conseil Européen de Lisbonne en 2000 donne le coup d’envoi de la Stratégie dite de
Lisbonne et de son Digital Agenda of Europe 2020. Cette stratégie économique et sociale vise 3
objectifs :
 Préparer la transition vers une société et une économie compétitives fondées sur le savoir ;
 Moderniser le modèle social européen, investir dans le capital humain et combattre les exclusions ;
 Appliquer un dosage approprié de politiques macro-économiques.
Un quatrième objectif environnemental viendra compléter la Stratégie de Lisbonne lors du Conseil
Européen de Göteborg en 2001.
32
A l’époque, on ne parle pas encore de compétence numérique mais de compétence associée aux
technologies de l’information et de la communication (TIC), identifiées comme levier de productivité,
de croissance durable, d’innovation et d’emploi.
Le terme de e-competence fait son entrée lors de l’European e-Skills Forum de 2004, au travers de la
publication de la Commission Européenne « e-Skills for the 21st Century ». On y retrouve une
catégorisation en 3 grands domaines :
1. Les ICT practitioner skills ou compétences du praticien des TIC ;
2. Les ICT user skills ou compétences de l’usager à manipuler les outils des TIC de manière
confiante et critique pour son travail, ses loisirs, ses études ou sa communication ;
3. Les e-business skills (également appelées les e-leadership skills) ou compétences requises pour
exploiter toutes les opportunités offertes par les TIC (notamment internet) pour assurer une
meilleure performance dans différents types d’organisation, pour explorer de nouvelles voies en
management de process commerciaux, administratifs ou fonctionnels ou pour lancer de nouveaux
business.
L’importance dévolue par l’UE aux « e-skills » trouve sa source dans plusieurs convictions :
 Les TIC sont devenues dominantes dans les modes de vie des Européens ;
 Les TIC offrent des carrières attractives et des perspectives d’emploi considérables de manière
directe ou indirecte ;
 Le développement d’une stratégie long terme de « e-skills » est d’autant plus important en contexte
de crise ;
 Le secteur industriel des TIC représente une part substantielle du Produit Intérieur Brut européen ;
 L’émergence du e-commerce entraîne un sérieux virage sur le marché du travail en exacerbant la
demande en travailleurs qualifiés.
Source : Digital Agenda for Europe, A Europe 2020 Initiative, published on 17-06-2015
33
Les arguments ne manquent pas, bientôt renforcés par les résultats de l’étude PIAAC 2012 (Program
for the International Assessment of Adult Competencies) conduite par l’OCDE et dont les conclusions
sont les suivantes : « la capacité à accéder à l’information et à la traiter à l’aide des TIC représente
une compétence essentielle dans nos économies modernes de plus en plus fondées sur le savoir.
Une meilleure maîtrise de ce type de compétences est récompensée par une plus forte probabilité
d’être actif, et l’utilisation plus fréquente des TIC dans le cadre professionnel, par une rémunération
plus élevée que celle observée parmi les adultes présentant le même niveau de compétences en
littératie et en numératie, mais moins compétents dans ce domaine spécifique ou utilisant moins
fréquemment les TIC. Les adultes sans expérience dans les TIC se trouvant considérablement
pénalisés en termes de perspectives professionnelles et de rémunération, les décideurs doivent
réfléchir aux moyens de garantir l’accès de tous les individus à une formation dans les TIC, que ce
soit dans le cadre de la scolarité obligatoire ou d’activités de formation pour adultes ».
34
L’UE et l’OCDE se sont attachées toutes deux à établir un lien entre la compétence numérique et des
compétences dites génériques. Elles les ont contextuées dans un cadre conceptuel général, posé
comme un manifeste pour une vie individuelle harmonieuse et réussie dans une société du futur
performante.
Par exemple, l’OCDE (2005) définit dans une perspective long terme 3 grandes catégories de
compétences clés pour une société du savoir et de la connaissance:
1. Utiliser les TIC de manière interactive ;
2. Interagir entre groupes hétérogènes ;
3. Agir de manière autonome.
Chacune de ces compétences clés implique la mobilisation de connaissances, de savoir-faire cognitifs
et pratiques, aussi bien que des volets sociaux et comportementaux comprenant des attitudes, des
émotions, des valeurs et des motivations. La faculté de réfléchir et d’agir de manière réflexive est une
caractéristique sous-jacente de ce cadre conceptuel. Réfléchir demande de recourir à des savoir-faire
métacognitifs, à des aptitudes créatives, ainsi qu’à une prise de recul critique. Le process mental
engagé est complexe, il consiste à penser sur ses propres pensées et concerne des domaines aussi
divers que la mémoire, la perception, la résolution de problème …
La première compétence clé – utiliser les TIC de manière interactive – se rapproche beaucoup de ce
que l’on pourrait qualifier de compétence numérique. Elle correspond à la capacité à utiliser les TIC
pour communiquer, pour travailler, pour jouer … ce qui implique que l’individu prenne conscience de
ce que les TIC peuvent lui apporter dans la vie de tous les jours et en exploite pleinement le potentiel.
Mais la capacité d’utiliser la technologie, les compétences et les connaissances qu’elle requiert, sont
aussi le fruit d’un apprentissage.
35
III.3 De la compétence numérique à la boite à outils élémentaire du citoyen du XXIème siècle
Afin de mieux cerner le contenu de la compétence numérique, nous allons maintenant croiser les
travaux de recherche de différentes sources pour dresser un inventaire de ses composantes selon
différents angles de vue interpellant différentes disciplines.
 Relever les défis d’une culture de participation > sciences de la communication (2006)
En 2006, Henry Jenkins définit une gamme de compétences permettant de prendre part aux nouvelles
communautés émergeant dans le cadre d’une société connectée.
Compétence Définition / contenu
 Le jeu / le ludique Capacité à utiliser l’environnement proche comme terrain d’expérimentation
pour résoudre les problèmes
 L’interprétation Aptitude à endosser une autre identité dans un objectif d’improvisation et
de découverte
 La simulation Aptitude à interpréter et construire des modèles dynamiques à partir de
processus du monde réel
 L’appropriation Aptitude à extraire judicieusement et à adapter du contenu media
 Le multi-tâche Aptitude à exercer une surveillance permanente de l’environnement et à
changer d’orientation
 La cognition
distribuée
Aptitude à interagir de manière pertinente avec des outils qui décuplent les
capacités mentales
 L’intelligence
collective
Aptitude à échanger les connaissances et à comparer l’information avec les
autres en vue d’un objectif commun
 Le jugement Aptitude à évaluer la crédibilité et la fiabilité des différentes sources
d’information
 La navigation
transmedia
Aptitude à suivre le fil des événements et de l’information en utilisant divers
media
 Le réseautage Aptitude à chercher, synthétiser et diffuser l’information
 La négociation Aptitude à traverser différentes communautés, à discerner et respecter
différents points de vue, à comprendre et à suivre d’autres normes ou
méthodes
 Anticiper les compétences professionnelles à horizon 2020 > sciences économiques et sociales
(2011)
En 2011, Davis, Fidler et Gorbis (University of Phoenix Research Institute) s’interrogent sur les
bouleversements à l’œuvre dans la mutation du paysage du travail et l’identification des compétences
professionnelles clés de la prochaine décennie. L’originalité de leur recherche repose sur la mise en
évidence de 6 tendances de fond ‘disruptives’ générant 10 compétences distinctives pour la main
d’œuvre du futur.
Ces facteurs de changement sont :
 L’allongement de la durée de la vie L’augmentation de l’espérance de vie modifie les
trajectoires de carrière ainsi que les modes
d’apprentissage
 Le développement de la robotisation L’automatisation chasse l’intervention humaine des
tâches routinières et répétitives
 L’environnement informatique connecté La propagation des objets connectés et des capteurs, la
puissance de traitement décuplée des systèmes
36
d’information font déferler un torrent de données et
donnent naissance à des modèles et algorithmes à une
échelle sans précédent
 La super-structuration des organisations Les réseaux sociaux amènent de nouvelles formes de
production et de création de valeur
 Le nouvel écosystème des media Les nouveaux outils de communication requièrent de
nouvelles littératies des media au-delà de l’écrit
 Le monde globalement connecté et
digitalisé
La mondialisation et l’inter-connectivité placent la
diversité et l’adaptabilité au cœur du fonctionnement
des organisations
A cette projection de l’environnement sociétal de demain sont associées des compétences critiques
pour une réussite professionnelle sur un même horizon futuriste.
Compétence Définition / contenu
 Le pouvoir de
décision
Aptitude à déterminer le sens profond et la signification de ce qui est
exprimé, à créer un processus critique de décision
 L’intelligence sociale Aptitude à entrer en relation avec les autres de manière directe et intense,
pour détecter et stimuler les réactions et obtenir les interactions désirées
 L’innovation et
l’adaptabilité
Aptitude à penser et à trouver des solutions et des réponses au-delà des
routines, des procédures et des schémas automatisés
 La pluriculturalité Aptitude à opérer dans différents environnements culturels
 La pensée
informatique
Aptitude à traduire de vastes gisements de données en concepts abstraits
et à comprendre les raisonnements fondés sur l’analyse de données
 La littératie des
nouveaux media
Aptitude à évaluer de manière critique et à développer des contenus avec
de nouveaux media, et à mettre la puissance de ces media au service
37
d’une communication persuasive
 La pluridisciplinarité Aptitude à comprendre des concepts à travers différentes disciplines
 Le design de
processus
Aptitude à dessiner et développer des tâches et des processus pour obtenir
les résultats escomptés
 La gestion de la
charge cognitive
Aptitude à sérier et filtrer l’information par ordre d’importance, à
comprendre comment maximiser le fonctionnement cognitif en utilisant une
large palette d’outils et de techniques
 La collaboration
virtuelle
Aptitude à travailler de manière productive, à conduire le changement, à
témoigner sa présence et sa contribution en tant que membre d’une équipe
virtuelle
 Analyser et cartographier les cadres conceptuels de la compétence digitale pour en déduire un
modèle > institutions européennes (2011-2012)
Depuis le Conseil Européen de Lisbonne en 2000, le Joint Research Center de la Commission
Européenne finance de nombreuses recherches et rapports techniques dont l’objectif est de délimiter
de mieux en mieux les composantes de la compétence numérique. Les travaux les plus récents sont :
 Policy Brief: Ala-Mutka K., Punie. Y, Redecker C., digital competence for lifelong learning, 2008 ;
 Technical Note : Ala-Mutka K, Mapping digital competence : towards a conceptual understanding,
2011
 Technical Report : Ferrari A., Digital competence in practice : an analysis of frameworks, 2012
Définition de la compétence numérique
38
Composantes clés de la compétence numérique
Traduction au travers d’un modèle conceptuel
39
 Analyser les territoires de la littératie et des politiques de citoyenneté numériques > sciences de
l’éducation (2015)
En 2015, le centre canadien d’éducation aux media et de littératie numérique, Habilo Médias, publie
un document de discussion intitulé « définir la politique de littératie numérique et la pratique dans le
paysage de l’éducation canadienne ». Selon les auteurs, Hoechsmann et DeWaard de l’université de
Lakehead à Toronto, la littératie numérique ne se résume pas à un socle de compétences
technologiques, mais plutôt à une capacité à participer à une société qui utilise les TIC dans les
milieux professionnels, éducatifs, gouvernementaux, culturels, civiques et familiaux.
Dans son approche conceptuelle, Habilo Medias s’appuie en particulier sur 3 éléments de base :
1. L’habilité et la capacité d’utiliser le contenu et les outils des media numériques ;
2. La capacité de comprendre de façon critique le contenu et les outils des media numériques ;
3. La connaissance et l’expertise pour créer à l’aide de la technologie numérique.
Pour compléter cette approche, les auteurs proposent une carte mentale qui tend à visualiser et à
regrouper les différentes composantes de la politique de littératie numérique au Canada.
La compétence numérique implique la mobilisation de connaissances techniques, de savoir-
faire cognitifs (voire métacognitifs) et pratiques, aussi bien que des volets sociaux et
comportementaux comprenant des attitudes, des émotions, des valeurs et des motivations.
40
IV. Trois menaces relatives à l’acquisition des compétences numériques, trois freins à la
transformation digitale de l’entreprise
IV.1 Le digital divide ou les fractures numériques, le risque de l’e-exclusion
Le concept de fracture numérique, né du terme anglais digital divide, renvoie à de nombreuses
facettes de la numérisation de l’économie et à la diffusion des TIC. Quatre dimensions émergent de la
recherche académique, depuis la fin des années 1990 :
1. La fracture numérique de premier degré liée à l’accès aux équipements et aux
infrastructures : au sens strict, la fracture numérique désigne les inégalités d’accès à internet. Les
déterminants des fractures numériques de premier degré sont nombreux et reposent sur 2 facteurs
principaux : 1) les écarts de revenus entre nations et groupes sociaux et 2) la structure de
l’infrastructure des télécommunications. Ces fractures ne sont pas statiques, elles évoluent au fil
des progrès technologiques. Un élargissement aux accès peut cacher de nouvelles barrières plus
qualitatives (génération de téléphonie, qualité du débit, possibilités de stockage …). Kling (1998)
est le premier à remettre en cause cette approche techno-centrée en distinguant explicitement les
inégalités dans l’accès aux TIC (technical access) des inégalités dans les connaissances et les
compétences (social access).
2. La fracture numérique de second degré (Hargittaï, 2002) liée à l’usage des TIC : l’accès aux
TIC ne conditionne pas automatiquement leur usage effectif et encore moins leur usage
autonome et efficace. De nombreuses études montrent ainsi que de multiples facteurs se
combinent aux variables socio-démographiques traditionnelles (statut socio-économique, niveau
d’éducation, âge, sexe, etc…) pour influencer l’engagement (ou non) des individus dans les TIC.
S’approprier pleinement les TIC et leur contenu est bien une dynamique complexe, qui requiert
de nombreuses ressources d’ordre matériel, mental, social et culturel. Le gap cognitif est
l’endroit où la fracture numérique s’exprime de façon la plus violente (Guichard, 2003). La
maîtrise des TIC nécessite de surmonter la perte de certains repères spatio-temporels ou de
cadres structurés et stables, comme l’offre par exemple le livre physique. Un autre point clé
réside dans le tri, l’analyse et la synthèse de l’information collectée.
3. La fracture numérique sous l’angle des performances induites par l’usage des TIC : cette
dimension repose sur une approche macro-économique (Stratégie de Lisbonne (2000) pour l’UE).
Les TIC accélèreraient la productivité des uns et causeraient la déqualification des autres,
accentuant les inégalités de salaires.
4. La fracture numérique ‘dynamique’ liée aux processus d’apprentissage des TIC : les
nouvelles technologies sont considérées comme complexes et par essence ‘immatures’, c’est-à-
dire en constante évolution. Elles nécessitent des compétences spécifiques pour les utiliser
effectivement à des buts de création de richesse. L’acquisition de ces compétences requiert la
mise en place de processus d’apprentissages formels et informels. Le fossé est amplifié ici par les
primo-adoptants ou communautés virtuelles d’experts qui définissent ‘entre-soi’ les normes et
participent à l’élaboration des modalités d’évolution technologique qui répondent davantage à leurs
attentes qu’aux difficultés de rattrapage de la masse des ‘followers’.
41
Source : Gérard Valenduc, Patricia Vendramin, (2003), Internet et inégalités – une radigraphie de la fracture numérique, Centre
de recherche Travail et Technologies de la Fondation Travail-Université de Namur
La fracture numérique ‘dynamique’ liée aux apprentissages est la plus déterminante des
fractures numériques. Les TIC progressent à un rythme élevé avec de nombreuses ruptures. Dès
lors, leur adoption nécessite des apprentissages continus et l’acquisition constante de nouvelles
compétences.
Pour analyser les compétences numériques et leur mode de construction, nous pouvons nous référer
à une typologie de compétences élaborée par des chercheurs hollandais (Steyaert et De Haan, 2001),
reprise et complétée par la suite par d’autres auteurs (Vendramin et Valenduc, 2003, Van Dijk, 2005).
Ceux-ci distinguent trois niveaux de compétences numériques : les compétences instrumentales,
structurelles (ou informationnelles) et stratégiques.
 Les compétences structurelles ou informationnelles concernent la nouvelle façon d’entrer dans
les contenus en ligne, c’est-à-dire de chercher, sélectionner, comprendre, évaluer, traiter
l’information. Alors que l’informatique a toujours nécessité des compétences instrumentales, les
compétences informationnelles prennent toute leur importance avec le développement des
contenus d’information et des services en ligne. Elles sont nécessaires pour utiliser les procédures
de navigation, les moteurs de recherche, les blogs et forums de discussion, les services interactifs.
 Les compétences instrumentales ont trait à la manipulation du matériel et des logiciels. Elles
couvrent en premier lieu les compétences opérationnelles qui relèvent d’un savoir-faire de base.
Les compétences instrumentales comprennent aussi bien les capacités techniques que les
capacités de raisonnement pour faire face aux aléas techniques du quotidien. De nombreux
programmes de formation et de sensibilisation aux TIC se focalisent sur ces compétences
instrumentales. C’est le premier niveau d’acquisition, le passage obligé, celui le plus souvent
dispensé à des publics fragilisés : demandeurs d’emploi, migrants, seniors, jeunes en difficulté.
Ainsi en 2013, faisant le constat que 87% des employeurs utilisent les sites internet pour recruter,
Pole Emploi s’est attaché à former 250.000 demandeurs d’emploi à l’usage d’internet. Par ailleurs,
l’agence a développé des partenariats locaux avec des acteurs de la lutte contre la fracture
numérique, comme le réseau Cyber-base de la Caisse des Dépôts ou encore le réseau des
Espaces Publics Numériques (EPN). Ces lieux proposent des accès à internet, ainsi qu’un
accompagnement pour faciliter l’appropriation des technologies et des usages liés à internet, dont
la recherche d’emploi en ligne.
42
Van Dijk (2005) a introduit une distinction entre les compétences informationnelles formelles et
substantielles. Les premières sont relatives au format, les secondes au contenu de l’information.
 Les compétences stratégiques concernent l’aptitude à utiliser l’information de manière pertinente,
éthique et proactive, à lui donner du sens dans un contexte et à prendre des décisions éclairées en
vue d’agir sur son environnement. Ces compétences, comme les compétences informationnelles,
ne voient pas le jour avec le numérique ; leur besoin se faisait déjà sentir avec les médias écrits et
audiovisuels, mais les médias interactifs en ligne en accentuent l’importance et l’urgence de les
maîtriser.
Les auteurs s’entendent pour établir une hiérarchie des compétences numériques : les compétences
instrumentales sont une base à la construction des compétences informationnelles, qui soutiennent, à
leur tour, les compétences stratégiques. L’environnement professionnel – les collègues, les outils de
travail et leur contexte d’utilisation – joue un rôle prépondérant dans l’acquisition des 3 catégories de
compétences. L’utilisation des TIC au travail favorise incontestablement l’acquisition et le
développement des compétences instrumentales. Les compétences structurelles dépendent
davantage du type de métier exercé. Quant aux compétences stratégiques, elles sont liées à la marge
d’autonomie et d’initiative laissée au collaborateur.
Actuellement l’enseignement et la formation professionnelle se focalisent beaucoup sur les
compétences instrumentales, au risque de négliger les autres compétences, qui jouent pourtant un
rôle clé dans l’activation des usages. Le challenge de l’éducation et de la formation consiste à se
projeter au-delà des compétences techniques pour ancrer les compétences structurelles et
stratégiques, fondement d’une appropriation efficace et durable des TIC.
Tout usager, qu’il soit novice ou expert, est exposé au risque de perdre son niveau de maîtrise des
TIC en raison de l’évolution continuelle des technologies. Tout usager est donc par nature une victime
potentielle de la fracture numérique dynamique. Pour la surmonter, il convient de produire un effort
d’adaptation. Selon les individus, cet effort peut-être constant ou erratique au gré des circonstances,
des besoins et des compétences qui le motivent. Il s’agit donc d’un processus itératif fait de
décrochages et de rattrapages continuels.
Parmi les compétences formelles, l’auteur cite notamment :
- la capacité de comprendre la structure des fichiers d’un ordinateur, d’un site web ou d’une
compilation de musique ou d’images ;
- la compréhension de l’architecture d’un site web ;
- la capacité de maîtriser la structure des liens dans un hypertexte ;
- la compréhension de la présentation d’une page multimédia ;
- la capacité de maîtriser la fragmentation des sources d’information, réparties dans un grand
nombre de sites ;
- la maîtrise de l’obsolescence et du renouvellement rapides des sources d’information ;
- enfin, l’omniprésence de l’anglais.
Quant aux compétences informationnelles dites substantielles, elles consistent à apprendre :
- comment chercher l’information en ligne, comment la sélectionner parmi une offre
surabondante ;
- comment éditer soi-même cette information ;
- comment en évaluer la qualité ;
- comment combiner des sources d’information qui proviennent de médias et d’auteurs de plus
en plus diversifiés ;
- comment établir des liens ou des associations entre les informations sélectionnées ;
- comment arriver à formuler des généralisations.
43
Et c’est là qu’entrent en scène les compétences dites génériques, qui permettent à l’usager de
traverser les barrières des applications et des matériels, quelles que soient les situations d’usages.
Ces compétences plus transversales n’entrent pas dans le champ exclusif des compétences
numériques. Elles font écho à la notion « d’apprendre à apprendre », ce qui permet à l’usager de se
prendre en main et de se former pour maintenir son portefeuille de compétences et son employabilité.
Examinons à présent deux types de fractures numériques observées en entreprise : la fracture
professionnelle et la fracture générationnelle.
> Le risque d’exclusion numérique en milieu professionnel
Si les inégalités numériques dans la société se posent essentiellement en termes d’accès, les
inégalités numériques au travail, où l’environnement technologique est plus diversifié, reposent sur la
typologie des emplois exercés. Les métiers intellectuels ou administratifs ont un degré de familiarité
plus important avec les TIC que l’ouvrier posté sur une chaîne de production ou l’hôtesse de caisse en
supermarché. Travailler avec internet présuppose un usage intensif de l’information ou un besoin
régulier de communication sous forme électronique.
Valenduc (2007) établit une classification en 5 catégories de métiers :
1. Les professionnels des TIC > exemples : les informaticiens, les spécialistes de l’internet, du
multimédia et des services en ligne, ceux qui développent des applications spécialisées des TIC.
Pour eux, les compétences instrumentales constituent le cœur du métier, même si le besoin en
compétences non techniques s’impose de plus en plus.
2. Les métiers imprégnés d’informatique et de réseaux dans lesquels les TIC sont devenues une
composante indissociable du procédé, du produit ou du service > exemples : la production
d’énergie, l’industrie chimique, l’imprimerie et l’édition, la logistique, les services financiers, les
bureaux d’étude ou d’ingénierie, …
Les compétences TIC viennent s’articuler autour des qualifications professionnelles traditionnelles ;
elles sont acquises en formation initiale, continue ou sur le tas.
3. Les métiers dans lesquels les TIC ne sont pas au cœur du métier, mais peuvent constituer un
support à valeur ajoutée utile en termes d’information, d’organisation ou de marketing, sans pour
autant devenir un incontournable > exemples : les enseignants, les métiers manuels et artisanaux,
le petit commerce spécialisé, …
Il y a dans ces métiers une pression à évoluer vers l’ordinateur et internet, qui peut venir des
collègues, des clients, du réseau de relations.
4. Les métiers dont l’organisation est profondément transformée par les TIC, mais sans que la
majorité des salariés ne soient pour autant confrontés au besoin d’acquérir des compétences TIC
> exemples : la grande distribution, les transports, les chaînes de montage, la manutention …
Dans ces métiers, une familiarisation de base avec les TIC est souvent suffisante. Elle ne donne
pas nécessairement toutes les clés pour devenir un utilisateur autonome dans le cadre
domestique.
5. Les métiers à l’écart des TIC, où celles-ci ne jouent pas de rôle important dans le changement
organisationnel > exemples : les services aux personnes, le nettoyage, les emplois peu qualifiés
dans l’industrie ou le secteur public ...
Ici, l’initiation aux TIC ne relève que d’un intérêt et d’une démarche individuels dans un contexte
privé où les ressources du réseau de relations sont souvent moins pertinentes.
Memoire :  accelerer l acquisition des competences numeriques dans une entreprise en transformation digitale par brigitte feist
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Memoire : accelerer l acquisition des competences numeriques dans une entreprise en transformation digitale par brigitte feist

  • 1. 1 THESE PROFESSIONNELLE dans le cadre d'un Mastère Spécialisé® accrédité par la Conférence des Grandes Ecoles Programme : Mastère Spécialisé® (MS) en Management des Ressources Humaines Promotion : 2014 - 2015 NOM : FEIST Prénom : Brigitte Intitulé de la thèse : Comment accélérer l’acquisition des compétences numériques dans une entreprise en transformation digitale ? Date de la soutenance : 7 avril 2016 Directeur de thèse : Jean-Luc CERDIN Thèse : Non confidentielle
  • 2. 2 Remerciements Je remercie toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de cette thèse professionnelle et en tout premier lieu :  Stanislas Chevalet et Claire Creuzot, les deux managers qui ont entendu et compris dès 2014 mon souhait de tenter l’aventure d’un Mastère Spécialisé en Management des Ressources Humaines et ont soutenu ma candidature ;  Sophie Joyat et Marie-Christine Barjolin, responsables RH de BNP Paribas Cardif, qui ont donné leur feu vert pour que ce souhait se concrétise ;  Olivier Cortes, mon nouveau manager à compter de 2015 qui m’a laissé poursuivre mes travaux en m’accordant sa confiance pour organiser mes temps de travail entre mes nouvelles fonctions professionnelles et mes cours et recherches à l’ESSEC ;  Jean-Luc Cerdin, mon directeur de thèse à l’ESSEC, pour ses conseils ;  Régine Belliard, conseil documentaire ESSEC, et Malala Razafindraka, Chargée de Programmes, qui m’ont prodigué un appui très appréciable. J’exprime également ma gratitude aux deux co-directeurs du programme MS Management des Ressources Humaines de l’ESSEC, Jean-Marie Peretti et Jean-Luc Cerdin, ainsi qu’à l’ensemble du corps professoral qui, au-delà de la qualité de leurs interventions, ont accepté de maintenir un fil régulier de contact et de conversation à distance. Je suis très reconnaissante à l’ensemble des interviewés qui m’ont ouvert leur porte et ont accepté de se prêter au jeu de l’entretien qualitatif pour ma phase terrain. Ce furent de belles rencontres humaines, fondées sur le partage et la curiosité intellectuelle. J’ai une pensée particulière pour mes collègues étudiants de la promotion 2014-2015, compagnons d’aventure … et source inépuisable d’encouragement. J’associe à mes remerciements mes équipes, managers et collaborateurs du Secrétariat Général ETO et de la Direction des Achats, des Délégations Stratégiques et de la Logistique, qui ont fait preuve de compréhension lors de mes jours d’absence pour formation à l’ESSEC et qui ont tenu la ‘boutique’. Enfin, une telle expérience n’aurait pas été possible sans le soutien et la bienveillance de ma famille et de mes proches, qui m’ont permis de m’offrir cette parenthèse régénératrice de 18 mois et de me concentrer sur mon objectif. Et merci à Vous, Lecteur pour votre intérêt à lire ces pages.
  • 3. 3 Table des matières REMERCIEMENTS p.02 GLOSSAIRE P.05 INTRODUCTION p.06 1ère PARTIE : revue de littérature I. De la troisième révolution industrielle à l’économie du quaternaire … de la technologie aux changements des usages et des modes de vie I.1 La convergence de trois révolutions technologiques p.10 I.2 L’impact des innovations contemporaines sur le marché du travail et les emplois p.11 I.3 Quelles qualifications requises dans l’économie du quaternaire ? p.15 II. La maturité numérique française II.1 La performance numérique de la France à l’échelle mondiale sur le Digital p.16 Evolution Index II.2 Le paradoxe français dans le paysage européen : le décalage particuliers / p.19 entreprises Focus Assurance n°1 - Maturité numérique du secteur de l’Assurance p.24 II.3 L’accélération de la transformation digitale : un enjeu identifié, un chemin encore p.25 mal balisé, un potentiel salarié sous-exploité III. Comment définir les compétences numériques ? III.1 Qu’appelle-t-on une compétence individuelle ? p.28 III.2 La compétence numérique : un concept jeune, mouvant et d’essence politique p.30 III.3 De la compétence numérique à la boite à outils élémentaire du citoyen du XXIème p.35 siècle IV. Trois menaces relatives à l’acquisition des compétences numériques, trois freins à la transformation digitale de l’entreprise IV.1 Le digital divide ou les fractures numériques, le risque de l’e-exclusion p.40 Focus Assurance n°2 - Et si la génération X prenait sa revanche numérique ? p.46 IV.2 Le digital skills shortage ou le déficit de compétences numériques, l’exacerbation p.46 de la guerre des talents Focus Assurance n°3 - Re-skilling des emplois p.49
  • 4. 4 IV.3 Management 3.0, le malaise de la ligne managériale p.50 V. Quels leviers pour accélérer l’acquisition des compétences numériques ? V.1 L’apprendre à apprendre dans un cadre informel p.55 V.2 Le développement d’environnements de travail capacitants p.56 V.3 Le design thinking comme méthode de conduite du changement centrée p.57 sur les usages Focus Assurance n°4 – L’Open Innovation en action p.59 V.4 Les communautés de pratique, collectifs de savoir et d’innovation p.60 2ème PARTIE : analyse des entretiens qualitatifs I. La construction de l’enquête I.1 Les personnes ciblées pour l’entretien p.61 I.2 Le guide d’entretien p.64 II. La synthèse et l’analyse des entretiens II.1 Le paysage de la transformation digitale p.65 Focus Assurance n°5 – Les métiers de l’Assurance à l’ère du numérique p.68 II.2 L’environnement d’acquisition des compétences numériques p.70 II.3 La certification des compétences numériques versus le personal branding p.73 II.4 Coup de projecteur : l’intégration des jeunes et le spleen des managers p.75 III. Trois cas d’études, trois façons d’approcher les compétences numériques III.1 Le cabinet conseil Magellan Partners > S’approprier le Digital, c’est apprendre p.79 sans connaître chapitre suivant et être prêt à oublier le chapitre précédent aussitôt ! III.2 Le Groupe Orange > Numérique et talent humain vont de pair p.82 III.3 Le Groupe BNP Paribas > Offrir à nos clients la magie du digital tout en assurant p.86 la sécurité et la conformité de leurs opérations IV. Version finale du livrable ‘référentiel de compétences numériques’ IV.1 Deux référentiels de compétences numériques contemporains de mon livrable p.91 IV.2 Ma représentation d’un modèle de compétences numériques p.92 CONCLUSION p.93 BIBLIOGRAPHIE p.98
  • 5. 5 GLOSSAIRE AUTOUR DU NUMERIQUE Entreprise numérique : entreprise qui, dans toutes les dimensions de son modèle d’affaires a une vision et un plan numérique et pour laquelle la dimension numérique se confond souvent avec la dimension stratégique. Le concept d’entreprise numérique a vocation à être ouvert, dynamique et collectif. Il s’agit d’une démarche globale pour l’entreprise qui vise à développer la création de valeur par le numérique, c’est-à-dire par les usages personnels et professionnels des technologies de l’information. Dans ce cadre, l’entreprise développe avant tout les savoir-faire et les savoir-être qui vont faire l’entreprise numérique de demain. (1) Ressources numériques : ressources diverses qui regroupent non seulement le patrimoine technologique de l’entreprise (les applications, les bases de données, les infrastructures informatiques), mais également les compétences qu’ont les acteurs de l’entreprise à tirer parti de toutes les potentialités du numérique pour développer le modèle d’affaires, l’activité ou l’offre de valeur. Le développement de ces compétences numériques constitue la clé essentielle permettant à l’entreprise numérique de se déployer de manière pertinente. (1) Partenaires de l’entreprise numérique : l’entreprise numérique est ouverte, étendue. Son identité est en pleine mutation. L’entreprise fait partie de la communauté de son écosystème, elle interagit fortement avec ses partenaires. Dans une étude de 2009, l’Orange Labs de San Francisco fait le constat suivant : « les frontières traditionnelles des entreprises étant de plus en plus poreuses, celles- ci sont donc mieux à même d’interagir avec leurs partenaires potentiels ainsi qu’avec leurs clients, leurs employés et les communautés d’intérêt. » (1) Littératie numérique :  aptitude à comprendre et à utiliser le numérique dans la vie courante, à la maison, au travail, dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses compétences et ses capacités. (2)  capacité à utiliser les outils numériques, la capacité à comprendre, de façon critique, le contenu numérique ainsi que la capacité à pouvoir produire des contenus grâce aux outils numériques. (2)  vaste capacité de participer à une société qui utilise la technologie des communications numériques dans les milieux du travail, au gouvernement, en éducation, dans les domaines culturels, dans les espaces civiques, dans les foyers et dans les loisirs. (3) Sources : 1. « L’entreprise numérique, quelles stratégies pour 2015 ? », Bruno Ménard, CIGREF, 2010 et « Entreprises 2020 à l’ère du numérique : enjeux et défis », Pascal Buffard, CIGREF, 2014 2. « Littératie à l’ère de l’information », OCDE, 2000 3. « Définir la politique de littératie numérique et la pratique dans le paysage de l’éducation canadienne », Habilo Medias, 2015
  • 6. 6 INTRODUCTION Le digital investit à grande vitesse tous les champs de la société : l’éducation, l’économie, le business, l’entreprise, l’organisation du travail. Il bouscule les frontières entre vie privée et vie professionnelle. Il nous fait entrer dans un monde dans lequel il faut être capable de s’adapter, de comprendre, de saisir rapidement les opportunités d’innovation et de faire preuve de vision. Avec le digital, nous accédons à une nouvelle ère : celle de la société du savoir et de la connaissance. En quinze ans, trois vagues de transformation numériques se sont succédées. La première vague a lieu au tournant du millénaire avec la propagation d’internet considéré comme un canal de vente supplémentaire. Les thématiques tournent alors autour de la distribution, des transactions et de l’omni-canalité. La seconde vague se caractérise par l’avènement des réseaux sociaux avec pour point d’orgue l’arrivée de Facebook en avril 2004. La troisième et dernière vague est marquée par la déferlante des smartphones avec en 2008 la commercialisation de l’Iphone 3G qui créée une véritable rupture technologique en autorisant l’interaction avec des capteurs, notamment des GPS. Cette innovation ouvre la voie à la production de data par les individus, initiant ainsi le big data. Ce cycle d’innovations n’est pas fini. Déjà, le numérique nous prépare d’autres évolutions autour de l’internet des objets (IoT), de la robotique, l’intelligence artificielle et l’informatique cognitive. Source : Blog Futurs Talents, Jean-Baptiste Audrerie - 11 janvier 2016 L’originalité de ces premières vagues de transformation digitale repose sur le fait que les individus ont devancé les organisations dans l’appréhension des usages numériques. C’est pourquoi les entreprises ont trouvé plus de facilité à débuter leur transformation numérique en privilégiant la refonte du parcours et de l’expérience client. Aujourd’hui les entreprises abordent un nouveau tournant.
  • 7. 7 Source : Blog Cyberlabe, 20 décembre 2015 Après avoir renouvelé la relation client, le numérique attaque le fonctionnement et les processus mêmes des organisations. Il modifie considérablement les ‘business models’ et redéfinit les équilibres de marché en faisant tomber les barrières à l’entrée des nouveaux entrants, qu’il s’agisse des ambitieux GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple), des jeunes NATU (Netflix, Airbnb, Tesla, Uber), des petites startups ou de grands groupes en cours de redéploiement sur de nouveaux axes stratégiques (IBM). L’éclosion des plateformes génère pour les acteurs historiques d’un secteur un réel risque de désintermédiation qui menace des situations de rentes établies de longue date sur des marchés régulés. C’est la fameuse ‘uberisation’ de l’économie. Cette menace de la ‘disruption’ (capacité à se faire évincer par un acteur qui ne vient pas du marché), oblige les entreprises à passer du mode défensif au mode offensif. Cela passe par une remise en cause et un changement en profondeur des organisations qui se heurtent à trois difficultés :  La transversalité dans des sociétés organisées classiquement de manière hiérarchisée et en silos ;  La vitesse avec un rythme de changement technologique qui dépasse de loin le temps de l’humain ;  L’absence de culture du risque et d’acceptation du droit à l’échec. Le rapport Mettling remis en septembre 2015 par le DRH éponyme d’Orange à Myriam EL Khomri, Ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue Social, présente deux mérites. Tout d’abord, il établit pour la première fois un lien fort entre transformation digitale et fonctionnement de l’entreprise. Ensuite, il montre clairement que cette transformation remet en cause les fondements traditionnels de l’entreprise, en bouleversant l’unité d’action, de temps et de lieu du travail. Dans ce rapport intitulé ‘Transformation numérique et vie au travail’, Bruno Mettling pointe (p.7) les principaux impacts du numérique sur le travail, et notamment sur les métiers et les compétences. « La modification des conditions d’exercice des activités induites par ces nouveaux outils (numériques) et ces modes de travail concerne tous les métiers sans exception, manuels ou
  • 8. 8 intellectuels, métiers de la connaissance ou de l’expérience. Elle nécessite souvent de développer ou d’acquérir de nouvelles compétences (…). Les spécificités mais aussi les difficultés de cette adaptation par rapport aux évolutions traditionnelles de l’entreprise tiennent à ce que la vitesse exceptionnelle de diffusion nécessite un très haut degré d’adaptation et d’anticipation pour éviter la déqualification, facteur de rupture numérique ». Dans un environnement marqué par l’accélération du temps, les ruptures technologiques irréversibles et l’exigence accrue des clients en termes de qualité de service, les entreprises ne cherchent pas seulement des collaborateurs qui agissent digital (Digital Natives), mais aussi des collaborateurs qui pensent digital (Digit’Experts) avec une nouvelle approche de leur métier et de leur mission. Ceci implique de mettre en œuvre un nouveau mix de compétences associant des savoir-faire techniques (hardskills), des savoir-être comportementaux (softskills) et des connaissances sectorielles. Parmi les compétences recherchées, on peut imaginer une attention particulière apportée par exemple à l’intelligence sociale, à la pensée informatique, à l’inter-disciplinarité, à la créativité et à l’adaptation, à la collaboration virtuelle, à l’auto-formation. Sur le long terme, un collaborateur, quel que soit son département, devra manier avec la même facilité les enjeux fonctionnels du métier et les enjeux technologiques, en se construisant un profil hybride. De même, il se construira un parcours hybride, alternant ou cumulant les différentes formes d’emploi, salariales et entrepreneuriales. Simultanément, le management passera de l’autorité hiérarchique, de la légitimité d’expérience et d’expertise à la zone d’influence. Si les ‘pure players’ (Google, Microsoft, Orange, …) ou start-ups des TIC ont déjà pris une longueur d’avance dans la composition d’équipes de Digit’Experts, aidés en cela par leur sous-jacent technologique et leur jeunesse, toutes les entreprises n’en sont pas à ce stade, loin de là. Le défi majeur pour une compagnie ‘traditionnelle’ (dans l’industrie ou le service, le public ou le privé) réside aujourd’hui dans l’acquisition de talents digitaux mais surtout dans la réingénierie des compétences de sa population de salariés. Donner à chacun l’opportunité d’être un acteur de la transformation digitale de son entreprise, c’est à la fois l’associer à un projet dynamique et motivant mais aussi l’assurer de maintenir son employabilité sur le marché du travail. Il s’agit d’un enjeu crucial notamment pour les sociétés qui entretiennent une longue tradition d’accompagnement à la reconversion de leurs collaborateurs au travers d’un pacte social, déjà éprouvé lors des précédentes évolutions industrielles ou technologiques. La présente thèse professionnelle se propose d’étudier comment accélérer l’acquisition des compétences numériques dans une entreprise en transformation digitale. Dans un premier temps, une revue de littérature aura pour objectif de camper le cadre de la réflexion en analysant au travers d’articles académiques et de rapports d’étude récents (tous postérieurs à 2010 pour s’inscrire dans le contexte des vagues de transformation numérique) :  Les ressorts économiques de cette nouvelle révolution industrielle, son impact sur la structure de l’emploi, les qualifications requises dans l’ère du quaternaire ;  Le degré de maturité numérique des entreprises françaises ;  L’identification et la classification des compétences numériques au travers d’approches complémentaires issues des institutions politiques ou universitaires ;  Les menaces et les freins associés à l’acquisition de ces compétences en entreprise ;  Les conditions de développement et d’épanouissement de ces compétences à l’échelle individuelle et organisationnelle.
  • 9. 9 Cette partie théorique sera éclairée ici et là de quelques illustrations appliquées au secteur de l’Assurance. Ces focus donneront des exemples concrets des transformations à l’œuvre dans une profession financière dans laquelle j’exerce depuis plus de 20 ans et dont j’observe les mutations sous l’impact du digital. La résultante de la revue de littérature consistera à produire d’une part une proposition de référentiel de compétences numériques et d’autre part un guide d’entretien permettant de conduire une enquête qualitative auprès de 17 interviewés issus d’horizons variés : DRH, responsables pédagogiques des grandes écoles, responsable de formation, responsable d’observatoire des métiers, influenceur sur réseaux sociaux professionnels, représentant de syndicat de dirigeants, acteur de la FING, expert en cabinet conseil RH … A l’issue de ces rencontres, au-delà de l’analyse des témoignages des uns et des autres sur les pratiques, l’objectif consistera à stabiliser la proposition de référentiel de compétences numériques en intégrant toute la richesse de ces regards croisés.
  • 10. 10 1ère PARTIE : revue de littérature I. De la troisième révolution industrielle à l’économie du quaternaire … de la technologie aux changements des usages et des modes de vie I.1 La convergence de trois révolutions technologiques Un nouveau monde émerge affirme Jérémy Rifkin, économiste américain, au travers de ses deux derniers ouvrages : ‘La troisième révolution industrielle’ (2012) et ‘La nouvelle société du coût marginal zéro’ (2014). Nos sociétés sont bouleversées par la conjonction de trois révolutions technologiques :  la révolution des technologies de l’information et de la communication (TIC), qui permet l’échange de milliards d’informations de manière totalement décentralisée entre des milliards d’ordinateurs, de smartphones, de GPS, de capteurs, de compteurs, de collecteurs d’information ;  la révolution énergétique, qui substitue aux systèmes de production d’énergie centralisés, à partir de combustibles fossiles ou nucléaires, des formes nouvelles et totalement décentralisées de production d’énergie renouvelable, chaque logement se transformant en une petite centrale de production grâce à son architecture bioclimatique, ses capteurs solaires, voire son éolienne de poche ;  la révolution du stockage de l’électricité, qui devrait permettre d’ici quelques années de pallier le principal défaut des énergies éolienne et solaire qui est leur caractère aléatoire, et donc de recueillir les petites quantités d’énergie produites par chacun de ces millions de capteurs à des moments creux pour les utiliser au moment et dans le lieu où l’on en aura besoin. Considérées et articulées ensemble, ces trois révolutions débouchent sur la conceptualisation d’un énorme réseau d’échange d’informations et d’énergie, un « smart grid » (un « réseau intelligent ») géant, permettant la création d’une plateforme d’opération unique pour l’économie. Aujourd’hui, l’internet de l’information, déjà largement répandue, commence à converger avec le très jeune internet de l’énergie, et un début d’internet des logistiques : « trois internets en un » aboutissant à l’internet des objets. Cette grande mutation s’accompagne de deux incidences majeures : 1. l’approche du coût marginal zéro sur la production de nombreux biens et services, les rendant virtuellement gratuits et abondants ; 2. l’avènement de l’économie du partage avec la transformation des comportements individuels. C’est bien historiquement la concomitance du progrès sur le trinôme ‘communications- énergie-transports’ qui génère les plus grandes mutations économiques. Ainsi si l’on remonte à la révolution hydraulique, puis aux révolutions de la vapeur et de l'électricité, on constate que l'on assiste à chaque fois à la conjonction d'une révolution des communications (facilitation des échanges), d'une révolution énergétique (le « moteur » de l'économie) et d'une révolution des transports et de la logistique (fluidification de la circulation des biens à l'intérieur de cette économie). Au XIXe siècle, l'impression (de journaux, notamment) par des presses à vapeur remplace l'impression manuelle. Arrive le télégraphe. Ces deux moyens de communication profitent de la profusion de charbon à coût modéré, et l'invention de la locomotive permet d'élargir le marché et de fluidifier le commerce. Au XXe siècle, une nouvelle révolution se produit avec le téléphone et la radio, qui convergent avec l'arrivée du pétrole et de la voiture, et provoquent, couplées avec la construction du réseau routier, le boom de la grande mutation urbaine et « suburbaine ».
  • 11. 11 Le coût marginal de production – coût de production additionnel d’un objet ou d’un service une fois les coûts fixes absorbés – s’est considérablement réduit dans les économies traditionnelles ces quarante dernières années, avec une forte accentuation du phénomène sur la dernière décennie. Les industries musicale, de la presse, de l’édition, des divertissements ont vu ainsi leur business model se reconfigurer. L’industrie du savoir connait elle aussi de grandes mutations avec la montée en puissance des nouvelles formes d’encyclopédies universelles (Wkipedia) dont les contenus sont produits gratuitement par des millions d’internautes. Sans parler des MOOCs (Massive On-Line Open Courses) : en deux ans (2012-2014), 6 millions d'étudiants se sont mis à suivre gratuitement des cours online, issus des meilleures universités du monde. L’illustration ne s’arrête pas à des biens et services numériques. Longtemps il a été considéré que la réduction à zéro du coût marginal ne toucherait pas les industries traditionnelles. Cette croyance est tombée avec l’avènement de l’impression 3D notamment, autorisant chacun à fabriquer et produire soit même de nombreux produits. A ce titre les comportements individuels sont bouleversés : l’une des manifestations les plus évidentes est l’estompage de l’idée de possession ou de propriété d’un bien ou d’un service au profit d’une expérience vécue à laquelle on accède pour un temps donné, et que l’on partage avec les autres. A la « valeur d’échange » sur le marché se substitue la « valeur partageable » sur des « communaux » collaboratifs. Prenons l’exemple du transport : au concept de voiture, objet témoin de richesse et de statut pour toute une génération, se substitue peu à peu le concept de mobilité : j’emprunte une autolib pour me rendre à une gare multimodale, je finis mon parcours en transport en commun et je rentre en co-voiturage après avoir consulté la plateforme blablacar … L’internet des objets est le pendant technologique des « communaux » collaboratifs émergents. La culture du partage permet aux individus de s’engager dans des réseaux de pairs à pairs et de transférer des marchés capitalistes aux « communaux » collaboratifs (groupes, associations, coopératives, communautés …) de petits fragments de leur vie économique (transport, hébergement, divertissements, usages d’outils, etc…). Parfois taxés de rêves ou de prédictions, les travaux de Jérémy Rifkin inspirent les Etats (Angela Merkel), les collectivités locales (villes de San Antionio au Texas, Rome, Utrecht), les dirigeants publics ou privés. Ils présentent le mérite de bien identifier les enjeux économiques de demain et de cerner les nouveaux nerfs de la guerre sur lesquels s’activent déjà les cablo-opérateurs, les fournisseurs d’énergie, les géants d’internet, à savoir :  le financement et la possession des réseaux d’infrastructures internet et des plateformes d’objets connectés ;  la gestion, la circulation et le traitement des flux de données ou Big Data. I.2 L’impact des innovations contemporaines sur le marché du travail et les emplois A la sortie de la grande crise de 1929, John Maynard Keynes exprimait son optimisme dans son essai Economic Possibilities for our Grandchildren (1930), dans lequel il explorait une voie intermédiaire entre la révolution et la stagnation. Mais il avertissait également que cette voie comportait elle-même des risques, dont celui d’un sous-emploi technologique résultant d’une accélération des innovations : la découverte de moyens d’économiser le recours au travail humain pourrait être plus rapide que la découverte de nouvelles façons d’utiliser ce travail.
  • 12. 12 La phase des innovations contemporaines, qualifiée de troisième révolution industrielle ou d’ère numérique, remet en cause cette croyance et suscite des inquiétudes en raison de deux contre- performances : 1. le ralentissement des gains de productivité, accompagné d’un taux de chômage important et persistant ; 2. la bipolarisation des emplois selon le caractère routinier ou non routinier, marquée par un solde négatif entre les destructions massives d’activités automatisées ou codifiables sur le plan numérique et les créations d’activités manuelles ou cognitives. De ce fait, l’impact des nouvelles technologies numériques serait important dans la crise actuelle de l’emploi. Contrairement aux innovations de la deuxième et de la troisième révolution industrielle, qui ont introduit un biais en faveur du travail non qualifié en remplaçant le travail qualifié des artisans par du travail non qualifié d’ouvriers grâce au travail posté sur les chaines de production, les innovations contemporaines introduisent des phénomènes totalement nouveaux :  l’automatisation des tâches menace les activités « routinières » ;  le développement de l’intelligence artificielle, en particulier les algorithmes d’apprentissage, transforme aussi les professions plus qualifiées, fondées sur la maîtrise de grandes bases de connaissances ;  le report sur l’utilisateur final : les technologies numériques permettent d’équiper les utilisateurs des outils nécessaires pour exécuter eux-mêmes certaines tâches, faisant disparaître les professions correspondantes ;  le report sur la multitude : dans certains cas, ce n’est pas le consommateur lui-même qui prend en charge la production, mais la communauté des internautes (exemples de Wikipedia et TripAdvisor) ;  la concurrence des amateurs : les technologies numériques permettent d’équiper des individus pour qu’ils puissent offrir un produit souvent moins cher et d’une qualité supérieure par rapport aux professionnels (exemple de la plateforme AirBnB). Ces phénomènes affectent les catégories socio-professionnelles intermédiaires de la population active, celles-là même qui sont au cœur de notre modèle social. Cet avertissement est resté largement méconnu dans le milieu économique, focalisé sur la conviction que le progrès technique était toujours pourvoyeur de prospérité et d’emplois. Cette croyance a largement été alimentée par l’observation des conséquences des deux premières révolutions industrielles. Deux idées importantes concernant les relations entre innovation, croissance et emploi ont ainsi été forgées : 1. par son effet sur la productivité, l’innovation est le moteur de la croissance économique : 2. par la demande de nouveaux produits qu’elle induit et les gains de productivité qui permettent un pouvoir d’achat accru, l’innovation est à terme globalement favorable à l’emploi pour peu que le système éducatif et le système de formation des compétences répondent de manière satisfaisante aux nouveaux besoins de l’économie. En France, entre 1990 et 2013, la part des emplois intermédiaires dans l’emploi total a diminué de 8.6% (Goos M., Manning A., Salomons A., 2014)
  • 13. 13 L’inquiétude grandit donc s’agissant de l’effet du numérique sur l’emploi, avec deux constats majeurs : 1. la modification structurelle de la répartition des emplois entre peu qualifiés, intermédiaires et très qualifiés ; 2. le coup d’arrêt à la tendance longue de l’expansion du salariat et le spectre de la ‘gig economy’ ou économie des ‘petits boulots’ (renouveau du freelance et du travailleur indépendant), posant de nouveaux défis à la régulation et à la protection sociale. Dans leur article « Innovations contemporaines : contre-performances ou étapes transitoires » (2014), Michèle Dubonneuil et David Encaoua posent la problématique suivante : « les forces de l’économie de marché, dont l’innovation est une composante essentielle, deviendraient-elles les fossoyeurs de l’emploi ? Ou bien ne s’agirait-il que d’une phase transitoire à la recherche de nouvelles perspectives permettant aux innovations contemporaines d’être porteuses d’une prospérité économique retrouvée, comme l’ont été celles des deux révolutions industrielles antérieures ? ». Leur analyse débute sur la distinction de trois types d’innovation, selon la logique de finalité : 1. les innovations de remplacement, incorporant des améliorations techniques ou de nouvelles fonctionnalités ; 2. les innovations de rationalisation, permettant d’abaisser les coûts de production et/ou distribution des biens et services arrivés à maturité ; 3. les innovations d’autonomisation, qualifiées de créatrices de nouveaux usages, remplissant trois propriétés : i) ce sont des innovations de rupture, ii) à l’origine d’une demande nouvelle, iii) initiatrices de transformations sociales dans les modes de vie. Ces trois types d’innovations coexistent à tout moment dans une économie. Les innovations autonomisantes seraient à l’origine de créations nettes d’emplois, tandis que les deux autres types d’innovations auraient des effets plus ambigus. Ainsi, les combinaisons d’investissements en capital qu’elles engendrent peuvent conduire à des configurations globales différentes. Cette « courbe en U » est la signature du phénomène de polarisation. Contrairement aux autres pays occidentaux, la France se distingue toutefois par sa difficulté à créer des emplois peu qualifiés, en raison : 1. Du coût élevé du travail, pour les entreprises au niveau du SMIC (en particulier dans les zones où la productivité est plus faible), 2. D’une rigidité du droit du travail qui fait de la décision d’embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) une décision risquée, notamment dans le cas d’un travailleur sans diplôme et sans expérience. Source : Nicolas Colin et al., « Économie numérique », Notes du conseil d’analyse économique 2015/7 (n° 26), p. 1-12.
  • 14. 14 Période Cycles économiques Effets de report du capital Incidences 1945 - 1973 Cycles d’activité courts Report du capital libéré par des innovations de rationalisation sur des innovations autonomisantes  Renouvellement de la demande  Croissance économique  Solde net positif de créations d’emplois  Baisse du taux de chômage 1973 - 2015 Durée des périodes de récession plus longues Report du capital libéré par des innovations de rationalisation sur des innovations de rationalisation ou de remplacement  Créations d’emplois durant les phases d’expansion insuffisantes pour compenser les destructions d’emplois durant les phases de récession  Hausse du taux de chômage Que faire pour que les innovations autonomisantes redeviennent prédominantes ? Quelles conditions réunir pour permette aux innovations technologiques contemporaines de déployer leur potentiel ? Dubonneuil et Encaoua développent l’idée que (p.73) : « les potentialités de transformations sociales ouvertes par les technologies numériques contemporaines n’ont pas encore été suffisamment exploitées. Autrement dit, même si certaines de ces technologies ont bien un caractère d’innovations de rupture, elles n’ont pas encore entraîné les nécessaires transformations sociales pour acquérir le statut de véritables innovations autonomisantes. Leur potentiel se révélera autant à travers la transformation des modes de vie et la réinvention des usages qu’elles appellent que par leur contenu technologique à proprement dit ». Source : TheFamily Papers #002, Nicolas Colin, Another 100 Days : a digital Neaw deal for Workers, 28 octobre 2015
  • 15. 15 I.3 Quelles qualifications requises dans l’économie du quaternaire ? Une des transformations sociales les plus radicales apportées par les technologies numériques consiste à passer de la situation actuelle d’une production de biens, séparée des conditions de leur usage, à une production nouvelle de « solutions», consistant en une mise à disposition sur les lieux de vie des utilisateurs, tout à la fois, du bien, d’équipements associés, de services qui l’accompagnent et de personnel dédié à cet accompagnement. La vente séparée de biens et de services cède ainsi la place à une mise à disposition sous forme locative des conditions d’usage du produit intégré, évitant à l’utilisateur de devoir être propriétaire des composantes intermédiaires que sont le bien et les services correspondants. De plus en plus d’entreprises prennent conscience qu’il est possible de créer des « solutions » en combinant internet, le téléphone mobile et les capteurs. Pour faire de l’internet des objets une réalité, elles mettent en œuvre des plateformes pour faciliter et standardiser l’échange de données entre les différents composants : par exemple, on voit se développer des offres mettant à disposition des personnes dépendantes des capteurs permettant d’assurer les fonctions de téléassistance, de pilulier électronique, de contrôle de paramètres médicaux à distance. En outre, le progrès technologique pourrait déboucher sur l’interconnexion de différentes « solutions », autorisant des rebonds, la mise à disposition d’une « solution » en appelant une autre. Reprenons le cas de la perte d’autonomie : une solution de télésurveillance permettant de détecter une chute et d’envoyer le cas échéant un intervenant pour s’occuper de la personne … débouchera sur une autre solution consistant à photographier une blessure et à l’envoyer à un médecin pour un diagnostic à distance et une décision d’hospitalisation. La distinction habituelle entre biens et services s’estompe pour donner lieu à des « solutions », voire à des bouquets de « solutions » construits autour d’un lieu de vie (domicile, mobilité), d’un âge de la vie (silver économie), d’un besoin spécifique (se loger, se déplacer, se nourrir, se soigner). Selon Dubonneuil (2007, 2010, 2014), le « secondaire et le tertiaire se marient pour donner naissance à l’économie quaternaire ». Cette économie du quaternaire crée de nouvelles formes d’emplois satisfaisant des besoins d’interaction humaine et de service. En effet, deux types de qualifications émergent : 1. un travail de conception technologique, autour des fonctions de conception, de prototypage, de test et d’industrialisation de nouveaux biens et services dont la production sera de plus en plus automatisée ; 2. un travail d’interaction, consistant en une intervention humaine pour assurer la maintenance sur site des biens durant leur cycle de vie ainsi qu’un accompagnement à distance ou en face-à-face des utilisateurs. Ces emplois possèdent deux attributs importants : ils sont à la fois non délocalisables par nature et non substituables par des technologies numériques, dans la mesure où les interactions qu’ils comportent sont de nature humaine, non routinière, et donc non codifiable par essence. Ils nécessitent de nouvelles formes de spécialisations, notamment celle de pouvoir réagir rapidement à des situations inédites et de communiquer des informations précises à d’autres interlocuteurs. Dans l’ère du numérique et de la mondiatlisation, l’éducation, la formation et l’apprentissage sont cruciaux dès le plus jeune âge et tout au long de la vie, non seulement pour s’adapter aux transformations technologiques induites par les innovations contemporaines, mais également aux usages de ces innovations qui doivent conduire à une perception renouvelée des modes de vie.
  • 16. 16 II. La maturité numérique française II.1 La performance numérique de la France à l’échelle mondiale sur le Digital Evolution Index Sponsorisé par MasterCard et DataCash, l’institut ‘for Business in the Global Context’ de la Fletcher School (Tufts University, Medford USA) s’est penché sur la composition d’un indice visant à positionner une cinquantaine de pays dans le cadre d’une maturité et d’une trajectoire numérique. L’échantillon de pays retenus associe des pays développés et émergents représentant les 3/4 de la population mondiale. Le Digital Evolution Index (DEI) intègre les leviers mais aussi les freins que rencontre chaque nation dans son parcours d’évolution digitale. L’indice repose sur la compilation de données relatives à quatre piliers : 1. le facteur d’offre se focalise sur les infrastructures technologiques, logistiques, transactionnelles (accès internet, complétude des réseaux, …) permettant de soutenir le e-commerce et les transactions en ligne ; 2. le facteur de demande incorpore les comportements des consommateurs, leur appétence pour les paiements en ligne, ainsi que leur capacité à maîtriser les outils internet et les réseaux sociaux ; 3. le facteur institutionnel se penche sur l'efficacité des gouvernements dans le soutien à l'innovation, leur rôle dans le secteur privé et le cadre législatif pour favoriser l’émergence de l’écosystème digital ; 4. le facteur innovation inclut l'état de l'écosystème entrepreneurial, le financement de l'innovation, la présence d'un esprit et d'une culture start-up. Il en résulte un classement indicatif d’une maturité digitale. La dernière séquence de données enregistrées en 2013 fait figurer la France dans le second quartile, en 19 ème position avec un score global de 44.07/100, là où le pays ‘best-in-class’, Singapour, caracole avec un score de 56.21/100. Average 34.67 39.99 22.98 49.25
  • 17. 17 La France offre un tableau contrasté : si le levier de la demande progresse positivement avec 78% de sa population utilisant régulièrement internet et un accroissement rapide (+97% entre 2012 et 2013) de son e-commerce au travers des smartphones et tablettes, trois constats peuvent se révéler inquiétants : 1. son point fort, le levier de l’offre, lié à la qualité de ses infrastructures, est en décélération de -6.6% sur la période de référence 2008-2013 ; 2. le levier institutionnel donnant l’impulsion politique et réglementaire reste insuffisant ; 3. le levier innovation n’est pas suffisamment décisif pour donner un avantage comparatif. Singapour, le bon élève, n’a cessé quant à lui de progresser dans le développement d’une infrastructure numérique de calibre mondial, grâce à des partenariats public-privé, à l’exemple du projet Next Gen II sur le projet de création d’une infrastructure d’autoroute digitale. Il consolide encore davantage son statut de centre de communication régional. Grâce à des investissements en cours (les institutionnels locaux Temasek & GIC ont injecté en 2013-2014 3 milliards de $ dans les secteurs des technologies, des telecom et du eCommerce), Singapour demeure une destination attrayante pour les start-ups, pour le private equity et le capital risque. L’enseignement principal du classement est qu’il n’existe pas de configuration digitale type, car selon les pays, les 4 leviers ne connaissent pas le même degré de corrélation ni la même vitesse d’évolution. Au mieux, peut-on noter des similarités par zones géographiques (Pays nordiques, Europe Centrale, Europe du Sud, membres de l’ASEAN …) en raison d’une communauté d’environnements culturel, social, politique et économique. Source : Digital Planet : readying for the rise of the e-consumer, a report of the state and trajectory of global digital evolution, september 2014, L’étude de la Fletcher School analyse par ailleurs le taux de croissance – positif ou négatif - de l’indice (DEI) de chaque pays en regardant sa variation entre 2008 et 2013. Il en résulte un tableau de trajectoire numérique, ayant pour axe vertical le score de l’indice en 2013 et pour axe horizontal son taux de variation sur 5 ans. Chaque pays se voit ainsi affecté dans une zone d’évolution numérique.
  • 18. 18 Comment analyser les positionnements respectifs des pays sur la matrice de trajectoire digitale ?
  • 19. 19 La France figure dans le cadran des ‘stall out countries’, c’est-à-dire le cadran des pays ayant atteint un niveau de développement numérique élevé, mais qui accusent une perte de vitesse et s’exposent donc au risque de rester à la traine. Cette décélération, comme dans de nombreux pays d’Europe du Nord et de l’Ouest, s’explique par une croissance économique atone depuis la crise financière de 2008 et reflète les incidences des restrictions budgétaires que les états ont été contraints d’adopter. La conclusion de l’étude de la Fletcher School est que ces ‘stall out countries’ ne pourront se relancer dans la course qu’en redoublant d’effort sur l’innovation et en recherchant des marchés en dehors de leurs frontières nationales. II.2 Le paradoxe français dans le paysage européen : le décalage particuliers / entreprises Le numérique pèse ainsi aujourd’hui 5,5 % de notre PIB, et participe pour 25 % à la croissance française. La contribution à la richesse nationale pourrait atteindre 6 % en 2016 (135 milliards d’euros) et 7 % en 2020 (180 milliards d’euros). 880 milliards d’euros, c’est la gigantesque valeur économique que pourrait engendrer, d’ici 2025 – et selon le cabinet McKinsey France dans son rapport “Accélérer la mutation numérique des entreprises : un gisement de croissance et de compétitivité pour la France” -, le plein déploiement du numérique et des technologies, des produits et des services associés en France. La diffusion au grand public du numérique s’est accélérée ces dernières années dans l’hexagone. Mis à jour régulièrement, les Chiffres Clés de l’Observatoire du Numérique traduisent ce succès. Ils dressent un panorama synthétique du numérique dans notre pays, qui permet d’en caractériser le développement et le poids au niveau national comme à l’échelle européenne. Comparés aux résultats de l’enquête communautaire sur les TIC en 2013 (source Eurostat), les Chiffres Clés de l’Observatoire du Numérique 2014 font apparaître un contraste saisissant entre particuliers et entreprises. Les particuliers en France ont désormais un équipement adéquat et un usage élevé de l’internet.  82% des français ont un accès à internet depuis leur domicile. La progression est fulgurante, comparé à 2002 où seulement 22% des foyers étaient équipés. L’usage régulier de l’internet (au moins 1 fois par semaine) concerne 78% des Français, et l’usage quotidien d’internet touche 66% des Français.  L’internet mobile confirme sa percée : 30% des particuliers de 16 ans et plus en France utilisent une connexion via un réseau de téléphonie mobile pour connecter leur appareil mobile à internet, vs 23% dans l’UE. Près de 40% des Français possèdent un smartphone (75% dans la tranche d’âge des 18-24 ans).
  • 20. 20  Pour les infrastructures du numérique, la France occupe une très bonne position sur les connexions à haut débit : elle se situe au 5 ème rang européen pour le ratio abonnements à haut débit par 100 habitants, soit 37% vs 28% dans l’UE.  L’administration numérique progresse bien en France, puisque 60% des particuliers utilisent internet dans leurs relations avec l’administration, vs 41% dans l’UE.  59% des particuliers français ont acheté des biens ou services en ligne sur la période étudiée, vs 47% des particuliers européens de l’UE. Les usages en entreprises sont plus contrastés, avec une ségrégation entre quelques usages numériques de base omniprésents, comme l’utilisation d’e-mails ou la présence sur le web, et des usages plus avancés (fonctions interactives avec le client, outils collaboratifs internes, ...) qui ne sont adoptés que par une faible proportion d’entreprises. L’enquête récurrente INSEE sur les TIC (2012, 2013), conduite sur les entreprises d’au moins 10 salariés, illustre ce clivage entre usages simples et usages avancés. En voici les principaux résultats :
  • 21. 21  toutes les entreprises françaises disposent d’un accès à internet, et environ les deux tiers d’entre elles ont une page web ; 61% des entreprises utilisent l’EDI (Echange de Données Informatisées) ;  une minorité d’entreprises se sert des outils avancés de gestion des processus de l’entreprise : 33% ont un ERP (outil de gestion intégré), 26% un CRM (outil de gestion de la relation client), 13% un outil de partage d’information sur leur supply chain (chaîne logistique) ;  moins d’une entreprise sur sept a développé une interface web avancée : seules 14% vendent en ligne, 13% proposent un suivi de commande et 14% offrent un contenu personnalisé. Le constat est similaire en ce qui concerne les outils de communication et de collaboration : si l’email est incontournable (97% des entreprises l’utilisent en interne, 93% vers leurs clients), l’utilisation de nouveaux outils de communication reste encore minoritaire :  la visio-conférence est utilisée par 47% des entreprises et les outils collaboratifs (de type Sharepoint) par un peu plus d’un tiers d’entre-elles (37%).  le chat (23%), le réseau social interne (13%) et l’exploitation des réseaux sociaux grand public pour gérer la relation client (17.1%) décollent à peine. Source : Nicolas Colin et al., « Économie numérique », Notes du conseil d’analyse économique 2015/7 (n° 26), p. 1-12. Les entreprises françaises ne semblent pas tirer pleinement parti du potentiel de la demande en matière de services numériques. Selon la note du Conseil d’Analyse Economique (CAE) présentée au cabinet du Premier Ministre le 6/10/2015, plusieurs facteurs expliquent ce retard : 1. les compétences relativement faibles des actifs : l’enquête PIAAC 2013 (Program for the International Assessment of Adult Competencies) de l’OCDE mesure les compétences des adultes âgés de 16 à 65 ans et l’utilisation de ces compétences dans le cadre professionnel (compréhension écrite, mathématiques, nouvelles technologies). Elle donne à la France un score médiocre (258/500), légèrement inférieur à l’Espagne (260/500), et loin derrière les USA (267/500) et la Suède (282/500). Ce retard complique l’investissement dans le numérique, la mise en œuvre des changements organisationnels qui lui sont liés et l’appropriation des technologies par les salariés ;
  • 22. 22 2. l’inadaptation des réglementations sur les marchés des biens et services et sur le marché du travail, qui entrave le déploiement des modèles d’affaires numériques, freine le renouvellement des entreprises et dissuade les fonds d’investissement ; 3. le manque de fonds d’investissement de grande taille capable de prendre des risques importants sur des durées longues, ainsi que le nombre insuffisant de « business angels ». Une étude conduite par le cabinet McKinsey en 2014 sur un échantillon représentatif de 500 entreprises françaises (dont 325 PME) explore également les raisons de ce retard. Différents facteurs endogènes apparaissent : 1. les rigidités organisationnelles englobent une structuration compartimentée en silos, un manque d’agilité, de transversalité et de fluidité ; 2. la sur-spécialisation des compétences engendre un réel manque de polyvalence, ce qui constitue un comble sur le champ numérique dans un pays reconnu pour la qualité de ces mathématiciens, statisticiens et ingénieurs ; 3. la faiblesse caractéristique en France des marges commerciales (28% tous secteurs confondus contre 38% en moyenne en Europe) impacte directement les capacités d’investissement des entreprises et donc leur aptitude à se transformer ; 4. la crainte des dirigeants sur l’ampleur de la tâche à accomplir s’exprime tant sur le plan humain que financier. Si la prise de conscience de la transition numérique est actée, il manque encore la vision, la maturité et la déclinaison sur le business model ; 5. un rapport faussé au digital l’assimile trop souvent à l’informatique et à la technologie alors qu’il s’agit avant tout d’une révolution des services et des usages ; 6. les freins culturels incluent la défiance vis-à-vis du changement ainsi que l’individualisme qui laisse peu de place à l’esprit collectif qui est cœur de l’économie du quaternaire. Avec un décalage prononcé entre l’appétence et les usages des particuliers et ceux des entreprises, La France est un cas assez unique dans le paysage européen. Les usages internet des particuliers sont ainsi entre 6 et 19 points au-dessus de la moyenne de l’UE, là où les usages internet des entreprises sont quant à eux 10 points en dessous de la moyenne de l’UE.
  • 23. 23 Dans un contexte économique incertain, la transformation digitale représentant en quelque sorte un saut vers l’inconnu, les entreprises manquent cruellement de visibilité quant au retour sur investissement qu’elles en dégageront, tant en termes de valeur que d’échéance.
  • 24. 24 Focus Assurance n°1 – Maturité numérique du secteur de l’Assurance « Plus nous serons digitaux, plus nous serons dans l’efficience du service et les attendus en termes de qualité de service ». Stanislas Chevalet, Directeur Général Adjoint de BNP Paribas Cardif, Expansion Managment Review, septembre 2014. Le digital est un levier crucial pour les assureurs : il peut leur permettre de reconquérir une part plus importante du profit dans la chaine de valeur, aujourd’hui principalement capté par les assurés et les distributeurs. Au-delà des objectifs de vente en ligne qui restent anecdotiques et stagnent globalement à 5% des primes collectées en France, les enjeux de la transformation digitale se concentrent sur : 1. la redéfinition et le ré-enchantement de la relation client, concomitants avec la « retailisation » des services et l’avènement de l’hyper-usage ; 2. le questionnement sur l’évaluation et la mutualisation des risques à l’heure de la migration du big au smart data, avec une révision du modèle de pricing et une meilleure analyse des sinistres ; 3. l’industrialisation des opérations au travers de l’automatisation et de la dématérialisation des processus. Source : MIT Sloan Management : Capgemini, “The digital advantage : how digital leaders outperform their peers in every industry”, 2015
  • 25. 25 II.3 L’accélération de la transformation digitale : un enjeu identifié, un chemin encore mal balisé, un potentiel salarié sous-exploité Dans son livre blanc paru en novembre 2014 sous le titre « le Change Digital : l’intégration du sujet digital au sein des entreprises en 2014 », la chaire ESSEC du changement note un écart entre la prise de conscience élevée des enjeux du digital (86% des participants aux Rencontres Internationales du Changement organisées sur ce thème les 24 et 25 septembre 2014) et le niveau de maturité digitale, jugé insuffisant (60% des participants) et en construction. Ce constat rejoint les conclusions de l’étude Callson – Roland Berger, déjà mentionnée au 1.2.2 : la transformation numérique est très largement reconnue comme : 1. Un facteur de performance économique sur 2 axes :  le développement du chiffre d’affaires grâce à une approche centrée sur l’utilisateur final, une culture de la réinvention permanente du business model et de la chaîne de valeur, l’extensibilité (« scalability ») des solutions, la diminution de barrières géographiques et culturelles, l’ouverture de l’entreprise sur son écosystème extérieur ;  la baisse ou la maîtrise des coûts grâce à la mise en réseau de l’ensemble de la chaîne de production et de logistique, la mise en œuvre d’une maintenance prédictive des actifs de production, la dématérialisation des échanges et des processus, l’optimisation des plateformes de type cloud, l’utilisation du big data… qui rendent les environnements plus flexibles et génèrent des économies d’échelle par mutualisation, tout en convertissant de lourds investissements (CapEx) en charges récurrentes (OpEx) plus supportables. 2. Un facteur d’innovation : le numérique est à la fois le fond et la forme de l’innovation. Il est source de disruption mais également catalyseur ou facilitateur de solutions à partir de démarches inédites (capacité de mise sur le marché sous forme de lancements rapides ‘launch & iterate’ et d’essais successifs ‘trial & error’, incubateurs de start-ups, organigrammes aplatis, etc…) 3. Un facteur d’efficacité : l’étude INSEE/Eurostat de décembre 2013 « Analysing ICT Impact for Different Units Of Observation » trouve une corrélation positive significative entre la productivité du travail ou du capital au sein d’une entreprise et les variables de maturité numérique suivantes : 1) automatisation des canaux de vente, 2) volumes de vente en ligne, 3) gestion numérique de la chaîne logistique, 4) présence d’un ERP (outil de gestion intégré). 4. Un facteur de cohésion sociale : la diffusion des outils, des usages et de la culture numériques dans l’entreprise apparaît comme un facteur de transformation positive des relations de travail pour 37% des entreprises (vs 6% comme un facteur de transformation négative) grâce à un sentiment renforcé d’implication et une capacité de dialogue renouvelée. De même, elle renforce la satisfaction et le bien-être au travail pour 43% des entreprises (vs 5% qui ont un avis négatif). Avec autant de bénéfices reconnus, comment expliquer dès lors la frilosité des entreprises à accélérer leur transformation numérique ? Pourquoi cela constitue-t-il un tel défi ? Les freins les plus communément évoqués sont :  les coûts induits par l’immobilisation des capitaux permettant de financer la mise en place des nouveaux outils et process, les investissements en temps et moyens de R&D, la compétitivité des prix … sans être en mesure de générer un ROI direct ;  la gestion de l’héritage informatique et la redéfinition du rôle de la fonction de DSI (Direction des Systèmes d’Information) : la mise en place des outils de gestion s’est faite en France avec beaucoup plus d’adaptations spécifiques que dans les autres pays de l’UE, créant des strates et des couches spécifiques de développement. Il en a résulté des SI difficiles à faire évoluer, mutuellement dépendants, avec des déploiements lourds nécessitant un amortissement sur longue période. L’évolution des outils numériques se traduit dans l’entreprise par une attente des collaborateurs et du management, en rupture par rapport aux infrastructures mises en place : alternative SaaS (software as a service), tendance du BYOD (Bring Your Own Device), utilisation
  • 26. 26 des réseaux sociaux et des outils collaboratifs mélangeants des usages professionnels et personnels. Le DSI fait face à une situation délicate : il doit gérer l’héritage (‘legacy’) tout en ne freinant pas les nouveaux usages ;  la résistance au changement dans une culture d’entreprise française historiquement fondée sur un modèle de grande entreprise solidement structurée et hiérarchique, hors des modèles plus flexibles et réactifs qui apparaissent aujourd’hui plus performants, car plus innovants, agiles et participatifs. Ces chiffres corroborent ceux du livre blanc de la chaire ESSEC du changement qui indiquent que 2/3 des dirigeants ont intégré le digital dans leurs projets stratégiques, mais que seulement 30% des entreprises disposent d’une stratégie digitale, formalisée, claire, robuste et partagée. Les initiatives numériques se déploient généralement top down du senior management ou de la DSI vers les collaborateurs. Les 19% d’entreprises françaises qui ont concrétisé une initiative numérique dont les employés sont à l’origine font figurent d’exception. TNS Sofres, en lien avec Abilways Digital, a conduit de novembre à décembre 2013 une enquête de terrain intitulée « la transformation digitale en entreprise, vécu, perceptions et attentes – regards croisés RH et salariés ». L’échantillon représentatif des entreprises de plus de 200 salariés était composé de 275 interviewés, 40% appartenant à une fonction RH (DRH, responsable formation, …) et 60% relevant de fonctions opérationnelles. La très grande majorité des répondants anticipent un impact très fort du digital dans les années à venir sur :  leur propre fonction : 63% ;  la manière de travailler au sein de leur entreprise : 66% ;  le business model de leur entreprise : 55%. La transformation digitale est vécue par les salariés comme une formidable opportunité tant pour leur entreprise (87%) que pour leur propre carrière (70%). Ce qui est frappant de constater, c’est le décalage dans la dramatisation de la fonction RH relativement à la perception par les collaborateurs de la transformation numérique. Plus étonnant encore, si 57% des entreprises déclarent que la transformation numérique fait partie de leurs axes stratégiques à moyen terme, elles ne s’engagent que très peu dans une stratégie concrète de transformation :  36% des entreprises ont une stratégie numérique formalisée ;  20% des entreprises ont un responsable dédié au numérique (CDO : Chief Digital Officer) ;  30% des entreprises ont communiqué des objectifs liés au numérique à leurs managers. Cet engagement limité est particulièrement visible dans l’investissement en compétences.  52% des entreprises n’ont recruté à ce jour aucun spécialiste du numérique ;  dans 60% des entreprises, moins de 10% des salariés a suivi une formation numérique ;  lorsqu’elles existent, ces formations sont centrées sur la simple prise en main d’outils (60%), et très peu sur des compétences plus larges, comme la culture numérique (13%) ou les nouvelles méthodes de travail comme le processus d’innovation ouverte (10%). Les entreprises sous-exploitent le potentiel numérique de leurs salariés, en oubliant que la plupart ont développé une expérience et une culture numériques à titre personnel. Les consommateurs sont en avance par rapport aux entreprises, et parmi les consommateurs, les salariés sont les plus grands utilisateurs du numérique (ainsi 1 salarié sur 3 utilisait l’internet mobile en 2013 vs 1 sur 4 pour l’ensemble des Français).
  • 27. 27 Source TNS Sofres – Transformation digitale, 2014 Si 27% des salariés interrogés (22% dans les fonctions RH, 30% dans les fonctions opérationnelles) se disent tout à fait à l’aise avec les nouvelles pratiques liées au digital, et 56% plutôt à l’aise, ils réclament d’acquérir au travers d’un plan de formation adapté un savoir-faire mais aussi (et surtout !) un savoir-être digital. Source TNS Sofres – Transformation digitale, 2014 Les entreprises disposent donc en leur sein d’un puissant potentiel : s’appuyer sur des salariés enthousiastes, impatients, déjà acculturés à titre privé, comme moteurs de la transformation numérique. La transformation digitale ne peut être considérée comme une option : « disrupt or you will be disrupted ! ». Pour autant, la dichotomie entre usages numériques des particuliers et des entreprises, le décalage de perception entre RH et salariés, l’investissement encore limité en formations et compétences digitales … positionnent la France et ses entreprises en retrait de la dynamique de leurs voisins de l’UE.
  • 28. 28 III. Comment définir les compétences numériques ? III.1 Qu’appelle-t-on une compétence individuelle ? Dans le dictionnaire des ressources humaines (6 ème édition Vuibert 2011), Jean-Marie Peretti définit ainsi le concept de compétence : « La compétence rassemble trois types de savoir :  un savoir théorique ;  un savoir-faire (expérience) ;  une dimension comportementale (savoir-être) … … mobilisés ou mobilisables qu’un salarié met en œuvre pour mener à bien la mission qui lui est confiée. On distingue divers types de compétences : utilisées / utilisables, validées / potentielles, opérationnelles / personnelles. La compétence individuelle est le savoir-faire opérationnel d’une personne, validé dans son activité. Elle est fortement contingente à une situation professionnelle donnée et correspond donc à un contexte. La caractérisation de la compétence individuelle se considère selon quatre niveaux :  les compétences requises par un emploi ou un métier ;  les compétences mobilisées par un individu dans l’exercice de sa fonction ;  les compétences détenues par un individu à un moment donné ;  les compétences potentielles d’un individu (non encore mises en œuvre), qui sont souvent envisagées comme transversales, transférables, de prospective (domaine privilégié de la gestion des potentiels et des carrières) ». Il peut être intéressant de compléter cette définition d’un professeur chercheur émérite des RH de celle de psychologues, sociologues ou acteurs économiques et sociaux afin de croiser différents prismes et d’aboutir à une proposition de synthèse sur les caractéristiques principales de la compétence et de son activation. « La compétence peut être saisie au travers de quatre caractéristiques qui permettent de rendre compte de sa complexité : « La compétence est « l’intelligence pratique des situations » qui se manifeste par trois types de comportements : 1) l’autonomie, 2) la prise de responsabilité, 3) la communication. 1. elle est opératoire et finalisée : la compétence n’a de sens que par rapport à l’action, elle est toujours compétence à agir et est indissociable des activités par lesquelles elle se manifeste et au but que poursuit cette action ; 2. elle est apprise : on n’est pas naturellement compétent, on le devient par une construction personnelle et sociale qui marie apprentissages théoriques et issus de l’expérience ; 3. elle est structurée : la compétence combine de façon dynamique les éléments qui la constituent (savoirs, savoir-faire pratiques, raisonnements …) pour répondre à des exigences d’adaptation ; 4. elle est abstraite et hypothétique : la compétence est inobservable. Seules ses manifestations (comportements et performances) sont constatables ». Approche du psychologue : Jacques Leplat (1988), « Les habilités cognitives dans le travail » Approche du sociologue : Philippe Zarifian (1999), « Objectif compétences »
  • 29. 29 L’autonomie et la responsabilité font partie de la définition « de base » de la compétence : il s’agit d’attitudes sociales qui ne peuvent réellement s’apprendre et se développer qu’en assumant des situations professionnelles qui les sollicitent. Le contenu et l’organisation de travail ne sont pas seulement des dimensions dans lesquelles les compétences sont mobilisées, ce sont aussi celles dans lesquelles elles se développent ». « La compétence consiste à savoir mobiliser des ressources d’une double nature : d’une part des ressources personnelles (savoirs théoriques, savoir-faire opérationnels, savoir-faire sociaux) et d’autre part des ressources extérieures à l’individu (installations, outils de travail, documentations, informations, réseaux relationnels). Ainsi, la compétence est cette capacité d’intégrer des savoirs divers et hétérogènes pour les finaliser sur la réalisation d’activités. » « La compétence professionnelle est la mise en œuvre de capacités en situation professionnelle qui permettent d’exercer convenablement une fonction ou une activité. » « La compétence professionnelle est une combinaison de connaissances, savoir-faire, expériences et comportements s’exerçant dans un contexte précis. Elle se constate lors de sa mise en œuvre en situation professionnelle à partir de laquelle elle est validable. C’est donc à l’entreprise qu’il appartient de la repérer, de l’évaluer, de la valider et de la faire évoluer. » « La qualification serait la boîte à outils qu’un individu se forge en formation initiale, par la formation professionnelle, au travail, dans ses activités hors du travail. La qualification donne des repères collectifs. Les compétences seraient les différentes « capacités à », les savoirs et les savoir-faire mis en œuvre dans une situation de travail. La compétence serait une combinaison entre les ressources d’une personne et les moyens fournis par l’organisation. C’est « la manière » : deux individus peuvent avoir des boîtes à outils proches, mais chacun manie ses outils à sa façon. C’est dans cet apport individuel que réside la compétence ». En synthèse, nous retiendrons la définition proposée par Antoine Masson et Michel Parlier (2004) : « Etre compétent signifie savoir combiner et savoir mobiliser des ressources de façon pertinente au regard des finalités poursuivies dans l’activité de travail et en prenant en compte les caractéristiques de la situation du travail. La compétence s’entend comme une capacité à agir, on est « compétent dans et pour » un ensemble de situations professionnelles, dans un contexte donné et avec un niveau d’exigence donné. La compétence suppose l’action, l’adaptation à l’environnement comme à la modification de cet environnement. » Approche du consultant : Guy Le Boterf (1997), « De la compétence à la navigation professionnelle» Approche du normateur : AFNOR (2008), norme NF X 50-750 » Approche du patronat : MEDEF Approche des syndicats : convention cadre entre l’ANACT et les confédérations syndicales CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT-FO (2000) : « Développement, reconnaissance des compétences et des qualifications »
  • 30. 30 La compétence, la résultante de trois conditions III.2 La compétence numérique : un concept jeune, mouvant et d’essence politique Depuis la seconde moitié des années 2000, nous assistons à l’émergence du concept de compétence numérique, sans pour autant disposer d’une définition stabilisée. Van Deursen et Van Dijk (2009) notent que la plupart des études et papiers de recherche restent limités dans leurs définitions, dans la taille d’échantillonnage et dans la collecte de données, insistant sur le manque de données empiriques permettant de valider les structures et le contenu des compétences numériques. Ilomäki, Kantosalo et Lakkala (2011) tentent de cerner les origines du concept de compétence numérique en le resituant dans un paysage de disciplines et de concepts proches. Elles soulignent un périmètre très large couvrant les medias, la communication, la technologie, l’informatique, l’éducation et les sciences de l’information. La compétence  Savoir agir : Ai-je les ressources adaptées à la situation ? - Savoirs, savoir-faire, savoir-être - Outils et méthodes de travail  Vouloir agir : suis-je d’accord et motivé pour engager ces ressources ? - Compréhension des enjeux et des finalités de travail - Correspondance avec mes valeurs - Intérêt du travail - Reconnaissance de ma contribution  Pouvoir agir : ai-je les moyens d’engager ces ressources ? - Autonomie - Coopération - Conditions de travail
  • 31. 31 En synthèse, elles proposent la définition suivante : « la compétence numérique rassemble : 1. des savoir-faire techniques permettant l’usage de technologies numériques ; 2. des capacités à utiliser les technologies numériques de façon significative et pertinente dans le travail, les études, la vie quotidienne ; 3. des capacités à utiliser les technologies numériques de manière critique et réfléchie ; 4. une motivation à participer à une culture digitale ». Outre le fait de mettre l’accent sur le caractère récent et encore en formation du concept de compétence numérique, Ilomäki, Kantosalo et Lakkala pointent un phénomène intéressant ; la compétence numérique est en premier lieu un concept politique, porté essentiellement par des institutions telles :  l’UE (Ala-Mutka, framework for key competences for lifelong learning in a knowledge society, 2011)  l’OCDE ( Program Definition and Selection of Competencies, 2005)  l’UNESCO.(ICT Competency Standards for Teachers, 2010) La compétence numérique apparaît comme le reflet des croyances et des projections sur les besoins du futur et prend ses racines dans l’environnement de compétition économique dans lequel les nouvelles technologies sont vues comme une opportunité et une solution. Ainsi le Conseil Européen de Lisbonne en 2000 donne le coup d’envoi de la Stratégie dite de Lisbonne et de son Digital Agenda of Europe 2020. Cette stratégie économique et sociale vise 3 objectifs :  Préparer la transition vers une société et une économie compétitives fondées sur le savoir ;  Moderniser le modèle social européen, investir dans le capital humain et combattre les exclusions ;  Appliquer un dosage approprié de politiques macro-économiques. Un quatrième objectif environnemental viendra compléter la Stratégie de Lisbonne lors du Conseil Européen de Göteborg en 2001.
  • 32. 32 A l’époque, on ne parle pas encore de compétence numérique mais de compétence associée aux technologies de l’information et de la communication (TIC), identifiées comme levier de productivité, de croissance durable, d’innovation et d’emploi. Le terme de e-competence fait son entrée lors de l’European e-Skills Forum de 2004, au travers de la publication de la Commission Européenne « e-Skills for the 21st Century ». On y retrouve une catégorisation en 3 grands domaines : 1. Les ICT practitioner skills ou compétences du praticien des TIC ; 2. Les ICT user skills ou compétences de l’usager à manipuler les outils des TIC de manière confiante et critique pour son travail, ses loisirs, ses études ou sa communication ; 3. Les e-business skills (également appelées les e-leadership skills) ou compétences requises pour exploiter toutes les opportunités offertes par les TIC (notamment internet) pour assurer une meilleure performance dans différents types d’organisation, pour explorer de nouvelles voies en management de process commerciaux, administratifs ou fonctionnels ou pour lancer de nouveaux business. L’importance dévolue par l’UE aux « e-skills » trouve sa source dans plusieurs convictions :  Les TIC sont devenues dominantes dans les modes de vie des Européens ;  Les TIC offrent des carrières attractives et des perspectives d’emploi considérables de manière directe ou indirecte ;  Le développement d’une stratégie long terme de « e-skills » est d’autant plus important en contexte de crise ;  Le secteur industriel des TIC représente une part substantielle du Produit Intérieur Brut européen ;  L’émergence du e-commerce entraîne un sérieux virage sur le marché du travail en exacerbant la demande en travailleurs qualifiés. Source : Digital Agenda for Europe, A Europe 2020 Initiative, published on 17-06-2015
  • 33. 33 Les arguments ne manquent pas, bientôt renforcés par les résultats de l’étude PIAAC 2012 (Program for the International Assessment of Adult Competencies) conduite par l’OCDE et dont les conclusions sont les suivantes : « la capacité à accéder à l’information et à la traiter à l’aide des TIC représente une compétence essentielle dans nos économies modernes de plus en plus fondées sur le savoir. Une meilleure maîtrise de ce type de compétences est récompensée par une plus forte probabilité d’être actif, et l’utilisation plus fréquente des TIC dans le cadre professionnel, par une rémunération plus élevée que celle observée parmi les adultes présentant le même niveau de compétences en littératie et en numératie, mais moins compétents dans ce domaine spécifique ou utilisant moins fréquemment les TIC. Les adultes sans expérience dans les TIC se trouvant considérablement pénalisés en termes de perspectives professionnelles et de rémunération, les décideurs doivent réfléchir aux moyens de garantir l’accès de tous les individus à une formation dans les TIC, que ce soit dans le cadre de la scolarité obligatoire ou d’activités de formation pour adultes ».
  • 34. 34 L’UE et l’OCDE se sont attachées toutes deux à établir un lien entre la compétence numérique et des compétences dites génériques. Elles les ont contextuées dans un cadre conceptuel général, posé comme un manifeste pour une vie individuelle harmonieuse et réussie dans une société du futur performante. Par exemple, l’OCDE (2005) définit dans une perspective long terme 3 grandes catégories de compétences clés pour une société du savoir et de la connaissance: 1. Utiliser les TIC de manière interactive ; 2. Interagir entre groupes hétérogènes ; 3. Agir de manière autonome. Chacune de ces compétences clés implique la mobilisation de connaissances, de savoir-faire cognitifs et pratiques, aussi bien que des volets sociaux et comportementaux comprenant des attitudes, des émotions, des valeurs et des motivations. La faculté de réfléchir et d’agir de manière réflexive est une caractéristique sous-jacente de ce cadre conceptuel. Réfléchir demande de recourir à des savoir-faire métacognitifs, à des aptitudes créatives, ainsi qu’à une prise de recul critique. Le process mental engagé est complexe, il consiste à penser sur ses propres pensées et concerne des domaines aussi divers que la mémoire, la perception, la résolution de problème … La première compétence clé – utiliser les TIC de manière interactive – se rapproche beaucoup de ce que l’on pourrait qualifier de compétence numérique. Elle correspond à la capacité à utiliser les TIC pour communiquer, pour travailler, pour jouer … ce qui implique que l’individu prenne conscience de ce que les TIC peuvent lui apporter dans la vie de tous les jours et en exploite pleinement le potentiel. Mais la capacité d’utiliser la technologie, les compétences et les connaissances qu’elle requiert, sont aussi le fruit d’un apprentissage.
  • 35. 35 III.3 De la compétence numérique à la boite à outils élémentaire du citoyen du XXIème siècle Afin de mieux cerner le contenu de la compétence numérique, nous allons maintenant croiser les travaux de recherche de différentes sources pour dresser un inventaire de ses composantes selon différents angles de vue interpellant différentes disciplines.  Relever les défis d’une culture de participation > sciences de la communication (2006) En 2006, Henry Jenkins définit une gamme de compétences permettant de prendre part aux nouvelles communautés émergeant dans le cadre d’une société connectée. Compétence Définition / contenu  Le jeu / le ludique Capacité à utiliser l’environnement proche comme terrain d’expérimentation pour résoudre les problèmes  L’interprétation Aptitude à endosser une autre identité dans un objectif d’improvisation et de découverte  La simulation Aptitude à interpréter et construire des modèles dynamiques à partir de processus du monde réel  L’appropriation Aptitude à extraire judicieusement et à adapter du contenu media  Le multi-tâche Aptitude à exercer une surveillance permanente de l’environnement et à changer d’orientation  La cognition distribuée Aptitude à interagir de manière pertinente avec des outils qui décuplent les capacités mentales  L’intelligence collective Aptitude à échanger les connaissances et à comparer l’information avec les autres en vue d’un objectif commun  Le jugement Aptitude à évaluer la crédibilité et la fiabilité des différentes sources d’information  La navigation transmedia Aptitude à suivre le fil des événements et de l’information en utilisant divers media  Le réseautage Aptitude à chercher, synthétiser et diffuser l’information  La négociation Aptitude à traverser différentes communautés, à discerner et respecter différents points de vue, à comprendre et à suivre d’autres normes ou méthodes  Anticiper les compétences professionnelles à horizon 2020 > sciences économiques et sociales (2011) En 2011, Davis, Fidler et Gorbis (University of Phoenix Research Institute) s’interrogent sur les bouleversements à l’œuvre dans la mutation du paysage du travail et l’identification des compétences professionnelles clés de la prochaine décennie. L’originalité de leur recherche repose sur la mise en évidence de 6 tendances de fond ‘disruptives’ générant 10 compétences distinctives pour la main d’œuvre du futur. Ces facteurs de changement sont :  L’allongement de la durée de la vie L’augmentation de l’espérance de vie modifie les trajectoires de carrière ainsi que les modes d’apprentissage  Le développement de la robotisation L’automatisation chasse l’intervention humaine des tâches routinières et répétitives  L’environnement informatique connecté La propagation des objets connectés et des capteurs, la puissance de traitement décuplée des systèmes
  • 36. 36 d’information font déferler un torrent de données et donnent naissance à des modèles et algorithmes à une échelle sans précédent  La super-structuration des organisations Les réseaux sociaux amènent de nouvelles formes de production et de création de valeur  Le nouvel écosystème des media Les nouveaux outils de communication requièrent de nouvelles littératies des media au-delà de l’écrit  Le monde globalement connecté et digitalisé La mondialisation et l’inter-connectivité placent la diversité et l’adaptabilité au cœur du fonctionnement des organisations A cette projection de l’environnement sociétal de demain sont associées des compétences critiques pour une réussite professionnelle sur un même horizon futuriste. Compétence Définition / contenu  Le pouvoir de décision Aptitude à déterminer le sens profond et la signification de ce qui est exprimé, à créer un processus critique de décision  L’intelligence sociale Aptitude à entrer en relation avec les autres de manière directe et intense, pour détecter et stimuler les réactions et obtenir les interactions désirées  L’innovation et l’adaptabilité Aptitude à penser et à trouver des solutions et des réponses au-delà des routines, des procédures et des schémas automatisés  La pluriculturalité Aptitude à opérer dans différents environnements culturels  La pensée informatique Aptitude à traduire de vastes gisements de données en concepts abstraits et à comprendre les raisonnements fondés sur l’analyse de données  La littératie des nouveaux media Aptitude à évaluer de manière critique et à développer des contenus avec de nouveaux media, et à mettre la puissance de ces media au service
  • 37. 37 d’une communication persuasive  La pluridisciplinarité Aptitude à comprendre des concepts à travers différentes disciplines  Le design de processus Aptitude à dessiner et développer des tâches et des processus pour obtenir les résultats escomptés  La gestion de la charge cognitive Aptitude à sérier et filtrer l’information par ordre d’importance, à comprendre comment maximiser le fonctionnement cognitif en utilisant une large palette d’outils et de techniques  La collaboration virtuelle Aptitude à travailler de manière productive, à conduire le changement, à témoigner sa présence et sa contribution en tant que membre d’une équipe virtuelle  Analyser et cartographier les cadres conceptuels de la compétence digitale pour en déduire un modèle > institutions européennes (2011-2012) Depuis le Conseil Européen de Lisbonne en 2000, le Joint Research Center de la Commission Européenne finance de nombreuses recherches et rapports techniques dont l’objectif est de délimiter de mieux en mieux les composantes de la compétence numérique. Les travaux les plus récents sont :  Policy Brief: Ala-Mutka K., Punie. Y, Redecker C., digital competence for lifelong learning, 2008 ;  Technical Note : Ala-Mutka K, Mapping digital competence : towards a conceptual understanding, 2011  Technical Report : Ferrari A., Digital competence in practice : an analysis of frameworks, 2012 Définition de la compétence numérique
  • 38. 38 Composantes clés de la compétence numérique Traduction au travers d’un modèle conceptuel
  • 39. 39  Analyser les territoires de la littératie et des politiques de citoyenneté numériques > sciences de l’éducation (2015) En 2015, le centre canadien d’éducation aux media et de littératie numérique, Habilo Médias, publie un document de discussion intitulé « définir la politique de littératie numérique et la pratique dans le paysage de l’éducation canadienne ». Selon les auteurs, Hoechsmann et DeWaard de l’université de Lakehead à Toronto, la littératie numérique ne se résume pas à un socle de compétences technologiques, mais plutôt à une capacité à participer à une société qui utilise les TIC dans les milieux professionnels, éducatifs, gouvernementaux, culturels, civiques et familiaux. Dans son approche conceptuelle, Habilo Medias s’appuie en particulier sur 3 éléments de base : 1. L’habilité et la capacité d’utiliser le contenu et les outils des media numériques ; 2. La capacité de comprendre de façon critique le contenu et les outils des media numériques ; 3. La connaissance et l’expertise pour créer à l’aide de la technologie numérique. Pour compléter cette approche, les auteurs proposent une carte mentale qui tend à visualiser et à regrouper les différentes composantes de la politique de littératie numérique au Canada. La compétence numérique implique la mobilisation de connaissances techniques, de savoir- faire cognitifs (voire métacognitifs) et pratiques, aussi bien que des volets sociaux et comportementaux comprenant des attitudes, des émotions, des valeurs et des motivations.
  • 40. 40 IV. Trois menaces relatives à l’acquisition des compétences numériques, trois freins à la transformation digitale de l’entreprise IV.1 Le digital divide ou les fractures numériques, le risque de l’e-exclusion Le concept de fracture numérique, né du terme anglais digital divide, renvoie à de nombreuses facettes de la numérisation de l’économie et à la diffusion des TIC. Quatre dimensions émergent de la recherche académique, depuis la fin des années 1990 : 1. La fracture numérique de premier degré liée à l’accès aux équipements et aux infrastructures : au sens strict, la fracture numérique désigne les inégalités d’accès à internet. Les déterminants des fractures numériques de premier degré sont nombreux et reposent sur 2 facteurs principaux : 1) les écarts de revenus entre nations et groupes sociaux et 2) la structure de l’infrastructure des télécommunications. Ces fractures ne sont pas statiques, elles évoluent au fil des progrès technologiques. Un élargissement aux accès peut cacher de nouvelles barrières plus qualitatives (génération de téléphonie, qualité du débit, possibilités de stockage …). Kling (1998) est le premier à remettre en cause cette approche techno-centrée en distinguant explicitement les inégalités dans l’accès aux TIC (technical access) des inégalités dans les connaissances et les compétences (social access). 2. La fracture numérique de second degré (Hargittaï, 2002) liée à l’usage des TIC : l’accès aux TIC ne conditionne pas automatiquement leur usage effectif et encore moins leur usage autonome et efficace. De nombreuses études montrent ainsi que de multiples facteurs se combinent aux variables socio-démographiques traditionnelles (statut socio-économique, niveau d’éducation, âge, sexe, etc…) pour influencer l’engagement (ou non) des individus dans les TIC. S’approprier pleinement les TIC et leur contenu est bien une dynamique complexe, qui requiert de nombreuses ressources d’ordre matériel, mental, social et culturel. Le gap cognitif est l’endroit où la fracture numérique s’exprime de façon la plus violente (Guichard, 2003). La maîtrise des TIC nécessite de surmonter la perte de certains repères spatio-temporels ou de cadres structurés et stables, comme l’offre par exemple le livre physique. Un autre point clé réside dans le tri, l’analyse et la synthèse de l’information collectée. 3. La fracture numérique sous l’angle des performances induites par l’usage des TIC : cette dimension repose sur une approche macro-économique (Stratégie de Lisbonne (2000) pour l’UE). Les TIC accélèreraient la productivité des uns et causeraient la déqualification des autres, accentuant les inégalités de salaires. 4. La fracture numérique ‘dynamique’ liée aux processus d’apprentissage des TIC : les nouvelles technologies sont considérées comme complexes et par essence ‘immatures’, c’est-à- dire en constante évolution. Elles nécessitent des compétences spécifiques pour les utiliser effectivement à des buts de création de richesse. L’acquisition de ces compétences requiert la mise en place de processus d’apprentissages formels et informels. Le fossé est amplifié ici par les primo-adoptants ou communautés virtuelles d’experts qui définissent ‘entre-soi’ les normes et participent à l’élaboration des modalités d’évolution technologique qui répondent davantage à leurs attentes qu’aux difficultés de rattrapage de la masse des ‘followers’.
  • 41. 41 Source : Gérard Valenduc, Patricia Vendramin, (2003), Internet et inégalités – une radigraphie de la fracture numérique, Centre de recherche Travail et Technologies de la Fondation Travail-Université de Namur La fracture numérique ‘dynamique’ liée aux apprentissages est la plus déterminante des fractures numériques. Les TIC progressent à un rythme élevé avec de nombreuses ruptures. Dès lors, leur adoption nécessite des apprentissages continus et l’acquisition constante de nouvelles compétences. Pour analyser les compétences numériques et leur mode de construction, nous pouvons nous référer à une typologie de compétences élaborée par des chercheurs hollandais (Steyaert et De Haan, 2001), reprise et complétée par la suite par d’autres auteurs (Vendramin et Valenduc, 2003, Van Dijk, 2005). Ceux-ci distinguent trois niveaux de compétences numériques : les compétences instrumentales, structurelles (ou informationnelles) et stratégiques.  Les compétences structurelles ou informationnelles concernent la nouvelle façon d’entrer dans les contenus en ligne, c’est-à-dire de chercher, sélectionner, comprendre, évaluer, traiter l’information. Alors que l’informatique a toujours nécessité des compétences instrumentales, les compétences informationnelles prennent toute leur importance avec le développement des contenus d’information et des services en ligne. Elles sont nécessaires pour utiliser les procédures de navigation, les moteurs de recherche, les blogs et forums de discussion, les services interactifs.  Les compétences instrumentales ont trait à la manipulation du matériel et des logiciels. Elles couvrent en premier lieu les compétences opérationnelles qui relèvent d’un savoir-faire de base. Les compétences instrumentales comprennent aussi bien les capacités techniques que les capacités de raisonnement pour faire face aux aléas techniques du quotidien. De nombreux programmes de formation et de sensibilisation aux TIC se focalisent sur ces compétences instrumentales. C’est le premier niveau d’acquisition, le passage obligé, celui le plus souvent dispensé à des publics fragilisés : demandeurs d’emploi, migrants, seniors, jeunes en difficulté. Ainsi en 2013, faisant le constat que 87% des employeurs utilisent les sites internet pour recruter, Pole Emploi s’est attaché à former 250.000 demandeurs d’emploi à l’usage d’internet. Par ailleurs, l’agence a développé des partenariats locaux avec des acteurs de la lutte contre la fracture numérique, comme le réseau Cyber-base de la Caisse des Dépôts ou encore le réseau des Espaces Publics Numériques (EPN). Ces lieux proposent des accès à internet, ainsi qu’un accompagnement pour faciliter l’appropriation des technologies et des usages liés à internet, dont la recherche d’emploi en ligne.
  • 42. 42 Van Dijk (2005) a introduit une distinction entre les compétences informationnelles formelles et substantielles. Les premières sont relatives au format, les secondes au contenu de l’information.  Les compétences stratégiques concernent l’aptitude à utiliser l’information de manière pertinente, éthique et proactive, à lui donner du sens dans un contexte et à prendre des décisions éclairées en vue d’agir sur son environnement. Ces compétences, comme les compétences informationnelles, ne voient pas le jour avec le numérique ; leur besoin se faisait déjà sentir avec les médias écrits et audiovisuels, mais les médias interactifs en ligne en accentuent l’importance et l’urgence de les maîtriser. Les auteurs s’entendent pour établir une hiérarchie des compétences numériques : les compétences instrumentales sont une base à la construction des compétences informationnelles, qui soutiennent, à leur tour, les compétences stratégiques. L’environnement professionnel – les collègues, les outils de travail et leur contexte d’utilisation – joue un rôle prépondérant dans l’acquisition des 3 catégories de compétences. L’utilisation des TIC au travail favorise incontestablement l’acquisition et le développement des compétences instrumentales. Les compétences structurelles dépendent davantage du type de métier exercé. Quant aux compétences stratégiques, elles sont liées à la marge d’autonomie et d’initiative laissée au collaborateur. Actuellement l’enseignement et la formation professionnelle se focalisent beaucoup sur les compétences instrumentales, au risque de négliger les autres compétences, qui jouent pourtant un rôle clé dans l’activation des usages. Le challenge de l’éducation et de la formation consiste à se projeter au-delà des compétences techniques pour ancrer les compétences structurelles et stratégiques, fondement d’une appropriation efficace et durable des TIC. Tout usager, qu’il soit novice ou expert, est exposé au risque de perdre son niveau de maîtrise des TIC en raison de l’évolution continuelle des technologies. Tout usager est donc par nature une victime potentielle de la fracture numérique dynamique. Pour la surmonter, il convient de produire un effort d’adaptation. Selon les individus, cet effort peut-être constant ou erratique au gré des circonstances, des besoins et des compétences qui le motivent. Il s’agit donc d’un processus itératif fait de décrochages et de rattrapages continuels. Parmi les compétences formelles, l’auteur cite notamment : - la capacité de comprendre la structure des fichiers d’un ordinateur, d’un site web ou d’une compilation de musique ou d’images ; - la compréhension de l’architecture d’un site web ; - la capacité de maîtriser la structure des liens dans un hypertexte ; - la compréhension de la présentation d’une page multimédia ; - la capacité de maîtriser la fragmentation des sources d’information, réparties dans un grand nombre de sites ; - la maîtrise de l’obsolescence et du renouvellement rapides des sources d’information ; - enfin, l’omniprésence de l’anglais. Quant aux compétences informationnelles dites substantielles, elles consistent à apprendre : - comment chercher l’information en ligne, comment la sélectionner parmi une offre surabondante ; - comment éditer soi-même cette information ; - comment en évaluer la qualité ; - comment combiner des sources d’information qui proviennent de médias et d’auteurs de plus en plus diversifiés ; - comment établir des liens ou des associations entre les informations sélectionnées ; - comment arriver à formuler des généralisations.
  • 43. 43 Et c’est là qu’entrent en scène les compétences dites génériques, qui permettent à l’usager de traverser les barrières des applications et des matériels, quelles que soient les situations d’usages. Ces compétences plus transversales n’entrent pas dans le champ exclusif des compétences numériques. Elles font écho à la notion « d’apprendre à apprendre », ce qui permet à l’usager de se prendre en main et de se former pour maintenir son portefeuille de compétences et son employabilité. Examinons à présent deux types de fractures numériques observées en entreprise : la fracture professionnelle et la fracture générationnelle. > Le risque d’exclusion numérique en milieu professionnel Si les inégalités numériques dans la société se posent essentiellement en termes d’accès, les inégalités numériques au travail, où l’environnement technologique est plus diversifié, reposent sur la typologie des emplois exercés. Les métiers intellectuels ou administratifs ont un degré de familiarité plus important avec les TIC que l’ouvrier posté sur une chaîne de production ou l’hôtesse de caisse en supermarché. Travailler avec internet présuppose un usage intensif de l’information ou un besoin régulier de communication sous forme électronique. Valenduc (2007) établit une classification en 5 catégories de métiers : 1. Les professionnels des TIC > exemples : les informaticiens, les spécialistes de l’internet, du multimédia et des services en ligne, ceux qui développent des applications spécialisées des TIC. Pour eux, les compétences instrumentales constituent le cœur du métier, même si le besoin en compétences non techniques s’impose de plus en plus. 2. Les métiers imprégnés d’informatique et de réseaux dans lesquels les TIC sont devenues une composante indissociable du procédé, du produit ou du service > exemples : la production d’énergie, l’industrie chimique, l’imprimerie et l’édition, la logistique, les services financiers, les bureaux d’étude ou d’ingénierie, … Les compétences TIC viennent s’articuler autour des qualifications professionnelles traditionnelles ; elles sont acquises en formation initiale, continue ou sur le tas. 3. Les métiers dans lesquels les TIC ne sont pas au cœur du métier, mais peuvent constituer un support à valeur ajoutée utile en termes d’information, d’organisation ou de marketing, sans pour autant devenir un incontournable > exemples : les enseignants, les métiers manuels et artisanaux, le petit commerce spécialisé, … Il y a dans ces métiers une pression à évoluer vers l’ordinateur et internet, qui peut venir des collègues, des clients, du réseau de relations. 4. Les métiers dont l’organisation est profondément transformée par les TIC, mais sans que la majorité des salariés ne soient pour autant confrontés au besoin d’acquérir des compétences TIC > exemples : la grande distribution, les transports, les chaînes de montage, la manutention … Dans ces métiers, une familiarisation de base avec les TIC est souvent suffisante. Elle ne donne pas nécessairement toutes les clés pour devenir un utilisateur autonome dans le cadre domestique. 5. Les métiers à l’écart des TIC, où celles-ci ne jouent pas de rôle important dans le changement organisationnel > exemples : les services aux personnes, le nettoyage, les emplois peu qualifiés dans l’industrie ou le secteur public ... Ici, l’initiation aux TIC ne relève que d’un intérêt et d’une démarche individuels dans un contexte privé où les ressources du réseau de relations sont souvent moins pertinentes.