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  2. 91 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) Ahmed M’CHAREK « CITÉS » ET ROUTES DE LA THUSCA (RÉGION DE MACTARIS ET ZAMA REGIA) ENQUÊTE DE GÉOGRAPHIE HISTORIQUE ET ESSAI DE CARTOGRAPHIE1 Introduction Il m’a été donné en 1999 de publier – en hommage à P. Salama2 – les résultats d’une enquête consacrée – essentiellement – à la délimitation du pagus Thuscae qui regroupait autour de Mactaris (Maktar) sous le Haut-Empire une cinquantaine de « cités » (ou un peu moins si l’on tient compte du statut de civitas libera qui était celui de Zama Regia ; voire de celui d’Aggar ou Agger (Henchir sidi Amara) identifiable à mon avis avec l’oppidum liberum Aggaritanum ou Accharitanum mentionné par Pline l’Ancien)3 . La localisation de la Thusca doit beaucoup au fouilleur de Maktar, mon Maître G. C. Picard, qui avait compris que la réunion en un seul pagus (ou circonscription) de la Thusca numide avec le pays de Gunzuzi situé à l’intérieur de la Fossa Regia impliquait 1) Il m’est agréable de remercier vivement mon ami Lotfi Naddari pour l’aide qu’il m’a apportée dans la saisie informatique de ce texte et de la carte de la Thusca qui l’accompagne. 2) McharekA.,« DeZamaàKairouan :laThuscaetlaGamonia »,dans« Frontièresetlimitesgéographiques de l’Afrique du Nord antique. Hommage à Pierre Salama. Textes réunis par Lepelley Cl. et Dupuis X., publications de la Sorbonne, 1999, p. 139-183 (voir : carte du « secteur central de la Thusca » donnée en annexe de cette étude). 3) Dans une communication présentée en décembre 2016 (dans le cadre du colloque organisé à Tunis par le médiéviste Mohammed Hassen sur Les migrations au Maghreb à travers l’Histoire), j’ai évoqué l’alliance entre Grégoire, le dernier gouverneur byzantin en Afrique, et les Gétules Zarenses identifiables avec les futurs Djaraoua, tribu de la Kahina et fraction dirigeante zénète au VIIe siècle). À cette occasion, j’ai essayé de montrer que quatre localités peuplées de Zarenses Djaraoua) ou d’Aggarenses / Accharenses (Aggāra ou Accāra) furent fondées sous les Byzantins en application d’une alliance militaire entre les deux parties (foedus). Toutes ces localités se situaient sur « la route des montagnes » entre Aggar (Henchir sidi Amara) et la future Kairouan (dont le nom antique arabisé n’est à l’origine que Garawen, ethnonyme libyque désignant les Berbères Djaraoua). Ces mêmes fondations tardives s’inscrivent dans une vieille tradition d’alliance militaire entre les Gétules et les Romains, tradition qui remonte à Marius et à César. Et l’oppidum liberum Aggaritanum ou Accharitanum mentionné par Pline l’Ancien, serait selon moi, identifiable avec Aggar / Agger (Henchir sidi Amara) et attribuable à César.
  3. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 92 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) que les deux territoires en question étaient nécessairement contigus sous le Haut- Empire. D’où en 1966, un premier essai de cartographie montrant un territoire de la Thusca qui s’étend autour de Mactaris à l’ouest et en direction de la Fossa Regia à l’Est4 . Pour ma part, j’ai cherché à apporter des précisions à cette première délimitation au niveau de deux secteurs : - au Nord-Ouest, j’ai travaillé sur l’évolution du territoire géré à partir de Zama Regia (cité identifiable déjà à cette date, sans grand risque d’erreur, avec Henchir Jâma). Onsaitmaintenantqu’unedécouverteépigraphiqueestvenueconfirmerdéfinitivement cette localisation5 . Deux territoires sont ainsi distingués autour de Zama Regia depuis César : l’un correspond au territoire municipal de la cité qui s’étend sur le versant oriental du Djebel Messouge (depuis la « borne de Micipsa » érigée au sommet du massif montagneux en 127 av. J.-C.) et couvre la plaine de Siliana (ancienne plaine de Zama Regia) ; l’autre territoire, de caractère domanial, s’étend à l’ouest de la dite-borne et couvre la plaine d’es-Sers (correspondant depuis Auguste à la pertica de la colonia Augusta Assuras prolongée au nord par le reste des Regiae de Juba confisquées en 46 av. J.-C.)6 . - Le second secteur de la Thusca pour lequel j’ai cherché à apporter des précisions se trouve au sud des villes de Mactaris, Chusira et Agger ; il s’étend sur une région géographique définie par le bassin versant de l’oued Marguellil (région à vocation domaniale appelée Gamonia dans les sources médiévales). Une série de bornes marquait la limite méridionale de la Thusca avec un domaine sénatorial voisin d’Agger et avec des terres impériales de caractère steppique qui s’étendaient dans le nord de la Gamonia)7 . Sur la carte de la Thusca romaine8 que je donne ici la localisation est certes encore approximative à l’Est où la limite retenue laisse au dehors l’importante cité de Cululi (Ain Jaloula) qui fut promue au rang de municipe sous Hadrien ; et il en est de même pour la cité récemment localisée de Thambai (ou Thambeis) suite à la découverte sur le site de Henchir Nebhana d’une dédicace latine mentionnant le municipium Aelium Thambaiensis9 . La même incertitude -et pour la même raison- demeure au sujet de la 4) Picard (G.-C.), « L’administration territoriale de Carthage », Mélanges Piganiol, III, 1966, p. 1257- 1262 (voir carte, p. 1262). 5) Inscription trouvée par Ferjaoui (A.) et où on lit « Zamen[ses] Reg[ii] » (= Année Epigraphique, 2002, 1608). 6) Mcharek (A.), dans Hommage à P. Salama, 1999, p. 145- 152 ; ibid., p. 141 : fig. 1, carte du « Secteur central de la Thusca des cités ». 7) Id., Ibid. , p. 141: fig. 1 : carte du “Secteur central de la Thusca des cités” ; et p. 158 sq. , fig. 3 (carte de la Gamonia médiévale). 8) Voir infra, p. 33, fig. 1 : carte des « cités » et routes de la Thusca romaine et, en annexe à la fin de cet ouvrage : la même carte en format plus grand, lisible sur papier. 9) Aounallah (S.) et alii, dans Africa 23, p. 73-79. L’adjectif ethnique Thambaiensis correspond à mon avis au toponyme libyque Thambai dont les parallèles sont : Bagaiensis pour Bagai et Zaraiensis pour Zarai (voir : listes épiscopales africaines recensées par S. Lancel dans Les Actes de la Conférence de Carthage en 411, IV, 1991, où l’adjectif l’ethnique en question peut être donné aussi sous la forme Thambitanus construit sur Thambeis). Dans les sources arabes Bagai devient « Baghaia » et Zarai devient « Zaraia ». Le toponyme Thambai est construit sur un ethnonyme libyque bien documenté épigraphiquement, dont la base lexicale est TNB (cf. Sfaxi Intissar, Contribution à la connaissance de la langue libyque. L’apport de l’onomastique, Thèse de doctorat préparée sous la direction de S. Chaker, soutenue à Aix- en- Provence le 15-11-2016, p. 322).
  4. Ahmed MCHAREK 93 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) cité d’Althiburos (Henchir el- Medeina, actuellement en cours de fouilles) que j’hésite à compter parmi les villes de la Thusca romaine ; et ce en dépit de la grande proximité culturelle et institutionnelle avec Mactaris numide et romaine (peuplement numide enrichi par l’émigration punique, institution des trois suffètes, forte punicisation culturelle et parenté religieuse et artistique illustrée par les stèles figurées…). En revanche, les limites nord et sud de la Thusca romaine me paraissent déjà satisfaisantes. En effet, il apparaît clairement que le pagus Thuscae est limitrophe au nord du pays de Gunzuzi correspondant en gros à la vallée de l’oued Meliane comme l’a montré Fathia Bourghida10 , de la pertica de la colonia Iulia Karthago, du domaine impérial de la Turris rutunda et de la pertica de la colonia Augusta Assuras. Du côté sud, on voit aisément le passage du pays tellien des cités de la Thusca à celui du monde steppique, tribal et domanial qui s’étend au sud des villes d’Agger, Chusira, Mactaris et Mididi. Il apparaît ainsi que - pour l’essentiel - la localisation approximative de la Thusca romaine envisagée par G. C. Picard s’avère en gros acceptable à la lumière des progrès récents de la recherche ; sauf en ce qui la localisation des deux villes qu’il a placées sur sa carte publiée en 1966, en l’occurrence Zama Regia à l’extérieur et Furnos Maius à l’intérieur. Nous savons aujourd’hui que Zama Regia fut le véritable chef-lieu de la Thusca numide, même si elle a sans doute échappé au contrôle du préfet des cités en résidence à Mactaris sous le Haut-Empire en raison de son statut de cité libre. Quant à Furnos Maius (Henchir Ain Fourna), elle se trouvait assurément à l’intérieur de la Fossa Regia et comptait parmi les principales cités du pagus Gunzuzi. Pour des considérations historiques et pratiques, j’ai estimé utile de distinguer deux régions individualisées au sein de la vaste circonscription de la Thusca : une Thusca orientale et une Thusca occidentale séparées par l’oued Ouzafa (l’antique flumen Vzappa, sur lequel s’élevait à Ksour Abdelmalek la cité homonyme d’Vzappa) ; un cours d’eau qui prend son cours à l’ouest de Maktar dans les montagnes de Souk el- Jomâa, contourne Maktar par le sud et passe à peu de distance à l’est de la ville moderne de Siliana, pour aller se déverser dans le Bagrada (l’oued Mejrada) dont il est l’affluent, non loin de Testour (l’antique Tichilla). Mon élève Hanen Abda a consacré sa recherche doctorale à l’un des secteurs du pagus Thuscae, et en octobre 2016, elle a soutenu à Paris I- Sorbonne (en co-tutelle avec Michel Christol) une thèse intitulée « Cités et grands domaines de la Thusca orientale à l’époque romaine », volumes I et II, où elle a pu recenser une douzaine de cités plus ou moins identifiées (ouvrage désormais cité : Abda Hanen, Thèse, 2016). I- « Cités » identifiées de la Thusca romaine A- Quinze « cités » dans la Thusca orientale 1- Apud Asnam ? (Henchir es-Snam), cf. A.A. T., II, f. Dj. Bou Dabouss, 69 ; Mcharek (A.), dans Cahiers de Tunisie, 165, 3e trimestre 1993, p. 19-27 (station sur la voie Agger- Cululi, enceinte d’époque antique avec porte monumentale, entablement d’un édifice classique romain, sculpture en relief d’époque romaine). 10) Voir dans ce même volume : Bourghida- Mcharek (F.), « Du pagus Gunzuzi aux Knaziz ».
  5. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 94 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) 2- Aggar ou Agger (Henchir sidi Amara), cf. A. A. T., II, f. 30 (Mactar), 262-263 ; Carte des routes et des cités de l’est de l’Africa à la fin de l’Antiquité, d’après le tracé de Pierre Salama, éd. J. Desanges et altri, Turnhut, 2010 [désormais citée : Carte Salama 2, 2010], p. 101-102 ; Abda Hanen, Thèse, Volume I, 2016, p. 23- 62 (prédominance de l’onomastique des quirites au second siècle apr. J.-C. ; actes d’évergétisme municipal sous le règne des Sévères : conseil des décurions et trésor de la cité attestés en 196 apr. J.-C. ; municipe en 232 apr. J.-C. ; colonie honoraire au IVe siècle). 3- Chusira (Kesra), cf. A.A.T., II, f. 30 (Mactar), 234 ; Carte Salama 2, 2010, p. 133- 134 ; Abda Hanen, Thèse, volume I, 2016, p. 63-81 (Chusira : statut de civitas en 71-72 apr. J.-C.). 4- Henchir Sejja (civitas anonyme), cf. A. A. T, II, f. 30 (Mactar), 68 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016, p. 195- 199 (CIL VIII, 23746 : acte d’évergétisme par décret des décurions, aux frais d’un flamine perpétuel). 5- Limisa (Ksar Lemsa), cf. A.A.T. au 1/100.000, f. 31 (Bou Dabouss), 5-6 ; Carte Salama 2, 2010, p. 165- 166 ; Abda Hanen, Thèse, volume I, 2016, p. 82-156 (Limisa : civitas sous Hadrien et jusqu’ en 204-205 avec magistrats et sufètes; municipe entre 198 et 208). 6- Manange (Henchir Faroha ?), cf. A.A.T., II, f. 30 (Mactar), 251 ; Carte Salama 2,2010,p. 169-170 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016,p. 157-160 (en 210, la c(ivitas) M(anange) a un conseil de décurions et un trésor municipal). 7- [Ma]rag(ui) Sara ( Henchir Chār), cf. A.A.T., II, f. 30 (Mactar), 74 ; Carte Salama 2, 2010, p. 170 ; Abda Hanen, Thèse, volume I, 2016, p. 161-166 (sous Septime Sévère, la cité possède un conseil de décurions et un trésor municipal). 8- Muzuca (Henchir Karachoun), cf. A.A.T., II, f. 43 (Djebibina), 28-29 ; Carte Salama 2, 2010, p. 184- 185 ; Abda Hanen, Thèse, volume I, 2016, p. 170-189 (Muzuca : civitas sous Antonin le Pieux, municipium sous Caracalla et encore sous Constance Chlore et Constantin). 9- Henchir Besra : Vicus de Muzuca ?, cf. A. A. T., II, f. 31 (Dj. Bou Dabouss), 33 ; Carte Salama 2, 2010, p. 184 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016, p. 167-169. 10- SE[---] civitas (Henchir ed- Damous), cf. A.A.T., II, f. 31 (Djebel Bou Dabouss), 30 ; Carte Salama 2, p. 205 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016, p. 190- 194 (cité sufétale entre 145 et 161 apr. J.-C.). 11- Henchir Sejja (cité anonyme), cf. A.A.T., II, f. 30 (Mactar), 68 ; Abda Hanen, Thése, 2016, p. 195-1999 (C.I.L, VIII, 23746 : un flamine perpétuel a fait élever un portique et des colonnes; dédicace faite par décret des décurions). Il y a certes une proximité linguistique et phonétique entre le nom Sejja et celui de l’antique Seggo, mais cette localité située trop à l’est ne peut en aucun cas correspondre à la station homonyme de la Table de Peutinger. Tout au plus, peut-on supposer l’existence dans la Thusca de deux localités portant le même nom, à l’instar du cas de Maraci et Maragui Sara. 12- Sivalitana civitas (sidi Amor Djedidi), cf. A. A. T., II, f. 31 (Djebel Bou Dabouss), 14-15 ; Carte Salama 2, 2010, p. 214 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016, p. 200- 205 (civitas géréepardeuxmagistratssousAntoninlePieux).
  6. Ahmed MCHAREK 95 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) 13- Thicilila (site archéologique encore indéterminé, mais on sait que la cité s’élevait sur la rive droite de l’oued Siliana, au niveau de cette ville) ; cf. A. A. T., II, f. 25 (Jâma);AbdaHanen,Thèse,vol.I,2016, p.206-208(Ferjaoui Ahmed,dansC.R.A.I.,2001, p. 862-863 ; AE, 2001, 2077 : dédicace à Mercure en 208 par la civitas Thicililensis). 14- Vazi Sarra (Henchir Bez), cf. A. A. T., II, f. 30 (Mactar), 107 ; Carte Salama 2, 2010, p. 280- 281 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016, p. 216-231 (Vazi Sarra : civitas gérée par des magistri et un conseil de décurions sous Commode ; undecimprimi attestés en 212). Les listes épiscopales mentionnent une localité de Marcelliana en tant que dépendance de l’évêché de Vazi Sarra (probablement dans les environs de cette cité), cf. Lancel (S.), Actes de la conférence de Carthage, IV, 1991, p. 1416. 15- Vrusi (Henchir Sodga), cf. A. A. T., II, f. 30 (Mactar), 110 ; Carte Salama 2, 2010, p. 293- 294 ; Abda Hanen, Thèse, vol. I, 2016, p. 209-215 (Vrusi : civitas sous Commode avec conseil de décurions). Par ailleurs, dans la thèse de mon élève Arij Limam consacrée aux « Stèles et reliefs à personnages d’époque romaine découverts en Tunisie centrale (Thusca et environs) » soutenue le 11 avril 2017 à la Faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis, il y a une présentation rapide de plusieurs sites archéologiques de la Thusca occidentale. La documentation archéologique mise à contribution dans cette thèse (plus de 500 objets sculptés en relief) est le produit des ateliers de sculptures de la partie occidentale de la Thusca,plusprécisémentdusecteurdélimitéparlescitésdeMactarisetsonvicusMacota (Maghraoua), Mididi (Henchir Midid) et son vicus anonyme appelé aujourd’hui« Sebâa Rgoud », Thigibba (Hammam Zouakra) et Vlules (Ellès)11 . B- Quinze « cités » dans la Thusca occidentale 1- A[utipsida ?] (Ksar Mdouja = Ain Mdhoja) :cf. A. A. T., au 1/100. 000, f. 30 (Mactar), 133; Carte Salama 2, 2010, (CIL,VIII, 23658: civitas A[utipsida? vers 290- 294]) ; Cherif (Ali), « Données nouvelles sur l’histoire d’une cité méconnue du Haut-Tell tunisien : la civitas [--- ]/ Ain M’dhoja (région de Makhtar) », Antiquités Africaines, 51, 2015, p. 45-63 (désormais cité : Cherif (A.), dans Ant. Afr., 51, 20150). 2- Avula ? (Ksar Guennara) : cf. A. A. T., au 1/100.000. f. 30 (Mactar), 48 ; Cherif (A.), dans Ant. Afr., 51, 2015, p. 46. 3- Bagat ? (Henchir Ghayadha) : cf. A.A.T., au 1/100.000. f. 30 (Mactar), 18. Il s’agit probablement d’une cité pérégrine au Ier siècle ou au début du second apr. J.-C. Voir dans Mcharek (A.), Jaidi (H.), Baklouti (H.) et Sehili (S.), « Recherches archéologiques à Henchir Ghayadha/ Bagat ? (Tunisie). Enquête archéologique et synthèse historique ». Antiquités Aficaines, 44, 2008, p. 111- 167 (voir, notamment : p. 116-117). 4- Cit[---] civitas (sidi Ahmed al-Hachani), cf. A. A. T., au 1/100.000, f. 29 (Ksour), 121 ; Carte Salama 2, 2010, p. 137 ( CIL, VIII, 27818 : « inscription du Bas-Empire 11) Sur l’importance de la collection sculptée produite dans cette région (lieu de provenance des fameuses stèlesnumidesdites « stèlesdelaGhorfa »),voir :Mcharek(A.),«Àproposdelagrandedivinitéféminine sur les stèles figurées de la Thusca occidentale (région de Mactaris et Zama Regia) », sous-presse dans les Actes du colloque « Du culte aux sanctuaires. Architecture religieuse dans l’Afrique romaine et byzantine », organisé à Paris les 18-19 avril 2013 par F. Baratte et V. Brouquier- Reddé. Pour la définition du concept géographique de la « Thusca occidentale »; voir Ibid. note 2 et cartes 1 et 2.
  7. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 96 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) commémorant la restauration de plusieurs monuments » ; CIL, VIII, 27818 : mention d’un curator reipublicae). 5- Cuttilula (Ain Zouza), cf. A. A. T., au 1/100.000, f. 30 (Mactar), 55-56 ; Carte Salama 2,2010, p. 141 : plusieurs dédicaces latines dont l’une, d’époque sévérienne (publiée oralement par A. Beschaouch, donne le nom d’un curator reipublicae et mentionne les cives Cuttilulenses) ; édifices dont une porte, un fortin tardif, un mausolée et une double-enceinte). 6- Macota (Maghrawa), cf. A.A.T., au 1/100.000, f. 30 (Mactar), 125 ; Carte Salama 2, 2010, p. 166-167 (au Ier siècle, cette localité était un vicus de Mactaris, voir : Mcharek (A,), dans Antiquités Africaines, 1997, p. 119-127). 7- Mactaris (Maktar), cf. A.A.T., f. 30 (Mactar), 186 ; Carte Salama 2, 2010, p. 167- 168 ; Mcharek A., dans Hommage Salama, 1999, p. 143 sq.; notice « Mactar », dans Dictionnaire de l’Antiquité, éd. J. Leclant, Puf., 2005, p. 1313-1314 (Mactaris : civitas au Ier siècle, obtention du droit latin sous Hadrien, colonie honoraire sous Marc -Aurèle). 8- Mididi (Henchir Medid), cf., A. A. T., au 1/100.000, f. 36 (el-Ala), 4 ; Carte Salama 2, 2010, p. 178 (Mididi, civitas attestée par l’épigraphie; essor urbain et probable statut de municipe sous Dioclétien). 9- Seggo ? (Henchir el- Haddad), cf. A.A.T., au 1/100.000, f. 30 (Mactar), 13 ; Cherif (A.), Ant. Afr., 51, 2015, 2015, p. 46, fig. 1 (station de la Table de Peutinger). 10- Thigibba (Hammam Zouakra), cf. A. A. A., au 1/100.000, f. 30 (Mactar), 127 ; Carte Salama 2, 2010, p. 246-247 (plusieurs édifices : mégalithes, arc de triomphe, mausolées et enceinte). 11- Tucca Terebentina (Henchir Dougga), cf. A. A. T., au 1/100.000, f. 29 (Ksour), 123 ; Carte Salama 2, 2010, p. 272 (essor urbain tardif et probable statut de cité sous Dioclétien : forum, édifice civil élevé par un flamine perpétuel, restauration de monuments publics). 12- Vlules ou Vlulis (Henchir Ellès), cf. A. A.T, au 1/100.000, f. 30 (Mactar), 121 ; Carte Salama 2, 2010, p. 289-290 (aucun édifice civique reconnu ; peut-être le centre d’un grand domaine). 13- Vzappa (Ksour Abdelmalek), cf. A. A. T., au 1/100.000,f. 30 (Mactar), 153 ; Carte Salama 2, 2010, p. 298-299 (civitas sous Caracalla ; municipe en 274). 14- Vicus Maracitanus (Ksar Toual Zouameul), cf., A. A. T., au 1/100.000, f. 30 (Mactar), 32 ; Carte Salama 2, 2010, p. 282 (en 202 : dédicace à la triade capitoline et aux Sévères par les Vicani [Maracitani], citoyens romains dans une agglomération secondaire, vicus de la voisine Zama Regia). 15- Zama Regia (Henchir Jâma), cf. A. A. T., au 1/100.000, f. 25 (Jâma), 72 ; Carte Salama 2, 2010, p. 300- 301 (dernière résidence royale de Juba I, cité libre par un bienfait de Jules César, colonie honoraire d’Hadrien). Ainsi au total, il a existé dans la Thusca romaine –telle que délimitée actuellement- trente « cités » attestées par l’épigraphie latine essentiellement (toponymes antiques identifiés de manière satisfaisante, sauf pour quelques cas où les inscriptions sont incomplètes) : 15 dans la Thusca orientale et 15 dans la Thusca occidentale, sur un total de cinquante « poleis » mentionnées par Appien dans Libyca 68 au IIe siècle av. J.-C.
  8. Ahmed MCHAREK 97 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) On sait que sous le Haut-Empire romain, les inscriptions latines mentionnent un préfet des 64 cités du pagus Thuscae et Gunzuzi en 113 apr. J.-C. (A. Ep., 1963, 96) et seulement 62 cités en 158 pour le même pagus unifié (C.I.L., VIII, 23599). Entre les deux dates, deux cités ont échappé au contrôle du préfet en obtenant la promotion juridique ; l’une est Mactaris qui a obtenu le droit latin par un bienfait d’Hadrien (Beschaouch A., dans Bull. du Comité des Travaux hist., 1990-1992, p. 203-204), l’autre est sans doute l’une des cités du pagus Gunzuzi ; probablement Abthugnos (Henchir Souar) devenue municipe sous le même empereur (Inscr. Lat. d’Afrique, 1923, 788). Pour le reste, l’enquête sur le terrain devrait se poursuivre dans une région où l’Atlas Archéologique a recensé plus de 300 « ruines romaines » et où de nombreux sites archéologiques importants attendent d’être fouillés et pourraient bien livrer, à plus ou moins long terme, les noms des localités qui s’y élevaient ; on peut en citer une dizaine dans la Thusca orientale (Henchir el-Hammam, sidi Khalifa, Henchir Msireb, Henchir el-Belda, Henchir el-Mesmar, Henchir el-Serdouk, Henchir Mezrir, Henchir Abiodh, Henchir Omrane et Henchir Marched) et neuf dans la Thusca occidentale (Henchir Jabbara, Gabr el-Ghoul, sidi Bou Zouitina, Henchir Jebara, Henchir Soualem, Tazeghrart, Sebâa Biar, Ain Fdhil et sidi Ali Mediouni). C- « Cités » de la Thusca : une romanisation juridique limitée et tardive Le bilan que nous venons de dresser montre à l’évidence que les mots « civitates » et « poleis » employés dans les sources historiques relatives à la Thusca numide puis romaine ont besoin d’être nuancés. Dans l’état actuel de la documentation disponible, on peut retenir à ce propos les données suivantes : - Six cités seulement ont pu accéder au droit romain (le cas de Mididi n’étant pas assuré). On peut retenir, en effet, une promotion par étapes (jusqu’au statut de colonie honoraire) pour Zama Regia sous Hadrien, Mactaris sous Marc Aurèle, Agger à une époque plus tardive, ainsi qu’une promotion au statut de municipe pour trois autres cités pérégrines : Limisa et Muzuca (sous les Sévères), et Vzappa (vers 274 au plus tard). Au plan de l’essor urbanistique, les six villes en question cités sont celles qui ont réussi à se doter d’un véritable centre civique autour du forum romain12 , avec une enceinte délimitant un espace urbain de plusieurs dizaines d’hectares (les plus importantes étant Zama Regia avec plus de 70 ha et Mactaris avec 50 ha) ; tandis que pour les villes moyennes qui sont les plus nombreuses, la superficie intra-muros est en moyenne de 10 ha environ (Cuttilula avec une dizaine d’ha, Bagat avec huit ha seulement). - Quinze localités dotées de l’organisation municipale sont de statut pérégrin (civitates). Dans cette série, les plus anciennement attestées sont Chusira (en 71-72 apr. J.–C.) quigardelemêmestatutpérégrinjusqu’en 193-194aumoins etBagatconnueseulement par une inscription néo-punique. Au second siècle sont attestées trois autres cités pérégrines (SE--- civitas, Sivali(s) et Vazi Sarra) ; toutes les autres cités de droit pérégrin 12) Ajoutons qu’un forum romain est attesté également à Mididi, Thigibba , Cuttilula et vicus Maracitanus.
  9. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 98 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) sont tardives (attestées sous les Sévères, au IIIe ou au IVe siècle) : il s’agit d’Au[tipsida?] , CIT[---] civitas, Cuttilula, Manange, [Mar]arg(ui) Sara, Mididi, , Thicilila, Thigibba et Tucca Terebentina, Ain Sejja. D- Quelques toponymes identifiés signalent des communautés secondaires Il s’agit de vici ou de castella (comme Macota, Vicus Maracitanus), de stations routières attestées par la Table de Peutinger (Avula et Seggo) ou encore d’une bourgade signalée par saint Augustin (Apud Asnam). - Conclusions relatives aux « cités » de la Thusca À la suite de J. Desanges qui a écrit à propos de Capsa (centre des Capsitani) que les « civitates » africaines mentionnées par Pline l’Ancien peuvent être considérées tout aussi bien comme des «nationes»13 , on pourrait conclure- au vu du bilan de la municipalisation ci-dessus dressé- que le plus grand nombre des « cités » de la Thusca au Ier siècle après J.-C. n’étaient encore que de simples centres de regroupement pour des peuplades en voie de sédentarisation. Dans cette région historique, on peut reconnaître de nombreux ethnonymes libyques à travers la toponymie. Il en est ainsi par exemple pour Aggar/ Agger, nom d’origine gétule, deux fois attesté en Byzacène et désignant au Xe siècle une montagne du Hodna habitée par la tribu Zénète des Aggara / Accara14 . Des ethnonymes libyques se cachent aussi derrière nombre de toponymes de la Thusca, comme par exemple pour Limisa15 , celui des « Limsen » porté au XIIe siècle selon un chroniqueur berbère (al-Baydaq)16 par une communauté tribale qui donnera son nom à la médiévale Tilimsen). On peut compléter la liste en ajoutant Mididi (cité des Mididii) et Macota17 (probable centre des Micatanes)18 . Pays de tradition tribale à l’origine, la Thusca numide a connu la même lenteur dans le processus de romanisation que d’autres espaces tribaux plus ou moins comparables ; ce fut le cas par exemple du pays des Gétules Vamacures dans les Nememcha19 , où une enquête 13) Desanges (J.), Notice « Capsitani », dans Encyclopédie Berbère, 12, 1993, p. 1770. Voir aussi : Id. dans Commentaire du livre V de Pline l’Ancien. Histoire Naturelle, 29-30 (« civitates » = peuplades). 14) Mcharek (A.), « À propos du nom Aggar et des aires de peuplement « Accara » de l’Antiquité à nos jours », Actes du troisième colloque international de Sousse 2016 [1917], p. 35-49. 15) Limisa qui est la cité des Limisenses (CIL, VIII, 12036 ; Z. Ben Abdallah Ben Zina, dans Antiq. Afr., 40- 41, 2004-2005, p. 29) comptait parmi ses citoyens un L(ucius) Limisius Rogatianus dont le gentilice est construit sur le nom des Limisii. 16) Cf. Al-Baydaq (Abu Bakar b. Ali al- Sanhadji), Kitab akhbar al-Mahdi b. Toumert, Alger, 1975, p. 70 (« Limsat », branche de Rakraka , de la confédération des Masmouda). 17) J’ai en projet de reprendre cette question des toponymes/ethnonymes libyques de la Thusca dans une enquête que je consacre aux Zarenses (Djaraoua). 18) Cf. Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XXVI, 23. Les Micatanes sont une peuplade numide qui a profité de la guerre des mercenaires (240-237 av. J.- C.) pour se soulever contre Carthage ; Amilcar Barca s’est chargé de les mater. Selon G. Camps, le territoire des Micatanes serait à situer dans les montagnes de la Tunisie occidentale (Libyca, VIII, 1960, p. 246- 247 ; 252). 19) Cf. M’Charek (A.), « Continuité de l’ethnonymie, continuité du peuplement au Maghreb de l’Antiquité à nos jours : le cas des Avares (Haouara) et des Dianenses ou Zanenses (Zanata) », C. R. A. I., Paris, 2015-1, p. 452-453 (Vamacures Maiores).
  10. Ahmed MCHAREK 99 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) pertinente due à F. Jacques a montré un retard comparable dans la municipalisation et la romanisation20 . Ces données historiques permettent de mieux comprendre le choix romain de la « préfecture des cités » pour l’administration de la Thusca. Occupant un secteur central de l’actuelle dorsale tunisienne, ce canton montagneux constitue au début de la conquête romaine qui remonte ici à 46 av. J.-C. un espace encore insuffisamment urbanisé malgré l’influence indéniable de Zama Regia, chef-lieu régional à l’époque numide et l’essor récent de Mactaris, lieu de résidence du praefectus pagi Thuscae et Gunzuzi. Celui-ci a reçu la tâche d’administrer – à l’instar des préfets de tribus- les multiples « civitates » qui gravitaient autour de Mactaris dans une région stratégique qui séparait, au cœur de la province d’Afrique, les colonies romaines de Carthage, Mustis et Assuras (situées au nord) des grandes tribus semi-nomades qui vivaient dans les steppes méridionales (Musulames et autres communautés gétules non totalement soumises jusqu’ au règne de Trajan). Mais, c’est surtout le réseau routier régional qui illustre le mieux la fonction hautement stratégique de la Thusca au cours des deux premiers siècles de domination romaine. II- Réseau routier de la Thusca romaine Diverses sources archéologiques, épigraphiques et littéraires permettent d’examiner le réseau routier de la Thusca antique ; mais les travaux de recherche consacrés à ce sujet sont peu nombreux et se limitent à quelques secteurs privilégiés21 . Dans la présente enquête globale, on tentera de restituer en premier lieu les grandes voies de circulation qui traversaient le district à l’époque romaine. On aura à suivre ensuite, à travers des massifs montagneux compartimentés et largement pénétrables, le réseau des voies régionales et secondaires reliant entre elles les multiples localités d’unerégiondensémenturbanisée.Unecartedes« cités »etroutesdelaThusca romaine servira à illustrer le rôle joué par le réseau routier dans le pagus Thuscae organisé 20) Jacques (F.), « Propriétés impériales et cités en Numidie méridionale », Cahiers du centre G. Glotz, III, 1992, p. 123-139. 21) L’Atlas archéologique de la Tunisie au 1/100.000e publié à Paris en 1920 (2e édition, 2e livraison) par Cagnat (R.) et Merlin (A.) (cité désormais : A.A.T, II) réunit l’essentiel des indications données par les voyageurs et explorateurs de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Les Brigades topographiques ont publiédesrapportsarchéologiquesoùsetrouventconsignéesdesobservationssurlesvoiesantiques ; trois de ces rapports concernent la région qui nous occupe : Toussaint, « Rapports archéologique sur la région de Maktar », B.A.C., 1988, p. 185-188 (cité désormais, Toussaint, Rapport) ; Cap. Foussard, « Exploration archéologique du terrain compris sur la carte au 1/50.000e de Maktar », B.A.C., 1923, p. 55 (cité désormais Foussard, Exploration) ; Cap. Jounard, « Observations sur les ruines contenues dans la feuille de Djebel Bargou et de la carte au 1/50.000e de Maktar », B.A.C., 1925, p.280 (désormais cité : Jounard, Observations). Une enquête effectuée sur le terrain par Poinssot (L.) et Lantier (R.) relative aux bornes milliaires de la voie de Mactaris à Chusira est publiée dans B.A.C., 1923, p. CXCII. Plus tard, des contributions touchant des sections limitées du réseau routier de la Thusca sont données par des auteurs qui avaient plus au moins pratiqué le terrain : cf. Poinssot (L.), « Zama », dans Rev. Afr., 1928, p. 165-193 ; Deroche (L.), « Les fouilles de Ksar Toual Zammel et la question de Zama », MEFRA, LX, 1948, p. 93-94 ; Picard (G.-C.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 16-19, carte p. 15, fig. 2 ; Barbery (J.), « Précisions sur quelques itinéraires routiers en Tunisie centrale et au Cap Bon, Cahiers de Tunisie, n° 131-132, 1985, p. 5-48, cartes : fig. 1 et fig. 8 (cité désormais Barbery, Quelques itinéraires) ; Ennaïfer (M.), Althiburos, 1976, p. 31-32 ; Ben Baaziz (S.), La vallée de l’oued el-H’tab, 2000, II, p. 70-83 ; Ferchiou (N.), « Recherches sur le cadre géographique et historique de la région de Zama », Africa, Nouvelles séries, Séances scientifiques II, Tunis, 2004, p. 185-209.
  11. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 100 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) autour de son chef-lieu Mactaris. Non seulement, celle-ci n’était pas une ville située à l’écart des grandes voies de circulation comme on le croyait généralement, mais elle constituait depuis le règne d’Auguste un nœud routier essentiel à l’échelle régionale et interprovinciale. 1- Les sources : variété et limites Malgré leur intérêt limité, les vestiges de « chaussées antiques » et de « ponts romains »22 confirmentlesdonnéesfourniesparlessourceslittérairesetépigraphiques. Les Brigades topographiques et quelques explorateurs ont souvent mentionné ces vestiges de routes d’époque romaine qui, à la fin du XIXe siècle, étaient sans doute plus faciles à repérer qu’aujourd’hui. Dans une enquête relativement récente, J. Barbery a pu reconnaître sur le terrain des tronçons de voies autour de Limisa et de Manange ; malheureusement, les techniques modernes de mise en valeur agricole, de plus en plus répanduesdanslarégion,necessentderéduireleschancesd’uneenquêtearchéologique systématique. Les sources écrites constituent l’essentiel de la documentation disponible ; et malgré leurs défauts23 , les Itinéraires antiques (Table de Peutinger24 et Itinéraire d’Antonin25 ) s’avèrent particulièrement précieux puisqu’ils permettent de restituer deux axes routiers de la Thusca qui sont des tronçons de voies interprovinciales. Mais ce sont surtout les inscriptions milliaires qui donnent les indications les plus directes et les plus significatives ; malheureusement leur nombre est encore relativement réduit : sur plus de deux mille bornes recensées par P. Salama26 , vingt-deux seulement proviennent de la Thusca. Sur ce total de 23 bornes, 19 proviennent du territoire municipal de Mactaris où elles jalonnaient quatre itinéraires rayonnant autour de la ville qui fut le chef-lieu du pagus Thuscae. Cette documentation couvre en revanche une période assez longue : la région a livré en effet une borne-limite portant une inscription neopunique datée du règne de Micipsa, une borne augustéenne découverte à sidi Ali Mediouni et un milliaire du temps d’Honorius27 ; ce dernier milliaire compte parmi les documents routiers les plus tardifs trouvés à ce jour en Afrique romaine. 2- Les grandes voies de circulation Trois parcours régionaux constituent des tronçons de voies importantes reliant entre elles les provinces de Proconsulaire et de Numidie. Il s’agit de la voie augustéenne 22) Cf. carte jointe : « Cités » et routes de la Thusca romaine (voir : à la fin de l’ouvrage le dépliant qui permet une lecture sur papier de la même carte). 23)Le principal défaut de ces itinéraires est sans doute celui de laisser de côté des voies bien connues par ailleurs. On doit donc les utiliser avec prudence, car non seulement on ignore leur fonction précise, mais ils comportent des erreurs et des omissions. Voir à ce propos : Salama P., Voies romaines, 1951, p. 16 ; Février P. A., Approches du Maghreb romain, I, 1989, p. 136-137. 24) La Table de Peutinger est une carte du monde romain recopiée au XIIIe siècle à partir d’un document carolingien, lui-même repris d’une source antique. Voir à ce sujet : Levi A. et M., Tabula Peutingeriana, Bologne, 1978 ; Idem., Itenaria Picta. Contributione allo studio della Tabula Peutingeriana, Rome, 1967 (avec reproduction des onze segments). Le document daterait de la 2e moitié du IVe siècle : cf. Gascou (J.), A.N.R.W., 11, 10, 2, p. 196-348). 25) L’Itinéraire Antonin dérive d’un document officiel de Caracalla complété à la fin du IIIe ou au IVe siècle (Carte Salama 2, 2010, p. 17). 26) Salama (P.), Bornes milliaires, 1987, (passim). 27) Salama (P.), Voies romaines d’Afrique du Nord, 1951, p. 17.
  12. Ahmed MCHAREK 101 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) Carthage-Ammaedara et de deux parcours attestés, l’un par la Table de Peutinger, l’autre par l’Itinéraire d’Antonin. - Voie Augustéenne Carthage-Ammaedara28 La découverte en 1989 d’une importante borne milliaire à sidi Ali Mediouni, à 8 km au sud-ouest de Maktar, a permis de restituer un itinéraire régional, tronçon d’une route impériale aménagée par la Troisième Légion Auguste, probablement entre 6 et 14 apr. J.-C. : la voie augustéenne Carthage-Ammaedara. Gravée sur une stèle à sommet arrondi, cette inscription routière29 constitue l’unique document épigraphique africain à donner au nominatif l’intitulé impérial d’Auguste vivant. On y lit en même temps le nom de la Legio Tertia Augusta donné au, également au nominatif. Imp(erator) Caesar/ Augustus / Legio (Tertia) Aug(usta)/ (Mille passuum). La borne indiquait le 1e mille sans doute à partir d’un poste militaire installé à Mediouni pour surveiller le défilé entre Jebel Barbrou et Jebel Skarna, l’un des passages stratégiques entre la steppe et le plateau de Maktar. Cette borne milliaire de haute époque atteste, pour la première fois en Afrique, l’existence d’une voie de pénétration30 militaire reliant Carthage, lieu de résidence du proconsul commandant de l’armée, à Ammaedara (Haïdra), nouvelle base de la Troisième Légion Auguste, à travers la vallée de l’oued Meliane et celle de l’oued Ouzafa. Bien qu’on ne puisse exclure l’existence hypothétique, à partir d’Vzappa, d’une bretelle31 évitant au besoin Maktar pour gagner directement Mediouni, il est désormais admis que Mactaris a été, dès le règne d’Auguste, une ville-étape importante sur une voie impériale plus directe et sans doute plus ancienne que la route Carthage-Theveste, mais considérée jusqu’ici comme étant tardive et secondaire. Trois colonnes milliaires tardives trouvées sur le plateau de Maktar montrent l’importance au Bas-empire de cette voie augustéenne qui sera appelée à l’époque hafside « Trik es-Soltan »32 ; la première33 indiquait le 2e mille sur l’itinéraire Mactaris-Mediouni, à un endroit situé à 3 km au sud de Maktar, sur la rive droite de l’oued Ouzafa, la seconde34 fut trouvée à Henchir el-Henza, au même endroit que la borne augustéenne, soit à 1,5 km environ à l’est de Mediouni ; malheureusement, l’inscription qu’elle porte est martelée et seule une lettre est encore lisible ; la troisième colonne milliaire35 , découverte à 3 km au nord de Maktar, sur la rive gauche de l’oued Ouzafa, indiquait le 2e mille sur la route Mactaris-Uzappa. Chronologiquement, les quatre inscriptions milliaires trouvées sur cette voie impériale couvrent une période allant d’Auguste à Valentinien. Au nord d’Vzappa, la voie continuait à suivre la rive gauche de l’oued qui prend le nom de Siliana au niveau de 28) Mcharek (A.), « Un itinéraire inédit dans la région de Maktar : tronçon de la voie augustéenne Carthage- Ammaedara », B.C.T.H., n. s., Afrique du Nord, fasc. 22, 1989, p. 153-167. 29) Ibid., p. 156-158, fig. 1 et 2. 30) Ibid., p. 166, carte B. 31) Ibid., p. 167 (Discussion). 32) L’appellation « Trik es Soltane » est attestée dans les sources médiévales et modernes. 33) CIL, VIII, 21971 (2e mille sur la route Mactaris-Mediouni : voir B.C.T.H., n. s., Afrique du Nord, fasc. 22, 1992, p. 155). Elle fut érigée sous Dioclétien et Maximien et réutilisée sous Valentinien. 34) BCTH, n. s., Afrique du Nord, fasc. 22, 1992, p. 162, fig. 3. 35) BCTH, 1954, p. 120 (Ier mille sur la route de Mactaris à Vzappa), une route qui porte les traces d’une réfection sous Trajan Dèce).
  13. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 102 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) Gabrel-Ghoul.Un« pontromain »dontlesvestigesontétérepérésparlesexplorateurs36 lui donnait passage dans un secteur de la vallée appelé « Bled El Ganntra » (canton du pont)37 . Entre l’oued Siliana et Saradi (Henchir Sehili), la route traversait le plateau ondulé du Bargou pour desservir Henchir Ouled Omrane, Vazi Sarra (Henchir Bez) et Aïn Zakkar (Marcelliana ?). Entre ces deux dernières localités, plusieurs traces de la voie antique sont signalées par les Brigades topographiques38 . Au Bas-Empire et plus tard sous les Byzantins, le tronçon de la voie augustéenne entre Saradi et Mediouni a dû retrouver toute sa valeur stratégique ; son parcours était jalonné par de nombreux fortins39 dont les vestiges sont encore debout : Aïn Zakkar, Vazi Sarra, Gabr-el-Ghoul, Henchir Jebara, ainsi qu’à la sortie nord de Mactaris dont la sortie sud était gardée par le fortin de Ksar Bou Fatha. L’itinéraire Saradi- Mediouni traverse en diagonale le territoire de la Thusca et constitue le tronçon central de la voie augustéenne Carthage-Ammaedara40 . L’existence de cette « pénétrante », l’une des plus anciennes routes aménagée par la Troisième Légion Auguste41 pour unir la capitale administrative à la base militaire installée au cœurdupaysdesMusulames,aétéretenueparP.Salama.L’éminentspécialistedesvoies romaines d’Afrique qui a certes souligné le rôle joué par la vallée de l’oued Meliane42 dès le règne d’Auguste et plus tard au Bas-Empire n’a pas envisagé la possibilité d’un itinéraire direct par Mactaris et Thala. Il a préféré faire passer la voie impériale à travers les plaines de Siliana et d’es-Sers par les stations d’Assuras et d’Althiburos43 . G. C. Picard n’a pas manqué, en revanche, de noter que l’itinéraire par l’oued Meliane et le plateau de Bargou était prolongé par une route antique empruntant la vallée de l’oued Ouzafa jusqu’à Mactaris et que la route en question était le principal accès44 de cette dernière ville. À partir de Mactaris, deux itinéraires joignaient Thala et Ammaedara : - Un premier parcours qui semble avoir une valeur nettement stratégique desservait sidi Ali Mediouni, lieu d’origine de la numérotation45 par mille des bornes 36) Cf. Cagnat (C.), Nouvelles explorations, p. 45 ; Toussait, Rapport. 37) Cf. carte topographique au 1/50.000e f. Siliana, 485 N. ; 201 E. « Bled el Ganntra ». Un second pont donnait passage à la route augustéenne sur l’oued Saboun, au nord de Maktar. Des restes de ce pont, aujourd’hui disparues, ont été reconnues par les explorateurs (cf. Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 58). 38) Cf. Carte topographique au 1/50.000e , f. Djebel Bargou, entre Aïn Zakkar et Henchir Bez ; voir : Jounard, observations, p. 280. 39) Cf. Jounard, Observations, p. 276-278 ; Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 46 ; Picard (G. Ch.), Civitas Mactaritana, p. 17 ; A.A.T., II, f. Djebel Bargou, Maktar et el- Ala (voir : notices). 40) Cf. Mcharek (A.), « Un itinéraire inédit », 1989, p. 162-166 ; p. 165, carte B. 41) La voie Carthage-Ammaedara par Mactaris et Thala pourrait-être légèrement antérieure à la route littorale Carthage-Lepcis Magna attestée par les bornes de Kroussia (L. Foucher, Hadrumetum, 1964, p. 116) et celle de Sabratha (G. Di Vita-Evrard, dans Libya Antiqua, XV-XVI, 1978- 1979, p. 9-45). Mais elle a sans doute préparé et accompagné le transfert de la Légion à Ammaedara, antérieurement à l’aménagement de la « rocade » Ammaedara- Tacape au début du règne de Tibère, cf. : Mcharek (A.), « Un itinéraire inédit », 1989, p. 161). 42) Salama (P.), Voies romaines d’Afrique du Nord, 1951, p. 223. 43) Salama (P.), Bornes milliaires, 1987, p. 78-79 (voir : la liste des bornes milliaires trouvées dans les secteurs de Thuburbo Maius et d’Avioccala). 44) Picard (G.-Ch.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 17. 45) La numérotation des bornes milliaires - telle que révélée par l’inscription augustéenne - est peut-être à envisager non pas entre Mediouni et Maktar mais, plus vraisemblablement, entre Mediouni et Haïdra.
  14. Ahmed MCHAREK 103 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) comme l’atteste l’inscription augustéenne. Cette voie empruntait ensuite, très vraisemblablement, le passage ouvert par l’un des affluents de l’oued el H’tab, entre le Djebel Skarna et le Djebel Barbrou, pour déboucher dans la plaine de Rouhia. Elle devait desservir l’agglomération antique de Fondouk Debbiche46 , contourner légèrement le marécage de Rouhia et rattraper la via Hadrumetina47 , entre Sufes et Thala, au niveau de Henchir Left48 . -Pour le parcours entre le plateau de Maktar et la ville de Thala dont l’importance stratégiquen’estplusàdémonter,uneautresolutionpourraitparaîtreplussatisfaisante. À partir de Mactaris ou encore de Mediouni, l’armée romaine pouvait emprunter en effet un second itinéraire en passant par Mididi (Henchir Mided). Plus tard sous le Bas- Empire, la route Mactaris-Mididi est attestée par six bornes milliaires49 qui indiquaient les quatre premiers milles à partir du chef-lieu de la Thusca. À cette époque, la voie Mactaris- Ammaedara par Mididi a du éclipser l’itinéraire reliant le plateau de Maktar à la Steppe par le défilé entre le Djebel Skarna et le Djebel Barbrou. Après le transfert de la Troisième Légion Auguste à Theveste (Tebessa) en 75 apr. J.-C., le caractère militaire de la voie augustéenne Carthage-Ammaedara a du s’atténuer, voire disparaître plus tard à l’époque byzantine. La construction sur son parcours de plusieurs fortifications dont la citadelle de Chusira50 montre que la surveillance des routes joignant le Tell intérieur à la Steppe s’organisait de part et d’autre du massif du Berbrou. Malgré son importance indéniable, la voie augustéenne fut apparemment négligée par les documents routiers officiels qui sont parvenus jusqu’à nous. - Route reliant Agger à Zama Regia Sur un segment Aquae Regiae-Assuras51 , la Table de Peutinger mentionne sept stations intermédiaires et précise les distances qui les séparent; ces stations sont des localités de la Thusca : Aggar VII Manange VI Vzappa VI Autipsida VII Avula 46) A.A.T., II, f. el-Ala, entre 31 et 100. 47) Sur la via Hadrumetina, voir : Salama (P.), « La via Hadrumetina en Byzacène », Cahiers de Tuinisie, 45-46, 1964, p. 73 sq. 48) A.A.T., II, f. el-Ala, 106. 49) CIL, VIII, 21962 (2ème mille), 21963-65 a (3ème mille), 21966 (4ème mille). Un pont sur l’oued Mided donnait passage à la voie antique, à l’entrée de Mididi (Tissot, Géogr. comp., II, p. 619). 50) Cf. Ch. Diehl, dans Nouvelles archives des Missions, t. IV, 1893, p. 385. 51) Cf. Miller (K.), Iteneraria romana, Stuttgart, 1906. (Voir : Diocesis Africae et carte p. 286-287, n° 7 et 8).
  15. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 104 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) X Seggo XX Zama Regia Cet itinéraire de la Table de Peutinger a fait couler beaucoup d’encre52 en raison des difficultés qu’il y avait jusqu’ici à localiser la plupart des stations nommées, particulièrement Zama Regia. Au départ, une seule ville était identifiée avec certitude par l’épigraphie, en l’occurrence Vzappa (Ksour Abd el-Malek)53 . Aujourd’hui, les progrès de la recherche permettent de restituer d’une manière relativement satisfaisante l’essentiel de l’itinéraire en question. Comme on l’a déjà vu Zama Regia est désormais localisée par l’épigraphie à Henchir Jâma. Par ailleurs, une autre découverte épigraphique a révélé le nom antique de Henchir sidi Amara54 où on s’accordait à placer hypothétiquement la station d’Aggar55 . En effet, des travaux de dégagement dans la zone du forum de cette ville ont permis à L. Sebaï- Ladjimi de mettre au jour une inscription gravée sur l’un des piédroits de l’arc de triomphe ; il s’agit d’une dédicace adressée à Agger Augusta56 . Par l’équivalence désormais établie : Aggar (de la Table de Peutinger) = Agger (donné par l’épigraphie), l’identification de Henchir Faroha avec la station de Manange n’est plus une simple hypothèse57 . Nous savons qu’il s’agit d’une localité qui se trouvait à mi-chemin ou presque entre les étapes d’Agger et d’Vzappa, toutes les deux connues. Or un seul champ de ruines répond au signalement, à savoir Henchir Faroha58 ; ce dernier est l’unique site archéologique pouvant correspondre à une agglomération antique entre Henchir sidi Amara à l’est et Ksour Abd el -Malek à l’ouest59 . L’évidence des faits sur le terrain autorise à développer C(iuitas) M(anange) D(ecreto) D(ecurionum) P(ecunia) P(ublica) dans l’inscription A. Ep., 1899, 115, conformément à la lecture proposée par les auteursduCIL,VIII.L’inscriptionenquestionestunedédicaceadresséeen216àCaracalla. Un pont de six arches relativement bien conservé60 , construit sur l’oued Djilf, donnait passage à la route immédiatement à la sortie d’Agger. Par ailleurs, un tronçon 52) Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 31-32 ; Toussait, Rapport, p. 485 ; A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 48 ; Poinssot (L.), Zama, dans Rev. Afr. , 1928, p. 171 ; Deroche (L.), Ksar Toual Zammel, p. 93-94 ; Picard (G. Ch.), Civitas Mactaritana, 1054, p. 16-17 ; Barbery (J.), Quelques itinéraires, p. 43-44 et 9. 48, fig. 8. 53) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 153. 54) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 262. 55) Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 31-33 ; Monchicourt (Ch.), B.A.C., 1909, p. 112-115. 56) Sebaï- Lajimi (L.), dans Bulletin des travaux de l’INAA, avril-juin, 1988, p. 62 = A. Ep., 1991, 1636. 57) B.A.C., 1899, p. 218 ; A. Ep., 1899, 155 ; Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 31-33. 58) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 251. 59 Sur l’itinéraire encore fréquenté entre Agger (sidi Amara) et Henchir Faroha, on rencontre une seule ruine (A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 252) dont l’identification comme ferme antique ne fait aucun doute. Il en va de même pour le site rural qui jalonne la route entre Henchir Foroha et Vzappa (cf. A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 223). L’agglomération antique la plus proche de Faroha, en dehors d’Agger et Vzappa est la bourgade qui s’élevait à Henchir el-Jemal, au voisinage de Chusira (cf. A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 231). 60) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 262.A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 250. Le pont fait 48,85 m de long sur 6 m de large, y compris l’épaisseur des deux parapets haut de 1 m. Voir aussi : Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 32-33 ; De Belenet, B.A.C., 1886, p. 211 ; Poinssot (J.), dans Bull. Antiq. Afr., II, 1985, p. 98, pl. IV. Selon P. Salama, ce pont pouvait « atteindre 150 m de long et une hauteur de 30 m ». (Cf. Voies romaines d’Afrique du Nord, p. 80).
  16. Ahmed MCHAREK 105 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) de chaussée antique61 récemment relevé par J. Barbéry entre Henchir Faroha et Ksour Abd el-Malek est encore visible sur la piste moderne. Ce prospecteur s’est trompé cependant quand il a pris la porte monumentale du temple de Liber Pater à Uzappa pour « un arc … qui marque la route allant à Manange »62 . Comme l’a noté R. Cagnat63 , la voie actuelle de Henchir sidi Amara à Ksour Abd el-Malek fait 20 km environ, soit une distance conforme aux données de la Table de Peutinger (= un total de 13 milles). - À propos d’Autipsida, Avula et Seggo : pour une localisation dans la vallée de l’oued el-Hammam. Le deuxième tronçon de l’itinéraire qui nous occupe, entre Vzappa et Zama Regia, est bien plus difficile à restituer que le précédent. Il comporte, en effet, trois stations encore inconnues : Autipsida, Avula et Seggo. De R. Cagnat64 à G. Ch. Picard65 , la plupart des commentateurs66 ont estimé que la route Vzappa-Assuras devait emprunter la vallée de l’oued Ouzafa-Siliana avant de tourner à l’ouest au niveau de Ksar el -Hadid, pour gagner Henchir el- Haddad. De là, elle pouvait continuer en direction d’Assuras en passant soit par Henchir Jâma, soit par le col du Messouge et Sebâa Biar. Les auteurs de cette hypothèse ont proposé d’identifier Autipsida avec les ruines de Gabr el-Ghoul67 et Avula avec celles de Ksar el-Hadid68 . Cette solution aurait eu l’avantage de restituer la distance donnée par la Table de Peutinger entre Assuras et Vzappa (53 milles = 78,5 Km). Mais elle soulève cependant de sérieuses difficultés qui n’ont pas échappé à R. Cagnat ; il s’agit notamment de la distance entre Assuras et Zama Regia, de l’identifications des stations intermédiaires et surtout du « détour par Jâma et Ksar el Hadid » qui « allonge la route sans nécessité de vingt kilomètres environ69 ». De fait, il y a un obstacle bien plus grave encore car nous savons aujourd’hui que - sur cet itinéraire - la 2e agglomération qu’on rencontre après Gabr el- Ghoul, là où on devrait trouver Avula, s’appelait c(ivitas) [Ma]rag(ui)? Sara (Henchir Chār), petite agglomération bâtie sur un méandre de l’oued Silianã70 . L. Déroche71 avait déjà pressenti ce genre de difficulté en suggérant un itinéraire direct entre Vzappa et Sebâa Biar qu’il croyait identifiable avec Zama Regia72 . Pour cet auteur, la route pouvait passer à travers les Hamada des Ouled Aoun en desservant Ksar M’douja qui serait la station d’Autipsida.LasolutionsuggéréeparL.Dérochesacrifiecependantlesdonnéeschiffrées 61) Barbery (J.), Quelques itinéraires, p. 43-44 ; annexe « Un exemple de remploi de route romaine entre Vzappa et Manange ». Voir : Ibid., carte p. 48, fig. 3. 62) Ibid., p. 43-44. 63) Cagnat (C.), Nouvelles explorations, p. 31-33. 64) Ibid., p. 82. 65) Picard (G. Ch.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 19. 66) Cf. Toussaint, Rapport, p. 185-192. (Pour cet auteur, Sebâa Biar serait une station postale de Zama Regia (Henchir Jâma) ; Miller (K.), Itineraria romana, carte p. 106. Voir aussi AAT, II, XXX, f. Maktar, 48 (Ksar el Hadid) et 84 (Ksar el -Haddad). 67) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 84 (Kebeur er Roul = Kobbeur er Ghoul). 68) Ibid., p. 13. 69) Cagnat (C.), Nouvelles explorations, p. 82. 70) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 7. Voir : Mcharek (A.), dans L’Africa Romana, X, 1991. L’identification de Maragui Sara donne crédit à l’hypothèse de L. Poinssot tendant à localiser l’évȇché de Suliana à Ksar el Hadid, à 5 km au nord de Henchir Chār. 71) M.E.F.R.A., LX, 1948, p. 97. 72) A.A.T., II, XXX, f. Maktar, 29.
  17. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 106 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) de la Table de Peutinger, car la distance entre Vzappa et Sebâa Biar est seulement de 35 à 40 km. Il y a aussi une autre difficulté insurmontable déjà révélée par G. C. Picard73 qui a souligné l’absence, le long du tracé supposé, de toute trace de chaussée antique et de toute ruine d’agglomération74 susceptible d’être identifiée avec Avula ou avec Seggo. Si l’on ajoute que le site archéologique de Sebâa Biar n’a rien a voir avec Zama Regia désormais localisée à Henchir Jâma, on ne peut que donner raison à G. C. Picard qui a écarté catégoriquement l’itinéraire suggéré avec prudence par L. Deroche. Il nous faudra donc trouver une autre solution. Les résultats d’une exploration systématique du terrain -autant que les données du réseau routier antique- incitent à situer les stations d’Avula et de Seggo sur un itinéraire qui empruntait, non pas la vallée de l’Ouzafa, mais plutôt par celle de l’oued el- Hammam (empruntée par l’actuelle route reliant Makhtar à Siliana) comme vient de le faire avec pertinence mon élève Ali Chérif75 . Ce dernier a retrouvé par ailleurs, dans une école primaire de Siliana, le support de l’inscription trouvée jadis par Ch. Saumagne et qui donnait le nom de la civ(itas) [---]RAG. SARA. L’épigraphe retrouvée fut hélas barbouillée de peinture rouge par les paysans, mais on peut encore constater que dans le texte lacunaire de l’inscription, la restitution du toponyme [Ma]rag(ui) Sara ne se heurte à aucune difficulté76 . S’agissant d’un itinéraire de première importance pour la localisation des stations d’Autipsida,AvulaetSeggo,j’aiestiméutiled’yreveniricidemanièreapprofondie.D’abord, il faut rappeler que des sites archéologiques jalonnaient l’itinéraire entre Ksar M’douja et Henchir Jâma où deux tronçons de chaussée antique ont été retenus par Toussaint ; le premier à l’entrée de Ksar M’douja77 , au départ de la route vers la vallée de l’oued Ouzafa, le second tronçon au niveau de Ksar Guennara78 , à la naissance de l’oued el-Hammam où il se confond avec la route reliant Mactaris à Zama Regia (Henchir Jâma). Outre la forteresse byzantine de Ksar M’douja79 construite au voisinage d’une source aménagée en fontaine, il existait deux autres fortins dont les fondations sont encore visibles ; l’un à Ksar Guennara80 sur une hauteur qui surveillait l’entrée sud de l’agglomération antique; l’autre s’élevait également sur une éminence aujourd’hui dominée par la koubba de sidi Mansour81 . Ce dernier fortin commandait la vallée à l’endroit où devait aboutir une bretelle reliant Bagat (Henchir Ghayada) à l’importante voie qui passait par l’oued el-Hammam ; sur ce même parcours se trouvent deux autres établissements antiques, Henchir el-Hammam82 et Henchir el-Faiya83 . 73) Picard (G.C.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 19. 74) La seule ruine qui jalonne la piste entre Ksar M’douja et Sebâa Biar est celle de Henchir el-Tella (A.A.T., II, 30, f. Maktar), 124). Mais, il s’agit d’un site secondaire, peut-être un établissement agricole. 75) Chérif (A.), « Données nouvelles sur l’histoire d’une cité méconnue du Haut-Tell tunisien : la civitas A[---]/ Ain M’doja (région de Maktar) », Antiq. Africaines, 51, 2015, p. 47-64. 76) Voir infra : fig. 2 et fig. 2 bis (Je tiens à remercier Ali Chérif qui a bien voulu me communiquer les photos de l’inscription et m’autoriser à en faire état ici et les publier). 77) Toussaint, Rapport, p. 189 sq. Voir aussi : la carte topographique au 1/50.000e de Maktar, 440 N/ 292 E (Ksar M’douja). 78) Toussaint, Rapport, p. 189 sqq ; Carte topographique au 1/50.000e de Maktar, 443 N/ 298 ouest. 79) Pour la forteresse de Ksar M’douja, cf. A.A.T., II, f. 30 (Maktar), 133. Voir aussi, BAC, 1909, p. 111-125. 80) A.A.T., II, f. 30 (Maktar) 40 « Ksar Guennara ». 81) Toussaint, Rapport, p. 189 sqq. 82) A.A.T., II, f. 30 (Maktar), 20 : « ruine d’une abside qui a peut-être appartenu à un monument de bains ». 83) Ibidem., 15.
  18. Ahmed MCHAREK 107 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) Mais surtout, l’enquête sur le terrain permet -fort heureusement- de reconnaître les vestiges de deux agglomérations susceptibles d’avoir joué le rôle de stations routières. Sur cette voie de l’oued el-Hammam reliant Mactaris à Zama Regia, s’élevait en effet la localité de Ksar Guennara84 à sept km au nord de Ksar M’douja et celle de Henchir el- Haddad85 à 18 km plus au nord. Reste à examiner l’étape entre Vzappa et Ksar M’douja qui a retenu l’attention de G. C. Picard. Ce dernier a noté, à juste titre, la difficulté de la circulation en ligne directe entre les deux localités en raison de la topographie défavorable qui caractérise ce secteur de la Hamada des Ouled Aoun86 ; on n’y trouve, le long des pistes actuelles, ni trace de chaussée antique ni vestiges d’établissement agricole ou d’édifice funéraire. Là aussi, c’est l’examen du terrain qui permet de reconnaître un itinéraire tout indiqué. Il s’agit d’une piste souvent empruntée de nos jours encore par les paysans lors des opérations de transport entre Ksar Abd el-Malek et la route de Maktar à Siliana. Cette piste est celle qui - dès le départ de Ksar M’douja - se confond avec la route antique reconnue par les Brigades topographiques et permet de gagner la vallée de l’oued Ouzafa. Au niveau de l’oued Haroun, elle s’engage dans la partie septentrionale du plateau de Maktar après un franchissement aisé du cours d’eau. Cette voie passe ensuite entre deux fortins tardifs décrits par G.C. Picard, Ksar Aïn Ajina (ou Ksar Bou Guerba)87 et Ksar el-Ksiba88 et plus loin dans la vallée de l’oued Ouzafa, elle se confond jusqu’à Vzappa avec la voie augustéenne Carthage-Ammaedara. Sans occasionner un long détour, l’itinéraire entre Ksour Abd el-Malek et Ksar M’douja, par l’oued Ouzafa et le nord du plateau de Maktar, présentait des avantages évidents pour la circulation des courriers publics. Au vu de ces données documentaires, je n’ai aucune hésitation à restituer le tronçon de la Table de Peutinger en le faisant passer par la vallée de l’oued el -Hammam. Certes, des difficultés de détail existent pour les distances89 entre les diverses stations, mais dans l’ensemble ce tracé donne 80 km entre Vzappa et Assuras, c’est-à-dire une distance pratiquement conforme aux données du document routier90 (53 milles = 78,5 km). Pour les trois stations encore inconnues (Autipsida, Avula et Seggo), une seule hypothèse de localisation me paraît possible dans l’état actuel de la documentation. Je proposerais donc d’identifier Autipsida avec Ksar M’douja91 où s’élevait une ciuitas dont le nom, révélé en partie par une inscription fragmentaire92 , commence par la lettre A[---]. Quant aux deux stations suivantes, on pourrait estimer possible de les localiser – également de manière hypothétique –, la première (Avula) à Ksar Guennara93 , la seconde (Seggo) à Henchir el-Haddad94 comme on l’admet généralement95 . 84) Ibid., 40 (Ksar el Guennara). 85) Ibid., p. 13 (Henchir el Haddad). 86) Cf. Picard (G.-C.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 18. 87) Ibid., p. 18. Voir aussi Toussaint, Rapport, p. 189-190. 88) Toussaint, Rapport, p. 189-190. 89) On s’accorde généralement pour considérer les données chiffrées de la Table de Peutinger comme suspectes (Cf. Déroche (L.), MEFRA, LX, 1948, p. 95). 90) Il est à noter, par ailleurs, que le tracé entre Vzappa et Assuras par la vallée de l’oued Siliana donne à peu près une distance équivalente. Il n’est donc ni plus ni moins avantageux que l’itinéraire qui passe par la vallée de l’oued el-Hammam. 91) A.A.T., II, f. 30 (Maktar), 133. 92) A. Epig., 1899, 144. 93) A.A.T., II, f. 30 (Maktar), 40. 94) Ibid., 13. 95) Ibid., 13.
  19. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 108 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) Qu’en est-il, enfin, de cette voie de la Table de Peutinger quand elle quitte le territoire de la Thusca, en direction d’Aquae Regiae à l’est, et d’Assuras à l’ouest ? Entre Agger (Henchir sidi Amara) et Aquae Regiae (Henchir el-Khatera ?), la route ne passait pas par Jaloula (Cululi ?)96 qui ne deviendra une station routière importante que plus tard au Moyen Àge ; comme bien vu Toussaint, tout porte à croire que la voie antique inclinait vers le sud à partir d’Agger pour gagner directement Aquae Regiae. Ce tracé par la vallée de l’oued Marguellil qui laisse à l’est l’obstacle de Djebel Oueslet a été retenu par Pierre Salama dans sa carte des voies romaines d’Afrique publiée en 1951 et remise à jour partiellement en 1986. Entre Zama Regia (Henchir Jâma) et Assuras (Henchir Zanfour), il me paraît exclu que la route ait pu passer par la vallée du Messouge97 et le col de Kbor Klib. Un tel itinéraire est peu vraisemblable, car il imposerait un détour long et injustifié par Henchir el-Haddad (Seggo ?) et Ksar Toual Zouameul (vicus Maracitanus). Il devait exister sans doute un itinéraire direct reliant Zama Regia à son vicus, à travers le massif du Messouge où la topographie ne pose pas de problème insurmontable de circulation. L’examen du terrain incite à croire qu’un tracé conforme au contenu de la Table de Peutinger devrait suivre le versant occidental du Djebel Messouge ; un tel tracé suggéré d’ailleurs depuis longtemps par R. Cagnat98 pourrait correspondre à la piste actuelle qui de Jâma incline vers le sud-ouest pour gagner la plaine d’es-Sers. Au départ, cette voie constitue un embranchement à l’ouest sur la route reliant Jâma à Henchir el- Haddad au niveau d’Aïn Slimane ; cet embranchement emprunte le col de Barguia entre Djebel el Ghorfa et Djebel Korrass ; de là la route jalonnée par des sites archéologiques secondaires suit un tracé NE / SW et dessert les bourgades antiques qui s’élevaient à Henchir Soualem et Tazegrart; elle débouche enfin dans la plaine à travers le territoire des Ouled Hardi pour rattraper la route d’Assuras à Sebâa Biar. À mon avis, la documentation actuelle permet déjà de proposer une restitution probable au moins pour l’itinéraire entre Agger et Zama Regia ; c’est sans doute sur ce dernier parcours que s’élevaient la borne milliaire qui signalait sous Dioclétien et Maximien le IIIe mille à partir de Zama et celle également tardive trouvée dans les ruines d’Agger99 . La voie de la Table de Peutinger était doublée au sud par une route plus courte100 reliant Aquae Regiae à Assuras, à travers le plateau de Maktar et la Hamada des Ouled Ayar. - Route mentionnée par l’Itinéraire d’Antonin. Etabli sous Caracalla et plusieurs fois remanié ensuite, l’Itinéraire d’Antonin est comme la Table de Peutinger issu d’un document officiel dont on ignore, malheureusement, la fonction précise101 . Dans ce document routier, on apprend que la distance qui sépare Assuras102 d’une station appelée Tucca Terebentina était de douze 96 A.A.T., II, f. 31 (Djebel Bou Dabbouss), « Jaloula ». 97) Ibid., 185. 98) On s’accorde généralement pour considérer les données chiffrées de la Table de Peutinger comme suspectes (Cf. Deroche (L.), M.E.F.R.A., LX, 1948, p. 25). 99) B.A.C., 1932-1933, p. 246-247. 100) Picard (G. C.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 17 ; Toutain (J.), Les cités romaines de la Tunisie, 1885, p. 136. 101) Cf. Gascou (J.), dans A.N.R.W. II, 10, 2, p. 196-348 ; Février (P.A.), Approches du Maghreb romain, I, 1989, p. 136-137. 102) A.A.T., II, XXIX, f. Ksour, 80 (Henchir Zanfour).
  20. Ahmed MCHAREK 109 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) milles103 , sur trois segments dont un iter a Carthagine in Byzacio Sufetula vsque. On s’accorde à identifier cette station de Thugga Terebentina avec la ruine de Henchir Dougga104 dont le nom conserve le toponyme antique et qui se situe justement à une vingtaine de km (18 km à vol d’oiseau) au sud de Henchir Zanfour (Assuras). Sur l’itinéraire d’Assuras à Sufetula qui comporte les stations identifiées de Tucca Terebentina (Henchir Dougga) et de Sufes (Sbiba), on rencontre deux autres agglomérations secondaires : la première s’élevait à Aïn Fdhil105 , la deuxième à Henchir Left106 . La chaussée antique est visible aux environs de Henchir Dougga, côté sud, sur une longueur de plusieurs kilomètres107 ainsi qu’aux environs de Aïn Fdhil au départ des routes d’Assuras et de Thucca Terebentina108 . Dans cette dernière ville, les Byzantins ont construit une grande citadelle109 à trois bastions, encore debout. Plus tard, le général arabe Oqba Ibn Nafi’ s’y arrêtera, et la tradition lui attribue la transformation en mosquée110 d’une église de Tucca Terebentina. De Sufes située sur la via Hadrumetina, la voie signalée par l’Itinéraire d’Antonin permet de gagner la voie Carthage-Theveste au niveau de Laribus (al-Urbous) en passant par Tucca Terebenthina, Aïn Fdhil et Assuras ; de là on pouvait continuer vers l’ouest en direction de Cirta ou Hippo Regius ; mais à partir de Tucca Terebentina, on rattrapait plus vite la même voie impériale au niveau d’Althiburos (Medeina) en passant par ciuitas Cit[---](sidi Ahmed el Hacheni)111 et Bir Meractite112 . Entre Althiburos et Laribus, se trouvait la station d’Obba113 qui était reliée également à Assuras par une voie directe mentionnée comme mansio par l’Itinéraire d’Antonin114 . Althiburos figure en outre comme tête de ligne sur le segment de la Table de Peutinger qui passait à travers la Thusca (Assuras- Agger). Entre Althiburos et Assuras, le même document routier donne la station intermédiaire d’Altessera115 qui n’est pas identifiée jusqu’ici116 . Outre cette voie de l’Itinéraire d’Antonin, celle attestée par la Table de Peutinger et celle aménagée par l’armée sous Auguste, une autre artère importante traversait la Thusca, cette fois dans sa partie orientale, du sud au nord pour relier la via Hadrumetina 103) Tissot (C.), Géog. comp., II, p. 619 (Tucca Terebentina). 104) A.A.T., II, 31, f. Ksour, 123 ; Lancel (L.), Actes de la Conférence de Carthage, I, 1991, p. 166, n° 2, et IV, p. 1492. Pour le site voir : Ben Baaziz (S.), La vallée de l’oued el H’tab, I, 2000, p. 106. 105) A.A.T., II, f. 29 (Ksour), 108 (sidi Mohamed ben Zaied). 106) A.A.T., II, f. 36 (el- Ala), 106. 107) Carte topographique au 1/50.000, f. 52 (Ebba-Ksour), 419/ 280. 108) Ibid., 419/ 287. 109) Diehl (Ch.), L’Afrique byzantine, 1896, p. 280 ; Ben Baaziz (S.), op. cit., I, p. 106, fig. 17 (plan schématique delacitadellebyzantine). 110) Guérin (V.), Voyage archéologique, I, 1861, p. 395. 111) A.A.T., II, f. 29 (Ksour), 121. 112) Ibid., 118. 113) Ibid., 87-88. Cette ville s’appelle « Obba » dans les documents ecclésiastiques. Cf. Lancel (S.), Actes de la conférence de Carthage en 411, I, 1991, p. 166 ; IV, 1441). Or, une épitaphe que nous avons découverte donne le nom d’un certain Marcus Ibbeus ». S’agit-il d’une première mention épigraphique de l’ethnique Ebbius » gravée fautivement par un lapicide encore hésitant ? De toute façon, même déformé, le patronyme Ibbeus (= Ebbius ?) semble dériver d’un ethnique qui n’est pas sans rapport avec la ville appelée encore aujourd’hui « Ebba ». 114) Ennaïfer (M.), Althiburos et l’édifice des Asclepeia, 1976, p. 32, n° 107. 115) Ibid., p. 32, n° 105. 116) Voir dans ce même volume l’enquête consacrée par Naddari (L.) à la station d’Altessera.
  21. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 110 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) à la voie Carthage-Ammaedara dans la vallée de l’oued El Kebir, à quelques kilomètres à l’est d’Avioccala (Henchir sidi Amara, dans le pagus Gunzuzi)117 . 3- Routes régionales de la Thusca romaine - Route de Chusira à Assuras Quatre stations de cet itinéraire méridional sont des villes de la Thusca ; il s’agit de Chusira, Mactaris, Thigibba et Vlules. Omis par les routiers antiques, cet axe de circulation est jalonné par des bornes milliaires dont neuf sont datées du Bas-Empire et se trouvent sur la voie reliant Mactaris à Chusira118 ; le tracé de celle-ci coïncide avec l’actuelle route de Kairouan. Au départ de Mactaris, la route de Thigibba se confondait avec celle de Mididi ; elle passait devant le mausolée pyramidal et rejoignait le temple d’Apollon ; sur le plateau, un embranchement se détachait au niveau du mausolée de C. Verrius Rogatus pour gagner Thigibba (Hammam Zouakra) selon un tracé SE/ NO jalonné par des ruines antiques ; cette voie coïncidait pour partie avec la route actuelle de Rouhia. À l’entrée de Thigibba, la voie antique franchissait l’oued Nouallet sur un pont119 situé à peu de distance de la porte monumentale encore debout qui devait s’appeler « porte de Mactaris »120 . Des vestiges de la chaussée antique121 ont été repérés par les Brigades topographiques, entre Thigibba et Vlules sur une longueur de plusieurs kilomètres, ainsi qu’au départ de la route reliant cette dernière à Assuras. Enfin à l’époque tardive, un fortin122 élevé à Vlules et une imposante citadelle à Chusira123 surveillaient cet axe de circulation. Outre les trois itinéraires décrits ci-dessus, deux autres artères traversaient la Thusca du sud au nord et reliaient entre elles des capitales régionales ; elles se détachaient de la uia Hadrumetina124 pour rattraper, soit la grande voie Carthage- Theveste, soit la voie augustéenne Carthage-Ammaedara : - Voie reliant Agger à Limisa Entre Aquae Regiae au sud et Seressi (Oum el -Abouab) au nord, on passait par trois agglomérations : Agger (Sidi Amara), Sidi Khalifa125 (le centre d’un domaine privé encore anonyme) et Limisa (Ksar Lemsa)126 . Ces localités étaient reliées par une voie qui se confondait, entre Aquae Regiae et Agger, avec un tronçon de l’itinéraire attesté par la 117) A.A.T., II, f. 26 (Djebibina) 40. 118) CIL, VIII, 21967-70 (1er mille à partir de Mactaris ; CIL, VIII, 21972, 21973 = B.A.C., p. CXCII (2e mille) ; 21974-75 et B.A..C, 1923, p. CXCII (4e mille). Ces milliaires sont datables entre la Iere Tétrarchie et le règne de Julien Auguste, cf. Salama (P.), Bornes milliaires, p. 223-224). L’inscription CIL, VIII, 21976 attribuée par ce savant à la route Mactaris-Chusira est gravée sur une colonne érigée sous Valentinien pour marquer le 2e mille sur la route Mactaris- sidi Ali Mediouni, cf. Mcharek (A.), dans B.C.T.H., n. s., Afrique du Nord, fasc. 22, 1992, p. 155). 119) Cf. Cap. Foussard, dans B.A.C., 1923, p. 52. 120) Ibid., p. 52. 121) Cf. carte topographique au 1/50.000, Maktar, 121. 122) A.A.T., II, 30, f. Maktar, 121. 123) Cf. Diehl (Ch.), dans Nouv. Arch. des Missions, t. IV, 1893, p. 385. 124) Cf. Salama (P.), «La via Hadrumetina en Byzacène», Cahiers de Tunisie, 45-46, 1964, p. 73 sq. 125) A.A.T., II, f. 31 (Dj. Bou Dabouss), 45-46. 126) Ibid., 5-6.
  22. Ahmed MCHAREK 111 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) Table de Peutinger. La route continue ensuite à travers la vallée de l’oued Maarouf127 où J. Barbery a pu reconnaître deux tronçons conservés de la chaussée antique128 ; l’un au voisinage de sidi Khalifa, l’autre au nord de Ksar Lemsa. Le caractère stratégique de cet axe principal de circulation à travers la Thusca orientale129 , est illustré à basse époque par la citadelle byzantine de Limisa130 . Entre Ksar Lemsa et la route vers Carthage se trouve Seressi131 (Henchir Souar) sur un itinéraire direct emprunté par la route actuelle. Dans son enquête, J. Barbery donne un tracé supposé pour cette même voie dans lequel il néglige l’étape de Seressi. L’auteur fait passer la route par Muzuca (Henchir Karachoun)132 au prix d’un détour injustifié qu’il ne cherche pas à explique133 . À notre avis, une liaison directe entre Limisa et Seressi est bien plus vraisemblable et il n’y a aucune raison de l’ignorer. Sur les voies principales de la Thusca romaine se greffait un réseau de voies secondaires. 4- Routes secondaires de la Thusca romaine Les multiples cités de la Thusca romaine étaient reliées entre elles, non seulement parlesgrandesartèresdecirculation134 ,maisaussiparunréseaudevoiessecondaires135 qui ont souvent laissé des traces sur le terrain. Les sources textuelles d’époque antique mentionnent au moins trois itinéraires régionaux. - Voie de Zama Regia à Furnos Maius Dans un texte emprunté aux « actes de justification de Felix d’Abthugnos »136 , on apprend que le duumvir Alfius Caecilianus de cette ville voisine de la Thusca se trouvait en 303, lors de la persécution de Dioclétien, dans la ville de Zama pour affaires. Ce Caecilianus qui était en même temps patron d’un atelier traditionnel devait y acheter deslinae(filsdelin)137 .Aucoursdecevoyage,ilétaitaccompagnéducuratorReipublicae Saturninus car le séjour n’avait pas que des raisons purement commerciales138 . Dans la 127) Barbery (J.), Quelques itinéraires, p. 25, fig. 4. 128) Ibid., p. 28-31, fig. 5 et photos n° 2-4. 129) Toutes les cités secondaires de ce secteur sont reliées par des bretelles à l’axe Agger- Limisa. C’est le cas notamment de Muzuca et de son probable vicus qui s’élevait à Henchir Besra entre lesquels la circulation directe par la vallée de l’oued Maarouf semble avoir été particulièrement difficile. Aujourd’hui, elle est pratiquement impossible pour les véhicules. 130) Voir en dernier lieu Belkhodja (K.), Ksar Lemsa, dans Africa, 1968, p. 313-328, plans A et B ; pl. III, IV et V. 131) A.A.T., II, f. 26 (Djebibina), 56. 132) A.A.T., II, f. 31 (Dj. Bou Dabouss), 18. 133) Barbery (J.), Quelques itinéraires, p. 14, fig. 1. 134) Beaucoup de ces itinéraires secondaires sont attestés par l’archéologie ; c’est le cas par exemple, entre Chusira et Manange, au niveau de Henchir al-Jemal, où une voie romaine nettement marquée a été reconnue par les Brigades topographiques (A.A.T., II, 30, f. Maktar, 23; Toussaint, Rapport, p. 194). 135) Une épitaphe du second siècle, trouvée à Macota (Maghrawa) mentionne une via vicinalia (cf. CIL, VIII, 688). Cette appellation montre que la distinction était alors bien nette entre une voie vicinale destinée à relier les grands axes de circulation et une « via publica » assurant la communication entre les capitales des provinces, cf. Salama (P.), Voies romaines d’Afrique du Nord, 1987, p. 38. 136) Sur ce passage des « Acta purgationis Felicis », voir : Poinssot (L.), dans B.A.C., 1916, p. 306 ; Lepelley (Cl.), Les cités, II, p. 268 et suiv. ; Desanges (J.), Commentaire du Livre V de Pline, 1980, p. 323. 137) Cf. Lepelley (Cl.), Ibid., p. 268, n° 15 ; Desanges (J.) estime que, dans ce texte, Furnos est certainement Furnos Maius, et que Zama est probablement Henchir Jâma, car écrit-il, « Henchir Es Souar, Aïn Fourna et Jama sont à peu près alignés ». Cf. Commentaire du Livre V de Pline, 1980, p. 323). 138) Cf. Poinssot (L.), op. cit., p. 36. Voir aussi : Id., dans Rev. Afr., 1928, p. 168-169.
  23. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 112 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) ville de Zama (Regia) et sur le chemin de retour à Furnos Maius (ville du pagus Gunzuzi), les deux notables d’Abthugnos assistèrent à la destruction des basiliques et des livres de saints139 . L’itinéraire suivi par les deux hommes est celui qui emprunte la vallée de l’oued Siliana par Maragui Sara et se confond ensuite avec un tronçon de la voie augustéenne desservant Vazi Sarra. - Voie reliant Agger à Henchir es- Snam (Apud Asnam ?) Dans une lettre de l’année 395, saint Augustin mentionne une attaque des circoncellions à l’intérieur de la basilique d’une localité appelée Apud Asnam et signale lesdommagescausésdanslabasiliquelocale140 .ÀlasuitedeA.Beschaouch141 ,j’aiestimé que cette localité doit correspondre à « el- Asnam » signalée à une étape de Kairouan par les chroniqueurs arabes du Moyen Àge. En outre, une enquête sur le terrain m’a permis de localiser le champ de bataille d’al-Asnam où l’armée arabe de Kairouan a pu défaire en 742 apr. J.–C. une importante coalition de Berbères Kharidjites ; il s’agit de Henchir es-Senam142 situé entre Agger (Henchir sidi Amara) et Cululi (Ain Jaloula), un site antique identifiable avec Apud Asnam143 . La localisation récente de la voisine Thambeis à Henchir Nebhana confirme le bien-fondé de cette identification de la localité médiévale d’al-Asnam. Entre la ville d’Assuras où les circoncellions ont osé s’aventurer sous la conduite du terrible évêque Optat de Thamugadi144 et l’obscure localité d’Apud Asnam, ce sont les routes de la Thusca qui furent touchées par l’insécurité ; ce fut probablement le cas de l’itinéraire Agger- Apud Asnam qui permettait de gagner Aïn Jaloula et l’antique Gamonia (furure chôra de Kairouan). À un kilomètre à l’ouest de Henchir es-Senam, R. Cagnat a signalé un pont romain qui donnait passage à la voie antique vers Agger145 . - Un itinéraire emprunté par l’armée vandale Dans sa thèse, C. Courtois a établi une carte intitulée : « Itinéraires des Vandales en Afrique » où la ville d’Vrusi (Henchir Sodga) dans la Thusca orientale est donnée comme étant l’une des localités où le passage des Vandales est attesté par les textes146 . Le parcours régional mentionné ici par ce savant correspond à la voie qui reliait les cités de la vallée du Maârouf (Limisa et Muzuca) à celles du plateau de Bargou (Vrusi et Vazi Sarra) par le défilé de M’sireb. L’existence de ce dernier passage à travers une gorge pittoresque est attestée par un relief rupestre de Mercure. Le dieu patron des voyageurs est figuré en pied, tenant le caducée à l’intérieur d’une niche ; une dédicace fort abîmée accompagnait le relief au-dessus de l’image147 . Sur cette même route qui se prolongeait au nord, il existait une « porta Fornitana » dans la cité d’Vrusi, mentionnée par Victor de Vita148 . Selon P. Salama, l’appellation de cette porte serait à mettre en 139) Ibid., p. 168-169. 140) Cf. Mandouze (A.), Prosopographie, 1982, p. 91, s. v. Argentius I. 141) Cf. C.R.A.I., juillet-octobre 1968, p. 537-538. 142) A.A.T., II, 31, f. Dj. Bou Dabouss, 69. 143) Mcharek (A.), « Henchir es-Senam (antique Apud Asnam ?), champ de bataille en 125 de l’Hégire », dans Cahiers de Tunisie, 165, 1993, p. 19-27. 144) Salama (P.), Bornes milliaires, p. 75, n° 272. 145) Cagnat (R.), Nouvelles explorations, p. 30. 146) Courtois, (Chr.) Les Vandales et l’Afrique, Paris, 1955, p. 161. 147) Cf. Ferchiou (N.), Un fossé inconnu, I, p. 325. 148) Victor de Vita, Historia persecutionis Vandalicae, I, 10 ; C. Courtois, Victor de Vita et son œuvre, Alger, 1954, p. 46, n. 163, et p. 47, n. 178.
  24. Ahmed MCHAREK 113 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) rapport avec Furnos Maius149 . En dehors de ces données fournies par les textes, l’examen du terrain montre le rôle particulier joué par la ville qui fut le chef-lieu du pagus Thuscae etGunzuzidansleréseauroutierrégional. 5- Mactaris, principal nœud routier de la Thusca. La carte jointe à la présente étude permet de constater que Mactaris était autant que Zama Regia, Agger et Uzappa, un important carrefour routier régional. Mais plus que toute autre ville de la Thusca, elle commandait un important réseau de voies secondaires destinées à assurer les communications entre le chef-lieu du pagus et les dizaines d’agglomérations qui gravitaient autour. En effet, on compte pas moins de six voies qui divergeaient de Mactaris en direction des cités voisines, en l’occurrence Vzappa, Chusira, Mididi, Thigibba, Macota, A[utipsida ?] et la localité encore anonyme qui s’élevait à sidi Ali Mediouni. Quatre au moins parmi ces itinéraires correspondaient - comme on l’a vu - à des tronçons d’axes routiers importants ; ils ont tous reçu un bornage au Bas-Empire150 . Les dix-neuf bornes retrouvées151 sont toutes des colonnes d’époque romaine tardive152 sur lesquelles les milles étaient comptés à partir de Mactaris153 . Cette donnée montre peut-être le souci des notables d’une capitale régionale -alors plus au moins déchue- d’ériger des bornes à la gloire des empereurs sur les routes d’accès à leur ville. Conclusions relatives au réseau routier On retiendra pour conclure que la Thusca – pays de montagnes et château d’eau de la Tunisie actuelle- a été à l’époque antique une zone de transition largement pénétrable entre le Tell et la steppe, la Numidie et le Byzacium. Dans ce pays du Haut- Tell méridional, les barrières montagneuses, séparées par des plateaux élevés et des plaines intérieures, n’ont constitué que rarement des obstacles à contourner (Bargou et Skarna) et la circulation s’organisait essentiellement dans les grandes vallées (Maarouf, Ouzafa,Siliana,el-HammametMessouge).Descolsetdesdéfiléssouventpittoresqueset parfois aménagés permettent de franchir les massifs montagneux comme le Messouge et le Serj (défilés de M’sireb et Foum Ez- Zalga, au voisinage d’Agger, cols de Kbor -Klib et de Saddine, passage entre le Djebel Skarna et celui de Bargou). Cinq axes de circulation reliaient à travers ce « massif central » plusieurs capitales régionales dont on peut citer Carthage, Hadrumetum, Cirta, Hippo Regius 149) Cf. Salama (P.), La via Hadrumetina, Cahiers de Tunisie, 45-46, 1964, p. 77. 150) En plus des routes de Chusira, Vzappa et Mediouni déjà mentionnées, un quatrième itinéraire borné reliait Mactaris à Mididi. Voir les six bornes trouvées sur cette voie : CIL, VIII, 12962 (2e mille), 21963- 65 (3e mille), 21966 (4e mille). 151) Les 19 milliaires se répartissent ainsi : 9 bornes sur la route de Chusira, 6 sur celle de Mididi, 3 sur celle de Mediouni et une seule sur l’itinéraire reliant Mactaris à Vzappa. 152) Les 6 bornes milliaires trouvées sur la route de Mactaris à Mididi sont elles aussi datables du Bas-Empire, entre la 1e Tétrarchie et le règne d’Honorius : voir Salama (P.), Bornes milliaires, 1987, p. 222-224. 153) On a l’indication des quatre premiers milles sur la route de Mididi et sur celles de Chusira. Sur l’itinéraire reliant Mactaris à Mediouni, les bornes retrouvées signalent le 2e mille.
  25. « Cités » et routes de la Thusca (région de Mactaris et Zama Regia) Enquête de géographie historique et essai de cartographie 114 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116) et Theveste. À haute époque romaine sous Auguste et Tibère comme plus tard sous les Byzantins, la Thusca a toujours gardé une valeur stratégique indéniable. La voie Carthage-AmmaedaraaménagéeparlaIIIe LégionAugusteainsiqueplusieurscitadelles importantes construites par les Byzantins154 (à Chusira, Thugga Terebentina et Limisa) en fournissent les preuves matérielles. Les grandes artères de la région aménagées par les Romains ont sans doute pris la suite des pistes ouvertes par les Puniques et les Numides, notamment à travers les vallées des oueds el-Kebir, Ouzafa, Siliana et Messouge. Il est permis de supposer que ces anciens itinéraires ont pu servir pour les mouvements des troupes en guerre ; ce fut sans doute le cas pour celles engagées par Hannibal dans une bataille qui se déroula dans la « plaine de Zama », non loin de Margaron (Maragui Sara probablement) ; il en fut de même sans doute pour l’armée conduite par Metellus poursuivant Jugurtha entre Zama et Thala. Entre la région de Zama Regia et celle d’Hadrumetum, c’est encore un parcours à travers la Thusca qui fut celui d’Hannibal débarqué d’Italie et plus tard celui de Jules César victorieux à Thapsus et pressé d’atteindre Zama Regia. Outre la bataille de Zama en 202 av. J.-C., un autre affrontement décisif qui devait sceller l’avenir du Maghreb s’est déroulé sur le territoire de la Thusca : il s’agit du choc d’el -Asnam en 742 apr. J.-C. entre les Berbères Kharidjites et les Arabes de Kairouan localisable à Henchir es- Senam entre Ajjer et Kairouan. Si ce dernier itinéraire n’a pas été pour notre région l’unique voie de circulation mentionnée par les chroniqueurs arabes du Moyen Àge155 , onsaittoutefoisqu’ilaconstituél’avant-dernièreétapesur« laroutedesmontagnes »156 entre le Zab (pays de l’Aurès et du Hodna, en Algérie) d’un côté et la capitale de l’Ifriqiya de l’autre. L’autre conclusion à retenir concerne la ville de Mactaris, carrefour routier autant pour la Thusca que pour l’ensemble du territoire de l’Afrique proconsulaire. D’abord étape importante sur la voie de pénétration à caractère stratégique reliant Carthage à Ammaedara, elle n’a pas tardé à régner sur un réseau routier régional particulièrement dense qui la mettait en communication avec toutes les cités de la Thusca. Il faut donc écarter définitivement l’idée reçue qui faisait de Mactaris une ville située « à l’écart des axes de circulation »157 . Nous constatons au contraire que la carte du réseau routier de la Thusca met en évidence la fonction routière essentielle de cette ville à l’époque antique. Dès lors, on comprendra mieux le rapport à établir entre le réseau routier et le rôle administratif, fiscal et commercial de Mactaris sous le Haut- Empire romain. 154) Cf. Courtois (Chr.), Les Vandales et l’Afrique, 1955, p. 346. 155)Voirendernierlieu :Mahjoubi(A.),« Delafindel’antiquitéauMoyenâge :héritagesetchangements dans l’urbanisme africain, dans Colloque sur l’histoire et l’archéologie de l’Afr. du Nord, 1985, III p. 393 sqq. 156) Cf. Id., ibid. 157) Cf. Picard (G. C.), Civitas Mactaritana, 1954, p. 19, suivi par Gascou (J.), Politique municipale », 1972, p. 150 ; Mcharek (A.), Aspects de l’évolution, 1982 (Introduction).
  26. Ahmed MCHAREK 115 Mélanges d’histoire et d’archéologie de l’Afrique antique (pp. 91-116)
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