5. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
v
TAIEB AGOURRAM HEMATOLOGY PHD, DrCLS
Member of
Harvard Medical School Post-Graduate Association
Canadian Society for Medical Laboratory Science
American Society for Clinical Laboratory Science
National Post-Doctoral Association
10. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Le Sang Normal
1- DESCRIPTION GENERALE
Le sang est un tissu liquide comportant :
- une substance fondamentale : le plasma
Le plasma est le liquide dans lequel baignent les cellules sanguines. Il est d’une composition
complexe comportant, en milieu aqueux, des électrolytes, des protéines, des glucides, des
lipides, des enzymes, des hormones...
Parmi ces éléments, certaines protéines sont liées directement aux pathologies
hématologiques : facteurs de coagulation et immunoglobulines
- des cellules : les éléments figurés du sang
Les éléments figurés du sang se regroupent en trois grandes catégories :
- les globules blancs ou leucocytes qui ont pour rôle essentiel des réactions de défense
immunitaire de l'organisme.
- les globules rouges ou érythrocytes, riches en hémoglobine dont le rôle est le transport
d'oxygène des poumons vers les tissus.
- les plaquettes ou thrombocytes, qui interviennent dans le processus d'hémostase contribuant
à maintenir le sang à l'intérieur des vaisseaux en arrêtant les hémorragies.
Les protéines plasmatiques sont pour la plupart synthétisées au foie, mais certaines sont
synthétisées en tout ou en partie par les histiocytes ou les cellules endothéliales. Quatre
protéines de la coagulation ont besoin de vitamine K pour que leur synthèse se fasse
normalement. Les immunoglobulines sont évidemment produites par les lymphocytes et les
plasmocytes.
Les lymphocytes sanguins proviennent, une fois la puberté immunologique passée, des
organes lymphoïdes périphériques.
Chaque lignée cellulaire sanguine est très spécialisée. La quasi-totalité des cellules
sanguines, à l'exception de certains types de lymphocytes (voir plus loin) naissent dans la
mœlle osseuse. Elles ont besoin pour être fabriquées normalement de vitamines B12 et d’acide
folique, de plus, la lignée des globules rouges à besoin de fer et de pyridoxine (vitamine B6)
Le processus qui donne naissance aux cellules s'appelle hématopoïèse. Les cellules
sanguines et leur précurseur sont présents dans le sang, la mœlle osseuse et dans certains
organes. Ces organes riches en cellules sanguines sont souvent impliqués dans les processus
pathologiques touchant le sang et la mœlle osseuse. On parle d'organes hématopoïétiques. Il
s'agit essentiellement de l'ensemble du système lymphatique : ganglions, canaux
lymphatiques, rate, amygdales. Le foie n'est habituellement pas rattaché aux organes
hématopoïétiques, mais son rôle dans l'hématopoïèse lors de l’embryogenèse fait qu'il est
souvent impliqué dans les maladies hématologiques.
Les métabolismes de quatre vitamines (K, B6, B12, acide folique) et celui du Fer sont donc
de grande importance en hématologie.
11. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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2- LES FONCTIONS DU SANG
Grace à sa caractéristique distinctive de circuler à travers tout l’organisme, le sang
accomplit des fonctions de transport et de communication. Le sang est un transporteur
d’énergie (chaleur, molécules énergétiques) et de substances nutritives très variées (minéraux,
vitamines, acides aminés, glucides, lipides et autres). Il transporte également les substances de
déchets résultant de la combustion et des métabolismes vers les organes émonctoires (rein,
foie, poumon), participant ainsi à l’épuration de l’organisme.
Les communications assurées par la circulation sanguine dans tout l’organisme lui
permettent de jouer un rôle capital dans la régulation des interrelations complexes existant
entre les divers organes et fonctions physiologiques. Ce rôle est rempli par le transport de
nombreuses hormones, amines biogènes, et substances apparentées.
Les véhicules sanguins tels les matériaux nutritifs, les substances de déchets, les hormones et
substances analogues, et de nombreux médicaments sont, pour plusieurs d’entre eux,
véhiculés dans le sang par des protéines porteuses, soit spécifiques, soit non spécifiques (par
exemple albumine).
Par ses éléments constitutifs cellulaires et plasmatiques, le sang assume quatre fonctions
spécifiques principales :
1- Le transport d’oxygène vers les tissus périphériques, et le transport du CO2 au
poumon se fait essentiellement grâce à l’hémoglobine contenue dans les globules
rouges, qui constitue la protéine spécifique transportant l’oxygène et une partie du
CO2
2- La défense de l’organisme contre l’agression étrangère. Cette défense est assumée par
plusieurs mécanismes en concertation (la surveillance immunitaire, l’immunité
cellulaire et humorale, et la phagocytose).
3- L’enraiement de l’hémorragie, c'est-à-dire la fonction d’hémostase. Les mécanismes
sanguins par lesquels l’organisme arrête l’hémorragie mettent à contribution des
cellules sanguines, les plaquettes, et un ensemble complexe de protéines plasmatiques
de l’hémostase appelé lé système de la coagulation plasmatique.
4- La préservation de la fluidité et donc de la capacité circulatoire du sang. Celle-ci est
rendue possible grâce à la très grande capacité de déformabilité des cellules sanguines,
essentiellement celles des érythrocytes étant donné leur grande importante
quantitative. De plus le plasma possède des protéines anticoagulantes qui ont pour
propriété d’empêcher la formation d’un caillot bloquant la circulation, et un ensemble
de protéines capable de dissoudre un caillot qui se serait formé dans un vaisseau : ce
système est celui de la fibrinolyse.
Le plasma est un milieu aqueux riche en protéines très variées, et qui contient en outre
d’autres macromolécules et micromolécules. La protidémie normale varie de 60 à 80
12. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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grammes/litre dont environ 50% d’albumine : la pression oncotique du plasma est directement
proportionnelle à sa teneur en protéine et surtout en albumine.
Le plasma assure le transport des cellules sanguins qui sont maintenues en suspension,
dissociées les unes des autres, en équilibre fragile. Il sert également de véhicule non
spécifique, par l’albumine notamment, pour le transport de plusieurs micromolécules
endogènes ou exogènes (médicaments). Il existe plusieurs protéines plasmatiques qui
participent à l’hématopoïèse, soit pour le transport ou le stockage de la vitamine B12 ou du
fer, soit pour la régulation de la production des cellules sanguines.
On retrouve également dans le plasma les nombreuses protéines qui constituent l’arsenal de
l’immunité humoral. Les immunoglobulines (IgG, IgA, IgM, IgD, IgE) et le système du
complément ont des propriétés opsonisantes et il existe également d’autres opsonines :
L’opsonisation est la propriété de faciliter la phagocytose.
Le plasma joue aussi un rôle décisif dans l’hémostase et la fibrinolyse, par le système de la
coagulation plasmatique, les cofacteurs de l’hémostase primaires et le système fibrinolytique.
La concertation dans ce cas s’établit avec les plaquettes sanguines et la paroi des vaisseaux.
3- ETUDE QUANTITATIVE GLOBALE
Dans les études quantitatives du tissu sanguin, on distingue naturellement deux grands
compartiments : Celui des cellules sanguines et celui du plasma. Les mesures sont tantôt
absolues, soit les masses ou volumes, tantôt relatives, c’est-à-dire les proportions d’un
compartiment par rapport au sang total.
Les mesures relatives de la masse sanguine sont l’hématocrite et le plasmacrite.
L’hématocrite est une mesure du volume globulaire relativement au sang complet, exprimée
en pourcentage. On centrifuge un petit volume du sang à grande vitesse dans un tube gradué,
et on apprécie le pourcentage du volume total qui est occupé par les globules tassés
(essentiellement les érythrocytes). On peut de même calculer le plasmacrite, soit le
pourcentage du volume sanguin occupé par le plasma. La mesure de l’hématocrite se fait sur
sang capillaire ou sur sang veineux, dans un micro-tube.
On entend par masse sanguine le volume sanguin total de l’organisme. Ce dernier est
constitué d’une part par le volume globulaire, qui correspond au volume occupé par
l’ensemble des cellules sanguines, et d’autre part par le volume plasmatique. En pratique, le
volume globulaire correspond essentiellement à la masse des érythrocytes qui constituent
quelque 99% des cellules sanguines. On peut mesurer le volume sanguin total par l’étude de
la dilution dans le sang circulant d’une substance étrangère injectée et facilement identifiable,
par exemple un radio-isotope fixé à l’albumine humaine ou à des érythrocytes. Ainsi, lorsque
l’on injecte des globules rouges marqués avec le chrome51, on obtient une mesure directe du
13. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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volume globulaire, et on calcule indirectement le volume sanguin en divisant le volume
globulaire par l’hématocrite.
Les valeurs normales du volume sanguin total, du volume globulaire et du volume
plasmatique varient, à l’état normal, en fonction du poids, de la taille, du sexe et de l’âge.
Il existe une multitude de techniques d’analyses des protéines plasmatiques : Certaines sont
des méthodes d’analyses globales, d’autres sont des dosages spécifiques de l’une ou l’autre
des activités biologiques ou immunochimiques des ces macromolécules.
Plasma et sérum : Lorsque le plasma coagule dans un tube, le fibrinogène est transformé en
un caillot de fibrine et la phase liquide résiduelle s’appelle le sérum.
Deux méthodes analytiques globales sont d’usage courant : L’électrophorèse et
l’immunofixation des protéines sériques. Le principe de la technique de l’électrophorèse est la
séparation des protéines sériques en fonction de leur vitesse de migration lorsqu’elles sont
soumises à un champ électrique. Les supports habituellement utilisés pour la migration sont
l’acétate de cellulose et le gel d’agarose. On peut séparer et reconnaitre de cette façon
plusieurs fractions de protéines plasmatiques.
Les techniques dites de haute résolution (électrophorèse gel haute résolution et
électrophorèse capillaire) séparent les protéines en 7 fractions : pré-albumines, albumines, α1-
globulines, α2-globulines, β1-globulines, β2-globulines, γ-globulines.
Remarque :
- Le fibrinogène migre en β, il peut apparaître sur l’électrophorèse si un anticoagulant est
utilisé ou si le tube sec a mal coagulé.
Figure 1: Profil d'électrophorèse des protéines sériques
14. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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- En cas d’hémolyse, on peut observer un pic d’hémoglobine migrant β ou un pic
d’hémoglobine liée à l’haptoglobine migrant en α2.
Figure 2: Technique haute résolution
Gammapathies monoclonales
Figure 3: Gammapathie Monoclonale
Une Gammapathie monoclonale est fréquemment diagnostiquée grâce à la mise en évidence
d’un pic plus ou moins étroit au niveau des γ-globulines.
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La migration de l’immunoglobuline monoclonale peut rarement se situer au niveau des autres
fractions protéiques.
Un pic monoclonal sera d’autant plus difficile à visualiser qu’il est en faible quantité et qu’il
migre au niveau d’une autre fraction protéique.
Attention, l’hémolyse ou la présence de fibrinogène peut donner un aspect de pic monoclonal.
Lors de la mise en évidence d’un pic monoclonal à l’électrophorèse des protéines sériques, on
réalise un typage de l’immunoglobuline monoclonale (principalement par immunofixation).
Principe analytique On réalise une électrophorèse des protéines sériques sur gel.
On incube avec des antisérums (anti-IgG, anti-IgM, anti-IgA, anti-κ, anti-λ) : il y a
précipitation des complexes Ag-Ac. On révèle les complexes par un colorant.
Figure 4: Immunofixation des protéines sériques
L’immunofixation est aussi utilisée pour définir la sélectivité d’une protéinurie.
Protéinurie sélective : on retrouve principalement de l’albumine
Protéinurie moyennement sélective : on retrouve de l’albumine, des IgG et des IgA
Protéinurie non sélective : on retrouve de l’albumine, des IgG, des IgA, des IgM (voire des
polymères d’haptoglobine).
L’immunosoustration est une technique analytique permettant le typage d’un pic
monoclonal en électrophorèse capillaire. On ajoute au sérum des anticorps fixés à des billes
(anti-IgG, anti-IgM, anti-IgA, anti-κ, anti-λ). Les complexes Ag-Ac précipitent et on réalise
l’électrophorèse capillaire sur le surnageant. On visualise alors une disparition de la fraction
correspondant à l’antisérum utilisé.
16. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Figure 5: Immunosoustration des protéines sériques
Les protéines de l’inflammation sont des protéines dont la concentration varie d’au moins
25% au cours des 7 jours suivant le début d’un processus inflammatoire aigu.
Figure 6: Principales protéines de l'inflammation
17. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Les examens hématologiques courants apprécient surtout le nombre et la morphologie des
cellules circulantes. On étudie les éléments figurés du sang par :
a)- des techniques de numération globulaire.
b)- des méthodes d’analyses de la population érythrocytaire, et
c)- l’étude du microscope conventionnel d’étalements sanguins colorés par des
colorants appropriés, comme le May-Grunwald-Giemsa.
Nous étudierons successivement les trois lignées sanguines, leur morphologie, leur fonction et
les variations physiologiques ou pathologiques.
4- ETUDE DES CELLULES SANGUINES
Les Numérations Globulaires: ces techniques permettent de calculer le nombre absolu de
cellules contenues dans l’unité de volume du sang. Les méthodes modernes de numération des
cellules sanguines ont recours à des appareils électroniques qui ont augmenté de beaucoup la
précision et la reproductibilité de ces décomptes.
Les méthodes d’analyse de la population érythrocytaire: Grace à trois données de base,
l’hémoglobine, l’hématocrite et le nombre de globules rouges par mm3, on peut calculer des
valeurs moyennes pour certains paramètres des érythrocytes appelés constantes
érythrocytaires.
L’examen des éléments figurés du sang sur frottis : Les étalements sanguins sont obtenus en
déposant une petite goutte de sang sur une lame de verre et en l’étalant finement sur celle-ci à
l’aide d’une seconde lame de verre, Après coloration, o, observe au microscope les propriétés
des hématies et la morphologie des divers leucocytes et des plaquette.
L’examen des éléments sanguins a pour bits :
1- L’appréciation de la variation morphologique individuelle des cellules sanguines :
variation de taille, de la forme et de la coloration.
2- L’établissement des proportions des divers éléments leucocytaires dont l’ensemble
donne la leucocytose totale, c’est la formule leucocytaire.
3- L’identification et l’étude de cellules sanguines anormales.
La technique d’examen conditionne la qualité des résultats de l’hémogramme. Il se réalise
par ponction veineuse franche, chez un sujet non à jeun mais à distance d’une ingestion de
corps gras, normo hydraté. Le prélèvement se réalise sur tube contenant un chélateur du
calcium (EDTA), le mélange sang-EDTA doit être complet (mouvements répétés de
retournement du tube). Si l’on opère des prélèvements multiples, les prélèvements destinés
aux analyses hématologiques-hémogramme et coagulation-doivent être réalisés en premier
[afin d’éviter un début d’activation des phénomènes d’hémostase à l’intérieur de l’aiguille de
prélèvement]. Les prélèvements ne doivent pas être réalisés dans une veine perfusée ou à
partir d’une ligne de perfusion (risque de dilution du sang par le produit de perfusion). Si un
hémogramme est réalisé sur cathéter, une purge préalable de la ligne de perfusion doit être
préalablement réalisée. Les tubes sont calibrés pour des prélèvements de 5 ml En cas de
prélèvements en micro-méthodes pour nourrisson et petit enfant, les tubes sont de 1mL.
19. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Les Cellules Sanguines
LES LEUCOCYTES
Les différentes classes de leucocytes
L'étude du frottis sanguin après coloration a permis, en première approche de reconnaître deux grands
types de leucocytes :
- les "polynucléaires", qui paraissent avoir plusieurs noyaux. Il s'agit en fait de noyaux multilobés
- les "mononucléaires" qui comprennent en fait deux types de cellules totalement différentes :
. Les "monocytes", cellules macrophagiques circulantes
. Les "lymphocytes", support de l'immunité et la mémoire immunitaire
Dans quelques cas circulent dans le sang des cellules dérivées des lymphocytes : les plasmocytes.
I -LES POLYNUCLEAIRES
Les polynucléaires, caractérisés par un noyau multilobé, comportent dans leur cytoplasme des
granulations. Ces granulations ont des affinités tinctoriales différentes lorsque le frottis est
coloré au May Grunwald Giemsa (MGG) ce qui permet de classer les polynucléaires en trois
catégories :
- polynucléaires neutrophiles (granulocytes neutrophiles) dont les granulations, fines
prennent des colorants neutres
- polynucléaires éosinophiles qui comportent de grosses granulations réfringentes de
couleur orange
- polynucléaires basophiles, peu abondants, qui contiennent de grosses granulations
rouge violacé appelées métachromatiques.
LES POLYNUCLEAIRES NEUTROPHILES
Les polynucléaires neutrophiles sont de taille moyenne (10 à 14 µ). Leur noyau a de 2 à 5
lobes, la chromatine est dense. Le cytoplasme est abondant et contient de fines granulations
secondaires spécifiques neutrophiles, Marron ou beige à la coloration MGG.
L’étude en microscopie électronique a montré que le cytoplasme contient tous les organes
vitaux d’une cellule normale, soit des mitochondries, des ribosomes et l’appareil de Golgi.
20. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Les granulations neutrophiles correspondent à des lysosomes primaires, qui contiennent une
batterie d’enzymes hydrolytiques et autres substances à propriétés bactéricides ou
inflammatoires. Les granulations azurophiles (première génération de granulations) s’y
retrouvent en petit nombre : elles contiennent des protéines cationiques et plusieurs enzymes,
dont la myéloperoxidase.
Figure 9: Polynucléaire Neutrophile
Les polynucléaires ne sortent pas de la moelle dès la fin de leur maturation, il existe un
stock intra médullaire de polynucléaires qui ne sont libérés dans le sang qu'au fur et à mesure
des besoins.
Figure 10: Physiologie des Polynucléaires
21. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
12
L'ensemble de cette séquence dure entre 4 et 7 jours. Une fois passés dans le circuit sanguin
les polynucléaires y restent quelques heures avant de traverser la paroi vasculaire par
diapédèse pour aller dans le compartiment tissulaire et y exercer leur fonction de phagocytose
et destruction des bactéries étrangères.
Dans les vaisseaux les polynucléaires se trouvent dans deux états différents, les uns circulent
librement dans la lumière vasculaire (PC : polynucléaires circulants), les autres sont collés à la
paroi du vaisseau (PM : polynucléaires marginés). C'est le phénomène de la margination.
Seuls les polynucléaires circulants sont prélevés et comptabilisés lors d'une numération
sanguine. L'équilibre entre ces deux compartiments vasculaires est dynamique, les
polynucléaires circulants se collant à la paroi quelques secondes plus tard et les polynucléaires
marginés se détachant de la paroi pour se remettre à circuler s'ils n'ont détecté aucune
molécule étrangère les incitant à passer dans les tissus et à se diriger par chimiotaxie vers le
lieu de prolifération bactérienne. Cet équilibre entre les deux secteurs est mal connu, environ
la moitié des polynucléaires sont circulants et les autres marginés, mais il est évident qu'un
déséquilibre entre les deux entraine soit une pseudo neutropénie (trop de polynucléaires
marginés), soit une pseudo polynucléose (trop de polynucléaires circulants). On connaît
quelques causes de modification de cet équilibre, mais pas toutes. Un traitement corticoïde
démargine les polynucléaires, une hypermargination s'observe chez 30% des sujets de race
noire. À noter que l'existence de ce compartiment marginé et de stocks médullaires de
polynucléaires donnent une grande souplesse au système pour mobiliser rapidement des
polynucléaires en cas de besoin (infection bactérienne) sans avoir à faire intervenir le
processus beaucoup plus long de synthèse médullaire.
Figure 11: Phagocytose
Pour explorer les polynucléaires, on dispose de la numération dans le sang, de l'étude de la
morphologie sur le frottis sanguin et de réactions cytochimiques : réaction des phosphatases
22. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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alcalines leucocytaires (PAL), réaction des myélopéroxydases. Ces deux activités
enzymatiques ne sont pas spécifiques des polynucléaires neutrophiles.
Certains tests fonctionnels peuvent être faits :
- étude du chimiotactisme in vitro (chambre de Boyden),
- étude de la phagocytose in vitro de germes de levures ou de particules de latex. Cette
technique peut maintenant être abordée par la cytométrie en flux,
- étude du pouvoir bactéricide : formation de radicaux oxygénés, réalisable aussi par
cytométrie en flux.
Les polynucléaires neutrophiles sont les leucocytes sanguins les plus nombreux : ils
représentent 50 à 75% des leucocytes sanguins, soit pour 4000 à 10000 leucocytes/mm3
(4 à
10 x 109
/l), un taux moyen chez l'adulte de 2000 à 7500 polynucléaires neutrophiles par mm3
de sang (2 à 7,5 x 109
/l).
Les polynucléaires neutrophiles sont, en fait, dans le sang, répartis en deux secteurs :
- le secteur circulant, qui est le seul mesuré directement lors de la prise de sang pour
numération
- le secteur marginal : les polynucléaires sont plaqués contre les parois des vaisseaux
surtout dans la rate, le foie et les poumons. Ce secteur n'est pas mesuré alors qu'il représente
une quantité égale au secteur circulant. Ces polynucléaires marginés sont fonctionnels et
immédiatement disponibles. On connaît en pathologie des exemples d'excès de margination
des polynucléaires neutrophiles donnant des neutropénies. A l'inverse, la mobilisation de ces
polynucléaires marginés augmente la leucocytose sanguine.
Les polynucléaires neutrophiles font un très court séjour dans le sang circulant qui est
essentiellement un lieu de passage pour ces éléments. La durée de vie intravasculaire des
granulocytes neutrophiles est définie par un T1/2 de 4 à 6 heures.
LES POLYNUCELAIRES EOSINOPHILES
Les polynucléaires éosinophiles ont à peu près la même taille. Leur noyau est le plus souvent
bilobé avec une chromatine moins dense que celle des granuleux neutrophiles. Leur
caractéristique principale est dans les granulations, celles ci sont bien individualisées, rondes
comme des billes, tassées les unes contre les autres, habituellement de couleur rose orangée
(mais la coloration varie en fonction du Ph du colorant utilisé). Il est très fréquent d'observer
des petits trous ronds dans le cytoplasme, en effet les granulations des polynucléaires
éosinophiles contiennent de puissants enzymes protéolytiques qui, lors de l'étalement du sang
avant coloration, peuvent être libérés par l'éclatement de certains grains et digèrent un peu de
cytoplasme alentour, la granulation laisse un trou et apparaît ainsi en négatif. Cette lyse
cytoplasmique peut être plus importante et laisser des zones hyalines dépourvues de toute
granulation.
23. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
14
Figure 12: Polynucléaire Eosinophile
Comme le neutrophile, l’éosinophile est doué de mobilité et de phagocytose. Des travaux
récents lui attribuent d’autres fonctions, notamment dans les réactions immunitaires et
allergiques.
En microscopie électronique, les granulations spécifiques du polynucléaire éosinophile sont
formées de 2 composantes : une structure centrale cristalline, grossièrement rectangulaire,
présentant une périodicité de 3nm, et une matrice granulaire amorphe. Ces granulations
secondaires mûres sont responsables de la formation, dans les tissus à haute concentration
d'éosinophiles, des cristaux de Charcot-Leyden.
Les polynucléaires éosinophiles représentent 1 à 5% des leucocytes sanguins soit, en valeur
absolue de 40 à 400 par mm3 (0.04 à 0.4 x 109
/l). Leur temps de transit dans le sang est mal
connu. Il serait de 6 à 8 heures. Au total, la durée de vie moyenne de polynucléaires
éosinophiles est de 3 à 8 jours.
Les polynucléaires éosinophiles sont des cellules essentiellement tissulaires : ils naissent dans
la mœlle osseuse, transitent brièvement dans le sang avant de passer par diapédèse dans les
tissus où ils exercent leurs fonctions. La migration des éosinophiles est régulée par des
substances chimiotactiques. Ils interviennent dans les défenses immunitaires par leur pouvoir
phagocytaire et certaines substances contenues dans leurs granules. Une hyperéosinophilie
sanguine et tissulaire accompagne de nombreuses maladies allergiques ou parasitaires. Dans
certains cas, l'accumulation importante d'éosinophiles pourrait être responsable de lésions
tissulaires, dues aux substances présentes dans les granulations.
Les granulations contiennent des protéines cationiques qui sont les éléments les plus
caractéristiques. Elles sont au nombre de 4, présentes dans les granules spécifiques :
la protéine basique majeure (Major Basic Protein : MBP), la protéine éosinophile cationique
(Eosinophil Cationic Protein: ECP), la peroxydase (EPO) et la neurotoxine (Eosinophil
Derived Neurotoxin : EDN).
L'un des éléments essentiels de régulation de la croissance des éosinophiles et de leur taux
sanguin est l'interleukine 5 (IL-5).
24. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
15
Les polynucléaires éosinophiles ont des fonctions proches du polynucléaire : ils sont doués
de chimiotactisme, d'une faible capacité de phagocytose. Cependant, l'absence de lysozyme
les prive de pouvoir bactéricide efficace. Par contre, ils synthétisent un certain nombre de
cytokines : IL-1, IL-3, IL-5, GM-CSF.
Il n'y a pas en pratique de test d'exploration des éosinophiles et les principales pathologies
sont les augmentations des éosinophilies qui traduisent souvent des allergies ou des
parasitoses.
LES POLYNUCLEAIRE BASOPHILES
Les polynucléaires basophiles ont un noyau assez volumineux, souvent incisé. Le
cytoplasme et le noyau sont recouverts de grosses granulations en prenant les colorants
basiques d'où le nom de polynucléaires basophiles. Ce terme de basophilie ne doit pas être
confondu avec la basophilie cytoplasmique, rencontrée dans les cellules riches en ARN
comme les lymphocytes.
Les granulations des basophiles sont dites métachromatiques car elles ont la propriété de se
colorer en rouge violet lorsqu'elles sont au contact de colorant bleu comme le bleu de
toluidine. Cette propriété est due à la présence de mucopolysaccharide acide.
Leur répartition et leur cinétique sont mal connues. Ils ont un équivalent dans les tissus :
les mastocytes.
Figure 13: Polynucléaire Basophile
Les polynucléaires basophiles sont les moins nombreux. Ils représentent moins de 1 % des
leucocytes sanguins. Il y a donc moins de 100 polynucléaires basophiles par mm3
de sang
(<0,1 x 109
/l). Leur répartition et leur cinétique sont mal connues. Ils ont un équivalent dans
les tissus : les mastocytes.
Les polynucléaires basophiles sont doués de chimiotactisme. Ils n'ont pratiquement pas de
capacité de phagocytose et ne sont pas bactéricides. Ils interviennent dans les phénomènes
d'hypersensibilité immédiate grâce à récepteur de surface pour les IgE.
Les interactions des IgE membranaires avec l'antigène correspondant entraînent une
dégranulation des basophiles.
La dégranulation libère des produits très actifs : l'histamine qui est une amine vaso-active
entraînant la contraction des fibres musculaires lisses et une augmentation de perméabilité
capillaire responsable d'œdème ; l'héparine qui est un mucopolysaccharide acide. Le rôle
25. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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de l'héparine des polynucléaires basophiles est peu connu. C'est elle qui est responsable de la
métachromasie.
Le PAF, ou Platelet Activating Factor, est un constituant important des polynucléaires
basophiles. Ce facteur intervient probablement dans les phénomènes de chocs mais aussi dans
certains cas d'asthmes. Parmi les autres constituants des granulations, citons la sérotonine et
de la bradykinine.
II- LES MONONUCLEAIRES
LES MONOCYTES MACROPHAGES
Les monocytes appartiennent au système des phagocytes mononucléés qui comprend :
- les monocytes sanguins
- des cellules tissulaires : cellules de Langerhans de l'épiderme et du tissu conjonctif
sous-cutané, cellules de Kupffer dans le foie, macrophages alvéolaires du poumon,
macrophages pleuraux et péritonéaux des séreuses, cellules microgliales du système nerveux,
histiocytes spléniques, ostéoclastes.
Les monocytes sont, comme les polynucléaires, des cellules phagocytaires issues d'une même
lignée de la moelle osseuse. Ils phagocytent de grosses particules et sont donc dénommés «
macrophages ». Ils jouent un rôle essentiel dans le premier stade d'une réaction immunitaire
mettant en jeu les lymphocytes. Les monocytes sont les plus grandes cellules normales
circulant dans le sang, leur taille peut être supérieure à 20µ. Leur aspect est très polymorphe,
notamment leur noyau encoché mais non polylobé, souvent comme déchiqueté, aux formes
tarabiscotées, il n'y a pas un noyau de monocyte qui ressemble à un autre. La chromatine du
noyau ne comporte pas de masses denses comme celle du polynucléaire, elle est relativement
homogène, de couleur rosée. Le cytoplasme est gris bleu, inhomogène, spumeux. Il ne
contient pas de grains sinon quelques uns, fins ou grossiers. Un caractère très particulier du
monocyte est de contenir des vacuoles, zones vides arrondies, qui se situent aussi bien sur le
noyau que sur le cytoplasme.
Les monocytes représentent 2 à 10 % des leucocytes sanguins soit 100 à 1000 monocytes
par mm3
(0,1 à 1 x 109
/l).
Figure 14: Monocyte macrophage
26. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Après un transit sanguin de 20 à 40 heures, les monocytes passent dans les tissus et se
transforment en macrophages, grande cellule à cytoplasme abondant et mal limité qui peut
contenir des particules phagocytées. Elles peuvent prendre un aspect caractéristique dans
certains tissus, cités ci-dessus.
Les fonctions des monocytes sont très nombreuses. On en distingue deux principales :
La phagocytose.
La fonction de phagocytose est identique à celle des polynucléaires. Elle comprend un temps
d'adhésion dont on distingue deux types :
- fixation à des récepteurs non spécifiques : sur des globules rouges vieillis, des
corps étrangers et certaines bactéries
- fixation par l'intermédiaire de récepteurs spécifiques grâce au phénomène de
d'opsonisation.
Après cette phase d'adhésion succède l'ingestion de la particule ou de la cellule. A la
différence du polynucléaire neutrophile, le monocyte ne meurt pas après la phagocytose.
- dans certains cas, il détruit les particules de la cellule ingérée grâce à ses enzymes
mais il garde la capacité de présenter l'antigène correspondant aux cellules
immunitaires.
- dans d'autres cas, l'agent causal persiste ou se multiplie. Ceci peut aboutir à la
formation de cellules géantes par fusion de plusieurs macrophages ou de cellules
épithélioïdes, participant au granulome inflammatoire.
La phagocytose est donc un phénomène essentiel qui peut toucher
- soit des substances endogènes
globules rouges : l'hémolyse physiologique a lieu dans les histiocytes
macrophages qui récupèrent le fer et dégradent l'hémoglobine. Cette
hémolyse peut être exagérée lorsque les globules rouges sont recouverts
d'anticorps (anémie hémolytique auto-immune)
plaquettes : de la même façon, des plaquettes recouvertes d'anticorps
peuvent être détruites par les macrophages : thrombopénie immunologique
lipides : les monocytes macrophages sont parmi les premières cellules
concernées dans le processus de l'athérome.
- soit des substances exogènes
la phagocytose des bactéries, des virus, des parasites et des champignons est un
phénomène essentiel dans les défenses de l'organisme. En outre, leur rôle de
présentation avec l'antigène doit permettre les réactions immunitaires.
27. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
18
les monocytes macrophages ingèrent aussi des particules inertes : charbon,
goudron, silice...
Activités de synthèse et sécrétion
Les activités de synthèse et de sécrétion des monocytes macrophages sont très importantes.
Les principaux produits sont les suivants :
- cytokines et facteurs de croissance hématopoïétique
- facteur tissulaire de la coagulation
- enzyme : lysozyme, hydrolases, protéases
- protéine transporteuse : transferrine, ferritine, transcobalamine
- inhibiteur d'enzyme
- facteur du complément
- prostaglandine
En dehors de la numération des monocytes sanguins et de leur étude morphologique, on
dispose de quelques tests fonctionnels, en fait peu utilisés
- étude du métabolisme oxydatif
- étude de la phagocytose
- étude de migration
- étude du contenu enzymatique
En microscopie optique les éléments de la lignée monocytaire peuvent être caractérisés par
une réaction cytochimique : la réaction des estérases. Les estérases spécifiques sont inhibées
par le fluorure de sodium.
LES LYMPHOCYTES
Les lymphocytes ont une taille variable. On distingue parfois les petits lymphocytes qui ont
le diamètre d'un globule rouge (6 à 8 µ) et les grands lymphocytes, de 10 à 15 µ de diamètre.
Ce sont des cellules à noyau arrondi ou ovoïde. La chromatine est dense, sans nucléole. Le
cytoplasme est souvent assez basophile (coloration bleue). Il est peu abondant dans les petits
lymphocytes, et un peu plus abondant dans les grands lymphocytes mais le rapport nucléo-
cytoplasmique est rarement inférieur à 75%. On peut trouver quelques granulations
azurophiles dans le cytoplasme.
28. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
19
Figure 15: Petit Lymphocyte
Les grands lymphocytes ont à peu près la même taille que le polynucléaire. Leur cytoplasme
est bleuté, pour la plupart vide de granulation. Le noyau, arrondi ou quadrangulaire, est
inhomogène et plus clair que celui du petit lymphocyte. Le cytoplasme d'un faible
pourcentage de grands lymphocytes contient des granulations. Celles-ci sont soit deux ou trois
gros grains ronds de couleur violette, soit une dizaine de fines granulations azurophiles.
Certains lymphocytes (de type B) peuvent se transformer en plasmocytes. Ceci se produit
dans le tissu lymphoïde (ganglions) et normalement il n'y a pas de plasmocytes circulants. On
peut cependant en rencontrer et nous les décrirons ici. Le plasmocyte a des caractéristiques
très spécifiques qui le rendent reconnaissable entre tous. C'est une cellule oblongue, en forme
d'huître, arrondie à une extrémité et pointue à l'autre, de 15 à 20 µ de diamètre. Son noyau est
ovalaire situé au pôle arrondi de la cellule, formant avec l'axe de celle-ci un angle de 90°, à
chromatine en grosses mottes irrégulières, en écaille de tortue. Le cytoplasme est
habituellement abondant, très bleu, d'aspect volontiers spumeux, voire vacuolisé, avec un
archoplasme très net, zone claire située contre le noyau. De nombreuses variantes
morphologiques existent mais tous les plasmocytes ont en commun l'hyperbasophilie du
cytoplasme et l'excentration du noyau.
Figure 16: Plasmocyte
29. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
20
Figure 17: Divers aspects des lymphocytes stimulés
(Divers aspects des lymphocytes stimulés (lymphocytes atypiques ou hyperbasophiles) que
l'on peut observer au cours d'un syndrome mononucléosique. Un lymphocyte et un
polynucléaire neutrophile d'aspect normal (en haut à gauche), et plusieurs cellules plus
grandes, avec un noyau de forme variable et un cytoplasme plus ou moins nettement bleu
(basophile).
Les lymphocytes représentent 25 à 40 % des leucocytes sanguins chez l'adulte. Il y a donc
1000 à 4000 lymphocytes par mm3
(1 à 4 x 109
/l) chez l'adulte. Chez l'enfant les lymphocytes
sont plus nombreux, ils représentent souvent 60 % des leucocytes sanguins : lymphocytose
physiologique de l'enfant.
Les lymphocytes sanguins représentent en fait une très faible partie du pool
lymphocytaire de l'organisme. Après leur maturation dans la mœlle osseuse ou le thymus, les
lymphocytes migrent dans les organes lymphoïdes secondaires ou périphériques qui
Figure 18: Grand Lymphocyte à Grains
30. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
21
contiennent des lymphocytes B et T : les organes lymphoïdes secondaires sont la rate, les
ganglions et le tissu lymphoïde non encapsulé, distribué dans les muqueuses digestives
(plaque de Peyer) et dans les muqueuses respiratoires.
La mœlle osseuse est à la fois un organe lymphoïde primaire et secondaire.
Dans le sang la majorité des lymphocytes sont des lymphocytes de type T qui font un
circuit entre les voies lymphatiques, les veinules post-capillaires, les régions paracorticales
des ganglions lymphatiques, le canal thoracique et la circulation sanguine.
Les sous-populations lymphocytaires
Les lymphocytes B
Les lymphocytes B constituent 10 à 20% des lymphocytes du sang circulant. Ils sont
facilement identifiables grâce à la présence sur leur membrane de molécules
d’immunoglobulines (Ig) qu’ils synthétisent et expriment dès le début de leur différenciation.
Celle-ci est en effet associée à l’expression de différents récepteurs de surface.
Le lymphocyte B évolue par 2 étapes :
La première est une étape de différenciation qui se situe dans la moelle osseuse en dehors
de tout contact antigénique : elle concerne le passage de la cellule souche lymphoïde aux
lymphocytes B immatures. Elle permet l’expression membranaire du récepteur pour
l’antigène (BCR pour « B-cell receptor), récepteurs de type IgM et IgD de membrane qui peut
alors migrer vers les organes lymphoïdes périphériques. En cas de réarrangement génique non
fonctionnel ou la formation de lymphocytes B à forte affinité pour des auto-antigènes, le
lymphocyte B est éliminé.
La seconde étape est une étape de maturation dans les organes lymphoïdes périphériques et
dépend de l’activation par un antigène reconnu. Les lymphocytes B sont responsables de la
formation de follicules lymphoïdes où ils sont en contact avec les cellules dendritiques
folliculaires, cellules professionnelles de la présentation de l’antigène. Un lymphocyte B
sélectionné pour son affinité pour l’antigène migrera dans le centre germinatif du follicule où
il subira prolifération et nouvelle sélection. Les lymphocytes B non sélectionnés se mettent en
apoptose et sont phagocytés par des macrophages (ils deviennent des macrophages à corps
tingibles). La maturation du lymphocyte B sous l’induction de l’antigène aboutit à la sélection
du lymphocyte B qui a la meilleure affinité pour l’antigène puis la maturation en plasmocyte
sécréteur de l’Ig (phénomène de commutation isotypique) et la formation de lymphocytes B
mémoire.
Les lymphocytes B ont des récepteurs pour le fragment Fc des Ig, pour le complément
(fractions C1q et C3), pour les interleukines (IL-2, IL-4, IL-6 ; l’IL-2 participe à la maturation
des lymphocytes B, l’IL-4 est un facteur de croissance et l’IL-6 un facteur de différenciation),
pour la transferrine.
La réponse humorale B est de deux types :
o antigène T indépendant (antigènes polysaccharidiques ou
lipopolysaccharidiques) ;
31. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
22
o antigène T dépendant où existe une coopération entre les lymphocytes B, les
macrophages et les lymphocytes T CD4+, en présence d’une histocompatibilité
HLA de classe II (restriction allogénique). La réponse primaire est de type
IgM, la réponse secondaire de type IgG.
Les lymphocytes T
Les lymphocytes T présentent une différenciation contrôlée par le thymus (lymphocytes
thymo-dépendants ou T). La différenciation thymique est marquée par le réarrangement des
gènes codant pour les chaînes des récepteurs T et l’expression membranaire d’un récepteur de
membrane à l’antigène, le TCR (pour « T-cell receptor »).
Il existe dans le thymus une sélection positive (seuls survivent les thymocytes dont le
récepteur T peut reconnaître les peptides présentés par les molécules du CMH du soi) et une
sélection négative (les thymocytes dont le récepteur est de forte affinité pour les molécules du
soi [lymphocytes T auto-réactifs de forte affinité] sont éliminés par apoptose, de même que
les thymocytes qui produisant un récepteur T non fonctionnel).
Le récepteur T pour l’antigène se décompose en deux structures fonctionnelles : un
hétérodimère dont la fonction est de reconnaître l’antigène à la surface de la cellule
présentatrice d’antigène en association avec une molécule d’histocompatibilité ; et un
complexe multiprotéique dénommé CD3 dont la fonction est de transmettre le signal
intracellulaire d’activation du lymphocyte T.
La molécule CD4 est exprimée sur les lymphocytes T dits helper, la molécule CD8 sur les
lymphocytes T cytotoxiques et suppresseurs. La présence de la molécule CD4 ou CD8
augmente la sensibilité du lymphocyte T à l’antigène (augmentation de la sensibilité
d’environ 100 fois) présenté par les molécules de classe II (lymphocyte CD4) ou de classe I
(lymphocyte CD8) (c’est-à-dire que ces molécules diminuent de 100 fois la dose d’antigène
nécessaire à l’activation du lymphocyte T). Les lymphocytes CD4 interviennent dans la
régulation de l’immunité humorale où ils sont indispensables dans la réponse B vis-à-vis
d’antigènes T dépendants, et dans la réponse cellulaire par la sécrétion de cytokines
(lymphocytes CD4+ Th1 et sécrétion de l’IL-2 et l’IFN ; lymphocytes CD4+ Th2 et sécrétion
d’IL-4, IL-6, IL-10, IL-13 et IL-15).
Les lymphocytes cytotoxiques T CD8+ sont restreints par le CMH, l’action du lymphocyte
T CD8+ ne pouvant se faire que lorsqu’un antigène est présenté par les molécules de classe I.
Les lymphocytes T jouent un rôle dans la défense anti-infectieuse et les rejets de greffe par
coopération avec les lymphocytes B, par sécrétion de lymphokines et par action cytotoxique.
Les lymphocytes NK
Les lymphocytes NK sont des lymphocytes ni B ni T qui représentent 5-15% des
lymphocytes du sang périphérique. Ce sont des lymphocytes de grande taille qui expriment
des granules intracytoplasmiques et sont ainsi souvent appelés des grands lymphocytes
granuleux. Ils dérivent d’un précurseur médullaire CD34+ commun avec les lymphocytes T.
Ils ne connaissent pas de maturation thymique, ils n’expriment pas les récepteurs
membranaires pour l’antigène. Par contre, ils expriment des récepteurs de faible affinité pour
32. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
23
le fragment Fc des Ig, la molécule CD16 et la molécule NCAM (CD56), isoforme d’une
molécule neuronale. Ils sont donc CD3-, sIg-, CD16+, CD56+. Les lymphocytes NK
présentent des propriétés cytotoxiques caractéristiques grâce à deux molécules de lyse
cellulaire contenues dans les granules intracytoplasmiques (la perforine et le granzyme B).
Les lymphocytes NK sont doués de cytotoxicité de deux types :
l’ADCC (« antibody-dependent-cytotoxicity »), réponse anticorps dépendante. Elle
permet aux lymphocytes NK de lyser des cibles recouvertes d’anticorps. Le récepteur
activateur est la molécule CD16.
Une cytotoxicité directe naturelle lui permettant de lyser sans immunisation préalable
des cellules tumorales, des cellules infectées par des virus ou des cellules
alllogéniques. La reconnaissance par les cellules NK de molécules du CMH de classe I
exprimées par les cellules potentiellement cibles confère une protection contre la lyse
NK, via l’activation de récepteurs inhibiteurs sur la cellule NK (récepteurs KIR pour)
« killer inhibitory receptors ». Les cellules NK sont activées par l’interféron et l’IL-2.
Figure 19: Les Sous Populations Lymphocytaires en fonction de l'âge
33. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
24
LES PLAQUETTES
Les plaquettes sanguines jouent un rôle essentiel dans l'hémostase. Elles proviennent de la
fragmentation du cytoplasme des mégacaryocytes médullaires. Ce sont des petits éléments de
2 ou 3µ de diamètre, arrondis ou triangulaires, sans noyau, contenant de fines granulations
rosâtres. Elles peuvent être isolées sur la lame colorée ou en amas, car elles ont une tendance
à l'agrégation. Dans ce dernier cas il faut savoir les rechercher sur les bords de la lame ou en
queue de frottis.
Leur centre est occupé par des granulations : chromomères. La partie non colorée s'appelle
hyalomère.
Le taux normal de plaquettes est chez l'adulte de 150 à 400 x 109/l (150 000 à
400 000/mm3
). A l'état physiologique, un tiers des plaquettes est contenu dans la rate, ceci
explique que lorsque la rate augmente de façon importante son volume, le chiffre des
plaquettes au niveau sanguin baisse.
La durée de vie des plaquettes est courte 4 à 8 jours. Cette durée se raccourcit dès qu'il y a
activation de l'hémostase.
Les plaquettes interviennent aux 2 premiers temps de l’hémostase : Leur rôle principal se
situe lors de l’hémostase primaire, où elles formeront le premier caillot (thrombus blanc),
mais aussi lors de la coagulation, où elles servent de support à l’activation des facteurs
(activité appelée autrefois “ facteur 3 plaquettaire ”).
Les plaquettes portent les antigènes érythrocytaires ABO, les antigènes HLA et des
antigènes spécifiques : les antigènes HPA, permettant de décrire 5 groupes plaquettaires : les
groupes HPA-1 à HPA-5). Des anticorps peuvent donc apparaître après transfusion de
plaquettes rendant les transfusions plaquettaires suivantes inefficaces.
Les différents états d'activation plaquettaire vont en modifier la forme : une plaquette activée
devient d'abord sphérique puis elle émet des prolongements cytoplasmiques et enfin s'étale
très largement.
Dans ce frottis particulier, où les plaquettes sont abondantes parce qu'elles ont été
artificiellement concentrées, on peut apprécier leurs dimensions en les comparants aux
globules rouges. Leur diamètre est trois fois plus petit; il est compris entre 2 et 4 µm.
La plaquette sanguine possède un cytosquelette, des grains, du glycogène, des mitochondries,
un système tubulaire dense et un système canaliculaire ouvert. La partie la plus importante du
cytosquelette est un anneau périphérique de microtubules.
Les grains les plus nombreux sont appelés grains alpha; ils renferment les activateurs de
l'hémostase. Leur contenu est opaque aux électrons et comprend fréquemment une structure
plus dense, le nucléoïde. D'autres, beaucoup plus rares et appelés corps denses, contiennent du
calcium, de l'ADP et de la sérotonine. En microscopie optique, tous ces grains ont l'aspect de
granulations azurophiles.
34. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
25
Figure 20: Très nombreuses plaquettes
Les plaquettes ont la forme de disques biconvexes ronds ou ovales. Lorsqu'elles sont activées,
elles émettent de très nombreux pseudopodes qui se présentent, dans cette micrographie à
balayage, comme des prolongements de forme très diverse.
Figure 21: Plaquettes avec des pseudopodes
Le système tubulaire dense, désigné par des flèches, est formé de tubules courts et aplatis,
dont le contenu est dense aux électrons. Il dérive du réticulum endoplasmique de la cellule qui
a donné naissance aux plaquettes.
35. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
26
Figure 22: Système Tubulaire Dense
Le système canaliculaire ouvert est composé de grandes vacuoles et de saccules organisés en
réseau. On l'appelle ainsi parce qu'il communique avec le milieu extérieur. Ce système est une
réserve membranaire et permet des échanges rapides entre le contenu plaquettaire et le milieu
environnant.
Figure 23: Système Canaliculaire Ouvert
Rôle dans l'hémostase
Dès que l'endothélium (E) est lésé, la plaquette sanguine (P) est attirée vers la brèche qui a
mis à nu la membrane basale et le tissu conjonctif sous-jacent qui recouvre les cellules
musculaires lisses situées dans le bas de l'image.
36. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
27
Figure 24: brèche vasculaire
Immédiatement, la plaquette se métamorphose. Bien arrondie lorsqu'elle n'est pas activée (1),
elle émet d'abord de longs prolongements (2) puis adhère au tissu lésé et s'étale
progressivement (3 et 4). Elle libère alors les facteurs de la coagulation contenus dans ses
granules, via son système canaliculaire ouvert. D'autres plaquettes se collent à celles qui sont
en place.
Figure 25: Métamorphose plaquettaire
Toutes les plaquettes impliquées dans cette première réaction forment le clou plaquettaire
ou thrombus blanc qui bouche l'interstice dû à la lésion et arrête ainsi l'hémorragie. Il est
délimité par un pointillé dans l'image. A ce stade, l'agrégation des plaquettes est encore
réversible.
Le clou plaquettaire augmente de volume. Un des facteurs plaquettaires transforme le
fibrinogène sanguin en un réseau de fibrine insoluble (F) qui emprisonne les plaquettes (P) et
rend l'agrégation irréversible.
37. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
28
Figure 26: Clou Plaquettaire
Dans un petit vaisseau comme celui-ci, l'agrégation plaquettaire suffit, à elle seule, pour
obstruer la lumière vasculaire. L'endothélium du vaisseau est désigné par des flèches. Les
plages cytoplasmiques plus claires, marquées par un astérisque, appartiennent à d'autres
cellules sanguines emprisonnées dans l'agrégat.
Figure 27: Réseau de Fibrine
38. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
29
Figure 28: Agrégation plaquettaires
Dans les vaisseaux plus grands, la fibrine, ici colorée en violet, continue à précipiter autour du
thrombus blanc, situé dans le bas de l'image. Le réseau emprisonne alors les globules rouges
et tous les autres éléments figurés du sang.
Figure 29: Fibrine
C'est ainsi que le thrombus blanc devient un thrombus rouge qui, en augmentant de volume,
peut, comme ici, obstruer un vaisseau. Si la paroi annulaire de ce vaisseau est nettement
visible, son endothélium par contre est devenu méconnaissable. Il est partiellement détruit et
partiellement masqué par le thrombus. Beaucoup plus tard, le vaisseau sera reperméabilisé
grâce à un mécanisme complexe, la fibrinolyse.
39. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
30
Figure 30: Thrombus Rouge
La plaquette sanguine est donc l'élément figuré du sang responsable de l'hémostase.
Résumons schématiquement cette fonction.
1. Dès qu'il y a lésion endothéliale, les plaquettes adhèrent au tissu conjonctif et forment
un clou plaquettaire qui colmate la brèche.
2. Elles libèrent des facteurs plaquettaires.
3. Ceux-ci induisent une agrégation plaquettaire d'abord réversible.
4. Lorsque les plaquettes sont enveloppées dans un réseau de fibrine, l'agrégation devient
irréversible.
Figure 31: Reperméabilisé du vaisseau
40. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
31
LES ERYTHROCYTES
L’érythrocyte ou Le globule rouge, encore appelé hématie est la cellule sanguine la plus
abondante. Elle est ainsi appelée à cause de la couleur rouge-rosée qu'elle prend à la
coloration de May Grunwald Giemsa (MGG), au microscope optique. Cette coloration est due
à son contenu en hémoglobine. L'hémoglobine transporte l'oxygène, capté lors de la
respiration alvéolaire, vers les tissus de l'organisme.
Le globule rouge adulte normal, cellule mature de la lignée érythrocytaire, a la forme d'une
lentille biconcave. Son diamètre est de 8µm. C'est une cellule anucléée. Elle prend une
coloration rose vif au MGG, avec en son centre, une zone plus claire, appelée centre clair.
La forme particulière du globule rouge lui permet :
- d'avoir une plus grande surface par rapport à son volume que la forme sphérique, ce
qui favorise les échanges d'oxygène.
- d'avoir une plus grande déformabilité que la forme sphérique, plus rigide. Ceci
permet le passage du globule rouge dans la microcirculation, et en particulier dans les pores
des sinus de la rate qui n'ont que 0,5 à 2,5 µm de diamètre.
Figure 32: Globule rouge vu de face et de profil
41. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
32
La forme et la taille des globules rouges sont à l'état normal très homogènes et toute variation
traduit une anomalie cellulaire.
Le globule rouge est souvent comparé à un "sac" contenant de l'hémoglobine et les molécules
énergétiques indispensables à sa survie. Sa structure se décompose schématiquement en trois
éléments : la membrane, les enzymes, et l'hémoglobine.
La membrane du globule rouge
Elle comporte : - la membrane cytoplasmique
- le cytosquelette membranaire
La membrane cytoplasmique: Sa structure est celle d'une membrane cellulaire classique,
elle est constituée d'une bicouche lipidique où s'intercalent des protéines. Ces protéines sont
de plusieurs types. Certaines sont des transporteurs d'ions chlore et bicarbonate, d'autres sont
des récepteurs membranaires. Une partie de ces protéines est porteuse des fonctions
antigéniques du globule rouge et des groupes sanguins érythrocytaires (ABO, Rhésus, etc...).
Le cytosquelette érythrocytaire (ou squelette membranaire) : Il est responsable des
propriétés mécaniques du globule rouge. Il est formé d'un réseau bidimensionnel de protéines
qui tapissent la face interne de la membrane cytoplasmique du globule rouge. Le principal
constituant protéique de ce réseau est la spectrine ( et). Les molécules de spectrine sont
associées entre elles et arrimées à la membrane érythrocytaire par l'intermédiaire de l'ankyrine
et d'autres protéines, telles que la protéine bande 3, les protéines 4.1 et 4.2.
Figure 33: Structure de la membrane érythrocytaire
42. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
33
Les protéines transmembranaires jouent un rôle essentiel dans les échanges du globule rouge
avec le milieu extérieur. Les plus importantes sont les ATPases Na+ et K+ dépendantes qui
permettent le transport actif des cations Na+ et K+, le ATPases Ça++ dépendantes et les
protéines permettant le transport des anions, de l'eau, du glucose.
Trois protéines transmembranaires permettent la stabilité de forme du globule rouge en se
fixant sur les protéines intrinsèques du cytosquelette: Ce sont la protéine 3, la Glycophorine A
et la Glycophorine C.
- La Protéine 3 se fixe à la β spectrine grâce à l'Ankyrine
- Les Glycophorines A et C se fixent à la protéine 4.1
Le squelette protéique comporte 3 protéines principales : la spectrine, l'Actine ou protéine 5,
la protéine 4.1
La spectrine est en réalité formée de deux chaînes polypeptidiques différentes nommées
alpha et bêta, (α synthétisée par un gène du chromosome 1, β par un gène du chromosome
14). α et β sont polymérisées sous formes de tétramères qui soutiennent la couche
phospholipoprotéique membranaire grâce à des liaisons avec les protéines 3 (via l'Ankyrine)
avec les glycophorines (via la protéine 4/1 et l'Actine). Toutes ces protéines peuvent être
phosphorylées.
• Des anomalies congénitales ou acquises de la membrane sont à l'origine d'hyperhémolyse.
L'étude de la membrane est effectuée par :
- l'aspect des hématies sur le frottis sanguin,
- le test de résistance des hématies aux solutions hypotoniques,
- le test d'autohémolyse des hématies
Les enzymes érythrocytaires
Le globule rouge est une cellule simplifiée, sans noyau, dont les besoins énergétiques sont
faibles. Le rôle des enzymes est d'assurer les fonctions vitales du globule rouge :
- apport d'énergie: destiné à maintenir la forme biconcave du globule rouge, ainsi que
les échanges transmembranaires
- lutte contre les agents oxydants
Deux voies principales permettent d'obtenir de l'énergie à partir du glucose.
- La voie principale : glycolyse anaérobie (voie d’Embden-Meyerhof)
Plusieurs enzymes interviennent en cascade dans cette voie glycolytique qui transforme une
molécule de glucose en pyruvate. Les molécules énergétiques générées par cette voie sont
l'ATP et le NADH (coenzyme de la méthémoglobine réductase).
43. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
34
- La voie accessoire : glycolyse aérobie (cycle ou shunt des pentoses phosphates). Cette
voie qui représente seulement 10 % de la glycolyse totale, se greffe sur la voie précédente.
Elle régénère du NADPH (co-enzyme qui permet de lutter contre les agents oxydants). L'un
des enzymes de cette voie, la glucose 6-phosphate déshydrogénase (G6PD) est responsable
d'un déficit enzymatique fréquent dans certaines populations (méditerranéenne, d'Afrique
noire). Elle entraîne une anémie hémolytique aiguë, plus ou moins grave. Celle-ci est
généralement provoquée par la prise de certains médicaments, ou par l'absorption de fèves
(favisme). Ce déficit a une transmission récessive liée à l'X
Figure 34:Glycolyse érythrocytaire
L'hémoglobine
Elle est le principal constituant du contenu érythrocytaire. C'est le pigment responsable de la
coloration rouge du sang.
L'hémoglobine est responsable du transport de l'oxygène et du gaz carbonique, et des
échanges gazeux au niveau des tissus et du poumon.
L'hémoglobine est une protéine de 67000 daltons. C'est un hétéro-tétramère formé de 4
chaînes de globine et de 4 molécules d'hème.
L'hème
Est une protoporphyrine de type IX. Il comporte un atome de fer divalent Fe+2 (fer ferreux).
L'une des valences de ce fer se fixe à la globine au niveau d'une histidine. L'autre valence fixe
l'oxygène dans la forme oxygénée (oxyhémoglobine).
44. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
35
La globine
Est la partie protéique de l'hémoglobine. Chaque molécule d'hémoglobine (Hb) est formée de
4 chaînes de globine : 2 chaînes , et 2 chaînes non-alpha (ou). La structure des chaînes de
globine ou non- est très similaire.
Par exemple, la structure de la chaîne bêta-globine qui entre dans la composition de
l'hémoglobine adulte majoritaire, l'hémoglobine A, est la suivante :
- structure primaire de la chaîne de ß-globine : succession de 146 acides aminés
- structure secondaire: hélicoïdale (la chaîne forme une hélice)
- structure tertiaire : l'hélice se compacte, prend une forme globulaire, ménageant en
son centre une cavité, la poche de l'hème (lieu de fixation de l'hème et du fer).
- La structure quaternaire de l'hémoglobine A est la suivante. On notera : Hb A (α2 ß2),
ce qui indique que l'Hb A comporte 2 chaînes alpha et 2 chaînes bêta.
Les chaînes alpha et bêta s'associent entre elles pour former le tétramère de globine. Chaque
molécule de globine porte en son centre une molécule d'hème (4 au total par molécule d'Hb).
Au centre de la molécule d'hémoglobine se trouve une molécule de 2-3 DPG (2-3
diphosphoglycérate). Cette molécule de liaison assure le passage de la forme oxygénée à la
forme désoxygénée, et donc la libération de l'oxygène.
Figure 35: Structure de l'hémoglobine
45. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
36
La composition des hémoglobines n'est pas la même chez l'embryon, le fœtus ou le nouveau
né, et l'adulte.
Chez l'embryon il existe des types particuliers d'hémoglobines comportant des chaînes de
globine embryonnaires.
Chez le fœtus et le nouveau-né on trouve l'hémoglobine fœtale (HbF: (2 2)). Cette
hémoglobine est majoritaire à la naissance (80 % environ). Son taux décroît au cours de la
première année de vie, durant laquelle elle est remplacée progressivement par l'hémoglobine
A. Au-delà de la première année elle n'est présente qu'à l'état de trace (moins de 1 %).
A partir de 1 à 2 ans, la répartition des différentes hémoglobines est la même que celle de
l'adulte : l'hémoglobine majoritaire est l'Hb A (2 2). Elle représente plus de 97 % de
l'hémoglobine totale. Il existe une fraction minoritaire, l'Hb A2 (2 2) <3,5 %.
L'hémoglobine fœtale peut persister au-delà de l'âge d’un an dans certaines circonstances :
- les thalassémies
- la Persistance Héréditaire d'Hémoglobine Fœtale (PHHF) qui ne s'accompagne, le
plus souvent d'aucun signe clinique ou hématologique.
On distingue deux groupes de gènes de globine qui sont regroupés en familles de gènes : les
gènes de type situés sur le chromosome 16 et les gènes de type situés sur le chromosome
11.
Figure 36: Ontogenèse des hémoglobines humaines
46. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
37
Les gènes de globine peuvent être le siège d'anomalies moléculaires. On distingue deux
grands groupes d'anomalies : les anomalies quantitatives de la synthèse des chaînes de
globine, ce sont les thalassémies, et les anomalies qualitatives de l'hémoglobine où la protéine
codée a une structure anormale, Elles résultent de la synthèse d'une hémoglobine de structure
anormale, l'une des chaînes de globine (α ou ß) étant porteuse d'une mutation sur l'un ou
plusieurs de ses acides aminés.
De très nombreuses mutations sont décrites (plus de 500 pour la chaîne bêta globine), mais
certaines sont très rares.
La plus fréquente est l'hémoglobinose S ou drépanocytose. Elle est très répandue chez les
sujets originaires d'Afrique noire. Cette affection aurait également été sélectionnée par le
paludisme. L’hémoglobine S est une hémoglobine anormale dont la solubilité est très
diminuée. Elle a tendance à polymériser dès que la pression partielle en oxygène (PO2)
diminue. Elle forme alors de longs polymères qui déforment le globule rouge en forme de
faux ou de faucilles: c'est la falciformation. Cette modification de la forme des hématies a
deux conséquences: l'obstruction des vaisseaux sanguins par les globules rouges moins
déformables, responsable de thrombose et d'infarctus, et la destruction des globules rouges par
hémolyse. La maladie clinique ne s'exprime que chez les homozygotes qui ont deux gènes
mutés (SS). Les hétérozygotes (AS) sont cliniquement asymptomatiques.
Le globule rouge mature circule dans les vaisseaux sanguins. Il traverse les poumons où il
fixe l'oxygène sur l'hémoglobine qui devient l'oxyhémoglobine, et libère le CO2. Il traverse
les capillaires des différents organes où l'hémoglobine libère l'oxygène (désoxyhémoglobine)
et se charge en CO2 (carboxyhémoglobine).
Le globule rouge naît et vit son "enfance" dans la moelle osseuse : c'est l'érythropoïèse. Après
une durée de vie moyenne de 120 jours dans la circulation sanguine, le globule rouge vieilli
est détruit, c'est l'érythrolyse (ou hémolyse physiologique).
Le réticulocyte est un globule rouge jeune venant d'être formé par la moelle osseuse et
contenant encore un peu d'ARN. Il a la morphologie du globule rouge adulte avec cependant
un volume un peu plus grand. Il ne comporte pas de noyau. Le réticulocyte vit environ 24
heures dans la moelle, puis il en sort par diapédèse grâce à des mouvements pseudopodiques,
et passe dans le sang où il poursuit sa maturation. En 24 heures environ le réticulocyte perd
l'ARN qu'il contient et se transforme alors en un globule rouge adulte.
Les hématies arrivées au terme de leur vie sont porteuses d'anomalies de structure et
morphologiques. Elles sont phagocytées dans le système réticulo-endothélial. Le siège
principal de la destruction érythrocytaire est la moelle osseuse (50% des hématies y sont
détruites par le système des phagocytes mononucléés). Le reste est détruit dans le foie et la
rate.
47. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
38
L'hémolyse normale (physiologique) est extravasculaire : Ce qui signifie que
l'hémoglobine n'est pas libérée dans les vaisseaux. Les globules rouges sont phagocytés par
les macrophages :
. Les acides aminés de la globine sont récupérés par l'organisme
. Le fer est stocké dans les macrophages, puis réutilisé
. Le reste de l'hème, après perte du fer, est transformé en bilirubine libre liée à
l'albumine qui passe dans le sang puis est éliminée par le foie dans la bile sous forme de
bilirubine conjuguée, et dans les selles sous forme de stercobilinogène.
Normalement le taux de bilirubine totale sérique est de 10 µmol/l, formé presque uniquement
de bilirubine libre et de traces de bilirubine conjuguée.
L'hémolyse physiologique peut être augmentée par des processus pathologiques. On parle
d'hyperhémolyse. Il y a deux éventualités selon que l'hémolyse est extravasculaire, comme
l'hémolyse physiologique, ou bien intravasculaire.
L'hémolyse est extravasculaire. Le catabolisme de l'hémoglobine suit les
voies normales, mais il est exagéré. Ceci entraîne une augmentation de la bilirubine libre
responsable d'un ictère hémolytique. La bilirubine conjuguée sérique reste habituellement
normale. Le stercobilinogène fécal augmente. Il n'y a pas de bilirubine libre dans les urines.
L'hémolyse est intravasculaire. Ce mécanisme est plus rare. Il se produit
lorsque les globules rouges sont lysés directement dans les vaisseaux en particulier par:
. Des produits toxiques (médicaments)
. Cause infectieuse (paludisme)
- Des anticorps, par exemple en cas d'incompatibilité dans les groupes sanguins
(transfusion)
On retrouve les mêmes anomalies que dans l'hémolyse extravasculaire puisque le catabolisme
de l'hémoglobine est augmenté, avec en plus :
- une hémoglobinémie plasmatique (le plasma est rosé après centrifugation)
- une hémoglobinurie (présence d'hémoglobine dans les urines)
- un effondrement du taux de l'haptoglobine sérique :
En effet l'hémoglobine libérée se fixe sur l'haptoglobine, protéine sérique, formant un
complexe qui ne peut en raison de sa taille passer dans les urines. Si l'hémolyse est importante
toute l'haptoglobine est saturée. Il reste alors de l’hémoglobine libre dans le plasma et celle-ci
passe dans les urines (hémoglobinurie). Le seuil à partir duquel l’hémoglobine passe la
barrière rénale est ainsi directement fonction de la capacité de fixation de l’hémoglobine sur
l’haptoglobine. Par ailleurs, il y a effondrement de l'haptoglobinémie parce que l'haptoglobine
est catabolisée avec l'hémoglobine qu’elle a fixée.
48. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
39
NB : Une diminution de l'haptoglobine peut également se voir dans les hémolyses
extravasculaires importantes, mais elle est moins constante.
Méthodes d’étude des globules rouges
Outre les techniques de numération des hématies et des réticulocytes, on mesure également
des paramètres moyens qui caractérisent la ou les populations érythrocytaires, appelés
constantes érythrocytaires, et on apprécie également la variation morphologique individuelle
(étude de la dispersion) par l’examen des hématies sur frottis.
Les constantes érythrocytaires sont : Le volume globulaire moyen (VGM), la teneur
globulaire moyenne en hémoglobine (TGMH) et la concentration globulaire moyenne en
hémoglobine (CGMH).
Le VGM
Comme l'hématocrite correspond à un volume, si on divise l'hématocrite par le nombre de
globule rouge on obtient le volume moyen des globules rouges. C'est le Volume Globulaire
Moyen (VGM). Il est exprimé en µ3. Il s'agit d'une valeur moyenne, la taille des globules
rouges pouvant varier (anisocytose).
Le VGM est normalement compris entre 80 et 100 µ3
. Sous le seuil de 80, on parle de
microcytose et au dessus de 100 de macrocytose.
Le VGM est actuellement mesuré directement par les appareils automatiques lors d'un
hémogramme. Ces appareils vont mesurer le volume de plusieurs milliers de globules rouges
ce qui permet d'obtenir des ces mesures :
Le VGM : moyenne arithmétique de ces volumes.
L'indice de distribution des érythrocytes : l'automate va calculer la déviation standard
autour de cette moyenne et calculer l'indice de distribution qui varie normalement de
12 à 16 %. Au dessus de 16% se définit l'anisocytose.
La CCMH
La concentration corpusculaire (ou globulaire) moyenne en hémoglobine (CCMH) correspond
à la quantité d'hémoglobine contenu dans 100 ml de globules rouges. Ce paramètre est obtenu
en faisant le rapport entre Hémoglobine/Hématocrite. Il est exprimé en gramme/100ml ou en
%. Les valeurs normales varient entre 32 et 36%.
Lorsque la CCMH est inférieure à 32% on parle d'hypochromie. Au dessus on parle de
normochromie. Le taux maximal de la CCMH est de 38% (arrêt de la synthèse de
l'hémoglobine dans l'érythroblaste à partir de ce taux).
49. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
40
La TCMH
Paramètre moins utile, la teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine (TCMH) est calculée
par le rapport hémoglobine/nombre de globules rouges contenus dans 100 ml de sang. Elle est
normalement comprise entre 27 et 31 pg/GR.
- La numération des réticulocytes
Il existe deux techniques :
- numération au microscope optique après coloration vitale au bleu de Crésyl
brillant mettant en évidence l'ARN qui précipite sous forme de substance
"granulo-filamenteuse". Le réseau (réticulocyte vient de reticulum = filet) d'ARN
est coloré en prune.
- numération par cytométrie en flux, après coloration de l'ARN par un fluorochrome
(thiazole orange par exemple). C'est la méthode la plus précise.
Figure 37: Réticulocytes colorés au Bleu de Crésyl Brillant
Nombre normal de réticulocytes : Il dépend pour une part de la technique de numération, ce
qui explique qu'il y ait de grandes variations selon les laboratoires.
Les chiffres normaux, donnés par la cytométrie en flux sont de :
0,5 à 2,5 % ou (20 à 120 000/mm3
)
Elle est indispensable dans la démarche diagnostique d'une anémie. Il est impératif de
demander une numération des réticulocytes devant tout abaissement de l'Hb. En effet, le
nombre de réticulocytes permet d'apprécier le fonctionnement de la moelle. Dans une anémie,
50. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
41
leur augmentation est le signe que la moelle réagit normalement par une augmentation de
production des globules rouges, d'où la classification physiopathologique des anémies :
- régénérative, lorsqu'il y a augmentation des réticulocytes indiquant que la moelle
fonctionne normalement
- arégénérative, sans augmentation des réticulocytes, indiquant une moelle
fonctionnant de manière insuffisante, incapable de s'adapter.
Figure 38: réticulocytes par cytométrie
Le frottis sanguin
C'est l'examen au microscope d'un frottis sanguin coloré au May Grunwald Giemsa (MGG).
Il permet de mettre en évidence des anomalies morphologiques des hématies ou la présence
d'inclusions anormales dans celles-ci. L'examen du frottis sanguin est un élément important
pour l'orientation du diagnostic étiologique d'une anémie ou d'une hémolyse. Il faut penser à
le demander, car il n'est pas réalisé systématiquement.
Les principales anomalies de forme du globule rouge
- L'anisocytose est caractérisée par la présence de globules rouges de taille
différente. Elle s'observe dans toutes les anémies.
51. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
42
- la schizocytose correspond à la présence de fragments d'érythrocytes; cette
anomalie s'observe dans les thalassémies, les néphro-anémies, les anémies de
cause mécanique…
- la sphérocytose : les globules rouges ont une forme sphérique, ils apparaissent
denses sur le frottis avec disparition de la zone claire centrale physiologique. On
les observe dans la sphérocytose héréditaire mais aussi dans le cas des anémies
d'origine immunologique.
- l'elliptocytose ou ovalocytose : correspond à la présence d'hématies de forme
allongée, ovalaire. Elle peut s'observer de manière non spécifique ou dans le cadre
d'une anémie hémolytique congénitale liée à une anomalie de la membrane du
globule rouge.
- la drépanocytose : c'est la présence d'hématies en forme de faux ou drépanocytes.
Elles apparaissent spontanément sur les frottis sanguins de sujets atteints de
drépanocytose homozygote.
Figure 40: Hémoglobine valeur en concentration
Figure 39: Hémogramme et volumes sanguins
54. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
45
La Moelle Osseuse Normale
La moelle osseuse n’a rien à voir avec la moelle épinière. Elles sont toutes les deux nommées
« moelle », car elles se trouvent au centre de l’os. La moelle osseuse est le tissu situé au
milieu des os et qui produit les différents types de cellules du sang : globules rouges, globules
blancs et plaquettes. La moelle épinière, se situe dans la colonne vertébrale et appartient au
système nerveux. Il existe deux types de moelle osseuse : la moelle active, qui est rouge, et la
moelle graisseuse, qui est jaune. A la naissance, tous les os du corps humain sont remplis de
moelle active. A partir de l’âge de trois ans, certains os commencent à perdre leur action et la
moelle se transforme en moelle adipeuse. Chez l’adulte, seule la moelle des os courts et celle
des os plats reste active.
Notions embryologiques et anatomiques
Les premiers éléments de la moelle osseuse (éléments hématopoïétiques) apparaissent au
cours de la troisième semaine de la vie embryonnaire. On distingue trois étapes au cours de
l’hématopoïèse.
La premier, dite mésenchymateuse, correspond à la différenciation de cellules du sac vitellin
en cellules hématopoïétiques, Plus, survient l’étape appelée hépatosplénique. Le foie et la rate
prennent alors en charge l’hématopoïèse. Cette étape assure la production d’éléments
hématopoïétiques jusqu’aux environ du huitième mois de la vie fœtale. Puis le vers quatrième
mois, commence l’hématopoïèse au niveau de la moelle osseuse. Il s’agit e l’étape médullaire
. A la fin de la vie fœtale, la moelle osseuse est le principal organe hématopoïétique.
Figure 41: Localisation de la Moelle Osseuse
55. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
46
La moelle osseuse est abondante dans les cavités de l'os spongieux des os courts et des os
plats, et celles des épiphyses et des métaphyses des os longs. Elle est rare dans la cavité
diaphysaire des os longs. Dans cette métaphyse, les travées d'os spongieux sont aisément
reconnaissables. Elles sont plus denses et plus rapprochées dans la partie droite; la moelle par
contre est plus abondante dans la partie gauche.
Figure 42:Métaphyse des Os longs
Dans cette coupe de moelle osseuse, examinée à faible grossissement, Il est difficile
d'identifier les différents types cellulaires. On reconnaît néanmoins les précurseurs des
plaquettes sanguines, les mégacaryocytes, qui sont volumineux et possèdent un noyau
plurilobé. Les plages claires représentent des adipocytes.
Figure 43: Coupe de Moelle osseuse
56. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
47
A plus fort grossissement, on peut reconnaître plusieurs cellules sanguines différenciées et
notamment des polynucléaires et des lymphocytes. Parmi elles se trouvent des cellules non
différenciées. Celles qui sont le plus aisément identifiables appartiennent à la lignée des
polynucléaires éosinophiles parce que leur cytoplasme est rempli de granulations rouges. Le
centre de l'image est occupé par un large vaisseau dont l'endothélium est très aplati et
discontinu; c'est une sinusoïde veineuse, caractéristique de la moelle osseuse. A droite de ce
sinusoïde se trouve une grande cellule où l'on reconnaît un noyau à plusieurs lobes; ici encore,
il s'agit d'un précurseur des plaquettes sanguines.
Figure 44: Même coupe au fort grossissement
Les cellules mésenchymateuses, qui sont à l'origine de la moelle, se différencient en cellules
stromales et en précurseurs des cellules sanguines. Les cellules stromales comportent les
cellules réticulées, les cellules endothéliales et les adipocytes.
Dans la moelle osseuse, les cellules mésenchymateuses destinées à se différencier en cellules
sanguines sont appelées cellules souches. Lorsqu'elles sont capables de donner naissance à
plusieurs types cellulaires, elles sont dites pluripotentes. Les cellules souches pluripotentes se
divisent et produisent des cellules unipotentes, programmées pour produire chacune un type
cellulaire déterminé. Ces différents types cellulaires peuvent être classés en différentes
lignées. La lignée lymphoïde produit les lymphocytes, la lignée érythrocytaire produit les
érythrocytes, la lignée plaquettaire produit les plaquettes sanguines, la lignée granulo-
monocytaire produit les granulocytes et les monocytes.
La moelle osseuse est un organe très vascularisé. Le sang arrive au niveau de l’os par les
artères nourricières et les artères périostées perforantes. Ces artères se ramifient pour aboutir à
de petits capillaires artériels drainant au niveau des sinusoïdes médullaires qui eux drainent
éventuellement au niveau des veines efférentes.
57. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
48
Le tissu adipeux de la moelle osseuse varie en abondance avec l’âge et avec toute une série
de conditions pathologiques. Les variations relatives à l’âge sont en rapport avec l’involution
adipeuse et fibro-adipeuse du tissu hématopoïétique : Chez l’enfant, le tissue adipeux
représente environ 10% de la moelle osseuse, chez l’adulte, 40 à 45 %, chez le vieillard, 70 à
75%. Il faut donc tenir compte de l’âge de la personne dans l’interprétation histologique du
tissu adipeux médullaire.
Figure 45: Répartition anatomique de la moelle osseuse
La charpente médullaire est formée par quelques fibres de collagène et de réticuline qui
suivent les axes vasculaires et bordent les travées osseuses. Le réseau de réticuline, mis en
évidence par une coloration à l’argent (laidlaw), représente à l’état normal un cadre très lâche
de fibres très fines. En plus de servir de soutien au tissu adipeux et hématopoïétique, la
réticuline est une constituante des sinusoïdes médullaires.
L’augmentation de la trame de réticuline, associée ou non à un dépôt exagéré de collagène,
constitue ce qu’il est convenu d’appeler myélofibrose ou transformation fibreuse de la moelle.
58. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
49
Elle se voit dans de multiples conditions pathologiques et explique souvent la pauvreté des
frottis du myélogramme obtenu par ponction aspiration alors que la biopsie peut révéler une
moelle cellulaire.
L’importante, de la trame réticulinique s’évalue par coloration spéciale et se grade suivant
l’échelle de Bauer-Meisser (grade 0 à +4)
La ponction biopsie médullaire permet d’effectuer un prélèvement de moelle osseuse, dans un
but d’analyse cytologique (myélogramme), histologique (biopsie), microbiologique (myélo-
culture, PCR), immuno-phénotypique ou cytogénétique.
La ponction consiste en une simple aspiration de cellules médullaires, alors que la biopsie
correspond au prélèvement d’un cylindre ostéomédullaire. Les coupes ensuite réalisées
permettent une analyse fine de la moelle hématopoïétique et du stroma médullaire.
L’étude de la moelle osseuse est indiquée lorsque les données cliniques et les études du sang
périphérique évoquent un dysfonctionnement médullaire. Elle doit être précédée par
l’évaluation de l’histoire médicale, de l’examen physique, de l’hémogramme et du frottis
sanguin. Elle permet d’amener ou de confirmer le diagnostic d’une pathologie impliquant le
système hématopoïétique.
Figure 46: Lieu de ponction sternale chez l’adulte
59. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
50
Figure 47: Lieu de la ponction chez l'enfant
La moelle osseuse est située dans l'os spongieux. Elle est constituée des diverses lignées
hématopoïétiques et de tissu adipeux. Ces deux tissus évoluent en proportion selon l'âge. Pour
le nouveau-né, l'ensemble des logettes médullaires est occupé, en totalité, par le tissu
hématopoïétique. Pour l'adulte, ce tissu hématopoïétique occupe surtout les zones centrales
des espaces médullaires tandis que les zones périphériques sont adipeuses ; de plus, pour le
sujet âgé, le tissu hématopoïétique est confiné dans le spongieux des os crâniens, corps
vertébraux, des côtes, des clavicules, du sternum, des os pelviens et des extrémités
céphaliques du fémur et de l'humérus.
On dit que ce tissu ostéomédullaire est rouge par opposition aux autres zones d'os spongieux,
surtout adipeuses appelées moelle jaune. L'ensemble de ces systèmes tissulaires est décrit
habituellement selon la démarche suivante :
le tissu osseux,
le tissu de soutien : les vaisseaux, les fibroblastes et la trame réticulinique qu'ils
élaborent,
les adipocytes
Le tissu hématopoïétique comportant les lignées : granulocytaire, érythropoiétique,
mégacaryopoiétique, ainsi que des lymphocytes, des plasmocytes et des mastocytes qui sont
très largement minoritaires.
LE TISSU OSSEUX
Il présente deux dispositifs architecturaux bien différents : la corticale d'une part où les
canaux des ostéons contiennent peu de tissu conjonctif et d'autre part le tissu osseux
spongieux ou os trabéculaire au sein duquel de larges espaces, séparant les travées entre elles
sont occupées par du tissu hématopoïétique et adipeux. L'os est pourvu d'une population
cellulaire très bien différenciée, de trois types :
60. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
51
les ostéocytes, intra-osseux et régulièrement répartis dans la structure lamellaire, des
travées ou des ostéons.
les ostéoblastes, recouvrant la surface des travées,
les ostéoclastes, situés dans les lacunes de résorption.
Les ostéoblastes ainsi que les ostéocytes sont d'origine mésenchymateuse ; les ostéoclastes
quand à eux, dérivent de la lignée monocytaire.
Figure 48: Tissu osseux
LES TISSUS DE SOUTIEN
Les vaisseaux
Plusieurs variétés de structures vasculaires sont identifiables. Dans la moelle, les sinusoïdes
sont répartis de façon variable. Généralement, ils sont peu visibles. Leur importante dilatation
doit faire évoquer la possibilité d'un syndrome myéloprolifératif.
Les sinusoïdes, quand ils sont visibles, renferment des éléments hématopoïétiques matures
qui sont en transit vers la circulation générale. Très souvent, proche de ces sinusoïdes, des
mégacaryocytes sont présents. Les sinusoïdes débouchent dans le système veineux.
De place en place, des artérioles à paroi plus épaisse sont également observées. Fréquemment,
autour de ces artérioles, il existe de nombreux éléments granulocytaires.
Enfin, des capillaires sont visibles, généralement étroits, à la différence des sinusoïdes. Ils
sont fréquemment entourés de quelques plasmocytes de caractère mature.
61. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
52
Le tissu adipeux
Le nombre des adipocytes varie beaucoup d'une zone à l'autre du tissu médullaire ;
habituellement, chez l'adulte, les adipocytes occupent au total 50 % des espaces médullaires.
Ce nombre est variable en fonction de l'âge, les adipocytes sont très peu nombreux chez
l'enfant et augmentent progressivement chez l'adulte âgé. De plus, d'un espace à l'autre, les
adipocytes sont en nombre variable, nettement plus nombreux dans les espaces médullaires
sous corticaux ; enfin, dans un espace médullaire, les adipocytes sont distribués de façon
périphérique, laissant le centre de l'espace au tissu hématopoïétique.
Les fibroblastes
Ils constituent une population cellulaire très peu nombreuse dont le rôle est la constitution
d'un réseau réticulinique de soutien. Ce réseau est révélé par une imprégnation au nitrate
d'argent et est visible sous forme de courts filaments devenant plus nombreux autour des
vaisseaux. Dans la moelle normale, ce réseau est ténu mais régulièrement réparti. Cette
répartition peut être évaluée semi quantitativement.
Figure 49: Réseau réticulinique normal
Ce réseau peut s'accentuer de façon plus ou moins importante pour des raisons pathologiques.
Autres cellules :
Des éléments cellulaires macrophagiques sont parfois observés et parmi eux quelques
sidérophages, quelques dépôts sidériques peuvent être mis en évidence par la coloration de
Tirman ou de Perls. L'éventualité d'une surcharge sidérique peut être l'occasion d'une
évaluation semi-quantitative.
62. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
53
La lignée granulocytaire : Les formes cellulaires de la lignée les plus indifférenciées sont
situées en périphérie de l'espace médullaire avec maturation des éléments cellulaires vers le
centre de l'espace. A une plus petite échelle, les éléments granulocytaires se répartissent de
façon identique autour des artérioles. Chez l'adulte, les éléments cellulaires de la lignée
granulocytaire, à tous stades maturatifs, sont normalement deux fois plus nombreux que les
éléments cellulaires de la lignée érythroblastique (chez l'enfant et notamment chez le
nouveau-né, la proportion est totalement différente puisque la lignée érythroblastique
représente 70 % de toutes les cellules de la moelle).
Les myéloblastes sont assez facilement reconnaissables : ce sont de grandes cellules à noyau
arrondi, possédant de 1 à 5 petits nucléoles. La chromatine est fine. Le cytoplasme est peu
abondant et basophile. Les promyélocytes et les myélocytes sont identifiables par leur
granulation généralement assez bien visible, notamment à la coloration de MGG. Les
granulations rouges des cellules éosinophiles sont les plus facilement reconnaissables. Les
leucocytes polynucléaires matures, neutrophiles, possèdent généralement trois lobes
nucléaires bien visibles (sur les coupes tissulaires) ; dans ce cadre, au dessus de trois lobes, les
leucocytes polynucléaires neutrophiles sont considérés comme hyper-segmentés. Enfin, les
granulations basophiles sont généralement non ou mal visibles en raison de leur
hydrosolubilité après fixation dans une solution formolique. Quoi qu'il en soit, les éléments
myélocytaires les plus matures sont généralement situés non loin des sinusoïdes afin de
gagner ensuite la circulation générale.
La lignée monocytaire : elle se distingue mal de la lignée granulocytaire. Les monoblastes
sont des cellules plus grandes que les myéloblastes. Les pro-monocytes sont de taille
sensiblement égale aux promyélocytes avec quelques granulations cytoplasmiques. Le
monocyte gagne rapidement la circulation générale. Certains de ces monocytes sont capables
d'une transformation en macrophages. Ce sont de volumineuses cellules à large cytoplasme
faiblement basophile. Le noyau est central, ovalaire à chromatine fine. Le macrophage est
facilement reconnu lorsqu'il contient quelques débris nucléaires ou des dépôts sidériques dans
son cytoplasme. Quelques macrophages sont facilement identifiés au sein des nids
érythroblastiques.
La lignée érythroblastique : elle est organisée en amas ou nids, situés généralement dans les
zones centrales de l'espace médullaire. Le centre de cet espace est occupé par un macrophage
dont le cytoplasme contient quelques grains sidériques. Les érythroblastes les moins matures
sont observés autour du macrophage. Les formes les plus évoluées sont situées à distance là
où existe un ou plusieurs sinusoïdes. Les érythroblastes les plus jeunes sont de grandes
cellules à grand noyau comportant un ou plusieurs nucléoles allongés, en barre, proche de la
membrane nucléaire. Le cytoplasme est peu abondant et basophile. Au fur et à mesure de la
maturation, les éléments cellulaires érythroblastiques révèlent une nette condensation
nucléaire parfois entourée d'un halo clair, signalant l'existence d'un normoblaste. Ce noyau a
alors à peu près la taille d'un lymphocyte mature.
63. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
54
La lignée mégacaryocytaire : les mégacaryocytes matures sont répartis de façon régulière
dans la zone centrale de l'espace médullaire, non loin d’une sinusoïde. Les mégacaryocytes
sont classiquement isolés. Tout groupement ou toute répartition proche des travées osseuses
est anormal. Les mégacaryocytes sont très facilement identifiables ; par contre, les formes
jeunes le sont beaucoup plus difficilement. Le regroupement de mégacaryocytes supérieur à 5
éléments doit être considéré comme pathologique.
LES AUTRES CELLULES
Leur nombre est habituellement faible ; on peut reconnaître des lymphocytes, des
plasmocytes, des mastocytes ou quelques macrophages.
Les lymphocytes : une très faible population lymphocytaire de phénotype B ou T est
occasionnellement observée. Ils peuvent parfois constituer de petits amas et ces derniers
peuvent être assez nombreux chez l'adulte âgé. Classiquement, plus de trois amas
lymphocytaires retrouvés dans une biopsie de bonne qualité, doivent être considérés comme
pathologiques. Quelques critères en faveur du caractère normal de ces amas lymphocytaires
peuvent être retenus : les amas sont situés généralement proches des artérioles, ils sont
généralement situés au centre des espaces médullaires, l'amas lymphoïde est lui-même centré
par un petit vaisseau et peu contenir quelques mastocytes ou plasmocytes. Chez le nouveau-
né, la moelle normale peut montrer une abondante population cellulaire lymphocytaire
avoisinant 50 % des éléments nucléés.
Les plasmocytes : ces cellules peuvent normalement représenter 2 % de la population nucléé
de la moelle. Ils sont généralement situés le long des capillaires et associés à quelques
macrophages. Le plasmocyte est lui-même facilement identifiable par le caractère excentrique
de son noyau et sa zone claire, cytoplasmique, figurant l'appareil de Golgi. Ces plasmocytes
peuvent, de plus, contenir des dépôts d'immunoglobuline prenant le nom de corps de Russell.
Les mastocytes : quand leurs granulations ne sont pas dissoutes, ils sont assez facilement
mis en évidence par la coloration de MGG : les granules cytoplasmiques sont très fortement
colorées en bleu-noir. Les cellules ont un noyau ovalaire parfois assez mal visible en raison
du nombre important des granules cytoplasmiques. Les mastocytes sont généralement
distribués autour des vaisseaux et répartis le long des travées osseuses.
Les macrophages : ces éléments cellulaires ont déjà été cités dans le paragraphe relatant
l'érythropoïèse.
64. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
55
Retenir que les différents tissus constituant une biopsie ostéomédullaire forment un système
complexe où chaque structure est interdépendante des autres et donc l'interprétation de toute
lésion doit prendre en compte l'ensemble du système précédemment décrit.
Retenir aussi que l'examen microscopique d'une biopsie ostéomédullaire concerne une tranche
très fine du système complexe précité : cette tranche mesure au maximum 4 micromètres
d'épaisseur ; comme les cellules hématopoïétiques notamment ont une taille supérieure à 4
micromètres, seule une tranche de ces cellules est observée.
Se rappeler que le conditionnement technique d'examen de ces tissus osseux ou médullaires a
subi, avant la coupe microtomique, de nombreuses agressions chimiques, de déshydratation et
de réhydratation entraînant donc une déformation souvent importante pouvant gêner
l'identification cellulaire.
L'avantage de la biopsie est tout de même de permettre un examen de la moelle in situ et
d'évaluer des structures non accessibles par la ponction tel que le réseau de réticuline.
LES CELLULES TOTIPOTENTES : Toutes les cellules du sang sont produites à partir
d'une même cellule indifférenciée dite cellule souche totipotente ou cellule souche primitive
qui a la capacité de reconstituer à long terme l'hématopoïèse. Elles s'autorenouvellent et
évoluent ver la pluripotence.
Elles sont localisées dans la moelle osseuse mais certaines peuvent passer temporairement
dans le sang. Elles ne représentent que 0,01 à 0.05 % des cellules médullaires et ne sont pas
identifiables morphologiquement.
Elles sont, pour la plupart quiescentes, en dehors du cycle cellulaire, en stade G0.
Elles possèdent à leur surface des protéines spécifiques, ou CD (Cluster of Differentiation ),
reconnaissables par anticorps monoclonaux qui détectent :
Marqueurs positifs : CD 34+, Ckit+, Rhodamine (Rho) +, Thy1+
Marqueurs négatifs : HLA-DR- (HLA de Classe II), CD38-, CD 33-
Elles sont résistantes aux médicaments cytotoxiques de chimiothérapie, à l'irradiation et à la
congélation, propriété utilisée pour les greffes de moelle osseuse.
Les cellules souches possèdent deux propriétés caractéristiques. Elles peuvent à la fois
s'autorenouveler et se différencier.
L'autorenouvellement : C’est une multiplication des cellules totipotentes sans
différenciation. Cela permet de maintenir intact le nombre de cellules souches primitives et
donc de maintenir le potentiel de l'hématopoïèse.
La différenciation : C’est la capacité des cellules totipotentes, sous l'influence de facteurs de
croissance, de se diviser et de s'engager, de façon irréversible, vers une ou plusieurs lignées.
La cellule perd alors sa totipotence pour devenir un progéniteur ou une cellule souche
engagée.
65. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
56
Lors d'une hématopoïèse normale, il existe un équilibre entre la production des cellules
souches par division cellulaire (autorenouvellement) et la perte des cellules souches par
engagement vers les lignées cellulaires (différenciation). Les cellules souches peuvent être
prélevées, concentrées puis congelées dans l'azote liquide. Lorsqu'une chimiothérapie très
toxique pour la moelle osseuse (myélotoxicité) est nécessaire, la reconstitution de
l'hématopoïèse peut être réalisée par décongélation et réinjection de ces cellules souches. C'est
le principe de l'autogreffe de moelle osseuse.
Sous l'influence de facteurs de croissance spécifiques, la cellule souche totipotente va
s'engager dans la différenciation d'une lignée cellulaire. Elle devient alors un progéniteur ou
cellule souche pluripotente différenciée ou engagée.
Au terme de plusieurs divisions les cellules souches engagées perdent progressivement leur
potentiel de différenciation. Les progéniteurs deviennent alors des précurseurs spécifiques
d'une seule lignée sanguine. Ces cellules sont alors les précurseurs identifiables sur un
prélèvement de moelle osseuse.
Ces précurseurs se divisent et mûrissent (maturation) pour donner naissance à des cellules
fonctionnelles. Ils correspondent à la majorité des cellules visibles sur un prélèvement moelle
osseuse par de ponction sternale ou par une biopsie ostéomédullaire (BOM). La maturation
terminale aboutit aux cellules matures fonctionnelles qui passent dans le sang.
Il existe dans le tissu osseux trois types de cellules :
l'ostéoblaste est la cellule de l'os en formation
l'ostéocyte est la cellule de l'os formé
l'ostéoclaste est la cellule de la résorption osseuse massive.
L'ostéoblaste est la cellule qui construit la lamelle osseuse. Le support de l'ostéogénèse est
représenté ici par une bande longitudinale colorée en bleu. Les ostéoblastes se disposent
contre ce support en une couche continue de cellules cubiques. Leur cytoplasme est
intensément basophile, ce qui se traduit dans cette préparation par une couleur violette. Cette
basophilie est due à la richesse en réticulum endoplasmique rugueux. Le noyau rond a
l'apparence d'une tache plus claire sur le fond sombre du cytoplasme et est souvent situé au
pôle cellulaire opposé au support.
L'ostéoblaste a plusieurs fonctions. La principale est de produire la phase organique de la
lamelle osseuse qui, tant qu'elle n'est pas calcifiée, s'appelle substance ostéoïde. Il sécrète
aussi des phosphatases alcalines. Ces enzymes hydrolysent la gaine de polyphosphates qui
enveloppe les fibres collagènes et inhibe la calcification. L'ostéoblaste intervient enfin dans la
calcification elle-même. Il sécrète les premiers éléments minéraux sous la forme d'ions
solubles qui précipitent en phase amorphe. Il intervient enfin dans la régulation de l'ostéolyse;
il peut freiner l'activité des ostéoclastes en sécrétant une prostaglandine; il peut aussi la
renforcer en sécrétant un facteur qui augmente la mobilité des ostéoclastes et une collagénase
qui détruit les fibres collagènes.
66. LES CAHIERS D’HEMATOLOGIE
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Les ostéoblastes proviennent de cellules mésenchymateuses prédéterminées, appelées cellules
ostéoprogénitrices. Seule leur situation à proximité d'autres cellules osseuses permet de les
identifier dans les préparations classiques. Elles se trouvent ici dans le tissu conjonctif
muqueux, entre le vaisseau sanguin et la rangée d'ostéoblastes.
L'ostéoblaste est donc la cellule de l'os en formation. Il élabore la phase organique,
produit des phosphatases alcalines et intervient dans la calcification et la régulation de
l'ostéolyse. Il provient d'une cellule mésenchymateuse.
Figure 50: Lamelle osseuse
L'ostéoblaste, en sécrétant la phase organique, s'enferme progressivement dans sa propre
production. Il devient alors un ostéocyte ou cellule de l'os formé. Chaque ostéocyte est logé
dans une petite cavité ou lacune. Les lacunes à bords lisses contiennent des ostéocytes jeunes
qui achèvent le dépôt qu'ils avaient entamé lorsqu'ils étaient encore ostéoblastes. Les lacunes
à bords plus irréguliers contiennent des ostéocytes âgés.
Les ostéocytes épousent la forme de leur cavité. Leurs longs prolongements cytoplasmiques
s'enfoncent dans les canalicules qui, d'une lamelle à l'autre, unissent les lacunes. Dans ces
canalicules, les prolongements de cellules voisines sont unis par des jonctions communicantes
et enveloppés, comme l'ostéocyte lui-même, d'un revêtement externe, représenté en rouge
dans le schéma. La masse du tissu osseux est ainsi occupée par un réseau cellulaire important.
L'ostéocyte a une double fonction. L'ostéocyte jeune termine la synthèse entamée par
l'ostéoblaste. L'ostéocyte âgé exerce, au moyen de son système lysosomial, une activité
ostéolytique importante. Cette double fonction est sous le contrôle hormonal de la
parathormone et de la calcitonine. Les ostéocytes interviennent donc dans les échanges
ioniques.