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ÉCONOMIE
SOCIÉTÉ
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Voler au secours des
jeunes de Cité-soleil
par CHERISCLER Evens
Quatre millions de
dollars américains à
la Willbes pour créer
1000 emplois en Haïti
Par Henri Alphonse
La société civile doute
de l'arbitrage de l'OEAPar Stephen Ralph Henri
HAÏTI / JUSTICE
MERCREDI 15 JUILLET 2015 NUMÉRO 39
WWW.LENATIONAL.HT
QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI
ACTUALITÉ
Un nouveau palais pour
la Cour de cassation
HAÏTI / RÉPUBLIQUE DOMINICAINE / MIGRATION
Des agents de l’USGPN hissent le drapeau haïtien sur le mât à l’entrée du palais de la Cour de cassation. / Photo : J.J. Augustin
L
es membres de la Mission ont
discuté avec le président de la
République Michel Martelly, le
Premier ministre Évans Paul
et sept autres ministres du gouverne-
ment, dont Lener Renauld, ministre
des Affaires étrangères ad intérim,
dans l’après-midi du 13 juillet au
Palais présidentiel. En dehors d’un
cahier de charges déjà déposé par
les autorités haïtiennes à l’OEA, des
informations sur les dernières acti-
vités de déportation et de rapatrie-
ment, de la République dominicaine
vers Haïti, ont été remis aux envoyés
de l’Organisation, en la circonstance.
Une mission de l’OEA (Organisation des États américains) a séjourné du 10 au 14
juillet sur l’île. Objectifs : recueillir les informations et produire un rapport dans
le cadre du conflit migratoire opposant Haïti et la République dominicaine. Un
document doit être remis au secrétaire général de l’Organisation, Luis Almagro. Les
missionnaires de l’organisme ont, entre autres, rencontré des membres de la société
civile haïtienne. Ces derniers sont sceptiques quant aux résultats de cette mission.
L'Union européenne
s'engage dans
l'observation
électorale
Par Noclès Débréus
2 | N0
39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
TRIBUNE
N
ous sommes nombreux à
être sceptiques sur la ques-
tion de la nouvelle Haïti.
Une Haïti de stabilité et
de prospérité. Une Haïti souveraine
et respectable, institutionnalisée et
structurée. Où chacun tire son épingle
du jeu. Où des opportunités s’offrent
à tous et à chacun. Nous en faisons
mille et un discours. Nous y écrivons
des textes savants traitant des plus
grandes théories de développement
durable. Nos projections donnent sur
le court, le moyen et le long terme.
Mais nous sommes très peu à croire
dans nos propres discours, très peu à
croire que cette Haïti se relèvera.
C’est ici le premier mal haïtien.
L’Hypocrisie ! Nous sommes
hypocrites ! Nos propos sont
insincères. Nous ne sommes ni
pieux, ni vertueux. Nos mensonges
nous gangrènent. C’est le propre
de la politique haïtienne depuis
toujours qui trouve sa logique
d’existence dans le mensonge,
la calomnie, le désordre et
l’enrichissement illicite. Et cette
pratique donne pour conséquence
cette liste innombrable de
candidats aux différents postes
électifs. Ils viennent de nulle part.
Qui sont-ils ? Des citoyens haïtiens.
Certainement. Mais qu’ont-ils
accompli ? Pourquoi pensent-ils
pouvoir gérer l’État ? En réalité,
ont-ils l’intention de gérer ou même
de contribuer aux transformations
sociopolitiques du pays. Non.
Loin de là. La grande majorité ne
cherche qu’un djob, un moyen de
s’enrichir. Car la politique en Haïti
n’est jamais pensée autrement,
Haïti elle-même est, et a toujours
été une caverne d’Ali baba. Il suffit
de connaître la formule magique,
secret de polichinelle, « Sésame
ouvre-toi » !
Mais encore, après tout cela, c’est à
croire que la politique commande
tout d’une Nation. Cependant, si
la Nation est une âme, un vouloir
vivre ensemble comme le veut
Danton, énonçons l’hypothèse que
la nation haïtienne n’a jamais existé
a aucun moment de son histoire.
Mon argumentaire ne peut être que
bref ici pour m’expliquer : Les rares
gouvernants à avoir voulu instituer
le vouloir vivre ensemble, n’ont pas
du tout été suivis et les autres ont
toujours été combattus pour avoir
été non seulement nuls mais pire
que cela, des mercenaires. Et en
cela, nous voyons le deuxième mal
haïtien.
Nous sommes tous des mercenaires
par cette attitude de je m’en
foutisme ou de je m’en fichisme dont
nous faisons toujours montre. Nous
sommes des fuyards. Nous sommes
caractérisés par un individualisme
outré. Nos réflexions ne portent que
sur notre propre petite personne.
Pour nous, il n’est pas de collectif
qui tienne. C’est l’exemple de la
diaspora haïtienne, des groupes de
musique, des associations et même
de la Sélection de foot.
Qu’est ce qui expliquerait qu’un
joueur sélectionné pour représenter
sa terre natale, son pays dans
une compétition internationale,
abandonne en cours de route
? C’est ce qui se passe pour la
Sélection haïtienne dans la Gold
Cup de 2015 avec les joueurs Jeff
Louis et Jean Jacques Pierre. Ils
n’ont pas d’excuse !
Mais ce que je viens d’écrire ne
va pas changer la question. Il faut
surtout le voir dans la perspective
d’une histoire sordide.
Mais en réalité, le problème vient
de loin. Nous avons été esclaves.
Nous sommes imprégnés par
un sentiment de mégalomanie
qui nous étouffe. Nous voulons
paraître, nous voulons être aux
premières loges, là je ne parle pas
du pays, mais de l’être haïtien qui
croit pouvoir être sans Haïti. C’est
en cela qu’il faut comprendre mes
préoccupations improbables. Et
celles des mes amis, et aussi celles
de tous ceux-là qui ont la prétention
de pouvoir mieux guider Haïti vers
de nouveaux horizons. Ce n’est
peut être pas une question de
volonté. Il faudrait y voir une affaire
personnelle. Surtout que vous ne
serez pas d’avis que je mette dans
le même panier tout le monde sans
exception ; c’est un choix et je crois
que nous sommes tous en cause
d’une manière ou d’une autre.
Le mal haïtien est complexe. Un
simple texte ne peut nullement le
traduire. Je voudrais le dire dans
toute son acuité. Mais je n’ai pas
de mots pour l’exprimer. Pourtant
je le vis tous les jours, j’en fais
partie. La nouvelle Haïti naitra-t-
elle ? J’ai tellement envie d’y croire
! Mais sceptique, je le suis autant
que vous. J’ai commencé à écrire ce
texte pour dire les maux d’Haïti et
j’ai compris que je n’en finirais pas
si je devais les énumérer. Voyez-là
un autre mal, l’inconstance !
Haïti et ses maux !Par Jackson Joseph
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 3
ACTUALITÉ
Jacques Roche
« Tu peux m’enfermer comme un fou, me rendre fou, m’humilier, m’écraser,
m’assoiffer, m’affamer. Me faire signer la reddition de mes combats… Mais
tunepeuxtuermesrêves.»
JacquesRochedanssonpoème«survivre» écrivaitcesversprémonitoires.Il
ne savait pas qu’il allait être la proie des loups, de ces créatures hideuses qui
hantentencorenosruesetquisepromènententouteimpunitéparcequenotre
systèmepolitiqueetjuridiques’estadaptéàlareproductionetàlaprotection
decesanormaux.
Lepoèteestmortparcequesonamourdelavie,sonrêved’unautremonde,
d’uneautresociétéontfomentéplusquedelahaine.Savisionasuscitécequ’il
yadepire:lapeur.Noussommesplongésdanslechaosetceuxquiviventdece
chaosontpeurdelaparolequiréveillelesmorts-vivants.Ilyaceuxquirêvent
aussi,ilssontlégions,deveniraux commandesdecechaos.Ilssonttellement
petits,tellementpiètresqu’ilsnepeuventrêverd’autrechose.Lafinduchaos
seraitpoureuxlafindumonde.
Lapeuraeuraisondupoète,maisellenepeutavoirraisondel’espoir.
Car, que les faiseurs de chaos le veillent ou non, un peuple ne peut cesser de
rêveràunavenirmeilleur.Etc’estcequelepoèteaclamétoutesavie.Nejamais
perdrel’espoirmalgrélaférocitédesmonstres.
Jacques Roches aimait la vie dans ce qu’il y a de meilleur. La plupart de nos
rédacteurs le connaissaient et tous ont gardé de lui l’image d’un homme qui
semblait porter sur ses épaules la douleur d’Haïti, mais qui persistait malgré
tout,chaquejour,àcueillirdesétoilesavecsoncœur.Desimposteurscriminels
nel’ontpasseulementassassiné. SurlecorpsdeJacques,cesimposteurscrimi-
nelsontécritlanoirceurdeleurâme.Anousd’enprendreacteàchaquemoment
denotreviedepeuplesinousnesommespasdesfousetdesinconscients.
AuNational,nousnousinclinonsencoreunefoisdevantlamémoiredeJacques
Roche.Ilspartenttoustroptôt,nosgrandshommescommesilabêtisesurcette
terre d’Haïti tramait un complot pour nous mettre en mode régression. Pour
sonnerleglasdecetteconjuration,c’estànoustousdeconjuguernosefforts,
defaireensortequenousdevenionsgrandsetfortsensemble.AlbertCamus
nedisait-ilpasquelagrandeurdel’hommedépenddesadécisiond’êtreplus
fortquesacondition?C’estparcelaquenouspourrons,finalement,ensemble,
vaincrecesmontresetconstruirecepaysrêvéparnosancêtresoùlebienvivre
ensembledeviendralarègle.
Gary Victor
Édito
Accord pour la facilitation
des échanges au sein
des membres de l'OMC
Par Évens RÉGIS
HAÏTI/ÉCHANGESCOMMERCIALES
C
’est un accord qui a été signé à
Bali, lors de la IX Conférence
ministérielle de l’OMC. Il vise
à astreindre les pays membres
de cette structure à améliorer
leur transparence, leur efficacité
douanière, ainsi que leur coopération
avec les organismes de régulation des
frontières et le secteur privé. L’accord,
déclare Ghisler Dugat, directeur
général du MCI, se révèle important
dans le secteur, car avec lui, on peut
aboutir à une réduction des coûts de
transactions de dédouanement des
biens à l’import et à l’export.
L’accord de facilitation des échanges
(AFE) contient 36 dispositions. Et il
sera contraignant pour tous les 159
États membres de l’OMC. Il contient
trois mesures d’application. Les
signataires auront le choix entre
une mise en œuvre dès l’entrée en
vigueur, une mise en œuvre différée
ou une mise en œuvre en rapport
avec l’acquisition des capacités à
travers l’assistance et le support.
Contrairement aux pays qui sont
mieux positionnés économiquement
sur l’échiquier mondial, l’OMC
accorde la possibilité aux pays
moins avancés et à ceux en voie
de développement de classer eux-
mêmes, individuellement, les
dispositions de l’accord selon les
trois catégories de mesures.
Ces derniers auront également la
chance de prendre du temps pour
se conformer et d’en choisir leur
date de mise en œuvre de l’accord.
Les ateliers du MCI, selon le
directeur général Ghisler Dugat,
sont organisés pour prévenir des
inquiétudes au sein des secteurs-
clés de la vie économique nationale,
au moment de la mise en œuvre de
l’accord. Avec cet accord, poursuit-
il, les échanges commerciaux
vont être effectués beaucoup plus
rapidement et les tarifs douaniers
vont être diminués.
Les ateliers, c’est justement
pour évaluer, notifier les besoins
d’Haïti, et ensuite faire des
recommandations à l’OMC et aux
autres donateurs, afin de recevoir
les accompagnements nécessaires,
a-t-il ajouté.
Le représentant du Centre de
commerce international (CCI),
Ezéquiel Mariano Guicovsky
Lizarraga, a précisé pour sa part
qu’il s’agit d’une initiative pour
aider les décideurs et le secteur
privé à mieux comprendre les
mesures de cet accord, pour que
la République soit mieux équipée
pour adresser à l’OMC sa requête
devant faciliter dans les prochains
jours, la mise en vigueur de l’accord
sur le territoire national.
Ezéquiel Mariano Guicovsky
Lizarraga a par ailleurs informé
que son institution va travailler
avec les secteurs public et privé
d’Haïti, en vue de les aider à
mieux interpréter les principes, les
obligations, ainsi que les actions
concrètes qu’ils doivent mener pour
ne pas enfreindre les prescrits dudit
accord.
Décembre 2013, les pays membres de l’Organisation
mondiale du commerce (OMC) ont adopté, en Indonésie,
un accord pour la facilitation des échanges dont la
ratification est prévue pour décembre 2015. Une fois
cet accord entré en vigueur, l’OMC va contraindre ses
membres à améliorer leurs procédures d’échanges. Afin
d’évaluer et d’identifier les besoins nécessaires d’Haïti
avant la matérialisation de cet accord, le ministère du
Commerce et de l’Industrie (MCI) a pris les devants, en
organisant les 14 et 15 juillet, à l’hôtel Royal Oasis, un
atelier de réflexion pour mieux informer les secteurs
concernés du bien-fondé de cet accord.
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4 | N0
39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
ACTUALITÉ
L'Union européenne s'engage
dans l'observation électorale
Par Noclès Débréus
HAÏTI/ÉLECTIONS
A
près avoir apporté une con-
tribution de cinq millions
d’euros au budget électoral,
l’Union européenne (UE),
à la demande du gouvernement
haïtien, s’est impliquée, cette fois,
dans l’observation électorale. En ce
sens, un protocole d’entente a été
paraphé, ce mardi 14 juillet, entre le
Conseil électoral provisoire (CEP) et
les responsables de l’UE concernant
une mission d’observation électorale
pour les élections législatives, prési-
dentielle ainsi que les collectivités ter-
ritoriales de cette année. Ce même
protocole sera aussi signé avec le
Premier ministre Évans Paul, le mer-
credi 15 juillet 2015, annoncent les
responsables.
Après l’Organisation des États
américains (OEA) et l’Onu, l’Union
européenne, avec cette mission
d’observation, est venue augmenter
le rang des organismes internation-
aux impliqués dans l’observation
électorale en Haïti. Cette mission
de l’Union européenne, selon Mme
Manuela Riccio, chargée d’affaires
de l’UE en Haïti, aura pour attribu-
tion de fournir une analyse com-
plète du processus électoral avec
comme boussole la législation haï-
tienne ainsi que les normes région-
ales et internationales régissant la
matière.
Menée par Mme Elena Valenciano,
membre du Parlement européen,
cette mission d’observation est
composée de plusieurs équipes
divisées ainsi : une équipe-cadre
formée de 7 experts, 11 équipes
d’observateurs de longue durée
qui seront déployées dans tous les
départements du pays, un mois
avant la tenue du scrutin, et 11
équipes d’observateurs de courte
durée qui se déploieront le jour du
vote. À cela s’ajoutent les obser-
vateurs du Corps diplomatique de
l’Union européenne accrédités en
Haïti, qui participeront également à
l’observation des joutes électorales
dans le pays.
« La mission électorale fait partie
intégrante du soutien que l’UE
octroie à Haïti. Elle démontre la
solidarité des citoyens européens
avec Haïti et notre engagement
pour le soutien d’une démocratie
moderne et consolidée, essentielle
pour la reconstruction et le dével-
oppement du pays », a fait savoir
Madame Valenciano dans des propos
rapportés par Manuela Riccio au
moment de signer le protocole.
Selon Madame Riccio, qui parlait au
nom de la cheffe de la mission, cette
délégation d’observation n’entend
pas interférer dans le processus
électoral, mais elle veillera à ce
que la volonté du peuple haïtien
soit reflétée le plus fidèlement pos-
sible dans les résultats électoraux
en toute transparence.
Dans le cadre de ses travaux
d’observation, la mission produira
une analyse qui couvrira le cadre
juridique, la performance de
l’administration électorale, les
activités de campagne des candi-
dats et partis politiques, le respect
des libertés fondamentales, l’action
des médias, le vote, le dépouille-
ment, l’annonce des résultats,
la consolidation des résultats et
autres. Dans les douze jours qui
suivent le jour du vote, la mission
sortira un rapport préliminaire sur
ses observations, a informé Manuela
Riccio, précisant que cette mission
d’observation de l’UE est soumise à
un code de conduite qui empêchera
toute ingérence dans le processus
électoral.
Plus loin, Manuela Riccio a sou-
ligné que la mission adhère égale-
ment aux principes admis pour
l’observation électorale au niveau
international. Aussi, dit-elle, cette
observation sera menée avec impar-
tialité et la plus haute rigueur au
service exclusif du droit de vote
libre et démocratique.
Ce protocole d’accord paraphé entre
l’institution électorale et l’Union
européenne traduit le choix du Con-
seil électoral provisoire de conduire
le processus dans l’objectivité, la
vérité et la transparence, a informé
de son côté, Pierre Louis Opont,
président de l’organisme électoral.
« Plus il y a d’observateurs, plus le
CEP disposera de témoins », a-t-il
dit, avant de renouveler son engage-
ment à mener le processus électoral
dans le strict respect du décret élec-
toral et d’organiser des élections
honnêtes et démocratiques à partir
du 9 août pour le premier tour des
législatives.
Signature d’un protocole d’entente entre le CEP et l’UE sur l’observation des élections législatives. / Photo: Noclès Débréus
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 5
ACTUALITÉ
ÉCHO
Le CEUEH annonce
une marche pacifique
pour le 28 juillet
Le collectif des étudiants de l’UEH
(CEUEH) n’entend pas laisser
passer inaperçue la date du 28
juillet qui ramène le centième
anniversaire de l’occupation
américaine en Haïti. Il annonce
deux journées de réflexions
durant lesquelles des conférences
débats seront organisées avec les
professeurs de l’UEH. Le Collectif
se dit contre un carnaval le 28
juillet et programme une marche
pacifique pour commémorer cette
triste date.
L'inauguration
d'un observatoire
universitaire
binational, fin juillet
Un observatoire universitaire
binational sera inauguré
bientôt en Haïti. Cette structure
contribuera au développement
socio-économique durable des
deux pays en favorisant le dialogue
transfrontalier et la coopération
bilatérale, à travers l’analyse
continue des questions migratoire,
d’éducation, d’environnement
et de commerce. Les activités
seront basées sur la recherche,
des réunions, des publications et
la formation, qui contribueront à
la régulation des relations entre les
ressortissants des deux nations,
apprend-on.
L'Ocaph, création d'un
fonds d'urgence en
faveur des déportés
Les Haïtiens déportés ne
bénéficient nullement d’un
traitement acceptable de la part du
gouvernement haïtien, a déploré
l’Observatoire citoyen de l’action
des pouvoirs publics haïtiens
(Ocaph). Jusqu’à présent, aucune
structure sérieuse n’est mise en
place pour accueillir les rapatriés,
a dénoncé Jhony Célestin,
membre de l’Ocaph, qui demande
la création d’un fonds d’urgence en
faveur des déportés.
Petit-Goâve : armes à
feu interdites lors de la
campagne électorale
Durant la période de campagne
électorale, la Police nationale
d’Haïti est la seule institution
habilitée à porter des armes à
feu dans la commune de Petit-
Goâve. C’est ce qu’a indiqué un
communiqué de presse de la
Direction départementale de
l’Ouest, précisant que tout individu
surpris en flagrant délit avec une
arme à feu (artisanale ou non)
tombera sous le coup de la loi. Le
communiqué invite par ailleurs «
toute personne qui aurait remarqué
une motocyclette circulant sans
son numéro d’autocollant à le
signaler à la police par un appel
téléphonique ou par un SMS aux
numéros suivants : 509 - 4834-
1714 / 509- 4834-1737 ».
IFC va injecter quatre
millions de dollars
américains dans le
textile
«InternationalFinanceCorporation
» (IFC), une institution membre
du Groupe Banque mondiale, va
investir quatre millions de dollars
pour aider la société « The Willbes
Haitian S.A. », filiale de l’entreprise
sud-coréenne « The Willbes & Co.,
Ltd », à développer sa capacité de
production de vêtements et créer
1 000 emplois supplémentaires
à Port-au-Prince d’ici à la fin de
2016. IFC va en outre mobiliser un
prêt parallèle de quatre millions
de dollars auprès de la Banque
interaméricaine de iéveloppement
(BID).
Les membres de la mission de l’OEA rencontrent des représentants des
organisations de la sociét´civile.
» suite de la première page
La société civile doute de l'arbitrage de l'OEA
Par Stephen Ralph Henri
HAÏTI/RÉPUBLIQUEDOMINICAINE/MIGRATION
L
a Mission a également
rencontré des organismes
de la société civile haïtienne
évoluant dans le secteur des
droits humains ou traitant de la
question migratoire le dimanche
12 juillet. Parmi ces organisations,
on retrouve le Réseau national de
défense des droits humains (RNDDH),
le Groupe d’appui aux rapatriés et
refugiés (Garr), la Fondation Zile, la
Commission épiscopale Justice et
Paix, le Centre œcuménique des droits
de l’homme et le Forum économique.
La directrice de la Commission
épiscopale Justice et Paix (Ce-Jilap),
apprécie la démarche de l’OEA de
dépêcher cette mission. Toutefois,
elle croit qu’il n’y a pas « trop d’espoir
» sur les impacts du rapport que cette
mission va produire en dépit « des
beaux souhaits ».
Les perspectives ne sont pas claires,
pour la directrice de la Ce-Jilap, qui
doute de « la possibilité pour le rapport
de l’OEA d’influencer les décisions
de la République dominicaine ».
La Coordination du Collectif du 4
Décembre est du même avis.
« Nous avons questionné la force que
ce rapport pourrait avoir », souligne
au National Jean Robert Argant, le
coordonateur du Collectif. « Nous
espérons quand même que cela
arrivera à un point où la République
dominicaine sera perçue par la
communauté internationale comme
un État paria et bandit », ajoute le
responsable.
Le doute qu’expriment ces
organisations découle du fait que
les autorités dominicaines ont déjà
négligé des décisions arrêtées par
des institutions internationales, dont
la Cour interaméricaine des droits
de l’homme (CIDH). En 2005, la
CIDH avait condamné les pratiques
d’immigration de la République
voisine, qu’elle jugeait contraires
aux dispositions de la Convention
américaine sur les droits de l’homme,
un document pourtant signé par l’État
dominicain.
Si l’espoir d’un changement de
direction quant aux agissements
de la République dominicaine est
moindre, la coordination de la
Fondation Zile, y voit une possibilité
de mobiliser la communauté
internationale. « Le rapport en soi
va permettre l’interpellation d’autres
instances internationales », juge
Edwin Paraison, coordonnateur de
la Fondation.
Aussi souligne-t-il l’avantage des
« recommandations vers les deux
gouvernements », qui seront produites
par les membres de la Mission. Il croit
que ce sera « un rapport très équilibré
comportant des données fournies par
les deux Républiques ».
Le Garr partage l’idée du Collectif et
« espère qu’après le rapport les gens
seront beaucoup plus sensibilisés à la
cause des migrants », déclare Saint-
Pierre Beaubrun, coordonateur du
Groupe. « La solidarité internationale
(…) et la pression morale sur la
République dominicaine » que
pourra provoquer le rapport des
missionnaires sont d’autres valeurs
positives que souligne Beaubrun.
Le Garr a remis aux membres de la
Mission un document contenant,
essentiellement, des textes qu’il a
produits sur les actes de déportation
et de rapatriement.
Par ailleurs, les membres de la
mission de l’OEA ont rencontré des
organisations de la société civile
dominicaine, des entrepreneurs
ainsi que les dirigeants dominicains,
les 10 et 11 juillet. Cette mission,
conduite par le secrétaire aux
Affaires politiques de l’OEA
Francisco Guerrero, est effectuée à
la demande du secrétaire général de
l’Organisation, Luis Almagro, et des
des autorités des deux pays.
Après la rencontre avec la mission de
l’OEA, les dirigeants dominicains ont
expliqué à la presse qu’ils exigeaient
des excuses publiques de la part des
dirigeants haïtiens. La République
dominicaine nie avoir déjà commencé
avec le processus de déportation et
de rapatriement. Or, les personnes
déportées en Haïti témoignent qu’elles
ont été contraintes par des militaires
et des policiers dominicains de
monter dans des bus qui les ont
conduites à la frontière.
De leur côté, les organisations des
droits humains en Haïti voient le
retrait de l’arrêt 168-13 adoptée par
la Cour constitutionnelle dominicaine
en date du 23 septembre 2013 comme
la solution à trouver. Cette disposition
dénationalise tous les Dominicains
nés en République dominicaine de
parents étrangers depuis 1929. Cette
décision avait engendré la création
d’un Plan national (dominicain) de
régularisation des étrangers (PNRE)
qui a duré une année et qui est
arrivé à terme le 17 juin 2015. Ce
programme a servi de contexte pour
nourrir l’idée de déportation et de
rapatriement à Saint-Domingue. Et
depuis, plus de 40 mille personnes
ont été refoulées vers Haïti.
6 | N0
39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
ACTUALITÉ
Un nouveau palais pour la Cour de cassation
Par Lionel Edouard
HAÏTI/JUSTICE
C
omme à l’accoutumée, à
chaque grande inaugura-
tion, c’est par une céré-
monie religieuse qu’a débuté
l’événement. Le cardinal Chibly Lan-
glois qui officiait, tout en présentant
ses sympathies aux victimes de la
dernière catastrophe survenue en
Chine Taïwan, a imploré la bénédic-
tion de Dieu sur les nouveaux bâti-
ments qui devront loger la Cour de
cassation.
Le président de cette cour, Me Jules
Cantave, a enchaîné pour expliquer
que cette inauguration est un
événement attendu depuis trois ans. Il
a aussi rappelé la terrible catastrophe
du 12 janvier 2010, durant lequel
le bâtiment du Palais de justice qui
logeait la Cour de cassation, construit
en 1928, s’était effondré. « Nous
avions beaucoup perdu, notamment
en vies humaines », a-t-il dit, appelant
à observer une minute de silence en
l’honneur des nombreuses victimes.
Puis, vantant la taille et l’élégance
architecturale de ce nouveau
bâtiment qui, selon lui, est l’un des
plus beaux acquis dans le cadre de
la reconstruction postséisme, Me
Cantave a remercié Taiwan pour
son aide financière qui a servi à la
matérialisation de ce projet.
Des relations
en bonne santé...
Le président de la République,
Michel Martelly, avant de débuter
son allocution, a également demandé
une minute de recueillement, cette
fois, en l’honneur des victimes de
l’explosion du 27 juin 2015 qui a fait
plus de 500 blessés dont 200 graves
dans un parc aquatique à Taipei,
capitale du Taïwan.
Ensuite, M. Martelly a mis l’accent
sur le renforcement continu des
liens de coopération entre les deux
pays, depuis l’entame des relations
diplomatiques en 1956. Cela s’est
traduit, a-t-il poursuivi, par un
partenariat axé sur le développement
et le renforcement des capacités du
gouvernement haïtien en vue de
faciliter les efforts de reconstruction.
« Le chemin de la reconstruction phy-
sique du pays est très long, un chemin
que l’État haïtien n’arrivera pas à
parcourir seul mais, avec le support
de l’international et la détermination
de mon administration, nous y arriv-
erons sûrement », a dit le président
Martelly, qui a également expliqué le
choix de la construction du Palais de
la Cour de cassation, par le fait que le
président Ma Ying-Jeou est lui-même
un juriste qui a été ministre de la
Justice à Taïwan entre 1993 et 1996.
« Cet ouvrage constitue un
témoignage de notre profond respect
pour la justice », affirme le président
Martelly qui y voit un symbole de la
suprématie du pouvoir judiciaire dans
ses rapports de dépendance avec les
deux autres pouvoirs. Aussi soutient-
il, pour un pouvoir prédisposé à la
distribution de la justice, selon le
droit et un mode impartial, il est
normal qu’il soit mis en valeur à
travers des locaux qui optimisent les
conditions de travail.
La sécurisation des dossiers
judiciaires et un environnement
favorable au travail des juges
sont les autres qualités de cet
ouvrage construit selon les normes
parasismiques, mises en exergue par
le chef de l’État haïtien. Par ailleurs,
il garantit l’entière collaboration du
MJSP qui devra travailler avec la
justice pour le plus grand bien de
la population. Avant de commencer
son allocution, le président Ma
Ying-Jeou a, de son côté, remercié
les autorités haïtiennes pour leur
compassion à l’endroit des victimes
de l’explosion au parc aquatique à
Taipei. « Le nombre d’hospitalisés
ne cesse de baisser », a-t-il informé.
S’adressant en français à l’assistance,
il s’est dit fier d’inaugurer ce nouveau
bâtiment, fruit de l’amitié entre la
République de Chine Taïwan et Haïti.
Puis, il a enchaîné sur une note plutôt
humoristique en disant : « Mesdames
et Messieurs, c’est tout ce que je
connais en français. »
Renouvelant la volonté de son pays
de continuer à accompagner Haïti,
le président Ying-Jeou croit que ce
nouveau local pour la Cour de cassa-
tion marque la volonté du président
Martelly de bâtir un État de droit en
Haïti. Aussi a-t-il tenu à souligner
des domaines de coopération entre
les deux Républiques qui compren-
nent, notamment, la santé publique,
le relogement des sinistrés, les infra-
structures et l’intégration des enfants.
Au Palais national, le président Ying-
Jeou a informé que l’ambassadeur
de Taïwan en Haïti sera instruit
d’explorer d’autres champs de coo-
pération entre les deux pays, notam-
ment le secteur énergétique (énergie
solaire).
Au Palais national, le président Michel
Martelly, qui accompagnait son
homologue devant la presse, a, quant
à lui, renouvelé la volonté d’Haïti de
rester aux côtés de Taïwan dans ses
prises de position à travers les insti-
tutions internationales. Car, croit-il,
la coopération entre les deux pays est
bénéfique pour l’humanité.Financé
à hauteur de 15 millions 300 mille
dollars par le gouvernement taïwa-
nais, selon le président Martelly, ces
travaux ont été réalisés par la firme
Overseas Engineering Construction
Company et supervisés par l’Unité
de construction de logements et de
bâtiments publics (UCLBP). Lancés
en août 2013, ils ont duré vingt-trois
mois. Le bâtiment est conçu selon les
normes parasismiques, pour résister
à un tremblement de terre de magni-
tude 9 sur l’échelle de Richter.
Établi sur une superficie de 4 262
m2, le palais de la Cour de cassa-
tion comporte trois étages. Le pre-
mier niveau, d’une superficie de
1 415 m2, abritera un espace de
stationnement d’une capacité de 24
voitures. Le deuxième niveau occu-
pera une superficie de 1 462 m2
et abritera notamment les bureaux
des juges, du commissaire et des
substituts-commissaires du gouver-
nement. Le bureau du président de
la Cour, d’une superficie de 54 m2,
se trouvera au troisième niveau du
bâtiment qui s’étend sur une super-
ficie de 1 421 m2.
Le président Michel Martelly et son homologue taïwanais inaugurent le palais de
la Cour de cassation / Photo: J.J. Augustin
En présence de nombreuses personnalités du Gouvernement, du Corps diplomatique et du pouvoir judiciaire,
le chef de l’État haïtien, Michel Joseph Martelly, et son homologue de la République de Chine (Taïwan), Ma Ying-
Jeou,ont inauguré, au Champ de Mars, les nouveaux locaux devant abriter la Cour de cassation, la plus haute
instance du pouvoir judiciaire en Haïti.
» suite de la première page
A
lors que la campagne élec-
torale est lancée, le climat
de sécurité reste encore délé-
tère. Candidats, dirigeants
politiques, responsables de l’appareil
électoral, personne n’est à l’abri de
cettevagued’insécuritéquidéferlesur
le pays. Durant le weekend écoulé,
plusieurs cas de violences liées à la
question électorale ont été recensés
dans le Sud-Est et dans l’Artibonite
où trois individus lourdement armés
avaient investi la résidence privée
de Claudel St-Hilien, président du
Bureau électoral départemental
(BED) de ce département.
Certains départements, dont
l’Artibonite et le Sud-Est, ayant
la réputation de « zones rouges »
sont le théâtre de certains actes de
violences en ce début de campagne
électorale. Dans le Sud-Est, les sym-
pathisants du Parti haïtien Tèt kale
(PHTK) ont frappé fort, en giflant
un propriétaire de maison qui se
serait opposé à ce que des photos
de leurs candidats soient collées sur
les murs de sa résidence. En réac-
tion, ce propriétaire aurait blessé
l’un de ces colleurs de photos à
coups de pique, selon des informa-
tions recueillies auprès des témoins
de cette scène qui s’est passée dans
la localité de Beaudouin (une banli-
eue de Jacmel).
À Bainet, toujours dans le Sud-Est,
un partisan de Joseph Lambert a
failli y laisser sa peau en collant sur
les murs d’une maison privée des
photos de « Papa Tounen », surnom
attribué à l’ancien sénateur Joseph
Lambert. Alors que l’article 115 du
décret électoral édicte clairement
que les candidats et candidates,
partis et groupements politiques
peuvent utiliser tout moyen de
communication collective pour
exposer leur programme. Cependant,
il leur est interdit d’apposer
affiches, graffitis et autres sur les
clôtures, murs, portes des maisons
privées, des édifices d’intérêt public
(lieux de cultes, écoles, hôpitaux,
monuments historiques, etc.) sous
réserve des sanctions prévues dans
ledit t décret. Les candidats ainsi
que leurs sympathisants semblent
avoir oublié cette disposition légale
en apposant librement leurs affiches
sur les murs des maisons privées.
Déjà, la semaine écoulée, des
individus non identifiés ont fait
irruption dans la résidence de
Raymond Jean-François, candidat à
la mairie de la commune de Bainet,
sous la bannière du parti Fusion des
sociaux-démocrates. Kensy Jean
François, un mineur de 16 ans, neveu
du candidat, a été blessé par balle et
les envahisseurs avaient emporté des
documents appartenant au candidat.
Dans la commune de Belle-Anse, des
inconnus armés avaient aussi tiré sur
la résidence de Garraud Historique,
membre du parti « Renmen Ayiti »,
de Jean Henry Céant.L’inquiétude
est grandissante durant cette
période électorale. Des membres
de l’institution électorale avaient
dénoncé un complot ourdi contre
eux.
Des organisations de défense des
droits humains ainsi que d’autres
organisations de la société civile
sont montées au créneau pour
dénoncer une vague de violences
durant cette période électorale.
Dans un rapport, le Réseau national
de défense des droits humains
(RNDDH), le Conseil haïtien des
acteurs non étatiques (Conhane) et
le Conseil national d’observation
des élections (CNO) ont exigé des
autorités concernées une attention
particulière sur le développement
de la violence préélectorale.
À Petit-Goâve où la situation de
sécurité est déjà précaire, le rapport
a fait mention de plusieurs groupes
armés qui se seraient emparés
de la ville. Certains quartiers de
cette commune sont déclarées
« zones rouges » et les citoyens ne
peuvent y circuler librement. Ces
organisations préviennent qu’au
cas où cette situation perdurerait
jusqu’au jour du scrutin, beaucoup
d’électeurs ne pourront pas voter.
Au fil des jours, les cas de
violences augmentent alors que la
Mission des Nations unies pour la
stabilisation d’Haïti (Minustah) s’est
désengagée dans six départements,
parmi lesquels figurent ceux qui
sont réputés chauds en période
électorale.
Face à cet environnement
d’insécurité, la Police nationale
semble de plus en plus avoir du pain
sur la planche, et la population,
aux abois, attend impatiemment la
mise en œuvre du plan de sécurité
longtemps annoncé par l’inspecteur
Gary Desrosiers, porte-parole de
l’institution policière.
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 7
ACTUALITÉ
Gare aux violences électorales !Par Noclès Débréus
HAÏTI/ÉLECTIONS
8 | N0
39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
MONDE
François Hollande s’est posé mardi
en président « audacieux », lors
de sa traditionnelle interview du
14 juillet, mettant en avant son
rôle face à la crise grecque et à la
menace terroriste, sans pour autant
dévoiler ses intentions pour 2017.
« Je ne dis pas que c’est la France
qui a gagné » mais elle a « occupé
toute sa place », joué « tout
son rôle » pour éviter une sortie
d’Athènes de la zone euro, a affirmé
le président de la République,
au lendemain l’accord européen
obtenu à l’arraché à Bruxelles.
Il a souligné à l’inverse « un moment
d’interrogation » chez la chancelière
allemande Angela Merkel qui, de
son côté, a envisagé un « Grexit ».
A l’offensive, M. Hollande a annoncé
qu’ilallaitfairedespropositionspour
« un gouvernement économique
européen » et l’instauration d’ « un
budget de la zone euro ».
« L’humiliation, c’eût été de chasser
» la Grèce, a-t-il aussi déclaré,
alors que les conditions de son
maintien dans la zone euro sont
extrêmement contraignantes. Selon
lui, les réformes prévues doivent
permettre aux Grecs de « retrouver
de la croissance ».
Le chef de l’État, qui a bouclé son
interview en direct sur France
2 et TF1 en trois quarts d’heure
chrono, a souhaité aux journalistes
David Pujadas et Claire Chazal, de
connaître « des présidents aussi
audacieux » que lui, insistant sur
les « 40 milliards de baisse de
charges pour les entreprises » du
pacte de responsabilité et la mise
en place d’un « nouveau dialogue
social », engagés depuis 2012.
Six mois après les attentats de
janvier à Paris et trois semaines
après celui de Saint-Quentin-
Fallavier, il a assuré que l’exécutif
ne baisserait pas la garde face à la
menace terroriste. « Rien ne sera
relâché », « nous sommes mobilisés
», a-t-il dit, soulignant que « 10 000
militaires seront maintenus sur
le territoire » en plus des 20 000
policiers et gendarmes.
Sarkozy n’est pas sur ma
table de travail
A propos des déclarations
controversées de son Premier
ministre, Manuel Valls, qui avait
parlé fin juin une « guerre de
civilisation » contre l’islamisme
radical, M. Hollande a nuancé,
soulignant « nous sommes face à
des groupes qui veulent mettre en
cause les civilisations, toutes les
civilisations » et « les premières
victimes sont musulmanes ».
M. Hollande a aussi estimé que
l’accord « très important » conclu
sur le nucléaire iranien, au terme
de 21 mois de négociations, était la
preuve que « décidément le monde
avance ».
A22moisdelafindesonmandat,M.
Hollande, toujours très impopulaire
et sans résultats probants sur le
front économique et social, a admis
que même si la croissance « est là
», elle est encore « trop faible » (1,2
% en 2015, selon l’Insee).
Le chef de l’État a promis d’activer
tous les « facteurs de croissance ».
Les décrets de la loi Macron, que le
gouvernement veut décisive pour
relancer l’économie, seront « pris
pour l’été », ce qui va « libérer un
certain nombre d’activités ».
Sur le plan politique, à cinq mois
des régionales de décembre,
dernier test électoral avant la
présidentielle, M. Hollande, déjà
lancé dans une précampagne qui
ne dit pas son nom pour 2017,
s’est toutefois refusé « à annoncer
quelque candidature que ce soit ».
Face aux crises internationales
et aux difficultés économiques,
« si je pensais à l’élection
présidentielle, je serais à côté du
sujet », a-t-il considéré, réaffirmant
qu’il entendait être jugé « sur les
résultats ». « S’il n’y a pas de baisse
du chômage, je ne me représenterai
pas », a-t-il rappelé
Quant à son challenger Nicolas
Sarkozy qui multiplie les attaques
contre lui, il l’a balayé d’un revers
de main: « J’ai suffisamment de
sujets à traiter, celui-là n’est pas
sur ma table de travail ».
Le président de la République a
également assuré que Manuel Valls,
« un bon Premier ministre qui a pris
des engagements », avait vocation
à « terminer le quinquennat » à ses
côtés.
M. Hollande a aussi laissé la porte
ouverte à un retour des écologistes
au gouvernement. En prévision de
la conférence climat en décembre à
Paris, « ceux qui veulent apporter
leur concours sont les bienvenus
et je ne vais pas faire de contrôle à
l’entrée », a-t-il lancé à leur adresse.
Alors que le PS a approuvé
sans surprise l’intervention
présidentielle,l’oppositionacritiqué
un exercice d’autocélébration. «
Hollande en mode autosatisfaction
déconnectée des réalités », a attaqué
dans un tweet l’ex-ministre Nadine
Morano (Les Républicains), rejointe
par Nicolas Dupont-Aignan (Debout
la France) qui a critiqué « un nouvel
exercice d’autocélébration de sa
politique, pourtant dénuée de tout
résultat ».
Dans la même veine, la présidente
du FN Marine Le Pen, a critiqué le
« satisfecit » de M. Hollande qui
« continue à mentir aux Français
», tandis que le Front de gauche a
dénoncé « une politique contraire
aux intérêts de la France. »
Hollande se pose en président « audacieux »
sur la Grèce et face à la menace terroriste
sources : AFP
Le président français François Hollande au palais de l’Elysée à Paris le 14 juillet 2015. / Photo : AFP / POOL / AFP
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 9
MONDE
L
’Iran et les grandes puissances
ont conclu mardi un accord
historique mettant fin à douze
années de tensions autour du
dossier nucléaire iranien et ouvrant
une « nouvelle page » dans les rela-
tions internationales.
L’accord rend quasi impossible
la construction d’une bombe
atomique par Téhéran et marque
le début d’une normalisation des
relations de ce pays de 77 millions
d’habitants, aux riches ressources
pétrolières et gazières, avec la
communauté internationale.
L’UE, l’ONU, Téhéran ou encore
Londres ont salué un accord «
historique », tandis que Moscou
poussait « un soupir de soulagement
» au terme d’un véritable marathon
diplomatique.
Les 109 pages de l’accord limitent
les ambitions nucléaires de Téhéran
en échange de la levée progressive
et réversible des sanctions qui
étouffent son économie.
Ce succès diplomatique, conclu
après deux ans de négociations
acharnées, referme un dossier
qui empoisonnait les relations
internationales depuis 2003.
Ce dénouement intervient à un
moment où le Proche-Orient est
déchiré par de nombreux conflits,
dans lesquels l’Iran est impliqué.
Paris a appelé l’Iran à se saisir de
l’occasion pour « aider à en finir »
avec le conflit en Syrie. A Damas, le
président Bachar al-Assad a félicité
son allié iranien chiite pour sa «
grande victoire ».
Même les Emirats arabes unis -un
pays sunnite- ont estimé que cet
accord pouvait être une « occasion
d’ouvrir une nouvelle page dans les
relations entre les pays de la région
du Golfe ».
A l’inverse, Israël a immédiatement
dénoncé une « erreur historique »,
qui va permettre à l’Iran de financer
sa « machine de terreur ». « Israël
n’est pas lié à cet accord avec l’Iran
(....) Nous saurons toujours nous
défendre », a menacé le Premier
ministre Benjamin Netanyahu.
C’est la première fois qu’un accord
à ce niveau lie la République
islamique et les Etats-Unis depuis
la rupture de leurs relations
diplomatiques en 1980.
« Cet accord nous donne une chance
d’aller dans une nouvelle direction »,
a commenté le président américain
Barack Obama, tout en soulignant
qu’il était fondé sur les vérifications
« et pas sur la confiance ».
Deux semaines après la
réconciliation avec Cuba, le
président démocrate marque
d’une nouvelle pierre blanche
diplomatique la fin de son dernier
mandat.
L’épilogue est également un succès
pour le président iranien Hassan
Rohani, pour qui l’accord pourrait
« éliminer peu à peu la méfiance »
entre les ennemis historiques. Le
chef de l’Etat, un modéré, a promis
que son pays ne se doterait « jamais
» de la bombe atomique.
Accès limité
L’entente a été arrachée à l’issue
de 18 jours d’un dernier round
de négociations, un final d’une
longueur sans précédent depuis les
accords de Dayton qui ont mis fin
à la guerre de Bosnie-Herzégovine
en 1995.
L’accord met en œuvre de grands
principes actés à Lausanne
en avril: Téhéran s’engage à
réduire ses capacités nucléaires
(centrifugeuses, stock d’uranium
enrichi...) pendant plusieurs
années et à laisser les inspecteurs
de l’Agence internationale de
l’énergie atomique (AIEA) procéder
à des inspections plus poussées.
Le but est de rendre quasiment
impossible la possibilité pour l’Iran
de fabriquer une bombe atomique,
tout en assurant à Téhéran, qui
nie avoir jamais eu l’intention de
se doter de la bombe, le droit de
développer une filière nucléaire
civile.
Une fois les installations iraniennes
réduites, selon les termes de
l’accord, il faudrait en effet un
an à Téhéran pour fabriquer une
bombe, contre deux à trois mois
aujourd’hui.
En échange, l’Iran bénéficiera
progressivement d’une levée des
sanctions internationales adoptées
depuis 2006 par les Etats-Unis,
l’Union européenne et l’ONU et qui
brident l’économie du pays.
Les premières sanctions
pourront être levées à partir
du premier semestre 2016 si la
République islamique respecte ses
engagements. En cas de violation
de l’accord, elles pourront être
rétablies. Et cette réversibilité
durera quinze ans.
En revanche, l’interdiction
du commerce des armes a été
reconduite pour cinq ans, sauf
autorisation spécifique du Conseil
de sécurité. La demande de l’Iran,
soutenue par Moscou, de lever cet
embargo a été un des principaux
points de blocage des discussions.
Autre sujet délicat: la possibilité
pour les inspecteurs de l’AIEA de
se rendre sur les sites militaires
iraniens. Finalement, Téhéran a
accepté de leur permettre un “accès
limité” à certains sites.
De travers
Les milieux économiques se
tiennent prêts à revenir dans ce
pays qui dispose des quatrièmes
réserves de brut au monde et des
deuxièmes de gaz. L’Iran, un pays
de l’Opep, pourra à terme exporter
à nouveau librement son pétrole.
Les prix du pétrole perdaient du
terrain mardi dans les échanges
européens après l’annonce de
l’accord qui se traduira par un
afflux de brut dans un marché déjà
plombé par un surplus d’offre.
Les Iraniens, qui ont élu Hassan
Rohani à la présidence en 2013 sur
la promesse de levée des sanctions,
attendaient un tel accord avec
impatience.
« Quand le monde nous reconnaîtra
comme un pays pacifique (...) les
investissements étrangers vont
affluer et cela aura un impact
positif sur la vie des gens », a
estimé, à Téhéran, Hamid Bahri,
un ingénieur de 34 ans.
Mais les tenants d’une ligne dure en
Iran aussi bien qu’aux Etats-Unis
n’ont cessé d’exprimer leur hostilité
aux discussions.
A Washington, l’accord doit
désormais être soumis au Congrès,
contrôlé par les Républicains qui
sont très méfiants envers Téhéran.
L’accord doit également être
endossé par le Conseil de sécurité
de l’ONU, une formalité qui doit
intervenir d’ici « quelques jours »,
selon Paris.
Accord historique sur le nucléaire iranien
après 12 ans de criseSources : AFP
Les principaux diplomates qui ont œuvré à la conclusion d’un accord sur le nucléaire iranien posent le 14 juillet 2015 à Viennes. / Photo : AFP / JOE KLAMAR
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39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
ÉCONOMIE
Quatre millions de dollars américains à la Willbes
pour créer 1000 emplois en Haïti
Par Henri Alphonse
E
lle importe ses matières pre-
mières de la République
dominicaine, confectionne
ses vêtements en Haïti et les
vend aux Etats-Unis d’Amérique.
Preuve, s’il en est encore besoin, que
les affaires n’ont pas de frontières,
encore moins d’état d’âme.
La Société financière internatio-
nale (SFI - FIC), une institution
membre du groupe de la Banque
mondiale, investira quatre mil-
lions de dollars, soit 224 millions
de gourdes au taux en vigueur sur
le marché des changes (56 gourdes
pour un dollar US), pour aider la
société Willbes à développer sa
capacité de production de vête-
ments et à créer environ 1000
emplois à Port-au-Prince d’ici à la
fin de 2016.
La SFI envisage de mobiliser un
prêt parallèle de quatre millions
de dollars auprès de la Banque
interaméricaine de développement
(BID) pour aider la Willbes à con-
solider sa situation financière. Ces
ressources supplémentaires per-
mettront à la société de se doter,
par ailleurs, de nouvelles lignes de
production.
D’un autre point de vue, ce
financement favorisera – selon
la SFI – le développement du
secteur vestimentaire en Haïti,
une composante essentielle de
l’économie nationale et une source
majeure d’investissements étrang-
ers et d’emplois. Ces dernières
années, les exportations de vête-
ments ont représenté quelque
90 % des exportations d’Haïti. «
Ce partenariat conclu avec IFC,
favorisera l’expansion de Willbes
et la prospérité du secteur haïtien
de l’habillement », s’est félicité
M. Byung-Hyun Jun, président
directeur général de la Willbes.
Il reste convaincu qu’Haïti est en
mesure de devenir l’un des pro-
ducteurs les plus compétitifs de
vêtements de confection. « Et nous
sommes prêts à prendre part à
cette croissance », a-t-il promis.
Luc Grillet, responsable principal
pour l’Amérique centrale et les
Caraïbes à la SFI, témoigne de la
détermination de l’institution à
soutenir le secteur privé haïtien
par l’intermédiaire d’entreprises
qui, comme la Willbes, « créent des
emplois et des débouchés permet-
tant à la population d’améliorer ses
conditions de vie ». Une démarche
qu’il inscrit dans le cadre d’une
stratégie visant à « favoriser la
croissance dans un secteur priori-
taire et à produire ainsi des emplois
et des recettes d’exportations pour
l’économie haïtienne ».
Un portefeuille assez garni
Le portefeuille de la SFI en Haïti
s’élève à 122 millions de dol-
lars dont 24 ont été mobilisés
auprès d’autres partenaires. La
SFI intervient dans des secteurs
comme l’hôtellerie, l’énergie, les
marchés financiers et le secteur
manufacturier. Dans le cadre de
ses programmes consultatifs avec
le secteur privé et les autorités
nationales, elle facilite l’accès au
financement, soutient les parte-
nariats public-privé, favorise
l’amélioration du climat de
l’investissement en Haïti et apporte
son soutien aux programmes desti-
nés à rehausser la productivité des
petites et moyennes entreprises.
La Willbes
La Wilbes est une entreprise tex-
tile sud-coréenne de confections,
installée au Parc industriel de Port-
au-Prince depuis plus de 10 ans
et offrant des emplois à quelque
4500 personnes. Cette filiale de
l’entreprise sud-coréenne The
Willbes & Co. Ltd, a su tirer profit
des avantages offerts par la loi
Help, ci-devant Hope.
Elle bénéficie également des
exemptions de taxes et autres
avantages offerts par le gouver-
nement haïtien aux industries
de sous-traitance installées en
Haïti. Elle conseille également à
la Kotra, l’agence sud-coréenne
de promotion d’investissements
qui l’a honoré en juin 2010 « pour
sa constance et l’immense travail
réalisé en Haïti ».
La SFI
Membre du groupe de la Banque
mondiale, la SFI - IFC - est la plus
importante institution mondiale
d’aide au développement dont les
activités concernent exclusivement
le secteur privé. Elle collabore avec
des entreprises privées dans une
centaine de pays et consacre son
capital, son expertise et son influ-
ence à l’éradication de l’extrême
pauvreté et à la promotion d’une
prospérité partagée.
Au cours de l’exercice quatorze
, SFI-IFC a fourni plus de 22 mil-
liards de dollars de financements
pour améliorer les conditions de
vie dans les pays en développe-
ment et résoudre les problèmes de
développement les plus urgents.
INDUSTRIETEXTILE
Quatre millions de dollars à la Wilbes pour créer 1 000 emplois en Haïti. / Photo: ukrmillers.com
RENCONTREENTRELEMPCEETLEGROUPEG12+
Le cadre de coopération de l'aide externe
au développement sera réexaminé
Source : MPCE
C
onsolider les actions en cours.
Étudier ensemble les pistes
de coopération. Deux objec-
tifs que se sont donné les
responsables du ministère de la Plani-
fication et de la Coopération externe
et ses partenaires du groupe G12+
dans le cadre de l’accompagnement
au gouvernement d’Haïti.
Cette première rencontre dite
« consolidée » - ce sont les
termes utilisés par le bureau
de Communication du MPCE -
était l’occasion d’une évaluation
conjointe de l’impact des efforts
consentis jusque là par les parties
prenantes du processus de
coopération en cours.
Selon un communiqué du Bureau,
le ministre Yves Germain Joseph a
fait état, au cours de la rencontre,
de l’adoption d’un ensemble
de dispositions garantes d’une
meilleure gestion, en rapport
avec la mission, les fonctions et
attributions du MPCE. Se référant
au Cadre de Coopération de
l’Aide Externe au Développement
(CAED), le Ministre a informé les
membres du G12+ présents à cette
réunion qu’il avait constitué une
commission chargée d’évaluer la
situation du CAED et de faire le
cas échéant, des propositions en
vue de la relance de ses activités.
La nécessité de reformater
le secrétariat technique de
coordination est la thématique
qui a retenu l’attention des parties.
L’obligation de maintenir un rythme
raisonnable de tenue de comités
d’efficacité de l’aide fut aussi
évoquée par le ministre Germain
qui a recommandé dans la foulée
la formulation de critères d’analyse
et d’évaluation du mécanisme
conjoint de coopération.
Le Ministre Joseph s’est porté
garant de l’engagement du MPCE à
travailleraurenforcementdesUnités
d’Etudes et de Programmation
(UEP), qui conditionnent le
bon fonctionnement des tables
sectorielles et techniques. Il a
particulièrement insisté, au cours
de la rencontre, sur la nécessité
d’adopter le principe « coûts-
bénéfices » dans le cadre de la
programmation de l’investissement
public.
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 11
ÉCONOMIE
Développement économique. Équité sociale. Équité intergénérationnelle. Trois dimensions du développement
soutenable mises en discussion, ce week-end écoulé, au Champ de Mars par un groupe d’étudiants issus de
différentes facultés de l’université d’État d’Haïti et des universités privées de la place.
Le développement durable,
ce nouveau paradigmePar Therno N. A. Sénélus
DÉVELOPPEMENTETÉQUITÉ
N
ouveau mode de développe-
ment officiellement proposé
parlaconférencedesNations
unies pour l’environnement
(CNUED) et la Banque mondiale, il y
a vingt-cinq ans environ, le concept
de développement durable a servi de
toile de fond au discours des politici-
ens haïtiens notamment les candi-
dats aux prochains scrutins. Il n’est
pas nouveau en Haïti mais il parait
utopique, à en croire les différents
points de vue de certains étudiants.
Dans le cadre d’un « vox Pop »
réalisé avec ces étudiants, autour
de ce débat contradictoire,
l’approche économique était
privilégiée pour conduire les
réflexions axées sur les problèmes
socio-économiques et politiques
du pays.
Avec des argumentaires persuasifs
relatifs aux conditions vie de la
population haïtienne, Julsaint
Alsain, étudiant en Sciences
économiques, se montre très
préoccupé par le langage de ces
hommes politiques qui utilisent le
concept de développement durable
pour satisfaire leurs propres
besoins et laisser sans solution
les problèmes socioéconomiques
du pays. Lors de ces réflexions,
Julsaint Alsain a dit croire que le
développement soutenable ne doit
pas faire l’objet de définition et
de discours. Le pragmatisme sur
le tas s’avère nécessaire. Chaque
jour nous utilisons ce concept
mais rien n’est véritablement fait
pour sortir le pays du marasme
économique qui le paralyse. Nous
vivons l’ère des produits importés.
Il en a profité pour faire remarquer
que la gourde qui perd de sa valeur
risque d’aggraver davantage la
situation économique des secteurs
vulnérables de la population.
Tenant compte de la précarité
de la vie dans nos communes,
le coordonnateur national du
Conseil national de la sécurité
alimentaire, Gary Mathieu, a
indiqué que Thiotte, Grand Gosier,
Anse-à-Pître, Baînet et Côte-de-
Fer, dans le département du Sud-
Est, les communes de la Gonâve
et de Fonds Verettes dans l’Ouest
ainsi que le Bas Nord-Ouest, sont
en situation de sécheresse.
Abondant dans le même sens,
l’étudiant Julsaint Alsain
précise que toutes les sections
communales sont en situation
de sécheresse et qu’il s’agit d’une
crise alimentaire poussée. Pour
lui, depuis toujours, le pays fait
face à une terrible sécheresse.
Illusion monétaire et dumping
social
Pour raffermir ses opinions,
Eslet Latouche, pose le problème
sociétal en parlant de la rareté
de l’eau à travers le pays, la crise
alimentaire, la perte des denrées
agricoles des paysans, le chômage,
les sous-emplois et la sous-
rémunération et la fluctuation.
Elle sait que ces problèmes ne
datent pas d’aujourd’hui : « ce
problème n’est pas récent.
Mais il surgit à cause du manque
de leadership de nos dirigeants.
Si dès le départ on avait forgé
un programme sectoriel efficient
pour renforcer la capacité des
agriculteurs haïtiens, ce problème
n’aurait pas existé ».
La promotion des entreprises
locales via l’agriculture serait
très importante pour les paysans,
déclare-t-il, ajoutant que « les
employeurs œuvrant sur le sol
national ne tiennent pas compte
des modes et niveaux de vie des
employés. Le coût de la vie devrait
interpeller les patrons afin de
repenser le salaire des ouvriers »
. Au cas où la classe patronale
ne penserait pas aux conditions
de vie de ces employés qui vivent
toujours dans des situations
difficiles, le dumping social
reprend vigueur.
« Nous devons nous mettre au
travail pour replacer le pays dans
la sphère économique des autres
pays des Caraïbes » martèle-t-il.
Et d’ajouter : « lorsque le revenu
d’un employé est inférieur à
ses dépenses on est dans une
situation d’illusion monétaire
qui conduirait effectivement au «
dumping ».
En vue de corroborer les réflexions
des deux étudiants, Marline
Bablois, mémorante en gestion
des affaires, fustige le laxisme des
autorités qui, jusqu’à date, ne font
rien pour pallier le problème de la
dégringolade de la gourde.
Elle croit, cependant, qu’il
faut repenser Haïti sur le plan
socioéconomique et politique.
« La disette, le chômage,
l’inaccessibilité aux besoins
sociaux de base sont, entre autres,
mes préoccupations ».
Elle a, par ailleurs, précisé que le
développement durable ne doit pas
servir de discours politique. Les
problèmes sociaux, économiques
et environnementaux doivent être
pris en compte.
À cet effet, il faut lutter pour
un développement économique
efficace et une équité sociale. Si
les besoins présents ne sont pas
satisfaits, qu’en est-il des besoins
futurs ? s’est-elle interrogée.
« Ces hommes politiques qui utilisent le concept de développement durable pour satisfaire leurs propres besoins et laisser
sans solution les problèmes socioéconomiques du pays ». / Photo : horbourg-wihr.fr
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39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
ÉCONOMIE
INNOVATIONETCROISSANCE
Les incubateurs en perspective
Source : La Documentation française
La création d’entreprises prépare le renouvellement et l’adaptation de l’économie, c’est à dire le futur. Les
responsables économiques ont progressivement pris conscience de la nécessité de l’encourager, et plus encore,
de ne pas la décourager.
L
es économistes conviennent
maintenant de l’existence de
liens directs entre le niveau
de création d’entreprises
et d’innovation et la croissance
économique.
Une terminologie en
évolution
Les incubateurs sont des struc-
tures d’appui à la création
d’entreprises. Ils réunissent des
ressources spécialisées dédiées à
l’accompagnement et l’assistance
des entreprises avant leur créa-
tion ou dans les premières années
de leur vie. Ils comprennent, en
général, un hébergement immo-
bilier souple, des services admi-
nistratifs, des actions de conseil
et de mise en relation avec les
réseaux d’affaires notamment
financiers. En France, le terme «
incubateur » s’est appliqué aux
structures d’appui avant la créa-
tion d’entreprises, par exemple les
premiers incubateurs des Écoles
des Mines et a été utilisé pour
les incubateurs lancés récem-
ment par le M.E.N.R.T. – Ministère
de l’Éducation Nationale, de la
Recherche et de la Technologie.
Le terme « pépinière » a été utilisé
plus couramment pour les struc-
tures d’appui aux entreprises après
leur création, ce terme étant pré-
féré à celui de nursery, de ruche,
de couveuse, etc. Aux États-Unis,
le terme « incubator » désigne les
pépinières, le concept d’incubateur
étant parfois traduit par « innova-
tion center » ; mais d’une façon
générale, le terme « incubator »
recouvre à la fois les structures
d’appui avant et après la création.
Au moment de la vague Internet,
un grand nombre de structures se
sont créées, notamment d’origine
privée, pour accompagner et faci-
liter le lancement de start-up,
moyennant une contrepartie finan-
cière. Ces structures appelées «
incubator » aux États-Unis se sont
développées rapidement en Europe
en gardant le nom d’incubateur.
Les divers systèmes d’appui à
la création d’entreprises
En prenant davantage en compte
l’importance des petites entre-
prises et des créations d’entreprise
dans le tissu économique local, les
pays industrialisés – à partir des
années quatre-vingt - ont accru
les dispositifs d’appui à la créa-
tion d’entreprises. L’objectif était
d’apporter aux nouveaux entre-
preneurs des conditions d’accès
plus faciles aux ressources qui
leur sont nécessaires. Trois axes
d’intervention des pouvoirs pub-
lics1 se sont développés parallèle-
ment :
- les appuis financiers
- le conseil et la formation
- le soutien logistique.
Les appuis financiers
Il s’agit de subventions, d’avances
remboursables, de cautions et
garanties, d’accès au capital-ris-
que. Une panoplie de mesures a
été mise en place, aux niveaux
national, régional voire local.
Les procédures, les plates-formes
d’initiative locales, les prêts à la
création d’entreprises sont de bons
exemples, même si les procédures
en place ne permettent pas encore
de répondre à tous les besoins.
- Le conseil et la formation : la
sensibilisation et la formation
à la création d’entreprises, les
différents types de conseils spé-
cialisés ou généralistes apportés
aux entrepreneurs se sont mul-
tipliés par les différents réseaux
des Chambres de Commerce, des
Chambres des Métiers, des bou-
tiques de gestion, des plateformes
d’initiatives locales, d’« Entrepren-
dre en France », des Clubs de créa-
teurs d’entreprises, etc.
- Le soutien logistique : Il s’agissait
de mettre à disposition des jeunes
entreprises un hébergement dans
des locaux adaptés et flexibles
pour une période temporaire et des
services administratifs, en temps
partagé. Puis l’offre de conseils
plus ou moins complexes, ainsi
que l’ouverture sur des réseaux
d’affaires sont venues enrichir
le système. Ainsi, les pépinières
ont commencé à se développer au
milieu des années 85 et ont joué
localement une fonction nouvelle
d’intégration des moyens mis à
la disposition d’entreprises en
création. Les pépinières offrant
des services complets utilisaient
donc en fonction des besoins les
outils financiers ou les réseaux de
conseils décrits précédemment en
s’appuyant sur des partenariats
locaux. Les pépinières et incuba-
teurs se sont développés à peu près
au même moment en Angleterre,
en Allemagne et en France, alors
qu’elles avaient démarré un peu
plus tôt aux États-Unis.
Les deux vagues de création
d’incubateurs
Depuis leur création, on peut
distinguer deux vagues de dével-
oppement des incubateurs dans les
quatre pays étudiés.
1. La période de lancement des
incubateurs de développement
économique local : 1980-1997
Dans chaque pays, les incubateurs
sont nés d’initiatives individuelles
locales, pour répondre à un prob-
lème spécifique de régénération
ou d’expansion d’un territoire.
La fonction immobilière a été la
première afin d’offrir des condi-
tions d’hébergement favorables
aux jeunes entreprises. Les fonc-
tions complémentaires de services,
d’accompagnement et de conseil
se sont développées progressive-
ment. Ce modèle d’activation
économique s’est peu à peu diffu-
sé, souvent encouragé par des col-
lectivités locales qui cherchaient
à résoudre un problème d’activité
ou un problème d’image. Au début
de cette période, la plupart des
incubateurs bénéficiaient de sub-
ventions publiques nationales ou
locales, de programmes européens,
de l’appui de grandes entreprises,
de banques et d’organismes locaux
divers. Les modèles privés étaient
peu nombreux (sauf en Angleterre).
Aux États-Unis on ne note en 1996
que peu d’exemples d’incubateurs
privés. Ceux-ci étaient essentiel-
lement à base immobilière, leur
objectif étant de rentabiliser une
propriété immobilière au moyen
de loyers accompagnés de services
communs.
2. La deuxième période : crois-
sance et diversification des
modèles d’incubateurs : 1998
Cette phase, qui est en cours, a
été marquée par plusieurs phé-
nomènes : l’explosion des incu-
bateurs privés à but commercial
et notamment des « incubateurs
internet » lancés par des entre-
preneurs indépendants, des finan-
ciers, voire des grandes entrepris-
es. Ces catégories d’incubateurs
privés, associés à internet, puis
à d’autres technologies ont béné-
ficié d’une très forte médiatisa-
tion et d’un engouement excessif
pendant les années de croissance
suivis d’une méfiance toute aussi
marquée depuis le dégonflement
de la bulle. Cet engouement lié à
la mode a poussé de nombreuses
structures d’appui, de conseil ou
de financement de jeunes pousses
à s’appeler « incubateur », termi-
nologie qui a été souvent rejetée,
quelques mois plus tard, par ces
protagonistes qui ne voulaient plus
de cette étiquette. Parallèlement,
les incubateurs issus du monde
académique et des centres de
recherche ont connu une nouvelle
phase de développement grâce aux
nouvelles politiques d’innovation
au niveau européen et au niveau
des États, ainsi qu’à l’attrait vif
des étudiants pour les start-up. Ce
renouveau d’intérêt a permis, en
parallèle, de consolider l’intérêt
des incubateurs de développement
économique local activé par les
pouvoirs publics locaux. Enfin, les
grandes entreprises se sont davan-
tage intéressées à l’incubation
(Corporate incubator).
Cette deuxième vague s’est donc
caractérisée par l’intervention d’un
grand nombre d’acteurs divers et
nouveaux qui se sont intéressés
à l’incubation d’entreprises, pour
renforcer ou diversifier leurs activ-
ités, voire par opportunisme.
Les mécanismes qui ont encouragé
la création d’incubateurs dans la
première vague sont essentielle-
ment les suivants :
- créer des économies d’échelle
dans la mise à disposition de
locaux et de services adaptés aux
entreprises en création. Ces locaux
adaptés et flexibles avec des loyers
souvent attractifs correspondent à
un besoin réel des nouvelles entre-
prises qui ne trouvaient souvent
sur le marché que des locaux trop
grands, trop chers, avec des cau-
tions, etc. C’est aussi une occa-
sion idéale de briser la solitude du
nouvel entrepreneur en partageant
des locaux avec ses pairs.
- créer des lieux d’apprentissage et
de mise en relation d’affaires pour
des entrepreneurs qui n’ont pas le
capital social et l’expérience de la
gestion des entreprises. Souvent
les nouveaux entrepreneurs doi-
vent tout apprendre à la fois sur le
tas, s’ils n’ont pas eu la chance de
côtoyer de près la fonction entre-
preneuriale. L’incubateur sera un
lieu idéal pour apprendre plus vite
avec moins de risque d’échecs.
- créer des lieux symboliques de
l’esprit d’entreprise dans une com-
munauté donnée. Dans la deux-
ième vague, se sont ajoutées aux
causes précédentes, des incita-
tions supplémentaires :
- Des acteurs économiques divers
cherchent à tirer profit des innova-
tions entrepreneuriales pour béné-
ficier des plus-values financières,
accéder à de nouvelles technolo-
gies ou à de nouveaux marchés
- Ils pensent également qu’on peut
à la fois « accélérer » et « indus-
trialiser » la fabrication de start-
up, en mettant à leur disposition
le maximum de ressources, et en
élaborant des processus systéma-
tiques pour rationaliser les étapes
complexes de passage de l’idée au
projet, puis du projet à l’entreprise
viable. Cette deuxième phase de
bouillonnement effervescent a eu
plusieurs conséquences impor-
tantes :
- Un grand nombre d’acteurs nou-
veaux s’est lancé sur le « marché »
de l’incubation. Malgré le retour-
nement de conjoncture, une
partie des « nouveaux entrants »
persévère, alors que d’autres ont
arrêté.
- Le concept d’incubateur s’est dif-
fusé plus largement et a été mieux
connu du public.
- Ceci a entraîné, concomitamment,
un intérêt accru des pouvoirs
publics pour les incubateurs clas-
siques et pour les incubateurs liés
aux nouvelles technologies.
*Extrait du rapport de recherche
: « Les incubateurs : émergence
d’une nouvelle industrie – Com-
paraison des acteurs et de leurs
stratégies », Avril 2002.
Pour en savoir davantage : http://
www.ladocumentationfrancaise.
fr/var/storage/rapports-pub-
lics/024000373.pdf
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
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39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
SOCIÉTÉ
LN : Au niveau des Caraïbes, quelles
sont les institutions qui seraient
prêtes à vous donner un support
car elles sont aussi concernées par
l’héritage taïno que nous avons
tous dans la région. Cuba par
exemple? Je ne veux pas parler
de la République dominicaine
aujourd’hui... pourtant très avancée
dans la conservation de la tradition
Taïno.
GPJ : Nous n’avons pas encore à
proprement parler des institutions
à Cuba ou dans d’autres régions
caribéennes prêtes à donner leur
support. Cependant, le projet est
déjà bien accueilli pour l’originalité
de son domaine d’intervention et
nous espérons avoir à nos côtés
plusieurs institutions locales et
internationales à l’avenir. En effet,
il y a peu d’intérêt manifesté à
l’égard de l’héritage des Tainos en
Haïti, ancêtres de notre culture,
contrairement en République
voisine et dans d’autres régions
en Amérique. Cependant, il y a
de bons signaux partis de certains
secteurs en Haïti. On commence à
prendre conscience de la nécessité
de connaître les secrets de la
culture ancestrale. Récemment en
Haïti, au cours de la période du 6
au 10 mai 2015, ont eu lieu, sous
les auspices de l’édition Mémoire
d’Encrier de Rodney Saint-Eloi,
les nuits amérindiennes, cette
fois-ci sous la présidence de la
poétesse Joséphine Bacon. Cet
événement culturel était intervenu
dans le cadre de ce besoin de
connaissance et de ralliement des
peuples d’Amérique autour de la
culture amérindienne. Dans un
colloque tenu dans le cadre de ces
mêmes activités à la Bibliothèque
nationale, Madame Marie Alice
Théard a eu à faire une apologie
de notre origine amérindienne.
Le vaudou, a-t-elle fait savoir, est
un répertoire de culture taïno. Il
faut noter que le terme indien a
été improprement utilisé par les
européens notamment les espagnols
pour identifier et reconnaître les
premiers autochtones en Amérique;
étant donné que ceux-là pensaient
se retrouver en Inde. Bref, il y a une
sorte d’éveil en faveur du retour
vers la source car, l’histoire officielle
a intoxiqué notre intelligence
de certains secrets de la vie des
Taïnos. Margareth Papillon dans « la
Légende de Quisqueya » permet de
se faire une idée des méfaits de nos
mépris de nos valeurs culturelles
et de notre ignorance des secrets
de cette Ile. Et pour cause. Nous
nous comportons comme des fils
indignes. Ce qui fait qu’Haïti,
par malheur, est le seul pays dans
les Caraïbes à ne pas honorer la
mémoire des Taïnos, car on nous a
fait croire, dans l’histoire apprise,
que tous les indiens étaient morts
avant l’arrivée des contingents
africains. Mais nous oublions que
beaucoup d’entre eux avaient pris le
maquis et ont vécu dans les grottes.
Et, ce sont eux qui ont permis aux
esclaves rebelles de parcourir tout
le pays à travers le réseau de grottes
existant sur le territoire qu’eux
seuls maîtrisaient. Personne n’a
jamais pris le temps d’analyser
cette phrase de Dessalines, le père
de la Patrie : «Nous avons vengé les
indiens et l’Amérique» et personne
ne s’est demandé pourquoi, en
novembre 1802, Dessalines choisit
de faire porter à l’armée le nom
d’Incas, fils du Soleil avant de
dénommer le pays Ayiti.
DANIEL : LE SOLITAIRE
LN : Pensez-vous que le docteur
Daniel Mathurin, incontestable
scientifique, inspiré et visionnaire,
n’ait pas aménagé ses arrières par
certaines institutions culturelles
et scientifiques à caractère
nationaliste et que cela puisse
handicaper un peu le projet de la
Fondation en son nom ?
GPJ : Daniel a toujours travaillé en
solitaire. Car ces questionnements
venaient du plus profond de son
être et il se mettait à la tâche
24 heures par jour. Il n’avait pas
pris contact avec les institutions
culturelles œuvrant en Haïti car
il n’avait pas la même méthode
d’approche qu’elles. La sienne était
multidisciplinaire tandis que celle
des autres parlaient d’amalgame.
Lorsque Daniel a compris qu’il
n’y avait pas d’audience, en Haïti,
pour de telles recherches, il s’est
tourné vers la République voisine
qui l’a bien accueilli car dans ce
pays la question taïno a déjà été
approfondie. Les scientifiques
dominicains travaillant dans
ce domaine, connaissent bien
l’importance de ce bout de territoire.
Et donc, Daniel a su établir des
relations de recherche avec
Dominicains et en décembre 2012,
nous avons été reçus à l’académie
dominicaine. Malheureusement,
la tragédie causée par l’accident
de Daniel a coupé court à cette
relation naissante. Cependant, la
Fondation est en train de renouer
les liens déjà tissés sur l’ensemble
du territoire pour une synergie
dans la recherche sur les premiers
habitants de ce pays, sur les roches
étampées et les diverses grottes que
recèle cette île merveilleuse.
LN :- Depuis l’accident sur
l’autoroute de Santo Domingo de
votre cher époux, le public a soif
d’entendre vos recherches sur
les symboles des « vèvès », leurs
configurations mathématiques et
cosmiques. Où en êtes-vous avec
votre équipe de recherches?
GPJ : Le problème en Haïti, c’est
que les gens vous crachent dessus
quand vous leur jetez des perles
et vous réclament quand on fait
silence.C’estcetteambivalencedans
notre comportement qui explique
d’ailleurs le piétinement enregistré
dans la politique haïtienne et qui
freine le développement du pays.
Je me rappelle quand on faisait les
émissions sur les résultats de nos
recherches on nous prenait pour
des illuminés. Je peux te dire que
nous sommes très loin dans ces
recherches et allons bientôt passer
dans la phase d’expérimentation
de l’effet Kirlian engendré par
nos « vèvès ». L’effet Kirlian est la
photographie du champ énergétique
à haute fréquence émanant d’un
corps dû au fait du mouvement
des molécules et atomes. Ce sera
la preuve que ce sont vraiment des
condensateurs de forces astrales. Et
nous nous penchons aussi sur l’effet
des incantations qui accompagnent
le tracé de ces vèvès. Donc, c’est
tout un monde de connaissances
qui est malheureusement occulté
par le travestissement de la pensée
en Haïti.
VÈVÈ , ADN, HÔTELS LUXUEUX
LN : D’où viennent les « vèvès »
? D’Afrique? Des Caraïbes ? Feu
Docteur Mathurin parlait de la
“route de l’Asson” et liait cela à la
configuration de l’ADN. Que pouvez-
vous nous dire de plus comme
mathématicienne et cosmologue?
GPM : Selon les résultats de nos
recherches, les « vèvès » sont une
combinaison des plus anciennes
écritures retrouvées en Afrique,
en Europe, en Amérique, en Asie
etc. Nous avons compris que ces
derniers ont un caractère universel.
Mais c’est sur le territoire haïtien
seulement que l’on retrouve
ses combinaisons géométriques
nommées : (Aïzan, Legba, la route
de l’Asson, le socle du poteau) etc.
Aïzan est le dieu de la médecine
et des hommes. Milo Rigaud l’a
traduit ainsi : «la double couleuvre
de l’oxygène se nomme Aï-zan
Tau-Can, mystère du vodou qui
indique que, pour accéder aux
étoiles, l’animalcule spiriforme de
la semence créatrice (voir ici l’ADN)
doit se purifier par le feu, sous la
forme imaginée du retournement
du serpent dans l’atome. C’est cette
compréhension de l’Aï-Zan par
Milo Rigaud qui nous a conduits à
étudier l’Aï-Zan sous cet angle et il
avait raison. On peut donc dire que
les « vèvès » sont une combinaison
des connaissances scripturales
ancestrales entre les deux cultures
qui se sont imbriquées sur cette île
magique qu’est notre Ayiti.
LN : La prochaine conférence de la
Fondation, c’est pour quand? On
a reproché que la Fondation était
trop élitiste du fait qu’elle donne
ses conférences dans des hôtels
huppés de la capitale. Le peuple et
la classe moyenne vous attendent
car vous semblez aller plus loin que
Jacques Roumain ou MiIo Rigaud.
GPJ : La première conférence de la
Fondation sera prononcée en février
2016. Je dois rappeler à tous, que
Daniel et moi avions marché un peu
partout à travers le pays pour tenir
des conférences aux groupes qui se
faisaient le plaisir de nous inviter.
Nous avons fait beaucoup de
conférences dans le Nord-Ouest,
particulièrement à l’Alliance
française de Port de Paix, au Cap
Haïtien. Il nous fallait expliquer
à la population de ces zones les
richesses que couve leur sous-
sol et ce que cela représente
pour la «mafia internationale» à
la recherche de ces richesses sur
l’ensemble de la planète. Nous
avons aussi répondu aux invitations
de plusieurs groupes de jeunes
comme des clubs littéraires de la
capitale et prononcé gracieusement
d’innombrables conférences au
sein de l’université d’État d’Haïti
dans le cadre de la cellule Poto
Mitan à la faculté d’Ethnologie. La
conférence au Montcel a été une
invitation de Madame Michèle
Villedrouin qui avait su apprécier
à leur juste valeur nos recherches
et voulait entreprendre , avec nous
des discussions et débats sur ces
sujets au sein de la communauté
port-au-princienne.
Je ne comprends pas pourquoi
tu dis que la Fondation est
trop élitiste. Dans toutes nos
conférences nous avons toujours
reçu toutes les couches de la société,
certainement ceux qui avaient
les mêmes questionnements que
nous. Car la grande majorité des
«intellectuels haïtiens», ne sont
pas vraiment ouverts à ces grands
questionnements et boudent
toute personne ayant un discours
différent. Comme le disait si bien
Daniel, pour nous comprendre il
faut faire une remise en question
de la connaissance acquise.Pour
le choix des hôtels, je dois te
dire que particulièrement l’hôtel
Montana nous offrait toujours
gratuitement la salle. Donc, ce
n’était pas un choix élitiste de notre
part, c’était plutôt une obligation
presque familiale. Ici, je crois que
l’expression élitiste prise dans un
contexte révolutionnaire est tout
à fait correct dans la mesure où
l’œuvre de la Fondation ne vise qu’à
produire un effet cathartique sur le
mental haïtien afin de créer la voie
à une autre Haïti, l’Ayiti des taïnos.
Pour ce faire, cela ne peut être
que l’affaire d’une élite agissante
travaillant pour le compte et/ou le
profit de la majorité.
La mémoire tainopar Pierre Clitandre
FOCUS
L’Ingénieur Ginette Pérodin Mathurin, dans cette deuxième et dernière partie de l’entrevue, parle de l’alliance
historique entre les nègres d’Afrique et les indiens Taïnos. Elle souligne les travaux du feu Dr. Mathurin dans
le décodage des « vèvès » qui seraient des signes de la civilisation Inca du Pérou. Elle nous fait le portrait d’un
Daniel solitaire. Elle donne des précisions sur l’ADN et se défend contre la critique des conférences dans des
hôtels luxueux.
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 15
SOCIÉTÉ
N
ous sommes à la Cité des
34 quartiers. Les jeunes de
cette zone urbaine fragilisée
par toutes les formes de
violences sociales, politiques, restent
convaincus que leur vie quotidienne
sombre au désespoir. Aussi, rien qu’à
penser à leur avenir, des sentiments
d’incertitude les animent et les
rongent profondément.
Ces jeunes quittent tôt leurs par-
ents pour évoluer dans des bandes
ou créer prématurément leurs
propres familles. Souvent, ce sont
des pères et des mères de plusieurs
enfants. Et leur progéniture risque
de connaître le même sort qu’eux.
N’ayant pas d’accès à l’emploi, au
logement, à la santé, à l’éducation,
à la formation professionnelle, aux
loisirs, ils avouent être victimes
de toutes les formes d’exclusion
sociale.
Quand ils ne sont pas simplement
scolarisés, ils se trouvent dans
l’obligation d’abandonner l’école.
Ils n’ont pas, non plus, la chance
d’avoir une formation profession-
nelle qui aurait pu leur garantir un
emploi et un salaire.
Victimes des violences symbol-
iques, souvent leurs réactions sont
aussi l’expression des violences qui
sont sanctionnées par les agents de
la répression policière. Certains
ont déjà fait la prison qui semble
être un passage obligatoire pour
ces garçons et ces filles qui se sont
accoutumés à vivre comme des
fugitifs.
Leur vie quotidienne, disent-ils,
c’est une tragédie. Dans une pièce
de maison, ils sont plus d’une
dizaine. Au réveil, ils ont beaucoup
de peine à manger car ils ne dis-
posent pas de la somme modique
de dix gourdes pour se procurer un
plat chaud au restaurant populaire
Ede pèp implanté à Cité-soleil par
l’actuel gouvernement. Entre eux,
la solidarité reste la meilleure stra-
tégie de survie.
L’alcool, le jeu de pocker et de dom-
inos, la drogue, et parfois le sport
qu’ils aiment, malgré l’absence de
centre sportif et de terrain de foot-
ball, sont leurs seuls passe-temps
pour résister aux conditions de vie
infrahumaine qu’ils ont toujours
connues depuis leur enfance. Selon
l’un d’eux qui opinait sur l’accès
aux loisirs, la somme faramineuse
qui a été dépensée pour le concert
de Lil Wayne et de Chris Brown,
aurait pu contribuer à la mise en
place d’infrastructures sportives
pour les jeunes qui se livrent à
la délinquance, à la violence, à la
prostitution dans la commune de
Cité-soleil.
La population de Cité-soleil, con-
fient quelques jeunes, ne reçoit
aucune aide des autorités étatiques,
des organismes internationaux qui
auraient pu contribuer à amélio-
rer leurs conditions de vie. Les
organisations non gouvernemen-
tales ne sont pas présentes dans la
Cité, en raison de la violence qui
s’y est établie. Toutefois, ils disent
être reconnaissants des travaux
que Hands together et la Fonda-
tion Gabrie ont réalisés dans cette
commune où les populations sont
très vulnérables.
Ces jeunes sont marginalisés et ne
se représentent que par rapport
à la violence, aux malversations
politiques dont ils sont parfois les
instruments. Ils ne pensent à eux-
mêmes que par rapport à leur situ-
ation de vulnérabilité économique
dont profitent souvent les leaders
politiques.
Questionnés sur les prochaines
élections, ils expriment leurs doutes
car ils ne croient pas que celles-ci
pourront apporter des solutions à
leurs problèmes. Leur citoyenneté,
pensent-ils, ne se définit plus par la
jouissance des droits sociaux, poli-
tiques et économiques. La sociali-
sation a fait d’eux des déviants qui
semblent ne jamais pouvoir inté-
grer la société qui les a toujours
rejetés.
Leur espoir est qu’un jour les déci-
deurs viennent leur offrir d’autres
alternatives qui leur permettraient
d’avoir un statut social et les
détourneraient de tout ce qui est
de nature à hypothéquer leur vie.
La construction de logements, de
centres de formation profession-
nelle, de centres de santé, de cen-
tres sportifs, devrait être la priorité
de ceux qui briguent la présidence
pour obtenir les votes de la popula-
tion de Cité-soleil et particulière-
ment ceux de la population juvé-
nile. Car, sans un changement de
vision des acteurs politiques et
un engagement réel à tenir leurs
promesses, il ne faudra point
espérer une renaissance ou plutôt
une naissance de Cité-soleil dans
laquelle tous les jeunes pourront
aspirer à un avenir prometteur.
Il faut réellement que la jeunesse
soit l’avenir de la société haïtienne.
Il importe aux autorités d’en pren-
dre conscience pour la préparer en
conséquence.
Voler au secours des jeunes de Cité-soleilpar CHERISCLER Evens
JEUNESSE
Si la jeunesse représente l’avenir de la société haïtienne, à Cité-Soleil, il y a des jeunes qui ne peuvent plus rêver.
Des enfants, l’avenir de Cité Soleil. / Photo : Minustah
16 | N0
39 MERCREDI 15 JUILLET 2015
SOCIÉTÉ
I
nsalubrité, voilà un mot qui offre
une description fidèle de nom-
breuses zones de la capitale. Le
problème est criant. Les fatras
servent même de repères dans cette
République bidonvillisée.
Certaines fois, les tas d’immondices
sont tellement immenses qu’ils
obstruent la circulation. Des
cartons, des sachets, des bouteilles
en plastique…et surtout les fameux
« emboités ». Ces assiettes en carton
provenant de la République voisine
dont nos dirigeants ont interdit
l’utilisation sur le territoire national.
Tout cela crée un environnement
urbain à risque.
Les gens seraient obligés de jeter
leurs déchets dans les rues par
manque de poubelles. « Sim pa jete
fatra yo nan lari a, kibò m’ap lage
l ? », questionne un commerçant
de la zone du Champ de Mars. En
effet, l’on peut parcourir plusieurs
centaines de mètres sans trouver
une poubelle dans la zone. À
proximité du stade Sylvio Cator, à la
rue de l’Enterrement, l’on rencontre
chaque jour une pile de déchets.
C’est finalement une référence.
L’insalubrité à travers la capitale est
devenue, de jour en jour, beaucoup
plus inquiétante. Désormais, quand
on marche à Port-au-Prince, l’on
doit éviter à tout prix de fouler un
sachet noir ou même une assiette
en carton. Des gens s’en servent
pour jeter leurs matières fécales
dans les rues.
À portail Léogane, l’on peut remar-
quer, dès la première seconde
passée au lieu où stationnent les
bus assurant le trajet Port-au-
Prince/Petit-Goâve, que l’endroit se
transforme en latrine. En effet, l’on
ne peut pas y passer sans renifler
l’odeur puante d’excréments jetés
dans le canal « bwatchenn ». La sit-
uation n’est guère différente à la rue
du Centre ou encore à la Grand-Rue.
Là, se trouvent des travailleurs, des
détaillants fatigués sous le poids
du soleil, à toutes les heures de la
journée, assiettes en main, cuil-
lère dans la bouche à s’alimenter
dans l’odeur empestée de ces rues.
Les marchandes de nourriture pla-
cent leurs tentes dans des espaces
utilisés par des gens pour effectuer
leurs besoins physiologiques.
Certains pensent que ce sont les
marchands, eux-mêmes, qui uti-
lisent ces lieux à cette fin. « Se yo
menm ki nan espas la ankò, se yo
ki twalèt ladan », justifient-ils. Mais
les marchands défendent : « Se
moun ki rete nan zòn lan yo ki plis
sal li, yo pa fè twalèt lakay yo »,
répliquent-ils. Mais ils admettent
que certains d’entre eux n’ont pas
le choix. « Kèk fwa tou w paka kont
moun lan, li paka kite bezwen an
touye l », racontent-ils.
C’est un problème qui met en jeu la
santé des gens qui, pour une raison
ou une autre, doivent fréquenter
ces lieux. L’État devrait intervenir
dans une telle situation s’il veut
protéger la santé de ses citoyens. « Il
est certain, selon des esprits avisés,
que personne ne peut se permettre
d’évoluer dans des environnements
pareils sans s’exposer de graves
problèmes de santé ».
Quand l'insalubrité va trop loinpar Ritzamarum ZETRENNE
PORT-AU-PRINCE
C’est évident que l’insalubrité fait rage à travers la capitale. C’est l’un des problèmes les plus criants de Port-au-
Prince.
Les fatras servent de repères dans certains endroits de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. / Photo : J.J. Augustin
Les nouvelles infections ont chuté
de plus d'un tiers depuis 2000
Sources : 20minutes.fr
SIDA
L
es nouvelles infections par le
VIH/Sida ont chuté de plus
d’un tiers depuis 2000, a
annoncé mardi l’ONU, se félici-
tant que le monde ait atteint l’objectif
du Millénaire pour le développe-
ment qui visait à inverser le cours de
l’épidémie.
Mais pour parvenir à mettre fin
à l’épidémie d’ici à 2030, l’ONU
demande que près de 32 milliards
de dollars (29 milliards d’euros)
soient désormais investis chaque
année d’ici à 2020 dans la lutte
contre le sida, contre 21,7 milliards
actuellement.
En attendant, «le monde a atteint
l’objectif 6 du Millénaire pour le
développement. L’épidémie a été
enrayée et inversée», a affirmé
le secrétaire général des Nations
unies Ban Ki-moon dans le dernier
rapport de l’Onusida.
En 2014, 36,9 millions de
personnes vivaient avec le sida
En 2000, les Nations unies
avaient fixé huit grands Objectifs
du Millénaire pour 2015, dont
combattre le VIH/sida. A cet égard,
la lutte acharnée menée par la
communauté internationale contre
le sida fait figure de succès. Le
rapport note que les efforts déployés
ont aussi permis d’atteindre la
cible fixée en 2011 consistant à
mettre 15 millions de personnes
sous traitements antirétroviraux
(TARV) en 2015, contre seulement
1 million en 2001. En 2014, 36,9
millions de personnes vivaient avec
le sida. La même année, 1,2 million
de personnes sont décédées de
causes liées au sida (une chute de
41 % depuis le pic de 2004), selon
le rapport. La tuberculose reste la
principale cause de décès parmi les
personnes vivant avec le VIH.
Une chute spectaculaire chez les
enfants Dans le monde, 2 millions
de personnes ont été nouvellement
infectées en 2014, contre 3,1
millions en 2000, une baisse de
35,5 %. Chez les enfants, la chute
est plus spectaculaire encore:
-58 %. L’Afrique subsaharienne
reste la région la plus touchée,
représentant 70% des cas, avec
25,8 millions de personnes vivant
avec le VIH/sida l’an dernier. Mais
la région Asie/Pacifique, bien que
moins affectée avec seulement 5
millions de personnes vivant avec
le virus l’an dernier, préoccupe
toutefois les experts en raison d’une
recrudescence des cas.
Les nouvelles infections y ont
progressé de 3 % entre 2010
et 2014. La Chine, l’Inde et
l’Indonésie représentent 78 % des
nouvelles infections dans la région
l’an dernier.
Il faudra encore débourser 32 milliards de dollars (29 milliards d’euros) par an d’ici à 2020 pour espérer en finir
avec le sida d’ici à 2030...
MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0
39 | 17
CULTURE
Miss Anayizz :
l'événement incontournable de l'étéPar Elisée Décembre
Pour la neuvième année consécutive, Beaudor Communication va encore pimenter l’été avec le plus ancien
concours de beauté actif, Miss Anayizz. Ce concours, qui fusionne beauté et intelligence, permet à toutes jeunes
filles qui désirent y participer de développer les meilleures de leurs capacités, affirme son initiateur, Gaspard
Dorélien.
D
epuis l’arrêt du concours
Miss Vidéomax sur la
Chaîne 5, qui par ailleurs ne
fonctionne plus, Miss Anay-
izz est devenu le leader des concours
de beauté. D’année en année, le con-
cepteur de ce concours et son staff
de réalisation y apportent toujours
quelque chose d’inédit. Quant aux
postulantes, elles ne ratent jamais
l’occasion de s’éclater, malgré parfois
le stress qui a tendance à prendre le
dessus.
« Les inscriptions à Miss Anayizz
sont lancées. Les critères sont
les mêmes : être âgée entre 17 et
25 ans, être célibataire, avoir un
casier judiciaire vierge, être de
taille moyenne et avoir un poids
ne dépassant pas 130 livres »,
précise Gaspard Dorélien.
En direct sur la Télévision
nationale d’Haïti (TNH) et sur la
Radio Télévison Caraïbes (RTVC),
les émissions de Miss Anayizz
sont suivies sur tout le territoire
national et aussi dans la diaspora.
Chacune de Ces émissions sont
postées sur « youtube » afin
que les fidèles fans du concours
puissent revoir une séance autant
de fois qu’ils le désirent.
Miss Anayizz, plus qu’un
concours de beauté
Certains concours internationaux
portent l’accent surtout sur
de l’apparence physique. Miss
Anayizz, en revanche, fusionne
beauté et intelligence, affirme
Gaspard Dorélien. »Le nouveau
format du concours, précise
encore M. Dorélien, offre la
possibilité à ces jeunes filles d’être
plus compétitives, car il laisse
à chacune d’elles l’occasion de
donner leur opinion, de débattre
d’un sujet, de présenter une ville,
et tout cela, dans une ambiance
de plaisir. Ce nouveau format
augmente la chance de chacune
de remporter la couronne. »
Le concours Miss Anayiz, qui
s’étend sur une période de six à
huit semaines, donne l’opportunité
aux finalistes de visiter les plus
envoûtants sites touristiques, la
Citadelle, le Palais Sans-Souci,
Labadee, la côte des Arcadins et
tant d’autres sites encore.
Miss Anayiz, plus qu’une couronne
« Les dix finalistes retenues
poursuivent toutes le même but
: remporter la couronne. Mais
Miss Anayiz est plus qu’une
couronne. C’est aussi un espace
où nous préparons chacune de
nos postulantes pour le marché
du travail. Bon nombre de nos
jeunes filles ont été embauchées
après avoir participé au concours
», signale le présentateur d’ « Une
personnalité dit tout ». Il ajoute
que grâce à leur partenariat avec
l’Université Quisqueya, la Miss et
ses deux dauphines ont à droit
à une bourse d’étude à l’UNIQ,
moyennant qu’elles réussissent le
concours d’admission.
« À toutes celles qui désirent y
participer les inscriptions sont
reçues du lundi au vendredi de 9
h a. m. à 5 h p. m., et le samedi de
9 h a. m. à 2 h p. m., à Fotomatik,
Univers FM et Radio Télévision
Caraïbes. »
Miss Anayiz 2014, Fabiaula DUMAS. / Photo: Fotomatik
« Jacques Roche, je t'écris cette lettre »
Par Carl-Henry PIERRE
L
es lettres envoyées à ses amis
sont ordinairement des lettres
fermées. Enveloppées. Une
façon de garder l’intimité des
dires. Et celle envoyée à Jacques
Roche pourtant est ouvertement
publique. Ce n’est pas seulement
une lettre. C’est tout un alphabet de
beauté qui est offert aux yeux de tous.
« Jacques Roche, je t’écris cette lettre
» est donc un recueil de poèmes de 74
pages de l’éditeur Rodney Saint-Eloi,
paru en 2013, sous le label des Édi-
tions Mémoire d’encrier.
Comment peut-on écrire une lettre
à un ami mort pour faire son
deuil ? Y a-t-il un pont invisible
entre les êtres, morts ou vivants
? C’est une réponse à ce type de
question que l’auteur accouche
sur les pages du livre. On est
dans l’univers de l’hommage. De
l’amitié. De l’amour. Donc on est
dans le poème, puisque le poème
embrasse toute la forme du réel.
Le poème de Rodney est tissé
dans une perspective de sauver la
mémoire de ce journaliste martyr
qu’est devenu Jacques Roche à
partir de ces actes crapuleux sur
sa personne : celui de son Kidnap-
ping (le 10 juillet 2005 à Port-
au-Prince) et celui de son corps
retrouvé inerte (le 14 juillet 2005).
Par endroits dans ce poème,
Jacques est bel et bien mort pour
l’auteur. Dans d’autres fragments,
il reste vivant tel un arbre. Son
souffle est sur la ville. Sur tout
le paysage. C’est sur ce paradoxe
qu’est assis le poème. C’était un
combattant, ce Jacques, on aura
vite compris cela en le lisant. La
rébellion semble avoir été son fort.
On sent que l’auteur s’attache à
une certaine nécessitée de dire.
À une certaine transparence de
vérité. De justice aussi. L’auteur
dit à Jacques dans le texte de ne
pas mourir.
Dans le texte, l’auteur de Pierres
Anonymes dit que toute terre est
fruit d’espérance et que Jaques
Roche, comme les bourgeons, ne
savait pas ce que c’est que mourir
et que, même là-haut, ses pieds
poudrés toucheront le sol. Rodney
demande à l’auteur du poème «
Survivre » s’il apprendra l’exil à
ses pieds exilés. Entre finesse et
tristesse, le poème coule telle une
cascade.
« Ils t’ont crevé les yeux
Tes yeux sondent les consciences
Ils se sont vus dans tes yeux clairs
Ils n’ont pas aimé ce qu’ils ont vu »
« Parlons bas
Parlons seul
Pour qu’ils ne connaissent jamais
Le secret de nos espoirs. »
« Jacques Roche, je t’écris cette
lettre » semble être un hymne à
la lumière. Un texte à lire, surtout
en ce mois de juillet qui ramène
la naissance (21 juillet 1961) et la
décennie de la mort de ce journali-
ste, poète et diseur que Jacques
fut. Il importe en urgence que le
public ait contact avec les textes
qu’il avait écrits et ceux qu’il avait
dits dans son ardeur de vivant. Il
importe d’autant plus qu’il figure
parmi les auteurs sur « Ile en Ile
», ce site de valorisation des res-
sources informatives et culturelles
du monde insulaire francophone.
Le texte de Rodney Saint-Eloi nous
fait voir la plante que Jacques a
nourrie de son sang. Et qui dira au
poète comment nommer la mort
quand le tombeau est celui d’un
ami ?
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  • 1. » P. 10 » P. 15 »   P. 4 ÉCONOMIE SOCIÉTÉ » suite page 5 » lire page 4 Voler au secours des jeunes de Cité-soleil par CHERISCLER Evens Quatre millions de dollars américains à la Willbes pour créer 1000 emplois en Haïti Par Henri Alphonse La société civile doute de l'arbitrage de l'OEAPar Stephen Ralph Henri HAÏTI / JUSTICE MERCREDI 15 JUILLET 2015 NUMÉRO 39 WWW.LENATIONAL.HT QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI ACTUALITÉ Un nouveau palais pour la Cour de cassation HAÏTI / RÉPUBLIQUE DOMINICAINE / MIGRATION Des agents de l’USGPN hissent le drapeau haïtien sur le mât à l’entrée du palais de la Cour de cassation. / Photo : J.J. Augustin L es membres de la Mission ont discuté avec le président de la République Michel Martelly, le Premier ministre Évans Paul et sept autres ministres du gouverne- ment, dont Lener Renauld, ministre des Affaires étrangères ad intérim, dans l’après-midi du 13 juillet au Palais présidentiel. En dehors d’un cahier de charges déjà déposé par les autorités haïtiennes à l’OEA, des informations sur les dernières acti- vités de déportation et de rapatrie- ment, de la République dominicaine vers Haïti, ont été remis aux envoyés de l’Organisation, en la circonstance. Une mission de l’OEA (Organisation des États américains) a séjourné du 10 au 14 juillet sur l’île. Objectifs : recueillir les informations et produire un rapport dans le cadre du conflit migratoire opposant Haïti et la République dominicaine. Un document doit être remis au secrétaire général de l’Organisation, Luis Almagro. Les missionnaires de l’organisme ont, entre autres, rencontré des membres de la société civile haïtienne. Ces derniers sont sceptiques quant aux résultats de cette mission. L'Union européenne s'engage dans l'observation électorale Par Noclès Débréus
  • 2. 2 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 TRIBUNE N ous sommes nombreux à être sceptiques sur la ques- tion de la nouvelle Haïti. Une Haïti de stabilité et de prospérité. Une Haïti souveraine et respectable, institutionnalisée et structurée. Où chacun tire son épingle du jeu. Où des opportunités s’offrent à tous et à chacun. Nous en faisons mille et un discours. Nous y écrivons des textes savants traitant des plus grandes théories de développement durable. Nos projections donnent sur le court, le moyen et le long terme. Mais nous sommes très peu à croire dans nos propres discours, très peu à croire que cette Haïti se relèvera. C’est ici le premier mal haïtien. L’Hypocrisie ! Nous sommes hypocrites ! Nos propos sont insincères. Nous ne sommes ni pieux, ni vertueux. Nos mensonges nous gangrènent. C’est le propre de la politique haïtienne depuis toujours qui trouve sa logique d’existence dans le mensonge, la calomnie, le désordre et l’enrichissement illicite. Et cette pratique donne pour conséquence cette liste innombrable de candidats aux différents postes électifs. Ils viennent de nulle part. Qui sont-ils ? Des citoyens haïtiens. Certainement. Mais qu’ont-ils accompli ? Pourquoi pensent-ils pouvoir gérer l’État ? En réalité, ont-ils l’intention de gérer ou même de contribuer aux transformations sociopolitiques du pays. Non. Loin de là. La grande majorité ne cherche qu’un djob, un moyen de s’enrichir. Car la politique en Haïti n’est jamais pensée autrement, Haïti elle-même est, et a toujours été une caverne d’Ali baba. Il suffit de connaître la formule magique, secret de polichinelle, « Sésame ouvre-toi » ! Mais encore, après tout cela, c’est à croire que la politique commande tout d’une Nation. Cependant, si la Nation est une âme, un vouloir vivre ensemble comme le veut Danton, énonçons l’hypothèse que la nation haïtienne n’a jamais existé a aucun moment de son histoire. Mon argumentaire ne peut être que bref ici pour m’expliquer : Les rares gouvernants à avoir voulu instituer le vouloir vivre ensemble, n’ont pas du tout été suivis et les autres ont toujours été combattus pour avoir été non seulement nuls mais pire que cela, des mercenaires. Et en cela, nous voyons le deuxième mal haïtien. Nous sommes tous des mercenaires par cette attitude de je m’en foutisme ou de je m’en fichisme dont nous faisons toujours montre. Nous sommes des fuyards. Nous sommes caractérisés par un individualisme outré. Nos réflexions ne portent que sur notre propre petite personne. Pour nous, il n’est pas de collectif qui tienne. C’est l’exemple de la diaspora haïtienne, des groupes de musique, des associations et même de la Sélection de foot. Qu’est ce qui expliquerait qu’un joueur sélectionné pour représenter sa terre natale, son pays dans une compétition internationale, abandonne en cours de route ? C’est ce qui se passe pour la Sélection haïtienne dans la Gold Cup de 2015 avec les joueurs Jeff Louis et Jean Jacques Pierre. Ils n’ont pas d’excuse ! Mais ce que je viens d’écrire ne va pas changer la question. Il faut surtout le voir dans la perspective d’une histoire sordide. Mais en réalité, le problème vient de loin. Nous avons été esclaves. Nous sommes imprégnés par un sentiment de mégalomanie qui nous étouffe. Nous voulons paraître, nous voulons être aux premières loges, là je ne parle pas du pays, mais de l’être haïtien qui croit pouvoir être sans Haïti. C’est en cela qu’il faut comprendre mes préoccupations improbables. Et celles des mes amis, et aussi celles de tous ceux-là qui ont la prétention de pouvoir mieux guider Haïti vers de nouveaux horizons. Ce n’est peut être pas une question de volonté. Il faudrait y voir une affaire personnelle. Surtout que vous ne serez pas d’avis que je mette dans le même panier tout le monde sans exception ; c’est un choix et je crois que nous sommes tous en cause d’une manière ou d’une autre. Le mal haïtien est complexe. Un simple texte ne peut nullement le traduire. Je voudrais le dire dans toute son acuité. Mais je n’ai pas de mots pour l’exprimer. Pourtant je le vis tous les jours, j’en fais partie. La nouvelle Haïti naitra-t- elle ? J’ai tellement envie d’y croire ! Mais sceptique, je le suis autant que vous. J’ai commencé à écrire ce texte pour dire les maux d’Haïti et j’ai compris que je n’en finirais pas si je devais les énumérer. Voyez-là un autre mal, l’inconstance ! Haïti et ses maux !Par Jackson Joseph
  • 3. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 3 ACTUALITÉ Jacques Roche « Tu peux m’enfermer comme un fou, me rendre fou, m’humilier, m’écraser, m’assoiffer, m’affamer. Me faire signer la reddition de mes combats… Mais tunepeuxtuermesrêves.» JacquesRochedanssonpoème«survivre» écrivaitcesversprémonitoires.Il ne savait pas qu’il allait être la proie des loups, de ces créatures hideuses qui hantentencorenosruesetquisepromènententouteimpunitéparcequenotre systèmepolitiqueetjuridiques’estadaptéàlareproductionetàlaprotection decesanormaux. Lepoèteestmortparcequesonamourdelavie,sonrêved’unautremonde, d’uneautresociétéontfomentéplusquedelahaine.Savisionasuscitécequ’il yadepire:lapeur.Noussommesplongésdanslechaosetceuxquiviventdece chaosontpeurdelaparolequiréveillelesmorts-vivants.Ilyaceuxquirêvent aussi,ilssontlégions,deveniraux commandesdecechaos.Ilssonttellement petits,tellementpiètresqu’ilsnepeuventrêverd’autrechose.Lafinduchaos seraitpoureuxlafindumonde. Lapeuraeuraisondupoète,maisellenepeutavoirraisondel’espoir. Car, que les faiseurs de chaos le veillent ou non, un peuple ne peut cesser de rêveràunavenirmeilleur.Etc’estcequelepoèteaclamétoutesavie.Nejamais perdrel’espoirmalgrélaférocitédesmonstres. Jacques Roches aimait la vie dans ce qu’il y a de meilleur. La plupart de nos rédacteurs le connaissaient et tous ont gardé de lui l’image d’un homme qui semblait porter sur ses épaules la douleur d’Haïti, mais qui persistait malgré tout,chaquejour,àcueillirdesétoilesavecsoncœur.Desimposteurscriminels nel’ontpasseulementassassiné. SurlecorpsdeJacques,cesimposteurscrimi- nelsontécritlanoirceurdeleurâme.Anousd’enprendreacteàchaquemoment denotreviedepeuplesinousnesommespasdesfousetdesinconscients. AuNational,nousnousinclinonsencoreunefoisdevantlamémoiredeJacques Roche.Ilspartenttoustroptôt,nosgrandshommescommesilabêtisesurcette terre d’Haïti tramait un complot pour nous mettre en mode régression. Pour sonnerleglasdecetteconjuration,c’estànoustousdeconjuguernosefforts, defaireensortequenousdevenionsgrandsetfortsensemble.AlbertCamus nedisait-ilpasquelagrandeurdel’hommedépenddesadécisiond’êtreplus fortquesacondition?C’estparcelaquenouspourrons,finalement,ensemble, vaincrecesmontresetconstruirecepaysrêvéparnosancêtresoùlebienvivre ensembledeviendralarègle. Gary Victor Édito Accord pour la facilitation des échanges au sein des membres de l'OMC Par Évens RÉGIS HAÏTI/ÉCHANGESCOMMERCIALES C ’est un accord qui a été signé à Bali, lors de la IX Conférence ministérielle de l’OMC. Il vise à astreindre les pays membres de cette structure à améliorer leur transparence, leur efficacité douanière, ainsi que leur coopération avec les organismes de régulation des frontières et le secteur privé. L’accord, déclare Ghisler Dugat, directeur général du MCI, se révèle important dans le secteur, car avec lui, on peut aboutir à une réduction des coûts de transactions de dédouanement des biens à l’import et à l’export. L’accord de facilitation des échanges (AFE) contient 36 dispositions. Et il sera contraignant pour tous les 159 États membres de l’OMC. Il contient trois mesures d’application. Les signataires auront le choix entre une mise en œuvre dès l’entrée en vigueur, une mise en œuvre différée ou une mise en œuvre en rapport avec l’acquisition des capacités à travers l’assistance et le support. Contrairement aux pays qui sont mieux positionnés économiquement sur l’échiquier mondial, l’OMC accorde la possibilité aux pays moins avancés et à ceux en voie de développement de classer eux- mêmes, individuellement, les dispositions de l’accord selon les trois catégories de mesures. Ces derniers auront également la chance de prendre du temps pour se conformer et d’en choisir leur date de mise en œuvre de l’accord. Les ateliers du MCI, selon le directeur général Ghisler Dugat, sont organisés pour prévenir des inquiétudes au sein des secteurs- clés de la vie économique nationale, au moment de la mise en œuvre de l’accord. Avec cet accord, poursuit- il, les échanges commerciaux vont être effectués beaucoup plus rapidement et les tarifs douaniers vont être diminués. Les ateliers, c’est justement pour évaluer, notifier les besoins d’Haïti, et ensuite faire des recommandations à l’OMC et aux autres donateurs, afin de recevoir les accompagnements nécessaires, a-t-il ajouté. Le représentant du Centre de commerce international (CCI), Ezéquiel Mariano Guicovsky Lizarraga, a précisé pour sa part qu’il s’agit d’une initiative pour aider les décideurs et le secteur privé à mieux comprendre les mesures de cet accord, pour que la République soit mieux équipée pour adresser à l’OMC sa requête devant faciliter dans les prochains jours, la mise en vigueur de l’accord sur le territoire national. Ezéquiel Mariano Guicovsky Lizarraga a par ailleurs informé que son institution va travailler avec les secteurs public et privé d’Haïti, en vue de les aider à mieux interpréter les principes, les obligations, ainsi que les actions concrètes qu’ils doivent mener pour ne pas enfreindre les prescrits dudit accord. Décembre 2013, les pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont adopté, en Indonésie, un accord pour la facilitation des échanges dont la ratification est prévue pour décembre 2015. Une fois cet accord entré en vigueur, l’OMC va contraindre ses membres à améliorer leurs procédures d’échanges. Afin d’évaluer et d’identifier les besoins nécessaires d’Haïti avant la matérialisation de cet accord, le ministère du Commerce et de l’Industrie (MCI) a pris les devants, en organisant les 14 et 15 juillet, à l’hôtel Royal Oasis, un atelier de réflexion pour mieux informer les secteurs concernés du bien-fondé de cet accord.
  • 4. WWW.LENATIONAL.HT 10, RUE GABART · PÉTION-VILLE EMAIL: INFO@LENATIONAL.HT PUBLICITE@LENATIONAL.HT REDACTION@LENATIONAL.HT (509) 4611-1010 / 3214-5554 PROPRIÉTAIRE : LE NATIONAL. 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En ce sens, un protocole d’entente a été paraphé, ce mardi 14 juillet, entre le Conseil électoral provisoire (CEP) et les responsables de l’UE concernant une mission d’observation électorale pour les élections législatives, prési- dentielle ainsi que les collectivités ter- ritoriales de cette année. Ce même protocole sera aussi signé avec le Premier ministre Évans Paul, le mer- credi 15 juillet 2015, annoncent les responsables. Après l’Organisation des États américains (OEA) et l’Onu, l’Union européenne, avec cette mission d’observation, est venue augmenter le rang des organismes internation- aux impliqués dans l’observation électorale en Haïti. Cette mission de l’Union européenne, selon Mme Manuela Riccio, chargée d’affaires de l’UE en Haïti, aura pour attribu- tion de fournir une analyse com- plète du processus électoral avec comme boussole la législation haï- tienne ainsi que les normes région- ales et internationales régissant la matière. Menée par Mme Elena Valenciano, membre du Parlement européen, cette mission d’observation est composée de plusieurs équipes divisées ainsi : une équipe-cadre formée de 7 experts, 11 équipes d’observateurs de longue durée qui seront déployées dans tous les départements du pays, un mois avant la tenue du scrutin, et 11 équipes d’observateurs de courte durée qui se déploieront le jour du vote. À cela s’ajoutent les obser- vateurs du Corps diplomatique de l’Union européenne accrédités en Haïti, qui participeront également à l’observation des joutes électorales dans le pays. « La mission électorale fait partie intégrante du soutien que l’UE octroie à Haïti. Elle démontre la solidarité des citoyens européens avec Haïti et notre engagement pour le soutien d’une démocratie moderne et consolidée, essentielle pour la reconstruction et le dével- oppement du pays », a fait savoir Madame Valenciano dans des propos rapportés par Manuela Riccio au moment de signer le protocole. Selon Madame Riccio, qui parlait au nom de la cheffe de la mission, cette délégation d’observation n’entend pas interférer dans le processus électoral, mais elle veillera à ce que la volonté du peuple haïtien soit reflétée le plus fidèlement pos- sible dans les résultats électoraux en toute transparence. Dans le cadre de ses travaux d’observation, la mission produira une analyse qui couvrira le cadre juridique, la performance de l’administration électorale, les activités de campagne des candi- dats et partis politiques, le respect des libertés fondamentales, l’action des médias, le vote, le dépouille- ment, l’annonce des résultats, la consolidation des résultats et autres. Dans les douze jours qui suivent le jour du vote, la mission sortira un rapport préliminaire sur ses observations, a informé Manuela Riccio, précisant que cette mission d’observation de l’UE est soumise à un code de conduite qui empêchera toute ingérence dans le processus électoral. Plus loin, Manuela Riccio a sou- ligné que la mission adhère égale- ment aux principes admis pour l’observation électorale au niveau international. Aussi, dit-elle, cette observation sera menée avec impar- tialité et la plus haute rigueur au service exclusif du droit de vote libre et démocratique. Ce protocole d’accord paraphé entre l’institution électorale et l’Union européenne traduit le choix du Con- seil électoral provisoire de conduire le processus dans l’objectivité, la vérité et la transparence, a informé de son côté, Pierre Louis Opont, président de l’organisme électoral. « Plus il y a d’observateurs, plus le CEP disposera de témoins », a-t-il dit, avant de renouveler son engage- ment à mener le processus électoral dans le strict respect du décret élec- toral et d’organiser des élections honnêtes et démocratiques à partir du 9 août pour le premier tour des législatives. Signature d’un protocole d’entente entre le CEP et l’UE sur l’observation des élections législatives. / Photo: Noclès Débréus
  • 5. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 5 ACTUALITÉ ÉCHO Le CEUEH annonce une marche pacifique pour le 28 juillet Le collectif des étudiants de l’UEH (CEUEH) n’entend pas laisser passer inaperçue la date du 28 juillet qui ramène le centième anniversaire de l’occupation américaine en Haïti. Il annonce deux journées de réflexions durant lesquelles des conférences débats seront organisées avec les professeurs de l’UEH. Le Collectif se dit contre un carnaval le 28 juillet et programme une marche pacifique pour commémorer cette triste date. L'inauguration d'un observatoire universitaire binational, fin juillet Un observatoire universitaire binational sera inauguré bientôt en Haïti. Cette structure contribuera au développement socio-économique durable des deux pays en favorisant le dialogue transfrontalier et la coopération bilatérale, à travers l’analyse continue des questions migratoire, d’éducation, d’environnement et de commerce. Les activités seront basées sur la recherche, des réunions, des publications et la formation, qui contribueront à la régulation des relations entre les ressortissants des deux nations, apprend-on. L'Ocaph, création d'un fonds d'urgence en faveur des déportés Les Haïtiens déportés ne bénéficient nullement d’un traitement acceptable de la part du gouvernement haïtien, a déploré l’Observatoire citoyen de l’action des pouvoirs publics haïtiens (Ocaph). Jusqu’à présent, aucune structure sérieuse n’est mise en place pour accueillir les rapatriés, a dénoncé Jhony Célestin, membre de l’Ocaph, qui demande la création d’un fonds d’urgence en faveur des déportés. Petit-Goâve : armes à feu interdites lors de la campagne électorale Durant la période de campagne électorale, la Police nationale d’Haïti est la seule institution habilitée à porter des armes à feu dans la commune de Petit- Goâve. C’est ce qu’a indiqué un communiqué de presse de la Direction départementale de l’Ouest, précisant que tout individu surpris en flagrant délit avec une arme à feu (artisanale ou non) tombera sous le coup de la loi. Le communiqué invite par ailleurs « toute personne qui aurait remarqué une motocyclette circulant sans son numéro d’autocollant à le signaler à la police par un appel téléphonique ou par un SMS aux numéros suivants : 509 - 4834- 1714 / 509- 4834-1737 ». IFC va injecter quatre millions de dollars américains dans le textile «InternationalFinanceCorporation » (IFC), une institution membre du Groupe Banque mondiale, va investir quatre millions de dollars pour aider la société « The Willbes Haitian S.A. », filiale de l’entreprise sud-coréenne « The Willbes & Co., Ltd », à développer sa capacité de production de vêtements et créer 1 000 emplois supplémentaires à Port-au-Prince d’ici à la fin de 2016. IFC va en outre mobiliser un prêt parallèle de quatre millions de dollars auprès de la Banque interaméricaine de iéveloppement (BID). Les membres de la mission de l’OEA rencontrent des représentants des organisations de la sociét´civile. » suite de la première page La société civile doute de l'arbitrage de l'OEA Par Stephen Ralph Henri HAÏTI/RÉPUBLIQUEDOMINICAINE/MIGRATION L a Mission a également rencontré des organismes de la société civile haïtienne évoluant dans le secteur des droits humains ou traitant de la question migratoire le dimanche 12 juillet. Parmi ces organisations, on retrouve le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), le Groupe d’appui aux rapatriés et refugiés (Garr), la Fondation Zile, la Commission épiscopale Justice et Paix, le Centre œcuménique des droits de l’homme et le Forum économique. La directrice de la Commission épiscopale Justice et Paix (Ce-Jilap), apprécie la démarche de l’OEA de dépêcher cette mission. Toutefois, elle croit qu’il n’y a pas « trop d’espoir » sur les impacts du rapport que cette mission va produire en dépit « des beaux souhaits ». Les perspectives ne sont pas claires, pour la directrice de la Ce-Jilap, qui doute de « la possibilité pour le rapport de l’OEA d’influencer les décisions de la République dominicaine ». La Coordination du Collectif du 4 Décembre est du même avis. « Nous avons questionné la force que ce rapport pourrait avoir », souligne au National Jean Robert Argant, le coordonateur du Collectif. « Nous espérons quand même que cela arrivera à un point où la République dominicaine sera perçue par la communauté internationale comme un État paria et bandit », ajoute le responsable. Le doute qu’expriment ces organisations découle du fait que les autorités dominicaines ont déjà négligé des décisions arrêtées par des institutions internationales, dont la Cour interaméricaine des droits de l’homme (CIDH). En 2005, la CIDH avait condamné les pratiques d’immigration de la République voisine, qu’elle jugeait contraires aux dispositions de la Convention américaine sur les droits de l’homme, un document pourtant signé par l’État dominicain. Si l’espoir d’un changement de direction quant aux agissements de la République dominicaine est moindre, la coordination de la Fondation Zile, y voit une possibilité de mobiliser la communauté internationale. « Le rapport en soi va permettre l’interpellation d’autres instances internationales », juge Edwin Paraison, coordonnateur de la Fondation. Aussi souligne-t-il l’avantage des « recommandations vers les deux gouvernements », qui seront produites par les membres de la Mission. Il croit que ce sera « un rapport très équilibré comportant des données fournies par les deux Républiques ». Le Garr partage l’idée du Collectif et « espère qu’après le rapport les gens seront beaucoup plus sensibilisés à la cause des migrants », déclare Saint- Pierre Beaubrun, coordonateur du Groupe. « La solidarité internationale (…) et la pression morale sur la République dominicaine » que pourra provoquer le rapport des missionnaires sont d’autres valeurs positives que souligne Beaubrun. Le Garr a remis aux membres de la Mission un document contenant, essentiellement, des textes qu’il a produits sur les actes de déportation et de rapatriement. Par ailleurs, les membres de la mission de l’OEA ont rencontré des organisations de la société civile dominicaine, des entrepreneurs ainsi que les dirigeants dominicains, les 10 et 11 juillet. Cette mission, conduite par le secrétaire aux Affaires politiques de l’OEA Francisco Guerrero, est effectuée à la demande du secrétaire général de l’Organisation, Luis Almagro, et des des autorités des deux pays. Après la rencontre avec la mission de l’OEA, les dirigeants dominicains ont expliqué à la presse qu’ils exigeaient des excuses publiques de la part des dirigeants haïtiens. La République dominicaine nie avoir déjà commencé avec le processus de déportation et de rapatriement. Or, les personnes déportées en Haïti témoignent qu’elles ont été contraintes par des militaires et des policiers dominicains de monter dans des bus qui les ont conduites à la frontière. De leur côté, les organisations des droits humains en Haïti voient le retrait de l’arrêt 168-13 adoptée par la Cour constitutionnelle dominicaine en date du 23 septembre 2013 comme la solution à trouver. Cette disposition dénationalise tous les Dominicains nés en République dominicaine de parents étrangers depuis 1929. Cette décision avait engendré la création d’un Plan national (dominicain) de régularisation des étrangers (PNRE) qui a duré une année et qui est arrivé à terme le 17 juin 2015. Ce programme a servi de contexte pour nourrir l’idée de déportation et de rapatriement à Saint-Domingue. Et depuis, plus de 40 mille personnes ont été refoulées vers Haïti.
  • 6. 6 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 ACTUALITÉ Un nouveau palais pour la Cour de cassation Par Lionel Edouard HAÏTI/JUSTICE C omme à l’accoutumée, à chaque grande inaugura- tion, c’est par une céré- monie religieuse qu’a débuté l’événement. Le cardinal Chibly Lan- glois qui officiait, tout en présentant ses sympathies aux victimes de la dernière catastrophe survenue en Chine Taïwan, a imploré la bénédic- tion de Dieu sur les nouveaux bâti- ments qui devront loger la Cour de cassation. Le président de cette cour, Me Jules Cantave, a enchaîné pour expliquer que cette inauguration est un événement attendu depuis trois ans. Il a aussi rappelé la terrible catastrophe du 12 janvier 2010, durant lequel le bâtiment du Palais de justice qui logeait la Cour de cassation, construit en 1928, s’était effondré. « Nous avions beaucoup perdu, notamment en vies humaines », a-t-il dit, appelant à observer une minute de silence en l’honneur des nombreuses victimes. Puis, vantant la taille et l’élégance architecturale de ce nouveau bâtiment qui, selon lui, est l’un des plus beaux acquis dans le cadre de la reconstruction postséisme, Me Cantave a remercié Taiwan pour son aide financière qui a servi à la matérialisation de ce projet. Des relations en bonne santé... Le président de la République, Michel Martelly, avant de débuter son allocution, a également demandé une minute de recueillement, cette fois, en l’honneur des victimes de l’explosion du 27 juin 2015 qui a fait plus de 500 blessés dont 200 graves dans un parc aquatique à Taipei, capitale du Taïwan. Ensuite, M. Martelly a mis l’accent sur le renforcement continu des liens de coopération entre les deux pays, depuis l’entame des relations diplomatiques en 1956. Cela s’est traduit, a-t-il poursuivi, par un partenariat axé sur le développement et le renforcement des capacités du gouvernement haïtien en vue de faciliter les efforts de reconstruction. « Le chemin de la reconstruction phy- sique du pays est très long, un chemin que l’État haïtien n’arrivera pas à parcourir seul mais, avec le support de l’international et la détermination de mon administration, nous y arriv- erons sûrement », a dit le président Martelly, qui a également expliqué le choix de la construction du Palais de la Cour de cassation, par le fait que le président Ma Ying-Jeou est lui-même un juriste qui a été ministre de la Justice à Taïwan entre 1993 et 1996. « Cet ouvrage constitue un témoignage de notre profond respect pour la justice », affirme le président Martelly qui y voit un symbole de la suprématie du pouvoir judiciaire dans ses rapports de dépendance avec les deux autres pouvoirs. Aussi soutient- il, pour un pouvoir prédisposé à la distribution de la justice, selon le droit et un mode impartial, il est normal qu’il soit mis en valeur à travers des locaux qui optimisent les conditions de travail. La sécurisation des dossiers judiciaires et un environnement favorable au travail des juges sont les autres qualités de cet ouvrage construit selon les normes parasismiques, mises en exergue par le chef de l’État haïtien. Par ailleurs, il garantit l’entière collaboration du MJSP qui devra travailler avec la justice pour le plus grand bien de la population. Avant de commencer son allocution, le président Ma Ying-Jeou a, de son côté, remercié les autorités haïtiennes pour leur compassion à l’endroit des victimes de l’explosion au parc aquatique à Taipei. « Le nombre d’hospitalisés ne cesse de baisser », a-t-il informé. S’adressant en français à l’assistance, il s’est dit fier d’inaugurer ce nouveau bâtiment, fruit de l’amitié entre la République de Chine Taïwan et Haïti. Puis, il a enchaîné sur une note plutôt humoristique en disant : « Mesdames et Messieurs, c’est tout ce que je connais en français. » Renouvelant la volonté de son pays de continuer à accompagner Haïti, le président Ying-Jeou croit que ce nouveau local pour la Cour de cassa- tion marque la volonté du président Martelly de bâtir un État de droit en Haïti. Aussi a-t-il tenu à souligner des domaines de coopération entre les deux Républiques qui compren- nent, notamment, la santé publique, le relogement des sinistrés, les infra- structures et l’intégration des enfants. Au Palais national, le président Ying- Jeou a informé que l’ambassadeur de Taïwan en Haïti sera instruit d’explorer d’autres champs de coo- pération entre les deux pays, notam- ment le secteur énergétique (énergie solaire). Au Palais national, le président Michel Martelly, qui accompagnait son homologue devant la presse, a, quant à lui, renouvelé la volonté d’Haïti de rester aux côtés de Taïwan dans ses prises de position à travers les insti- tutions internationales. Car, croit-il, la coopération entre les deux pays est bénéfique pour l’humanité.Financé à hauteur de 15 millions 300 mille dollars par le gouvernement taïwa- nais, selon le président Martelly, ces travaux ont été réalisés par la firme Overseas Engineering Construction Company et supervisés par l’Unité de construction de logements et de bâtiments publics (UCLBP). Lancés en août 2013, ils ont duré vingt-trois mois. Le bâtiment est conçu selon les normes parasismiques, pour résister à un tremblement de terre de magni- tude 9 sur l’échelle de Richter. Établi sur une superficie de 4 262 m2, le palais de la Cour de cassa- tion comporte trois étages. Le pre- mier niveau, d’une superficie de 1 415 m2, abritera un espace de stationnement d’une capacité de 24 voitures. Le deuxième niveau occu- pera une superficie de 1 462 m2 et abritera notamment les bureaux des juges, du commissaire et des substituts-commissaires du gouver- nement. Le bureau du président de la Cour, d’une superficie de 54 m2, se trouvera au troisième niveau du bâtiment qui s’étend sur une super- ficie de 1 421 m2. Le président Michel Martelly et son homologue taïwanais inaugurent le palais de la Cour de cassation / Photo: J.J. Augustin En présence de nombreuses personnalités du Gouvernement, du Corps diplomatique et du pouvoir judiciaire, le chef de l’État haïtien, Michel Joseph Martelly, et son homologue de la République de Chine (Taïwan), Ma Ying- Jeou,ont inauguré, au Champ de Mars, les nouveaux locaux devant abriter la Cour de cassation, la plus haute instance du pouvoir judiciaire en Haïti. » suite de la première page
  • 7. A lors que la campagne élec- torale est lancée, le climat de sécurité reste encore délé- tère. Candidats, dirigeants politiques, responsables de l’appareil électoral, personne n’est à l’abri de cettevagued’insécuritéquidéferlesur le pays. Durant le weekend écoulé, plusieurs cas de violences liées à la question électorale ont été recensés dans le Sud-Est et dans l’Artibonite où trois individus lourdement armés avaient investi la résidence privée de Claudel St-Hilien, président du Bureau électoral départemental (BED) de ce département. Certains départements, dont l’Artibonite et le Sud-Est, ayant la réputation de « zones rouges » sont le théâtre de certains actes de violences en ce début de campagne électorale. Dans le Sud-Est, les sym- pathisants du Parti haïtien Tèt kale (PHTK) ont frappé fort, en giflant un propriétaire de maison qui se serait opposé à ce que des photos de leurs candidats soient collées sur les murs de sa résidence. En réac- tion, ce propriétaire aurait blessé l’un de ces colleurs de photos à coups de pique, selon des informa- tions recueillies auprès des témoins de cette scène qui s’est passée dans la localité de Beaudouin (une banli- eue de Jacmel). À Bainet, toujours dans le Sud-Est, un partisan de Joseph Lambert a failli y laisser sa peau en collant sur les murs d’une maison privée des photos de « Papa Tounen », surnom attribué à l’ancien sénateur Joseph Lambert. Alors que l’article 115 du décret électoral édicte clairement que les candidats et candidates, partis et groupements politiques peuvent utiliser tout moyen de communication collective pour exposer leur programme. Cependant, il leur est interdit d’apposer affiches, graffitis et autres sur les clôtures, murs, portes des maisons privées, des édifices d’intérêt public (lieux de cultes, écoles, hôpitaux, monuments historiques, etc.) sous réserve des sanctions prévues dans ledit t décret. Les candidats ainsi que leurs sympathisants semblent avoir oublié cette disposition légale en apposant librement leurs affiches sur les murs des maisons privées. Déjà, la semaine écoulée, des individus non identifiés ont fait irruption dans la résidence de Raymond Jean-François, candidat à la mairie de la commune de Bainet, sous la bannière du parti Fusion des sociaux-démocrates. Kensy Jean François, un mineur de 16 ans, neveu du candidat, a été blessé par balle et les envahisseurs avaient emporté des documents appartenant au candidat. Dans la commune de Belle-Anse, des inconnus armés avaient aussi tiré sur la résidence de Garraud Historique, membre du parti « Renmen Ayiti », de Jean Henry Céant.L’inquiétude est grandissante durant cette période électorale. Des membres de l’institution électorale avaient dénoncé un complot ourdi contre eux. Des organisations de défense des droits humains ainsi que d’autres organisations de la société civile sont montées au créneau pour dénoncer une vague de violences durant cette période électorale. Dans un rapport, le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), le Conseil haïtien des acteurs non étatiques (Conhane) et le Conseil national d’observation des élections (CNO) ont exigé des autorités concernées une attention particulière sur le développement de la violence préélectorale. À Petit-Goâve où la situation de sécurité est déjà précaire, le rapport a fait mention de plusieurs groupes armés qui se seraient emparés de la ville. Certains quartiers de cette commune sont déclarées « zones rouges » et les citoyens ne peuvent y circuler librement. Ces organisations préviennent qu’au cas où cette situation perdurerait jusqu’au jour du scrutin, beaucoup d’électeurs ne pourront pas voter. Au fil des jours, les cas de violences augmentent alors que la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah) s’est désengagée dans six départements, parmi lesquels figurent ceux qui sont réputés chauds en période électorale. Face à cet environnement d’insécurité, la Police nationale semble de plus en plus avoir du pain sur la planche, et la population, aux abois, attend impatiemment la mise en œuvre du plan de sécurité longtemps annoncé par l’inspecteur Gary Desrosiers, porte-parole de l’institution policière. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 7 ACTUALITÉ Gare aux violences électorales !Par Noclès Débréus HAÏTI/ÉLECTIONS
  • 8. 8 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 MONDE François Hollande s’est posé mardi en président « audacieux », lors de sa traditionnelle interview du 14 juillet, mettant en avant son rôle face à la crise grecque et à la menace terroriste, sans pour autant dévoiler ses intentions pour 2017. « Je ne dis pas que c’est la France qui a gagné » mais elle a « occupé toute sa place », joué « tout son rôle » pour éviter une sortie d’Athènes de la zone euro, a affirmé le président de la République, au lendemain l’accord européen obtenu à l’arraché à Bruxelles. Il a souligné à l’inverse « un moment d’interrogation » chez la chancelière allemande Angela Merkel qui, de son côté, a envisagé un « Grexit ». A l’offensive, M. Hollande a annoncé qu’ilallaitfairedespropositionspour « un gouvernement économique européen » et l’instauration d’ « un budget de la zone euro ». « L’humiliation, c’eût été de chasser » la Grèce, a-t-il aussi déclaré, alors que les conditions de son maintien dans la zone euro sont extrêmement contraignantes. Selon lui, les réformes prévues doivent permettre aux Grecs de « retrouver de la croissance ». Le chef de l’État, qui a bouclé son interview en direct sur France 2 et TF1 en trois quarts d’heure chrono, a souhaité aux journalistes David Pujadas et Claire Chazal, de connaître « des présidents aussi audacieux » que lui, insistant sur les « 40 milliards de baisse de charges pour les entreprises » du pacte de responsabilité et la mise en place d’un « nouveau dialogue social », engagés depuis 2012. Six mois après les attentats de janvier à Paris et trois semaines après celui de Saint-Quentin- Fallavier, il a assuré que l’exécutif ne baisserait pas la garde face à la menace terroriste. « Rien ne sera relâché », « nous sommes mobilisés », a-t-il dit, soulignant que « 10 000 militaires seront maintenus sur le territoire » en plus des 20 000 policiers et gendarmes. Sarkozy n’est pas sur ma table de travail A propos des déclarations controversées de son Premier ministre, Manuel Valls, qui avait parlé fin juin une « guerre de civilisation » contre l’islamisme radical, M. Hollande a nuancé, soulignant « nous sommes face à des groupes qui veulent mettre en cause les civilisations, toutes les civilisations » et « les premières victimes sont musulmanes ». M. Hollande a aussi estimé que l’accord « très important » conclu sur le nucléaire iranien, au terme de 21 mois de négociations, était la preuve que « décidément le monde avance ». A22moisdelafindesonmandat,M. Hollande, toujours très impopulaire et sans résultats probants sur le front économique et social, a admis que même si la croissance « est là », elle est encore « trop faible » (1,2 % en 2015, selon l’Insee). Le chef de l’État a promis d’activer tous les « facteurs de croissance ». Les décrets de la loi Macron, que le gouvernement veut décisive pour relancer l’économie, seront « pris pour l’été », ce qui va « libérer un certain nombre d’activités ». Sur le plan politique, à cinq mois des régionales de décembre, dernier test électoral avant la présidentielle, M. Hollande, déjà lancé dans une précampagne qui ne dit pas son nom pour 2017, s’est toutefois refusé « à annoncer quelque candidature que ce soit ». Face aux crises internationales et aux difficultés économiques, « si je pensais à l’élection présidentielle, je serais à côté du sujet », a-t-il considéré, réaffirmant qu’il entendait être jugé « sur les résultats ». « S’il n’y a pas de baisse du chômage, je ne me représenterai pas », a-t-il rappelé Quant à son challenger Nicolas Sarkozy qui multiplie les attaques contre lui, il l’a balayé d’un revers de main: « J’ai suffisamment de sujets à traiter, celui-là n’est pas sur ma table de travail ». Le président de la République a également assuré que Manuel Valls, « un bon Premier ministre qui a pris des engagements », avait vocation à « terminer le quinquennat » à ses côtés. M. Hollande a aussi laissé la porte ouverte à un retour des écologistes au gouvernement. En prévision de la conférence climat en décembre à Paris, « ceux qui veulent apporter leur concours sont les bienvenus et je ne vais pas faire de contrôle à l’entrée », a-t-il lancé à leur adresse. Alors que le PS a approuvé sans surprise l’intervention présidentielle,l’oppositionacritiqué un exercice d’autocélébration. « Hollande en mode autosatisfaction déconnectée des réalités », a attaqué dans un tweet l’ex-ministre Nadine Morano (Les Républicains), rejointe par Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) qui a critiqué « un nouvel exercice d’autocélébration de sa politique, pourtant dénuée de tout résultat ». Dans la même veine, la présidente du FN Marine Le Pen, a critiqué le « satisfecit » de M. Hollande qui « continue à mentir aux Français », tandis que le Front de gauche a dénoncé « une politique contraire aux intérêts de la France. » Hollande se pose en président « audacieux » sur la Grèce et face à la menace terroriste sources : AFP Le président français François Hollande au palais de l’Elysée à Paris le 14 juillet 2015. / Photo : AFP / POOL / AFP
  • 9. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 9 MONDE L ’Iran et les grandes puissances ont conclu mardi un accord historique mettant fin à douze années de tensions autour du dossier nucléaire iranien et ouvrant une « nouvelle page » dans les rela- tions internationales. L’accord rend quasi impossible la construction d’une bombe atomique par Téhéran et marque le début d’une normalisation des relations de ce pays de 77 millions d’habitants, aux riches ressources pétrolières et gazières, avec la communauté internationale. L’UE, l’ONU, Téhéran ou encore Londres ont salué un accord « historique », tandis que Moscou poussait « un soupir de soulagement » au terme d’un véritable marathon diplomatique. Les 109 pages de l’accord limitent les ambitions nucléaires de Téhéran en échange de la levée progressive et réversible des sanctions qui étouffent son économie. Ce succès diplomatique, conclu après deux ans de négociations acharnées, referme un dossier qui empoisonnait les relations internationales depuis 2003. Ce dénouement intervient à un moment où le Proche-Orient est déchiré par de nombreux conflits, dans lesquels l’Iran est impliqué. Paris a appelé l’Iran à se saisir de l’occasion pour « aider à en finir » avec le conflit en Syrie. A Damas, le président Bachar al-Assad a félicité son allié iranien chiite pour sa « grande victoire ». Même les Emirats arabes unis -un pays sunnite- ont estimé que cet accord pouvait être une « occasion d’ouvrir une nouvelle page dans les relations entre les pays de la région du Golfe ». A l’inverse, Israël a immédiatement dénoncé une « erreur historique », qui va permettre à l’Iran de financer sa « machine de terreur ». « Israël n’est pas lié à cet accord avec l’Iran (....) Nous saurons toujours nous défendre », a menacé le Premier ministre Benjamin Netanyahu. C’est la première fois qu’un accord à ce niveau lie la République islamique et les Etats-Unis depuis la rupture de leurs relations diplomatiques en 1980. « Cet accord nous donne une chance d’aller dans une nouvelle direction », a commenté le président américain Barack Obama, tout en soulignant qu’il était fondé sur les vérifications « et pas sur la confiance ». Deux semaines après la réconciliation avec Cuba, le président démocrate marque d’une nouvelle pierre blanche diplomatique la fin de son dernier mandat. L’épilogue est également un succès pour le président iranien Hassan Rohani, pour qui l’accord pourrait « éliminer peu à peu la méfiance » entre les ennemis historiques. Le chef de l’Etat, un modéré, a promis que son pays ne se doterait « jamais » de la bombe atomique. Accès limité L’entente a été arrachée à l’issue de 18 jours d’un dernier round de négociations, un final d’une longueur sans précédent depuis les accords de Dayton qui ont mis fin à la guerre de Bosnie-Herzégovine en 1995. L’accord met en œuvre de grands principes actés à Lausanne en avril: Téhéran s’engage à réduire ses capacités nucléaires (centrifugeuses, stock d’uranium enrichi...) pendant plusieurs années et à laisser les inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) procéder à des inspections plus poussées. Le but est de rendre quasiment impossible la possibilité pour l’Iran de fabriquer une bombe atomique, tout en assurant à Téhéran, qui nie avoir jamais eu l’intention de se doter de la bombe, le droit de développer une filière nucléaire civile. Une fois les installations iraniennes réduites, selon les termes de l’accord, il faudrait en effet un an à Téhéran pour fabriquer une bombe, contre deux à trois mois aujourd’hui. En échange, l’Iran bénéficiera progressivement d’une levée des sanctions internationales adoptées depuis 2006 par les Etats-Unis, l’Union européenne et l’ONU et qui brident l’économie du pays. Les premières sanctions pourront être levées à partir du premier semestre 2016 si la République islamique respecte ses engagements. En cas de violation de l’accord, elles pourront être rétablies. Et cette réversibilité durera quinze ans. En revanche, l’interdiction du commerce des armes a été reconduite pour cinq ans, sauf autorisation spécifique du Conseil de sécurité. La demande de l’Iran, soutenue par Moscou, de lever cet embargo a été un des principaux points de blocage des discussions. Autre sujet délicat: la possibilité pour les inspecteurs de l’AIEA de se rendre sur les sites militaires iraniens. Finalement, Téhéran a accepté de leur permettre un “accès limité” à certains sites. De travers Les milieux économiques se tiennent prêts à revenir dans ce pays qui dispose des quatrièmes réserves de brut au monde et des deuxièmes de gaz. L’Iran, un pays de l’Opep, pourra à terme exporter à nouveau librement son pétrole. Les prix du pétrole perdaient du terrain mardi dans les échanges européens après l’annonce de l’accord qui se traduira par un afflux de brut dans un marché déjà plombé par un surplus d’offre. Les Iraniens, qui ont élu Hassan Rohani à la présidence en 2013 sur la promesse de levée des sanctions, attendaient un tel accord avec impatience. « Quand le monde nous reconnaîtra comme un pays pacifique (...) les investissements étrangers vont affluer et cela aura un impact positif sur la vie des gens », a estimé, à Téhéran, Hamid Bahri, un ingénieur de 34 ans. Mais les tenants d’une ligne dure en Iran aussi bien qu’aux Etats-Unis n’ont cessé d’exprimer leur hostilité aux discussions. A Washington, l’accord doit désormais être soumis au Congrès, contrôlé par les Républicains qui sont très méfiants envers Téhéran. L’accord doit également être endossé par le Conseil de sécurité de l’ONU, une formalité qui doit intervenir d’ici « quelques jours », selon Paris. Accord historique sur le nucléaire iranien après 12 ans de criseSources : AFP Les principaux diplomates qui ont œuvré à la conclusion d’un accord sur le nucléaire iranien posent le 14 juillet 2015 à Viennes. / Photo : AFP / JOE KLAMAR
  • 10. 10 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 ÉCONOMIE Quatre millions de dollars américains à la Willbes pour créer 1000 emplois en Haïti Par Henri Alphonse E lle importe ses matières pre- mières de la République dominicaine, confectionne ses vêtements en Haïti et les vend aux Etats-Unis d’Amérique. Preuve, s’il en est encore besoin, que les affaires n’ont pas de frontières, encore moins d’état d’âme. La Société financière internatio- nale (SFI - FIC), une institution membre du groupe de la Banque mondiale, investira quatre mil- lions de dollars, soit 224 millions de gourdes au taux en vigueur sur le marché des changes (56 gourdes pour un dollar US), pour aider la société Willbes à développer sa capacité de production de vête- ments et à créer environ 1000 emplois à Port-au-Prince d’ici à la fin de 2016. La SFI envisage de mobiliser un prêt parallèle de quatre millions de dollars auprès de la Banque interaméricaine de développement (BID) pour aider la Willbes à con- solider sa situation financière. Ces ressources supplémentaires per- mettront à la société de se doter, par ailleurs, de nouvelles lignes de production. D’un autre point de vue, ce financement favorisera – selon la SFI – le développement du secteur vestimentaire en Haïti, une composante essentielle de l’économie nationale et une source majeure d’investissements étrang- ers et d’emplois. Ces dernières années, les exportations de vête- ments ont représenté quelque 90 % des exportations d’Haïti. « Ce partenariat conclu avec IFC, favorisera l’expansion de Willbes et la prospérité du secteur haïtien de l’habillement », s’est félicité M. Byung-Hyun Jun, président directeur général de la Willbes. Il reste convaincu qu’Haïti est en mesure de devenir l’un des pro- ducteurs les plus compétitifs de vêtements de confection. « Et nous sommes prêts à prendre part à cette croissance », a-t-il promis. Luc Grillet, responsable principal pour l’Amérique centrale et les Caraïbes à la SFI, témoigne de la détermination de l’institution à soutenir le secteur privé haïtien par l’intermédiaire d’entreprises qui, comme la Willbes, « créent des emplois et des débouchés permet- tant à la population d’améliorer ses conditions de vie ». Une démarche qu’il inscrit dans le cadre d’une stratégie visant à « favoriser la croissance dans un secteur priori- taire et à produire ainsi des emplois et des recettes d’exportations pour l’économie haïtienne ». Un portefeuille assez garni Le portefeuille de la SFI en Haïti s’élève à 122 millions de dol- lars dont 24 ont été mobilisés auprès d’autres partenaires. La SFI intervient dans des secteurs comme l’hôtellerie, l’énergie, les marchés financiers et le secteur manufacturier. Dans le cadre de ses programmes consultatifs avec le secteur privé et les autorités nationales, elle facilite l’accès au financement, soutient les parte- nariats public-privé, favorise l’amélioration du climat de l’investissement en Haïti et apporte son soutien aux programmes desti- nés à rehausser la productivité des petites et moyennes entreprises. La Willbes La Wilbes est une entreprise tex- tile sud-coréenne de confections, installée au Parc industriel de Port- au-Prince depuis plus de 10 ans et offrant des emplois à quelque 4500 personnes. Cette filiale de l’entreprise sud-coréenne The Willbes & Co. Ltd, a su tirer profit des avantages offerts par la loi Help, ci-devant Hope. Elle bénéficie également des exemptions de taxes et autres avantages offerts par le gouver- nement haïtien aux industries de sous-traitance installées en Haïti. Elle conseille également à la Kotra, l’agence sud-coréenne de promotion d’investissements qui l’a honoré en juin 2010 « pour sa constance et l’immense travail réalisé en Haïti ». La SFI Membre du groupe de la Banque mondiale, la SFI - IFC - est la plus importante institution mondiale d’aide au développement dont les activités concernent exclusivement le secteur privé. Elle collabore avec des entreprises privées dans une centaine de pays et consacre son capital, son expertise et son influ- ence à l’éradication de l’extrême pauvreté et à la promotion d’une prospérité partagée. Au cours de l’exercice quatorze , SFI-IFC a fourni plus de 22 mil- liards de dollars de financements pour améliorer les conditions de vie dans les pays en développe- ment et résoudre les problèmes de développement les plus urgents. INDUSTRIETEXTILE Quatre millions de dollars à la Wilbes pour créer 1 000 emplois en Haïti. / Photo: ukrmillers.com RENCONTREENTRELEMPCEETLEGROUPEG12+ Le cadre de coopération de l'aide externe au développement sera réexaminé Source : MPCE C onsolider les actions en cours. Étudier ensemble les pistes de coopération. Deux objec- tifs que se sont donné les responsables du ministère de la Plani- fication et de la Coopération externe et ses partenaires du groupe G12+ dans le cadre de l’accompagnement au gouvernement d’Haïti. Cette première rencontre dite « consolidée » - ce sont les termes utilisés par le bureau de Communication du MPCE - était l’occasion d’une évaluation conjointe de l’impact des efforts consentis jusque là par les parties prenantes du processus de coopération en cours. Selon un communiqué du Bureau, le ministre Yves Germain Joseph a fait état, au cours de la rencontre, de l’adoption d’un ensemble de dispositions garantes d’une meilleure gestion, en rapport avec la mission, les fonctions et attributions du MPCE. Se référant au Cadre de Coopération de l’Aide Externe au Développement (CAED), le Ministre a informé les membres du G12+ présents à cette réunion qu’il avait constitué une commission chargée d’évaluer la situation du CAED et de faire le cas échéant, des propositions en vue de la relance de ses activités. La nécessité de reformater le secrétariat technique de coordination est la thématique qui a retenu l’attention des parties. L’obligation de maintenir un rythme raisonnable de tenue de comités d’efficacité de l’aide fut aussi évoquée par le ministre Germain qui a recommandé dans la foulée la formulation de critères d’analyse et d’évaluation du mécanisme conjoint de coopération. Le Ministre Joseph s’est porté garant de l’engagement du MPCE à travailleraurenforcementdesUnités d’Etudes et de Programmation (UEP), qui conditionnent le bon fonctionnement des tables sectorielles et techniques. Il a particulièrement insisté, au cours de la rencontre, sur la nécessité d’adopter le principe « coûts- bénéfices » dans le cadre de la programmation de l’investissement public.
  • 11. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 11 ÉCONOMIE Développement économique. Équité sociale. Équité intergénérationnelle. Trois dimensions du développement soutenable mises en discussion, ce week-end écoulé, au Champ de Mars par un groupe d’étudiants issus de différentes facultés de l’université d’État d’Haïti et des universités privées de la place. Le développement durable, ce nouveau paradigmePar Therno N. A. Sénélus DÉVELOPPEMENTETÉQUITÉ N ouveau mode de développe- ment officiellement proposé parlaconférencedesNations unies pour l’environnement (CNUED) et la Banque mondiale, il y a vingt-cinq ans environ, le concept de développement durable a servi de toile de fond au discours des politici- ens haïtiens notamment les candi- dats aux prochains scrutins. Il n’est pas nouveau en Haïti mais il parait utopique, à en croire les différents points de vue de certains étudiants. Dans le cadre d’un « vox Pop » réalisé avec ces étudiants, autour de ce débat contradictoire, l’approche économique était privilégiée pour conduire les réflexions axées sur les problèmes socio-économiques et politiques du pays. Avec des argumentaires persuasifs relatifs aux conditions vie de la population haïtienne, Julsaint Alsain, étudiant en Sciences économiques, se montre très préoccupé par le langage de ces hommes politiques qui utilisent le concept de développement durable pour satisfaire leurs propres besoins et laisser sans solution les problèmes socioéconomiques du pays. Lors de ces réflexions, Julsaint Alsain a dit croire que le développement soutenable ne doit pas faire l’objet de définition et de discours. Le pragmatisme sur le tas s’avère nécessaire. Chaque jour nous utilisons ce concept mais rien n’est véritablement fait pour sortir le pays du marasme économique qui le paralyse. Nous vivons l’ère des produits importés. Il en a profité pour faire remarquer que la gourde qui perd de sa valeur risque d’aggraver davantage la situation économique des secteurs vulnérables de la population. Tenant compte de la précarité de la vie dans nos communes, le coordonnateur national du Conseil national de la sécurité alimentaire, Gary Mathieu, a indiqué que Thiotte, Grand Gosier, Anse-à-Pître, Baînet et Côte-de- Fer, dans le département du Sud- Est, les communes de la Gonâve et de Fonds Verettes dans l’Ouest ainsi que le Bas Nord-Ouest, sont en situation de sécheresse. Abondant dans le même sens, l’étudiant Julsaint Alsain précise que toutes les sections communales sont en situation de sécheresse et qu’il s’agit d’une crise alimentaire poussée. Pour lui, depuis toujours, le pays fait face à une terrible sécheresse. Illusion monétaire et dumping social Pour raffermir ses opinions, Eslet Latouche, pose le problème sociétal en parlant de la rareté de l’eau à travers le pays, la crise alimentaire, la perte des denrées agricoles des paysans, le chômage, les sous-emplois et la sous- rémunération et la fluctuation. Elle sait que ces problèmes ne datent pas d’aujourd’hui : « ce problème n’est pas récent. Mais il surgit à cause du manque de leadership de nos dirigeants. Si dès le départ on avait forgé un programme sectoriel efficient pour renforcer la capacité des agriculteurs haïtiens, ce problème n’aurait pas existé ». La promotion des entreprises locales via l’agriculture serait très importante pour les paysans, déclare-t-il, ajoutant que « les employeurs œuvrant sur le sol national ne tiennent pas compte des modes et niveaux de vie des employés. Le coût de la vie devrait interpeller les patrons afin de repenser le salaire des ouvriers » . Au cas où la classe patronale ne penserait pas aux conditions de vie de ces employés qui vivent toujours dans des situations difficiles, le dumping social reprend vigueur. « Nous devons nous mettre au travail pour replacer le pays dans la sphère économique des autres pays des Caraïbes » martèle-t-il. Et d’ajouter : « lorsque le revenu d’un employé est inférieur à ses dépenses on est dans une situation d’illusion monétaire qui conduirait effectivement au « dumping ». En vue de corroborer les réflexions des deux étudiants, Marline Bablois, mémorante en gestion des affaires, fustige le laxisme des autorités qui, jusqu’à date, ne font rien pour pallier le problème de la dégringolade de la gourde. Elle croit, cependant, qu’il faut repenser Haïti sur le plan socioéconomique et politique. « La disette, le chômage, l’inaccessibilité aux besoins sociaux de base sont, entre autres, mes préoccupations ». Elle a, par ailleurs, précisé que le développement durable ne doit pas servir de discours politique. Les problèmes sociaux, économiques et environnementaux doivent être pris en compte. À cet effet, il faut lutter pour un développement économique efficace et une équité sociale. Si les besoins présents ne sont pas satisfaits, qu’en est-il des besoins futurs ? s’est-elle interrogée. « Ces hommes politiques qui utilisent le concept de développement durable pour satisfaire leurs propres besoins et laisser sans solution les problèmes socioéconomiques du pays ». / Photo : horbourg-wihr.fr
  • 12. 12 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 ÉCONOMIE INNOVATIONETCROISSANCE Les incubateurs en perspective Source : La Documentation française La création d’entreprises prépare le renouvellement et l’adaptation de l’économie, c’est à dire le futur. Les responsables économiques ont progressivement pris conscience de la nécessité de l’encourager, et plus encore, de ne pas la décourager. L es économistes conviennent maintenant de l’existence de liens directs entre le niveau de création d’entreprises et d’innovation et la croissance économique. Une terminologie en évolution Les incubateurs sont des struc- tures d’appui à la création d’entreprises. Ils réunissent des ressources spécialisées dédiées à l’accompagnement et l’assistance des entreprises avant leur créa- tion ou dans les premières années de leur vie. Ils comprennent, en général, un hébergement immo- bilier souple, des services admi- nistratifs, des actions de conseil et de mise en relation avec les réseaux d’affaires notamment financiers. En France, le terme « incubateur » s’est appliqué aux structures d’appui avant la créa- tion d’entreprises, par exemple les premiers incubateurs des Écoles des Mines et a été utilisé pour les incubateurs lancés récem- ment par le M.E.N.R.T. – Ministère de l’Éducation Nationale, de la Recherche et de la Technologie. Le terme « pépinière » a été utilisé plus couramment pour les struc- tures d’appui aux entreprises après leur création, ce terme étant pré- féré à celui de nursery, de ruche, de couveuse, etc. Aux États-Unis, le terme « incubator » désigne les pépinières, le concept d’incubateur étant parfois traduit par « innova- tion center » ; mais d’une façon générale, le terme « incubator » recouvre à la fois les structures d’appui avant et après la création. Au moment de la vague Internet, un grand nombre de structures se sont créées, notamment d’origine privée, pour accompagner et faci- liter le lancement de start-up, moyennant une contrepartie finan- cière. Ces structures appelées « incubator » aux États-Unis se sont développées rapidement en Europe en gardant le nom d’incubateur. Les divers systèmes d’appui à la création d’entreprises En prenant davantage en compte l’importance des petites entre- prises et des créations d’entreprise dans le tissu économique local, les pays industrialisés – à partir des années quatre-vingt - ont accru les dispositifs d’appui à la créa- tion d’entreprises. L’objectif était d’apporter aux nouveaux entre- preneurs des conditions d’accès plus faciles aux ressources qui leur sont nécessaires. Trois axes d’intervention des pouvoirs pub- lics1 se sont développés parallèle- ment : - les appuis financiers - le conseil et la formation - le soutien logistique. Les appuis financiers Il s’agit de subventions, d’avances remboursables, de cautions et garanties, d’accès au capital-ris- que. Une panoplie de mesures a été mise en place, aux niveaux national, régional voire local. Les procédures, les plates-formes d’initiative locales, les prêts à la création d’entreprises sont de bons exemples, même si les procédures en place ne permettent pas encore de répondre à tous les besoins. - Le conseil et la formation : la sensibilisation et la formation à la création d’entreprises, les différents types de conseils spé- cialisés ou généralistes apportés aux entrepreneurs se sont mul- tipliés par les différents réseaux des Chambres de Commerce, des Chambres des Métiers, des bou- tiques de gestion, des plateformes d’initiatives locales, d’« Entrepren- dre en France », des Clubs de créa- teurs d’entreprises, etc. - Le soutien logistique : Il s’agissait de mettre à disposition des jeunes entreprises un hébergement dans des locaux adaptés et flexibles pour une période temporaire et des services administratifs, en temps partagé. Puis l’offre de conseils plus ou moins complexes, ainsi que l’ouverture sur des réseaux d’affaires sont venues enrichir le système. Ainsi, les pépinières ont commencé à se développer au milieu des années 85 et ont joué localement une fonction nouvelle d’intégration des moyens mis à la disposition d’entreprises en création. Les pépinières offrant des services complets utilisaient donc en fonction des besoins les outils financiers ou les réseaux de conseils décrits précédemment en s’appuyant sur des partenariats locaux. Les pépinières et incuba- teurs se sont développés à peu près au même moment en Angleterre, en Allemagne et en France, alors qu’elles avaient démarré un peu plus tôt aux États-Unis. Les deux vagues de création d’incubateurs Depuis leur création, on peut distinguer deux vagues de dével- oppement des incubateurs dans les quatre pays étudiés. 1. La période de lancement des incubateurs de développement économique local : 1980-1997 Dans chaque pays, les incubateurs sont nés d’initiatives individuelles locales, pour répondre à un prob- lème spécifique de régénération ou d’expansion d’un territoire. La fonction immobilière a été la première afin d’offrir des condi- tions d’hébergement favorables aux jeunes entreprises. Les fonc- tions complémentaires de services, d’accompagnement et de conseil se sont développées progressive- ment. Ce modèle d’activation économique s’est peu à peu diffu- sé, souvent encouragé par des col- lectivités locales qui cherchaient à résoudre un problème d’activité ou un problème d’image. Au début de cette période, la plupart des incubateurs bénéficiaient de sub- ventions publiques nationales ou locales, de programmes européens, de l’appui de grandes entreprises, de banques et d’organismes locaux divers. Les modèles privés étaient peu nombreux (sauf en Angleterre). Aux États-Unis on ne note en 1996 que peu d’exemples d’incubateurs privés. Ceux-ci étaient essentiel- lement à base immobilière, leur objectif étant de rentabiliser une propriété immobilière au moyen de loyers accompagnés de services communs. 2. La deuxième période : crois- sance et diversification des modèles d’incubateurs : 1998 Cette phase, qui est en cours, a été marquée par plusieurs phé- nomènes : l’explosion des incu- bateurs privés à but commercial et notamment des « incubateurs internet » lancés par des entre- preneurs indépendants, des finan- ciers, voire des grandes entrepris- es. Ces catégories d’incubateurs privés, associés à internet, puis à d’autres technologies ont béné- ficié d’une très forte médiatisa- tion et d’un engouement excessif pendant les années de croissance suivis d’une méfiance toute aussi marquée depuis le dégonflement de la bulle. Cet engouement lié à la mode a poussé de nombreuses structures d’appui, de conseil ou de financement de jeunes pousses à s’appeler « incubateur », termi- nologie qui a été souvent rejetée, quelques mois plus tard, par ces protagonistes qui ne voulaient plus de cette étiquette. Parallèlement, les incubateurs issus du monde académique et des centres de recherche ont connu une nouvelle phase de développement grâce aux nouvelles politiques d’innovation au niveau européen et au niveau des États, ainsi qu’à l’attrait vif des étudiants pour les start-up. Ce renouveau d’intérêt a permis, en parallèle, de consolider l’intérêt des incubateurs de développement économique local activé par les pouvoirs publics locaux. Enfin, les grandes entreprises se sont davan- tage intéressées à l’incubation (Corporate incubator). Cette deuxième vague s’est donc caractérisée par l’intervention d’un grand nombre d’acteurs divers et nouveaux qui se sont intéressés à l’incubation d’entreprises, pour renforcer ou diversifier leurs activ- ités, voire par opportunisme. Les mécanismes qui ont encouragé la création d’incubateurs dans la première vague sont essentielle- ment les suivants : - créer des économies d’échelle dans la mise à disposition de locaux et de services adaptés aux entreprises en création. Ces locaux adaptés et flexibles avec des loyers souvent attractifs correspondent à un besoin réel des nouvelles entre- prises qui ne trouvaient souvent sur le marché que des locaux trop grands, trop chers, avec des cau- tions, etc. C’est aussi une occa- sion idéale de briser la solitude du nouvel entrepreneur en partageant des locaux avec ses pairs. - créer des lieux d’apprentissage et de mise en relation d’affaires pour des entrepreneurs qui n’ont pas le capital social et l’expérience de la gestion des entreprises. Souvent les nouveaux entrepreneurs doi- vent tout apprendre à la fois sur le tas, s’ils n’ont pas eu la chance de côtoyer de près la fonction entre- preneuriale. L’incubateur sera un lieu idéal pour apprendre plus vite avec moins de risque d’échecs. - créer des lieux symboliques de l’esprit d’entreprise dans une com- munauté donnée. Dans la deux- ième vague, se sont ajoutées aux causes précédentes, des incita- tions supplémentaires : - Des acteurs économiques divers cherchent à tirer profit des innova- tions entrepreneuriales pour béné- ficier des plus-values financières, accéder à de nouvelles technolo- gies ou à de nouveaux marchés - Ils pensent également qu’on peut à la fois « accélérer » et « indus- trialiser » la fabrication de start- up, en mettant à leur disposition le maximum de ressources, et en élaborant des processus systéma- tiques pour rationaliser les étapes complexes de passage de l’idée au projet, puis du projet à l’entreprise viable. Cette deuxième phase de bouillonnement effervescent a eu plusieurs conséquences impor- tantes : - Un grand nombre d’acteurs nou- veaux s’est lancé sur le « marché » de l’incubation. Malgré le retour- nement de conjoncture, une partie des « nouveaux entrants » persévère, alors que d’autres ont arrêté. - Le concept d’incubateur s’est dif- fusé plus largement et a été mieux connu du public. - Ceci a entraîné, concomitamment, un intérêt accru des pouvoirs publics pour les incubateurs clas- siques et pour les incubateurs liés aux nouvelles technologies. *Extrait du rapport de recherche : « Les incubateurs : émergence d’une nouvelle industrie – Com- paraison des acteurs et de leurs stratégies », Avril 2002. Pour en savoir davantage : http:// www.ladocumentationfrancaise. fr/var/storage/rapports-pub- lics/024000373.pdf
  • 13. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 13
  • 14. 14 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 SOCIÉTÉ LN : Au niveau des Caraïbes, quelles sont les institutions qui seraient prêtes à vous donner un support car elles sont aussi concernées par l’héritage taïno que nous avons tous dans la région. Cuba par exemple? Je ne veux pas parler de la République dominicaine aujourd’hui... pourtant très avancée dans la conservation de la tradition Taïno. GPJ : Nous n’avons pas encore à proprement parler des institutions à Cuba ou dans d’autres régions caribéennes prêtes à donner leur support. Cependant, le projet est déjà bien accueilli pour l’originalité de son domaine d’intervention et nous espérons avoir à nos côtés plusieurs institutions locales et internationales à l’avenir. En effet, il y a peu d’intérêt manifesté à l’égard de l’héritage des Tainos en Haïti, ancêtres de notre culture, contrairement en République voisine et dans d’autres régions en Amérique. Cependant, il y a de bons signaux partis de certains secteurs en Haïti. On commence à prendre conscience de la nécessité de connaître les secrets de la culture ancestrale. Récemment en Haïti, au cours de la période du 6 au 10 mai 2015, ont eu lieu, sous les auspices de l’édition Mémoire d’Encrier de Rodney Saint-Eloi, les nuits amérindiennes, cette fois-ci sous la présidence de la poétesse Joséphine Bacon. Cet événement culturel était intervenu dans le cadre de ce besoin de connaissance et de ralliement des peuples d’Amérique autour de la culture amérindienne. Dans un colloque tenu dans le cadre de ces mêmes activités à la Bibliothèque nationale, Madame Marie Alice Théard a eu à faire une apologie de notre origine amérindienne. Le vaudou, a-t-elle fait savoir, est un répertoire de culture taïno. Il faut noter que le terme indien a été improprement utilisé par les européens notamment les espagnols pour identifier et reconnaître les premiers autochtones en Amérique; étant donné que ceux-là pensaient se retrouver en Inde. Bref, il y a une sorte d’éveil en faveur du retour vers la source car, l’histoire officielle a intoxiqué notre intelligence de certains secrets de la vie des Taïnos. Margareth Papillon dans « la Légende de Quisqueya » permet de se faire une idée des méfaits de nos mépris de nos valeurs culturelles et de notre ignorance des secrets de cette Ile. Et pour cause. Nous nous comportons comme des fils indignes. Ce qui fait qu’Haïti, par malheur, est le seul pays dans les Caraïbes à ne pas honorer la mémoire des Taïnos, car on nous a fait croire, dans l’histoire apprise, que tous les indiens étaient morts avant l’arrivée des contingents africains. Mais nous oublions que beaucoup d’entre eux avaient pris le maquis et ont vécu dans les grottes. Et, ce sont eux qui ont permis aux esclaves rebelles de parcourir tout le pays à travers le réseau de grottes existant sur le territoire qu’eux seuls maîtrisaient. Personne n’a jamais pris le temps d’analyser cette phrase de Dessalines, le père de la Patrie : «Nous avons vengé les indiens et l’Amérique» et personne ne s’est demandé pourquoi, en novembre 1802, Dessalines choisit de faire porter à l’armée le nom d’Incas, fils du Soleil avant de dénommer le pays Ayiti. DANIEL : LE SOLITAIRE LN : Pensez-vous que le docteur Daniel Mathurin, incontestable scientifique, inspiré et visionnaire, n’ait pas aménagé ses arrières par certaines institutions culturelles et scientifiques à caractère nationaliste et que cela puisse handicaper un peu le projet de la Fondation en son nom ? GPJ : Daniel a toujours travaillé en solitaire. Car ces questionnements venaient du plus profond de son être et il se mettait à la tâche 24 heures par jour. Il n’avait pas pris contact avec les institutions culturelles œuvrant en Haïti car il n’avait pas la même méthode d’approche qu’elles. La sienne était multidisciplinaire tandis que celle des autres parlaient d’amalgame. Lorsque Daniel a compris qu’il n’y avait pas d’audience, en Haïti, pour de telles recherches, il s’est tourné vers la République voisine qui l’a bien accueilli car dans ce pays la question taïno a déjà été approfondie. Les scientifiques dominicains travaillant dans ce domaine, connaissent bien l’importance de ce bout de territoire. Et donc, Daniel a su établir des relations de recherche avec Dominicains et en décembre 2012, nous avons été reçus à l’académie dominicaine. Malheureusement, la tragédie causée par l’accident de Daniel a coupé court à cette relation naissante. Cependant, la Fondation est en train de renouer les liens déjà tissés sur l’ensemble du territoire pour une synergie dans la recherche sur les premiers habitants de ce pays, sur les roches étampées et les diverses grottes que recèle cette île merveilleuse. LN :- Depuis l’accident sur l’autoroute de Santo Domingo de votre cher époux, le public a soif d’entendre vos recherches sur les symboles des « vèvès », leurs configurations mathématiques et cosmiques. Où en êtes-vous avec votre équipe de recherches? GPJ : Le problème en Haïti, c’est que les gens vous crachent dessus quand vous leur jetez des perles et vous réclament quand on fait silence.C’estcetteambivalencedans notre comportement qui explique d’ailleurs le piétinement enregistré dans la politique haïtienne et qui freine le développement du pays. Je me rappelle quand on faisait les émissions sur les résultats de nos recherches on nous prenait pour des illuminés. Je peux te dire que nous sommes très loin dans ces recherches et allons bientôt passer dans la phase d’expérimentation de l’effet Kirlian engendré par nos « vèvès ». L’effet Kirlian est la photographie du champ énergétique à haute fréquence émanant d’un corps dû au fait du mouvement des molécules et atomes. Ce sera la preuve que ce sont vraiment des condensateurs de forces astrales. Et nous nous penchons aussi sur l’effet des incantations qui accompagnent le tracé de ces vèvès. Donc, c’est tout un monde de connaissances qui est malheureusement occulté par le travestissement de la pensée en Haïti. VÈVÈ , ADN, HÔTELS LUXUEUX LN : D’où viennent les « vèvès » ? D’Afrique? Des Caraïbes ? Feu Docteur Mathurin parlait de la “route de l’Asson” et liait cela à la configuration de l’ADN. Que pouvez- vous nous dire de plus comme mathématicienne et cosmologue? GPM : Selon les résultats de nos recherches, les « vèvès » sont une combinaison des plus anciennes écritures retrouvées en Afrique, en Europe, en Amérique, en Asie etc. Nous avons compris que ces derniers ont un caractère universel. Mais c’est sur le territoire haïtien seulement que l’on retrouve ses combinaisons géométriques nommées : (Aïzan, Legba, la route de l’Asson, le socle du poteau) etc. Aïzan est le dieu de la médecine et des hommes. Milo Rigaud l’a traduit ainsi : «la double couleuvre de l’oxygène se nomme Aï-zan Tau-Can, mystère du vodou qui indique que, pour accéder aux étoiles, l’animalcule spiriforme de la semence créatrice (voir ici l’ADN) doit se purifier par le feu, sous la forme imaginée du retournement du serpent dans l’atome. C’est cette compréhension de l’Aï-Zan par Milo Rigaud qui nous a conduits à étudier l’Aï-Zan sous cet angle et il avait raison. On peut donc dire que les « vèvès » sont une combinaison des connaissances scripturales ancestrales entre les deux cultures qui se sont imbriquées sur cette île magique qu’est notre Ayiti. LN : La prochaine conférence de la Fondation, c’est pour quand? On a reproché que la Fondation était trop élitiste du fait qu’elle donne ses conférences dans des hôtels huppés de la capitale. Le peuple et la classe moyenne vous attendent car vous semblez aller plus loin que Jacques Roumain ou MiIo Rigaud. GPJ : La première conférence de la Fondation sera prononcée en février 2016. Je dois rappeler à tous, que Daniel et moi avions marché un peu partout à travers le pays pour tenir des conférences aux groupes qui se faisaient le plaisir de nous inviter. Nous avons fait beaucoup de conférences dans le Nord-Ouest, particulièrement à l’Alliance française de Port de Paix, au Cap Haïtien. Il nous fallait expliquer à la population de ces zones les richesses que couve leur sous- sol et ce que cela représente pour la «mafia internationale» à la recherche de ces richesses sur l’ensemble de la planète. Nous avons aussi répondu aux invitations de plusieurs groupes de jeunes comme des clubs littéraires de la capitale et prononcé gracieusement d’innombrables conférences au sein de l’université d’État d’Haïti dans le cadre de la cellule Poto Mitan à la faculté d’Ethnologie. La conférence au Montcel a été une invitation de Madame Michèle Villedrouin qui avait su apprécier à leur juste valeur nos recherches et voulait entreprendre , avec nous des discussions et débats sur ces sujets au sein de la communauté port-au-princienne. Je ne comprends pas pourquoi tu dis que la Fondation est trop élitiste. Dans toutes nos conférences nous avons toujours reçu toutes les couches de la société, certainement ceux qui avaient les mêmes questionnements que nous. Car la grande majorité des «intellectuels haïtiens», ne sont pas vraiment ouverts à ces grands questionnements et boudent toute personne ayant un discours différent. Comme le disait si bien Daniel, pour nous comprendre il faut faire une remise en question de la connaissance acquise.Pour le choix des hôtels, je dois te dire que particulièrement l’hôtel Montana nous offrait toujours gratuitement la salle. Donc, ce n’était pas un choix élitiste de notre part, c’était plutôt une obligation presque familiale. Ici, je crois que l’expression élitiste prise dans un contexte révolutionnaire est tout à fait correct dans la mesure où l’œuvre de la Fondation ne vise qu’à produire un effet cathartique sur le mental haïtien afin de créer la voie à une autre Haïti, l’Ayiti des taïnos. Pour ce faire, cela ne peut être que l’affaire d’une élite agissante travaillant pour le compte et/ou le profit de la majorité. La mémoire tainopar Pierre Clitandre FOCUS L’Ingénieur Ginette Pérodin Mathurin, dans cette deuxième et dernière partie de l’entrevue, parle de l’alliance historique entre les nègres d’Afrique et les indiens Taïnos. Elle souligne les travaux du feu Dr. Mathurin dans le décodage des « vèvès » qui seraient des signes de la civilisation Inca du Pérou. Elle nous fait le portrait d’un Daniel solitaire. Elle donne des précisions sur l’ADN et se défend contre la critique des conférences dans des hôtels luxueux.
  • 15. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 15 SOCIÉTÉ N ous sommes à la Cité des 34 quartiers. Les jeunes de cette zone urbaine fragilisée par toutes les formes de violences sociales, politiques, restent convaincus que leur vie quotidienne sombre au désespoir. Aussi, rien qu’à penser à leur avenir, des sentiments d’incertitude les animent et les rongent profondément. Ces jeunes quittent tôt leurs par- ents pour évoluer dans des bandes ou créer prématurément leurs propres familles. Souvent, ce sont des pères et des mères de plusieurs enfants. Et leur progéniture risque de connaître le même sort qu’eux. N’ayant pas d’accès à l’emploi, au logement, à la santé, à l’éducation, à la formation professionnelle, aux loisirs, ils avouent être victimes de toutes les formes d’exclusion sociale. Quand ils ne sont pas simplement scolarisés, ils se trouvent dans l’obligation d’abandonner l’école. Ils n’ont pas, non plus, la chance d’avoir une formation profession- nelle qui aurait pu leur garantir un emploi et un salaire. Victimes des violences symbol- iques, souvent leurs réactions sont aussi l’expression des violences qui sont sanctionnées par les agents de la répression policière. Certains ont déjà fait la prison qui semble être un passage obligatoire pour ces garçons et ces filles qui se sont accoutumés à vivre comme des fugitifs. Leur vie quotidienne, disent-ils, c’est une tragédie. Dans une pièce de maison, ils sont plus d’une dizaine. Au réveil, ils ont beaucoup de peine à manger car ils ne dis- posent pas de la somme modique de dix gourdes pour se procurer un plat chaud au restaurant populaire Ede pèp implanté à Cité-soleil par l’actuel gouvernement. Entre eux, la solidarité reste la meilleure stra- tégie de survie. L’alcool, le jeu de pocker et de dom- inos, la drogue, et parfois le sport qu’ils aiment, malgré l’absence de centre sportif et de terrain de foot- ball, sont leurs seuls passe-temps pour résister aux conditions de vie infrahumaine qu’ils ont toujours connues depuis leur enfance. Selon l’un d’eux qui opinait sur l’accès aux loisirs, la somme faramineuse qui a été dépensée pour le concert de Lil Wayne et de Chris Brown, aurait pu contribuer à la mise en place d’infrastructures sportives pour les jeunes qui se livrent à la délinquance, à la violence, à la prostitution dans la commune de Cité-soleil. La population de Cité-soleil, con- fient quelques jeunes, ne reçoit aucune aide des autorités étatiques, des organismes internationaux qui auraient pu contribuer à amélio- rer leurs conditions de vie. Les organisations non gouvernemen- tales ne sont pas présentes dans la Cité, en raison de la violence qui s’y est établie. Toutefois, ils disent être reconnaissants des travaux que Hands together et la Fonda- tion Gabrie ont réalisés dans cette commune où les populations sont très vulnérables. Ces jeunes sont marginalisés et ne se représentent que par rapport à la violence, aux malversations politiques dont ils sont parfois les instruments. Ils ne pensent à eux- mêmes que par rapport à leur situ- ation de vulnérabilité économique dont profitent souvent les leaders politiques. Questionnés sur les prochaines élections, ils expriment leurs doutes car ils ne croient pas que celles-ci pourront apporter des solutions à leurs problèmes. Leur citoyenneté, pensent-ils, ne se définit plus par la jouissance des droits sociaux, poli- tiques et économiques. La sociali- sation a fait d’eux des déviants qui semblent ne jamais pouvoir inté- grer la société qui les a toujours rejetés. Leur espoir est qu’un jour les déci- deurs viennent leur offrir d’autres alternatives qui leur permettraient d’avoir un statut social et les détourneraient de tout ce qui est de nature à hypothéquer leur vie. La construction de logements, de centres de formation profession- nelle, de centres de santé, de cen- tres sportifs, devrait être la priorité de ceux qui briguent la présidence pour obtenir les votes de la popula- tion de Cité-soleil et particulière- ment ceux de la population juvé- nile. Car, sans un changement de vision des acteurs politiques et un engagement réel à tenir leurs promesses, il ne faudra point espérer une renaissance ou plutôt une naissance de Cité-soleil dans laquelle tous les jeunes pourront aspirer à un avenir prometteur. Il faut réellement que la jeunesse soit l’avenir de la société haïtienne. Il importe aux autorités d’en pren- dre conscience pour la préparer en conséquence. Voler au secours des jeunes de Cité-soleilpar CHERISCLER Evens JEUNESSE Si la jeunesse représente l’avenir de la société haïtienne, à Cité-Soleil, il y a des jeunes qui ne peuvent plus rêver. Des enfants, l’avenir de Cité Soleil. / Photo : Minustah
  • 16. 16 | N0 39 MERCREDI 15 JUILLET 2015 SOCIÉTÉ I nsalubrité, voilà un mot qui offre une description fidèle de nom- breuses zones de la capitale. Le problème est criant. Les fatras servent même de repères dans cette République bidonvillisée. Certaines fois, les tas d’immondices sont tellement immenses qu’ils obstruent la circulation. Des cartons, des sachets, des bouteilles en plastique…et surtout les fameux « emboités ». Ces assiettes en carton provenant de la République voisine dont nos dirigeants ont interdit l’utilisation sur le territoire national. Tout cela crée un environnement urbain à risque. Les gens seraient obligés de jeter leurs déchets dans les rues par manque de poubelles. « Sim pa jete fatra yo nan lari a, kibò m’ap lage l ? », questionne un commerçant de la zone du Champ de Mars. En effet, l’on peut parcourir plusieurs centaines de mètres sans trouver une poubelle dans la zone. À proximité du stade Sylvio Cator, à la rue de l’Enterrement, l’on rencontre chaque jour une pile de déchets. C’est finalement une référence. L’insalubrité à travers la capitale est devenue, de jour en jour, beaucoup plus inquiétante. Désormais, quand on marche à Port-au-Prince, l’on doit éviter à tout prix de fouler un sachet noir ou même une assiette en carton. Des gens s’en servent pour jeter leurs matières fécales dans les rues. À portail Léogane, l’on peut remar- quer, dès la première seconde passée au lieu où stationnent les bus assurant le trajet Port-au- Prince/Petit-Goâve, que l’endroit se transforme en latrine. En effet, l’on ne peut pas y passer sans renifler l’odeur puante d’excréments jetés dans le canal « bwatchenn ». La sit- uation n’est guère différente à la rue du Centre ou encore à la Grand-Rue. Là, se trouvent des travailleurs, des détaillants fatigués sous le poids du soleil, à toutes les heures de la journée, assiettes en main, cuil- lère dans la bouche à s’alimenter dans l’odeur empestée de ces rues. Les marchandes de nourriture pla- cent leurs tentes dans des espaces utilisés par des gens pour effectuer leurs besoins physiologiques. Certains pensent que ce sont les marchands, eux-mêmes, qui uti- lisent ces lieux à cette fin. « Se yo menm ki nan espas la ankò, se yo ki twalèt ladan », justifient-ils. Mais les marchands défendent : « Se moun ki rete nan zòn lan yo ki plis sal li, yo pa fè twalèt lakay yo », répliquent-ils. Mais ils admettent que certains d’entre eux n’ont pas le choix. « Kèk fwa tou w paka kont moun lan, li paka kite bezwen an touye l », racontent-ils. C’est un problème qui met en jeu la santé des gens qui, pour une raison ou une autre, doivent fréquenter ces lieux. L’État devrait intervenir dans une telle situation s’il veut protéger la santé de ses citoyens. « Il est certain, selon des esprits avisés, que personne ne peut se permettre d’évoluer dans des environnements pareils sans s’exposer de graves problèmes de santé ». Quand l'insalubrité va trop loinpar Ritzamarum ZETRENNE PORT-AU-PRINCE C’est évident que l’insalubrité fait rage à travers la capitale. C’est l’un des problèmes les plus criants de Port-au- Prince. Les fatras servent de repères dans certains endroits de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. / Photo : J.J. Augustin Les nouvelles infections ont chuté de plus d'un tiers depuis 2000 Sources : 20minutes.fr SIDA L es nouvelles infections par le VIH/Sida ont chuté de plus d’un tiers depuis 2000, a annoncé mardi l’ONU, se félici- tant que le monde ait atteint l’objectif du Millénaire pour le développe- ment qui visait à inverser le cours de l’épidémie. Mais pour parvenir à mettre fin à l’épidémie d’ici à 2030, l’ONU demande que près de 32 milliards de dollars (29 milliards d’euros) soient désormais investis chaque année d’ici à 2020 dans la lutte contre le sida, contre 21,7 milliards actuellement. En attendant, «le monde a atteint l’objectif 6 du Millénaire pour le développement. L’épidémie a été enrayée et inversée», a affirmé le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon dans le dernier rapport de l’Onusida. En 2014, 36,9 millions de personnes vivaient avec le sida En 2000, les Nations unies avaient fixé huit grands Objectifs du Millénaire pour 2015, dont combattre le VIH/sida. A cet égard, la lutte acharnée menée par la communauté internationale contre le sida fait figure de succès. Le rapport note que les efforts déployés ont aussi permis d’atteindre la cible fixée en 2011 consistant à mettre 15 millions de personnes sous traitements antirétroviraux (TARV) en 2015, contre seulement 1 million en 2001. En 2014, 36,9 millions de personnes vivaient avec le sida. La même année, 1,2 million de personnes sont décédées de causes liées au sida (une chute de 41 % depuis le pic de 2004), selon le rapport. La tuberculose reste la principale cause de décès parmi les personnes vivant avec le VIH. Une chute spectaculaire chez les enfants Dans le monde, 2 millions de personnes ont été nouvellement infectées en 2014, contre 3,1 millions en 2000, une baisse de 35,5 %. Chez les enfants, la chute est plus spectaculaire encore: -58 %. L’Afrique subsaharienne reste la région la plus touchée, représentant 70% des cas, avec 25,8 millions de personnes vivant avec le VIH/sida l’an dernier. Mais la région Asie/Pacifique, bien que moins affectée avec seulement 5 millions de personnes vivant avec le virus l’an dernier, préoccupe toutefois les experts en raison d’une recrudescence des cas. Les nouvelles infections y ont progressé de 3 % entre 2010 et 2014. La Chine, l’Inde et l’Indonésie représentent 78 % des nouvelles infections dans la région l’an dernier. Il faudra encore débourser 32 milliards de dollars (29 milliards d’euros) par an d’ici à 2020 pour espérer en finir avec le sida d’ici à 2030...
  • 17. MERCREDI 15 JUILLET 2015 N0 39 | 17 CULTURE Miss Anayizz : l'événement incontournable de l'étéPar Elisée Décembre Pour la neuvième année consécutive, Beaudor Communication va encore pimenter l’été avec le plus ancien concours de beauté actif, Miss Anayizz. Ce concours, qui fusionne beauté et intelligence, permet à toutes jeunes filles qui désirent y participer de développer les meilleures de leurs capacités, affirme son initiateur, Gaspard Dorélien. D epuis l’arrêt du concours Miss Vidéomax sur la Chaîne 5, qui par ailleurs ne fonctionne plus, Miss Anay- izz est devenu le leader des concours de beauté. D’année en année, le con- cepteur de ce concours et son staff de réalisation y apportent toujours quelque chose d’inédit. Quant aux postulantes, elles ne ratent jamais l’occasion de s’éclater, malgré parfois le stress qui a tendance à prendre le dessus. « Les inscriptions à Miss Anayizz sont lancées. Les critères sont les mêmes : être âgée entre 17 et 25 ans, être célibataire, avoir un casier judiciaire vierge, être de taille moyenne et avoir un poids ne dépassant pas 130 livres », précise Gaspard Dorélien. En direct sur la Télévision nationale d’Haïti (TNH) et sur la Radio Télévison Caraïbes (RTVC), les émissions de Miss Anayizz sont suivies sur tout le territoire national et aussi dans la diaspora. Chacune de Ces émissions sont postées sur « youtube » afin que les fidèles fans du concours puissent revoir une séance autant de fois qu’ils le désirent. Miss Anayizz, plus qu’un concours de beauté Certains concours internationaux portent l’accent surtout sur de l’apparence physique. Miss Anayizz, en revanche, fusionne beauté et intelligence, affirme Gaspard Dorélien. »Le nouveau format du concours, précise encore M. Dorélien, offre la possibilité à ces jeunes filles d’être plus compétitives, car il laisse à chacune d’elles l’occasion de donner leur opinion, de débattre d’un sujet, de présenter une ville, et tout cela, dans une ambiance de plaisir. Ce nouveau format augmente la chance de chacune de remporter la couronne. » Le concours Miss Anayiz, qui s’étend sur une période de six à huit semaines, donne l’opportunité aux finalistes de visiter les plus envoûtants sites touristiques, la Citadelle, le Palais Sans-Souci, Labadee, la côte des Arcadins et tant d’autres sites encore. Miss Anayiz, plus qu’une couronne « Les dix finalistes retenues poursuivent toutes le même but : remporter la couronne. Mais Miss Anayiz est plus qu’une couronne. C’est aussi un espace où nous préparons chacune de nos postulantes pour le marché du travail. Bon nombre de nos jeunes filles ont été embauchées après avoir participé au concours », signale le présentateur d’ « Une personnalité dit tout ». Il ajoute que grâce à leur partenariat avec l’Université Quisqueya, la Miss et ses deux dauphines ont à droit à une bourse d’étude à l’UNIQ, moyennant qu’elles réussissent le concours d’admission. « À toutes celles qui désirent y participer les inscriptions sont reçues du lundi au vendredi de 9 h a. m. à 5 h p. m., et le samedi de 9 h a. m. à 2 h p. m., à Fotomatik, Univers FM et Radio Télévision Caraïbes. » Miss Anayiz 2014, Fabiaula DUMAS. / Photo: Fotomatik « Jacques Roche, je t'écris cette lettre » Par Carl-Henry PIERRE L es lettres envoyées à ses amis sont ordinairement des lettres fermées. Enveloppées. Une façon de garder l’intimité des dires. Et celle envoyée à Jacques Roche pourtant est ouvertement publique. Ce n’est pas seulement une lettre. C’est tout un alphabet de beauté qui est offert aux yeux de tous. « Jacques Roche, je t’écris cette lettre » est donc un recueil de poèmes de 74 pages de l’éditeur Rodney Saint-Eloi, paru en 2013, sous le label des Édi- tions Mémoire d’encrier. Comment peut-on écrire une lettre à un ami mort pour faire son deuil ? Y a-t-il un pont invisible entre les êtres, morts ou vivants ? C’est une réponse à ce type de question que l’auteur accouche sur les pages du livre. On est dans l’univers de l’hommage. De l’amitié. De l’amour. Donc on est dans le poème, puisque le poème embrasse toute la forme du réel. Le poème de Rodney est tissé dans une perspective de sauver la mémoire de ce journaliste martyr qu’est devenu Jacques Roche à partir de ces actes crapuleux sur sa personne : celui de son Kidnap- ping (le 10 juillet 2005 à Port- au-Prince) et celui de son corps retrouvé inerte (le 14 juillet 2005). Par endroits dans ce poème, Jacques est bel et bien mort pour l’auteur. Dans d’autres fragments, il reste vivant tel un arbre. Son souffle est sur la ville. Sur tout le paysage. C’est sur ce paradoxe qu’est assis le poème. C’était un combattant, ce Jacques, on aura vite compris cela en le lisant. La rébellion semble avoir été son fort. On sent que l’auteur s’attache à une certaine nécessitée de dire. À une certaine transparence de vérité. De justice aussi. L’auteur dit à Jacques dans le texte de ne pas mourir. Dans le texte, l’auteur de Pierres Anonymes dit que toute terre est fruit d’espérance et que Jaques Roche, comme les bourgeons, ne savait pas ce que c’est que mourir et que, même là-haut, ses pieds poudrés toucheront le sol. Rodney demande à l’auteur du poème « Survivre » s’il apprendra l’exil à ses pieds exilés. Entre finesse et tristesse, le poème coule telle une cascade. « Ils t’ont crevé les yeux Tes yeux sondent les consciences Ils se sont vus dans tes yeux clairs Ils n’ont pas aimé ce qu’ils ont vu » « Parlons bas Parlons seul Pour qu’ils ne connaissent jamais Le secret de nos espoirs. » « Jacques Roche, je t’écris cette lettre » semble être un hymne à la lumière. Un texte à lire, surtout en ce mois de juillet qui ramène la naissance (21 juillet 1961) et la décennie de la mort de ce journali- ste, poète et diseur que Jacques fut. Il importe en urgence que le public ait contact avec les textes qu’il avait écrits et ceux qu’il avait dits dans son ardeur de vivant. Il importe d’autant plus qu’il figure parmi les auteurs sur « Ile en Ile », ce site de valorisation des res- sources informatives et culturelles du monde insulaire francophone. Le texte de Rodney Saint-Eloi nous fait voir la plante que Jacques a nourrie de son sang. Et qui dira au poète comment nommer la mort quand le tombeau est celui d’un ami ?