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LE DEVOIR D’INFORMATION DU MEDECIN LIBERAL
              Mise Ă  jour 08 /2010




             Jean VILANOVA – Juriste
           jean.vilanova@ca-predica.fr




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Avant mĂȘme d’ĂȘtre une obligation lĂ©gale et dĂ©ontologique, parler au patient, l’informer des risques qu’il encourt du fait de la stratĂ©gie thĂ©rapeutique envisagĂ©e et de
ceux qui rĂ©sulteraient du refus de sa part de cette stratĂ©gie relĂšve de l’humanisme mĂ©dical. Parce que la mĂ©decine est aussi un art de l’oralitĂ©.

L’humanisme mĂ©dical constitue l’un des fondements sĂ©culaires de la relation de respect et de confiance entre soignant et soignĂ©. InformĂ© de façon claire, loyale et
appropriĂ©e, ce dernier consentira – ou non – aux soins proposĂ©s.

DĂšs lors pourquoi la question du devoir d’information continue-t-elle de donner lieu Ă  des dĂ©bats parfois tumultueux entre mĂ©decins et juristes ?

Tout commence le 25 /02 /1997. La 1Ăšre chambre civile de la Cour de cassation rend alors un arrĂȘt qui soulĂšve l’ire d’une grande partie du corps mĂ©dical. Tandis que
depuis plusieurs dĂ©cennies, en cas de rĂ©clamation, la charge de la preuve du dĂ©faut d’information appartenait au demandeur (le patient), l’arrĂȘt consacre un
principe exactement inverse : c’est dĂ©sormais au praticien de prouver qu’il a bien informĂ© ledit patient. La haute juridiction retient ici la rĂšgle selon laquelle
 « Celui
qui se prĂ©tend libĂ©rĂ© doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. » (art. 1315-2 du code civil)

ConsacrĂ©e un peu plus tard par la loi n° 2002-303 du 4 /03 /2002 relative aux droits des malades et Ă  la qualitĂ© du systĂšme de santĂ©, cette jurisprudence n’en vient
pas moins s’ajouter – injustement d’ailleurs – aux dĂ©cisions parfois incomprises qui jalonnent l’histoire du droit.

Aujourd’hui la question de l’information du patient occupe une place considĂ©rable en responsabilitĂ© mĂ©dicale. D’aucuns, et nous en sommes, y voient un gisement
nouveau, durable et possiblement important de contentieux. D’oĂč, partant du cadre lĂ©gal, la clarification permanente de ses contours Ă  laquelle s’attache la
jurisprudence. Chacun doit savoir ce qu’il en est. Pour preuve, dans un arrĂȘt rĂ©cemment rendu (3 /06 /2010), la Cour de cassation marque une nouvelle avancĂ©e
au-delĂ  du droit pur. On n’accĂšde pas, nous dit-elle – on n’accĂšde plus – impunĂ©ment au corps du patient sans le consentement de celui-ci, fusse pour lui prodiguer
des soins indispensables à sa survie
 Ou quand la morale devient droit !

« L’arrĂȘt fondateur » du 25 /02 /1997 a constituĂ© la premiĂšre pierre d’un Ă©difice jurisprudentiel en permanente Ă©volution depuis. Il faut aujourd’hui constater la
cohĂ©rence et le remarquable Ă©quilibre prĂ©sentĂ© par cet Ă©difice qui marie – nous le dĂ©montrerons – la volontĂ© de prendre en charge la souffrance du patient et le
souci de laisser au médecin toute la sérénité nécessaire à la pratique de son art.




                                                                                                         J.V. – le 10 /08 /2010




                                                                                                                                                                         2
PREAMBULE : UN PRINCIPE SECULAIRE


        Le devoir d’information du mĂ©decin vis Ă  vis de son patient fait partie intĂ©grante de l’acte de soins et doit ĂȘtre accompli Ă  tous les stades de celui-ci.




                        1. En amont du traitement                                                                    2. En cours de traitement

                                                                                                                              

 Information sur la stratĂ©gie thĂ©rapeutique envisagĂ©e, son coĂ»t, les
                                                                                             A chaque nouvelle Ă©tape du traitement
conditions de son remboursement
                                                                                             Lorsque le praticien souhaite modifier ses choix thĂ©rapeutiques
 Risques et Ă©ventuels effets secondaires induits
                                                                                             Lorsqu’un incident survient
 Risques encourus en cas de refus de soins



                                                                       3. A l’issue du traitement

                                                                                  

                                            Information sur les prĂ©cautions Ă  prendre pour une meilleure efficacitĂ© du
                                           traitement dans le temps




L’information dĂ©livrĂ©e au patient doit ĂȘtre loyale, claire et appropriĂ©e (article 35 du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale) afin d’obtenir de sa part un consentement libre et
éclairé sur les soins proposés.




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A. LE TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION PAR LA JURISPRUDENCE : EVOLUTIONS

                                1. Le dĂ©faut d’information est une faute dont il appartient Ă  la victime de rapporter la preuve.
                                                          Cour de cassation – ArrĂȘt du 29 /05 /1951
« Si le contrat qui se forme entre le chirurgien et son client comporte l’obligation pour le praticien de procĂ©der Ă  une opĂ©ration chirurgicale par lui jugĂ©e utile
qu’aprĂšs avoir au prĂ©alable obtenu l’assentiment du malade, il appartient toutefois Ă  celui-ci, lorsqu’il se soumet en pleine luciditĂ© Ă  l’intervention du chirurgien, de
rapporter la preuve que ce dernier a manquĂ© Ă  cette obligation contractuelle en ne l’informant pas de la vĂ©ritable nature de l’opĂ©ration qui se prĂ©parait et en ne
sollicitant pas son consentement à cette opération. »




                              2. La charge de la preuve de l’information incombe dĂ©sormais au praticien – (Cass. 25 /02 /1997)

                                                                               Les faits
Un patient est victime d’une perforation intestinale consĂ©cutive Ă  une coloscopie entreprise pour exĂ©rĂšse de polypes intestinaux. Il reproche au gastro-
entĂ©rologue, non pas une Ă©ventuelle maladresse dans la conduite du geste mais de ne l’avoir pas informĂ© du risque de perforation colique et demande rĂ©paration
financiÚre de son préjudice.
Par arrĂȘt rendu le 5 /07 /1994, la Cour d’appel de Rennes rejette cette demande au motif que le patient est incapable de rapporter la preuve de ce dĂ©faut
d’information de la part de son thĂ©rapeute. En l’occurrence, les juges du fond applique ici strictement la jurisprudence en cours, telle qu’elle a Ă©tĂ© posĂ©e le 29 /05 /
1951. Le patient forme un pourvoi devant la Cour de cassation.

                                                            Cour de cassation – ArrĂȘt H. du 25 /02 1997
La Cour de cassation, dans son arrĂȘt du 25 /02 /1997 opĂšre un revirement jurisprudentiel en cassant l’arrĂȘt rendu par la Cour d’appel de Rennes et en renvoyant
l’affaire devant une Cour d’appel de renvoi (voir 5Ăšme Ă©tape) en ces termes :
« Attendu que celui qui est lĂ©galement ou contractuellement tenu d’une obligation particuliĂšre d’information doit rapporter la preuve de l’exĂ©cution de cette
obligation ;
Attendu qu’à l’occasion d’une coloscopie avec ablation d’un polype, rĂ©alisĂ©e par le docteur C., monsieur H. a subi une perforation intestinale ; que, au soutien de
son action contre ce mĂ©decin, monsieur H. a fait valoir qu’il ne l’avait pas informĂ© du risque de perforation au cours d’une telle intervention ; que la cour d’appel a
Ă©cartĂ© ce moyen et dĂ©boutĂ© monsieur H. de son action au motif qu’il lui appartient de rapporter la preuve de ce que le praticien ne l’avait pas averti de ce risque,
ce qu’il ne faisait pas dĂšs lors qu’il ne produisait aux dĂ©bats aucun Ă©lĂ©ment accrĂ©ditant cette thĂšse ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le mĂ©decin est tenu d’une obligation particuliĂšre d’information vis Ă  vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a
exĂ©cutĂ© cette obligation (soulignĂ© par nous), la cour d’appel a violĂ© le texte susvisĂ©.»




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3. L’obligation d’information n’est pas levĂ©e du seul fait que le risque est de rĂ©alisation exceptionnelle – (Cass. 7 /10 /1998)

                                                                              Les faits
Victime d’une chute ayant provoquĂ© la fracture de la deuxiĂšme vertĂšbre lombaire une patiente, aprĂšs avoir subi un traitement par immobilisation et port d’un
corset consulte un chirurgien en raison d’une cyphose persistante. Celui-ci prĂ©conise une intervention consistant en la mise en place d’un cadre de Hartchild, suivi
dans un second temps d’une greffe vertĂ©brale. A la suite de l’intervention, la patiente se plaint, dĂšs son rĂ©veil, d’un trouble visuel et d’une douleur au niveau de
l’orbite gauche. Une trombophlĂ©bite est diagnostiquĂ©e. Elle aura pour consĂ©quence la perte dĂ©finitive de l’Ɠil gauche par atrophie du nerf optique. La patiente
assigne en rĂ©paration de son prĂ©judice le chirurgien en invoquant notamment un manquement Ă  son devoir d’information.
Par arrĂȘt rendu le 26 /09 /1996, la Cour d’appel de Lyon rejette la demande au motif « 
que l’information du patient n’est exigĂ©e que pour des risques
normalement prĂ©visibles, ce qui n’était pas le cas de la complication post-opĂ©ratoire litigieuse qui bien que connue est trĂšs rare
 » et les juges du fond d’ajouter
« 
que le chirurgien n’avait pas Ă  avertir sa patiente de ce risque afin d’éviter par une inquiĂ©tude inutile de la placer dans un Ă©tat psychologique dĂ©favorable au
bon dĂ©roulement d’une intervention classique. »

                                                           Cour de cassation – ArrĂȘt C. du 7 /10 /1998
Par arrĂȘt rendu le 7 /10 /1998, la Cour de cassation casse l’arrĂȘt de la cour d’appel sur le moyen suivant :
« Hormis les cas d’urgence, d’impossibilitĂ© ou de refus du patient d’ĂȘtre informĂ©, un mĂ©decin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriĂ©e sur
les risques graves affĂ©rents aux investigations et soins proposĂ©s et qu’il n’est pas dispensĂ© de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se rĂ©alisent
qu’exceptionnellement (soulignĂ© par nous). »




                4. Un mĂ©decin n’est pas tenu de rĂ©ussir Ă  convaincre son patient du danger de l’acte qu’il demande – (Cass. 18 /01 /2000)

                                                                              Les faits
Devant subir l’opĂ©ration de la cataracte de son Ɠil droit, une patiente refuse l’anesthĂ©sie gĂ©nĂ©rale proposĂ©e par l’ophtalmologiste. Elle choisit de recourir Ă  une
anesthĂ©sie loco rĂ©gionale non sans avoir Ă©tĂ© prĂ©alablement informĂ©e par le praticien des dangers de cette mĂ©thode. A la suite de l’injection anesthĂ©sique apparaĂźt
un chĂ©mosis hĂ©morragique provoquant la rupture du globe oculaire et la perte de l’usage de l’Ɠil.
La cour d’appel de Lyon, par arrĂȘt rendu le 14 /05 /1997 retient la responsabilitĂ© du mĂ©decin. Elle considĂšre que la faute de celui-ci consiste dans le fait
« de n’avoir pas Ă©tĂ© en mesure de convaincre sa patiente des dangers prĂ©sentĂ©s par un tel acte. »

                                                           Cour de cassation – ArrĂȘt Y. du 18 /01 2000
ArrĂȘt cassĂ© le 18 /01 /2000, la Cour de cassation estimant
 « qu’un mĂ©decin n’est pas tenu de rĂ©ussir Ă  convaincre son patient du danger de l’acte mĂ©dical qu’il
demande
 » En statuant ainsi, la Cour de cassation rĂ©Ă©value la place du patient au sein de la sphĂšre de soins. La prise de dĂ©cision relative Ă  l’acte mĂ©dical est
apprĂ©hendĂ©e comme le fruit d’un dialogue, le dernier mot restant au malade dĂ»ment informĂ© des risques encourus.




                                                                                                                                                                    5
5. Il n’y a pas de responsabilitĂ© du mĂ©decin pour dĂ©faut d’information s’il apparaĂźt que mĂȘme informĂ©, le patient n’aurait pas refusĂ© l’opĂ©ration –
                                                                    (Cass. 20 /06 /2000)

                                                                               Les faits
 Il s’agit ici des suites de l’affaire traitĂ©e au paragraphe 2 (arrĂȘt H. du 25 /02 1997), la Cour de cassation ayant cassĂ© l’arrĂȘt de la Cour d’appel de
Lyon et renvoyĂ© l’affaire devant une autre cour d’appel afin qu’elle soit rejugĂ©e conformĂ©ment Ă  ses conclusions.
C’est Ă  la Cour d’appel d’Angers qu’est dĂ©volue cette mission. Celle-ci ne se contente pas de suivre, au mot prĂšs, les attendus de la Haute juridiction. Elle va plus
loin dans ses investigations. Ayant constatĂ© que le pĂšre du patient Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© d’un cancer du cĂŽlon, elle considĂšre dans son arrĂȘt rendu le 18 /09 /1998 que
mĂȘme informĂ© du risque de perforation (ce qui n’avait pu ĂȘtre prouvĂ© par le mĂ©decin), le patient n’aurait refusĂ© ni l’examen, ni l’exĂ©rĂšse du polype de crainte qu’il
ne dĂ©gĂ©nĂšre en cancer. Selon la Cour d’appel d’Angers, il n’y a donc pas de lien de causalitĂ© entre l’absence d’information et le prĂ©judice. A l’instar de la Cour
d’appel de Lyon, mais sur un motif diffĂ©rent, elle rejette donc la demande du plaignant qui, une nouvelle fois, forme un pourvoi en cassation.

                                                  Cour de cassation ; second pourvoi – ArrĂȘt H. du 20 /06 /2000
Cette fois la Cour de cassation consacre l’arrĂȘt d’appel. Elle prĂ©cise que pour obtenir rĂ©paration
 « le patient doit Ă©tablir que s’il avait Ă©tĂ© dĂ»ment informĂ©, il
aurait fait un choix diffĂ©rent
 » Elle rappelle Ă©galement le pouvoir souverain des juges de cours d’appel qui
 « doivent prendre en considĂ©ration l’état de santĂ©
du patient ainsi que son évolution prévisible, sa personnalité, les raisons pour lesquelles les investigations ou les soins à risque lui sont proposés, ainsi que les
caractéristiques de ces investigations, de ces soins et de ces risques. »
Il est Ă©vident qu’à ce stade les hauts magistrats cherchent le juste Ă©quilibre entre le droit rĂ©galien dont dispose le patient d’ĂȘtre informĂ© et le devoir du mĂ©decin de
tout tenter pour le guĂ©rir. Dans une certaine mesure, la pression Ă  laquelle se voyaient soumis les mĂ©decins depuis l’arrĂȘt du 25 /02 1997 se relĂąche.




                   6. La violation du devoir d’information ne peut ĂȘtre sanctionnĂ©e qu’au titre de la perte de chance – (Cass. 7 /12 /2004)

                                                                               Les faits
A la suite d’une tympanoplastie, un patient prĂ©sente une paralyse faciale rĂ©sultant de l’opĂ©ration. La responsabilitĂ© du praticien est recherchĂ©e au motif d’un
manquement Ă  son devoir d’information sur le risque ainsi encouru puis rĂ©alisĂ©. Par arrĂȘt rendu le 28 /11 /2001, La Cour d’appel de Rennes estime cette
responsabilitĂ© engagĂ©e et condamne le praticien Ă  rĂ©parer l’entier prĂ©judice liĂ© Ă  la paralysie faciale. Le praticien forme un pourvoi en cassation.

                                                            Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 7 /12 /2004
La Cour de cassation casse l’arrĂȘt d’appel : « 
 une obligation d’information ne peut ĂȘtre sanctionnĂ©e qu’au titre de la perte de chance subie par le patient
d’échapper par une dĂ©cision peut-ĂȘtre plus judicieuse, au risque qui s’est finalement rĂ©alisé  le dommage correspond alors Ă  une fraction des diffĂ©rents chefs de
prĂ©judice subis qui est dĂ©terminĂ©e en mesurant la chance perdue et ne peut ĂȘtre Ă©gale aux atteintes corporelles rĂ©sultant de l’acte mĂ©dical
 »
DĂ©cision importante. En considĂ©rant que le dommage rĂ©sultant du dĂ©faut d’information ne se rĂ©pare que par la perte de chance, la haute cour allĂšge la charge qui
pĂšse sur le praticien. La perte de chance, perte d’un espoir et non d’un droit implique en effet une indemnisation toujours partielle du prĂ©judice.




                                                                                                                                                                        6
A ce stade, la jurisprudence a accompli un important travail. Toutefois, certains aspects mériteraient de plus amples éclaircissements, notamment en
matiĂšre d’apport de la preuve par le praticien du respect de son obligation. Mais avant d’aborder ce point aujourd’hui clarifiĂ©, il convient de comparer la
question du devoir d’information telle qu’elle nous est prĂ©sentĂ©e par la jurisprudence avec les dispositions du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale puis avec
la loi du 4 /03 /2002 relative aux droits des malades et à la qualité du systÚme de santé.




                                                                        ♩♩♩♩♩♩




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B. LE TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION PAR LA DEONTOLOGIE MEDICALE

Art. 35 du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale – Information du patient
« Le mĂ©decin doit Ă  la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriĂ©e sur son Ă©tat, les
investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalitĂ© du patient dans ses explications et
veille à leur compréhension.
Toutefois, dans l’intĂ©rĂȘt du malade et pour des raisons lĂ©gitimes que le praticien apprĂ©cie en conscience, un malade peut ĂȘtre tenu dans
l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic graves, sauf dans les cas oĂč l’affection dont il est atteint expose les tiers Ă  un risque de
contamination.
Un pronostic fatal ne doit ĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ© qu’avec circonspection, mais les proches doivent en ĂȘtre prĂ©venus, sauf exception ou si le malade a
prĂ©alablement interdit cette rĂ©vĂ©lation ou dĂ©signĂ© les tiers auxquels elle doit ĂȘtre faite. »



                Art. 36 du code de déontologie médicale - Consentement
                « Le consentement de la personne examinĂ©e ou soignĂ©e doit ĂȘtre recherchĂ© dans tous les cas.
                Lorsque le malade, en Ă©tat d’exprimer sa volontĂ©, refuse les investigations ou le traitement proposĂ©, le mĂ©decin doit respecter ce refus aprĂšs
                avoir informé le malade de ses conséquences.
                Si le malade est hors d’état d’exprimer sa volontĂ©, le mĂ©decin ne peut intervenir sans que ses proches aient Ă©tĂ© prĂ©venus et informĂ©s, sauf
                urgence ou impossibilité.
                Les obligations du mĂ©decin Ă  l’égard du patient lorsque celui-ci est un mineur ou un majeur protĂ©gĂ© sont dĂ©finies Ă  l’article 42. »




   Certains auteurs ont cru dĂ©celer une diffĂ©rence d’apprĂ©ciation entre dĂ©ontologie et jurisprudence quant au pĂ©rimĂštre de l’information destinĂ©e au
malade. Selon eux, la jurisprudence en fixant la rĂšgle d’une information Ă©largie aux risques exceptionnels entrait en contradiction avec la dĂ©ontologie
qui, sauf le risque d’exposition de tiers Ă  une contamination permet de taire certaines informations dans l’intĂ©rĂȘt mĂȘme du malade et pour des raisons
légitimes.

Une telle contradiction, si elle existait, ferait dĂ©sordre. Il n’en est rien. Tant pour les juges de droit commun (arrĂȘt du 7 /10 /1998 Ă©noncĂ© plus haut) que
pour les rĂ©dacteurs du code de dĂ©ontologie, l’information dispensĂ©e doit s’avĂ©rer « loyale, claire et appropriĂ©e » Ă  l’état du malade. Une information
appropriĂ©e Ă  l’état du malade signifie une information adaptĂ©e. On n’informe pas de la mĂȘme façon un patient victime d’une entorse Ă  la suite d’un
accident de ski et un autre qui développe un cancer généralisé.

Un arrĂȘt rendu le 23 /05 /2000 par la Cour de cassation confirme la parfaite concordance de vue des hauts magistrats avec la dĂ©ontologie.




                                                                                                                                                                 8
La limitation de l’information due par un praticien Ă  son patient en matiĂšre de diagnostic est lĂ©gitime – (Cass. 23 /05 /2000)

                                                                               Les faits
En septembre 1986, un patient ĂągĂ© de 53 ans et dont la situation professionnelle est prĂ©caire consulte un psychiatre en raison d’une forte anxiĂ©tĂ©. Un traitement
est entrepris. Quelques mois plus tard, en avril 1987, l’aggravation de l’état dĂ©pressif du patient entraĂźne son hospitalisation dans une clinique oĂč est posĂ© le
diagnostic de psychose maniaco-dépressive. Le psychiatre décide de ne pas en informer son patient.
Une phase d’amĂ©lioration temporaire intervient mais en octobre 1990 le praticien Ă©tablit un certificat mĂ©dical d’invaliditĂ© Ă  90 % qui permet au patient de faire
valoir ses droits auprĂšs des organismes sociaux dont il relevait et des assurances couvrant les emprunts qu’il avait contractĂ©s. Il est mĂ©dicalement acquis que
l’invaliditĂ© est consĂ©cutive Ă  la psychose maniaco-dĂ©pressive diagnostiquĂ©e en 1987 (lien de causalitĂ©).
En janvier 1996, le patient reproche Ă  son mĂ©decin ne n’avoir pas rĂ©vĂ©lĂ© le diagnostic de sa maladie dĂšs 1987 et soutient que ceci l’a privĂ© des possibilitĂ©s de
faire valoir ses droits Ă  une pension d’invaliditĂ©, Ă  un complĂ©ment de pension de retraite et Ă  la prise en charge par les assurances des Ă©chĂ©ances de prĂȘts.
Il estime le montant de son prĂ©judice Ă  304 898 € (2 000 000 FRF). DĂ©boutĂ© par le Tribunal de Grande Instance puis par la Cour d’appel de Besançon (arrĂȘt du
30 /04 1998), il forme un pourvoi devant la Cour de cassation.

                                                           Cour de cassation – ArrĂȘt D. du 23 /05 /2000
La Cour de cassation, dans son arrĂȘt rendu le 23 /05 /2000 validera l’arrĂȘt de la cour d’appel aux motifs suivants :
Le Code dĂ©ontologie mĂ©dicale
 « autorise le mĂ©decin Ă  limiter l’information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave ; que si une telle limitation doit
ĂȘtre fondĂ©e sur des raisons lĂ©gitimes et dans l’intĂ©rĂȘt du patient, cet intĂ©rĂȘt devant ĂȘtre apprĂ©ciĂ© en fonction de la nature de la pathologie, de son Ă©volution
prĂ©visible et de la personnalitĂ© du malade, la cour d’appel a, sans dĂ©naturation, procĂ©dĂ© Ă  la recherche qu’il lui est reprochĂ© d’avoir omise ; qu’elle a, en effet, par
motifs propres et adaptĂ©s, constatĂ© que l’évolution sous traitement d’une psychose maniaco-dĂ©pressive ne pouvait ĂȘtre Ă©valuĂ©e avant plusieurs annĂ©es, l’état du
patient ayant d’ailleurs connu une nette amĂ©lioration en 1988 et 1989, et que la rĂ©vĂ©lation de ce diagnostic devait ĂȘtre faite avec prudence compte tenu des
phases mĂ©lancoliques et d’excitation maniaque ; qu’ayant ainsi souverainement estimĂ© que l’intĂ©rĂȘt du malade justifiait la limitation de l’information quant au
diagnostic, la cour d’appel a pu dĂ©cider que le praticien n’avait pas commis de faute
 »




                                                                              ♩♩♩♩♩♩




                                                                                                                                                                           9
C. LE TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION DANS LE CADRE DE LA LOI DU 4 /03 /2002

Parmi de nombreuses autres dispositions, la loi du 4 /03 /2002 relative aux droits des malades et à la qualité du systÚme de santé a vocation à redéfinir, de façon
durable, le cadre gĂ©nĂ©ral de la responsabilitĂ© mĂ©dicale. Le devoir d’information est abordĂ© Ă  l’article 11 de ce texte et donne lieu Ă  l’insertion des nouveaux articles
L.1111-1 et suivants au code de la santĂ© publique. La reconnaissance du droit de toute personne Ă  ĂȘtre informĂ©e sur son Ă©tat de santĂ© est consacrĂ©e.




Le contenu de l’information
Il porte sur les investigations, traitements ou actions de prévention proposés, leur utilité, leur urgence, leurs conséquences, les
risques fréquents ou graves normalement prévisibles, les autres solutions possibles, les conséquences prévisibles en cas de
refus. La volontĂ© d’une personne d’ĂȘtre tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit ĂȘtre respectĂ©e sauf lorsque
des tiers sont exposés à un risque de transmission.
L’information porte aussi, avant la dĂ©livrance des soins sur leur coĂ»t et les conditions de leur remboursement.




              La preuve de l’information
              En cas de litige, il appartient au professionnel de santĂ© d’apporter la preuve que l’information a Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©e Ă  l’intĂ©ressĂ© dans les
              conditions prĂ©vues par la loi. Cette preuve peut ĂȘtre apportĂ©e par tout moyen.




                             Informer pour recueillir le consentement du patient
                             Aucun acte mĂ©dical ne peut ĂȘtre pratiquĂ© sans le consentement libre et Ă©clairĂ© de la personne et ce consentement peut ĂȘtre
                             retirĂ© Ă  tout moment. Ceci ne concerne bien Ă©videmment pas l’urgence.
                             Le mĂ©decin doit respecter la volontĂ© du patient aprĂšs l’avoir informĂ© des consĂ©quences de son choix. Si la volontĂ© du patient de
                             refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger, le mĂ©decin doit tout mettre en Ɠuvre pour le convaincre d’accepter
                             les soins.
                             Sauf urgence, aucune intervention ne peut ĂȘtre faite sur une personne hors d’état d’exprimer sa volontĂ© sans avoir au prĂ©alable
                             consulté sa famille ou un proche.




                                                                                                                                                                     10
TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION
                                      TABLEAU COMPARATIF ENTRE LA JURISPRUDENCE ET LA LOI


                                    Cour de cassation                                                Loi du 4 /03 /2002
                          Jurisprudence – ArrĂȘt H. du 25 /02 /1997                        Art. L.1111-1 Code de la santĂ© publique

                 La charge de la preuve appartient au praticien                 La charge de la preuve appartient au praticien

                 L’information porte sur les risques graves affĂ©rents aux L’information porte sur les risques frĂ©quents ou graves
                 investigations et soins proposés et sur ceux qui, normalement prévisibles

                 exceptionnels, sont susceptibles de mettre en danger la vie ou
                 la santé du patient


                 La preuve de l’information peut ĂȘtre apportĂ©e par tout moyen   La preuve de l’information peut ĂȘtre apportĂ©e par tout moyen




   Ceux, nombreux dans le monde de la santĂ© qui espĂ©raient une remise en cause par la loi de la jurisprudence relative Ă  l’inversion de la charge de la
preuve en matiĂšre d’information seront déçus. La loi en effet consacre la jurisprudence qui l’a prĂ©cĂ©dĂ©e. L’harmonie s’avĂšre ainsi totale entre les deux
sources du droit.

MĂȘme au niveau du contenu de l’information il n’existe aucune diffĂ©rence, en dĂ©pit des apparences, entre la Cour de cassation et le lĂ©gislateur. Les
hauts magistrats Ă©voquent une nĂ©cessaire information sur « les risques graves
 et ceux qui, exceptionnels sont susceptibles de mettre en danger la vie
ou la santĂ© du patient » tandis que la loi prĂ©voit l’information sur « les risques frĂ©quents ou graves normalement prĂ©visibles. »

Or, un risque exceptionnel grave n’en est pas moins connu. DĂšs lors, puisqu’il est connu, ne devient-il pas « normalement prĂ©visible » ? Gageons que
certaines juridictions ne manqueront pas de s’interroger sur ce point. Selon nous, la question de l’information sur les risques exceptionnels n’a pas Ă©tĂ©
écartée par la loi.

Enfin, que signifie « tout moyen » en matiĂšre d’apport de la preuve ?




                                                                          ♩♩♩♩♩♩




                                                                                                                                                      11
D. LA PREUVE DE L’ACCOMPLISSEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION

                                                                       RAPPEL PREALABLE
                                                                                                                                      

   L’information doit ĂȘtre loyale, claire et appropriĂ©e L’information est donnĂ©e au cours d’un entretien La charge de la preuve de l’information incombe au
   (Cour de cassation et Code de déontologie)           individuel (loi du 4 /03 /2002)                  praticien par tout moyen (Cour de cassation et loi)



La loi du 4 /03 /2002 instaure désormais une rÚgle unique se situant dans une proche continuité des dispositions antérieures et dont les juges devront désormais
vĂ©rifier la bonne application. Elle tend Ă  renforcer le caractĂšre d’oralitĂ© de l’information ; l’écrit n’en est pas pour autant exclu, mĂȘme s’il ne saurait constituer un
Ă©lĂ©ment probant de preuve. Quant Ă  la preuve proprement dite, elle peut et doit ĂȘtre rapportĂ©e par tous moyens ainsi que l’exigent ensemble la loi et la
jurisprudence.



                                        La preuve de l’information peut ĂȘtre faite par tous moyens – (Cass. 14 /10 /1997)

                                                                               Les faits
 Une patiente de 28 ans dĂ©cĂšde des suites d’une embolie gazeuse aprĂšs avoir subi une cƓlioscopie. Sa famille assigne le chirurgien au motif d’un dĂ©faut
 d’information de la patiente sur le risque d’embolie gazeuse liĂ© Ă  l’opĂ©ration.
 Dans un arrĂȘt rendu le 31 /05 /1995, la Cour d’appel de Rennes rejette la demande de la famille. Pour les juges du fond, le fait que la patiente exerçait la
 profession de laborantine au sein mĂȘme de l’établissement oĂč avait eu lieu l’opĂ©ration, qu’elle s’était entretenue Ă  plusieurs reprises avec le mĂ©decin et avait enfin
 pris sa dĂ©cision aprĂšs une longue rĂ©flexion en manifestant de l’anxiĂ©tĂ© avant l’intervention constituent autant d’élĂ©ments de prĂ©somptions tendant Ă  prouver que
 l’information sur le risque d’embolie gazeuse lui avait bien Ă©tĂ© donnĂ©e.

                                                            Cour de cassation – ArrĂȘt G. du 14 /10 /1997
 A la suite du pourvoi formĂ© devant elle par la famille de la dĂ©funte, la Cour de cassation consacre cet arrĂȘt par sa propre dĂ©cision du 14 /10 /1997 dans les termes
 suivants :
 « S’il est exact que le mĂ©decin a la charge de prouver qu’il a bien donnĂ© Ă  son patient une information loyale, claire et appropriĂ©e sur les risques des
 investigations ou soins qu’il propose, de façon Ă  lui permettre d’y donner un consentement ou un refus Ă©clairé  la preuve de cette information peut ĂȘtre donnĂ©e
 par tous moyens (soulignĂ© par nous). La Cour d’appel ayant constatĂ© qu’il rĂ©sultait des piĂšces produites que la patiente (dĂ©cĂ©dĂ©e des suites d‘une embolie
 gazeuse), qui exerçait la profession de laborantine titulaire dans le centre hospitalier oĂč avait eu lieu la cƓlioscopie, avait eu divers entretiens avec son mĂ©decin,
 pris sa dĂ©cision aprĂšs un temps de rĂ©flexion trĂšs long et manifestĂ© de l’hĂ©sitation et de l’anxiĂ©tĂ© avant l’opĂ©ration, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain
 d’apprĂ©ciation que la cour d’appel a retenu que cet ensemble de prĂ©somptions dĂ©montrait que le mĂ©decin gynĂ©cologue avait informĂ© sa patiente du risque grave
 d’embolie gazeuse inhĂ©rent Ă  la cƓlioscopie. »




                                                                                                                                                                      12
L’apport de la preuve, par « tous moyens » donc, nĂ©cessite la constitution Ă  charge du mĂ©decin d’un faisceau de prĂ©somptions qualifiĂ© par la jurisprudence de
« graves, prĂ©cises et concordantes ». Il est constituĂ© d’élĂ©ments divers, matĂ©riels (fiche d’information, dossier mĂ©dical) ou non (dĂ©lai de rĂ©flexion). Un seul parmi
ces Ă©lĂ©ments n’a pas valeur de preuve. C’est leur conjonction, le fameux faisceau qui, en l’espĂšce, l’emporte.



La fiche d’information
En l’espĂšce, une fiche d’information remise au patient et signĂ© par lui sur les risques encourus du fait du traitement choisi et de
ceux encourus en cas de refus de soins n’est pas en soi une preuve ; tout au plus une prĂ©somption.
Quant au devis prĂ©alable, imposĂ© ou non par la rĂ©glementation et remis au patient, il n’a pas davantage valeur de preuve que
l’information a bien Ă©tĂ© donnĂ©e. Un tel document se situe sur le seul terrain Ă©conomique.




              Le dossier médical
              Les dispositions prévues dans le cadre de la loi du 4 /03 /2002 relatives à la mise en place, la tenue et la remise au patient
              demandeur de son dossier mĂ©dical ont pu ĂȘtre perçues – Ă  tort – par certains mĂ©decins comme, sinon coercitives, du moins
              susceptibles de favoriser un sentiment de dĂ©fiance du patient Ă  leur endroit. Chacun aujourd’hui peut se rendre compte qu’il n’en
              n’était rien, ni dans l’esprit, ni dans la lettre. Mieux, avec le recul, on perçoit Ă  quel point le dossier mĂ©dical est susceptible de
              constituer non pas une preuve, mais un élément assez déterminant de présomption tendant à manifester le respect par le
              mĂ©decin de son devoir d’information. Puisque doivent figurer dans ce dossier toutes les donnĂ©es objectives liĂ©es Ă  l’état de santĂ©
              du patient à la suite des examens successifs, des soins prodigués et la constatation de leurs effets, nous pensons que se trouve
              dÚs lors décrit dans ce document, ou à tout le moins résolument ébauché, le cadre du colloque singulier.




                            Le délai de réflexion
                            Le dĂ©lai de rĂ©flexion peut ĂȘtre rĂ©glementaire. C’est notamment le cas en chirurgie esthĂ©tique. Le dĂ©cret n° 2005- 777 du
                            11 /07 /2005 prĂ©voit un dĂ©lai de rĂ©flexion de quinze jours, sans qu’il soit possible d’y dĂ©roger aprĂšs la remise du devis dĂ©taillĂ© par
                            le chirurgien Ă  son patient. Mais hors les cas oĂč la rĂ©glementation l’impose et pour autant bien entendu que cela ne n’aggrave en
                            rien l’état de santĂ© du patient, un dĂ©lai de rĂ©flexion peut aussi lui ĂȘtre proposĂ©. Un document Ă©crit l’informe alors des risques qu’il
                            encourt du fait de l’intervention envisagĂ©e. Le patient signe ce document qui stipule par ailleurs que, durant la pĂ©riode de
                            réflexion, le praticien reste à sa disposition pour toutes informations complémentaires.



Cette construction fera l’objet d’un nouvel arrĂȘt rendu par la haute Juridiction qui, en parachevant le travail entrepris depuis l’arrĂȘt fondateur du 25 /02 /1997,
dĂ©finira prĂ©cisĂ©ment les Ă©lĂ©ments constitutifs du faisceau de prĂ©somption en matiĂšre d’apport de la preuve.




                                                                                                                                                                      13
La jurisprudence dĂ©finit les Ă©lĂ©ments du « tous moyens » en matiĂšre de preuve de l’information – (Cass. 4 /01 /2005)

                                                                                 Les faits
 AprĂšs avoir accouchĂ© d’un enfant trisomique, une patiente assigne son gynĂ©cologue. Elle reproche Ă  celui-ci – il s’en dĂ©fend – de ne l’avoir pas informĂ© de la
 nĂ©cessitĂ© d’une amniocentĂšse alors mĂȘme qu’elle suivait une grossesse Ă  risque.
 DĂ©boutĂ©e en appel, la patiente forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Dans son arrĂȘt rendu le 4 /01 /2995, la 1Ăšre chambre civile de la Haute Juridiction
 rejette ce pourvoi au motif que le mĂ©decin a bien prouvĂ© la dĂ©livrance de l’information permettant la patiente de consentir ou refuser l’amniocentĂšse.

                                                              Cour de cassation – ArrĂȘt G. du 4 /01 /2005
 « 
 Le mĂ©decin prouve par tous moyens la dĂ©livrance de l’information permettant au patient d’émettre un consentement ou un refus Ă©clairĂ© quant aux
 investigations et soins auxquels il est possible de recourir
 Il rĂ©sultait des attestations produites par la patiente, ses dĂ©clarations au cours de l’expertise et du
 dossier mĂ©dical que la patiente avait Ă©tĂ© particuliĂšrement sensibilisĂ©e Ă  l’éventualitĂ© de l’examen dont il s’agit
 et que le refus de la patiente figurait dans la lettre
 adressĂ© pour ce motif par le mĂ©decin Ă  une consƓur en vue d’une Ă©chographie de substitution
 »




    L’arrĂȘt du 4 /01 /2005 est d’une grande portĂ©e. Se trouvent enfin Ă©numĂ©rĂ©s les moyens de preuve : attestations produites par la patiente, ses
dĂ©clarations au cours de l’expertise, examen du dossier mĂ©dical et, fait nouveau, la lettre Ă©crite par le mĂ©decin Ă  sa consƓur notifiant le refus de la
patiente de subir une amniocentĂšse. En droit, il s’agit d’une preuve dite « auto-constituĂ©e. »

Certes, ce n’est pas cette preuve auto-constituĂ©e qui exonĂšre le praticien poursuivi. L’exonĂ©ration repose toujours sur le fameux faisceau de
prĂ©somptions « graves, prĂ©cises et concordantes » et la preuve auto-constituĂ©e n’est qu’un Ă©lĂ©ment parmi d’autres (le dossier mĂ©dical, les dĂ©clarations
de la patiente, etc.) de ce faisceau.

C’est pourquoi prĂ©sentĂ©e comme argument unique, cette preuve ne suffirait bien entendu pas Ă  emporter la conviction du magistrat. Il n’empĂȘche. Pour
autant que cette jurisprudence se confirme, voilà désormais matiÚre à alléger sensiblement la charge de la preuve incombant au professionnel de santé.




                                                                                                                                                                         14
E. INDEMNISATION DU DEFAUT D’INFORMATION : RESPONSABILITE MEDICALE ET ONIAM


  La perte de chance nĂ©e du dĂ©faut d’information implique une rĂ©paration intĂ©grale du dommage entre le praticien et l’ONIAM – (Cass. 11 /03 /2010)

                                                                               Les faits
OpĂ©rĂ© d’une hernie discale, un patient reste paralysĂ© des membres infĂ©rieurs. Avant l’intervention, il avait signĂ© un consentement type faisant Ă©tat de
« complications y compris vitales » sans qu’elles soient nommĂ©es. Le dĂ©lai de rĂ©flexion entre la signature et l’intervention a Ă©tĂ© de 12 jours. Le patient assigne le
chirurgien et l’ONIAM devant le TGI de Marseille.
Le TGI met le chirurgien hors de cause. Au vu des expertises, il est intervenu conformĂ©ment aux donnĂ©es de la Science. Le TGI met Ă  la charge de l’ONIAM la
rĂ©paration intĂ©grale du prĂ©judice (alĂ©a thĂ©rapeutique). L’ONIAM interjette appel.
Par arrĂȘt du 10 /09 /2008, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence infirme le jugement. Le praticien n’a pas commis de faute mĂ©dicale mais il a failli Ă  son devoir
d’information crĂ©ant, pour le patient, une perte de chance d’échapper au prĂ©judice. Qui plus est, selon la cour, l’état du patient ne justifiait pas l’urgence de
l’intervention. Et ce patient a Ă©tĂ© privĂ© du temps de rĂ©flexion suffisant pour dĂ©cider d’accepter ou non le risque. La rĂ©paration du dommage nĂ© du dĂ©faut
d’information est Ă©valuĂ©e Ă  80 %. Quant Ă  l’ONIAM, il est mis hors de cause car l’indemnisation par le biais de la solidaritĂ© nationale ne peut ĂȘtre que subsidiaire.
Le chirurgien et son assureur forment un pourvoi devant la Cour de cassation. Ils reprochent Ă  la cour d’appel sa dĂ©cision de condamner le praticien alors que le
patient avait Ă©tĂ© informĂ© du risque de paraplĂ©gie inhĂ©rent au geste opĂ©ratoire et que ce geste, appropriĂ©, avait Ă©tĂ© accompli dans les rĂšgles de l’art. La victime
forme quant Ă  elle un pourvoi incident contre la dĂ©cision d’appel d’écarter l’ONIAM de la rĂ©paration du prĂ©judice non indemnisĂ© par l’assureur du chirurgien
(20 %).

                                                           Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 11 /03 /2010
La haute cour rejette le pourvoi principal formĂ© par le chirurgien et son assureur. Elle revanche, elle accueille le pourvoi incident en cassant l’arrĂȘt d’appel sur la
dĂ©cision des juges du fond d’écarter l’ONIAM du complĂ©ment d’indemnisation au motif qu’il ne peut ĂȘtre que subsidiaire.
Sur le moyen du pourvoi :
« 
 attendu que la cour d’appel a tout d’abord, pour Ă©carter toute faute diagnostique ou opĂ©ratoire de M. X (le chirurgien), retenu que l’intervention chirurgicale
Ă©tait une rĂ©ponse thĂ©rapeutique adaptĂ©e, mĂȘme si la nĂ©cessitĂ© immĂ©diate n’en Ă©tait pas justifiĂ©e
 qu’elle a ensuite constatĂ© qu’en raison du court laps de temps
qui avait sĂ©parĂ© la consultation initiale et l’opĂ©ration, M. Y (le patient) n’ayant reçu aucune information sur les diffĂ©rentes techniques envisagĂ©es, les risques de
chacune et les raisons du choix de M. X pour l’une d’entre elles, n’avait pu bĂ©nĂ©ficier d’un dĂ©lai de rĂ©flexion pour mĂ»rir sa dĂ©cision
 ce dont il rĂ©sultait qu’en
privant M. Y de la facultĂ© de consentir d’une façon Ă©clairĂ©e Ă  l’intervention, M. X avait manquĂ© Ă  son devoir d’information
 il a privĂ© M. Y d’une chance
d’échapper Ă  une infirmité 
Sur le moyen du pourvoi incident :
« Ne peuvent ĂȘtre exclus du bĂ©nĂ©fice de la rĂ©paration au titre de la solidaritĂ© nationale les prĂ©judices non indemnisĂ©s ayant pour seul origine un accident non
fautif ;

 que pour rejeter la demande dirigĂ©e par M. Y contre l’ONIAM
 l’arrĂȘt retient qu’une faute a Ă©tĂ© retenue Ă  l’encontre du praticien, l’indemnisation est Ă  la
charge de ce dernier, l’obligation d’indemnisation par la solidaritĂ© nationale n’étant que subsidiaire ; Qu’en statuant ainsi alors que l’indemnitĂ© allouĂ©e Ă  M. Y avait
pour objet de rĂ©parer le prĂ©judice nĂ© d’une perte de chance d’éviter l’accident mĂ©dical litigieux, accident non imputable Ă  une faute de M. X Ă  l’encontre duquel
avait Ă©tĂ© exclusivement retenu un manquement Ă  son devoir d’information

Par ces motifs
 Casse et annule mais seulement en sa disposition mettant hors de cause l’ONIAM
 »




                                                                                                                                                                      15
Personne ne s’y trompe. L’arrĂȘt de cassation du 11 /03 /2010 (1Ăšre ch. civ.) marque une nouvelle inflexion dans l’approche par les hauts magistrats de
l’incontournable question de l’information due au patient.

En rejetant le principe de subsidiaritĂ© de l’ONIAM au profit du principe de complĂ©mentaritĂ© entre celui-ci et la RC du praticien, la cour fixe une rĂšgle
nouvelle permettant une totale indemnisation de la victime. Il s’agit, en soi, d’une audacieuse avancĂ©e tant elle ouvre des perspectives, notamment dans
la perception de la nature mĂȘme de la faute d’information. Qu’on en juge.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence considĂšre que la paraplĂ©gie dont le patient est dĂ©sormais atteint ne rĂ©sulte pas d’une faute mĂ©dicale (choix de la
stratĂ©gie thĂ©rapeutique, conduite du geste
) mais d’un dĂ©faut d’information patent.
 L’opĂ©ration prĂ©sentait des risques, y compris vitaux alors que l’étroitesse du dĂ©lai de rĂ©flexion laissĂ© au patient ne lui laisse guĂšre un choix raisonnĂ©
pour accepter ou non le risque.
 Les informations indispensables sur les diffĂ©rentes techniques envisagĂ©es, les risques induits par chacune d’entre elles et les raisons du choix du
chirurgien ne sont pas abordés de façon orale devant lui.
 Facteur aggravant, en dĂ©pit du fait que M. Y prĂ©sente une hernie volumineuse, l’intervention ne prĂ©sente pas un caractĂšre d’urgence absolue.

Pour les juges du fond, il y a lĂ  autant de facteurs constitutifs d’une faute d’information ayant fait perdre une chance Ă  M. Y d’échapper au prĂ©judice. La
rĂ©paration consĂ©cutive Ă  cette perte de chance s’évalue Ă  80 % du prĂ©judice.

Mais qu’en est-il des 20 % non indemnisĂ©s ?

La cour d’appel estime que la solidaritĂ© nationale ne peut jouer dans la mesure oĂč le dommage ne rĂ©sulte pas d’un alĂ©a thĂ©rapeutique mais d’une faute,
ici matĂ©rialisĂ©e par le dĂ©faut d’information du chirurgien. Et l’ONIAM na pas Ă  intervenir puisque la RC du mĂ©decin fautif a normalement jouĂ©. Il s’agit de
l’application mĂȘme du principe de subsidiaritĂ©. L’ONIAM intervient seul, en rĂ©paration d’un alĂ©a ou n’intervient pas du tout (sauf dĂ©rogation prĂ©vue
article L. 1142-18 du code de la santé publique).

La perception de la Cour de cassation est autre. Selon elle, le dĂ©faut d’information n’est pas une faute « comme les autres », c’est-Ă -dire une de celles
survenues dans la conduite « d’actes de prĂ©vention, de diagnostic ou de soins » tel que l’exprime la loi (art. L. 1142-1-II du code de la santĂ© publique). Le
dĂ©faut d’information est une faute « Ă©thique » ou « morale », non une faute mĂ©dicale de prĂ©vention, de diagnostic ou de soins. Cette faute morale reste
une faute autonome, sans causalitĂ© directe avec le prĂ©judice. En effet, le prĂ©judice ne naĂźt pas du dĂ©faut d’information. Il naĂźt soit d’une faute mĂ©dicale,
soit du risque inhĂ©rent au geste ou Ă  la pathologie, soit d’un alĂ©a thĂ©rapeutique. C’est pourquoi l’on rĂ©pare le dommage qui aurait pu ĂȘtre Ă©cartĂ© si
l’information avait Ă©tĂ© donnĂ©e de façon claire, loyale et appropriĂ©e par le biais d’un instrument spĂ©cifique : la perte de chance, et cette rĂ©paration est
partielle.

Il en rĂ©sulte qu’au sens de l’arrĂȘt du 11 /03 /2010, cette faute parce qu’elle est morale et non pas mĂ©dicale, ouvre voie Ă  une indemnisation intĂ©grale
mariant RC et solidaritĂ© nationale. On mesure ici la portĂ©e d’une telle jurisprudence, fruit de la singularitĂ© de la faute d’information.




                                                                                                                                                          16
F. L’AUTONOMIE DE LA FAUTE RESULTANT DU DEFAUT D’INFORMATION : DU REJET A LA RECONNAISSANCE


                              Le manquement au devoir d’information n’est pas source de prĂ©judice moral– (Cass. 6 /12 /2007)

                                                                               Les faits
 Un patient reste hĂ©miplĂ©gique des suites d’une opĂ©ration pour carotidie avant de succomber 3 annĂ©es plus tard, son Ă©tat n’ayant cessĂ© de se dĂ©grader. La veuve
 et son fils intentent une action en réparation contre le chirurgien au double motif de leur préjudice et de celui de leur époux et pÚre.
 Par arrĂȘt rendu le 30 06 /2006, la Cour d’appel de Bordeaux considĂšre que le chirurgien a commis une faute en n’informant pas le patient du risque d’hĂ©miplĂ©gie
 qui s’est rĂ©alisĂ©e. Toutefois, elle Ă©carte la rĂ©paration du prĂ©judice au titre de la perte de chance au motif que compte tenu de la gravitĂ© de son Ă©tat et eu Ă©gard au
 fait que le risque d’hĂ©miplĂ©gie Ă©tait faible, le patient, mĂȘme informĂ© n’aurait pas refusĂ© l’opĂ©ration. Les juges du fond caractĂ©risent nĂ©anmoins le prĂ©judice moral
 du dĂ©funt et de sa famille et accordent Ă  l’un et aux autres la somme de 3 000 €.
 La famille du dĂ©funt forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Elle conteste la dĂ©cision des juges du fond de refuser l’indemnisation de la perte de chance.
 Le chirurgien et son assureur forment un pourvoi incident contre la double indemnisation du préjudice moral décidée par la cour.

                                                            Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 6 /12 /2007
 La Cour de cassation rejette le pourvoi formĂ© par la famille au motif « 
 que l’on devait considĂ©rer que, compte tenu de la gravitĂ© du problĂšme cardiaque, de son
 Ă©volution rapide et du caractĂšre relativement faible du risque encouru
 le patient se serait fait opĂ©rer mĂȘme si le mĂ©decin l’avait avisĂ© d’une possibilitĂ© de
 complication ; qu’il ne pouvait donc ĂȘtre soutenu que le dĂ©faut d’information avait fait perdre au patient une chance de ne pas subir la pathologie dont il a Ă©tĂ©
 atteint
 »
 Elle casse en revanche la partie de l’arrĂȘt ouvrant indemnisation du prĂ©judice moral du patient et de sa famille, considĂ©rant « 
 que le seul prĂ©judice
 indemnisable Ă  la suite du non respect de l’obligation d’information du mĂ©decin
 est la perte de chance d’échapper au risque qui s’est finalement rĂ©alisé  »



   Si le devoir d’information revĂȘt dĂ©sormais un caractĂšre rĂ©galien, il faut nĂ©anmoins estimer que le manquement Ă  ce devoir n’ouvre pas voie Ă  la perte
de chance et donc Ă  son indemnisation lorsque, eu Ă©gard Ă  la gravitĂ© de son Ă©tat, le malade, mĂȘme dĂ»ment informĂ© n’aurait pas refusĂ© l’opĂ©ration et le
risque consĂ©cutif. A la date de son rendu, l’arrĂȘt reprend sans surprise une jurisprudence jusqu’alors d’une grande constance.

La rĂ©paration du prĂ©judice moral est, quant Ă  elle Ă©cartĂ©e par les hauts magistrats, le seul prĂ©judice indemnisable (et les conditions d’indemnisation ne
sont pas ici rĂ©unies) demeurant la perte de chance d’échapper au risque. Il n’empĂȘche, en reconnaissant la rĂ©alitĂ© du prĂ©judice moral nĂ© du dĂ©faut
d’information – Ă  dĂ©coupler complĂštement de la perte de chance – et mĂȘme si la disposition est cassĂ©e, la Cour d’appel de Bordeaux ouvre un chemin
sur lequel la Cour de cassation ne va pas tarder Ă  se situer elle-mĂȘme.




                                                                                                                                                                     17
Sauf incapacitĂ© Ă  consentir, le non-respect du devoir d’information est source de prĂ©judice qu’il convient d’indemniser – (Cass. 3 /06 /2010)

                                                                               Les faits
 Un mĂ©decin urologue pratique une adĂ©nomectomie prostatique sur un patient souffrant de rĂ©tention d’urine. A la suite de l’intervention, celui-ci demeure atteint
 d’une impuissance sexuelle complĂšte et dĂ©finitive. Il recherche la responsabilitĂ© du praticien sur deux motifs : la faute technique et le dĂ©faut d’information sur le
 risque d’impuissance sexuelle liĂ©e Ă  l’opĂ©ration.
 Dans un arrĂȘt rendu le 9 /04 /2008, la Cour d’appel de Bordeaux le dĂ©boute de l’ensemble de ses demandes. Le geste a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© dans les rĂšgles de l’art, il Ă©tait
 nĂ©cessaire et il n’existait pas d’alternative. Eu Ă©gard au danger d’infection que faisait courir la sonde vĂ©sicale, il est peu probable que le patient aurait renoncĂ© Ă 
 l’intervention, mĂȘme dĂ»ment averti du risque d’impuissance que celle-ci prĂ©sentait.
 Le patient forme un pourvoi devant la Cour de cassation sur plusieurs branches : le geste opĂ©ratoire, le suivi post-opĂ©ratoire et le dĂ©faut d’information.

                                                             Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 3 /06 /2010
 La Cour de cassation rejette les deux premiĂšres branches du pourvoi mais accueille la troisiĂšme, cassant en cette disposition l’arrĂȘt de la Cour de Bordeaux dans
 les termes suivants :
 « Attendu
 que toute personne a le droit d’ĂȘtre informĂ©e, prĂ©alablement aux investigations, traitements ou actions de prĂ©vention proposĂ©es, des risques
 inhĂ©rents Ă  ceux-ci, et que son consentement doit ĂȘtre recueilli par le praticien, hors le cas oĂč son Ă©tat rend nĂ©cessaire une intervention thĂ©rapeutique Ă  laquelle
 elle n’est pas Ă  mĂȘme de consentir ; que le non-respect du devoir d’information qui en dĂ©coule, cause Ă  celui auquel l’information Ă©tait lĂ©galement due, un
 prĂ©judice
 que le juge ne peut laisser sans rĂ©paration
 Par ses motifs, casse et annule
 »




   MĂȘme si le geste opĂ©ratoire Ă©tait nĂ©cessaire Ă  la santĂ© et peut-ĂȘtre Ă  la survie du patient ne devait-il ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ© d’une information claire, loyale et
appropriĂ©e sur les risques encourus, notamment le risque d’impuissance sexuelle complĂšte et dĂ©finitive ? Et, en l’absence de faute mĂ©dicale prouvĂ©e, ce
seul manquement induit-il à lui seul un préjudice indemnisable ?

Telle est, en l’occurrence la question posĂ©e Ă  la Cour de cassation Ă  laquelle elle rĂ©pond par l’affirmative.

Contrairement Ă  d’autres observateurs, nous ne voyons rien de rĂ©ellement surprenant dans le rendu de l’arrĂȘt du 3 /06 /2010. Cet arrĂȘt ne constitue pas
une inflexion de la jurisprudence. Il n’est que le logique prolongement à la construction jurisprudentielle entreprise depuis le 25 /02 /1997. Il prend
naturellement en compte les principes de notre droit en matiĂšre de protection de la personne humaine.

La Haute cour fait tout d’abord rĂ©fĂ©rence aux principes rĂ©gis au livre I – Chapitre 2 du Code civil « Du respect de la personne humaine ».

    -    Article 16 : « La loi assure la primautĂ© de la personne, interdit toute atteinte Ă  la dignitĂ© de celle-ci et garantit le respect de l’ĂȘtre humain. »




                                                                                                                                                                      18
-   Article 16-3 : « Le consentement de l’intĂ©ressĂ© doit ĂȘtre recueilli prĂ©alablement hors le cas oĂč son Ă©tat rend nĂ©cessaire une intervention
       thĂ©rapeutique Ă  laquelle il n’est pas Ă  mĂȘme de consentir. »

Elle en appelle ensuite Ă  l’article 1382 tirĂ© du livre III – Chapitre 2 « Des dĂ©lits et des quasi-dĂ©lits » qui stipule que « Tout fait quelconque de l’homme, qui
cause Ă  autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivĂ© Ă  le rĂ©parer. » Et cet article n’est que la traduction du fameux principe du
primum non nocere.

Ainsi la Cour de cassation n’invente rien (ce qui Ă©chapperait Ă  ses prĂ©rogatives par ailleurs !)

Depuis fort longtemps, notre droit traite de façon autonome de la question éthique et du respect du corps. Nombre de textes internationaux comme,
parmi d’autres, La DĂ©claration universelle sur la bioĂ©thique et les droits de l’homme (UNESCO – 19 /10 /2005) font de mĂȘme. Il est naturel qu’au bout du
compte, cette autonomie en matiĂšre de traitement se prolonge d’une autonomie en matiĂšre de responsabilitĂ© – on parlera alors de « responsabilitĂ©
Ă©thique » ou de « responsabilitĂ© morale » – et d’une autonomie en matiĂšre de faute avec obligation de rĂ©parer cette faute Ă©thique ou cette faute morale.
Reste Ă  dĂ©finir comment mais en lui-mĂȘme le principe est acquis.

En parallÚle, la force considérable conférée au consentement par la loi du 4 /03 /2002 relative aux droits des patients et à la qualité du systÚme de santé,
loi qui rĂ©git aujourd’hui la responsabilitĂ© mĂ©dicale relĂšve d’une prĂ©occupation identique du lĂ©gislateur.

Il n’est pas possible au praticien d’intervenir sans le consentement « libre et Ă©clairĂ© » du patient et ce consentement peut ĂȘtre retirĂ© Ă  tout moment (art.
L. 1111-4-3). Or ce consentement naĂźt, nous l’avons Ă©noncĂ© plus haut, d’une information claire, loyale et appropriĂ©e sur les risques propres Ă  la stratĂ©gie
thérapeutique proposée.

L’absence de consentement est d’évidence fautive au sens de ce texte. MĂȘme si l’intervention est mĂ©dicalement justifiĂ©e, voire indispensable Ă  la santĂ©
du patient, dĂšs lors qu’en Ă©tat de donner son consentement celui-ci n’a pas Ă©tĂ© recherchĂ© par l’homme de l’art, la faute est lĂ , patente, autonome.

C’est le message que nous adresse la Cour de cassation dans son arrĂȘt du 3 /06 /2010. La Haute juridiction poursuit donc son travail d’apprĂ©hension
globale de la dĂ©licate question lĂ©gale et dĂ©ontologique de l’information due au patient. Elle enrichit aujourd’hui sa construction jurisprudentielle
d’élĂ©ments Ă©thiques et moraux inhĂ©rents au respect du corps.

Qui l’en blñmera ?

       Commentaire extrait note JV – 04 /2010 – LE DEFAUT D’INFORMATION DU MEDECIN ENVERS SON PATIENT CONSTITUE-T-IL UNE FAUTE AUTONOME ?




                                                                                                                                                              19
CONCLUSION (provisoire
)


Si la jurisprudence de la Cour de cassation en matiĂšre d’information du mĂ©decin envers son patient s’avĂšre, par essence mĂȘme Ă©volutive, elle n’est en revanche ni
exploratoire ni aventureuse. Nous distinguons dans chacune des Ă©tapes essentielles qui jalonnent son parcours, soit l’application sous jacente des prĂ©ceptes du
droit tels qu’ils existent, soit lorsque ces prĂ©ceptes n’existent pas, la fixation de rĂšgles qu’il convient alors d’expliquer, voire d’amender ensuite.

Le temps n’est plus vraiment au seul questionnement sur les moyens de preuve que l’information a bien Ă©tĂ© donnĂ©e au patient (et comprise de lui) ou sur le contenu
de celle-ci. Avec le temps, des orientations de plus en plus précises auxquels les praticiens peuvent se référer ont été définies.

Tout n’est pas balisĂ© pour autant, loin s’en faut.

De notables contradictions prĂ©judiciables Ă  tous, mĂ©decins et patients commencent Ă  poindre ici ou lĂ . Prenons ainsi l’exemple du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale
qui, nous l’avons vu (page 8 de l’étude) admet que le malade puisse ĂȘtre tenu dans l’ignorance de son Ă©tat, ceci dans son intĂ©rĂȘt « et pour des raisons lĂ©gitimes que
le mĂ©decin apprĂ©cie en conscience
 » La jurisprudence s’est certes calĂ©e sur cette disposition (arrĂȘt du 23 /05 /2000) mais pour combien de temps encore ?

Car il y a antinomie entre le silence du mĂ©decin et la norme nouvellement consacrĂ©e par la jurisprudence par laquelle le dĂ©faut d’information s’assimile Ă  une faute
autonome. Intervenir sur le corps du patient nĂ©cessite son consentement, mĂȘme si les soins s’avĂšrent indispensables. Se taire c’est commettre une faute : nier la
personne dans sa dignité et le respect qui lui est dû.

Comment les juges vont-ils gĂ©rer cette opposition frontale de principes ? Il faut espĂ©rer qu’ils le feront en laissant au praticien la latitude sans laquelle il n’exerce
plus librement. Mais le droit (c’est-à-dire la loi) leur laissera-t-il le choix ?

Pour le reste, les nouvelles et puissantes avancĂ©es de la jurisprudence depuis le dĂ©but de l’annĂ©e 2010 ont surpris beaucoup de monde. Il est vrai qu’en moins de
trois mois, entre le 11 /03 et le 3 /06 /2010, les contours du devoir d’information se sont trouvĂ©s fortement modifiĂ©s :
     - par l’ouverture vers une indemnisation intĂ©grale du prĂ©judice (perte de chance par la RC, faute morale d’information par la solidaritĂ© nationale) ;
     - par la consĂ©cration de l’autonomie de la faute d’information.

MĂȘme en connaissant l’attachement sĂ©culaire des juges Ă  une indemnisation complĂšte du dommage corporel, nous avons Ă©tĂ© surpris par la premiĂšre disposition
tant le principe d’une rĂ©paration partielle par la seule perte de chance nous paraissait gravĂ© dans le marbre.

Pour la faute autonome au contraire, le droit tel qu’il est Ă©crit ne laissait pas d’autre alternative. Quel paradoxe que cet arrĂȘt du 3 /06 /2010, si prĂ©visible et pourtant
tellement commenté !




                                                                                                                                                                         20

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  • 1. LE DEVOIR D’INFORMATION DU MEDECIN LIBERAL Mise Ă  jour 08 /2010 Jean VILANOVA – Juriste jean.vilanova@ca-predica.fr 1
  • 2. Avant mĂȘme d’ĂȘtre une obligation lĂ©gale et dĂ©ontologique, parler au patient, l’informer des risques qu’il encourt du fait de la stratĂ©gie thĂ©rapeutique envisagĂ©e et de ceux qui rĂ©sulteraient du refus de sa part de cette stratĂ©gie relĂšve de l’humanisme mĂ©dical. Parce que la mĂ©decine est aussi un art de l’oralitĂ©. L’humanisme mĂ©dical constitue l’un des fondements sĂ©culaires de la relation de respect et de confiance entre soignant et soignĂ©. InformĂ© de façon claire, loyale et appropriĂ©e, ce dernier consentira – ou non – aux soins proposĂ©s. DĂšs lors pourquoi la question du devoir d’information continue-t-elle de donner lieu Ă  des dĂ©bats parfois tumultueux entre mĂ©decins et juristes ? Tout commence le 25 /02 /1997. La 1Ăšre chambre civile de la Cour de cassation rend alors un arrĂȘt qui soulĂšve l’ire d’une grande partie du corps mĂ©dical. Tandis que depuis plusieurs dĂ©cennies, en cas de rĂ©clamation, la charge de la preuve du dĂ©faut d’information appartenait au demandeur (le patient), l’arrĂȘt consacre un principe exactement inverse : c’est dĂ©sormais au praticien de prouver qu’il a bien informĂ© ledit patient. La haute juridiction retient ici la rĂšgle selon laquelle
 « Celui qui se prĂ©tend libĂ©rĂ© doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. » (art. 1315-2 du code civil) ConsacrĂ©e un peu plus tard par la loi n° 2002-303 du 4 /03 /2002 relative aux droits des malades et Ă  la qualitĂ© du systĂšme de santĂ©, cette jurisprudence n’en vient pas moins s’ajouter – injustement d’ailleurs – aux dĂ©cisions parfois incomprises qui jalonnent l’histoire du droit. Aujourd’hui la question de l’information du patient occupe une place considĂ©rable en responsabilitĂ© mĂ©dicale. D’aucuns, et nous en sommes, y voient un gisement nouveau, durable et possiblement important de contentieux. D’oĂč, partant du cadre lĂ©gal, la clarification permanente de ses contours Ă  laquelle s’attache la jurisprudence. Chacun doit savoir ce qu’il en est. Pour preuve, dans un arrĂȘt rĂ©cemment rendu (3 /06 /2010), la Cour de cassation marque une nouvelle avancĂ©e au-delĂ  du droit pur. On n’accĂšde pas, nous dit-elle – on n’accĂšde plus – impunĂ©ment au corps du patient sans le consentement de celui-ci, fusse pour lui prodiguer des soins indispensables Ă  sa survie
 Ou quand la morale devient droit ! « L’arrĂȘt fondateur » du 25 /02 /1997 a constituĂ© la premiĂšre pierre d’un Ă©difice jurisprudentiel en permanente Ă©volution depuis. Il faut aujourd’hui constater la cohĂ©rence et le remarquable Ă©quilibre prĂ©sentĂ© par cet Ă©difice qui marie – nous le dĂ©montrerons – la volontĂ© de prendre en charge la souffrance du patient et le souci de laisser au mĂ©decin toute la sĂ©rĂ©nitĂ© nĂ©cessaire Ă  la pratique de son art. J.V. – le 10 /08 /2010 2
  • 3. PREAMBULE : UN PRINCIPE SECULAIRE Le devoir d’information du mĂ©decin vis Ă  vis de son patient fait partie intĂ©grante de l’acte de soins et doit ĂȘtre accompli Ă  tous les stades de celui-ci. 1. En amont du traitement 2. En cours de traitement    Information sur la stratĂ©gie thĂ©rapeutique envisagĂ©e, son coĂ»t, les  A chaque nouvelle Ă©tape du traitement conditions de son remboursement  Lorsque le praticien souhaite modifier ses choix thĂ©rapeutiques  Risques et Ă©ventuels effets secondaires induits  Lorsqu’un incident survient  Risques encourus en cas de refus de soins 3. A l’issue du traitement   Information sur les prĂ©cautions Ă  prendre pour une meilleure efficacitĂ© du traitement dans le temps L’information dĂ©livrĂ©e au patient doit ĂȘtre loyale, claire et appropriĂ©e (article 35 du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale) afin d’obtenir de sa part un consentement libre et Ă©clairĂ© sur les soins proposĂ©s. 3
  • 4. A. LE TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION PAR LA JURISPRUDENCE : EVOLUTIONS 1. Le dĂ©faut d’information est une faute dont il appartient Ă  la victime de rapporter la preuve. Cour de cassation – ArrĂȘt du 29 /05 /1951 « Si le contrat qui se forme entre le chirurgien et son client comporte l’obligation pour le praticien de procĂ©der Ă  une opĂ©ration chirurgicale par lui jugĂ©e utile qu’aprĂšs avoir au prĂ©alable obtenu l’assentiment du malade, il appartient toutefois Ă  celui-ci, lorsqu’il se soumet en pleine luciditĂ© Ă  l’intervention du chirurgien, de rapporter la preuve que ce dernier a manquĂ© Ă  cette obligation contractuelle en ne l’informant pas de la vĂ©ritable nature de l’opĂ©ration qui se prĂ©parait et en ne sollicitant pas son consentement Ă  cette opĂ©ration. » 2. La charge de la preuve de l’information incombe dĂ©sormais au praticien – (Cass. 25 /02 /1997) Les faits Un patient est victime d’une perforation intestinale consĂ©cutive Ă  une coloscopie entreprise pour exĂ©rĂšse de polypes intestinaux. Il reproche au gastro- entĂ©rologue, non pas une Ă©ventuelle maladresse dans la conduite du geste mais de ne l’avoir pas informĂ© du risque de perforation colique et demande rĂ©paration financiĂšre de son prĂ©judice. Par arrĂȘt rendu le 5 /07 /1994, la Cour d’appel de Rennes rejette cette demande au motif que le patient est incapable de rapporter la preuve de ce dĂ©faut d’information de la part de son thĂ©rapeute. En l’occurrence, les juges du fond applique ici strictement la jurisprudence en cours, telle qu’elle a Ă©tĂ© posĂ©e le 29 /05 / 1951. Le patient forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Cour de cassation – ArrĂȘt H. du 25 /02 1997 La Cour de cassation, dans son arrĂȘt du 25 /02 /1997 opĂšre un revirement jurisprudentiel en cassant l’arrĂȘt rendu par la Cour d’appel de Rennes et en renvoyant l’affaire devant une Cour d’appel de renvoi (voir 5Ăšme Ă©tape) en ces termes : « Attendu que celui qui est lĂ©galement ou contractuellement tenu d’une obligation particuliĂšre d’information doit rapporter la preuve de l’exĂ©cution de cette obligation ; Attendu qu’à l’occasion d’une coloscopie avec ablation d’un polype, rĂ©alisĂ©e par le docteur C., monsieur H. a subi une perforation intestinale ; que, au soutien de son action contre ce mĂ©decin, monsieur H. a fait valoir qu’il ne l’avait pas informĂ© du risque de perforation au cours d’une telle intervention ; que la cour d’appel a Ă©cartĂ© ce moyen et dĂ©boutĂ© monsieur H. de son action au motif qu’il lui appartient de rapporter la preuve de ce que le praticien ne l’avait pas averti de ce risque, ce qu’il ne faisait pas dĂšs lors qu’il ne produisait aux dĂ©bats aucun Ă©lĂ©ment accrĂ©ditant cette thĂšse ; Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le mĂ©decin est tenu d’une obligation particuliĂšre d’information vis Ă  vis de son patient et qu’il lui incombe de prouver qu’il a exĂ©cutĂ© cette obligation (soulignĂ© par nous), la cour d’appel a violĂ© le texte susvisĂ©.» 4
  • 5. 3. L’obligation d’information n’est pas levĂ©e du seul fait que le risque est de rĂ©alisation exceptionnelle – (Cass. 7 /10 /1998) Les faits Victime d’une chute ayant provoquĂ© la fracture de la deuxiĂšme vertĂšbre lombaire une patiente, aprĂšs avoir subi un traitement par immobilisation et port d’un corset consulte un chirurgien en raison d’une cyphose persistante. Celui-ci prĂ©conise une intervention consistant en la mise en place d’un cadre de Hartchild, suivi dans un second temps d’une greffe vertĂ©brale. A la suite de l’intervention, la patiente se plaint, dĂšs son rĂ©veil, d’un trouble visuel et d’une douleur au niveau de l’orbite gauche. Une trombophlĂ©bite est diagnostiquĂ©e. Elle aura pour consĂ©quence la perte dĂ©finitive de l’Ɠil gauche par atrophie du nerf optique. La patiente assigne en rĂ©paration de son prĂ©judice le chirurgien en invoquant notamment un manquement Ă  son devoir d’information. Par arrĂȘt rendu le 26 /09 /1996, la Cour d’appel de Lyon rejette la demande au motif « 
que l’information du patient n’est exigĂ©e que pour des risques normalement prĂ©visibles, ce qui n’était pas le cas de la complication post-opĂ©ratoire litigieuse qui bien que connue est trĂšs rare
 » et les juges du fond d’ajouter « 
que le chirurgien n’avait pas Ă  avertir sa patiente de ce risque afin d’éviter par une inquiĂ©tude inutile de la placer dans un Ă©tat psychologique dĂ©favorable au bon dĂ©roulement d’une intervention classique. » Cour de cassation – ArrĂȘt C. du 7 /10 /1998 Par arrĂȘt rendu le 7 /10 /1998, la Cour de cassation casse l’arrĂȘt de la cour d’appel sur le moyen suivant : « Hormis les cas d’urgence, d’impossibilitĂ© ou de refus du patient d’ĂȘtre informĂ©, un mĂ©decin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriĂ©e sur les risques graves affĂ©rents aux investigations et soins proposĂ©s et qu’il n’est pas dispensĂ© de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se rĂ©alisent qu’exceptionnellement (soulignĂ© par nous). » 4. Un mĂ©decin n’est pas tenu de rĂ©ussir Ă  convaincre son patient du danger de l’acte qu’il demande – (Cass. 18 /01 /2000) Les faits Devant subir l’opĂ©ration de la cataracte de son Ɠil droit, une patiente refuse l’anesthĂ©sie gĂ©nĂ©rale proposĂ©e par l’ophtalmologiste. Elle choisit de recourir Ă  une anesthĂ©sie loco rĂ©gionale non sans avoir Ă©tĂ© prĂ©alablement informĂ©e par le praticien des dangers de cette mĂ©thode. A la suite de l’injection anesthĂ©sique apparaĂźt un chĂ©mosis hĂ©morragique provoquant la rupture du globe oculaire et la perte de l’usage de l’Ɠil. La cour d’appel de Lyon, par arrĂȘt rendu le 14 /05 /1997 retient la responsabilitĂ© du mĂ©decin. Elle considĂšre que la faute de celui-ci consiste dans le fait « de n’avoir pas Ă©tĂ© en mesure de convaincre sa patiente des dangers prĂ©sentĂ©s par un tel acte. » Cour de cassation – ArrĂȘt Y. du 18 /01 2000 ArrĂȘt cassĂ© le 18 /01 /2000, la Cour de cassation estimant
 « qu’un mĂ©decin n’est pas tenu de rĂ©ussir Ă  convaincre son patient du danger de l’acte mĂ©dical qu’il demande
 » En statuant ainsi, la Cour de cassation rĂ©Ă©value la place du patient au sein de la sphĂšre de soins. La prise de dĂ©cision relative Ă  l’acte mĂ©dical est apprĂ©hendĂ©e comme le fruit d’un dialogue, le dernier mot restant au malade dĂ»ment informĂ© des risques encourus. 5
  • 6. 5. Il n’y a pas de responsabilitĂ© du mĂ©decin pour dĂ©faut d’information s’il apparaĂźt que mĂȘme informĂ©, le patient n’aurait pas refusĂ© l’opĂ©ration – (Cass. 20 /06 /2000) Les faits  Il s’agit ici des suites de l’affaire traitĂ©e au paragraphe 2 (arrĂȘt H. du 25 /02 1997), la Cour de cassation ayant cassĂ© l’arrĂȘt de la Cour d’appel de Lyon et renvoyĂ© l’affaire devant une autre cour d’appel afin qu’elle soit rejugĂ©e conformĂ©ment Ă  ses conclusions. C’est Ă  la Cour d’appel d’Angers qu’est dĂ©volue cette mission. Celle-ci ne se contente pas de suivre, au mot prĂšs, les attendus de la Haute juridiction. Elle va plus loin dans ses investigations. Ayant constatĂ© que le pĂšre du patient Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© d’un cancer du cĂŽlon, elle considĂšre dans son arrĂȘt rendu le 18 /09 /1998 que mĂȘme informĂ© du risque de perforation (ce qui n’avait pu ĂȘtre prouvĂ© par le mĂ©decin), le patient n’aurait refusĂ© ni l’examen, ni l’exĂ©rĂšse du polype de crainte qu’il ne dĂ©gĂ©nĂšre en cancer. Selon la Cour d’appel d’Angers, il n’y a donc pas de lien de causalitĂ© entre l’absence d’information et le prĂ©judice. A l’instar de la Cour d’appel de Lyon, mais sur un motif diffĂ©rent, elle rejette donc la demande du plaignant qui, une nouvelle fois, forme un pourvoi en cassation. Cour de cassation ; second pourvoi – ArrĂȘt H. du 20 /06 /2000 Cette fois la Cour de cassation consacre l’arrĂȘt d’appel. Elle prĂ©cise que pour obtenir rĂ©paration
 « le patient doit Ă©tablir que s’il avait Ă©tĂ© dĂ»ment informĂ©, il aurait fait un choix diffĂ©rent
 » Elle rappelle Ă©galement le pouvoir souverain des juges de cours d’appel qui
 « doivent prendre en considĂ©ration l’état de santĂ© du patient ainsi que son Ă©volution prĂ©visible, sa personnalitĂ©, les raisons pour lesquelles les investigations ou les soins Ă  risque lui sont proposĂ©s, ainsi que les caractĂ©ristiques de ces investigations, de ces soins et de ces risques. » Il est Ă©vident qu’à ce stade les hauts magistrats cherchent le juste Ă©quilibre entre le droit rĂ©galien dont dispose le patient d’ĂȘtre informĂ© et le devoir du mĂ©decin de tout tenter pour le guĂ©rir. Dans une certaine mesure, la pression Ă  laquelle se voyaient soumis les mĂ©decins depuis l’arrĂȘt du 25 /02 1997 se relĂąche. 6. La violation du devoir d’information ne peut ĂȘtre sanctionnĂ©e qu’au titre de la perte de chance – (Cass. 7 /12 /2004) Les faits A la suite d’une tympanoplastie, un patient prĂ©sente une paralyse faciale rĂ©sultant de l’opĂ©ration. La responsabilitĂ© du praticien est recherchĂ©e au motif d’un manquement Ă  son devoir d’information sur le risque ainsi encouru puis rĂ©alisĂ©. Par arrĂȘt rendu le 28 /11 /2001, La Cour d’appel de Rennes estime cette responsabilitĂ© engagĂ©e et condamne le praticien Ă  rĂ©parer l’entier prĂ©judice liĂ© Ă  la paralysie faciale. Le praticien forme un pourvoi en cassation. Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 7 /12 /2004 La Cour de cassation casse l’arrĂȘt d’appel : « 
 une obligation d’information ne peut ĂȘtre sanctionnĂ©e qu’au titre de la perte de chance subie par le patient d’échapper par une dĂ©cision peut-ĂȘtre plus judicieuse, au risque qui s’est finalement rĂ©alisé  le dommage correspond alors Ă  une fraction des diffĂ©rents chefs de prĂ©judice subis qui est dĂ©terminĂ©e en mesurant la chance perdue et ne peut ĂȘtre Ă©gale aux atteintes corporelles rĂ©sultant de l’acte mĂ©dical
 » DĂ©cision importante. En considĂ©rant que le dommage rĂ©sultant du dĂ©faut d’information ne se rĂ©pare que par la perte de chance, la haute cour allĂšge la charge qui pĂšse sur le praticien. La perte de chance, perte d’un espoir et non d’un droit implique en effet une indemnisation toujours partielle du prĂ©judice. 6
  • 7. A ce stade, la jurisprudence a accompli un important travail. Toutefois, certains aspects mĂ©riteraient de plus amples Ă©claircissements, notamment en matiĂšre d’apport de la preuve par le praticien du respect de son obligation. Mais avant d’aborder ce point aujourd’hui clarifiĂ©, il convient de comparer la question du devoir d’information telle qu’elle nous est prĂ©sentĂ©e par la jurisprudence avec les dispositions du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale puis avec la loi du 4 /03 /2002 relative aux droits des malades et Ă  la qualitĂ© du systĂšme de santĂ©. ♩♩♩♩♩♩ 7
  • 8. B. LE TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION PAR LA DEONTOLOGIE MEDICALE Art. 35 du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale – Information du patient « Le mĂ©decin doit Ă  la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriĂ©e sur son Ă©tat, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalitĂ© du patient dans ses explications et veille Ă  leur comprĂ©hension. Toutefois, dans l’intĂ©rĂȘt du malade et pour des raisons lĂ©gitimes que le praticien apprĂ©cie en conscience, un malade peut ĂȘtre tenu dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic graves, sauf dans les cas oĂč l’affection dont il est atteint expose les tiers Ă  un risque de contamination. Un pronostic fatal ne doit ĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ© qu’avec circonspection, mais les proches doivent en ĂȘtre prĂ©venus, sauf exception ou si le malade a prĂ©alablement interdit cette rĂ©vĂ©lation ou dĂ©signĂ© les tiers auxquels elle doit ĂȘtre faite. » Art. 36 du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale - Consentement « Le consentement de la personne examinĂ©e ou soignĂ©e doit ĂȘtre recherchĂ© dans tous les cas. Lorsque le malade, en Ă©tat d’exprimer sa volontĂ©, refuse les investigations ou le traitement proposĂ©, le mĂ©decin doit respecter ce refus aprĂšs avoir informĂ© le malade de ses consĂ©quences. Si le malade est hors d’état d’exprimer sa volontĂ©, le mĂ©decin ne peut intervenir sans que ses proches aient Ă©tĂ© prĂ©venus et informĂ©s, sauf urgence ou impossibilitĂ©. Les obligations du mĂ©decin Ă  l’égard du patient lorsque celui-ci est un mineur ou un majeur protĂ©gĂ© sont dĂ©finies Ă  l’article 42. » Certains auteurs ont cru dĂ©celer une diffĂ©rence d’apprĂ©ciation entre dĂ©ontologie et jurisprudence quant au pĂ©rimĂštre de l’information destinĂ©e au malade. Selon eux, la jurisprudence en fixant la rĂšgle d’une information Ă©largie aux risques exceptionnels entrait en contradiction avec la dĂ©ontologie qui, sauf le risque d’exposition de tiers Ă  une contamination permet de taire certaines informations dans l’intĂ©rĂȘt mĂȘme du malade et pour des raisons lĂ©gitimes. Une telle contradiction, si elle existait, ferait dĂ©sordre. Il n’en est rien. Tant pour les juges de droit commun (arrĂȘt du 7 /10 /1998 Ă©noncĂ© plus haut) que pour les rĂ©dacteurs du code de dĂ©ontologie, l’information dispensĂ©e doit s’avĂ©rer « loyale, claire et appropriĂ©e » Ă  l’état du malade. Une information appropriĂ©e Ă  l’état du malade signifie une information adaptĂ©e. On n’informe pas de la mĂȘme façon un patient victime d’une entorse Ă  la suite d’un accident de ski et un autre qui dĂ©veloppe un cancer gĂ©nĂ©ralisĂ©. Un arrĂȘt rendu le 23 /05 /2000 par la Cour de cassation confirme la parfaite concordance de vue des hauts magistrats avec la dĂ©ontologie. 8
  • 9. La limitation de l’information due par un praticien Ă  son patient en matiĂšre de diagnostic est lĂ©gitime – (Cass. 23 /05 /2000) Les faits En septembre 1986, un patient ĂągĂ© de 53 ans et dont la situation professionnelle est prĂ©caire consulte un psychiatre en raison d’une forte anxiĂ©tĂ©. Un traitement est entrepris. Quelques mois plus tard, en avril 1987, l’aggravation de l’état dĂ©pressif du patient entraĂźne son hospitalisation dans une clinique oĂč est posĂ© le diagnostic de psychose maniaco-dĂ©pressive. Le psychiatre dĂ©cide de ne pas en informer son patient. Une phase d’amĂ©lioration temporaire intervient mais en octobre 1990 le praticien Ă©tablit un certificat mĂ©dical d’invaliditĂ© Ă  90 % qui permet au patient de faire valoir ses droits auprĂšs des organismes sociaux dont il relevait et des assurances couvrant les emprunts qu’il avait contractĂ©s. Il est mĂ©dicalement acquis que l’invaliditĂ© est consĂ©cutive Ă  la psychose maniaco-dĂ©pressive diagnostiquĂ©e en 1987 (lien de causalitĂ©). En janvier 1996, le patient reproche Ă  son mĂ©decin ne n’avoir pas rĂ©vĂ©lĂ© le diagnostic de sa maladie dĂšs 1987 et soutient que ceci l’a privĂ© des possibilitĂ©s de faire valoir ses droits Ă  une pension d’invaliditĂ©, Ă  un complĂ©ment de pension de retraite et Ă  la prise en charge par les assurances des Ă©chĂ©ances de prĂȘts. Il estime le montant de son prĂ©judice Ă  304 898 € (2 000 000 FRF). DĂ©boutĂ© par le Tribunal de Grande Instance puis par la Cour d’appel de Besançon (arrĂȘt du 30 /04 1998), il forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Cour de cassation – ArrĂȘt D. du 23 /05 /2000 La Cour de cassation, dans son arrĂȘt rendu le 23 /05 /2000 validera l’arrĂȘt de la cour d’appel aux motifs suivants : Le Code dĂ©ontologie mĂ©dicale
 « autorise le mĂ©decin Ă  limiter l’information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave ; que si une telle limitation doit ĂȘtre fondĂ©e sur des raisons lĂ©gitimes et dans l’intĂ©rĂȘt du patient, cet intĂ©rĂȘt devant ĂȘtre apprĂ©ciĂ© en fonction de la nature de la pathologie, de son Ă©volution prĂ©visible et de la personnalitĂ© du malade, la cour d’appel a, sans dĂ©naturation, procĂ©dĂ© Ă  la recherche qu’il lui est reprochĂ© d’avoir omise ; qu’elle a, en effet, par motifs propres et adaptĂ©s, constatĂ© que l’évolution sous traitement d’une psychose maniaco-dĂ©pressive ne pouvait ĂȘtre Ă©valuĂ©e avant plusieurs annĂ©es, l’état du patient ayant d’ailleurs connu une nette amĂ©lioration en 1988 et 1989, et que la rĂ©vĂ©lation de ce diagnostic devait ĂȘtre faite avec prudence compte tenu des phases mĂ©lancoliques et d’excitation maniaque ; qu’ayant ainsi souverainement estimĂ© que l’intĂ©rĂȘt du malade justifiait la limitation de l’information quant au diagnostic, la cour d’appel a pu dĂ©cider que le praticien n’avait pas commis de faute
 » ♩♩♩♩♩♩ 9
  • 10. C. LE TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION DANS LE CADRE DE LA LOI DU 4 /03 /2002 Parmi de nombreuses autres dispositions, la loi du 4 /03 /2002 relative aux droits des malades et Ă  la qualitĂ© du systĂšme de santĂ© a vocation Ă  redĂ©finir, de façon durable, le cadre gĂ©nĂ©ral de la responsabilitĂ© mĂ©dicale. Le devoir d’information est abordĂ© Ă  l’article 11 de ce texte et donne lieu Ă  l’insertion des nouveaux articles L.1111-1 et suivants au code de la santĂ© publique. La reconnaissance du droit de toute personne Ă  ĂȘtre informĂ©e sur son Ă©tat de santĂ© est consacrĂ©e. Le contenu de l’information Il porte sur les investigations, traitements ou actions de prĂ©vention proposĂ©s, leur utilitĂ©, leur urgence, leurs consĂ©quences, les risques frĂ©quents ou graves normalement prĂ©visibles, les autres solutions possibles, les consĂ©quences prĂ©visibles en cas de refus. La volontĂ© d’une personne d’ĂȘtre tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit ĂȘtre respectĂ©e sauf lorsque des tiers sont exposĂ©s Ă  un risque de transmission. L’information porte aussi, avant la dĂ©livrance des soins sur leur coĂ»t et les conditions de leur remboursement. La preuve de l’information En cas de litige, il appartient au professionnel de santĂ© d’apporter la preuve que l’information a Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©e Ă  l’intĂ©ressĂ© dans les conditions prĂ©vues par la loi. Cette preuve peut ĂȘtre apportĂ©e par tout moyen. Informer pour recueillir le consentement du patient Aucun acte mĂ©dical ne peut ĂȘtre pratiquĂ© sans le consentement libre et Ă©clairĂ© de la personne et ce consentement peut ĂȘtre retirĂ© Ă  tout moment. Ceci ne concerne bien Ă©videmment pas l’urgence. Le mĂ©decin doit respecter la volontĂ© du patient aprĂšs l’avoir informĂ© des consĂ©quences de son choix. Si la volontĂ© du patient de refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger, le mĂ©decin doit tout mettre en Ɠuvre pour le convaincre d’accepter les soins. Sauf urgence, aucune intervention ne peut ĂȘtre faite sur une personne hors d’état d’exprimer sa volontĂ© sans avoir au prĂ©alable consultĂ© sa famille ou un proche. 10
  • 11. TRAITEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION TABLEAU COMPARATIF ENTRE LA JURISPRUDENCE ET LA LOI Cour de cassation Loi du 4 /03 /2002 Jurisprudence – ArrĂȘt H. du 25 /02 /1997 Art. L.1111-1 Code de la santĂ© publique La charge de la preuve appartient au praticien La charge de la preuve appartient au praticien L’information porte sur les risques graves affĂ©rents aux L’information porte sur les risques frĂ©quents ou graves investigations et soins proposĂ©s et sur ceux qui, normalement prĂ©visibles
 exceptionnels, sont susceptibles de mettre en danger la vie ou la santĂ© du patient
 La preuve de l’information peut ĂȘtre apportĂ©e par tout moyen La preuve de l’information peut ĂȘtre apportĂ©e par tout moyen Ceux, nombreux dans le monde de la santĂ© qui espĂ©raient une remise en cause par la loi de la jurisprudence relative Ă  l’inversion de la charge de la preuve en matiĂšre d’information seront déçus. La loi en effet consacre la jurisprudence qui l’a prĂ©cĂ©dĂ©e. L’harmonie s’avĂšre ainsi totale entre les deux sources du droit. MĂȘme au niveau du contenu de l’information il n’existe aucune diffĂ©rence, en dĂ©pit des apparences, entre la Cour de cassation et le lĂ©gislateur. Les hauts magistrats Ă©voquent une nĂ©cessaire information sur « les risques graves
 et ceux qui, exceptionnels sont susceptibles de mettre en danger la vie ou la santĂ© du patient » tandis que la loi prĂ©voit l’information sur « les risques frĂ©quents ou graves normalement prĂ©visibles. » Or, un risque exceptionnel grave n’en est pas moins connu. DĂšs lors, puisqu’il est connu, ne devient-il pas « normalement prĂ©visible » ? Gageons que certaines juridictions ne manqueront pas de s’interroger sur ce point. Selon nous, la question de l’information sur les risques exceptionnels n’a pas Ă©tĂ© Ă©cartĂ©e par la loi. Enfin, que signifie « tout moyen » en matiĂšre d’apport de la preuve ? ♩♩♩♩♩♩ 11
  • 12. D. LA PREUVE DE L’ACCOMPLISSEMENT DU DEVOIR D’INFORMATION RAPPEL PREALABLE    L’information doit ĂȘtre loyale, claire et appropriĂ©e L’information est donnĂ©e au cours d’un entretien La charge de la preuve de l’information incombe au (Cour de cassation et Code de dĂ©ontologie) individuel (loi du 4 /03 /2002) praticien par tout moyen (Cour de cassation et loi) La loi du 4 /03 /2002 instaure dĂ©sormais une rĂšgle unique se situant dans une proche continuitĂ© des dispositions antĂ©rieures et dont les juges devront dĂ©sormais vĂ©rifier la bonne application. Elle tend Ă  renforcer le caractĂšre d’oralitĂ© de l’information ; l’écrit n’en est pas pour autant exclu, mĂȘme s’il ne saurait constituer un Ă©lĂ©ment probant de preuve. Quant Ă  la preuve proprement dite, elle peut et doit ĂȘtre rapportĂ©e par tous moyens ainsi que l’exigent ensemble la loi et la jurisprudence. La preuve de l’information peut ĂȘtre faite par tous moyens – (Cass. 14 /10 /1997) Les faits Une patiente de 28 ans dĂ©cĂšde des suites d’une embolie gazeuse aprĂšs avoir subi une cƓlioscopie. Sa famille assigne le chirurgien au motif d’un dĂ©faut d’information de la patiente sur le risque d’embolie gazeuse liĂ© Ă  l’opĂ©ration. Dans un arrĂȘt rendu le 31 /05 /1995, la Cour d’appel de Rennes rejette la demande de la famille. Pour les juges du fond, le fait que la patiente exerçait la profession de laborantine au sein mĂȘme de l’établissement oĂč avait eu lieu l’opĂ©ration, qu’elle s’était entretenue Ă  plusieurs reprises avec le mĂ©decin et avait enfin pris sa dĂ©cision aprĂšs une longue rĂ©flexion en manifestant de l’anxiĂ©tĂ© avant l’intervention constituent autant d’élĂ©ments de prĂ©somptions tendant Ă  prouver que l’information sur le risque d’embolie gazeuse lui avait bien Ă©tĂ© donnĂ©e. Cour de cassation – ArrĂȘt G. du 14 /10 /1997 A la suite du pourvoi formĂ© devant elle par la famille de la dĂ©funte, la Cour de cassation consacre cet arrĂȘt par sa propre dĂ©cision du 14 /10 /1997 dans les termes suivants : « S’il est exact que le mĂ©decin a la charge de prouver qu’il a bien donnĂ© Ă  son patient une information loyale, claire et appropriĂ©e sur les risques des investigations ou soins qu’il propose, de façon Ă  lui permettre d’y donner un consentement ou un refus Ă©clairé  la preuve de cette information peut ĂȘtre donnĂ©e par tous moyens (soulignĂ© par nous). La Cour d’appel ayant constatĂ© qu’il rĂ©sultait des piĂšces produites que la patiente (dĂ©cĂ©dĂ©e des suites d‘une embolie gazeuse), qui exerçait la profession de laborantine titulaire dans le centre hospitalier oĂč avait eu lieu la cƓlioscopie, avait eu divers entretiens avec son mĂ©decin, pris sa dĂ©cision aprĂšs un temps de rĂ©flexion trĂšs long et manifestĂ© de l’hĂ©sitation et de l’anxiĂ©tĂ© avant l’opĂ©ration, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’apprĂ©ciation que la cour d’appel a retenu que cet ensemble de prĂ©somptions dĂ©montrait que le mĂ©decin gynĂ©cologue avait informĂ© sa patiente du risque grave d’embolie gazeuse inhĂ©rent Ă  la cƓlioscopie. » 12
  • 13. L’apport de la preuve, par « tous moyens » donc, nĂ©cessite la constitution Ă  charge du mĂ©decin d’un faisceau de prĂ©somptions qualifiĂ© par la jurisprudence de « graves, prĂ©cises et concordantes ». Il est constituĂ© d’élĂ©ments divers, matĂ©riels (fiche d’information, dossier mĂ©dical) ou non (dĂ©lai de rĂ©flexion). Un seul parmi ces Ă©lĂ©ments n’a pas valeur de preuve. C’est leur conjonction, le fameux faisceau qui, en l’espĂšce, l’emporte. La fiche d’information En l’espĂšce, une fiche d’information remise au patient et signĂ© par lui sur les risques encourus du fait du traitement choisi et de ceux encourus en cas de refus de soins n’est pas en soi une preuve ; tout au plus une prĂ©somption. Quant au devis prĂ©alable, imposĂ© ou non par la rĂ©glementation et remis au patient, il n’a pas davantage valeur de preuve que l’information a bien Ă©tĂ© donnĂ©e. Un tel document se situe sur le seul terrain Ă©conomique. Le dossier mĂ©dical Les dispositions prĂ©vues dans le cadre de la loi du 4 /03 /2002 relatives Ă  la mise en place, la tenue et la remise au patient demandeur de son dossier mĂ©dical ont pu ĂȘtre perçues – Ă  tort – par certains mĂ©decins comme, sinon coercitives, du moins susceptibles de favoriser un sentiment de dĂ©fiance du patient Ă  leur endroit. Chacun aujourd’hui peut se rendre compte qu’il n’en n’était rien, ni dans l’esprit, ni dans la lettre. Mieux, avec le recul, on perçoit Ă  quel point le dossier mĂ©dical est susceptible de constituer non pas une preuve, mais un Ă©lĂ©ment assez dĂ©terminant de prĂ©somption tendant Ă  manifester le respect par le mĂ©decin de son devoir d’information. Puisque doivent figurer dans ce dossier toutes les donnĂ©es objectives liĂ©es Ă  l’état de santĂ© du patient Ă  la suite des examens successifs, des soins prodiguĂ©s et la constatation de leurs effets, nous pensons que se trouve dĂšs lors dĂ©crit dans ce document, ou Ă  tout le moins rĂ©solument Ă©bauchĂ©, le cadre du colloque singulier. Le dĂ©lai de rĂ©flexion Le dĂ©lai de rĂ©flexion peut ĂȘtre rĂ©glementaire. C’est notamment le cas en chirurgie esthĂ©tique. Le dĂ©cret n° 2005- 777 du 11 /07 /2005 prĂ©voit un dĂ©lai de rĂ©flexion de quinze jours, sans qu’il soit possible d’y dĂ©roger aprĂšs la remise du devis dĂ©taillĂ© par le chirurgien Ă  son patient. Mais hors les cas oĂč la rĂ©glementation l’impose et pour autant bien entendu que cela ne n’aggrave en rien l’état de santĂ© du patient, un dĂ©lai de rĂ©flexion peut aussi lui ĂȘtre proposĂ©. Un document Ă©crit l’informe alors des risques qu’il encourt du fait de l’intervention envisagĂ©e. Le patient signe ce document qui stipule par ailleurs que, durant la pĂ©riode de rĂ©flexion, le praticien reste Ă  sa disposition pour toutes informations complĂ©mentaires. Cette construction fera l’objet d’un nouvel arrĂȘt rendu par la haute Juridiction qui, en parachevant le travail entrepris depuis l’arrĂȘt fondateur du 25 /02 /1997, dĂ©finira prĂ©cisĂ©ment les Ă©lĂ©ments constitutifs du faisceau de prĂ©somption en matiĂšre d’apport de la preuve. 13
  • 14. La jurisprudence dĂ©finit les Ă©lĂ©ments du « tous moyens » en matiĂšre de preuve de l’information – (Cass. 4 /01 /2005) Les faits AprĂšs avoir accouchĂ© d’un enfant trisomique, une patiente assigne son gynĂ©cologue. Elle reproche Ă  celui-ci – il s’en dĂ©fend – de ne l’avoir pas informĂ© de la nĂ©cessitĂ© d’une amniocentĂšse alors mĂȘme qu’elle suivait une grossesse Ă  risque. DĂ©boutĂ©e en appel, la patiente forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Dans son arrĂȘt rendu le 4 /01 /2995, la 1Ăšre chambre civile de la Haute Juridiction rejette ce pourvoi au motif que le mĂ©decin a bien prouvĂ© la dĂ©livrance de l’information permettant la patiente de consentir ou refuser l’amniocentĂšse. Cour de cassation – ArrĂȘt G. du 4 /01 /2005 « 
 Le mĂ©decin prouve par tous moyens la dĂ©livrance de l’information permettant au patient d’émettre un consentement ou un refus Ă©clairĂ© quant aux investigations et soins auxquels il est possible de recourir
 Il rĂ©sultait des attestations produites par la patiente, ses dĂ©clarations au cours de l’expertise et du dossier mĂ©dical que la patiente avait Ă©tĂ© particuliĂšrement sensibilisĂ©e Ă  l’éventualitĂ© de l’examen dont il s’agit
 et que le refus de la patiente figurait dans la lettre adressĂ© pour ce motif par le mĂ©decin Ă  une consƓur en vue d’une Ă©chographie de substitution
 » L’arrĂȘt du 4 /01 /2005 est d’une grande portĂ©e. Se trouvent enfin Ă©numĂ©rĂ©s les moyens de preuve : attestations produites par la patiente, ses dĂ©clarations au cours de l’expertise, examen du dossier mĂ©dical et, fait nouveau, la lettre Ă©crite par le mĂ©decin Ă  sa consƓur notifiant le refus de la patiente de subir une amniocentĂšse. En droit, il s’agit d’une preuve dite « auto-constituĂ©e. » Certes, ce n’est pas cette preuve auto-constituĂ©e qui exonĂšre le praticien poursuivi. L’exonĂ©ration repose toujours sur le fameux faisceau de prĂ©somptions « graves, prĂ©cises et concordantes » et la preuve auto-constituĂ©e n’est qu’un Ă©lĂ©ment parmi d’autres (le dossier mĂ©dical, les dĂ©clarations de la patiente, etc.) de ce faisceau. C’est pourquoi prĂ©sentĂ©e comme argument unique, cette preuve ne suffirait bien entendu pas Ă  emporter la conviction du magistrat. Il n’empĂȘche. Pour autant que cette jurisprudence se confirme, voilĂ  dĂ©sormais matiĂšre Ă  allĂ©ger sensiblement la charge de la preuve incombant au professionnel de santĂ©. 14
  • 15. E. INDEMNISATION DU DEFAUT D’INFORMATION : RESPONSABILITE MEDICALE ET ONIAM La perte de chance nĂ©e du dĂ©faut d’information implique une rĂ©paration intĂ©grale du dommage entre le praticien et l’ONIAM – (Cass. 11 /03 /2010) Les faits OpĂ©rĂ© d’une hernie discale, un patient reste paralysĂ© des membres infĂ©rieurs. Avant l’intervention, il avait signĂ© un consentement type faisant Ă©tat de « complications y compris vitales » sans qu’elles soient nommĂ©es. Le dĂ©lai de rĂ©flexion entre la signature et l’intervention a Ă©tĂ© de 12 jours. Le patient assigne le chirurgien et l’ONIAM devant le TGI de Marseille. Le TGI met le chirurgien hors de cause. Au vu des expertises, il est intervenu conformĂ©ment aux donnĂ©es de la Science. Le TGI met Ă  la charge de l’ONIAM la rĂ©paration intĂ©grale du prĂ©judice (alĂ©a thĂ©rapeutique). L’ONIAM interjette appel. Par arrĂȘt du 10 /09 /2008, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence infirme le jugement. Le praticien n’a pas commis de faute mĂ©dicale mais il a failli Ă  son devoir d’information crĂ©ant, pour le patient, une perte de chance d’échapper au prĂ©judice. Qui plus est, selon la cour, l’état du patient ne justifiait pas l’urgence de l’intervention. Et ce patient a Ă©tĂ© privĂ© du temps de rĂ©flexion suffisant pour dĂ©cider d’accepter ou non le risque. La rĂ©paration du dommage nĂ© du dĂ©faut d’information est Ă©valuĂ©e Ă  80 %. Quant Ă  l’ONIAM, il est mis hors de cause car l’indemnisation par le biais de la solidaritĂ© nationale ne peut ĂȘtre que subsidiaire. Le chirurgien et son assureur forment un pourvoi devant la Cour de cassation. Ils reprochent Ă  la cour d’appel sa dĂ©cision de condamner le praticien alors que le patient avait Ă©tĂ© informĂ© du risque de paraplĂ©gie inhĂ©rent au geste opĂ©ratoire et que ce geste, appropriĂ©, avait Ă©tĂ© accompli dans les rĂšgles de l’art. La victime forme quant Ă  elle un pourvoi incident contre la dĂ©cision d’appel d’écarter l’ONIAM de la rĂ©paration du prĂ©judice non indemnisĂ© par l’assureur du chirurgien (20 %). Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 11 /03 /2010 La haute cour rejette le pourvoi principal formĂ© par le chirurgien et son assureur. Elle revanche, elle accueille le pourvoi incident en cassant l’arrĂȘt d’appel sur la dĂ©cision des juges du fond d’écarter l’ONIAM du complĂ©ment d’indemnisation au motif qu’il ne peut ĂȘtre que subsidiaire. Sur le moyen du pourvoi : « 
 attendu que la cour d’appel a tout d’abord, pour Ă©carter toute faute diagnostique ou opĂ©ratoire de M. X (le chirurgien), retenu que l’intervention chirurgicale Ă©tait une rĂ©ponse thĂ©rapeutique adaptĂ©e, mĂȘme si la nĂ©cessitĂ© immĂ©diate n’en Ă©tait pas justifiĂ©e
 qu’elle a ensuite constatĂ© qu’en raison du court laps de temps qui avait sĂ©parĂ© la consultation initiale et l’opĂ©ration, M. Y (le patient) n’ayant reçu aucune information sur les diffĂ©rentes techniques envisagĂ©es, les risques de chacune et les raisons du choix de M. X pour l’une d’entre elles, n’avait pu bĂ©nĂ©ficier d’un dĂ©lai de rĂ©flexion pour mĂ»rir sa dĂ©cision
 ce dont il rĂ©sultait qu’en privant M. Y de la facultĂ© de consentir d’une façon Ă©clairĂ©e Ă  l’intervention, M. X avait manquĂ© Ă  son devoir d’information
 il a privĂ© M. Y d’une chance d’échapper Ă  une infirmité  Sur le moyen du pourvoi incident : « Ne peuvent ĂȘtre exclus du bĂ©nĂ©fice de la rĂ©paration au titre de la solidaritĂ© nationale les prĂ©judices non indemnisĂ©s ayant pour seul origine un accident non fautif ; 
 que pour rejeter la demande dirigĂ©e par M. Y contre l’ONIAM
 l’arrĂȘt retient qu’une faute a Ă©tĂ© retenue Ă  l’encontre du praticien, l’indemnisation est Ă  la charge de ce dernier, l’obligation d’indemnisation par la solidaritĂ© nationale n’étant que subsidiaire ; Qu’en statuant ainsi alors que l’indemnitĂ© allouĂ©e Ă  M. Y avait pour objet de rĂ©parer le prĂ©judice nĂ© d’une perte de chance d’éviter l’accident mĂ©dical litigieux, accident non imputable Ă  une faute de M. X Ă  l’encontre duquel avait Ă©tĂ© exclusivement retenu un manquement Ă  son devoir d’information
 Par ces motifs
 Casse et annule mais seulement en sa disposition mettant hors de cause l’ONIAM
 » 15
  • 16. Personne ne s’y trompe. L’arrĂȘt de cassation du 11 /03 /2010 (1Ăšre ch. civ.) marque une nouvelle inflexion dans l’approche par les hauts magistrats de l’incontournable question de l’information due au patient. En rejetant le principe de subsidiaritĂ© de l’ONIAM au profit du principe de complĂ©mentaritĂ© entre celui-ci et la RC du praticien, la cour fixe une rĂšgle nouvelle permettant une totale indemnisation de la victime. Il s’agit, en soi, d’une audacieuse avancĂ©e tant elle ouvre des perspectives, notamment dans la perception de la nature mĂȘme de la faute d’information. Qu’on en juge. La Cour d’appel d’Aix-en-Provence considĂšre que la paraplĂ©gie dont le patient est dĂ©sormais atteint ne rĂ©sulte pas d’une faute mĂ©dicale (choix de la stratĂ©gie thĂ©rapeutique, conduite du geste
) mais d’un dĂ©faut d’information patent.  L’opĂ©ration prĂ©sentait des risques, y compris vitaux alors que l’étroitesse du dĂ©lai de rĂ©flexion laissĂ© au patient ne lui laisse guĂšre un choix raisonnĂ© pour accepter ou non le risque.  Les informations indispensables sur les diffĂ©rentes techniques envisagĂ©es, les risques induits par chacune d’entre elles et les raisons du choix du chirurgien ne sont pas abordĂ©s de façon orale devant lui.  Facteur aggravant, en dĂ©pit du fait que M. Y prĂ©sente une hernie volumineuse, l’intervention ne prĂ©sente pas un caractĂšre d’urgence absolue. Pour les juges du fond, il y a lĂ  autant de facteurs constitutifs d’une faute d’information ayant fait perdre une chance Ă  M. Y d’échapper au prĂ©judice. La rĂ©paration consĂ©cutive Ă  cette perte de chance s’évalue Ă  80 % du prĂ©judice. Mais qu’en est-il des 20 % non indemnisĂ©s ? La cour d’appel estime que la solidaritĂ© nationale ne peut jouer dans la mesure oĂč le dommage ne rĂ©sulte pas d’un alĂ©a thĂ©rapeutique mais d’une faute, ici matĂ©rialisĂ©e par le dĂ©faut d’information du chirurgien. Et l’ONIAM na pas Ă  intervenir puisque la RC du mĂ©decin fautif a normalement jouĂ©. Il s’agit de l’application mĂȘme du principe de subsidiaritĂ©. L’ONIAM intervient seul, en rĂ©paration d’un alĂ©a ou n’intervient pas du tout (sauf dĂ©rogation prĂ©vue article L. 1142-18 du code de la santĂ© publique). La perception de la Cour de cassation est autre. Selon elle, le dĂ©faut d’information n’est pas une faute « comme les autres », c’est-Ă -dire une de celles survenues dans la conduite « d’actes de prĂ©vention, de diagnostic ou de soins » tel que l’exprime la loi (art. L. 1142-1-II du code de la santĂ© publique). Le dĂ©faut d’information est une faute « Ă©thique » ou « morale », non une faute mĂ©dicale de prĂ©vention, de diagnostic ou de soins. Cette faute morale reste une faute autonome, sans causalitĂ© directe avec le prĂ©judice. En effet, le prĂ©judice ne naĂźt pas du dĂ©faut d’information. Il naĂźt soit d’une faute mĂ©dicale, soit du risque inhĂ©rent au geste ou Ă  la pathologie, soit d’un alĂ©a thĂ©rapeutique. C’est pourquoi l’on rĂ©pare le dommage qui aurait pu ĂȘtre Ă©cartĂ© si l’information avait Ă©tĂ© donnĂ©e de façon claire, loyale et appropriĂ©e par le biais d’un instrument spĂ©cifique : la perte de chance, et cette rĂ©paration est partielle. Il en rĂ©sulte qu’au sens de l’arrĂȘt du 11 /03 /2010, cette faute parce qu’elle est morale et non pas mĂ©dicale, ouvre voie Ă  une indemnisation intĂ©grale mariant RC et solidaritĂ© nationale. On mesure ici la portĂ©e d’une telle jurisprudence, fruit de la singularitĂ© de la faute d’information. 16
  • 17. F. L’AUTONOMIE DE LA FAUTE RESULTANT DU DEFAUT D’INFORMATION : DU REJET A LA RECONNAISSANCE Le manquement au devoir d’information n’est pas source de prĂ©judice moral– (Cass. 6 /12 /2007) Les faits Un patient reste hĂ©miplĂ©gique des suites d’une opĂ©ration pour carotidie avant de succomber 3 annĂ©es plus tard, son Ă©tat n’ayant cessĂ© de se dĂ©grader. La veuve et son fils intentent une action en rĂ©paration contre le chirurgien au double motif de leur prĂ©judice et de celui de leur Ă©poux et pĂšre. Par arrĂȘt rendu le 30 06 /2006, la Cour d’appel de Bordeaux considĂšre que le chirurgien a commis une faute en n’informant pas le patient du risque d’hĂ©miplĂ©gie qui s’est rĂ©alisĂ©e. Toutefois, elle Ă©carte la rĂ©paration du prĂ©judice au titre de la perte de chance au motif que compte tenu de la gravitĂ© de son Ă©tat et eu Ă©gard au fait que le risque d’hĂ©miplĂ©gie Ă©tait faible, le patient, mĂȘme informĂ© n’aurait pas refusĂ© l’opĂ©ration. Les juges du fond caractĂ©risent nĂ©anmoins le prĂ©judice moral du dĂ©funt et de sa famille et accordent Ă  l’un et aux autres la somme de 3 000 €. La famille du dĂ©funt forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Elle conteste la dĂ©cision des juges du fond de refuser l’indemnisation de la perte de chance. Le chirurgien et son assureur forment un pourvoi incident contre la double indemnisation du prĂ©judice moral dĂ©cidĂ©e par la cour. Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 6 /12 /2007 La Cour de cassation rejette le pourvoi formĂ© par la famille au motif « 
 que l’on devait considĂ©rer que, compte tenu de la gravitĂ© du problĂšme cardiaque, de son Ă©volution rapide et du caractĂšre relativement faible du risque encouru
 le patient se serait fait opĂ©rer mĂȘme si le mĂ©decin l’avait avisĂ© d’une possibilitĂ© de complication ; qu’il ne pouvait donc ĂȘtre soutenu que le dĂ©faut d’information avait fait perdre au patient une chance de ne pas subir la pathologie dont il a Ă©tĂ© atteint
 » Elle casse en revanche la partie de l’arrĂȘt ouvrant indemnisation du prĂ©judice moral du patient et de sa famille, considĂ©rant « 
 que le seul prĂ©judice indemnisable Ă  la suite du non respect de l’obligation d’information du mĂ©decin
 est la perte de chance d’échapper au risque qui s’est finalement rĂ©alisé  » Si le devoir d’information revĂȘt dĂ©sormais un caractĂšre rĂ©galien, il faut nĂ©anmoins estimer que le manquement Ă  ce devoir n’ouvre pas voie Ă  la perte de chance et donc Ă  son indemnisation lorsque, eu Ă©gard Ă  la gravitĂ© de son Ă©tat, le malade, mĂȘme dĂ»ment informĂ© n’aurait pas refusĂ© l’opĂ©ration et le risque consĂ©cutif. A la date de son rendu, l’arrĂȘt reprend sans surprise une jurisprudence jusqu’alors d’une grande constance. La rĂ©paration du prĂ©judice moral est, quant Ă  elle Ă©cartĂ©e par les hauts magistrats, le seul prĂ©judice indemnisable (et les conditions d’indemnisation ne sont pas ici rĂ©unies) demeurant la perte de chance d’échapper au risque. Il n’empĂȘche, en reconnaissant la rĂ©alitĂ© du prĂ©judice moral nĂ© du dĂ©faut d’information – Ă  dĂ©coupler complĂštement de la perte de chance – et mĂȘme si la disposition est cassĂ©e, la Cour d’appel de Bordeaux ouvre un chemin sur lequel la Cour de cassation ne va pas tarder Ă  se situer elle-mĂȘme. 17
  • 18. Sauf incapacitĂ© Ă  consentir, le non-respect du devoir d’information est source de prĂ©judice qu’il convient d’indemniser – (Cass. 3 /06 /2010) Les faits Un mĂ©decin urologue pratique une adĂ©nomectomie prostatique sur un patient souffrant de rĂ©tention d’urine. A la suite de l’intervention, celui-ci demeure atteint d’une impuissance sexuelle complĂšte et dĂ©finitive. Il recherche la responsabilitĂ© du praticien sur deux motifs : la faute technique et le dĂ©faut d’information sur le risque d’impuissance sexuelle liĂ©e Ă  l’opĂ©ration. Dans un arrĂȘt rendu le 9 /04 /2008, la Cour d’appel de Bordeaux le dĂ©boute de l’ensemble de ses demandes. Le geste a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© dans les rĂšgles de l’art, il Ă©tait nĂ©cessaire et il n’existait pas d’alternative. Eu Ă©gard au danger d’infection que faisait courir la sonde vĂ©sicale, il est peu probable que le patient aurait renoncĂ© Ă  l’intervention, mĂȘme dĂ»ment averti du risque d’impuissance que celle-ci prĂ©sentait. Le patient forme un pourvoi devant la Cour de cassation sur plusieurs branches : le geste opĂ©ratoire, le suivi post-opĂ©ratoire et le dĂ©faut d’information. Cour de cassation – ArrĂȘt X. du 3 /06 /2010 La Cour de cassation rejette les deux premiĂšres branches du pourvoi mais accueille la troisiĂšme, cassant en cette disposition l’arrĂȘt de la Cour de Bordeaux dans les termes suivants : « Attendu
 que toute personne a le droit d’ĂȘtre informĂ©e, prĂ©alablement aux investigations, traitements ou actions de prĂ©vention proposĂ©es, des risques inhĂ©rents Ă  ceux-ci, et que son consentement doit ĂȘtre recueilli par le praticien, hors le cas oĂč son Ă©tat rend nĂ©cessaire une intervention thĂ©rapeutique Ă  laquelle elle n’est pas Ă  mĂȘme de consentir ; que le non-respect du devoir d’information qui en dĂ©coule, cause Ă  celui auquel l’information Ă©tait lĂ©galement due, un prĂ©judice
 que le juge ne peut laisser sans rĂ©paration
 Par ses motifs, casse et annule
 » MĂȘme si le geste opĂ©ratoire Ă©tait nĂ©cessaire Ă  la santĂ© et peut-ĂȘtre Ă  la survie du patient ne devait-il ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ© d’une information claire, loyale et appropriĂ©e sur les risques encourus, notamment le risque d’impuissance sexuelle complĂšte et dĂ©finitive ? Et, en l’absence de faute mĂ©dicale prouvĂ©e, ce seul manquement induit-il Ă  lui seul un prĂ©judice indemnisable ? Telle est, en l’occurrence la question posĂ©e Ă  la Cour de cassation Ă  laquelle elle rĂ©pond par l’affirmative. Contrairement Ă  d’autres observateurs, nous ne voyons rien de rĂ©ellement surprenant dans le rendu de l’arrĂȘt du 3 /06 /2010. Cet arrĂȘt ne constitue pas une inflexion de la jurisprudence. Il n’est que le logique prolongement Ă  la construction jurisprudentielle entreprise depuis le 25 /02 /1997. Il prend naturellement en compte les principes de notre droit en matiĂšre de protection de la personne humaine. La Haute cour fait tout d’abord rĂ©fĂ©rence aux principes rĂ©gis au livre I – Chapitre 2 du Code civil « Du respect de la personne humaine ». - Article 16 : « La loi assure la primautĂ© de la personne, interdit toute atteinte Ă  la dignitĂ© de celle-ci et garantit le respect de l’ĂȘtre humain. » 18
  • 19. - Article 16-3 : « Le consentement de l’intĂ©ressĂ© doit ĂȘtre recueilli prĂ©alablement hors le cas oĂč son Ă©tat rend nĂ©cessaire une intervention thĂ©rapeutique Ă  laquelle il n’est pas Ă  mĂȘme de consentir. » Elle en appelle ensuite Ă  l’article 1382 tirĂ© du livre III – Chapitre 2 « Des dĂ©lits et des quasi-dĂ©lits » qui stipule que « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause Ă  autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivĂ© Ă  le rĂ©parer. » Et cet article n’est que la traduction du fameux principe du primum non nocere. Ainsi la Cour de cassation n’invente rien (ce qui Ă©chapperait Ă  ses prĂ©rogatives par ailleurs !) Depuis fort longtemps, notre droit traite de façon autonome de la question Ă©thique et du respect du corps. Nombre de textes internationaux comme, parmi d’autres, La DĂ©claration universelle sur la bioĂ©thique et les droits de l’homme (UNESCO – 19 /10 /2005) font de mĂȘme. Il est naturel qu’au bout du compte, cette autonomie en matiĂšre de traitement se prolonge d’une autonomie en matiĂšre de responsabilitĂ© – on parlera alors de « responsabilitĂ© Ă©thique » ou de « responsabilitĂ© morale » – et d’une autonomie en matiĂšre de faute avec obligation de rĂ©parer cette faute Ă©thique ou cette faute morale. Reste Ă  dĂ©finir comment mais en lui-mĂȘme le principe est acquis. En parallĂšle, la force considĂ©rable confĂ©rĂ©e au consentement par la loi du 4 /03 /2002 relative aux droits des patients et Ă  la qualitĂ© du systĂšme de santĂ©, loi qui rĂ©git aujourd’hui la responsabilitĂ© mĂ©dicale relĂšve d’une prĂ©occupation identique du lĂ©gislateur. Il n’est pas possible au praticien d’intervenir sans le consentement « libre et Ă©clairĂ© » du patient et ce consentement peut ĂȘtre retirĂ© Ă  tout moment (art. L. 1111-4-3). Or ce consentement naĂźt, nous l’avons Ă©noncĂ© plus haut, d’une information claire, loyale et appropriĂ©e sur les risques propres Ă  la stratĂ©gie thĂ©rapeutique proposĂ©e. L’absence de consentement est d’évidence fautive au sens de ce texte. MĂȘme si l’intervention est mĂ©dicalement justifiĂ©e, voire indispensable Ă  la santĂ© du patient, dĂšs lors qu’en Ă©tat de donner son consentement celui-ci n’a pas Ă©tĂ© recherchĂ© par l’homme de l’art, la faute est lĂ , patente, autonome. C’est le message que nous adresse la Cour de cassation dans son arrĂȘt du 3 /06 /2010. La Haute juridiction poursuit donc son travail d’apprĂ©hension globale de la dĂ©licate question lĂ©gale et dĂ©ontologique de l’information due au patient. Elle enrichit aujourd’hui sa construction jurisprudentielle d’élĂ©ments Ă©thiques et moraux inhĂ©rents au respect du corps. Qui l’en blĂąmera ? Commentaire extrait note JV – 04 /2010 – LE DEFAUT D’INFORMATION DU MEDECIN ENVERS SON PATIENT CONSTITUE-T-IL UNE FAUTE AUTONOME ? 19
  • 20. CONCLUSION (provisoire
) Si la jurisprudence de la Cour de cassation en matiĂšre d’information du mĂ©decin envers son patient s’avĂšre, par essence mĂȘme Ă©volutive, elle n’est en revanche ni exploratoire ni aventureuse. Nous distinguons dans chacune des Ă©tapes essentielles qui jalonnent son parcours, soit l’application sous jacente des prĂ©ceptes du droit tels qu’ils existent, soit lorsque ces prĂ©ceptes n’existent pas, la fixation de rĂšgles qu’il convient alors d’expliquer, voire d’amender ensuite. Le temps n’est plus vraiment au seul questionnement sur les moyens de preuve que l’information a bien Ă©tĂ© donnĂ©e au patient (et comprise de lui) ou sur le contenu de celle-ci. Avec le temps, des orientations de plus en plus prĂ©cises auxquels les praticiens peuvent se rĂ©fĂ©rer ont Ă©tĂ© dĂ©finies. Tout n’est pas balisĂ© pour autant, loin s’en faut. De notables contradictions prĂ©judiciables Ă  tous, mĂ©decins et patients commencent Ă  poindre ici ou lĂ . Prenons ainsi l’exemple du code de dĂ©ontologie mĂ©dicale qui, nous l’avons vu (page 8 de l’étude) admet que le malade puisse ĂȘtre tenu dans l’ignorance de son Ă©tat, ceci dans son intĂ©rĂȘt « et pour des raisons lĂ©gitimes que le mĂ©decin apprĂ©cie en conscience
 » La jurisprudence s’est certes calĂ©e sur cette disposition (arrĂȘt du 23 /05 /2000) mais pour combien de temps encore ? Car il y a antinomie entre le silence du mĂ©decin et la norme nouvellement consacrĂ©e par la jurisprudence par laquelle le dĂ©faut d’information s’assimile Ă  une faute autonome. Intervenir sur le corps du patient nĂ©cessite son consentement, mĂȘme si les soins s’avĂšrent indispensables. Se taire c’est commettre une faute : nier la personne dans sa dignitĂ© et le respect qui lui est dĂ». Comment les juges vont-ils gĂ©rer cette opposition frontale de principes ? Il faut espĂ©rer qu’ils le feront en laissant au praticien la latitude sans laquelle il n’exerce plus librement. Mais le droit (c’est-Ă -dire la loi) leur laissera-t-il le choix ? Pour le reste, les nouvelles et puissantes avancĂ©es de la jurisprudence depuis le dĂ©but de l’annĂ©e 2010 ont surpris beaucoup de monde. Il est vrai qu’en moins de trois mois, entre le 11 /03 et le 3 /06 /2010, les contours du devoir d’information se sont trouvĂ©s fortement modifiĂ©s : - par l’ouverture vers une indemnisation intĂ©grale du prĂ©judice (perte de chance par la RC, faute morale d’information par la solidaritĂ© nationale) ; - par la consĂ©cration de l’autonomie de la faute d’information. MĂȘme en connaissant l’attachement sĂ©culaire des juges Ă  une indemnisation complĂšte du dommage corporel, nous avons Ă©tĂ© surpris par la premiĂšre disposition tant le principe d’une rĂ©paration partielle par la seule perte de chance nous paraissait gravĂ© dans le marbre. Pour la faute autonome au contraire, le droit tel qu’il est Ă©crit ne laissait pas d’autre alternative. Quel paradoxe que cet arrĂȘt du 3 /06 /2010, si prĂ©visible et pourtant tellement commentĂ© ! 20