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République Tunisienne
Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique, des Technologies de
l’Information et de la Communication
Université de Jendouba
Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et de Gestion de Jendouba
Mémoire pour l’obtention du diplôme de Mastère Recherche en
Management
Elaboré par :
Ouesleti Manel
Dirigé par :
Mr. Ben Nomee Tarek
ANNEE UNIVERSITAIRE
2013-2014
Le management stratégique de la RSE : le
cas des entreprises hôtelières en Tunisie
« Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre
Ni de réussir pour persévérer ».
Guillaume d’Orange-Nassau
Dédicaces
A mon grand-père
A mes parents
A tous ceux qui me sont chers
Remerciements
Mes remerciements vont tout d’abord à Monsieur Ben Noumène Tarek d’avoir accepté d’encadrer ce
travail de recherche. Je le remercie de m’avoir fait confiance et de m’avoir consacré beaucoup de son
temps et de sa patience et de m’avoir surtout encouragé sans cesse à des moments où le doute prenait le
pas sur la motivation. Ses conseils, ses remarques, sa disponibilité, son écoute et sa compréhension ont
largement contribué à ce que ce mémoire arrive à son terme aujourd’hui.
Mes remerciements s’adressent également au Professeur Ammar Hassen d’avoir accepté d’évaluer ce
travail, mais aussi pour sa disponibilité et pour ses critiques et ses conseils enrichissants qui ont contribué
à préciser ma pensée.
Je tiens aussi à exprimer ma gratitude à Bahbah Ahmed Brahim, doctorant Algérien, qui m’a soutenu et
apporté une aide précieuse.
Je tiens également à remercier les membres du jury qui ont accepté de consacrer une partie de leur temps
précieux pour l’évaluation de ce travail.
Merci également à l’ensemble des enseignants-chercheurs et doctorants rencontrés dans le cadre des
universités d’été, des séminaires et qui par leurs conseils avisés et leurs encouragements m’ont aidé à
avancer dans ce mémoire.
Je tiens également à remercier tous les dirigeants qui m’ont accueillie dans leur entreprise pour réaliser
mon enquête exploratoire et ceux qui ont répondu à mes questions. Je tiens également à remercier mes
collègues de la faculté de Jendouba. Je remercie ma chère amie Sayarri Hammami Fahima pour l’aide
tout au long de mes recherches. Enfin, je ne saurai oublier ma famille, mes parents notamment, qui ont su
faire preuve de patience à mon égard et qui ont toujours été présents par leur écoute et leurs conseils.
Je vous remercie tous sincèrement.
Sommaire
Introduction générale-------------------------------------------------------------------------------------------------- 1
Chapitre 1 : Revue de littérature----------------------------------------------------------------------------------- 1
Section 1 : Définitions : l’absence d’une définition consensuelle --------------------------------------------- 4
Section 2 : Evolution historique du concept de RSE------------------------------------------------------------- 9
Section 3 : Fondements théoriques de la RSE -------------------------------------------------------------------16
Chapitre 2 : le mangement et le management stratégique de la RSE -------------------------------------26
Section 1 : Le management stratégique---------------------------------------------------------------------------27
Section2 : Le management stratégique de la RSE---------------------------------------------------------------32
Section 3 : la stratégie RSE comme une réponse aux contraintes internes et externes de l’entreprise --42
Chapitre 3 : Positionnement épistémologique et méthodologie de la Recherche-----------------------46
Section 1 : Posture épistémologique et démarche de recherche-----------------------------------------------47
Section 2 : Enoncé de la problématique et formulation des hypothèses de recherche ---------------------52
Section 3 : Une étude qualitative ----------------------------------------------------------------------------------55
Chapitre 4 : Résultats et analyse des résultats -----------------------------------------------------------------69
Section 1 : Présentation des résultats------------------------------------------------------------------------------71
Section 2 : Résultats de l’étude ------------------------------------------------------------------------------------76
Section 3 : Analyse des résultats-----------------------------------------------------------------------------------88
Conclusion générale---------------------------------------------------------------------------------------------------94
Références bibliographies -------------------------------------------------------------------------------------------96
Annexes---------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 108
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
1
Introduction générale
Les recherches en sciences de gestion peuvent désigner divers courants théoriques. Elles se basent
notamment sur la conception de l’entreprise et au travers d’elle ainsi que sur l’étendue de sa
responsabilité.
Entre une vision néoclassique réduisant la responsabilité de l’entreprise à la seule satisfaction des
actionnaires Friedman, (1970) et une conception qu’a développée le rôle de l’entreprise pour prendre en
considération les intérêts de ses parties prenantes Freeman, (1984), la question essentielle du périmètre de
l’entreprise et de sa responsabilité fait débat.
Les préoccupations des sphères économiques, politiques et sociétales mondiales rejoignent aujourd’hui
les discussions académiques. Une économie mondialisée, conjuguée à une prise de conscience croissante
des dangers environnementaux et des difficultés sociales engendre un questionnement sur le rôle de
l’entreprise.Ce questionnement, vif depuis les scandales qui ont secoué la légitimité des entreprises au
début des années 2000 Salmon, (2005) s’est également accru avec la récente crise financière.
Au-delà de la vision restrictive proposée par les néoclassiques, une vision partenariale de l’entreprise se
diffuse en sciences de gestion et dans les milieux managériaux, prônant une intégration des partenaires de
l’entreprise dans la prise de décision. De manière plus globale, on parle désormais de la responsabilité
sociale de l’entreprise (RSE) engagée de manière croissante dans une démarche stratégique.
L’expansion de la RSE dans les discours des entreprises, mais aussi dans les travaux de recherche
notamment en sciences de gestion Dreveton et Krupicka, (2005) démontrent si besoin était qu’il ne s’agit
pas d’un « effet de mode ».
Liée à la préoccupation ancienne du développement durable, la RSE apparaît comme un concept flou et
multidimensionnel apparu précisément aux Etats-Unis au début du vingtième siècle dans les milieux
d’affaires.
Entre la « Corporate Social Responsibility » états-unienne, créée par l’histoire socio-économique du pays
et la religion protestante, et un sens plus français de la RSE considérée comme une appropriation de la
problématique de la durabilité par les entreprises Capron et Quairel-Lanoizelée, (2007), de nombreuses
interprétations coexistent.
La commission européenne définissait la RSE en 2001 comme « l’intégration volontaire par les
entreprises des préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs
relations avec leurs parties prenantes » Commission Européenne, (2001).
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
2
La conciliation des impératifs environnementaux et sociaux aux impératifs économiques, le dépassement
des obligations légales, mais aussi l’intégration d’une stratégie RSE dans une entreprise semblent
constituer le dénominateur commun de nombreuses définitions de la RSE.
Dans les dernières années, les entreprises en Tunisie semblent s’être approprié la problématique de la
responsabilité sociale en l’intégrant dans leur management.
Dans ce contexte nous nous interrogeons si les entreprises du secteur hôtelier en Tunisie sont concernées
par l’intégration de la RSE dans leur management. En effet, l’entreprise hôtelière par son implantation, sa
puissance, sa taille mais aussi son impact sur l’environnement au sens large la pose au cœur des
réflexions.
Dans le cadre de ce travail de recherche, nous tenterons de répondre à la problématique suivante :
Comment les dirigeants des entreprises hôtelières en Tunisie perçoivent-ils l’intégration de la RSE dans
une perspective stratégique ?
Afin de répondre à cette question, nous nous basons sur le modèle de Quairel-Lanoizelée (2007).
Sur le plan méthodologique, nous recourrons à une étude qualitative basée sur des entretiens semi-
directifs auprès d’un échantillon de dirigeants d’entreprises hôtelières.
Notre travail s’articule en deux parties :
La première partie sera consacrée à la revue de littérature dans laquelle nous analyserons le concept de la
responsabilité sociale de l’entreprise. Afin de mieux comprendre ce concept au cœur de notre
problématique, cette première partie proposera une étude des origines et des approches théoriques
mobilisables en matière de RSE.
Dans le premier chapitre, nous tenterons de définir le concept de la RSE, d’étudier son émergence en
revenant aux origines religieuses, historiques et théoriques de son apparition.
Enfin nous reviendrons sur les grandes approches théoriques mobilisables en matière de RSE, ainsi que
les approches des théories des organisations.
Dans le deuxième chapitre, nous étudierons la notion du management stratégique de la RSE ainsi que les
facteurs qui poussent un manager à opter pour une démarche de management stratégiques RSE.
La seconde partie sera consacrée à une présentation approfondie du cadre théorique, méthodologique de
cette recherche ainsi que des résultats obtenus.
Dans le troisième chapitre nous présenterons notre posture épistémologique et nous formulons de manière
détaillée notre problématique, ainsi que nos hypothèses de recherche. Le quatrième chapitre quant à lui
sera consacré à la présentation et l’analyse des résultats.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
Chapitre 1 :
Revue de littérature
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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Introduction
La Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE) est devenue, ces dernières années, l’un des thèmes les
plus importants pour plusieurs disciplines de la littérature managériale. Ce concept correspond à
l’intégration d’objectifs sociaux avec ceux d’ordre économique Tebini, (2010).
La RSE, est loin de faire l’unanimité, quelle que soit dans la pratique de l’entreprise que dans le domaine
académique, même si la nouvelle notion RSE trouve, depuis quelque temps, un écho l’ambiguïté serait dû
aux enjeux théoriques, managériaux et idéologiques relatifs au concept Locket et coll, (2006).
Pour comprendre le concept RSE, il faut se baser sur les positions de certains auteurs.
Le but étant de fournir un panorama général des débats relatifs à la RSE. Mais sans prendre en compte
tous les débats liés au thème, nous essayerons d’en étudier les plus saillants.
Tout d’abord, nous passerons en revue les débats et nous verrons que le concept donne lieu aux
différentes définitions. Par la suite, nous commencerons par présenter l’historique du concept de la RSE.
Enfin, nous nous intéresserons aux débats relatifs aux fondements philosophiques et théoriques en
examinant les différentes perspectives existantes à ce niveau.
Section 1 : Définitions : l’absence d’une définition consensuelle
1. Définitions de la RSE
Bansal et Kandola, (2004) se concentrent sur l’absence d’une définition exacte en avançant l’idée qu’il est
plus facile d’identifier une entreprise irresponsable d’entreprise responsable. Les écarts liés à la définition
de la RSE renvoient aux fondements et aux mobiles qui ont poussé à l’intégration de la responsabilité
sociale. Certains auteurs tels que Delalieux, (2005), le qualifient de « concept ombrelle qui abrite en son
sein des revendications variées et parfois totalement contradictoires ».
Pour Pasquero, (2005), chaque stade sécrète ses propres exigences de responsabilité sociale, mais celles-
ci se fondent sur les acquis des périodes qui les ont précédées. De nos jours, nous aidons à une
standardisation de la RSE qui la transforme en une sorte de « croisade morale » ou « humanitaire ».
D’où un certain ajustement de l’action sociale de l’entreprise serait quand même nécessaire.
Pour les juristes, la RSE touche la responsabilité juridique ; pour les sociologues, elle correspond à la
dimension de l’éthique ou au comportement social responsable ; pour la religion elle se rattache aux
actions de charité et beaucoup d’autres y voient une notion purement sociale, Champion et Gendron,
(2005).
Il semble ainsi difficile de trouver une formulation qui satisfait l’ensemble des parties en question
Windsor, (2006).Selon Allouche et al, (2004), les tentatives de définition de la RSE par les acteurs
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
5
concernés, entreprises, agences de notations et chercheurs, ont généré une confusion dans la
conceptualisation de cette notion.
2. Des définitions multiples
La définition du ministère français de l’écologie se présente comme suit « La responsabilité sociétale des
entreprises (RSE) est la déclinaison des principes du développement durable à l’échelle de l’entreprise ».
Springett, (2005), la RSE est l’hybridation entre une meilleure compréhension et un traitement de
l’environnement sous le principe purement social, d’éco justice et de démocratie moins instrumentale et
plus participative. Le tout vise à contribuer à une conception globale de ‘the good life’ Springett, (2005).
Le concept de « la responsabilité sociale de l’entreprise » présente les responsabilités qu’ont les
dirigeants de l’entreprise envers la société. Il est sûr que la RSE a de multiples définitions c'est-à-dire que
la RSE change de concept, tout le temps et ne veut pas dire la même chose pour tout le monde, Boyer et
Arnaud, (2002).
Déjean et Gond, (2004) font la distinction entre les définitions institutionnelles et celles académiques de
la RSE. La plupart des définitions disposées dans le domaine institutionnel fournissent une place
fondamentale à l’engagement de l’entreprise en précisant que cet engagement doit aller au-delà des
obligations et des attentes légales.
Cependant, ces définitions sont assez hétérogènes. Les définitions académiques du concept RSE se
distinguent par la volonté notamment celle de fournir un cadre d’analyse indépendant aux objectifs
propres d’organisation Déjean et Gond, (2004).
La définition de Williams et Siegel, (2001) selon laquelle : « Nous définissons la Responsabilité Sociale
de l’Entreprise comme des actions permettant d’améliorer le bien-être social au-delà des intérêts de
l’entreprise et de ce qui est requis par la loi.» c'est-à-dire que la RSE est l’ensemble des actions visant le
bien social au-delà des intérêts de l’entreprise et de ce qui est demandé par la loi. Notamment cette
définition suppose qu’il existe nécessairement un arbitrage entre les intérêts économiques de l’entreprise
et la démarche sociale et environnementale prônée par la RSE.
2.1 La RSE Un investissement à long terme
En faisant appel à un changement du modèle purement social qui se base sur une économie capitaliste,
l’auteur oriente son accès vers une conception de la « durabilité forte ». Dempsey et all, (2006) présentent
la RSE comme étant un équilibre entre l’augmentation économique, la tendance écologique et les
placements socioculturels.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
6
Neubaum., et all, (2006) considèrent la RSE comme un équilibre entre la responsabilité environnementale
et sociale des entreprises et les enjeux économiques. Wu., Y et all, (2005) voient la RSE dans la recherche
de l’interrelation et la corrélation indispensable entre l’augmentation économique, la capacité de
protection environnementale et les conditions socioculturelles.
Selon Carroll, (1979) la RSE répond aux attentes de la société aux niveaux économiques, juridique,
éthique et discrétionnaire. En effet l’entreprise de nos jours subit de grandes contraintes de la part de la
société, les actionnaires, les employés, les clients, les fournisseurs, les lois, la réglementation, les
groupements de la société civile etc.
En adoptant les objectifs d’investissement à long terme, l’entreprise teint une responsabilité illimitée en
termes d’une continuité responsabilité économique, sociale, et environnementale auxquelles elle est
confrontée Joras M., et all, (2002)
2.2 La RSE n’est pas du domaine de l’entreprise
Pour Persais, (2007) la RSE est une convention entre acteurs. Selon l’auteur, cette notion est par nature
subjective puisqu’elle renvoie à l’idée, que chacun se fait du rôle de l’entreprise dans la société.
Les diversités dans les appréhensions résultent des différences à formuler une définition unique à
l’entreprise et à son rôle. Cette diversité nous conduit à s’interroger s’il y a- une théorie universelle de
l’entreprise ?
A nous demander encore sur le but des affaires et de tout système économique : Pourquoi l’entreprise
existe-t-elle ?
Pour les libéraux, la seule responsabilité sociale de l’entreprise est de réaliser autant que possible des
profits aux actionnaires, dans ce sens l’entreprise a seulement des préoccupations purement économiques.
Friedman, (1970) est la référence la plus connue de ce courant. Pour raccourcir ses principales idées
datantes de 1970, l’organisation ne peut pas avoir des responsabilités, seules les propriétaires ou les
dirigeants ont une responsabilité. En effet, ces derniers ont des responsabilités envers les employés qui
doivent mener leur travail comme il leur est demandé, dans le but de produire le plus d’argent possible,
tout en respectant les règles de base de la société dictées par les lois et l’éthique. Alors, le dirigeant se
présente comme une personne. Donc, il peut avoir des responsabilités.
Le manager peut volontairement verser une partie de son revenu pour des causes qu’il juge valables et il
peut aussi refuser de travailler pour le compte de certaines entreprises. Ainsi, il s’agit de prendre des
décisions concernant sa propre énergie et son propre argent. Mais il ne peut juger à la place de ses
employeurs pour atteindre un intérêt social. Il est embauché dans l’entreprise pour la diriger en tant
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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qu’expert dans la gestion et non pas pour résoudre les problèmes de la société, notamment quand de telles
actions engagent des coûts pour l’entreprise.
Les dépenses des entreprises en faveur des actions sociales ne sont pas justifiées et vont à l’inverse de
l’esprit de la pure concurrence. Ces actions ne seraient autorisées que si elles font profiter à l’entreprise
une baisse des impôts.
Finalement, Friedman désigne la théorie de la RSE comme un ennemi pour les principes du système
libéral car la RSE oblige l’entreprise à pratiquer des actions sociales contraires aux principes de
l'entreprise dans sa recherche du profit. Pour lui, le bien-être collectif est assuré non pas par le
comportement éthique, mais par la main invisible et le libre fonctionnement du marché.
Friedman avait un annonciateur, qui pensait que l’entreprise doit se concentrer sur l’augmentation de sa
production et le redoublement de ses profits en suivant les contraintes du marché, alors que les problèmes
sociaux doivent être résolus par l’Etat.
Dans le même ordre d’idée, pour Carr, (1968), le but final de l’entreprise est de faire des profits, mais
pour toucher cette cible, l’entreprise adopte des voies (tricheurs), car les affaires ne peuvent pas être
dirigées par l’éthique comme dans la vie privée.
Il n’y a donc pas un accord ni une acceptation sur la définition de l’entreprise et bien sûr sur celle de la
RSE. Ce concept semble délicat à encadrer et accumuler plusieurs significations au fil des ans.
Jamali, (2008) à dire que la RSE est une notion imprécise et intangible qui peut ne rien signifier.
Elle est donc, pour lui, démunie de tout sens.
2.3 La RSE démarche volontaire de l’entreprise
Pour Jamali, (2008) la RSE se définit comme, un choix volontaire prit par le manager de l’entreprise pour
l'intérêt de la collectivité, et ce, même en sacrifiant des profits.
Si nous nous concentrons plus sur le sens direct de la notion RSE, il est incontestable que l’expression de
« responsabilité » n’a pas ici le sens d’« obligation » car la démarche est supposée « volontaire ».
En plus l'engagement de l'entreprise à la « responsabilité » à un impact sur elle-même d’une part et sur les
parties prenantes d’autre part.
La Commission interdépartementale du développement durable, dont le siège est à Bruxelles, défini en
2005, la RSE comme « un processus permanent d’amélioration dans le cadre duquel les entreprises
intègrent de manière volontaire, systématique et cohérente des considérations d’ordre social,
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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environnemental et économique dans la gestion globale de l’entreprise ; à cet égard, la concertation avec
les parties prenantes de l’entreprise fait partie intégrante du processus » CIDD, (2005).
La définition donnée à la RSE par la Commission Européenne est la suivante : « Un concept qui désigne
l’intégration volontaire par les entreprises des préoccupations sociales et environnementales à leurs
activités commerciales avec leurs parties prenantes. » Dans cette affirmation on comprend que,
l’entreprise socialement responsable ne répond pas seulement aux obligations juridiques, mais qu’elle va
au-delà. En formant un parallèle entre les définitions précédentes (Commission des Communautés
Européennes, la Commission interdépartementale), nous pouvons dire que l’intégration volontaire d’une
gestion responsable est un élément indispensable dans la compréhension de la RSE reste qu’ « il n’y a pas
de consensus sur une définition de la RSE référence » Déjean et Gond, (2004)
Conclusion
Nous préférons ne pas arriver à une telle conclusion, mais plutôt dire que le concept de la RSE est très
complexe, une acceptation générale sur sa définition serait pratiquement impossible vu que les problèmes
sociaux diffèrent d’un pays à un autre Masaka, (2008).
La RSE est une notion très évolutive. On pourrait même s’interroger s’il s’agit vraiment d’un concept.
C’est un concept difficilement mesurable basé sur une forme morale, et donc relative. Il est donc logique
que la définition de ce concept varie selon les pays, les cultures et les pensées.
La RSE est un concept évolutif et dynamique qui unit des éléments de différents niveaux de l’entreprise
entre eux. Les valeurs et les attentes changent avec le temps et avec les circonstances qui sont elles-
mêmes variables Okoye, (2009). La différence des approches s’intéressant à la RSE, résulte d’un
désaccord sur ses principales caractéristiques.
Rappelons aussi que le phénomène de RSE ne s’intéresse pas seulement à l’entreprise privée, son champ
s’élargit pour rassembler les gouvernements et les organisations mondiales. On le désigne alors par
« la responsabilité sociale des organisations ».
De la même façon, les notions qui lui sont liées, comme la bonne gouvernance, s’utilisent aussi dans les
institutions de l’Etat, les organisations mondiales et les associations coopératives.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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Section 2 : Evolution historique du concept de RSE
La littérature de la RSE montre le rythme accéléré de l'évolution dynamique et le développement de ce
concept. Pasquer, (2005) le concept RSE est changeable au fil de temps ; chaque période a incité ses
propres besoins et exigences tout en se basant sur les acquis précédents pour avancer.
1. Période de 1920 à 1940 : éthique de l’affaire d’un bon patron
Lors de cette période la politique de la Responsabilité Sociale de l'Entreprise (RSE), a été présentée
comme une nouveauté ayant apparue durant les dix dernières années, avec Taylor (1911) et Mayo (1933),
puis Barnard (1938) qui sont les fondateurs et qui avaient rationalisé la grande entreprise.
L'histoire de la RSE semble absolument attachée à celle de la grande entreprise nord-américaine du début
du 19 ème siècle. La « grande entreprise » est un objet nouveau dont les modalités de contrôle restent mal
définies, et dont la légitimité au sein de la société américaine est loin d'être obtenue.
On avance avec l'émergence du concept de la RSE ou les dirigeants se trouvent obligés de répondre à la
demande des règles, de sécurité formulées par certains salariés, et néanmoins difficile à légitimer dans la
société américaine, dans la mesure où il entre en conflit important avec les idéaux de liberté, d’initiative
et de liberté individuelle caractéristiques de la culture américaine à cette période.
Miller et O’Leary,(1989) stipulent ainsi que les premières théories du management (Taylor, Follett,
Mayo et Barnard) ont toutes participé pour créer ce genre d'entreprises « socialement acceptable » en
légitimant le principe de la hiérarchie qui se déroule le plus souvent dans le principe d’efficience et de
rationalité.
Ainsi, dès les années 1920, « il existait des différences dans la manière dont les cadres dirigeants
parlaient de leurs employeurs, mais déjà les actionnaires commençaient à être considérés simplement
comme un acteur parmi d’autres intérêts et participants dont le management doit reconnaître et
réconcilier les revendications » Heald, (1961).
Avec l'apparition de la grande entreprise, dans cette période l’acceptabilité sociale de l'entreprise de
grande forme construit un enjeu crucial au début du siècle, il est possible de montrer que les
caractéristiques de cette nouvelle institution qui se fond sur la séparation entre propriété et gestion ont fait
la dispersion de l’actionnariat et la professionnalisation du management ont fourni un apport favorable à
la diffusion de l’idée de Responsabilité Sociale Epstein, (2002) ; Heald ,(1970).
En effet la légitimation et l'acceptation de cette forme d'entreprise ont contribué, toutes les deux a
l'apparition de la politique de la RSE. La naissance de la notion de la RSE est alors intimement liée à la
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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question de la gouvernance. Ce ne sont pas les théoriciens ni les universitaires qui ont élaboré le concept
de la RSE. Ce sont plutôt les hommes d’affaires de l’époque par leurs propos au sujet du service public et
du paternalisme.
2. Période 1950-1970 : perspective idéologique
Bowen (1953) était Le fondateur de la théorique de la notion de responsabilité sociale dans l’histoire
moderne. Dans son ouvrage intitulé "The social responsabilités of the businessman", il présente le
concept RSE comme une approche religieuse fondée sur une promesse personnelle sociale volontaire non
procédurale encore micro -économique et instrumentale de la part des hommes d’affaires.
Bowen était très attaché à la religion chrétienne, particulièrement protestante. L’argent dans cette
religion, n’appartient pas à l’individu, mais à la communauté, on parle ici de la coopérative.
La recherche du profit ne peut pas alors être considérée comme la finalité de l'activité de l’entreprise
privée. Les chercheurs protestants n’ont pas accepté la propriété privée si elle ne contribue pas à l’intérêt
public et n’améliore pas le bien être de la société. Ils luttent contre le pouvoir intégral des dirigeants des
firmes et ils invitent à la participation dans la prise de décision des groupes concernés.
Ils critiquaient l'illégalité de l’entreprise capitaliste et les conditions de travail des enfants et des femmes.
Les confrontations entre les visions protestantes et capitalistes étaient fortes. Ainsi, l'entreprise a été
obligée de vérifier les implications sociales de ses activités dans la société dans le but de réaliser
l’équilibre entre ses intérêts privés et l’intérêt public, d’où l'exigence de l'application de la responsabilité
sociale au sein de l’entreprise.
Nous reprenons les thèmes de réflexion développés dans « Social Responsibility of the Businessman ».
Tout d’abord Brown, (1953) se base sur les pratiques et les proclamations des managers américains des
grandes entreprises du début du siècle, pour se placer sur les véritables conditions d’apparition d’une
dispute autour de la responsabilité sociale dans la société américaine des années 1950.
Bowen a développé trois grands thèmes : la définition et la problématique du concept de « responsabilité
sociale », la confrontation des visions protestantes et managériales sur la responsabilité sociale et, enfin,
la problématique de la pérennisation et de l’opérationnalisation de la responsabilité sociale.
Dans ce contexte, Bowen tend à définir la notion de la responsabilité sociale comme suit :
« 1. Le terme de Responsabilités Sociales des hommes d’affaires sera utilisé fréquemment. Il renvoie aux
obligations des hommes d’affaires de suivre les politiques, de prendre les décisions, ou de suivre les
orientations qui sont désirables en termes d’objectifs et de valeurs pour notre société.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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Cette définition n’implique pas que les hommes d’affaires, en tant que membres de la société, ne
disposant pas d’un droit à critiquer les valeurs acceptées au sein de la société et à contribuer à leurs
améliorations. En effet, au vu de leur grands pouvoir et influence, il peut sembler indispensable qu’ils
prennent part à ce débat. Cependant, nous supposons qu’en tant que subordonnés (à) la société, ils ne
doivent pas mépriser les valeurs socialement acceptées ou placer leurs propres valeurs au-dessus de
celles de la société. Des synonymes de la responsabilité sociale sont ‘la responsabilité publique’, les
‘obligations sociales’, ou la ‘morale d’entreprise’.
2. Le terme doctrine de la responsabilité sociale renvoie à l’idée, désormais largement exprimée, selon
laquelle la prise en compte volontaire d’une responsabilité sociale de l’homme d’affaires est, ou pourrait
être, un moyen opérationnel pour résoudre des problèmes économiques et atteindre plus globalement les
objectifs économiques que nous poursuivons » (p. 6).
La « théorie de la responsabilité sociale » implique l’idée d’un alignement de l’initiative des hommes
d’affaires et des décisions managériales pour réaliser les objectifs économiques et sociaux.
Pour l’auteur, la « théorie de la responsabilité sociale » pour qu’elle joue un rôle structurant sur les
comportements des hommes d’affaires et qu’elle devienne une force de régulation économique, elle doit
être acceptée et diffusée, au sein des milieux d’affaires et aussi dans l’ensemble de la société.
Il formule des modèles, au niveau des formations en management, au sein des entreprises et explique les
difficultés que représente l’opérationnalisation de la notion de responsabilité sociale. L’auteur se
concentre notamment à l'importance de l’éthique de toute décision pour assurer sa légitimité.
L’analyse de Bowen est opportuniste et modérée. Elle apporte des réponses définitives aux problèmes liés
à la responsabilité sociale. Sa démarche consiste à dégager de nouvelles pistes de réflexion et invite à
investir dans le futur du potentiel de la RSE.
Alors devant l'augmentation des demandes de la société, l'entreprise a été obligée a jouer un rôle plus
sérieux et plus important en tant qu'une entité économique dans la société. Cette période s'est caractérisée
donc par la naissance de nouvelles règles, de nouvelles pratiques et de nouveaux outils tels que l'audit
social. Dès lors, on a assisté à la cristallisation d'un autre visage de la RSE, à savoir le « Corporate Social
Responsiveness » qui renvoie à l’adaptation de l'entreprise de répondre aux exigences sociales plus
généralement sur le niveau sociétal.
Nous remarquons alors que les premiers discours et théorisations de la RSE furent fortement marqués par
les concepts protestants de « public service » et « stewardship ». Le terme dépasse les cibles économiques
et les obligations légales pour gagner des objectifs sociaux. (Mc Guire, 2006) dit « l’idée d’une
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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responsabilité sociale suppose que l’entreprise n’a pas seulement des obligations légales ou économiques
mais qu’elle a aussi des responsabilités envers la société qui vont au-delà de ses obligations ».
3. Période 1980-1990 : l’institutionnalisation de la RSE comme réconciliation
entre intérêt de l’entreprise et intérêt général
Dans les années 1980 le modèle économique se basait sur le libre-échange et la libre concurrence
notamment par la limitation de l’intervention de l'État. Ainsi ce modèle économique a encouragé la vague
de privatisation d’où l’entreprise serait sur une équation simple : la maximisation du profit.
Cette période a également connu une augmentation des valeurs des marchés financiers et un
développement des fonds d'investissement traditionnels. Pour ces raisons le concept de la RSE s’est
développé avec Carroll, (1979) ; Wattick et Cochran, (1985) ; Wood, (1991).
Carroll, (1979) dans sa pensée sur la notion de la RSE intègre trois dimensions de la responsabilité
sociale, à savoir les principes de la RSE, les processus de sensibilité sociale et les résultats observables.
Carroll se base sur cette logique et définit la RSE comme : « la responsabilité sociale de l'entreprise
englobe les attentes économiques, légales, éthiques et discrétionnaires que la société a des organisations
à un moment donné ».
L'approche de Carroll, (1979) permet ainsi de produire une analyse économique et une analyse sociale en
essayant de trouver un accord entre les deux parties ayant des intérêts opposés et distinct.
Wood, (1991) a encore développé la même idée « La signification de la responsabilité sociétale ne peut
être appréhendée qu’à travers l’interaction de trois principes : la légitimité, la responsabilité publique et
la discrétion managériale, ces principes résultent de la distinction de trois niveaux d’analyse,
institutionnel, organisationnel et individuel ».
Clarkson, (1995) redéfinit la RSE comme la capacité à gérer et satisfaire principalement les différentes
parties prenantes de l'entreprise. Cette définition produit un autre passage qu'est la théorie des parties
prenantes qui a augmenté de nouveaux le débat autour du développement du concept de la RSE avec
Freeman, (1984) ; Donaldson et Preston, (1995) ; Mitchell et all, (1997).
Avec la théorie des parties prenantes l'augmentation de la valeur sociale, tend de plus en plus vers une
justification plus utilisatrice d'attitude sociale de l'entreprise. En effet la satisfaction des attentes des
diverses parties prenantes augmente la popularité et la célébrité de l'entreprise par l’amélioration des
conditions de travail, fidéliser les clients et améliorer la relation avec les banques. Les investisseurs et le
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
13
gouvernement, permettent d'améliorer, après une certaine période, sa performance financière et son risque
financier Freeman, (1984) ; Mc Guire., (2006).
Selon Jones, (1980) la RSE est « l’idée selon laquelle les entreprises, par-delà les prescriptions légales
ou contractuelles, ont une obligation envers les acteurs sociétaux ».Le concept RSE est devenu un champ
d'étude très vaste voire même un domaine d'étude pluridisciplinaires. Notamment les pratiques
socialement responsables ont pris de la valeur et de l’importance par les experts de gestion dans leurs
discours dans les entreprises que dans leur politique de gestion.
Dans ce contexte, on conclue que la RSE est présentée comme une réponse à la contrainte institutionnelle
(ONG, État, normes, médias, consommateurs, syndicats, investisseurs et agences de notation).
L’entreprise se trouve obligée de s'adapter dans cette nouvelle tension environnementale quelle que soit
sa motivation.
4. Les années 2000 : la RSE comme problématique et débat social
Les objectifs financiers ont produit une perturbation et des contraintes dans l’opinion publique Enron,
(2001) ; WorldCom, (2002) ; Dexia, (2011) ainsi que des problèmes atmosphériques (Plate-forme de BP,
2010 ; Centrale de Fukushima, 2011 ; plate-forme de Total, 2012). Ces raisons ont contribué à
l’augmentation de l’intérêt de l’application de la politique de la RSE. Pour cela les pratiques de
responsabilité sociale deviennent une obligation morale que les experts doivent prendre en compte dans le
monde des affaires.
Nous constatons dans cette période une hausse des valeurs de l'investissement socialement responsable
exprimé par l'émergence des nouvelles demandes de la part des investisseurs institutionnels, cela
s'explique par la compréhension des managers de la RSE comme moyen de création de la valeur.
Ce mouvement s’est développé par l'adoption de certaines lois (NRE en 2001 en France ; Core Bill, 2002
au Royaume Uni), principes (PRI en 2006), et normes et certifications (IS014000, SA8000 ; IS026000).
Plusieurs modèles théoriques et travaux empiriques renforcent le développement de la vision de la RSE
en montrant qu’elle permet de gagner la compétitivité et l’efficacité par une meilleure utilisation des
ressources. Encore une bonne politique de la RSE entraine un accroissement de la motivation des salariés,
de même l’attractivité pour attirer des meilleurs moyens de la productivité.
Pour élaborer une relation entre la création de la valeur partagée par l'entreprise et la société, Porter et
Kramer, (2006) évoquent la question de faire un choix entre plusieurs possibilités pour arriver à
l’intégration de la politique RSE dans la stratégie même de l'entreprise d’où le début d’émergence de
concept de la stratégie de RSE.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
14
Tabatoni et Jarniou, (1975) la responsabilité sociétale de l’entreprise est un concept qui doit permettre
aux entreprises de prendre en compte le développement durable dans leur stratégie. Nous constatons alors
qu’il ya un lien entre la stratégie de l'entreprise et l'adaptation d'une politique RSE.
La RSE devient un avantage et une priorité importante pour les managers, en effet pour stimuler la
pratique de la RSE plusieurs règles sont mises en œuvre pour atteindre l’objectif de la pratique de la RSE
telles queIS014000 et SA8000 et IS026000. « L’un des principes fondamentaux de la responsabilité
sociétale réside dans l’observation du principe de légalité et dans le respect des obligations
réglementaires. Toutefois, la responsabilité sociétale entraîne également des actions allant au-delà du
respect de la loi ainsi que la reconnaissance des obligations juridiquement non contraignantes vis-à-vis
des autres » iso 26000 (2010).
Dans cette période la « responsabilité » devient un devoir, l'entreprise doit rendre compte de ses actes et
en anticiper les conséquences. Elle implique donc une délibération préalable d’ordre moral ou politique
pour définir ce devoir et se produit par une formalisation légale et institutionnelle (par exemple du type
juridique) dont le principe d’action conduit l’entité responsable à adopter une conduite conforme à la
prescription normative de ce devoir. Les économistes n'ont pas été très intéressés par ce type d’enjeu et
donc par la responsabilité sociétale d’entreprise (RSE), voire réticents, compte tenu de la conception
habituelle des limites de leur science qui impose une théorie restrictive des institutions (cadre exogène à
l’économie, c’est-à-dire donné par des acteurs non économiques aux agents économiques, au sein duquel
ceux-ci s’organisent ensuite le plus efficacement possible).
Mais cette réticence contribue à l'analyse des situations de déséquilibre qui se voit dans les lacunes et les
faiblesses du marché pourraient apparaître où la fonction politique RSE elle-même serait une contrainte à
un objectif utilitariste Orléan, (1997). De ce fait, les analyses institutionnalistes se sont déjà largement
saisies de cet objet Bodet, Lamarche, (2007) ; Rousseau, (2010).Cette nouvelle approche a été acceptée
par un engagement international notamment facilité par le développement des agences de notation telles
que MSCI ESG aux États-Unis, Jantzi au Canada, Vigeo en France et EIRIS en Angleterre.
Ces agences réalisent des audits des performances des entreprises en matière de RSE.
D’où Les indicateurs établis par ces agences représentent une source importante d'information pour les
investisseurs intéressés par ce type de stratégie. Sur le plan académique, ce type d'information a permis
d'enrichir la littérature autour du concept de la RSE. Cette variation intéressante qui précise le concept de
la RSE conduit, Acquier et Aggeri ;(2006) à parler d'une industrie de la RSE.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
15
Figure n°1-1 : L’évolution historique du concept RSE
Sources : Brodhag, (2012)
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
16
Section 3 : Fondements théoriques de la RSE
1. Le néo-institutionnalisme et RSE
1.1 La théorie néo-institutionnelle
Le néo-institutionnalisme, une école de pensée, apparait au milieu des années 1970. Elle contient des
différents courants qui font partie d’un domaine très varié : l’économique, le sociologique et les sciences
politiques. Les fondateurs de ce cadre théorique sont Américains (Paul Di Maggio, Walter Powell,
Richard Walter Scott…). Ils se sont fondés sur l’institutionnalisme de Selznick, (1949) quoiqu’ils
divergent au niveau des principes d’analyse et des approches de l’environnement.
La définition du concept d’institution donné par Pyka et ali, (2003) est comme suit : « les régularités
observées dans les comportements et (ou) les actions d’individus ou de groupes quand ceux-ci sont
confrontés à un ensemble de circonstances similaires ».
Pour Dosi et Orsenigo, (1988) les institutions concernent un ensemble d’organisations formelles
(entreprises, universités, agences gouvernementales) ainsi qu’un ensemble de normes et (ou) de
restrictions, construites par les êtres humains, afin de réduire l’incertitude par la pratique de conduites ou
de comportements prédéterminés.
La théorie néo-institutionnelle étudie les contraintes culturelles et sociales imposées par l’environnement
sur les organisations. En effet les décisions stratégiques d’une entreprise sont influencées par des
contraintes externes. Dans cette perspective, les comportements organisationnels ne sont pas des réponses
aux seules pressions du marché, mais aussi des réponses aux contraintes institutionnelles résultant
d’organes de régulation notamment : l’Etat, les organisations comme (ONG, média…) et la société en
général (opinion publique) Desermaux, (2004).
Pour Draetta, (2006) l’adaptation des entreprises en matière de responsabilité sociale et de protection de
l’environnement est influencée par le contexte socio-institutionnel qui crée des contraintes sur celles-ci.
Les entreprises modifient leurs attitudes pour être plus compatibles avec les mutations de
l’environnement. Les contraintes peuvent être de nature formelle ou informelle, sociale ou normative, et
elles présentent les attentes de la société civile. Les dirigeants sont obligés de modifier les comportements
des entreprises préoccupées d’acquérir des pratiques en compatibilité avec l’environnement institutionnel
constitué par des acteurs qui contribuent à la construction du cadre normatif et cognitif.
Les entreprises adoptent des structures que les institutions exigent d’elles afin d’accroître leur légitimité
institutionnelle et leur pouvoir. L’entreprise s’engage à pousser les comportements éthiques Mercier,
(2004). Les entreprises, comme les firmes pétrolières et les banques, sont mal vues par la société.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
17
Alors le développement de travaux dans le cadre de la RSE devient une obligation pour se légitimer,
autrement dit pour acquérir une licence d’opérer. Cette pensé socioculturelle se base sur le courant du
constructivisme social qui absorbe les problèmes environnementaux et sociaux à des identités socialement
construites, plutôt qu’à des faits totalement objectifs Draetta, (2006).
Pour Hannigan, (1995), ces problèmes ne se produisent pas tous seuls, ce sont les résultats finaux d’un
processus social de définitions, de négociations et de légitimations d’une demande publique et privée.
Les théories néo-institutionnelles sociologiques considèrent les entreprises comme des systèmes organisés
influencés par des structures sociales composées par des normes, des valeurs et d’hypothèses largement
acceptées.
Selon l’approche néo-institutionnelle, l’isomorphisme institutionnel peut se résumer en trois types :
mimétique, normatif et coercitif.
- L’isomorphisme mimétique : c’est une imitation des entreprises entre elles. C'est-à-dire que certaines
entreprises ne cessent de s’imiter les unes les autres et elles mobilisent certains concepts dans leurs
pratiques. L’imitation peut s’expliquer par le manque d’une rationalité et l’incertitude ; faible
compréhension de l’outil et de la théologie, encore les buts de l’entreprise sont peut-être ambigus. Bodet
C. Lamarche T., (2007), les néo-institutionnalismes ont représenté les fonctionnements mimétiques
comme un copieur qui entre à nouveau dans le domaine de la concurrence avec le copier. Les agences de
rating défendent le mimétisme en produisant un système de référence entre les firmes.
-L’isomorphisme normatif : rejoint l’effet de l’isomorphisme mimétique. L’approche normative, a réglé
ce que l’entreprise doit faire et ce qui est plus efficace pour elle. Les normes professionnelles influencent
les comportements des entreprises qui finissent par se réunir au niveau de la profession.
De nos jours, nous assistons à la globalisation de tels phénomènes au niveau international dans certains
domaines notamment ceux qui sont focalisés par le public.
L’isomorphisme coercitif : présent le cadre légal qui influence le comportement des entreprises qui
deviennent homogènes en entrainant une correspondance aux institutions qui les contiennent.
On peut signaler à titre d’exemple les réglementations imposées par les autorités de tutelle aux banques
commerciales ou autres.
Enfin, l’entreprise finit par subir les effets combinés des trois isomorphismes. Et il devient difficile de
séparer l’effet de l’un ou de l’autre.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
18
1.2 Lecture néo-institutionnaliste de la RSE
La théorie néo-institutionnaliste analyse la RSE à travers une voie normative et aussi celle de la légitimité
de ses pratiques en tant que réponses institutionnelles aux contraintes de l’environnement.
« La légitimité est une exigence ou un statut qui existe quand le système de valeurs d’une entité est en
alignement avec le système de valeurs d’un système social plus large dans lequel l’entité est une partie.
Quand une disparité réelle ou potentielle se trouve entre les systèmes de valeur, il y a un risque pour la
légitimité de l’entité. » Arenas et Mària, (2011). Ainsi se traduisaient toutes les actions traitées par
l’opinion publique, le grand public, les meneurs d’opinion (journalistes et medias) et les hommes
politiques locaux. Decock Good, (2001).
Dans cette perspective, Menard, (2003) souligne seulement l’analyse économique néo-institutionnelle qui
repose sur deux concepts fondamentaux qui sont l’environnement institutionnel et les arrangements
institutionnels. En effet l’environnement institutionnel renvoi aux règles politiques, sociales ou légales
imposées par le cadre institutionnel North, (1990) alors que les arrangements institutionnels renvoient à
modalités organisationnelles crée par les acteurs dans le cadre des règles données.
La lecture normative des pratiques de la RSE se base sur les règles imposées par un pouvoir légal ou de
façon volontaire c'est-à-dire par le phénomène d’une autorégulation ou d’une régulation unie avec les
acteurs économiques. La théorie néo-institutionnaliste détermine finalement la validité des pratiques de la
RSE des acteurs concernés.
Pailot, (2006) affirme que « la théorie sociologique néo-institutionnaliste […] accorde, on le sait, une
place centrale aux notions de légitimité et de normativité […] la première étant d’ailleurs
consubstantielle à la dimension évaluative de la seconde ». Selon Kashyap, Mir et all, (2004) la RSE est
adoptée dans un but de profit à long terme. Dans certains cas l’entreprise utilise la responsabilité sociale
pour attirer l’attention des organisations mondiales afin de gagner leur confiance et augmenter sa part du
marché. En fait, dans la plupart des cas, les entreprises sous les contraintes institutionnelles se trouvent
obligées de pratiquer des missions et des politiques socialement acceptables. Mais leur suivi dépend des
rapports de forces entre les acteurs internes et externes de l’entreprise.
Alors la RSE est une corrélation à double sens : d’une part, une partie de la société et d’autre part, elle
doit être reconnue pour qu’elle continue de survivre dans la société.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
19
2. La théorie des parties prenantes
La théorie des parties prenantes est une traduction de la théorie anglo-saxonne des stakeholders. Mais
plusieurs auteurs français voient que la traduction de « stackeholder » par « partie prenante » n’est pas
très précise et qu’elle ne reflète pas précisément le sens du terme, stakeholder c'est-à-dire : celui qui a un
intérêt dans l’entreprise » On met la théorie des parties prenantes généralement sur un continuum qui va
d’une vision large à une vision restreinte.
La vision large, proposée par Freeman, (1984), détermine la partie prenante comme "tout individu ou
groupe qui peut affecter ou être affecté par la réalisation des objectifs de l’organisation".
Cette définition est assez large pour inclure à peu près tous les acteurs de la société. Certains ont suggéré
que, en suivant cette définition, on pouvait considérer comme des parties prenantes dans la plupart des
entreprises dans la mesure où ces groupes sont susceptibles "d’affecter la réalisation des objectifs de
l’organisation". La partie prenante se présente comme étant « tout groupe d’individus ou tout individu qui
peut attribuer et affecté la réalisation des objectifs organisationnels ». C’est une ré-conceptualisation de
la nature de l’entreprise pour déterminer les intérêts externes, au-delà du domaine traditionnel des
actionnaires, à savoir les clients, les employés et les fournisseurs Jamali D, (2008).
Les entreprises devraient gérer les intérêts des différentes parties prenantes d’une façon responsable, sans
tenir compte des frontières qui les séparent et prendre soin des parties prenantes « silencieuses » telles que
les communautés locales et l’environnement Jamali D., (2008).
Une vision aussi large du concept de la partie prenante est problématique selon Mercier S., (2004)
« n’importe qui pourrait postuler à un intérêt dans une organisation » .La théorie des parties prenantes
est très reliée à la théorie de l’agence ou à celle des coûts de transaction, parce qu’elle exige un contrat
entre la firme et ses parties prenantes (mais on exclut l’environnement de toute évidence).
L’entreprise dans ces courants de pensée modernes est une harmonie de contrats et de relations
d’échange. Mais certainement l’entreprise a plus de transactions et de contrats avec ses parties prenantes,
qu’elles doivent maintenir leurs relations et la survie de ces relations pour garantir le succès et la survie
de l’entreprise à long terme.
Dontenwill, (2005) suggère que la théorie des parties prenantes apporte un renouveau de la vision dans la
façon d’appréhender la gestion d’une entreprise. Pour Dontenwill, (2005), ce n’est pas l’exploration des
parties prenantes qui est la nouveauté dans cette théorie mais plutôt le management exact des choix
stratégiques de l’entreprise. Mais la théorie des parties prenantes a essuyé un certain nombre de critiques.
Tout d’abord, d’un point de vue scientifique, certains se demandent si l’on peut vraiment parler d’une
théorie Phillips, et all, (2003). En effet, tant sur le concept de partie prenante que sur la manière de les
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
20
appréhender et de les "gérer", les vues sont tellement diverses et parfois même opposées Donaldson et
Preston, (1995) que le statut de la théorie est difficile à valider. Ensuite, au niveau du contenu, des
critiques ont rapidement émergé pour contester la remise en cause du rôle des actionnaires comme seule
réelle "partie prenante" de l’activité, cette remise en cause étant considérée comme "anti-capitaliste"
Heald, (1970). En outre, certains auteurs trouvent très réducteur de découper en "parties prenantes"
parfois très abstraites un ensemble d’acteurs sociaux avec des logiques complexes et diversifiées.
D’autres contestent l’affirmation selon laquelle une attention accrue à diverses parties prenantes est
nécessairement une preuve de responsabilité sociétale, considérant qu’elle n’est rien de plus qu’une
préoccupation stratégique Greenwood, (2007).
Enfin, certains regrettent qu’on réduise tous les problèmes éthiques à des questions de logiques
conflictuelles entre parties prenantes Heald, (1970).
3. Le modèle de Carroll de la responsabilité sociale des entreprises
Le modèle initial de (Carroll, 1979), que nous trouvons dans plusieurs articles et livres, développe quatre
types de responsabilités pour l’entreprise, à savoir leurs critères et leurs différences,Perez R.,(2007)
économiques, légales, éthiques et discrétionnaires.
3.1 Modèle de Carroll 1979
Pour Carroll, (1979), « la responsabilité sociale des entreprises doit répondre aux attentes économiques,
légales, éthiques et discrétionnaires de la société à un moment donné ». Cette conception se trouve dans
le modèle des catégories de la responsabilité sociale développée par Carroll, (1979) et selon lequel il
considère qu’il existe quatre catégories d’obligations de l’entreprise envers la société.
Carroll, (1979) montre que les rapports de chaque catégorie présente un indice d’importance de la
responsabilité et que les actions des entreprises peuvent être classées dans l’une ou l’autre de ces
catégories. Les quatre catégories de responsabilité existent simultanément selon un ordre d’importance
relative :
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
21
Figure n°1-2 : Les 4 catégories de la responsabilité sociale Carroll, (1979)
En effet, pour Carroll, la présence de ce modèle dans le monde des affaires peut être un atout permettant
la continuité des objectifs économiques, légaux, éthiques et/ou discrétionnaires.
Néanmoins, dans ce modèle Carroll n’a pas bien étudié les concepts éthiques et discrétionnaires.
3.2 Modèle de Carroll 1991
En 1991, Carroll refait son modèle initial pour remettre en place une nouvelle conceptualisation de la
responsabilité sociale des entreprises sous la forme d’une pyramide. Ce modèle, purement libéral est l’un
des plus utilisés pour comprendre la RSE. Il a été jugé comme simple. Dans cette pyramide, les
responsabilités économiques constituent la base de la responsabilité, en deuxième position nous trouvons
les responsabilités légales suivies par les responsabilités éthiques et à la tête de la pyramide nous trouvons
les responsabilités philanthropiques. Dans la pyramide de Carroll, (1991), les responsabilités s’ajoutent
les unes aux autres et chacune d’entre elles forme une composante de base de la responsabilité globale de
l’entreprise.
- Economique : la responsabilité fondamentale de l’entreprise est de satisfaire la demande des
consommateurs.
Le rôle des entreprises est principalement économique ; assurer leur continuité sur le marché, réaliser des
profits aux actionnaires, créer des emplois et payer les impôts.
Les responsabilités économiques sont alors liées à la satisfaction des exigences de différentes parties
prenantes de l’entreprise : les actionnaires qui veulent encaisser des dividendes, les employés qui veulent
Responsabilité discrétionnaire
Responsabilité
éthique
Responsabilité Légale
Responsabilité économique
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
22
avoir des emplois immédiats et bien payés, les consommateurs qui veulent avoir des produits de bonne
qualité et L’Etat qui veut avoir des recettes fiscales.
Ainsi, Carroll, (1991) considère que la société exige la satisfaction des responsabilités économiques.
- Légale : La responsabilité légale est la deuxième partie du modèle de Carroll, (1991) : l’entreprise est
obligée de respecter la loi et d’agir conformément à cette dernière. C’est une responsabilité sociale
puisque les lois découlent de la société et de ses valeurs dont l’entreprise doit assurer ses objectifs
économiques en respectant le cadre légal et institutionnel. On peut noter ici que la loi désigne les limites
acceptables mais ne définit pas l’éthique Jamali, (2008). C’est pour cette raison que les responsabilités
légales sont, au même titre que les responsabilités économiques, mais la loi est différente de l’éthique.
- Ethique : l’entreprise doit agir honnêtement avec la société même si elle n’est pas commandée par des
contraintes. Dans ce cadre, la poursuite d’objectifs éthiques par les entreprises peut être vue comme un
outil permettant de changer le cadre légal et institutionnel, prend constamment en compte les exigences
des parties prenantes et ainsi améliore le comportement global des entreprises dans l’économie.
Selon Carroll, (1991), les responsabilités éthiques sont attendues par la société. Notons à cet effet que la
responsabilité éthique de l’entreprise a été instituée en 1931 par un ouvrier syndical Hyacinthe Dubreuil
(1883-1971), qui a prôné la création d’ateliers autonomes favorisant l’apprentissage des responsabilités et
donnant à l’ouvrier les moyens d’accomplir son existence.
- Philanthropique : à la tête de la pyramide de Carroll, (1991), se trouve la quatrième catégorie du
modèle ; c’est la Philanthropique. Dans ce sens, l’entreprise aide les associations à améliorer la situation
des individus sans s’attendre à une contrepartie de leur part comme le soutien à l’art, aux écoles et aux
orphelinats. L’entreprise peut participer en ressources financières ou en temps des responsables travaillant
pour elle. Au cas où sa contribution n’est pas au niveau attendu, cela ne remet nullement en cause sa
moralité. Bien entendu, la RSE ne se limite pas aux actions philanthropiques. « Ces dernières sont comme
la crème sur le gâteau. » Carroll, (1991). Selon Carroll, (1991), ces responsabilités n’ont pas trop
d’importance que les trois autres modèles de la responsabilité sociale mais elles restent voulues par la
société.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
23
Figure n°1-3 : La pyramide de la responsabilité sociale Carroll, (1991)
4. La conceptualisation de Wood (1991)
Wood refait le modèle de la performance sociale de l’entreprise présenté par Carroll tout en l’affinant de
subtilités considérables. Donc elle place la RSE dans un cadre plus étendue.
Le modèle de recherche de Wood sur la RSE a avancé de façon significative. Se référer à ce modèle
serait tout d’abord examiner les principes qui motivent les actions de RSE : institutionnel, organisationnel
et individuel. Selon ce modèle, les actions de RSE peuvent découler du principe de légitimité, du désir de
l’entreprise de maintenir sa crédibilité ou bien de sa volonté d’obtenir des résultats de performance.
Ici, Les préférences et les tendances des managers peuvent aussi engendrer un facteur important à ce
niveau. Les réactions forment pour Wood une dimension d’action sérieuse pour compléter les
composantes normatives et de motivation. Et finalement, les résultats de performance s’attachent aux
impacts sociaux, programmes sociaux et politiques sociales.
L’originalité de l’apport de Wood, telle que rapportée par Haigh M. et Jones M. T., (2007) relativement
aux travaux qui l’ont précédé peuvent se résumer par l’interrelation de la société et des affaires et son
insistance sur la non séparation entre les deux. Selon cette conceptualisation, la société a des attentes de la
part des comportements des entreprises. Ces attentes sont incitées par les effets externes économiques.
Le concept d’externalité est « la reconnaissance que l’action d’un acteur donné peut simuler d’autres
acteurs sans que ceux-ci aient été consultés ou indemnisés pour les effets dommageables qu’ils portent
(externalités négatives) ou sans que les bénéficiaires aient à payer un avantage qui leur est attribué du
fait de ces externalités (externalités positives). » Urban S., (2005).
Philanthropique
Ethique
Légale
Economique
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
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5. Internaliser les effets externes
L’engagement de l’entreprise d’être responsable est vu par certains chercheurs comme une volonté
d’internaliser certaines externalités négatives (comme la pollution de l’air, des rivières ou des mers).
Dans ce modèle de développement l’entreprise veut minimiser les effets négatifs de sa production.
Elle essaie donc par plusieurs moyens d’agir, soit d’une manière défensive en améliorant ses pratiques et
en corrigeant les dégâts qu’elle aura causés. Elle essaie de corriger son image et de l’embellir auprès de la
société. Ces différentes actions sont très importantes pour l’organisation et la société.
L’entreprise établirait des actions de chartes en vue de garder ses relations avec ses partenaires et de
réduire les externalités négatives produites par elle-même ou par ses sous-traitants.
Nous assistons depuis 2001 à l’émergence des premiers engagements volontaires de la part dès
l’entreprise, avec la multiplication des codes et des chartes. Celles-ci assument un rôle d’évaluateur, elles
s’auto-instituent ; elles autoproduisent des règles : ce qui est appelé la soft law. L’entreprise arrive même
à se déclarer responsable de l’intérêt général et des générations futures. Or, certains de ces codes, tel que
l’OCDE et l’OIT le rapportent, ne comportent que des principes généraux, ne servent nullement à la mise
en œuvre de dispositifs effectifs de RSE et manquent souvent de transparence Capron M. et Quairel F.,
(2004).
6. Le modèle de Quazi et O’Brien
Le modèle de Quazi et O’Brien, qui a découvert en 2000, a été vérifié empiriquement dans différents
contextes : au Bangladesh et en Australie, puis en 2005, par De la Crus Deniz et Suarez en Espagne et
plus récemment, au Moyen Orient en 2009 par Jamali D., Sidani Y. et El-Asmar K, (2009). Dans ce
schéma, l’axe horizontal indique les variations dans les engagements de responsabilité sociale et l’axe
vertical la perception des conséquences des actions responsabilité social.
Les 4 quadrants qui en résultent montrent : la conception classique étroite de la responsabilité et la
focalisation sur les coûts, la vue socio-économique qui s’attend à des gains potentiels importants avec une
responsabilité sociale étroite, la vue philanthropique qui a une vision étendu de la responsabilité avec
prudence des coûts et finalement, la vue moderne qui voit dans la RSE une action bénéfique et où la
responsabilité sociale est indispensable. Les résultats sont surtout concentrés entre la vision très classique
où l’on ne croit pas à la RSE et où l’on observe que celle-ci représente un coût et la vision moderne qui
suppose à la RSE dans les actions philanthropiques alors qu’on agit sans espérer aucun avantage mais
l’on s’attend à subir un coût. L’étude de Jamali et al. (2009) a transporté une nouvelle dimension au
modèle de Quazi et O’Brien dans la mesure où elle considère que la philanthropie peut être stratégique et
viser une grande responsabilité et profiter de cette stratégie, donc ne pas la considérer comme un coût.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
25
Figure n°1-4 : Le modèle de Quazi et O’Brien
Gains dérivés des actions RSE Fadoie, (2010)
Large responsabilité Etroite responsabilité
Conclusion du chapitre 1
Votaw déclara, déjà en 1973, « le mouvement de responsabilité sociale des entreprises aurait besoin de
retomber sur terre » car d’après l’auteur, « aucune cause sociale durant l’histoire récente n’a été sujette
à tellement de différentes approches, définitions, révisions, conceptions et de dogmes autant que celle-
ci».
Comme nous avons pu le constater, la RSE est un concept très subjectif, elle est perçue de différentes
façons, selon l’idéologie et le courant de pensée. Bien que la recherche dans le champ de la RSE soit
complexe et qu’il faille souvent y distinguer la théorie de l’idéologie, d’un côté, puis la théorie de la
pratique, de l’autre, ce sujet fut très à la mode dans les pays dits développés à la fin du siècle dernier et il
continue à intéresser les chercheurs puisqu’il s’est étendu de l’environnement proche de l’entreprise à
l’environnement au sens large du globe terrestre pour toucher à l’univers tout entier.
Stratégique
ModerneVue moderne
Vue socio-économiquePhilanthropique
Moderne
Vue classique
Large responsabilité
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
Chapitre 2 :
le mangement et le management
stratégique de la RSE
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
27
Section 1 : Le management stratégique
1. La stratégie d’entreprise
Pour comprendre ce qu’est la stratégie d’entreprise, nous citons plusieurs auteurs qui ont en donné une
définition. Ainsi,Tabatoni et Jarniou ,(1975) considèrent que les décisions sont dites stratégiques
lorsqu’elles « visent à orienter de façon déterminante et pour le long terme les activités et les structures
de l’organisation ». Pour Ansoff, (1988), la stratégie est le moyen d’accéder à l’atteinte des objectifs, une
formulation claire de la stratégie peut enlever et améliorer les performances et devenir un outil de
management essentiel et indispensable, alors Thiétard, (1984) définit la stratégie comme « l’ensemble des
décisions et des actions relatives aux choix des moyens et à l’articulation des ressources en vue
d’atteindre un objectif ». Nous terminons, par Orsoni (1990), « la stratégie désigne l’ensemble des choix
qui orientent une firme sur une longue période », l’entreprise opérant des choix dans des « domaines
importants pour elle (activités et structure) et pour le long terme ».
D’autres auteurs mènent la notion de stratégie en relatif avec la façon dont elle est menée.
Sallenave, (1984) admet qu’« une stratégie est positive pour l’entreprise si à son terme, l’entreprise en
question se trouve relativement mieux par rapport à ses concurrents qu’au début. Une stratégie n’est ni
bonne, ni mauvaise, elle est seulement meilleure ou pire que celle des concurrents ».
Selon lui, la notion de stratégie est relative et reprend la définition qu’en donne Henderson, (1969) qui
considère une stratégie d’entreprise comme « un plan d’utilisation et d’allocations des ressources
disponibles dans le but de modifier l’équilibre concurrentiel et de la stabiliser à l’avantage de
l’entreprise considérée ». On peut remarquer la puissance de l’allocation des ressources et donc éloigner
la stratégie en chiffres.
Selon Avenier, (1992), il existe deux manières de définir la stratégie. La première est appréciée «
comme un ensemble de règles pour prendre des décisions relatives aux choix des domaines d’activités de
l’entreprise, qui prend en compte les quatre aspects complémentaires suivants : le champ d’activité
produit-marché, le vecteur de croissance (…), l’avantage compétitif que la firme entend exploiter pour
asseoir sa position, la synergie (…) » et la deuxième soit elle est conclue « comme un plan d’actions ».
Il s’agit de l’objection entre le processus stratégiques et le contenu Simon, (1978) dans la conception de la
« rationalité ».
D’autres auteurs proposent une définition de la stratégie en positionnant l’acteur au centre de
l’organisation Tel est le cas de Savall et Zardet ,(1995) selon qui, la stratégie c’est « concevoir, réunir et
manœuvrer des ressources, des forces et énergies de façon intentionnelle, pour occuper dans l’espace et
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
28
dans le temps une position jugée avantageuse dans un contexte relativement conflictuel et de compétition,
afin de réaliser un projet de l’acteur (entreprise ou individu) comportant des enjeux importants et
relativement durables ». Cette définition de la stratégie est terminée par un aspect socio-économique,
c'est-à-dire « qui définit conjointement des objectifs économiques et des objectifs sociaux, au même
niveau de l’activité stratégique, car (…) les uns sont le moyen d’atteindre les autres et réciproquement ».
D’autres auteurs vont mettre la stratégie comme adjoint à trouver les meilleures solutions pour
l’allocation des ressources de l’entreprise. C’est ainsi que Mahé ,(1998) dégage quatre idées essentielles
, selon lesquelles « ce qui est stratégique revêt une dimension essentielle (cruciale) pour une organisation
; (…) il ne peut y avoir stratégie que si un problème d’allocation de ressources (financières, humaines,
matérielles, etc.) est en cause ; (…) toute stratégie s’inscrit dans une anticipation de réalisation de but(s)
dans le temps (durée) ; (…) la stratégie concerne une réflexion sur des actions relatives à la relation
entreprise / environnement ».
À propos l’acteur de la stratégie d’entreprise, Mintzberg, (1990) considère que la détermination de la
stratégie est une des devoirs les plus importantes dévolues au manager. La stratégie fait « référence à la
façon dont un système collectif, nommé organisation, établit ses orientations fondamentales, et si
nécessaire, ses changements de cap ». Dans leurs synthèses sur la stratégie, Hafsi et Toulouse, (1996)
prévoient qu’il existe cinq aspects radicaux de la stratégie. Elle est la « manifestation de la volonté des
dirigeants », « l’expression d’une communauté de personnes », un « filon conducteur » au sens du
cheminement et de cohérence des actions dans une même direction, une « construction d’un avantage
concurrentiel » et une « gestion de la relation entreprise / environnement ».
Martinet, (1983) améliore l’approche de la stratégie en a supposant que « toute entreprise est plus ou
moins orientée par une politique générale » qui serait « l’ensemble des principes directeurs et des
grandes règles et normes qui orientent en permanence l’action ». Pour cette, la politique générale assiste
de guide aux décisions et « s’impose à la stratégie en lui fixant des buts à atteindre (…), des contraintes
et des critères à respecter ».
Nous fermerons cette revue de la littérature en stratégie par les 5P de Henry Mintzberg qui sont une
manière de définir le mot "stratégie". Ou Chaque P exprime un aspect de la stratégie : plan, ploy,
pattern, position, perspective.
 Plan : la stratégie est définie comme un plan, un pilote pour se protéger la situation à long terme,
ce qui entraine une intention stratégique.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
29
 Ploy : la stratégie est une manœuvre s’opposer pour développer une offensive face à ses
concurrents sur le marché. La manœuvre est aussi un acte pour opérer les objectifs que s'est fixée
l'entreprise. Le but ici est d'être une menace et un danger pour ses concurrents.
 Pattern : la stratégie est un modèle, une action formalisée. En comparant avec la premier P, ici la
stratégie est une action à accomplir pour obtenir des résultats et non une intention Position : la
stratégie s’exprimer par une meilleure position et l’équilibre sur le marché d’autre part par la
localisation de l'entreprise dans son environnement. La position prise se fait en fonction de la
position des concurrents sur le marché.
 Perspective : la stratégie est une éventualité de la place de l'entreprise dans son environnement
dans l'avenir. Dans ce P, la stratégie devient aussi une façon de sentir l’univers autour de
l'entreprise et surtout de prendre en compte son environnement.
À partir de l’ensemble de ces définitions nous donnons une synthèse d’une stratégie. En effet à l’origine
de la stratégie il y a une décision, des choix qui se passent au niveau politique de l’entreprise.
D’où la stratégie située entre le point d'observation et la source. En fonction de ces tendances
stratégiques, il se fait pour la direction de l’entreprise de faire en sorte d’allouer les ressources dont elle
dispose. Au cours de cette phase, l’entreprise va définir les buts entiers et les objectifs de son
fonctionnement et son activité. Elle va aussi déterminer les moyens pour atteindre ses buts.
La prise de décision stratégique va attribuer, par ailleurs, à une mise en œuvre des actions établies au
niveau politique. L’entreprise doit maintenir ses performances et le niveau stratégique de la prise de
décision est soutien de ce contrôle. Grâce à toutes ces prudences stratégiques, l’organisation en pratiquant
sa politique va maitriser et réaliser ses objectifs et atteindre ses buts d’où elle va s’assurer une continuité
dans sa position interne et externe. D’où elle avoir une performance globale c'est-à-dire sociale,
économique et environnementale.
Figure n°2-1 : Les grandes dates de l’apparition de la pensé stratégique Gherib, (2010)
1960 1980
École Normative
Les grandes dates de l’apparition de la pensée stratégique
École nor mative : l’École du positionnement
400
ans
Av-JC
Fin 17eme
siècle
Clausewitz
« De
la guerre »
Clausewitz
1889
H.Liddle
Harrat
Sun Tzu
Préceptes Militaires
Consutants
Conflit
Du Vietnam
1962 1967
James
Brien Quin /
Porter
1972
PIMS
‘‘Boutiques
des
Stratégies’’
‘‘Choix stratégie
et Concurrence »
Porter
1990
/1991
Critiques
De l’école du
positionnemnet
Guerre
napoléonienne
BCG
“L’art de la
guerre”
Sun Tzu
Apparition
des Revues
de
stratégies
SMJ/JBS
Fin 70
debut 80
Propositions
empiriques
1951
Théorie
des jeux
Von Neuman &
Mongenstern
Richard
Rumelt /
Hamel
2nd
Guerre
Mondiale
7
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
30
2. Le management et le management stratégique
2.1 Le management : la gestion des hommes
L’origine de mot management est anglaise, « to manage » qui signifie diriger, lui-même provient du
français « ménager » ou « manège ». Fayol, (1921) détermine le management comme étant la « conduite,
la direction d’une entreprise ». Dans le même sens, le Petit Robert le définit comme l ’« ensemble des
techniques d’organisation et de gestion d’une affaire, d’une entreprise ». Le management intègre l’action
d’organiser et donc la gestion Mintzberg, (1990).
Il n’existe pas une différenciation entre le management et la gestion, tout en supposant que les tâches des
managers incluent des travaux de gestionnaires. Lassègue, (1987) définit la gestion comme
« l’application des sciences à la conduite des organisations ». Selon le même auteur, cela se réalise par
trois déterminants que sont respectivement, la communauté de finalité entre les membres, le désir de
coopérer partagé par les membres et la communication.
Selon Crozier, (1985), « le management est un art » car il assiste à gouverner un ordinaire tissé de
contradictions. Il considère que « croire que l’on peut déduire de ces connaissances des règles
"scientifiques" pour la gestion et la direction des organisations humaines relève d’une illusion
dangereuse ». A l’inverse Lassègue et Martory, (1987) considèrent la gestion que comme une science
dans ses fondements qui est appliquée avec une rationalité totale. Lassègue, (1987) confirme d’ailleurs
« je définis donc la gestion comme l’application des sciences à la conduite des organisations ».
Savall et Zardet, (1995) considèrent le management comme « les moyens mis en œuvre auprès des
acteurs internes (individus et entités) pour maîtriser l’interaction entre structures et comportements au
service d’un certain niveau de performance socio-économique recherché par l’entreprise »
Anastassopoulos, (1980) a déterminé les bords du management par trois volets que sont respectivement ;
les objectifs de l’entreprise, sa stratégie et ses ressources. Ainsi, il démontre que « le management est la
manière dont sont fixés les objectifs généraux de l’entreprise, dont sont formulées ses stratégies à long
terme, dont sont définies, rassemblées, organisées les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ses
stratégies au sein du système de gestion approprié »
2.2 Le management stratégique : intégration de la stratégie dans les pratiques de gestion
Thiétart, (1980) joint le management et la stratégie en développant que « la stratégie est la pierre
angulaire à partir de laquelle le management va pouvoir s’élaborer ». Nous assumons, selon lui, que le
management est un acte, un procédé, une action, un style de piloter une organisation, de la diriger, de
programmer, de planifier son développement et de la contrôler. D’où la stratégie sera limitée à un
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
31
ensemble de choix, de priorités et d’engagements pris en vue d’atteindre des objectifs. Martinet, (1983)
propose que la stratégie d’une organisation se mette au service de la gestion opérationnelle.
Il affirme donc que « si la gestion courante permet de réaliser, la gestion stratégique doit mettre
l’entreprise en situation de réaliser. (…) La gestion stratégique est donc inséparable de la notion
d’investissement pris au sens large : en homme, en recherche-développement, en prospection de marché,
en organisation… la gestion courante se préoccupant, quant à elle, de la conversion de ses
investissements en résultats ». Pour Orsoni ,(1990) « l’art d’employer les méthodes, les modèles, les
théories, en un mot les armes qui peuvent aider les dirigeants lorsqu’ils effectuent de tels choix
[stratégiques de longs termes] dans le cadre d’une politique générale ».
Selon Koenig, (1996), « le management stratégique d’une organisation a pour fonction d’en assurer la
compétitivité, la sécurité et la légitimité » c’est dire que n’est pas « l’apanage des seules entreprises ».
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
32
Section2 : Le management stratégique de la RSE
Les vingt dernières années sont caractérisées par une croissance progressive des préoccupations
environnementales, sociales et sociétales dans le management stratégique des entreprises. Il est clair que
l’intégration des principes de la RSE par les entreprises commence a existé avec une nuance importante.
Donaldson et Preston, (1995) ; Shrivastava et Hart, (1996) ; Hart, (1997) ; Reynaud, (1997) ; Reynaud et
Rollet, (2001) ; Martinet et Reynaud, (2001, 2004) ; Reynaud et al, (2006).
D’une part, le niveau d’engagement des principes de la RSE des entreprises se caractérise par une
certaine hétérogénéité : il se balance entre l’absence de réponse et l’attitude proactive, et d’autre part, si
cet engagement existe, l’orientation de l’entreprise en matière de la RSE peut varier entre l’écologie, du
social et/ou du sociétal Patricia, (2009).
Le management de la RSE est une démarche mise en place dans les entreprises. Il indique l’ensemble des
méthodes de gestion et d’organisation de l’entreprise. C’est une démarche évolutive qui consiste alors à
intégrer la RSE dans la gestion et la stratégie de l’entreprise. Elle vise notamment à prendre en compte de
façon systématique l’impact des activités de l’entreprise sur les parties prenantes Cazal, (2006).
Les premières modalités de la démarche du management de la RSE s’inscrivent dans une perspective de
développement durable. Ce dernier implique une interdépendance entre développement économique et
qualité de l’environnement. Encore le management stratégique de la RSE a comme rôle l’identification et
la maîtrise des risques d’impact direct ou indirect des activités de l’entreprise sur les parties prenantes.
Celle-ci repose également sur une recherche d’amélioration continue de leur compétitivité.
Elle implique donc une gestion dans à long terme Patricia, (2009).
1. Les stratégies d’engagement RSE
En 2001 la Commission des Communautés Européennes définit le concept de RSE dans son Livre Vert :
« Le concept de responsabilité sociale des entreprises signifie essentiellement que celles-ci décident de
leur propre initiative à contribuer à améliorer la société et à rendre plus propre l’environnement. (…).
Cette responsabilité s’exprime vis-à-vis des salariés et, plus généralement, de toutes les parties prenantes
qui sont concernées par l’entreprise mais qui peuvent, à leur tour, influer sur sa réussite (…). Bien que
leur responsabilité première soit de générer des profits, les entreprises peuvent en même temps
contribuer à des objectifs sociaux et à la protection de l’environnement, en intégrant la responsabilité
sociale comme investissement stratégique au cœur de leur stratégie commerciale, de leurs instruments de
gestion et de leurs activités » CE, (2001). Cette définition montre que la RSE n'est pas uniquement une
alternative aux activités centrales de l'entreprise, mais elle se pratique à la gestion même de toutes
sociétés.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
33
L’entreprise qui veut être socialement responsable doit intégrer les activités sociales dans sa stratégie.
Cela lui permettrait de se différencier par rapport aux autres Hess, et al, (2002). En effet c’est vrai que
l’entreprise supporte un coût supplémentaire en choisissant une stratégie RSE, mais en contrepartie, elle
dépasserait des risques importants au niveau interne et externe Ansoff, (1979).
Tableau n°2-1 : Les réponses aux risques environnements externes et internes
Réponses aux risques liés aux
environnements internes
Réponses aux risques liés aux environnements
externes
Gestion des ressources humaines : qualité du
recrutement
Changement de l’environnement institutionnel (Etat,
Europe, Monde)
Conditions de travail, d’accidents du travail, de
maladies locales professionnelles
Qualité des relations avec les acteurs locaux
Qualité de la production, Equilibre produit/prix Répercussions environnementales de l’activité de
l’entreprise Absence (ou présence) des activités de
mécénat
Productivité Absence (ou présence) des activités de mécénat
Absence (ou manque) de gestion optimale de
biens immatériels
Modification de la démographie (Fort investissement
pour les jeunes)
Gestion inadaptée des générations et/ou de la
multi-culturalité
Qualité de l’enseignement et de la formation
professionnelle
une stratégie de gestion prévisionnelle des
risques
Connaissance et mise en application des principes du
développement durable et de la RSE
Image de l’entreprise
Source : Martinet A.-C. et Reynaud E. (2001)
On repère dans le modèle de Carroll, (1979) une dimension philosophique de la conscience sociale qui
confirme la stratégie proactive, accommodante, défensive et réactive en référence aux travaux de Martinet
et Reynaud E. (2001), et Wilson, (1974).
Capron et Quairel-Lanoizelée, (2007) présentent une typologie des attitudes stratégiques en fonction,
d’une part, du gain économique de l’organisation (risques et opportunités faibles ou forts) et, d’autre part,
des contraintes exercées par les parties prenantes et de la transparence médiatique recherchée par le
dirigeant de l’entreprise.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
34
Ces auteurs constatent alors quatre stratégies :
- Proactive (lancée volontairement par le dirigeant)
- Défensive (recherche de correspondances strictes aux attentes des parties prenantes)
- Réactive (suite à des difficultés médiatisées)
- Engagée (volontaire, par pure croyance personnelle du dirigeant en l’absence de pressions externes
fortes).
Figure n°2-2 : Typologie des comportements stratégiques RSE
Performance économique
de l’entreprise
Pressions des
parties prenantes
Visibilité médiatique
Risques faibles
Opportunités faibles
Risques forts
Opportunités fortes
Pressions faibles
Visibilité faible
Ignorance, conformité faible
ou symbolique
Stratégies engagées
Stratégies proactives : de
l’intégration faible à l’intégration
substantielle
Pressions fortes
Visibilité forte
Stratégies défensives :
évitement, manipulation
Stratégies proactives ou réac-tives
Compromis
Source, Capron et Quairel-Lanoizelée, (2010)
Ils distinguent alors une variété de stratégies en commençant par les comportements défensifs : l’inertie
qui n’est pas tenable à terme à cause des pressions légales et institutionnelles pour une reddition des
entreprises ; la manipulation avec « des tentatives pour influencer ou contrôler les pressions
institutionnelles » comme la présence et le lobbying dans les instances de régulation ou de normalisation
de types Grenelle de l’environnement et l’évitement qui consiste à déguiser « la non-conformité par
l’élaboration d’une image de conformité » à travers des pratiques de greenwashing ou de
windowdressing », qui peuvent au contraire nuire la réputation des entreprises si elles sont dénoncées par
les parties prenantes .
Capron et Quairel-Lanoizelée (2010) mettent également en exergue des comportements actifs à
commencer par les approches « qui séparent les actions de RSE des stratégies liées aux métiers de
l’entreprise » comme la philanthropie, le mécénat et la constitution de fondation d’entreprise qui nous
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
35
viennent du monde anglo-saxon mais qui motivent de plus en plus les entreprises françaises Seghers,
(2007). Dans ces comportements actifs, il y a également les approches RSE corrélées à la stratégie
globale des entreprises : l’intégration faible mais progressive d’objectifs RSE dans les métiers de
l’entreprise ; les stratégies de compromis entre les intérêts économiques et les remises en cause des
métiers de l’entreprise à l’aune des valeurs et des enjeux de la RSE ; et les stratégies qui intègrent la RSE
dans le cœur de métier de l’entreprise, sa stratégie et son organisation. Ce sont ces derniers types de
stratégies qui engagent le plus l’entreprise. Elles peuvent être de nature réactive et se développent après
une crise ou face à des risques inacceptables auxquels est confrontée l’entreprise. Et elles peuvent être
dans une logique proactive « lorsqu’elles partent d’initiatives volontaires des dirigeants et qu’elles
affirment la convergence d’objectifs de responsabilité dans la contribution du développement durable
avec les finalités de performances financières de l’entreprise » Capron, Quairel-Lanoizelée, (2010).
Selon Porter, (1987), l’élaboration d’une stratégie doit reposer sur un avantage concurrentiel qu’elle a
déjà ou qu’elle peut acquérir pour lui permettre d’avoir une longueur d’avance sur ses concurrents.
L’auteur distingue deux types d’avantage et préconise qu’une stratégie doit viser uniquement un des deux
pour un segment de marché considéré sous peine de « s’enliser dans la voie médiane ».
Le premier avantage est « l’avantage coûts » qui doit être entendu comme tout ce qui permet à une
entreprise de gagner des coûts de réalisation des activités de la « chaîne de valeur » inférieurs à ceux des
concurrents. La stratégie adoptée vise alors à offrir des prix inférieurs par apport aux entreprises
concurrentes Porter, (1987).
Le deuxième avantage est l’ « avantage de différenciation » qui permet à l’entreprise d’offrir au segment
de marché convoité une offre différenciée de celle des entreprises concurrentes, avec un surcoût limité et
adapté à la création de valeur de l’offre pour le client. La stratégie adoptée vise à offrir une solution
optimale en termes de qualité pour le client.
Un avantage concurrentiel ne peut être formulé qu’en faisant référence à un secteur ou segment et n’est à
priori pas transposable à d’autres. Porter, (1987).
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
36
Figure n°2-3 : L’approche stratégique de la RSE selon Porter et Kramer, (2006)
Aspects sociaux et
environnementaux génériques
Aspects sociaux et
environnementaux sur
lesquels la chaîne de valeur a
un impact
Aspects sociaux et
environnementaux qui ont un
impact sur l’avantage
concurrentiel
Entreprise citoyenne
RSE défensive
Atténuer les impacts négatifs
des activités liées à la chaîne
de valeur
« Philantropie stratégique »
qui accroît l’avantage
concurrentiel
RSE stratégiqueTransformer les activités de
la chaîne de valeur au
bénéfice de la société et en
renforçant la stratégie de
l’entreprise
Source : Porter et Kramer (2006)
D’après Porter et Kramer, (2006), deux démarches complémentaires permettent d’évaluer la prise en
compte de la RSE dans la stratégie des entreprises. Une première démarche consiste à partir de l’analyse
de la chaîne de valeur de l’organisation et à évaluer l’ensemble de ses impacts sociaux et
environnementaux. La seconde s’appuie sur un diagnostic du potentiel de la RSE dans le contexte
concurrentiel.
Le diagnostic « interne ➝externe » (Inside out) et le diagnostic « externe ➝interne » (Outside In).
L’analyse de Porter et Kramer, (2006) consiste alors à implanter la RSE dans la stratégie de l’entreprise.
Celle-ci est guidée par la recherche d’un avantage concurrentiel Porter, (1987).
Les deux auteurs suggèrent en premier lieu à reconnaître, dans la chaîne de valeur Porter, (1987), les
points d’intersection entre l’entreprise et la société dans laquelle elle s’introduit, en distinguant les liens
inside-out (l’impact de l’entreprise sur la société, positif ou négatif) et les liens outside-in (l’impact de la
société sur l’entreprise, positif ou négatif). Dans la mesure où les entreprises n’ont pas vocation à régler
tous les problèmes de la société, l’idée est qu’elles hiérarchisent alors les actions sur lesquelles va
soutenir la RSE, non en raison de la valeur essentielle de telle ou telle question d’ordre social ou
environnemental, mais en fonction des liens que cette question entretient avec la création de valeur dans
l’entreprise concernée. Ils incitent donc à distinguer, pour chaque entreprise, les questions génériques
(Generic Social Issues) sur lesquelles la chaîne de valeur de l’entreprise concernée n’a pas d’impact et qui
n’ont pas d’impact sur l’entreprise concernée ; les questions sur lesquelles la chaîne de valeur de
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
37
l’entreprise a un impact (Value Chain Social Impacts) et enfin, les questions qui ont un impact sur la
compétitivité de l’entreprise (Social Dimensions of Competitive Context).
Porter et Kramer, (2006) distinguent alors, dans la RSE, l’approche défensive et l’approche stratégique.
La première est à l’œuvre lorsque l’entreprise, en équilibre avec les préoccupations des parties prenantes,
se comporte de manière citoyenne et atténue les effets négatifs, réels ou anticipés, de l’activité productive
en se basant sur une liste standardisée de domaine d’action.
L’approche stratégique doit aller au-delà de la recherche mimétique de bonnes pratiques, pour essayer de
trouver ce qui, dans la RSE, permet au contraire de se différencier et de renforcer l’avantage
concurrentiel. Cette approche stratégique doit se focaliser sur des objectifs bornés qui intègrent à la fois
des effets inside-out et outside-in.
Toutefois Martinet et Reynaud (2004) définisent trois types de comportement stratégiques :
− Une attitude attentiste relative au manque de volonté de s’engager de la part du dirigeant ou, de manière
plus matérialiste, à la déficience des ressources disponibles (humaines, financières).
− Une attitude adaptative pour répondre à la législation Di Maggio et Powell, (1983) ou à anticiper les
attentes futures du marché par une offre « responsable ».
− Une attitude proactive ayant un but d’innovation au sein d’un secteur d’activité.
Quant à Bellini, (2003), elle définit une typologie des attitudes écologiques de l’entreprise inspirée des
travaux de (Carroll ,1979) sur la RSE.
L’auteur distingue trois stratégies :
- les attitudes éco défensives (suivant une logique purement financière).
- les attitudes éco conformistes (respecter les normes exigées par la réglementation)
- les comportements écosensibles (ou proactifs a une tactique innovatrice).
Bellini(,2003) montre que seules les attitudes écosensibles relèvent de la stratégie d’entreprise.
Dans cette étude préalable, une stratégie sociétale se présente comme l’association de l’engagement
environnemental (faible ou fort) et de l’engagement social (faible ou fort), dont le but est d’assurer la
continuité de l’entreprise.
Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
38
Figure n°2-4 : Matrice des stratégies sociétales des créateurs
Engagement
Social
Engagement
Environnemental
Faible Fort
Faible Stratégie
réactive
Stratégie
proactive
Fort Stratégie
rituelle
Stratégie
mobilisatrice
Source : Berger-Douce, 2007
− La stratégie réactive : est une combinaison d’engagement environnemental et social faible.
Cette stratégie s’adopte en cas de difficultés répétitives comme le manque d’informations sur le sujet de
responsabilité, l’insuffisance de temps et le coût de la mise en place des pratiques de RSE.
− La stratégie proactive : est un engagement environnemental fort aligné par à un engagement social
faible. Cette stratégie très adoptée surtout dans les secteurs d’activité éco-industrielles et dans les
entreprises conscientes de l’effet négatif de leurs activités en termes de pollution environnementale.
Les entrepreneurs qui adoptent une stratégie proactive se trouvent devant des difficultés supplémentaires
lors de la création avec des entrepreneurs « classiques » Friedmann, (2005).
− La stratégie mobilisatrice : est une combinaison d’un double engagement (environnemental et social)
fort. Cette stratégie est peu adoptée par les PME car elle repose sur une analyse forte de l’entrepreneur en
faveur de l’engagement sociétal. Or, ces entrepreneurs se trouvent devant des obstacles lors de la création,
car ils doivent déterminer leurs parties prenantes à la fois sur le plan social et sur le plan environnemental
Clausen, (2005).
− La stratégie rituelle : est un engagement social fort aligné par un engagement environnemental faible.
Cette stratégie est assez pratiquée dans les entreprises de petites et moyennes taille, si l’on définit que ces
organisations sont imprégnées des valeurs de leur dirigeant. Une structure de petite taille peut être
regardée comme davantage favorable à un engagement social fort notamment en raison des effets de
proximité Torrès et Gueguen, (2006).
Martinet et Reynaud, (2001) développe les stratégies de la RSE dans son modèle en distinguons trois
choix stratégiques possibles :
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
Le management stratégique
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Le management stratégique
Le management stratégique
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Le management stratégique
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Le management stratégique

  • 1. République Tunisienne Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique, des Technologies de l’Information et de la Communication Université de Jendouba Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et de Gestion de Jendouba Mémoire pour l’obtention du diplôme de Mastère Recherche en Management Elaboré par : Ouesleti Manel Dirigé par : Mr. Ben Nomee Tarek ANNEE UNIVERSITAIRE 2013-2014 Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie
  • 2. « Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre Ni de réussir pour persévérer ». Guillaume d’Orange-Nassau Dédicaces A mon grand-père A mes parents A tous ceux qui me sont chers
  • 3. Remerciements Mes remerciements vont tout d’abord à Monsieur Ben Noumène Tarek d’avoir accepté d’encadrer ce travail de recherche. Je le remercie de m’avoir fait confiance et de m’avoir consacré beaucoup de son temps et de sa patience et de m’avoir surtout encouragé sans cesse à des moments où le doute prenait le pas sur la motivation. Ses conseils, ses remarques, sa disponibilité, son écoute et sa compréhension ont largement contribué à ce que ce mémoire arrive à son terme aujourd’hui. Mes remerciements s’adressent également au Professeur Ammar Hassen d’avoir accepté d’évaluer ce travail, mais aussi pour sa disponibilité et pour ses critiques et ses conseils enrichissants qui ont contribué à préciser ma pensée. Je tiens aussi à exprimer ma gratitude à Bahbah Ahmed Brahim, doctorant Algérien, qui m’a soutenu et apporté une aide précieuse. Je tiens également à remercier les membres du jury qui ont accepté de consacrer une partie de leur temps précieux pour l’évaluation de ce travail. Merci également à l’ensemble des enseignants-chercheurs et doctorants rencontrés dans le cadre des universités d’été, des séminaires et qui par leurs conseils avisés et leurs encouragements m’ont aidé à avancer dans ce mémoire. Je tiens également à remercier tous les dirigeants qui m’ont accueillie dans leur entreprise pour réaliser mon enquête exploratoire et ceux qui ont répondu à mes questions. Je tiens également à remercier mes collègues de la faculté de Jendouba. Je remercie ma chère amie Sayarri Hammami Fahima pour l’aide tout au long de mes recherches. Enfin, je ne saurai oublier ma famille, mes parents notamment, qui ont su faire preuve de patience à mon égard et qui ont toujours été présents par leur écoute et leurs conseils. Je vous remercie tous sincèrement.
  • 4. Sommaire Introduction générale-------------------------------------------------------------------------------------------------- 1 Chapitre 1 : Revue de littérature----------------------------------------------------------------------------------- 1 Section 1 : Définitions : l’absence d’une définition consensuelle --------------------------------------------- 4 Section 2 : Evolution historique du concept de RSE------------------------------------------------------------- 9 Section 3 : Fondements théoriques de la RSE -------------------------------------------------------------------16 Chapitre 2 : le mangement et le management stratégique de la RSE -------------------------------------26 Section 1 : Le management stratégique---------------------------------------------------------------------------27 Section2 : Le management stratégique de la RSE---------------------------------------------------------------32 Section 3 : la stratégie RSE comme une réponse aux contraintes internes et externes de l’entreprise --42 Chapitre 3 : Positionnement épistémologique et méthodologie de la Recherche-----------------------46 Section 1 : Posture épistémologique et démarche de recherche-----------------------------------------------47 Section 2 : Enoncé de la problématique et formulation des hypothèses de recherche ---------------------52 Section 3 : Une étude qualitative ----------------------------------------------------------------------------------55 Chapitre 4 : Résultats et analyse des résultats -----------------------------------------------------------------69 Section 1 : Présentation des résultats------------------------------------------------------------------------------71 Section 2 : Résultats de l’étude ------------------------------------------------------------------------------------76 Section 3 : Analyse des résultats-----------------------------------------------------------------------------------88 Conclusion générale---------------------------------------------------------------------------------------------------94 Références bibliographies -------------------------------------------------------------------------------------------96 Annexes---------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 108
  • 5. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 1 Introduction générale Les recherches en sciences de gestion peuvent désigner divers courants théoriques. Elles se basent notamment sur la conception de l’entreprise et au travers d’elle ainsi que sur l’étendue de sa responsabilité. Entre une vision néoclassique réduisant la responsabilité de l’entreprise à la seule satisfaction des actionnaires Friedman, (1970) et une conception qu’a développée le rôle de l’entreprise pour prendre en considération les intérêts de ses parties prenantes Freeman, (1984), la question essentielle du périmètre de l’entreprise et de sa responsabilité fait débat. Les préoccupations des sphères économiques, politiques et sociétales mondiales rejoignent aujourd’hui les discussions académiques. Une économie mondialisée, conjuguée à une prise de conscience croissante des dangers environnementaux et des difficultés sociales engendre un questionnement sur le rôle de l’entreprise.Ce questionnement, vif depuis les scandales qui ont secoué la légitimité des entreprises au début des années 2000 Salmon, (2005) s’est également accru avec la récente crise financière. Au-delà de la vision restrictive proposée par les néoclassiques, une vision partenariale de l’entreprise se diffuse en sciences de gestion et dans les milieux managériaux, prônant une intégration des partenaires de l’entreprise dans la prise de décision. De manière plus globale, on parle désormais de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) engagée de manière croissante dans une démarche stratégique. L’expansion de la RSE dans les discours des entreprises, mais aussi dans les travaux de recherche notamment en sciences de gestion Dreveton et Krupicka, (2005) démontrent si besoin était qu’il ne s’agit pas d’un « effet de mode ». Liée à la préoccupation ancienne du développement durable, la RSE apparaît comme un concept flou et multidimensionnel apparu précisément aux Etats-Unis au début du vingtième siècle dans les milieux d’affaires. Entre la « Corporate Social Responsibility » états-unienne, créée par l’histoire socio-économique du pays et la religion protestante, et un sens plus français de la RSE considérée comme une appropriation de la problématique de la durabilité par les entreprises Capron et Quairel-Lanoizelée, (2007), de nombreuses interprétations coexistent. La commission européenne définissait la RSE en 2001 comme « l’intégration volontaire par les entreprises des préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes » Commission Européenne, (2001).
  • 6. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 2 La conciliation des impératifs environnementaux et sociaux aux impératifs économiques, le dépassement des obligations légales, mais aussi l’intégration d’une stratégie RSE dans une entreprise semblent constituer le dénominateur commun de nombreuses définitions de la RSE. Dans les dernières années, les entreprises en Tunisie semblent s’être approprié la problématique de la responsabilité sociale en l’intégrant dans leur management. Dans ce contexte nous nous interrogeons si les entreprises du secteur hôtelier en Tunisie sont concernées par l’intégration de la RSE dans leur management. En effet, l’entreprise hôtelière par son implantation, sa puissance, sa taille mais aussi son impact sur l’environnement au sens large la pose au cœur des réflexions. Dans le cadre de ce travail de recherche, nous tenterons de répondre à la problématique suivante : Comment les dirigeants des entreprises hôtelières en Tunisie perçoivent-ils l’intégration de la RSE dans une perspective stratégique ? Afin de répondre à cette question, nous nous basons sur le modèle de Quairel-Lanoizelée (2007). Sur le plan méthodologique, nous recourrons à une étude qualitative basée sur des entretiens semi- directifs auprès d’un échantillon de dirigeants d’entreprises hôtelières. Notre travail s’articule en deux parties : La première partie sera consacrée à la revue de littérature dans laquelle nous analyserons le concept de la responsabilité sociale de l’entreprise. Afin de mieux comprendre ce concept au cœur de notre problématique, cette première partie proposera une étude des origines et des approches théoriques mobilisables en matière de RSE. Dans le premier chapitre, nous tenterons de définir le concept de la RSE, d’étudier son émergence en revenant aux origines religieuses, historiques et théoriques de son apparition. Enfin nous reviendrons sur les grandes approches théoriques mobilisables en matière de RSE, ainsi que les approches des théories des organisations. Dans le deuxième chapitre, nous étudierons la notion du management stratégique de la RSE ainsi que les facteurs qui poussent un manager à opter pour une démarche de management stratégiques RSE. La seconde partie sera consacrée à une présentation approfondie du cadre théorique, méthodologique de cette recherche ainsi que des résultats obtenus. Dans le troisième chapitre nous présenterons notre posture épistémologique et nous formulons de manière détaillée notre problématique, ainsi que nos hypothèses de recherche. Le quatrième chapitre quant à lui sera consacré à la présentation et l’analyse des résultats.
  • 7. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie Chapitre 1 : Revue de littérature
  • 8. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 4 Introduction La Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE) est devenue, ces dernières années, l’un des thèmes les plus importants pour plusieurs disciplines de la littérature managériale. Ce concept correspond à l’intégration d’objectifs sociaux avec ceux d’ordre économique Tebini, (2010). La RSE, est loin de faire l’unanimité, quelle que soit dans la pratique de l’entreprise que dans le domaine académique, même si la nouvelle notion RSE trouve, depuis quelque temps, un écho l’ambiguïté serait dû aux enjeux théoriques, managériaux et idéologiques relatifs au concept Locket et coll, (2006). Pour comprendre le concept RSE, il faut se baser sur les positions de certains auteurs. Le but étant de fournir un panorama général des débats relatifs à la RSE. Mais sans prendre en compte tous les débats liés au thème, nous essayerons d’en étudier les plus saillants. Tout d’abord, nous passerons en revue les débats et nous verrons que le concept donne lieu aux différentes définitions. Par la suite, nous commencerons par présenter l’historique du concept de la RSE. Enfin, nous nous intéresserons aux débats relatifs aux fondements philosophiques et théoriques en examinant les différentes perspectives existantes à ce niveau. Section 1 : Définitions : l’absence d’une définition consensuelle 1. Définitions de la RSE Bansal et Kandola, (2004) se concentrent sur l’absence d’une définition exacte en avançant l’idée qu’il est plus facile d’identifier une entreprise irresponsable d’entreprise responsable. Les écarts liés à la définition de la RSE renvoient aux fondements et aux mobiles qui ont poussé à l’intégration de la responsabilité sociale. Certains auteurs tels que Delalieux, (2005), le qualifient de « concept ombrelle qui abrite en son sein des revendications variées et parfois totalement contradictoires ». Pour Pasquero, (2005), chaque stade sécrète ses propres exigences de responsabilité sociale, mais celles- ci se fondent sur les acquis des périodes qui les ont précédées. De nos jours, nous aidons à une standardisation de la RSE qui la transforme en une sorte de « croisade morale » ou « humanitaire ». D’où un certain ajustement de l’action sociale de l’entreprise serait quand même nécessaire. Pour les juristes, la RSE touche la responsabilité juridique ; pour les sociologues, elle correspond à la dimension de l’éthique ou au comportement social responsable ; pour la religion elle se rattache aux actions de charité et beaucoup d’autres y voient une notion purement sociale, Champion et Gendron, (2005). Il semble ainsi difficile de trouver une formulation qui satisfait l’ensemble des parties en question Windsor, (2006).Selon Allouche et al, (2004), les tentatives de définition de la RSE par les acteurs
  • 9. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 5 concernés, entreprises, agences de notations et chercheurs, ont généré une confusion dans la conceptualisation de cette notion. 2. Des définitions multiples La définition du ministère français de l’écologie se présente comme suit « La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est la déclinaison des principes du développement durable à l’échelle de l’entreprise ». Springett, (2005), la RSE est l’hybridation entre une meilleure compréhension et un traitement de l’environnement sous le principe purement social, d’éco justice et de démocratie moins instrumentale et plus participative. Le tout vise à contribuer à une conception globale de ‘the good life’ Springett, (2005). Le concept de « la responsabilité sociale de l’entreprise » présente les responsabilités qu’ont les dirigeants de l’entreprise envers la société. Il est sûr que la RSE a de multiples définitions c'est-à-dire que la RSE change de concept, tout le temps et ne veut pas dire la même chose pour tout le monde, Boyer et Arnaud, (2002). Déjean et Gond, (2004) font la distinction entre les définitions institutionnelles et celles académiques de la RSE. La plupart des définitions disposées dans le domaine institutionnel fournissent une place fondamentale à l’engagement de l’entreprise en précisant que cet engagement doit aller au-delà des obligations et des attentes légales. Cependant, ces définitions sont assez hétérogènes. Les définitions académiques du concept RSE se distinguent par la volonté notamment celle de fournir un cadre d’analyse indépendant aux objectifs propres d’organisation Déjean et Gond, (2004). La définition de Williams et Siegel, (2001) selon laquelle : « Nous définissons la Responsabilité Sociale de l’Entreprise comme des actions permettant d’améliorer le bien-être social au-delà des intérêts de l’entreprise et de ce qui est requis par la loi.» c'est-à-dire que la RSE est l’ensemble des actions visant le bien social au-delà des intérêts de l’entreprise et de ce qui est demandé par la loi. Notamment cette définition suppose qu’il existe nécessairement un arbitrage entre les intérêts économiques de l’entreprise et la démarche sociale et environnementale prônée par la RSE. 2.1 La RSE Un investissement à long terme En faisant appel à un changement du modèle purement social qui se base sur une économie capitaliste, l’auteur oriente son accès vers une conception de la « durabilité forte ». Dempsey et all, (2006) présentent la RSE comme étant un équilibre entre l’augmentation économique, la tendance écologique et les placements socioculturels.
  • 10. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 6 Neubaum., et all, (2006) considèrent la RSE comme un équilibre entre la responsabilité environnementale et sociale des entreprises et les enjeux économiques. Wu., Y et all, (2005) voient la RSE dans la recherche de l’interrelation et la corrélation indispensable entre l’augmentation économique, la capacité de protection environnementale et les conditions socioculturelles. Selon Carroll, (1979) la RSE répond aux attentes de la société aux niveaux économiques, juridique, éthique et discrétionnaire. En effet l’entreprise de nos jours subit de grandes contraintes de la part de la société, les actionnaires, les employés, les clients, les fournisseurs, les lois, la réglementation, les groupements de la société civile etc. En adoptant les objectifs d’investissement à long terme, l’entreprise teint une responsabilité illimitée en termes d’une continuité responsabilité économique, sociale, et environnementale auxquelles elle est confrontée Joras M., et all, (2002) 2.2 La RSE n’est pas du domaine de l’entreprise Pour Persais, (2007) la RSE est une convention entre acteurs. Selon l’auteur, cette notion est par nature subjective puisqu’elle renvoie à l’idée, que chacun se fait du rôle de l’entreprise dans la société. Les diversités dans les appréhensions résultent des différences à formuler une définition unique à l’entreprise et à son rôle. Cette diversité nous conduit à s’interroger s’il y a- une théorie universelle de l’entreprise ? A nous demander encore sur le but des affaires et de tout système économique : Pourquoi l’entreprise existe-t-elle ? Pour les libéraux, la seule responsabilité sociale de l’entreprise est de réaliser autant que possible des profits aux actionnaires, dans ce sens l’entreprise a seulement des préoccupations purement économiques. Friedman, (1970) est la référence la plus connue de ce courant. Pour raccourcir ses principales idées datantes de 1970, l’organisation ne peut pas avoir des responsabilités, seules les propriétaires ou les dirigeants ont une responsabilité. En effet, ces derniers ont des responsabilités envers les employés qui doivent mener leur travail comme il leur est demandé, dans le but de produire le plus d’argent possible, tout en respectant les règles de base de la société dictées par les lois et l’éthique. Alors, le dirigeant se présente comme une personne. Donc, il peut avoir des responsabilités. Le manager peut volontairement verser une partie de son revenu pour des causes qu’il juge valables et il peut aussi refuser de travailler pour le compte de certaines entreprises. Ainsi, il s’agit de prendre des décisions concernant sa propre énergie et son propre argent. Mais il ne peut juger à la place de ses employeurs pour atteindre un intérêt social. Il est embauché dans l’entreprise pour la diriger en tant
  • 11. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 7 qu’expert dans la gestion et non pas pour résoudre les problèmes de la société, notamment quand de telles actions engagent des coûts pour l’entreprise. Les dépenses des entreprises en faveur des actions sociales ne sont pas justifiées et vont à l’inverse de l’esprit de la pure concurrence. Ces actions ne seraient autorisées que si elles font profiter à l’entreprise une baisse des impôts. Finalement, Friedman désigne la théorie de la RSE comme un ennemi pour les principes du système libéral car la RSE oblige l’entreprise à pratiquer des actions sociales contraires aux principes de l'entreprise dans sa recherche du profit. Pour lui, le bien-être collectif est assuré non pas par le comportement éthique, mais par la main invisible et le libre fonctionnement du marché. Friedman avait un annonciateur, qui pensait que l’entreprise doit se concentrer sur l’augmentation de sa production et le redoublement de ses profits en suivant les contraintes du marché, alors que les problèmes sociaux doivent être résolus par l’Etat. Dans le même ordre d’idée, pour Carr, (1968), le but final de l’entreprise est de faire des profits, mais pour toucher cette cible, l’entreprise adopte des voies (tricheurs), car les affaires ne peuvent pas être dirigées par l’éthique comme dans la vie privée. Il n’y a donc pas un accord ni une acceptation sur la définition de l’entreprise et bien sûr sur celle de la RSE. Ce concept semble délicat à encadrer et accumuler plusieurs significations au fil des ans. Jamali, (2008) à dire que la RSE est une notion imprécise et intangible qui peut ne rien signifier. Elle est donc, pour lui, démunie de tout sens. 2.3 La RSE démarche volontaire de l’entreprise Pour Jamali, (2008) la RSE se définit comme, un choix volontaire prit par le manager de l’entreprise pour l'intérêt de la collectivité, et ce, même en sacrifiant des profits. Si nous nous concentrons plus sur le sens direct de la notion RSE, il est incontestable que l’expression de « responsabilité » n’a pas ici le sens d’« obligation » car la démarche est supposée « volontaire ». En plus l'engagement de l'entreprise à la « responsabilité » à un impact sur elle-même d’une part et sur les parties prenantes d’autre part. La Commission interdépartementale du développement durable, dont le siège est à Bruxelles, défini en 2005, la RSE comme « un processus permanent d’amélioration dans le cadre duquel les entreprises intègrent de manière volontaire, systématique et cohérente des considérations d’ordre social,
  • 12. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 8 environnemental et économique dans la gestion globale de l’entreprise ; à cet égard, la concertation avec les parties prenantes de l’entreprise fait partie intégrante du processus » CIDD, (2005). La définition donnée à la RSE par la Commission Européenne est la suivante : « Un concept qui désigne l’intégration volontaire par les entreprises des préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales avec leurs parties prenantes. » Dans cette affirmation on comprend que, l’entreprise socialement responsable ne répond pas seulement aux obligations juridiques, mais qu’elle va au-delà. En formant un parallèle entre les définitions précédentes (Commission des Communautés Européennes, la Commission interdépartementale), nous pouvons dire que l’intégration volontaire d’une gestion responsable est un élément indispensable dans la compréhension de la RSE reste qu’ « il n’y a pas de consensus sur une définition de la RSE référence » Déjean et Gond, (2004) Conclusion Nous préférons ne pas arriver à une telle conclusion, mais plutôt dire que le concept de la RSE est très complexe, une acceptation générale sur sa définition serait pratiquement impossible vu que les problèmes sociaux diffèrent d’un pays à un autre Masaka, (2008). La RSE est une notion très évolutive. On pourrait même s’interroger s’il s’agit vraiment d’un concept. C’est un concept difficilement mesurable basé sur une forme morale, et donc relative. Il est donc logique que la définition de ce concept varie selon les pays, les cultures et les pensées. La RSE est un concept évolutif et dynamique qui unit des éléments de différents niveaux de l’entreprise entre eux. Les valeurs et les attentes changent avec le temps et avec les circonstances qui sont elles- mêmes variables Okoye, (2009). La différence des approches s’intéressant à la RSE, résulte d’un désaccord sur ses principales caractéristiques. Rappelons aussi que le phénomène de RSE ne s’intéresse pas seulement à l’entreprise privée, son champ s’élargit pour rassembler les gouvernements et les organisations mondiales. On le désigne alors par « la responsabilité sociale des organisations ». De la même façon, les notions qui lui sont liées, comme la bonne gouvernance, s’utilisent aussi dans les institutions de l’Etat, les organisations mondiales et les associations coopératives.
  • 13. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 9 Section 2 : Evolution historique du concept de RSE La littérature de la RSE montre le rythme accéléré de l'évolution dynamique et le développement de ce concept. Pasquer, (2005) le concept RSE est changeable au fil de temps ; chaque période a incité ses propres besoins et exigences tout en se basant sur les acquis précédents pour avancer. 1. Période de 1920 à 1940 : éthique de l’affaire d’un bon patron Lors de cette période la politique de la Responsabilité Sociale de l'Entreprise (RSE), a été présentée comme une nouveauté ayant apparue durant les dix dernières années, avec Taylor (1911) et Mayo (1933), puis Barnard (1938) qui sont les fondateurs et qui avaient rationalisé la grande entreprise. L'histoire de la RSE semble absolument attachée à celle de la grande entreprise nord-américaine du début du 19 ème siècle. La « grande entreprise » est un objet nouveau dont les modalités de contrôle restent mal définies, et dont la légitimité au sein de la société américaine est loin d'être obtenue. On avance avec l'émergence du concept de la RSE ou les dirigeants se trouvent obligés de répondre à la demande des règles, de sécurité formulées par certains salariés, et néanmoins difficile à légitimer dans la société américaine, dans la mesure où il entre en conflit important avec les idéaux de liberté, d’initiative et de liberté individuelle caractéristiques de la culture américaine à cette période. Miller et O’Leary,(1989) stipulent ainsi que les premières théories du management (Taylor, Follett, Mayo et Barnard) ont toutes participé pour créer ce genre d'entreprises « socialement acceptable » en légitimant le principe de la hiérarchie qui se déroule le plus souvent dans le principe d’efficience et de rationalité. Ainsi, dès les années 1920, « il existait des différences dans la manière dont les cadres dirigeants parlaient de leurs employeurs, mais déjà les actionnaires commençaient à être considérés simplement comme un acteur parmi d’autres intérêts et participants dont le management doit reconnaître et réconcilier les revendications » Heald, (1961). Avec l'apparition de la grande entreprise, dans cette période l’acceptabilité sociale de l'entreprise de grande forme construit un enjeu crucial au début du siècle, il est possible de montrer que les caractéristiques de cette nouvelle institution qui se fond sur la séparation entre propriété et gestion ont fait la dispersion de l’actionnariat et la professionnalisation du management ont fourni un apport favorable à la diffusion de l’idée de Responsabilité Sociale Epstein, (2002) ; Heald ,(1970). En effet la légitimation et l'acceptation de cette forme d'entreprise ont contribué, toutes les deux a l'apparition de la politique de la RSE. La naissance de la notion de la RSE est alors intimement liée à la
  • 14. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 10 question de la gouvernance. Ce ne sont pas les théoriciens ni les universitaires qui ont élaboré le concept de la RSE. Ce sont plutôt les hommes d’affaires de l’époque par leurs propos au sujet du service public et du paternalisme. 2. Période 1950-1970 : perspective idéologique Bowen (1953) était Le fondateur de la théorique de la notion de responsabilité sociale dans l’histoire moderne. Dans son ouvrage intitulé "The social responsabilités of the businessman", il présente le concept RSE comme une approche religieuse fondée sur une promesse personnelle sociale volontaire non procédurale encore micro -économique et instrumentale de la part des hommes d’affaires. Bowen était très attaché à la religion chrétienne, particulièrement protestante. L’argent dans cette religion, n’appartient pas à l’individu, mais à la communauté, on parle ici de la coopérative. La recherche du profit ne peut pas alors être considérée comme la finalité de l'activité de l’entreprise privée. Les chercheurs protestants n’ont pas accepté la propriété privée si elle ne contribue pas à l’intérêt public et n’améliore pas le bien être de la société. Ils luttent contre le pouvoir intégral des dirigeants des firmes et ils invitent à la participation dans la prise de décision des groupes concernés. Ils critiquaient l'illégalité de l’entreprise capitaliste et les conditions de travail des enfants et des femmes. Les confrontations entre les visions protestantes et capitalistes étaient fortes. Ainsi, l'entreprise a été obligée de vérifier les implications sociales de ses activités dans la société dans le but de réaliser l’équilibre entre ses intérêts privés et l’intérêt public, d’où l'exigence de l'application de la responsabilité sociale au sein de l’entreprise. Nous reprenons les thèmes de réflexion développés dans « Social Responsibility of the Businessman ». Tout d’abord Brown, (1953) se base sur les pratiques et les proclamations des managers américains des grandes entreprises du début du siècle, pour se placer sur les véritables conditions d’apparition d’une dispute autour de la responsabilité sociale dans la société américaine des années 1950. Bowen a développé trois grands thèmes : la définition et la problématique du concept de « responsabilité sociale », la confrontation des visions protestantes et managériales sur la responsabilité sociale et, enfin, la problématique de la pérennisation et de l’opérationnalisation de la responsabilité sociale. Dans ce contexte, Bowen tend à définir la notion de la responsabilité sociale comme suit : « 1. Le terme de Responsabilités Sociales des hommes d’affaires sera utilisé fréquemment. Il renvoie aux obligations des hommes d’affaires de suivre les politiques, de prendre les décisions, ou de suivre les orientations qui sont désirables en termes d’objectifs et de valeurs pour notre société.
  • 15. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 11 Cette définition n’implique pas que les hommes d’affaires, en tant que membres de la société, ne disposant pas d’un droit à critiquer les valeurs acceptées au sein de la société et à contribuer à leurs améliorations. En effet, au vu de leur grands pouvoir et influence, il peut sembler indispensable qu’ils prennent part à ce débat. Cependant, nous supposons qu’en tant que subordonnés (à) la société, ils ne doivent pas mépriser les valeurs socialement acceptées ou placer leurs propres valeurs au-dessus de celles de la société. Des synonymes de la responsabilité sociale sont ‘la responsabilité publique’, les ‘obligations sociales’, ou la ‘morale d’entreprise’. 2. Le terme doctrine de la responsabilité sociale renvoie à l’idée, désormais largement exprimée, selon laquelle la prise en compte volontaire d’une responsabilité sociale de l’homme d’affaires est, ou pourrait être, un moyen opérationnel pour résoudre des problèmes économiques et atteindre plus globalement les objectifs économiques que nous poursuivons » (p. 6). La « théorie de la responsabilité sociale » implique l’idée d’un alignement de l’initiative des hommes d’affaires et des décisions managériales pour réaliser les objectifs économiques et sociaux. Pour l’auteur, la « théorie de la responsabilité sociale » pour qu’elle joue un rôle structurant sur les comportements des hommes d’affaires et qu’elle devienne une force de régulation économique, elle doit être acceptée et diffusée, au sein des milieux d’affaires et aussi dans l’ensemble de la société. Il formule des modèles, au niveau des formations en management, au sein des entreprises et explique les difficultés que représente l’opérationnalisation de la notion de responsabilité sociale. L’auteur se concentre notamment à l'importance de l’éthique de toute décision pour assurer sa légitimité. L’analyse de Bowen est opportuniste et modérée. Elle apporte des réponses définitives aux problèmes liés à la responsabilité sociale. Sa démarche consiste à dégager de nouvelles pistes de réflexion et invite à investir dans le futur du potentiel de la RSE. Alors devant l'augmentation des demandes de la société, l'entreprise a été obligée a jouer un rôle plus sérieux et plus important en tant qu'une entité économique dans la société. Cette période s'est caractérisée donc par la naissance de nouvelles règles, de nouvelles pratiques et de nouveaux outils tels que l'audit social. Dès lors, on a assisté à la cristallisation d'un autre visage de la RSE, à savoir le « Corporate Social Responsiveness » qui renvoie à l’adaptation de l'entreprise de répondre aux exigences sociales plus généralement sur le niveau sociétal. Nous remarquons alors que les premiers discours et théorisations de la RSE furent fortement marqués par les concepts protestants de « public service » et « stewardship ». Le terme dépasse les cibles économiques et les obligations légales pour gagner des objectifs sociaux. (Mc Guire, 2006) dit « l’idée d’une
  • 16. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 12 responsabilité sociale suppose que l’entreprise n’a pas seulement des obligations légales ou économiques mais qu’elle a aussi des responsabilités envers la société qui vont au-delà de ses obligations ». 3. Période 1980-1990 : l’institutionnalisation de la RSE comme réconciliation entre intérêt de l’entreprise et intérêt général Dans les années 1980 le modèle économique se basait sur le libre-échange et la libre concurrence notamment par la limitation de l’intervention de l'État. Ainsi ce modèle économique a encouragé la vague de privatisation d’où l’entreprise serait sur une équation simple : la maximisation du profit. Cette période a également connu une augmentation des valeurs des marchés financiers et un développement des fonds d'investissement traditionnels. Pour ces raisons le concept de la RSE s’est développé avec Carroll, (1979) ; Wattick et Cochran, (1985) ; Wood, (1991). Carroll, (1979) dans sa pensée sur la notion de la RSE intègre trois dimensions de la responsabilité sociale, à savoir les principes de la RSE, les processus de sensibilité sociale et les résultats observables. Carroll se base sur cette logique et définit la RSE comme : « la responsabilité sociale de l'entreprise englobe les attentes économiques, légales, éthiques et discrétionnaires que la société a des organisations à un moment donné ». L'approche de Carroll, (1979) permet ainsi de produire une analyse économique et une analyse sociale en essayant de trouver un accord entre les deux parties ayant des intérêts opposés et distinct. Wood, (1991) a encore développé la même idée « La signification de la responsabilité sociétale ne peut être appréhendée qu’à travers l’interaction de trois principes : la légitimité, la responsabilité publique et la discrétion managériale, ces principes résultent de la distinction de trois niveaux d’analyse, institutionnel, organisationnel et individuel ». Clarkson, (1995) redéfinit la RSE comme la capacité à gérer et satisfaire principalement les différentes parties prenantes de l'entreprise. Cette définition produit un autre passage qu'est la théorie des parties prenantes qui a augmenté de nouveaux le débat autour du développement du concept de la RSE avec Freeman, (1984) ; Donaldson et Preston, (1995) ; Mitchell et all, (1997). Avec la théorie des parties prenantes l'augmentation de la valeur sociale, tend de plus en plus vers une justification plus utilisatrice d'attitude sociale de l'entreprise. En effet la satisfaction des attentes des diverses parties prenantes augmente la popularité et la célébrité de l'entreprise par l’amélioration des conditions de travail, fidéliser les clients et améliorer la relation avec les banques. Les investisseurs et le
  • 17. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 13 gouvernement, permettent d'améliorer, après une certaine période, sa performance financière et son risque financier Freeman, (1984) ; Mc Guire., (2006). Selon Jones, (1980) la RSE est « l’idée selon laquelle les entreprises, par-delà les prescriptions légales ou contractuelles, ont une obligation envers les acteurs sociétaux ».Le concept RSE est devenu un champ d'étude très vaste voire même un domaine d'étude pluridisciplinaires. Notamment les pratiques socialement responsables ont pris de la valeur et de l’importance par les experts de gestion dans leurs discours dans les entreprises que dans leur politique de gestion. Dans ce contexte, on conclue que la RSE est présentée comme une réponse à la contrainte institutionnelle (ONG, État, normes, médias, consommateurs, syndicats, investisseurs et agences de notation). L’entreprise se trouve obligée de s'adapter dans cette nouvelle tension environnementale quelle que soit sa motivation. 4. Les années 2000 : la RSE comme problématique et débat social Les objectifs financiers ont produit une perturbation et des contraintes dans l’opinion publique Enron, (2001) ; WorldCom, (2002) ; Dexia, (2011) ainsi que des problèmes atmosphériques (Plate-forme de BP, 2010 ; Centrale de Fukushima, 2011 ; plate-forme de Total, 2012). Ces raisons ont contribué à l’augmentation de l’intérêt de l’application de la politique de la RSE. Pour cela les pratiques de responsabilité sociale deviennent une obligation morale que les experts doivent prendre en compte dans le monde des affaires. Nous constatons dans cette période une hausse des valeurs de l'investissement socialement responsable exprimé par l'émergence des nouvelles demandes de la part des investisseurs institutionnels, cela s'explique par la compréhension des managers de la RSE comme moyen de création de la valeur. Ce mouvement s’est développé par l'adoption de certaines lois (NRE en 2001 en France ; Core Bill, 2002 au Royaume Uni), principes (PRI en 2006), et normes et certifications (IS014000, SA8000 ; IS026000). Plusieurs modèles théoriques et travaux empiriques renforcent le développement de la vision de la RSE en montrant qu’elle permet de gagner la compétitivité et l’efficacité par une meilleure utilisation des ressources. Encore une bonne politique de la RSE entraine un accroissement de la motivation des salariés, de même l’attractivité pour attirer des meilleurs moyens de la productivité. Pour élaborer une relation entre la création de la valeur partagée par l'entreprise et la société, Porter et Kramer, (2006) évoquent la question de faire un choix entre plusieurs possibilités pour arriver à l’intégration de la politique RSE dans la stratégie même de l'entreprise d’où le début d’émergence de concept de la stratégie de RSE.
  • 18. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 14 Tabatoni et Jarniou, (1975) la responsabilité sociétale de l’entreprise est un concept qui doit permettre aux entreprises de prendre en compte le développement durable dans leur stratégie. Nous constatons alors qu’il ya un lien entre la stratégie de l'entreprise et l'adaptation d'une politique RSE. La RSE devient un avantage et une priorité importante pour les managers, en effet pour stimuler la pratique de la RSE plusieurs règles sont mises en œuvre pour atteindre l’objectif de la pratique de la RSE telles queIS014000 et SA8000 et IS026000. « L’un des principes fondamentaux de la responsabilité sociétale réside dans l’observation du principe de légalité et dans le respect des obligations réglementaires. Toutefois, la responsabilité sociétale entraîne également des actions allant au-delà du respect de la loi ainsi que la reconnaissance des obligations juridiquement non contraignantes vis-à-vis des autres » iso 26000 (2010). Dans cette période la « responsabilité » devient un devoir, l'entreprise doit rendre compte de ses actes et en anticiper les conséquences. Elle implique donc une délibération préalable d’ordre moral ou politique pour définir ce devoir et se produit par une formalisation légale et institutionnelle (par exemple du type juridique) dont le principe d’action conduit l’entité responsable à adopter une conduite conforme à la prescription normative de ce devoir. Les économistes n'ont pas été très intéressés par ce type d’enjeu et donc par la responsabilité sociétale d’entreprise (RSE), voire réticents, compte tenu de la conception habituelle des limites de leur science qui impose une théorie restrictive des institutions (cadre exogène à l’économie, c’est-à-dire donné par des acteurs non économiques aux agents économiques, au sein duquel ceux-ci s’organisent ensuite le plus efficacement possible). Mais cette réticence contribue à l'analyse des situations de déséquilibre qui se voit dans les lacunes et les faiblesses du marché pourraient apparaître où la fonction politique RSE elle-même serait une contrainte à un objectif utilitariste Orléan, (1997). De ce fait, les analyses institutionnalistes se sont déjà largement saisies de cet objet Bodet, Lamarche, (2007) ; Rousseau, (2010).Cette nouvelle approche a été acceptée par un engagement international notamment facilité par le développement des agences de notation telles que MSCI ESG aux États-Unis, Jantzi au Canada, Vigeo en France et EIRIS en Angleterre. Ces agences réalisent des audits des performances des entreprises en matière de RSE. D’où Les indicateurs établis par ces agences représentent une source importante d'information pour les investisseurs intéressés par ce type de stratégie. Sur le plan académique, ce type d'information a permis d'enrichir la littérature autour du concept de la RSE. Cette variation intéressante qui précise le concept de la RSE conduit, Acquier et Aggeri ;(2006) à parler d'une industrie de la RSE.
  • 19. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 15 Figure n°1-1 : L’évolution historique du concept RSE Sources : Brodhag, (2012)
  • 20. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 16 Section 3 : Fondements théoriques de la RSE 1. Le néo-institutionnalisme et RSE 1.1 La théorie néo-institutionnelle Le néo-institutionnalisme, une école de pensée, apparait au milieu des années 1970. Elle contient des différents courants qui font partie d’un domaine très varié : l’économique, le sociologique et les sciences politiques. Les fondateurs de ce cadre théorique sont Américains (Paul Di Maggio, Walter Powell, Richard Walter Scott…). Ils se sont fondés sur l’institutionnalisme de Selznick, (1949) quoiqu’ils divergent au niveau des principes d’analyse et des approches de l’environnement. La définition du concept d’institution donné par Pyka et ali, (2003) est comme suit : « les régularités observées dans les comportements et (ou) les actions d’individus ou de groupes quand ceux-ci sont confrontés à un ensemble de circonstances similaires ». Pour Dosi et Orsenigo, (1988) les institutions concernent un ensemble d’organisations formelles (entreprises, universités, agences gouvernementales) ainsi qu’un ensemble de normes et (ou) de restrictions, construites par les êtres humains, afin de réduire l’incertitude par la pratique de conduites ou de comportements prédéterminés. La théorie néo-institutionnelle étudie les contraintes culturelles et sociales imposées par l’environnement sur les organisations. En effet les décisions stratégiques d’une entreprise sont influencées par des contraintes externes. Dans cette perspective, les comportements organisationnels ne sont pas des réponses aux seules pressions du marché, mais aussi des réponses aux contraintes institutionnelles résultant d’organes de régulation notamment : l’Etat, les organisations comme (ONG, média…) et la société en général (opinion publique) Desermaux, (2004). Pour Draetta, (2006) l’adaptation des entreprises en matière de responsabilité sociale et de protection de l’environnement est influencée par le contexte socio-institutionnel qui crée des contraintes sur celles-ci. Les entreprises modifient leurs attitudes pour être plus compatibles avec les mutations de l’environnement. Les contraintes peuvent être de nature formelle ou informelle, sociale ou normative, et elles présentent les attentes de la société civile. Les dirigeants sont obligés de modifier les comportements des entreprises préoccupées d’acquérir des pratiques en compatibilité avec l’environnement institutionnel constitué par des acteurs qui contribuent à la construction du cadre normatif et cognitif. Les entreprises adoptent des structures que les institutions exigent d’elles afin d’accroître leur légitimité institutionnelle et leur pouvoir. L’entreprise s’engage à pousser les comportements éthiques Mercier, (2004). Les entreprises, comme les firmes pétrolières et les banques, sont mal vues par la société.
  • 21. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 17 Alors le développement de travaux dans le cadre de la RSE devient une obligation pour se légitimer, autrement dit pour acquérir une licence d’opérer. Cette pensé socioculturelle se base sur le courant du constructivisme social qui absorbe les problèmes environnementaux et sociaux à des identités socialement construites, plutôt qu’à des faits totalement objectifs Draetta, (2006). Pour Hannigan, (1995), ces problèmes ne se produisent pas tous seuls, ce sont les résultats finaux d’un processus social de définitions, de négociations et de légitimations d’une demande publique et privée. Les théories néo-institutionnelles sociologiques considèrent les entreprises comme des systèmes organisés influencés par des structures sociales composées par des normes, des valeurs et d’hypothèses largement acceptées. Selon l’approche néo-institutionnelle, l’isomorphisme institutionnel peut se résumer en trois types : mimétique, normatif et coercitif. - L’isomorphisme mimétique : c’est une imitation des entreprises entre elles. C'est-à-dire que certaines entreprises ne cessent de s’imiter les unes les autres et elles mobilisent certains concepts dans leurs pratiques. L’imitation peut s’expliquer par le manque d’une rationalité et l’incertitude ; faible compréhension de l’outil et de la théologie, encore les buts de l’entreprise sont peut-être ambigus. Bodet C. Lamarche T., (2007), les néo-institutionnalismes ont représenté les fonctionnements mimétiques comme un copieur qui entre à nouveau dans le domaine de la concurrence avec le copier. Les agences de rating défendent le mimétisme en produisant un système de référence entre les firmes. -L’isomorphisme normatif : rejoint l’effet de l’isomorphisme mimétique. L’approche normative, a réglé ce que l’entreprise doit faire et ce qui est plus efficace pour elle. Les normes professionnelles influencent les comportements des entreprises qui finissent par se réunir au niveau de la profession. De nos jours, nous assistons à la globalisation de tels phénomènes au niveau international dans certains domaines notamment ceux qui sont focalisés par le public. L’isomorphisme coercitif : présent le cadre légal qui influence le comportement des entreprises qui deviennent homogènes en entrainant une correspondance aux institutions qui les contiennent. On peut signaler à titre d’exemple les réglementations imposées par les autorités de tutelle aux banques commerciales ou autres. Enfin, l’entreprise finit par subir les effets combinés des trois isomorphismes. Et il devient difficile de séparer l’effet de l’un ou de l’autre.
  • 22. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 18 1.2 Lecture néo-institutionnaliste de la RSE La théorie néo-institutionnaliste analyse la RSE à travers une voie normative et aussi celle de la légitimité de ses pratiques en tant que réponses institutionnelles aux contraintes de l’environnement. « La légitimité est une exigence ou un statut qui existe quand le système de valeurs d’une entité est en alignement avec le système de valeurs d’un système social plus large dans lequel l’entité est une partie. Quand une disparité réelle ou potentielle se trouve entre les systèmes de valeur, il y a un risque pour la légitimité de l’entité. » Arenas et Mària, (2011). Ainsi se traduisaient toutes les actions traitées par l’opinion publique, le grand public, les meneurs d’opinion (journalistes et medias) et les hommes politiques locaux. Decock Good, (2001). Dans cette perspective, Menard, (2003) souligne seulement l’analyse économique néo-institutionnelle qui repose sur deux concepts fondamentaux qui sont l’environnement institutionnel et les arrangements institutionnels. En effet l’environnement institutionnel renvoi aux règles politiques, sociales ou légales imposées par le cadre institutionnel North, (1990) alors que les arrangements institutionnels renvoient à modalités organisationnelles crée par les acteurs dans le cadre des règles données. La lecture normative des pratiques de la RSE se base sur les règles imposées par un pouvoir légal ou de façon volontaire c'est-à-dire par le phénomène d’une autorégulation ou d’une régulation unie avec les acteurs économiques. La théorie néo-institutionnaliste détermine finalement la validité des pratiques de la RSE des acteurs concernés. Pailot, (2006) affirme que « la théorie sociologique néo-institutionnaliste […] accorde, on le sait, une place centrale aux notions de légitimité et de normativité […] la première étant d’ailleurs consubstantielle à la dimension évaluative de la seconde ». Selon Kashyap, Mir et all, (2004) la RSE est adoptée dans un but de profit à long terme. Dans certains cas l’entreprise utilise la responsabilité sociale pour attirer l’attention des organisations mondiales afin de gagner leur confiance et augmenter sa part du marché. En fait, dans la plupart des cas, les entreprises sous les contraintes institutionnelles se trouvent obligées de pratiquer des missions et des politiques socialement acceptables. Mais leur suivi dépend des rapports de forces entre les acteurs internes et externes de l’entreprise. Alors la RSE est une corrélation à double sens : d’une part, une partie de la société et d’autre part, elle doit être reconnue pour qu’elle continue de survivre dans la société.
  • 23. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 19 2. La théorie des parties prenantes La théorie des parties prenantes est une traduction de la théorie anglo-saxonne des stakeholders. Mais plusieurs auteurs français voient que la traduction de « stackeholder » par « partie prenante » n’est pas très précise et qu’elle ne reflète pas précisément le sens du terme, stakeholder c'est-à-dire : celui qui a un intérêt dans l’entreprise » On met la théorie des parties prenantes généralement sur un continuum qui va d’une vision large à une vision restreinte. La vision large, proposée par Freeman, (1984), détermine la partie prenante comme "tout individu ou groupe qui peut affecter ou être affecté par la réalisation des objectifs de l’organisation". Cette définition est assez large pour inclure à peu près tous les acteurs de la société. Certains ont suggéré que, en suivant cette définition, on pouvait considérer comme des parties prenantes dans la plupart des entreprises dans la mesure où ces groupes sont susceptibles "d’affecter la réalisation des objectifs de l’organisation". La partie prenante se présente comme étant « tout groupe d’individus ou tout individu qui peut attribuer et affecté la réalisation des objectifs organisationnels ». C’est une ré-conceptualisation de la nature de l’entreprise pour déterminer les intérêts externes, au-delà du domaine traditionnel des actionnaires, à savoir les clients, les employés et les fournisseurs Jamali D, (2008). Les entreprises devraient gérer les intérêts des différentes parties prenantes d’une façon responsable, sans tenir compte des frontières qui les séparent et prendre soin des parties prenantes « silencieuses » telles que les communautés locales et l’environnement Jamali D., (2008). Une vision aussi large du concept de la partie prenante est problématique selon Mercier S., (2004) « n’importe qui pourrait postuler à un intérêt dans une organisation » .La théorie des parties prenantes est très reliée à la théorie de l’agence ou à celle des coûts de transaction, parce qu’elle exige un contrat entre la firme et ses parties prenantes (mais on exclut l’environnement de toute évidence). L’entreprise dans ces courants de pensée modernes est une harmonie de contrats et de relations d’échange. Mais certainement l’entreprise a plus de transactions et de contrats avec ses parties prenantes, qu’elles doivent maintenir leurs relations et la survie de ces relations pour garantir le succès et la survie de l’entreprise à long terme. Dontenwill, (2005) suggère que la théorie des parties prenantes apporte un renouveau de la vision dans la façon d’appréhender la gestion d’une entreprise. Pour Dontenwill, (2005), ce n’est pas l’exploration des parties prenantes qui est la nouveauté dans cette théorie mais plutôt le management exact des choix stratégiques de l’entreprise. Mais la théorie des parties prenantes a essuyé un certain nombre de critiques. Tout d’abord, d’un point de vue scientifique, certains se demandent si l’on peut vraiment parler d’une théorie Phillips, et all, (2003). En effet, tant sur le concept de partie prenante que sur la manière de les
  • 24. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 20 appréhender et de les "gérer", les vues sont tellement diverses et parfois même opposées Donaldson et Preston, (1995) que le statut de la théorie est difficile à valider. Ensuite, au niveau du contenu, des critiques ont rapidement émergé pour contester la remise en cause du rôle des actionnaires comme seule réelle "partie prenante" de l’activité, cette remise en cause étant considérée comme "anti-capitaliste" Heald, (1970). En outre, certains auteurs trouvent très réducteur de découper en "parties prenantes" parfois très abstraites un ensemble d’acteurs sociaux avec des logiques complexes et diversifiées. D’autres contestent l’affirmation selon laquelle une attention accrue à diverses parties prenantes est nécessairement une preuve de responsabilité sociétale, considérant qu’elle n’est rien de plus qu’une préoccupation stratégique Greenwood, (2007). Enfin, certains regrettent qu’on réduise tous les problèmes éthiques à des questions de logiques conflictuelles entre parties prenantes Heald, (1970). 3. Le modèle de Carroll de la responsabilité sociale des entreprises Le modèle initial de (Carroll, 1979), que nous trouvons dans plusieurs articles et livres, développe quatre types de responsabilités pour l’entreprise, à savoir leurs critères et leurs différences,Perez R.,(2007) économiques, légales, éthiques et discrétionnaires. 3.1 Modèle de Carroll 1979 Pour Carroll, (1979), « la responsabilité sociale des entreprises doit répondre aux attentes économiques, légales, éthiques et discrétionnaires de la société à un moment donné ». Cette conception se trouve dans le modèle des catégories de la responsabilité sociale développée par Carroll, (1979) et selon lequel il considère qu’il existe quatre catégories d’obligations de l’entreprise envers la société. Carroll, (1979) montre que les rapports de chaque catégorie présente un indice d’importance de la responsabilité et que les actions des entreprises peuvent être classées dans l’une ou l’autre de ces catégories. Les quatre catégories de responsabilité existent simultanément selon un ordre d’importance relative :
  • 25. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 21 Figure n°1-2 : Les 4 catégories de la responsabilité sociale Carroll, (1979) En effet, pour Carroll, la présence de ce modèle dans le monde des affaires peut être un atout permettant la continuité des objectifs économiques, légaux, éthiques et/ou discrétionnaires. Néanmoins, dans ce modèle Carroll n’a pas bien étudié les concepts éthiques et discrétionnaires. 3.2 Modèle de Carroll 1991 En 1991, Carroll refait son modèle initial pour remettre en place une nouvelle conceptualisation de la responsabilité sociale des entreprises sous la forme d’une pyramide. Ce modèle, purement libéral est l’un des plus utilisés pour comprendre la RSE. Il a été jugé comme simple. Dans cette pyramide, les responsabilités économiques constituent la base de la responsabilité, en deuxième position nous trouvons les responsabilités légales suivies par les responsabilités éthiques et à la tête de la pyramide nous trouvons les responsabilités philanthropiques. Dans la pyramide de Carroll, (1991), les responsabilités s’ajoutent les unes aux autres et chacune d’entre elles forme une composante de base de la responsabilité globale de l’entreprise. - Economique : la responsabilité fondamentale de l’entreprise est de satisfaire la demande des consommateurs. Le rôle des entreprises est principalement économique ; assurer leur continuité sur le marché, réaliser des profits aux actionnaires, créer des emplois et payer les impôts. Les responsabilités économiques sont alors liées à la satisfaction des exigences de différentes parties prenantes de l’entreprise : les actionnaires qui veulent encaisser des dividendes, les employés qui veulent Responsabilité discrétionnaire Responsabilité éthique Responsabilité Légale Responsabilité économique
  • 26. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 22 avoir des emplois immédiats et bien payés, les consommateurs qui veulent avoir des produits de bonne qualité et L’Etat qui veut avoir des recettes fiscales. Ainsi, Carroll, (1991) considère que la société exige la satisfaction des responsabilités économiques. - Légale : La responsabilité légale est la deuxième partie du modèle de Carroll, (1991) : l’entreprise est obligée de respecter la loi et d’agir conformément à cette dernière. C’est une responsabilité sociale puisque les lois découlent de la société et de ses valeurs dont l’entreprise doit assurer ses objectifs économiques en respectant le cadre légal et institutionnel. On peut noter ici que la loi désigne les limites acceptables mais ne définit pas l’éthique Jamali, (2008). C’est pour cette raison que les responsabilités légales sont, au même titre que les responsabilités économiques, mais la loi est différente de l’éthique. - Ethique : l’entreprise doit agir honnêtement avec la société même si elle n’est pas commandée par des contraintes. Dans ce cadre, la poursuite d’objectifs éthiques par les entreprises peut être vue comme un outil permettant de changer le cadre légal et institutionnel, prend constamment en compte les exigences des parties prenantes et ainsi améliore le comportement global des entreprises dans l’économie. Selon Carroll, (1991), les responsabilités éthiques sont attendues par la société. Notons à cet effet que la responsabilité éthique de l’entreprise a été instituée en 1931 par un ouvrier syndical Hyacinthe Dubreuil (1883-1971), qui a prôné la création d’ateliers autonomes favorisant l’apprentissage des responsabilités et donnant à l’ouvrier les moyens d’accomplir son existence. - Philanthropique : à la tête de la pyramide de Carroll, (1991), se trouve la quatrième catégorie du modèle ; c’est la Philanthropique. Dans ce sens, l’entreprise aide les associations à améliorer la situation des individus sans s’attendre à une contrepartie de leur part comme le soutien à l’art, aux écoles et aux orphelinats. L’entreprise peut participer en ressources financières ou en temps des responsables travaillant pour elle. Au cas où sa contribution n’est pas au niveau attendu, cela ne remet nullement en cause sa moralité. Bien entendu, la RSE ne se limite pas aux actions philanthropiques. « Ces dernières sont comme la crème sur le gâteau. » Carroll, (1991). Selon Carroll, (1991), ces responsabilités n’ont pas trop d’importance que les trois autres modèles de la responsabilité sociale mais elles restent voulues par la société.
  • 27. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 23 Figure n°1-3 : La pyramide de la responsabilité sociale Carroll, (1991) 4. La conceptualisation de Wood (1991) Wood refait le modèle de la performance sociale de l’entreprise présenté par Carroll tout en l’affinant de subtilités considérables. Donc elle place la RSE dans un cadre plus étendue. Le modèle de recherche de Wood sur la RSE a avancé de façon significative. Se référer à ce modèle serait tout d’abord examiner les principes qui motivent les actions de RSE : institutionnel, organisationnel et individuel. Selon ce modèle, les actions de RSE peuvent découler du principe de légitimité, du désir de l’entreprise de maintenir sa crédibilité ou bien de sa volonté d’obtenir des résultats de performance. Ici, Les préférences et les tendances des managers peuvent aussi engendrer un facteur important à ce niveau. Les réactions forment pour Wood une dimension d’action sérieuse pour compléter les composantes normatives et de motivation. Et finalement, les résultats de performance s’attachent aux impacts sociaux, programmes sociaux et politiques sociales. L’originalité de l’apport de Wood, telle que rapportée par Haigh M. et Jones M. T., (2007) relativement aux travaux qui l’ont précédé peuvent se résumer par l’interrelation de la société et des affaires et son insistance sur la non séparation entre les deux. Selon cette conceptualisation, la société a des attentes de la part des comportements des entreprises. Ces attentes sont incitées par les effets externes économiques. Le concept d’externalité est « la reconnaissance que l’action d’un acteur donné peut simuler d’autres acteurs sans que ceux-ci aient été consultés ou indemnisés pour les effets dommageables qu’ils portent (externalités négatives) ou sans que les bénéficiaires aient à payer un avantage qui leur est attribué du fait de ces externalités (externalités positives). » Urban S., (2005). Philanthropique Ethique Légale Economique
  • 28. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 24 5. Internaliser les effets externes L’engagement de l’entreprise d’être responsable est vu par certains chercheurs comme une volonté d’internaliser certaines externalités négatives (comme la pollution de l’air, des rivières ou des mers). Dans ce modèle de développement l’entreprise veut minimiser les effets négatifs de sa production. Elle essaie donc par plusieurs moyens d’agir, soit d’une manière défensive en améliorant ses pratiques et en corrigeant les dégâts qu’elle aura causés. Elle essaie de corriger son image et de l’embellir auprès de la société. Ces différentes actions sont très importantes pour l’organisation et la société. L’entreprise établirait des actions de chartes en vue de garder ses relations avec ses partenaires et de réduire les externalités négatives produites par elle-même ou par ses sous-traitants. Nous assistons depuis 2001 à l’émergence des premiers engagements volontaires de la part dès l’entreprise, avec la multiplication des codes et des chartes. Celles-ci assument un rôle d’évaluateur, elles s’auto-instituent ; elles autoproduisent des règles : ce qui est appelé la soft law. L’entreprise arrive même à se déclarer responsable de l’intérêt général et des générations futures. Or, certains de ces codes, tel que l’OCDE et l’OIT le rapportent, ne comportent que des principes généraux, ne servent nullement à la mise en œuvre de dispositifs effectifs de RSE et manquent souvent de transparence Capron M. et Quairel F., (2004). 6. Le modèle de Quazi et O’Brien Le modèle de Quazi et O’Brien, qui a découvert en 2000, a été vérifié empiriquement dans différents contextes : au Bangladesh et en Australie, puis en 2005, par De la Crus Deniz et Suarez en Espagne et plus récemment, au Moyen Orient en 2009 par Jamali D., Sidani Y. et El-Asmar K, (2009). Dans ce schéma, l’axe horizontal indique les variations dans les engagements de responsabilité sociale et l’axe vertical la perception des conséquences des actions responsabilité social. Les 4 quadrants qui en résultent montrent : la conception classique étroite de la responsabilité et la focalisation sur les coûts, la vue socio-économique qui s’attend à des gains potentiels importants avec une responsabilité sociale étroite, la vue philanthropique qui a une vision étendu de la responsabilité avec prudence des coûts et finalement, la vue moderne qui voit dans la RSE une action bénéfique et où la responsabilité sociale est indispensable. Les résultats sont surtout concentrés entre la vision très classique où l’on ne croit pas à la RSE et où l’on observe que celle-ci représente un coût et la vision moderne qui suppose à la RSE dans les actions philanthropiques alors qu’on agit sans espérer aucun avantage mais l’on s’attend à subir un coût. L’étude de Jamali et al. (2009) a transporté une nouvelle dimension au modèle de Quazi et O’Brien dans la mesure où elle considère que la philanthropie peut être stratégique et viser une grande responsabilité et profiter de cette stratégie, donc ne pas la considérer comme un coût.
  • 29. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 25 Figure n°1-4 : Le modèle de Quazi et O’Brien Gains dérivés des actions RSE Fadoie, (2010) Large responsabilité Etroite responsabilité Conclusion du chapitre 1 Votaw déclara, déjà en 1973, « le mouvement de responsabilité sociale des entreprises aurait besoin de retomber sur terre » car d’après l’auteur, « aucune cause sociale durant l’histoire récente n’a été sujette à tellement de différentes approches, définitions, révisions, conceptions et de dogmes autant que celle- ci». Comme nous avons pu le constater, la RSE est un concept très subjectif, elle est perçue de différentes façons, selon l’idéologie et le courant de pensée. Bien que la recherche dans le champ de la RSE soit complexe et qu’il faille souvent y distinguer la théorie de l’idéologie, d’un côté, puis la théorie de la pratique, de l’autre, ce sujet fut très à la mode dans les pays dits développés à la fin du siècle dernier et il continue à intéresser les chercheurs puisqu’il s’est étendu de l’environnement proche de l’entreprise à l’environnement au sens large du globe terrestre pour toucher à l’univers tout entier. Stratégique ModerneVue moderne Vue socio-économiquePhilanthropique Moderne Vue classique Large responsabilité
  • 30. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie Chapitre 2 : le mangement et le management stratégique de la RSE
  • 31. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 27 Section 1 : Le management stratégique 1. La stratégie d’entreprise Pour comprendre ce qu’est la stratégie d’entreprise, nous citons plusieurs auteurs qui ont en donné une définition. Ainsi,Tabatoni et Jarniou ,(1975) considèrent que les décisions sont dites stratégiques lorsqu’elles « visent à orienter de façon déterminante et pour le long terme les activités et les structures de l’organisation ». Pour Ansoff, (1988), la stratégie est le moyen d’accéder à l’atteinte des objectifs, une formulation claire de la stratégie peut enlever et améliorer les performances et devenir un outil de management essentiel et indispensable, alors Thiétard, (1984) définit la stratégie comme « l’ensemble des décisions et des actions relatives aux choix des moyens et à l’articulation des ressources en vue d’atteindre un objectif ». Nous terminons, par Orsoni (1990), « la stratégie désigne l’ensemble des choix qui orientent une firme sur une longue période », l’entreprise opérant des choix dans des « domaines importants pour elle (activités et structure) et pour le long terme ». D’autres auteurs mènent la notion de stratégie en relatif avec la façon dont elle est menée. Sallenave, (1984) admet qu’« une stratégie est positive pour l’entreprise si à son terme, l’entreprise en question se trouve relativement mieux par rapport à ses concurrents qu’au début. Une stratégie n’est ni bonne, ni mauvaise, elle est seulement meilleure ou pire que celle des concurrents ». Selon lui, la notion de stratégie est relative et reprend la définition qu’en donne Henderson, (1969) qui considère une stratégie d’entreprise comme « un plan d’utilisation et d’allocations des ressources disponibles dans le but de modifier l’équilibre concurrentiel et de la stabiliser à l’avantage de l’entreprise considérée ». On peut remarquer la puissance de l’allocation des ressources et donc éloigner la stratégie en chiffres. Selon Avenier, (1992), il existe deux manières de définir la stratégie. La première est appréciée « comme un ensemble de règles pour prendre des décisions relatives aux choix des domaines d’activités de l’entreprise, qui prend en compte les quatre aspects complémentaires suivants : le champ d’activité produit-marché, le vecteur de croissance (…), l’avantage compétitif que la firme entend exploiter pour asseoir sa position, la synergie (…) » et la deuxième soit elle est conclue « comme un plan d’actions ». Il s’agit de l’objection entre le processus stratégiques et le contenu Simon, (1978) dans la conception de la « rationalité ». D’autres auteurs proposent une définition de la stratégie en positionnant l’acteur au centre de l’organisation Tel est le cas de Savall et Zardet ,(1995) selon qui, la stratégie c’est « concevoir, réunir et manœuvrer des ressources, des forces et énergies de façon intentionnelle, pour occuper dans l’espace et
  • 32. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 28 dans le temps une position jugée avantageuse dans un contexte relativement conflictuel et de compétition, afin de réaliser un projet de l’acteur (entreprise ou individu) comportant des enjeux importants et relativement durables ». Cette définition de la stratégie est terminée par un aspect socio-économique, c'est-à-dire « qui définit conjointement des objectifs économiques et des objectifs sociaux, au même niveau de l’activité stratégique, car (…) les uns sont le moyen d’atteindre les autres et réciproquement ». D’autres auteurs vont mettre la stratégie comme adjoint à trouver les meilleures solutions pour l’allocation des ressources de l’entreprise. C’est ainsi que Mahé ,(1998) dégage quatre idées essentielles , selon lesquelles « ce qui est stratégique revêt une dimension essentielle (cruciale) pour une organisation ; (…) il ne peut y avoir stratégie que si un problème d’allocation de ressources (financières, humaines, matérielles, etc.) est en cause ; (…) toute stratégie s’inscrit dans une anticipation de réalisation de but(s) dans le temps (durée) ; (…) la stratégie concerne une réflexion sur des actions relatives à la relation entreprise / environnement ». À propos l’acteur de la stratégie d’entreprise, Mintzberg, (1990) considère que la détermination de la stratégie est une des devoirs les plus importantes dévolues au manager. La stratégie fait « référence à la façon dont un système collectif, nommé organisation, établit ses orientations fondamentales, et si nécessaire, ses changements de cap ». Dans leurs synthèses sur la stratégie, Hafsi et Toulouse, (1996) prévoient qu’il existe cinq aspects radicaux de la stratégie. Elle est la « manifestation de la volonté des dirigeants », « l’expression d’une communauté de personnes », un « filon conducteur » au sens du cheminement et de cohérence des actions dans une même direction, une « construction d’un avantage concurrentiel » et une « gestion de la relation entreprise / environnement ». Martinet, (1983) améliore l’approche de la stratégie en a supposant que « toute entreprise est plus ou moins orientée par une politique générale » qui serait « l’ensemble des principes directeurs et des grandes règles et normes qui orientent en permanence l’action ». Pour cette, la politique générale assiste de guide aux décisions et « s’impose à la stratégie en lui fixant des buts à atteindre (…), des contraintes et des critères à respecter ». Nous fermerons cette revue de la littérature en stratégie par les 5P de Henry Mintzberg qui sont une manière de définir le mot "stratégie". Ou Chaque P exprime un aspect de la stratégie : plan, ploy, pattern, position, perspective.  Plan : la stratégie est définie comme un plan, un pilote pour se protéger la situation à long terme, ce qui entraine une intention stratégique.
  • 33. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 29  Ploy : la stratégie est une manœuvre s’opposer pour développer une offensive face à ses concurrents sur le marché. La manœuvre est aussi un acte pour opérer les objectifs que s'est fixée l'entreprise. Le but ici est d'être une menace et un danger pour ses concurrents.  Pattern : la stratégie est un modèle, une action formalisée. En comparant avec la premier P, ici la stratégie est une action à accomplir pour obtenir des résultats et non une intention Position : la stratégie s’exprimer par une meilleure position et l’équilibre sur le marché d’autre part par la localisation de l'entreprise dans son environnement. La position prise se fait en fonction de la position des concurrents sur le marché.  Perspective : la stratégie est une éventualité de la place de l'entreprise dans son environnement dans l'avenir. Dans ce P, la stratégie devient aussi une façon de sentir l’univers autour de l'entreprise et surtout de prendre en compte son environnement. À partir de l’ensemble de ces définitions nous donnons une synthèse d’une stratégie. En effet à l’origine de la stratégie il y a une décision, des choix qui se passent au niveau politique de l’entreprise. D’où la stratégie située entre le point d'observation et la source. En fonction de ces tendances stratégiques, il se fait pour la direction de l’entreprise de faire en sorte d’allouer les ressources dont elle dispose. Au cours de cette phase, l’entreprise va définir les buts entiers et les objectifs de son fonctionnement et son activité. Elle va aussi déterminer les moyens pour atteindre ses buts. La prise de décision stratégique va attribuer, par ailleurs, à une mise en œuvre des actions établies au niveau politique. L’entreprise doit maintenir ses performances et le niveau stratégique de la prise de décision est soutien de ce contrôle. Grâce à toutes ces prudences stratégiques, l’organisation en pratiquant sa politique va maitriser et réaliser ses objectifs et atteindre ses buts d’où elle va s’assurer une continuité dans sa position interne et externe. D’où elle avoir une performance globale c'est-à-dire sociale, économique et environnementale. Figure n°2-1 : Les grandes dates de l’apparition de la pensé stratégique Gherib, (2010) 1960 1980 École Normative Les grandes dates de l’apparition de la pensée stratégique École nor mative : l’École du positionnement 400 ans Av-JC Fin 17eme siècle Clausewitz « De la guerre » Clausewitz 1889 H.Liddle Harrat Sun Tzu Préceptes Militaires Consutants Conflit Du Vietnam 1962 1967 James Brien Quin / Porter 1972 PIMS ‘‘Boutiques des Stratégies’’ ‘‘Choix stratégie et Concurrence » Porter 1990 /1991 Critiques De l’école du positionnemnet Guerre napoléonienne BCG “L’art de la guerre” Sun Tzu Apparition des Revues de stratégies SMJ/JBS Fin 70 debut 80 Propositions empiriques 1951 Théorie des jeux Von Neuman & Mongenstern Richard Rumelt / Hamel 2nd Guerre Mondiale 7
  • 34. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 30 2. Le management et le management stratégique 2.1 Le management : la gestion des hommes L’origine de mot management est anglaise, « to manage » qui signifie diriger, lui-même provient du français « ménager » ou « manège ». Fayol, (1921) détermine le management comme étant la « conduite, la direction d’une entreprise ». Dans le même sens, le Petit Robert le définit comme l ’« ensemble des techniques d’organisation et de gestion d’une affaire, d’une entreprise ». Le management intègre l’action d’organiser et donc la gestion Mintzberg, (1990). Il n’existe pas une différenciation entre le management et la gestion, tout en supposant que les tâches des managers incluent des travaux de gestionnaires. Lassègue, (1987) définit la gestion comme « l’application des sciences à la conduite des organisations ». Selon le même auteur, cela se réalise par trois déterminants que sont respectivement, la communauté de finalité entre les membres, le désir de coopérer partagé par les membres et la communication. Selon Crozier, (1985), « le management est un art » car il assiste à gouverner un ordinaire tissé de contradictions. Il considère que « croire que l’on peut déduire de ces connaissances des règles "scientifiques" pour la gestion et la direction des organisations humaines relève d’une illusion dangereuse ». A l’inverse Lassègue et Martory, (1987) considèrent la gestion que comme une science dans ses fondements qui est appliquée avec une rationalité totale. Lassègue, (1987) confirme d’ailleurs « je définis donc la gestion comme l’application des sciences à la conduite des organisations ». Savall et Zardet, (1995) considèrent le management comme « les moyens mis en œuvre auprès des acteurs internes (individus et entités) pour maîtriser l’interaction entre structures et comportements au service d’un certain niveau de performance socio-économique recherché par l’entreprise » Anastassopoulos, (1980) a déterminé les bords du management par trois volets que sont respectivement ; les objectifs de l’entreprise, sa stratégie et ses ressources. Ainsi, il démontre que « le management est la manière dont sont fixés les objectifs généraux de l’entreprise, dont sont formulées ses stratégies à long terme, dont sont définies, rassemblées, organisées les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ses stratégies au sein du système de gestion approprié » 2.2 Le management stratégique : intégration de la stratégie dans les pratiques de gestion Thiétart, (1980) joint le management et la stratégie en développant que « la stratégie est la pierre angulaire à partir de laquelle le management va pouvoir s’élaborer ». Nous assumons, selon lui, que le management est un acte, un procédé, une action, un style de piloter une organisation, de la diriger, de programmer, de planifier son développement et de la contrôler. D’où la stratégie sera limitée à un
  • 35. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 31 ensemble de choix, de priorités et d’engagements pris en vue d’atteindre des objectifs. Martinet, (1983) propose que la stratégie d’une organisation se mette au service de la gestion opérationnelle. Il affirme donc que « si la gestion courante permet de réaliser, la gestion stratégique doit mettre l’entreprise en situation de réaliser. (…) La gestion stratégique est donc inséparable de la notion d’investissement pris au sens large : en homme, en recherche-développement, en prospection de marché, en organisation… la gestion courante se préoccupant, quant à elle, de la conversion de ses investissements en résultats ». Pour Orsoni ,(1990) « l’art d’employer les méthodes, les modèles, les théories, en un mot les armes qui peuvent aider les dirigeants lorsqu’ils effectuent de tels choix [stratégiques de longs termes] dans le cadre d’une politique générale ». Selon Koenig, (1996), « le management stratégique d’une organisation a pour fonction d’en assurer la compétitivité, la sécurité et la légitimité » c’est dire que n’est pas « l’apanage des seules entreprises ».
  • 36. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 32 Section2 : Le management stratégique de la RSE Les vingt dernières années sont caractérisées par une croissance progressive des préoccupations environnementales, sociales et sociétales dans le management stratégique des entreprises. Il est clair que l’intégration des principes de la RSE par les entreprises commence a existé avec une nuance importante. Donaldson et Preston, (1995) ; Shrivastava et Hart, (1996) ; Hart, (1997) ; Reynaud, (1997) ; Reynaud et Rollet, (2001) ; Martinet et Reynaud, (2001, 2004) ; Reynaud et al, (2006). D’une part, le niveau d’engagement des principes de la RSE des entreprises se caractérise par une certaine hétérogénéité : il se balance entre l’absence de réponse et l’attitude proactive, et d’autre part, si cet engagement existe, l’orientation de l’entreprise en matière de la RSE peut varier entre l’écologie, du social et/ou du sociétal Patricia, (2009). Le management de la RSE est une démarche mise en place dans les entreprises. Il indique l’ensemble des méthodes de gestion et d’organisation de l’entreprise. C’est une démarche évolutive qui consiste alors à intégrer la RSE dans la gestion et la stratégie de l’entreprise. Elle vise notamment à prendre en compte de façon systématique l’impact des activités de l’entreprise sur les parties prenantes Cazal, (2006). Les premières modalités de la démarche du management de la RSE s’inscrivent dans une perspective de développement durable. Ce dernier implique une interdépendance entre développement économique et qualité de l’environnement. Encore le management stratégique de la RSE a comme rôle l’identification et la maîtrise des risques d’impact direct ou indirect des activités de l’entreprise sur les parties prenantes. Celle-ci repose également sur une recherche d’amélioration continue de leur compétitivité. Elle implique donc une gestion dans à long terme Patricia, (2009). 1. Les stratégies d’engagement RSE En 2001 la Commission des Communautés Européennes définit le concept de RSE dans son Livre Vert : « Le concept de responsabilité sociale des entreprises signifie essentiellement que celles-ci décident de leur propre initiative à contribuer à améliorer la société et à rendre plus propre l’environnement. (…). Cette responsabilité s’exprime vis-à-vis des salariés et, plus généralement, de toutes les parties prenantes qui sont concernées par l’entreprise mais qui peuvent, à leur tour, influer sur sa réussite (…). Bien que leur responsabilité première soit de générer des profits, les entreprises peuvent en même temps contribuer à des objectifs sociaux et à la protection de l’environnement, en intégrant la responsabilité sociale comme investissement stratégique au cœur de leur stratégie commerciale, de leurs instruments de gestion et de leurs activités » CE, (2001). Cette définition montre que la RSE n'est pas uniquement une alternative aux activités centrales de l'entreprise, mais elle se pratique à la gestion même de toutes sociétés.
  • 37. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 33 L’entreprise qui veut être socialement responsable doit intégrer les activités sociales dans sa stratégie. Cela lui permettrait de se différencier par rapport aux autres Hess, et al, (2002). En effet c’est vrai que l’entreprise supporte un coût supplémentaire en choisissant une stratégie RSE, mais en contrepartie, elle dépasserait des risques importants au niveau interne et externe Ansoff, (1979). Tableau n°2-1 : Les réponses aux risques environnements externes et internes Réponses aux risques liés aux environnements internes Réponses aux risques liés aux environnements externes Gestion des ressources humaines : qualité du recrutement Changement de l’environnement institutionnel (Etat, Europe, Monde) Conditions de travail, d’accidents du travail, de maladies locales professionnelles Qualité des relations avec les acteurs locaux Qualité de la production, Equilibre produit/prix Répercussions environnementales de l’activité de l’entreprise Absence (ou présence) des activités de mécénat Productivité Absence (ou présence) des activités de mécénat Absence (ou manque) de gestion optimale de biens immatériels Modification de la démographie (Fort investissement pour les jeunes) Gestion inadaptée des générations et/ou de la multi-culturalité Qualité de l’enseignement et de la formation professionnelle une stratégie de gestion prévisionnelle des risques Connaissance et mise en application des principes du développement durable et de la RSE Image de l’entreprise Source : Martinet A.-C. et Reynaud E. (2001) On repère dans le modèle de Carroll, (1979) une dimension philosophique de la conscience sociale qui confirme la stratégie proactive, accommodante, défensive et réactive en référence aux travaux de Martinet et Reynaud E. (2001), et Wilson, (1974). Capron et Quairel-Lanoizelée, (2007) présentent une typologie des attitudes stratégiques en fonction, d’une part, du gain économique de l’organisation (risques et opportunités faibles ou forts) et, d’autre part, des contraintes exercées par les parties prenantes et de la transparence médiatique recherchée par le dirigeant de l’entreprise.
  • 38. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 34 Ces auteurs constatent alors quatre stratégies : - Proactive (lancée volontairement par le dirigeant) - Défensive (recherche de correspondances strictes aux attentes des parties prenantes) - Réactive (suite à des difficultés médiatisées) - Engagée (volontaire, par pure croyance personnelle du dirigeant en l’absence de pressions externes fortes). Figure n°2-2 : Typologie des comportements stratégiques RSE Performance économique de l’entreprise Pressions des parties prenantes Visibilité médiatique Risques faibles Opportunités faibles Risques forts Opportunités fortes Pressions faibles Visibilité faible Ignorance, conformité faible ou symbolique Stratégies engagées Stratégies proactives : de l’intégration faible à l’intégration substantielle Pressions fortes Visibilité forte Stratégies défensives : évitement, manipulation Stratégies proactives ou réac-tives Compromis Source, Capron et Quairel-Lanoizelée, (2010) Ils distinguent alors une variété de stratégies en commençant par les comportements défensifs : l’inertie qui n’est pas tenable à terme à cause des pressions légales et institutionnelles pour une reddition des entreprises ; la manipulation avec « des tentatives pour influencer ou contrôler les pressions institutionnelles » comme la présence et le lobbying dans les instances de régulation ou de normalisation de types Grenelle de l’environnement et l’évitement qui consiste à déguiser « la non-conformité par l’élaboration d’une image de conformité » à travers des pratiques de greenwashing ou de windowdressing », qui peuvent au contraire nuire la réputation des entreprises si elles sont dénoncées par les parties prenantes . Capron et Quairel-Lanoizelée (2010) mettent également en exergue des comportements actifs à commencer par les approches « qui séparent les actions de RSE des stratégies liées aux métiers de l’entreprise » comme la philanthropie, le mécénat et la constitution de fondation d’entreprise qui nous
  • 39. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 35 viennent du monde anglo-saxon mais qui motivent de plus en plus les entreprises françaises Seghers, (2007). Dans ces comportements actifs, il y a également les approches RSE corrélées à la stratégie globale des entreprises : l’intégration faible mais progressive d’objectifs RSE dans les métiers de l’entreprise ; les stratégies de compromis entre les intérêts économiques et les remises en cause des métiers de l’entreprise à l’aune des valeurs et des enjeux de la RSE ; et les stratégies qui intègrent la RSE dans le cœur de métier de l’entreprise, sa stratégie et son organisation. Ce sont ces derniers types de stratégies qui engagent le plus l’entreprise. Elles peuvent être de nature réactive et se développent après une crise ou face à des risques inacceptables auxquels est confrontée l’entreprise. Et elles peuvent être dans une logique proactive « lorsqu’elles partent d’initiatives volontaires des dirigeants et qu’elles affirment la convergence d’objectifs de responsabilité dans la contribution du développement durable avec les finalités de performances financières de l’entreprise » Capron, Quairel-Lanoizelée, (2010). Selon Porter, (1987), l’élaboration d’une stratégie doit reposer sur un avantage concurrentiel qu’elle a déjà ou qu’elle peut acquérir pour lui permettre d’avoir une longueur d’avance sur ses concurrents. L’auteur distingue deux types d’avantage et préconise qu’une stratégie doit viser uniquement un des deux pour un segment de marché considéré sous peine de « s’enliser dans la voie médiane ». Le premier avantage est « l’avantage coûts » qui doit être entendu comme tout ce qui permet à une entreprise de gagner des coûts de réalisation des activités de la « chaîne de valeur » inférieurs à ceux des concurrents. La stratégie adoptée vise alors à offrir des prix inférieurs par apport aux entreprises concurrentes Porter, (1987). Le deuxième avantage est l’ « avantage de différenciation » qui permet à l’entreprise d’offrir au segment de marché convoité une offre différenciée de celle des entreprises concurrentes, avec un surcoût limité et adapté à la création de valeur de l’offre pour le client. La stratégie adoptée vise à offrir une solution optimale en termes de qualité pour le client. Un avantage concurrentiel ne peut être formulé qu’en faisant référence à un secteur ou segment et n’est à priori pas transposable à d’autres. Porter, (1987).
  • 40. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 36 Figure n°2-3 : L’approche stratégique de la RSE selon Porter et Kramer, (2006) Aspects sociaux et environnementaux génériques Aspects sociaux et environnementaux sur lesquels la chaîne de valeur a un impact Aspects sociaux et environnementaux qui ont un impact sur l’avantage concurrentiel Entreprise citoyenne RSE défensive Atténuer les impacts négatifs des activités liées à la chaîne de valeur « Philantropie stratégique » qui accroît l’avantage concurrentiel RSE stratégiqueTransformer les activités de la chaîne de valeur au bénéfice de la société et en renforçant la stratégie de l’entreprise Source : Porter et Kramer (2006) D’après Porter et Kramer, (2006), deux démarches complémentaires permettent d’évaluer la prise en compte de la RSE dans la stratégie des entreprises. Une première démarche consiste à partir de l’analyse de la chaîne de valeur de l’organisation et à évaluer l’ensemble de ses impacts sociaux et environnementaux. La seconde s’appuie sur un diagnostic du potentiel de la RSE dans le contexte concurrentiel. Le diagnostic « interne ➝externe » (Inside out) et le diagnostic « externe ➝interne » (Outside In). L’analyse de Porter et Kramer, (2006) consiste alors à implanter la RSE dans la stratégie de l’entreprise. Celle-ci est guidée par la recherche d’un avantage concurrentiel Porter, (1987). Les deux auteurs suggèrent en premier lieu à reconnaître, dans la chaîne de valeur Porter, (1987), les points d’intersection entre l’entreprise et la société dans laquelle elle s’introduit, en distinguant les liens inside-out (l’impact de l’entreprise sur la société, positif ou négatif) et les liens outside-in (l’impact de la société sur l’entreprise, positif ou négatif). Dans la mesure où les entreprises n’ont pas vocation à régler tous les problèmes de la société, l’idée est qu’elles hiérarchisent alors les actions sur lesquelles va soutenir la RSE, non en raison de la valeur essentielle de telle ou telle question d’ordre social ou environnemental, mais en fonction des liens que cette question entretient avec la création de valeur dans l’entreprise concernée. Ils incitent donc à distinguer, pour chaque entreprise, les questions génériques (Generic Social Issues) sur lesquelles la chaîne de valeur de l’entreprise concernée n’a pas d’impact et qui n’ont pas d’impact sur l’entreprise concernée ; les questions sur lesquelles la chaîne de valeur de
  • 41. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 37 l’entreprise a un impact (Value Chain Social Impacts) et enfin, les questions qui ont un impact sur la compétitivité de l’entreprise (Social Dimensions of Competitive Context). Porter et Kramer, (2006) distinguent alors, dans la RSE, l’approche défensive et l’approche stratégique. La première est à l’œuvre lorsque l’entreprise, en équilibre avec les préoccupations des parties prenantes, se comporte de manière citoyenne et atténue les effets négatifs, réels ou anticipés, de l’activité productive en se basant sur une liste standardisée de domaine d’action. L’approche stratégique doit aller au-delà de la recherche mimétique de bonnes pratiques, pour essayer de trouver ce qui, dans la RSE, permet au contraire de se différencier et de renforcer l’avantage concurrentiel. Cette approche stratégique doit se focaliser sur des objectifs bornés qui intègrent à la fois des effets inside-out et outside-in. Toutefois Martinet et Reynaud (2004) définisent trois types de comportement stratégiques : − Une attitude attentiste relative au manque de volonté de s’engager de la part du dirigeant ou, de manière plus matérialiste, à la déficience des ressources disponibles (humaines, financières). − Une attitude adaptative pour répondre à la législation Di Maggio et Powell, (1983) ou à anticiper les attentes futures du marché par une offre « responsable ». − Une attitude proactive ayant un but d’innovation au sein d’un secteur d’activité. Quant à Bellini, (2003), elle définit une typologie des attitudes écologiques de l’entreprise inspirée des travaux de (Carroll ,1979) sur la RSE. L’auteur distingue trois stratégies : - les attitudes éco défensives (suivant une logique purement financière). - les attitudes éco conformistes (respecter les normes exigées par la réglementation) - les comportements écosensibles (ou proactifs a une tactique innovatrice). Bellini(,2003) montre que seules les attitudes écosensibles relèvent de la stratégie d’entreprise. Dans cette étude préalable, une stratégie sociétale se présente comme l’association de l’engagement environnemental (faible ou fort) et de l’engagement social (faible ou fort), dont le but est d’assurer la continuité de l’entreprise.
  • 42. Le management stratégique de la RSE : le cas des entreprises hôtelières en Tunisie 38 Figure n°2-4 : Matrice des stratégies sociétales des créateurs Engagement Social Engagement Environnemental Faible Fort Faible Stratégie réactive Stratégie proactive Fort Stratégie rituelle Stratégie mobilisatrice Source : Berger-Douce, 2007 − La stratégie réactive : est une combinaison d’engagement environnemental et social faible. Cette stratégie s’adopte en cas de difficultés répétitives comme le manque d’informations sur le sujet de responsabilité, l’insuffisance de temps et le coût de la mise en place des pratiques de RSE. − La stratégie proactive : est un engagement environnemental fort aligné par à un engagement social faible. Cette stratégie très adoptée surtout dans les secteurs d’activité éco-industrielles et dans les entreprises conscientes de l’effet négatif de leurs activités en termes de pollution environnementale. Les entrepreneurs qui adoptent une stratégie proactive se trouvent devant des difficultés supplémentaires lors de la création avec des entrepreneurs « classiques » Friedmann, (2005). − La stratégie mobilisatrice : est une combinaison d’un double engagement (environnemental et social) fort. Cette stratégie est peu adoptée par les PME car elle repose sur une analyse forte de l’entrepreneur en faveur de l’engagement sociétal. Or, ces entrepreneurs se trouvent devant des obstacles lors de la création, car ils doivent déterminer leurs parties prenantes à la fois sur le plan social et sur le plan environnemental Clausen, (2005). − La stratégie rituelle : est un engagement social fort aligné par un engagement environnemental faible. Cette stratégie est assez pratiquée dans les entreprises de petites et moyennes taille, si l’on définit que ces organisations sont imprégnées des valeurs de leur dirigeant. Une structure de petite taille peut être regardée comme davantage favorable à un engagement social fort notamment en raison des effets de proximité Torrès et Gueguen, (2006). Martinet et Reynaud, (2001) développe les stratégies de la RSE dans son modèle en distinguons trois choix stratégiques possibles :