Portraits de chargés de développement numérique en région Provence-Alpes-Côte d'Azur (médiation numérique)
Réalisé dans le cadre de l'ObTIC : observatoire des usages numérique
1. Portraits d’acteurs
Les Chargés de Développement Numérique
Entretiens réalisés dans le cadre de l’Observatoire des TIC (ObTIC) en région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Juin 2012 1
2. Mettre des mots sur les choses...
Lorsque l’on demande à Martine comment elle qualifie son que les personnes que l’on reçoit, elles sont souvent au
métier, elle écarte d’emblée le volet « technique » pour mieux chômage. Elles n’ont pas encore fait le pas d’utiliser l’ordi-
en pointer la dimension « humaine ». De fait, dans le quartier nateur et surtout Internet, elles sont un peu angoissées.
populaire de la Cabucelle au sein du 15ème arrondissement Donc là, d’abord, on gère l’angoisse de ceux qui se disent
de Marseille - « l’un des quartiers les plus en difficulté », «j’ai raté le coche mais il faut absolument que je m’y mette
précise-t-elle - où est implanté son Espace Régional Internet parce que c’est nécessaire» ».
Citoyen (ERIC), Martine a vite compris que la « lutte contre
l’illectronisme » ne pouvait se payer de mots, mais devait Elle s’emploie également à dédramatiser la pratique de la lec-
s’inscrire avant toute chose dans une véritable économie de ture, sans laquelle il n’y a pas de manipulations informatiques
la parole. possible, en mettant par exemple le « côté ludique » en avant.
Comme elle le dit, « parler ici, c’est d’abord parler français. Pour les plus jeunes, c’est une toute autre histoire, car il
Trouver les mots au lieu de se bagarrer, surtout pour les s’agit au contraire de tempérer ce type d’usage. « Parce que
enfants. Pour les adultes, ça va être d’extérioriser, bien l’ordinateur, pour eux, c’est souvent plus le jeu. Donc on les
« Le métier d’animateur
que ce ne soit pas tout à fait de notre ressort, c’est une incite à être créatifs. On a créé un système de points. On
multimédia consiste surtout nécessité ne serait-ce que pour vivre ensemble ». On com- leur propose de dessiner sur un papier, de le scanner et de
à faire passer des choses prend alors que pour Martine les technologies de la commu- le compléter sur ordinateurs. Ça fait une petite création
nication, ce sont d’abord et surtout celles qui libèrent le lan- que l’on peut conforter ensuite avec d’autres recherches
autour du numérique avec
gage, qui favorisent l’expression, bref, qui font dire les maux. sur Internet».
des relations humaines, et
à mettre des mots sur ces Pour ce faire, elle s’efforce de préserver – non sans difficul- C’est alors qu’il faut faire accepter la place de l’adulte dans
choses. Ici, on peut racon- tés ! – un climat « convivial » au sein de son ERIC, de façon les apprentissages, sans pour autant l’imposer, trouver des
à ce que l’accès aux ordinateurs puisse se réaliser dans un astuces et naviguer à vue, parfois faire la morale, et sans
ter sa vie, ici, on peut avoir
contexte qui favorise les discussions amicales et l’entraide cesse rappeler les règles de civilité, comme celle – élémen-
un autre rapport à l’appren- entre adultes, autour notamment des démarches adminis- taire - qui consiste à dire « bonjour ».
tissage » tratives ou des recherches d’emploi sur Internet. « Je vois
MARTINE,
ARBORESCENCE
MARSEILLE (13)
3. « Parce que l’ordinateur, pour eux, c’est souvent plus le jeu. Donc
on les incite à être créatifs. On a créé un système de points. On
leur propose de dessiner sur un papier, de le scanner et de le
compléter sur ordinateurs. Ça fait une petite création que l’on
peut conforter ensuite avec d’autres recherches sur Internet »
grandiose, ce ne sera pas une thèse. Ce sont plutôt des
petits trucs pratiques : les choses à faire, ce qu’il vaut
mieux éviter, comment on s’y prend, quelle est la meilleure
manière de travailler avec des jeunes, etc. » Inversement,
elle s’appuie sur d’autres expériences qui ont cours ailleurs
et qui peuvent, à l’occasion d’une action ciblée, lui être utiles
(en particulier, la structure O2zone pour la vidéo, ZINC pour
la culture).
Si Martine sait compter ses forces, elle sait aussi combien
sa structure est fragile. Car la première difficulté à laquelle
elle est confrontée est de tenir ses engagements financiers
De sa formation aux Beaux-arts et de son ancien métier de pour assurer le fonctionnement quotidien de son association.
graphiste, Martine conserve la volonté farouche de « faire Il s’en suit une deuxième difficulté, qui consiste à tenter de
passer les choses via un message », ce que son expérience pérenniser les actions, surtout lorsque les « partenaires de
dans l’animation n’a fait que renforcer. Aussi, même si elle terrain » sont composés pour l’essentiel d’associations de
occupe aujourd’hui un poste de chargée de développement proximité soumises généralement aux mêmes contraintes
numérique, entend-elle demeurer un « passeur d’idées ». économiques, et que « six mois plus tard, elles n’existent
plus ».
Pour ses publics bien sûr, mais également à destination des
acteurs du réseau régional des ERIC qui ont, comme elle, Mais Martine n’est jamais à court de ressources, ni d’idées.
vocation à démocratiser les outils informatiques à destination « Par exemple, nous, on fait de l’accompagnement à l’em-
de publics défavorisés. « J’essaie d’écrire une méthodologie, ploi, de façon un peu bénévole disons. Est-ce que ça ne
de mettre ça sur papier ou sur écran afin qu’il y ait une vaudrait pas le coup de faire un vrai partenariat avec Pôle
façon de procéder qui soit transmissible. Bon, c’est pas Emploi ? ». Il suffit de se rendre dans son ERIC pour connaître
la réponse à cette question.
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4. Accompagner, être à l’écoute...
Le parcours professionnel d’Olivier s se lit comme un triptyque : teur socio-culturel dans le cadre d’une valorisation des acquis
d’abord, successivement et aujourd’hui, tout à la fois technicien de l’expérience (VAE). « Donc 3 diplômes pour 3 fonctions ».
réseau, responsable de projet et animateur. L’ensemble, son parcours, sa formation et ses envies, forme au
final un tout cohérent, qui lui permet de trouver un sens à son
Au départ, c’est vers l’informatique qu’il s’oriente, après un DUT travail. Enfin !
dans le domaine. Mais il se rend très vite compte qu’il est trop
loin de ses attentes. Il ne se voit pas simple technicien ou admi- En outre, cela répond à la diversité des besoins et des sollici-
nistrateur réseau. Il s’égare un temps dans la grande distribu- tations. Si vous allez dans le bureau d’Olivier vous serez sur-
tion, 5 ans tout de même, mais s’y retrouve encore moins. Il pris par la multiplicité de post-it qui lui rappelle les nombreux
obtient une licence en communication et en gestion de projet et bénéficiaires qui comptent sur lui. « C’est un peu schizophrène
part travailler pendant deux ans en collège en tant que profes- comme métier tout de même » dit-il en rigolant. D’abord, ce
seur de technologie. Ce virage dans sa carrière lui permet de sont les résidents du foyer ; pas évident de les intéresser avec
découvrir enfin une dimension qui fait sens à ses yeux : le social. le turn-over. À peine, sont-ils sensibilisés que le plus souvent ils
sont amenés à évoluer vers d’autres horizons. Ensuite, il y a
Il tombe un jour sur une petite annonce de Pôle Emploi : le les extérieurs. Ceux qui fréquentent le Logis des jeunes sans
On aime bien le concept Logis des Jeunes de Cannes recherche un animateur multimé- y résider atteignent souvent un niveau de maîtrise des outils
dia. « La fiche de poste correspondait exactement à ce que je auquel on ne s’attend pas. Pour tous, le maître-mot est d’utiliser
de la pieuvre : on aime recherchais : un peu d’informatique, un peu de social, un peu les technologies comme facteur de lien social. « On propose
tout, on touche à tout. d’animation, auprès des jeunes ». des services mais des services citoyens. On vient en profiter
mais on a un contact qui n’est pas le même : ce sont des
C’est ce qui nous plaît, personnes qu’on accueille, pas des clients. »
Depuis 2008, après 2 ans dans ce poste d’animation, il est
plein de public, plein de devenu chargé de développement numérique. En plus de l’ani-
projets » mation, il a plus de responsabilités, allant du développement Ce lien social avec les bénéficiaires supplée les difficultés qui
de projet à la gestion du service, en passant par la mainte- peuvent exister dans la relation à l’environnement local. Le Logis
nance réseau. Toujours dans la même logique, il complète à des Jeunes est atypique sur un territoire qui ne l’est pas moins
l’heure actuelle sa formation par un diplôme d’Etat dans le sec- : il est difficile d’envisager des partenariats quand personne ne
OLIVIER,
LOGIS DES JEUNES
CANNES (06)
5. Pour tous, le maître-mot est d’utiliser les technologies comme
facteur de lien social. « On propose des services mais des
services citoyens. On vient en profiter mais on a un contact
qui n’est pas le même : ce sont des personnes
qu’on accueille, pas des clients. »
sollicitations. Il ne trouve pas les partenaires dans sa ville.
Alors, il va les chercher ailleurs : Tania du Hublot à Nice pour
les projets plus culturels ; l’ERIC de Pertuis pour un projet e-
toileurs ; un photographe professionnel et des infographistes
pour le projet « les résidents s’affichent ».
Il y croit tellement qu’il souhaite faire évoluer son ERIC vers
un espace de coworking. Ouvert sur son environnement, il se
donne pour objectif de créer un espace dédié qui permette
d’aider dans leurs projets des entreprises, des associations
comme des individus, avec la volonté d’ouvrir leurs résidents
vers de nouveaux horizons.
semble devoir les soutenir. Olivier déplore ainsi que l’Espace Ce projet s’appuierait sur les réalisations déjà ancrées comme
Régional Internet Citoyen (ERIC) soit uniquement identifié « en « l’école des projets » qui offre un accompagnement perfor-
tant qu’outil, mais pas en tant que partenaire ». Chacun mant au service du développement de projets économiques et
travaille dans son domaine sans lien évident avec les autres. associatifs. D’une manière générale, pour Olivier, « l’évolution
Cette coupure existe d’autant plus qu’elle recouvre une cou- des ERIC en centre de ressources est indispensable ».
pure physique marquée par la voie ferrée entre la ville de bord
de mer et la ville au-delà. Peut-être la rénovation à venir de Et si l’on dit à Olivier qu’il fait de la médiation numérique pour
la gare sera-t-elle l’occasion de mettre fin à cette vision d’une faciliter l’accès à quelque chose de complexe dans une société
ville coupée en deux, traversée par une forme de méfiance où la place de la technologie nécessite de pacifier la relation
qui perdure. que les hommes entretiennent avec elle, il sera d’accord. Mé-
diateur et pacificateur, Olivier a trouvé le métier qu’il cherchait.
Pour dépasser les difficultés, Olivier croit à l’échange de
bonnes pratiques : malgré ses contraintes, Olivier prend le
temps nécessaire ; il s’y emploie, se déplace, répond aux
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6. Se dévouer, construire des ponts...
Tania possède la motivation de ceux qui entrent par la fenêtre Aussi, quand l’association DIVA ouvre un espace multimédia Le
lorsque vous les faites sortir par la porte. Elle ne lâche rien. Et Hublot en 2004 sur St Roch au sein des entrepôts Spada suite
contrairement à ce qu’elle prétend, ce n’est certainement pas à la fermeture des Diables Bleus, son directeur - Frédéric Ale-
le fruit du hasard si elle est actuellement chargée de développe- many – fait appel à elle pour inaugurer et développer le projet.
ment numérique au Hublot, à Nice (06). « Au début, c’étaient des missions courtes. Fred m’appelait
au fur et à mesure à travers des petits CDD, quand il avait
Après des études « poussives », comme elle le dit, elle obtient une enveloppe ». Pour autant, Tania ne compte pas ses heures.
une maîtrise en sciences de l’information et de la communica-
tion qui lui permet de se voir offrir un poste rémunérateur dans Elle réalise en autodidacte un portail Web, afin de concevoir un
une prestigieuse agence de publicité. Mais c’est dans une toute outil de référencement en ligne des acteurs culturels et artis-
autre voie que Tania entend s’engager : « j’ai choisi de travailler tiques de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Puis, de « conceptrice »,
dans le milieu associatif, car le milieu privé ne me convenait elle devient par la force des choses « animatrice », toujours en
pas. Moi, je donne de toute ma personne à partir du moment auto-formation. « J’ai appris beaucoup toute seule. Personne
où ça a un sens, pas pour engraisser le patron. Après ce sont ici ne m’a dit comment ça marche. Il n’y avait pas de méthode,
des choix, je savais déjà que je n’allais pas casser des briques j’ai tâtonné. Rien que pour l’allumage des ordinateurs par les
au niveau salaire. Je préfère m’éclater dans mon travail, plu- publics, il a fallu que je teste avec eux pour valider. En plus, les
tôt que déprimer et gagner plus d’argent, je ne fais pas partie personnes que je forme me demandent des choses. Du coup,
« Tu peux rester à faire non plus de ceux qui consomment à tout va. Je suis plutôt je dois chercher sur Internet, je me suis formée en ligne et
ton projet tout seul, pour- « miss recycle ». ». Et de fait, c’est en bénévole, puis dans le grâce à des personnes qui étaient présentes à ce moment et
cadre d’un contrat emploi-jeune, que Tania fait ses premières m’ont montré les clés, je les ai prises ».
quoi pas ? Mais moi c’est armes dans le monde de la culture, en œuvrant durant près
le public qui donne du de cinq ans à la publication d’un journal satirique et l’organisa- Pour valider cette expérience, Tania entreprend une formation
tion d’évènementiels dans des lieux de proximité pour mixer les à distance dans le domaine des TIC auprès de l’AFPA à Cannes.
sens à tout ce que je fais,
publics et créer du lien social dans les quartier Est de Nice. Mais au travers de ses nouvelles compétences numériques,
qui me permet de faire c’est surtout une « vocation », selon ses propres termes, qui
ce que je fais et qui m’ap- Elle participe activement à l’aventure des Diables Bleus, unique se révèle à elle. Dans l’animation, précise Tania, il faut savoir «
friche culturelle qui a existé à Nice, et qui a permis de renforcer transmettre » et faire preuve de « générosité ». Il faut égale-
porte ma motivation » les liens entre des énergies de disciplines artistiques différentes ment apprendre à « s’adapter aux publics ».
à Nice.
TANIA,
LE HUBLOT
NICE (06)
7. « Je fais tout quoi, je fais de l’animation, de l’initiation, je monte
des projets... j’accompagne des porteurs de projets, je fais de la
maintenance informatique. J’ai la chance d’avoir un métier très
riche qui change tout le temps, on ne s’endort jamais »
les rencontres avec les artistes qui y sont en résidence feront CDI de l’association DIVA », qui apporte avec lui son lot de
jaillir l’étincelle. « Quand tu mets un ERIC tout seul, c’est nouvelles charges et responsabilités. Pour y faire face, il faut
pauvre. C’est bien le trafic de personnes différentes qui fait savoir jongler.
la richesse et l’intérêt. (…) Il y a des gens qui sont éton-
nés par la méthode du Hublot, ils ne pensaient pas que ça Alors Tania jongle. « Je suis responsable de l’ERIC, au-des-
existait. Et bien maintenant ils respectent, ils respectent
sus de moi il y a Fred. J’ai la mission d’encadrer et de
vraiment ! » Et quand les publics adhèrent, participent à un
recruter l’animateur. Je fais tout quoi, je fais de l’animation,
événement, découvrent un lieu et qu’ils se mélangent aux
de l’initiation, je monte des projets, je fais des demandes de
artistes, Tania se dit que sa motivation et ses engagements
subventions, j’accompagne des porteurs de projets, je fais
font sens.
de la maintenance informatique. J’ai la chance d’avoir un
métier très riche qui change tout le temps, on ne s’endort
C’est d’autant plus vrai lorsque Pôle emploi oriente ces
jamais ».
mêmes publics, faute de savoir ou de pouvoir leur proposer
autre chose, vers l’action de formation aux TIC que propose
le Hublot, financée par la Politique de la Ville. « Parfois on Bien sûr elle préférerait une organisation du travail plus
n’a l’impression de faire le travail des institutions qui elles simple, moins contraignante. Mais de cela aussi, elle tire une
Il faut dire que l’enjeu est à la mesure des défis auxquels les force : toujours la même capacité à « faire des ponts », en
sont payées pour le faire ». C’est pourquoi, Tania essaie de
quartiers Est de Nice sont confrontés, et avec lesquels - de réaliser l’objectif de rendre autonome les publics face à une inaugurant de nouveaux partenariats comme avec les asso-
par sa situation géographique - le Hublot a partie liée. « Nous, recherche sur internet et sur la communication par email lié ciations REFLETS et ARBRE, tout en s’ouvrant à de nouvelles
on a des publics qui sont des publics éloignés des TIC et de à l’emploi mais pas seulement. « J’essaie de trouver l’intérêt méthodes de travail et à d’autres horizons.
la culture. C’était intéressant de travailler avec ces publics du public à utiliser l’outil ». Elle essaie de montrer la res-
qui sont essentiellement des demandeurs d’emploi et des source qu’est Internet, qui n’est pas seulement un moyen de
personnes en insertion. Du coup, j’ai commencé à faire des trouver une offre d’emploi et d’y répondre.
ateliers pour désacraliser l’outil pour ces personnes-là, afin
qu’elles soient autonomes sur le Web, sur le mail et par Heureusement la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, pour
rapport à l’emploi ». Comme l’indique le nom de la struc- sa part, perpétue son soutien notamment à travers des
ture qui héberge le Hublot, Tania s’efforce inlassablement de appels à projet sans lequel – Tania en est certaine – « l’ERIC
« construire des ponts », d’abord pour offrir à son public un
aurait fermé ».
accès aux outils numériques, ensuite pour créer une média-
tion vers le lieu de création lui-même, avec la conviction que En 2007, elle en vient donc à occuper « le premier poste en
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8. Former, transmettre
un savoir-faire...
Yann est un autodidacte de l’informatique, un pionnier de la occupations et ses demandes, car la structure labellisée Relais
PAO. Dès les années 80, il fonde et anime un club d’infor- de Service Public, travaille en lien avec Pôle Emploi ou la CAF,
matique. Infographiste et formateur, il poursuit sa route de les chambres consulaires, etc.
Soisson dans l’Aisne, en passant par Montreuil en Seine Saint-
Denis, Toulon, et bien d’autres étapes, jusqu’à Puget-Théniers Du coup, Yann s’est essayé aussi à un suivi des publics pour
dans l’arrière-pays niçois. En 2007, il devient chargé de déve- savoir d’où ils viennent, ce qu’ils veulent, etc. et ce avec un outil
loppement numérique au Foyer Rural Cépage. Il y développe qui permet de mieux analyser les actions conduites.
surtout ses compétences techniques et de formation, aussi
bien auprès du public accueilli qu’en direction du personnel de Yann doit ainsi mettre en œuvre des outils permettant l’analyse
l’ERIC (Espace Régional Internet Citoyen). des publics concernés et de leurs demandes. Il peut également
s’agir d’associations qu’il aide, dans le cadre de partenariats
Sa ligne de conduite professionnelle : « C’est une approche conventionnés. Cela va de la création d’un système d’échange
particulière, ne pas se faire dominer par le matériel. Etre local (SEL), jusqu’à la mise en œuvre d’un site de parcours
patient et pédagogue. » Ainsi, pour répondre aux attentes de randonnées, en passant par des chantiers-écoles en ma-
de ses visiteurs, Yann développe des outils supports. Une fois raîchage biologique. Pour répondre à tous ces besoins, Yann
C’est vrai aussi qu’on est sur les outils développés, il s’occupe de leur apprentissage par les s’est mis à parler toutes les langues informatiques, parfois
utilisateurs. En ce moment, dit-il, « je suis en train de dévelop- même les plus rares.
un territoire très vaste, on per des contenus et des supports de formation pour que les
est finalement un centre de gens puissent passer le B2i (Brevet Informatique et Inter- Au final, il souhaiterait être considéré comme un passeur.
ressources. On répond à de net) ». La priorité mise sur cet aspect de sa fonction s’explique C’est plus facile maintenant qu’il est en zone rurale. Ici, chacun
par fait que l’ERIC est aussi d’organisme de formation dont il le voit comme une ressource pour répondre aux nombreuses
nombreuses questions de tire 20% de ses revenus. demandes. « C’est vrai aussi qu’on est sur un territoire très
différents publics vaste, on est finalement un centre de ressources. On répond
Pour le reste, il s’agit de mettre en place des outils de suivi et à de nombreuses questions de différents publics. » Il n’a par
de gestion de projet. Les actions conduites sont multiples et contre aucun lien avec les autres ERIC du département, dont
l’informatique leur point commun. Chacun vient avec ses pré- il ne pense d’ailleurs pas partager les mêmes préoccupations:
YANN,
FOYER RURAL CEPAGE
PUGET-THENIERS (06)
9. « Je ne connais pas vraiment ce que font les autres ERIC,
mais pour ce que j’en ai vu, je ne pense pas que ce soit leur
truc de développer des sites. Surtout sur des besoins aussi
spécifiques. »
Quand on lui demande comment il se projette professionnelle-
ment « [Il] réfléchit à faire autre chose… de la programmation
par exemple ». Finalement, « c’est comme un jeu pour [lui] ».
« C’est une approche
particulière, ne pas
se faire dominer
par le matériel.
Etre patient
et pédagogue ».
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10. Produire, être
«réalisateur multimédia»...
Dans sa vie d’avant Arnaud était responsable de production C’est ce que confirme Sylvie Lafon, sa directrice : « Il venait
dans une entreprise de multimédia aixoise. Devenu travail- du monde de l’entreprise, avec une autre logique et un
leur indépendant, il développe des outils numériques pour de autre vocabulaire. Du coup, quand on rencontre la prési-
grands groupes privés. dente des Voiles de Saint-Tropez, elle est très contente
qu’on la fasse rêver mais après elle veut un discours très
Depuis janvier 2010, il travaille au Portail des Savoirs à concret. »
Pertuis dans le Vaucluse (84). En trente mois il a évolué.
D’abord animateur multimédia, il est devenu chargé de déve- En combinant un diplôme dans le domaine du cinéma et de
loppement numérique. Quinze mois dans une responsabilité ; l’audiovisuel, une expérience dans une société de production
quinze mois dans l’autre. et un goût prononcé pour tout ce qui touche à la culture, on
comprend pourquoi, en écoutant Arnaud parler, on pense au
« Le fait de passer d’animateur à CDN ne fait que confirmer métier de la « production ».
ce mélange de fonctions entre animateur, médiateur et for-
mateur ». Arnaud se qualifie de « passeur/médiateur » en veille Arnaud est un producteur, au sens cinématographique du
constante sur les usages numériques qu’il expérimente dans terme : il aide les autres à réaliser. Ainsi, il faut savoir presque
l’objectif de concevoir une pédagogie adaptée à chaque type de tout faire. Se débrouiller quand l’argent manque. « Parfois on
public (seniors, jeunes, artistes, etc.). se dit qu’on va choisir un projet qui dure moins longtemps pour
« On n’est pas obligé de se être sûr de le mener, ou des projets pour lesquels on récupè-
L’Espace Régional Internet Citoyen est pour lui un « espace de rera l’argent plus vite… ».
plier à un modèle particulier. projets »., principalement culturels, menés en partenariats
On peut inventer ce qu’on avec les acteurs locaux. Tourner les problèmes dans un autre sens, afin d’arriver à les
veut… produire ! ». résoudre. La curiosité est son alliée. Et même si la dimension
La rigueur et l’organisation de son travail, acquises grâce à technique est d’importance, il faut d’abord être capable de
sa formation initiale à l’IEP son parcours d’indépendant et son
, recevoir les publics, de transmettre un savoir, d’adapter son
expérience du milieu industriel se retrouvent dans sa façon de discours pour ne pas faire peur.
gérer les projets au sein du Portail des Savoirs.
ARNAUD,
PORTAIL DES SAVOIRS
PERTUIS (84)
11. Il considère le travail
qu’il exerce « comme
un service public du
numérique. Un lieu où
il a des gens pour
accompagner et
Au fond de lui, Arnaud est un précurseur. Il considère le tra-
vail qu’il exerce « comme un service public du numérique. former mais aussi un
Un lieu où il a des gens pour accompagner et former mais
aussi un lieu de ressources. Des ressources à la fois docu-
lieu de ressources.
mentaires, humaines et techniques. » Des ressources à la
Et pour réussir, dans sa mission, il s’inscrit pleinement sur son
fois documentaires,
territoire et n’hésite pas à y associer des mécènes, comme humaines et
à nouer des partenariats, même si la Mairie de Pertuis ne
participe pas de cet effort. Il s’agit souvent d’entreprises pri- techniques »
vées ; après tout, elles sont une part de lui, de sa vie d’avant.
Depuis mai 2012, Arnaud connaît une évolution
professionnelle qui élargit son périmètre d’intervention.
Pour réussir, il faut de la méthode.
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12. Décloisonner,
monter des partenariats...
Quand Angelo a pris des responsabilités au sein de Mode 83, il de sortir de son champ de compétences. Pour lui réussir des
s’appuyait sur une expérience solide au sein de services sociaux projets, dans des champs différents, nécessite de se confron-
et de missions locales. Ce qui a fait le lien, c’est l’habitude du tra- ter à des compétences, des connaissances ou des personnes
vail avec des publics en difficulté, allocataires du RSA, illettrés, nouvelles.
handicapés... C’est ainsi qu’il a rejoint une équipe disposant de
fortes compétences multimédia et qui souhaitait mobiliser de Sa recette pour travailler dans des domaines en perpétuelle évo-
nouvelles connaissances pour assurer la prise en charge d’un lution est de se former : c’est ainsi qu’Angelo revendique une
public si particulier. stratégie pour faire coïncider ses besoins personnels de déve-
loppement de carrière avec ceux qui permettent de répondre
Car développer à l’aide des outils TIC des actions d’insertion aux besoins de sa structure.
auprès de publics éloignés de l’emploi ou en précarité, n’est pas
chose aisée. Il faut tout à la fois des personnes compétentes Ainsi, pour lui, « rien n’est vraiment tabou en terme d’innova-
dans les contenus et la transmission des contenus et ayant des tion ». Aucun domaine n’est réservé et la transversalité propre
connaissances sur les publics et les difficultés de ces publics. aux TIC est salvatrice dans son travail. Bien utilisées, ces der-
nières possèdent en effet une certaine plasticité qui permet de
Trouver un mouton à cinq pattes ressemble à une gageure. les inclure dans des projets de natures très différentes.
D’autant plus, que quand Angelo est arrivé, le numérique n’était
« Le CDN a besoin d’une
pas son point fort. C’est au contact des équipes de MODE 83 Cela lui permet de toucher à tout, de ne pas se mettre lui-même
double compétence tech- qu’il a pu acquérir les savoir-faire complémentaires indispen- de barrière et de ne pas accepter de se laisser enfermer dans
nique et d’analyse/pros- sables et développer des compétences reconnues. Pour lui, les un champ ou dans un autre et empêcher d’aller vers des expé-
TIC peuvent désormais répondre à des enjeux sociaux multiples, riences qu’il juge intéressantes.
pective. Il doit sentir pour peu que l’on prenne le temps de comprendre ces enjeux et
quels seront les usages de réfléchir aux solutions possibles. Toutefois, une condition sine qua non à l’aboutissement de toute
de demain » réalisation, c’est la construction d’un réseau de partenaires so-
Mais Angelo considère de toute façon qu’en tant que CDN, il doit lide. Seul, la tâche est trop rude, voire impossible à mener à son
faire preuve d’« ouverture d’esprit ». Il ne doit pas avoir peur terme. « C’est difficile d’être coordinateur et développeur de
ANGELO,
MODE 83
DRAGUIGNAN (83)
13. C’est difficile d’être
coordinateur et
développeur de projet.
J’essaie de mener les deux
de front, c’est difficile.
Dans certaines structures,
les développeurs de
projets ne font que ça
projet. J’essaie de mener les deux de front, c’est difficile. Pour l’aider dans sa tâche, il travaille donc avec de nombreux
Dans certaines structures, les développeurs de projets ne interlocuteurs, du Département aux municipalités environ-
font que ça ». Le projet e-santé, celui de lutte contre l’illet- nantes, de l’AGEFIPH au Centre Ressources Illettrisme de
trisme, ou contre l’exclusion du 4ème âge… Paca, en passant par d’autres ERIC de la région. « C’est là
que l’humain reprend ses droits sur les TIC ». En effet, sans
Tous ces projets ne peuvent aboutir s’ils sont gérés de façon ces hommes et ces femmes de bonne volonté, les projets
isolée. développés ne pourraient voir le jour et aboutir.
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14. Être ressource, se renouveller...
« Nul n’est indispensable », est-on souvent tenté de dire. Mais animateur multimédia à la Maison de Service Public d’Orange,
quiconque connaît Florian a eu tôt fait de réviser ce dicton. Il faut il doit surtout son évolution aux qualités de « patience » et de
dire que depuis huit ans qu’il officie, sous différentes casquettes, « persévérance » qu’il juge essentielles à l’exercice d’un métier
tantôt à la Communauté de communes du Pays Vaison Ventoux qu’il ne cesse d’inventer au quotidien. « Quand j’étais animateur,
(COPAVO), tantôt sur le Pays « Une autre Provence », Florian je me souviens de la patience qu’il fallait pour travailler avec le
ne chôme pas. grand public. On était à leurs côtés pour leur recherche d’em-
ploi et pour certaines personnes c’était difficile. C’était aussi
A son actif, l’ouverture de près de 10 espaces publics numé- d’assumer leurs échecs quand ils n’avaient pas de réponses
riques, répartis entre différentes localités du territoire. « On a positives à leurs recherches. Ça pouvait durer des mois et
fait le choix de l’alternance pour jouer la carte de l’équité. On des mois, et on était à leurs côtés sur ces périodes-là ».
a 17 communes dans l’intercommunalité. On fait en sorte
que chaque collectivité ait au moins un espace ouvert dans De cette expérience dans l’animation, Florian tire une plus
l’année. Donc on va ouvrir 6 ou 9 mois dans une commune et grande aptitude à l’écoute dans sa gestion d’équipe, ainsi qu’une
ensuite fermer pour ouvrir dans la commune voisine qui est meilleure compréhension des difficultés que cette dernière ren-
à 3 kilomètres. Ça permet de faire tourner les publics et aux contre sur le terrain. Il en garde aussi une compétence parti-
débutants d’avoir une chance d’accéder au service ». culière, qu’il s’emploie constamment à mettre en œuvre dans
la gestion des projets, et qui consiste à savoir identifier le bon
« On voit bien que les col- Mais l’activité de Florian ne s’arrête pas là. Depuis qu’il occupe - partenaire parmi les structures institutionnelles.
lectivités ont besoin d’in- également en alternance - les fonctions de chargé de développe-
ment numérique (CDN) et de chargé de Mission TIC, il gère une Lorsqu’il devient CDN en 2006 au sein de l’intercommunalité,
terlocuteurs de proximité équipe de deux animateurs multimédia nécessaire à la bonne Florian lance un programme d’ateliers thématiques. Le premier,
sur leurs projets TIC. Du marche de son ERIC « en étoile » (ou multisite) et trouve encore à destination des élus, vise à les initier à l’usage d’un Intranet
du temps pour initier des projets de développement numérique qu’il met lui-même en place pour favoriser la circulation des
coup, elles font appel à
pour les territoires enclavés que sont le haut Vaucluse et la différents comptes-rendus de réunion sur support numérique.
nous pour nos capacités Drôme provençale. Les administrés, quant à eux, ne seront pas en reste. Ce sont
à travailler sur ce genre d’abord les publics séniors qui sont ciblés, au travers « d’actions
Que de chemin parcouru depuis que Florian a obtenu une de formation dans les maisons de retraite », en partenariat
de projets » Licence en informatique de l’Université de Marseille. Si cette avec le CLIC (centre local d’information et de coordination sur les
formation initiale lui a permis d’être recruté en 2003 comme problématiques gérontologiques). Puis, suivra un peu plus tard
FLORIAN,
COPAVO
VAISON-LA-ROMAINE (84)
15. « c’est un métier en mouvement, il n’y a jamais d’acquis
perpétuel, on se renouvelle tout le temps »
pour, précise-t-il à nouveau, « les rendre acteurs, être dès envisage dorénavant de préparer le concours de « technicien
demain créateurs sur Internet ». Aujourd’hui, ces différents de la fonction publique territoriale », qu’il conçoit comme la
ateliers comptent de manière régulière 90 inscrits, avec suite logique de son parcours professionnel. Comme il le dit,
une liste d’attente de près de 50 personnes en moyenne. « c’est un métier en mouvement, il n’y a jamais d’acquis
Alors Florian prévoit déjà de nouvelles formules pour mieux perpétuel, on se renouvelle tout le temps ».
répondre à la demande.
Car le meilleur atout de Florian est certainement de savoir
répondre aux multiples sollicitations avec pragmatisme et
organisation, parfois même en devançant les besoins de son
territoire. C’est ainsi que, depuis peu, il a engagé son ERIC
dans l’accompagnement de nouveaux types de projet, en lien
avec des thématiques sectorielles telles que le tourisme et la
culture. « On a porté un projet comme ESCAPADO qui était
le projet « TousoTIC » qui s’adresse cette fois-ci aux deman-
un des premiers projets d’itinéraire de randonnée interactif
deurs d’emplois en création d’activité. « Il faut savoir que le
sur Smartphone, notamment sur iPhone et sur Androïd.
premier espace Pôle Emploi est à 40 Km. C’est une spé-
On essaie de voir aussi quels sont les nouveaux produits
cificité de notre territoire. On a voulu, en partenariat avec
et services qui peuvent entrer en cohérence avec cette ap-
eux, ouvrir des permanences dans nos lieux à raison de 2
proche. Par exemple j’étais avec la conservatrice du musée
demi-journées par semaine. On s’est aperçu que c’était le
de Vaison car nous avons un projet ensemble. Moi j’apporte
meilleur moment pour travailler avec les créateurs d’entre-
ma compétence TIC et elle sa compétence patrimoine qui
prise. Une fois qu’ils ont fait leurs démarches administra-
permettra de faire sortir un projet en 2012 ».
tives, c’est trop tard. Donc, nous, on intervient en amont
pour leur apporter des compétences informatiques, avant
Cette nouvelle orientation ne va pas toutefois sans poser
qu’ils entrent dans leurs chantiers d’entreprise ».
quelques difficultés, notamment dans la rédaction des cahiers
des charges et en matière de respect du code des marchés
Plus récemment, c’est le projet « CréaTIC » qui a vu le jour
publics. C’est précisément pour mieux y répondre que Florian
à destination maintenant des plus jeunes et des adolescents
Voir d’autres portraits de Chargés de Développement Numérique en région Provence-Alpes-Côte d’Azur sur :http://emergences-numeriques.regionpaca.fr 7
16. Innover, bousculer
sa façon de travailler...
Lorsque l’on demande à Fabien de définir ses fonctions, il se frustré de ne pas pouvoir aller plus loin dans la création ». Il
qualifie lui-même volontiers d’« artisan multimédia ». Il faut dire entreprendra alors plus tard des études universitaires à Nice
que Fabien n’a jamais eu de véritable plan de carrière. Il se laisse qui déboucheront sur l’obtention d’une Licence Arts – Communi-
le plus souvent guider au gré des opportunités et de ses envies, cation - Langage et qui lui permettra, comme il le dit, « d’ouvrir
ce qui ne signifie pas pour autant qu’il ne prend pas de décision. les yeux sur l’art ». Il passe ensuite une année à Paris pour
Lorsqu’ Emmanuel Vergès – le directeur du ZINC à la Friche de parfaire sa formation aux Gobelins, l’école de l’image. Son di-
la Belle de Mai à Marseille – lui propose en 2010 d’occuper le plôme de réalisateur multimédia en poche, il est recruté dans la
poste de chargé de développement numérique au sein de la foulée par l’entreprise Pernod-Ricard en tant que Webdesigner.
structure, il l’accepte comme la suite logique de ses activités. « « Création de sites, Intranet, petits films : une application
C’était l’occasion. J’étais à ZINC depuis 2007 dans un cadre brute de décoffrage de ce que j’avais appris. Un travail assez
qui était orienté animation, tout en développant déjà des pro- répétitif, peu passionnant. En fait, ça ne m’intéressait pas
jets en relation avec des partenaires. Et ce poste de CDN est que mon travail soit validé par une personne, puis une autre,
arrivé un peu comme ça, je n’en avais pas vraiment entendu jusqu’à qu’on me demande de refaire. Et puis j’étais en re-
« Essayer d’innover tout parler avant ». Et d’ajouter, après un léger silence, « j’étais cherche d’autre chose, je manquais de contact, de relations
le temps. Ne pas se peut-être CDN avant de l’être officiellement ». Fabien ne croit humaines ».
pas si bien dire, car, chargé de développement numérique, il
contenter de reproduire l’est en effet presque viscéralement. S’il n’en avait pas jusque-là
Dès lors, décision est prise de revenir dans sa région d’origine
des projets. C’est pour formellement le statut, il en a en réalité toujours eu l’esprit, en
et d’y créer, « un peu à l’aveuglette », une association de créa-
ça que j’adore travailler ce sens qu’il est un adepte de l’innovation sociale, et pas seule-
tion multimédia pour, précise-t-il, « développer les pratiques
avec des artistes. On dit ment depuis qu’il est à ZINC. Tout, en effet, dans son parcours
chez les plus jeunes ». Dans un contexte général où l’émer-
et ses expériences de vie, témoigne d’une volonté permanente
que les artistes sont les d’apporter des solutions nouvelles et créatives à des besoins
gence d’une société française dite « de l’information » est affi-
chée comme une priorité dans les discours politiques, Fabien
radars du monde, ça me qu’il ressent ou des problématiques qu’il rencontre.
n’est certes pas le seul à avoir senti le vent favorable qui souffle
permet d’être bousculé et dorénavant sur toutes structures associatives désireuses de «
à mon tour de bousculer Déjà, lorsque dans sa jeunesse il fréquente le club informatique lutter contre la fracture numérique ». Mais lorsqu’il se lance
ma façon de travailler ». de la bibliothèque d’Aubagne, Fabien reste sur sa faim. « J’étais en 2003, c’est sans véritablement connaître le secteur de l’ac-
FABIEN,
ZINC
MARSEILLE (13)
17. « En cinq ans, j’ai beaucoup changé ma façon de travailler.
Avant, j’étais seul et responsable de tout. J’ai appris
à déléguer, à m’appuyer sur les compétences des autres,
à anticiper également »
subventions, animation d’ateliers). Il découvre également peu appris à déléguer, à m’appuyer sur les compétences des
à peu le réseau régional des espaces publics numériques, autres, à anticiper également ». C’est donc sans difficulté
dont ZINC à Marseille qui en constitue une sorte de tête de que Fabien s’est glissé dans ses nouveaux habits de CDN,
pont et qui finira par faire appel à lui en 2007. même s’il ne rechigne pas à l’occasion à revêtir ceux de l’ani-
mateur, comme cela est souvent le cas lorsqu’il conduit des
projets de coopération artistique en milieu scolaire à Alexan-
Initialement recruté en tant qu’animateur, Fabien devient ra-
drie, au Caire ou à Beyrouth.
pidement force de propositions et ne cesse depuis de faire
évoluer ses missions. C’est d’ailleurs de cette manière qu’il
conçoit sa fonction. Si, à ses débuts, il effectue quelques ini- Aujourd’hui, Fabien ressent le besoin de « de passer à autre
tiations à Internet et à l’informatique, il bascule rapidement chose ». Depuis peu, il a entamé une formation de formateur
dans l’animation d’ateliers collectifs et l’accompagnement de à Montpellier (avec le soutien de l’AFDAS) pour, dit-il, « faire
projets individuels. « C’est par exemple l’amateur de vidéo le point sur ce dont j’ai envie ». Il n’envisage donc pas cette
qui veut aller plus loin, le photographe qui voudrait déve- démarche comme une validation d’acquis d’expériences, mais
cès public à Internet, alors en pleine structuration, et avec lopper une galerie en ligne. Ce sont généralement des per- bien plutôt comme « une façon de faire des choix ». Comme
pour seule aspiration celle de suivre ses envies. « J’ai proposé sonnes qui ont déjà une pratique numérique de base et qui il le dit, « Je ne serai peut-être pas CDN pendant 10 ans.
des choses qui me ressemblaient : de la création de films viennent chercher de nouvelles connaissances ». Il faut dire Je ne serai sans doute plus dans ce milieu dans 10 ans.
pour les enfants de 8-10 ans, des concours de tablettes aussi que depuis 2006 la structure ZINC a elle-même enta- Pourquoi ne pas créer une petite entreprise de création
graphiques, des approches ludiques qui permettaient de mé une évolution, délaissant progressivement les activités qui internet par exemple ? ».
faire d’autres usages que le simple jeu vidéo ou la rédaction touchent au « libre accès » (consultation du Web, bureau-
de courrier. L’idée, c’était de montrer qu’un ordinateur, ce tique, recherche d’emplois, etc.) pour mieux se concentrer
n’est pas juste une machine à écrire évoluée, ni une télé, sur le développement de workshops multimédia qui associent
et qu’on peut faire des choses plus créatives ». Ce n’est artistes et publics dans une « logique de projet ». À cette
jamais évident de se lancer seul, de convaincre les financeurs, fin, Fabien a appris à organiser son temps de travail et celui
d’attirer du public, mais Fabien y est parvenu, et avec succès. de ses collègues, à créer les dynamiques collaboratives qui
Pendant quatre années, à Aubagne, il se forme à l’animation permettent d’avancer collectivement tout en s’adaptant indi-
multimédia et apprend à connaître, comme il le dit, « toutes viduellement. « En cinq ans, j’ai beaucoup changé ma façon
les facettes du métier » (montage de projet, recherche de de travailler. Avant, j’étais seul et responsable de tout. J’ai
Voir d’autres portraits de Chargés de Développement Numérique en région Provence-Alpes-Côte d’Azur sur :http://emergences-numeriques.regionpaca.fr 8
18. Direction de l’Économie régionale, de l’innovation et de l’enseignement supérieur
Service Innovation et Economie Numériques . Hôtel de Région . 27, place Jules Guesde . 13481 Marseille cedex 20 . Tél. : 04 91 57 53 88
regionpaca.fr
Préfecture de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur
Secrétariat Général pour les Affaires Régionales . Boulevard Paul Peytral . 13282 Marseille Cedex 20 . Tél. : 04 84 35 40 00
www.paca.pref.gouv.fr
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