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Fiche de réflexion
I. Rapport
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a. Le contexte1
16/02/2013, 20h. On était dans un restaurant à Pigalle, à Paris. J’étais à Paris pour rendre
visite à ma correspondante française qui y travaille. Il s’agit d’une conversation sur
l’euroscepticisme britannique.
b. Les intervenants2
1) Moi-même, Anglais, 22 ans.
2) Sophia, moitié Française moitié Marocaine, 22 ans. Elle est ma correspondante de
neuf ans et elle est devenue une amie proche.
3) Bastien, Français, 26 ans. Le petit copain de Sophia.
c. Que s’est-il passé ?
Pour la première fois dans ma vie j'ai rencontré un Français avec une vraie hostilité vers les
Anglais. Bastien m'a pris pour un porte-parole du gouvernement britannique et il m'a
interrogé de façon agacée et agressive. Il voulait savoir pourquoi on est si eurosceptique en
Angleterre et il a parlé de la « Auld Alliance » avec l'Ecosse. Je n’ai jamais entendu parler
de cette alliance, et il a dû expliquer qu’au Moyen-Age, la France et l’Ecosse étaient alliés
contre l’Angleterre. En fait Bastien a dit qu’il veut couper les liens avec l'Angleterre et
retourner à une alliance franco écossaise –une plaisanterie peut-être, mais il pense vraiment
que l’Angleterre devrait quitter l’Union européenne.
d. Réaction3
Moi j’étais surpris. D’après mon expérience en France, l’animosité franco-britannique n’est
qu’un cliché – c’est-à-dire que je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui avait un problème
avec les Anglais. Mais à cause de l’euroscepticisme des Britanniques et les divergences de
vue sur les questions européennes, Bastien, qui s’intéresse à la politique, était énervé. J’aime
bien les débats politiques donc j’étais content qu’il ait exprimé son opinion. Pourtant son
attitude était désagréable : il n’a pas demandé si je soutiens la proposition d’un référendum
pour quitter l’UE. Tout simplement il s’est en pris à moi. Je peux comprendre que
l’euroscepticisme des Britanniques est énervant pour l’Europe (on fait souvent usage de
notre droit de veto) mais cela n’excuse pas son attitude impolie.
1
Par exemple : date, heure, lieu
2
Pour chaque intervenant, notez autant de détails que possible comme le sexe, l’âge (plus âgé que vous, du même âge,
plus jeune), la nationalité, les liens avec cette personne.
3
Décrivez vos émotions et leur intensité (par exemple : extrêmement vexé, très heureux, légèrement agacé)
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Je voulais lui dire deux choses : que c’est impoli d’interroger quelqu’un comme ça dans un
contexte social (dans un bar, un restaurant etc.), et aussi que ce n’est pas particulièrement
accueillant d’être si agressif avec un parfait inconnu. Mais je restais calme et je n’ai rien dit.
II. Réflexion
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a. Votre explication4
Je n’ai rien dit parce que je ne voulais pas aggraver la situation. Je ne voulais pas
augmenter son hostilité vers les Anglais.
J’étais surpris par son grand intérêt à la politique britannique vers l’Europe. Très peu de
jeunes anglais de mon âge sauraient les politiques gouvernementales et donc le fait que cet
homme français en savait beaucoup était surprenant. En Angleterre on dit qu’il faut éviter de
parler de la politique parce qu’elle crée des divisions et une atmosphère inconfortable. Son
enthousiasme d’en parler avec moi, un étranger, était encore surprenant pour moi. Je dirais
plutôt que la jeunesse anglaise s’intéresse moins à la politique qu’en France (je parle de la
politique très rarement avec mes amis) donc son choix de sujet de conversation était bizarre
pour moi.
J’étais surpris aussi parce que je ne crois pas que l’Angleterre soit le pays le plus
problématique en Europe en ce moment. Pour une raison quelconque, Bastien pense que les
Anglais n’ont pas le droit d’être membre de l’UE : moi je pense qu’il existe quelques pays
avec certains problèmes plus urgents que l’euroscepticisme britannique ; les économies de la
Grèce, l’Espagne et l’Italie, par exemple.
En résumé, j’étais surpris par sa connaissance de la politique britannique, et aussi par son
enthousiasme, son attitude agressive et son animosité ostensible vers les Anglais.
b. Votre réflexion5
Dans la culture anglaise il y une tendance très courante, très répandue, d’être poli à
l’extrême. C’est une caractéristique nationale ancrée dans la psyché britannique. On est
presque trop poli : si quelqu’un marche sur mon pied, c’est moi qui dit « désolé » parce que
c’est ma faute d’avoir placé mon pied dans son chemin. On s’excuse tout le temps. C’est pour
cette raison que je n’ai rien dit à Bastien : pour moi la politesse est appréciée dès le plus
jeune âge. Je ne voulais pas avoir l’air grossière ou malpolie.
Cette idée de politesse influence aussi mes autres réactions : j’étais surpris qu’il m’a parlé
de la politique dans un restaurant. Normalement on essaie d’éviter ce sujet de conversation
au cours de dîner au cas où on offense quelqu’un.
4
Expliquez pourquoi vous avez réagi ainsi.
5
Quelles sortes de comportements (comportements acceptés dans votre culture) et/ou hypothèses, valeurs ou croyances
ont pu influencer vos réactions?
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De plus, la politique pour ma génération (parmi mes amis au moins) n’est pas un sujet de
conversation typique. En fait la politique n’est pas ‘cool’. Je crois que ça explique ma
surprise de son enthousiasme.
c. Autre réflexion6
Je crois que pour le dire simplement les Français sont plus ouverts en général. Ils expriment
leurs sentiments librement ; ils ne sont pas accablés comme nous par la politesse extrême. Je
trouve qu’ils n’ont pas peur de dire ce qu’ils veulent, même si c’est controversé. C’est un
peuple plus émotif que les Anglais. Les Anglais sont plus stoïques : on parle du « stiff upper
lip » (le flegme légendaire des Anglais) et « pas de sexe, s’il vous plaît, nous sommes
britanniques ». Bastien a pensé que son comportement était acceptable. Ça c’est la différence
entre les cultures des deux pays – les compétences et valeurs interpersonnelles sont
différents.
Ça m’intéresse pourquoi il pense que l’Angleterre est le pays le plus problématique en
Europe. Peut-être que Bastien pense a la longue histoire entre la France et l’Angleterre et il
en a marre avec nos attitudes. Les relations entre les deux pays étaient difficiles pendant des
siècles, et de nos jours l’Angleterre est devenu de plus en plus eurosceptique donc je
comprends s’il en a marre.
De plus je crois que la population française est beaucoup plus active au niveau politique.
Cela pourrait expliquer pourquoi il était si enthousiaste du point de vue de l’euroscepticisme
britannique.
III. Ré-évaluation après discussion avec votre partenaire
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a. Réflexion de mon partenaire sur mon expérience7
J’en ai parlé avec une amie, Holly, qui a vécu en France quand elle était petite. Voilà la
question qu’on a posé : la France, n’a-t-elle pas elle aussi changé ? Elle a confirmé ce que je
savais déjà : en France aujourd’hui l’euroscepticisme est présent à l’extrême droite et à
l’extrême gauche du spectre politique. Bastien a indiqué que l’Angleterre est tout seul dans
son euroscepticisme, mais ce n’est pas du tout vrai. Le Front national est le troisième parti
politique en France (dans les dernières élections présidentielles, au moins), tandis que le
Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni et le Parti national britannique sont toujours des
partis d’importance mineure.
Holly pense que les Français se sentent trop impliqués dans l’Union européenne. Quitter
l’union, ce n’est pas envisageable. Elle dit que la plupart des Français haussent les épaules :
il n’y rien que personne ne puisse faire pour améliorer la situation, donc il faut juste tirer le
meilleur possible. Les pays ultra eurosceptiques comme la Grande-Bretagne causent un
6
Quelles conventions du comportement et/ou hypothèses, valeurs ou croyances ont pu influencer le comportement de
l’autre personne ?
7
Discutez votre expérience avec votre partenaire, Demandez‐lui de donner son opinion et d’avancer des explications
possibles sur les différences culturelles de comportement, de valeurs et de croyances du/des intervenant(s). Notez
ensuite les réflexions de votre partenaire sur votre expérience.
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problème pour le succès de la France dans l’UE, et Holly pense que cela pourrait expliquer
l’attitude anti anglaise de Bastien.
En ce qui concerne le comportement et le tempérament de Bastien, Holly dit que ce n’est pas
surprenant. A son avis les Français sont beaucoup plus honnêtes et directs : ils ne tournent
autour du pot. La superficialité de la politesse extrême à l’anglaise n’est pas toujours
appréciée parmi les Français, selon elle.
b. Ré-interpretation et ré-évaluation personnelles8
Bastien a raison quand même : on est le pays le plus eurosceptique dans l’UE, plus
eurosceptique aujourd’hui que jamais. Le fait que le candidat pour le Parti pour
l’indépendance du Royaume Uni arrivé deuxième dans l’élection à Eastleigh pour le siège au
Parlement, avant le Parti travailliste et les Conservateurs, jette de la lumière sur l’état de
l’euroscepticisme en Angleterre. A mon avis, il y a une tendance dans ce pays de penser
qu’on ne fait pas partie de l’Europe. On n’utilise pas les mots ‘Europe’ ou bien ‘européen’
pour décrire l’Angleterre. Quand j’ai vécu en Allemagne j’ai parlé souvent avec mes amis
des liens entre l’Angleterre et l’Europe comme s’ils étaient des entités distinctes, et ça les
énervait très fort. Ils m’ont dit que l’Angleterre est en Europe, qu’on le veuille ou non. Cette
tendance de séparer l’Angleterre et l’Europe dans la psyché nationale nous a conduit à
penser qu’on est un peuple différent, et c’est pour ça qu’on est eurosceptique. Beaucoup de
monde en Angleterre pense qu’on ne fait pas partie du continent européen et donc on ne veut
pas être membre de l’UE.
D’autre part, la sphère d’influence de la France en Europe est énorme, commençant avec le
Premier Empire (voir ci-dessous). Donc je crois que c’est plus facile pour les Français de se
sentir « européens ». La France se trouve au cœur de l’Europe : c’est pourquoi ils sont moins
eurosceptiques, je pense.
En prenant en considération le comportement de Bastien et son attitude ardente, et aussi le
comportement d’Anthony (très passionné) dans la première fiche de réflexion, je dirais que
les Français sont plus directs, plus émotifs, plus imprudents peut-être parce qu’ils n’ont
aucune peur d’exprimer leurs opinions. J’ai appris que ce n’est pas « impoli » c’est juste une
manière différente de communication.
8
Expliquez à présent, comment vous interprétez et évaluez cette expérience. Il est possible que votre interprétation
évolue et change au fil du temps. Une fois que vos connaissances interculturelles se seront approfondies, vous éprouverez
peut‐être le besoin de revisiter vos expériences vécues en début d’année et d’affiner vos réflexions.