Recréer un sentiment de citoyenneté européenne doit être un sujet de préoccupation
prioritaire aujourd’hui pour nos élites. Les défis de l’Union européenne se définissent certes
vis à vis de la globalisation et nos gouvernants se préoccupent en priorité d’économie, mais
une autre urgence est l’absence d’affectio societatis des peuples européens à l’égard du
projet EUROPE.
La construction européenne par les élites est vouée à l’échec. Aujourd’hui le citoyen européen s’interroge sur le sens à donner à cette construction.
Infographie Assemblées Générales entre 2012 et 2016
Citoyennete européenne revue parlementaire
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Faut-il être fier d’être européen ?
Recréer un sentiment de citoyenneté européenne doit être un sujet de préoccupation
prioritaire aujourd’hui pour nos élites. Les défis de l’Union européenne se définissent certes
vis à vis de la globalisation et nos gouvernants se préoccupent en priorité d’économie, mais
une autre urgence est l’absence d’affectio societatis des peuples européens à l’égard du
projet EUROPE.
La construction européenne par les élites est vouée à l’échec. Aujourd’hui le citoyen
européen s’interroge sur le sens à donner à cette construction. Dans la perspective des
prochaines élections européennes de 2014, tant la montée des partis eurosceptiques que
les perspectives d’un abstentionnisme important qui remettrait en cause la légitimité
démocratique des députés européens sont à prendre au sérieux.
Viviane de BEAUFORT1
Professeur, département droit et environnement
de l’entreprise, ESSEC
Membre de l’Atelier de la République
Comment définir la citoyenneté
européenne ?
La citoyenneté européenne a jusqu’ici été
une construction de droit ; elle est de nature
essentiellement juridique… Trois dimensions
peuvent être identifiées :
g La citoyenneté politique (dimension
« civique ») existe : les ressortissants de
l’Union européenne ont le droit d’élire et
d’être élu aux municipales, le droit d’élire
des députés européen au SUD, un droit de
pétition au Parlement, le droit de plainte au
médiateur, le droit de contester l’action
d’un État (contentieux préjudiciel et
plainte pour manquement) et désormais le
droit d’INIATIVE citoyenne,…
g La citoyenneté civile (affirmation du prin-
cipe d’égalité devant la loi) est un acquis :
droit de circuler et de s’établir librement
sur l’ensemble du territoire européen avec
des modalités assouplies pour la zone
Schengen. La possibilité d’y évoluer en
relative sécurité, de s’y voir reconnaître
les mêmes droits que les résidents du pays
d’accueil, droit de représentation consu-
laire et protection diplomatique et consu-
laire dans les pays tiers.
(1) Ce texte est notamment fondé sur les interventions
– lors d’un débat organisé par l’Atelier de la
République le 14 mai dernier – de Pascale Joannin,
directeur général de la Fondation Robert Schuman ;
Dominique Riquet, député européen (PR-UDI) ;
Gilles Le Bail, consultant, auteur du livre
« L’Europe : défaite ou défis » ; Joachim Bitterlich,
ancien ambassadeur allemand et conseiller
d’Helmut Kohl, professeur affilié à l’ESCP Europe,
membre du conseil scientifique de la Fondation
Robert Schuman ; Catherine Lalumière, présidente
de la Maison de l’Europe, ancienne députée euro-
péenne ; Thierry Cornillet, ancien député européen
et ancien président du Parti radical, avocat ; Anne
Houtman, représente officielle de la Commission
européenne en France.
2. g La citoyenneté sociale également : protec-
tion des droits de la personne et consécra-
tion de droits collectifs (cf. Charte et juris-
prudence de la Cour de justice de l’UE).
Autrement dit l’UE a créé des Droits supplé-
mentaires importants pour le citoyen euro-
péen mais a échoué dans la création d’une
opinion publique.
Si l’on définit un État comme démocratique à
partir de son système de droit, de sa transpa-
rence, de sa gouvernance et de son degré de
respect des droits de l’homme. L’Union euro-
péenne est une démocratie avancée.
La question est davantage celle de la perception,
du ressenti démocratique lié à la complexité du
système. La construction européenne a oublié de
parler aux citoyens avec son cœur.
Comment se situent les citoyens
français à l’égard de la Construction
européenne ?
Une lecture attentive des résultats des
Eurobaromètres, dont celui de février 2013,
laisse globalement apparaître que les Français
demeurent encore, même si c’est de moins en
moins, majoritairement pro-européens. Des
interrogations sur le sens du projet et un désir
d’être davantage associé à celui-ci émergent,
autrement dit il y a une demande de politisation
du débat. Le citoyen plébiscite une action à
échelle européenne, conscient que face aux
enjeux mondiaux, l’échelon Europe est le bon
échelon d’action…
Quelles mesures pour faire face à la crise ?
Le rôle de l’Europe est plébiscité !
g Réglementation stricte des marchés finan-
ciers : 91 %
g Programme européen pour relancer la
croissance : 88 %
g Principe de réciprocité dans les échanges
internationaux : 82 %
g Décisions prises à la majorité : 80 %
g Contrôle de l’UE sur les budgets des
États : 79 %
g Contrôle des agences de notation : 73 %
g Taxe sur les transactions financières : 72 %
g Harmonisation de la fiscalité : 71 %
g Interdiction d’importer des produits prove-
nant de certains pays : 48 %
Un rôle plus important pour l’Europe dans
les domaines suivants :
g La recherche : 87 %
g La lutte contre le chômage : 86 %
g La protection de l'environnement : 86 %
g La lutte contre la crise économique : 84 %
g La protection des consommateurs : 78 %
g La protection sociale : 75 %
g La sécurité énergétique : 73 %
g Le système éducatif et universitaire : 72 %
g L'aide aux pays les plus pauvres : 66 %
g La lutte contre l'immigration clandestine :
62 %
g L'agriculture et la pêche : 55 %
g La politique étrangère et la défense : 53 %
g L'intégration des immigrés non commu-
nautaires : 49 %
Un désir d’information
g Vous sentez-vous bien informés sur la vie
publique de l’UE ? À 66 % non
g Selon vous les politiques et les médias
devraient-ils parler davantage de l’UE ? À
76 % oui
g La construction européenne nous rend plus
forts face au reste du monde ? À 66 % oui
(78 % en 2009)
g Face à la crise, les réponses devraient être
apportées au niveau européen ? À 52 %
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3. oui – 38 % non – 10 % les deux (47 % en
2009)
g Jusqu’ici les États ont fait prévaloir leurs
intérêts immédiats plutôt qu’agir collecti-
vement ? À 74 % oui
Près de quatre Français sur cinq (78 %)
considèrent que la construction européenne
se fait sans que les peuples soient suffisam-
ment consultés.
De fait, bien des politiques osent plaider
pour une Europe plus intégrée, alors que
d’évidence, le besoin de « + d’Europe » est
urgent. L’Union européenne continue à être
utilisée comme un bouc émissaire.
Vers un affectio societatis européen ?
Le ferment de l’Europe est son peuple et il
faut désormais donner du sens à la construc-
tion européenne, créer un « affectio societa-
tis » (lien entre les fondateurs d’une société
et ladite société). Or, l’Union européenne a
parfaitement réussi l’organisation de débats
associant la société civile sur les questions
relatives au Marché intérieur avec la
pratique systématisée des consultations
ouvertes sur le web, des livres verts, des
auditions publiques, l’écoute des thinks
tanks.
Il est temps que l’équivalent soit fait dans la
sphère politique autrement dit que les partis
politique débattent notamment à l’occasion des
élections européennes. Il faut aujourd’hui dres-
ser ce constat de l’écart grandissant entre les
citoyens et le projet d’Europe. Constat qui
nous confronte à des obligations essentielles :
g Obligation de pédagogie
g Obligation d’accepter le débat
g Obligation d’accélérer le travail de
conviction
Selon Pascale Joannin « en Allemagne, la
campagne est prête et les listes sont déjà
plus ou moins établies. En France, comme
chaque fois on va attendre le dernier
moment et d’autant plus cette fois du fait des
municipales ». Être européens et fiers de
l’être ne signifie pas être euro-béats. Chacun
s’inquiète de la montée des populismes et de
l’euroscepticisme. On souligne une certaine
complaisance des États à l’égard du phéno-
mène de la montée des extrémistes : alors
qu’en 2000, l’arrivée au pouvoir, en
Autriche, du FPÖ et de son leader Jorg
Heider a créé un tollé politique en Europe,
nos gouvernements, et peut-être la société,
se sont moins émus de l’arrivée de partis
d’extrême droite au pouvoir dans plusieurs
pays, en 2013. Or, nos valeurs communes
européennes sont remises en cause. Et c’est
de la responsabilité des institutions euro-
péennes, donc des États que de les préserver.
Il faut se recentrer sur les valeurs de
l’Europe : la construction européenne est le
seul rempart contre le repli sur soi, tendance
naturelle en période de crise. L’éducation et
la communication sont des clés !
Cet écart entre les citoyens et le projet
d’Europe est à interpeller. Dominique Riquet
explique, pour sa part, que l’Europe a
jusqu’ici participé du domaine du projet rêvé.
Devenant une réalité politique, l’Union euro-
péenne devient naturellement sujette à décep-
tion et frustration.
Les critiques envers l’Europe viennent d’un
mécanisme naturel en politique : le rôle de
l’Europe s’est beaucoup accru et l’Europe est
passée du statut de « généreux donateur » au
statut d’acteur politique ; on passe donc du
rêve à la réalité. Les citoyens sont devenus
sceptiques vis-à-vis de leur gouvernement,
mais l’Europe de Schuman et des valeurs est
toujours revendiquée et voulue par les
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4. citoyens. L’euroscepticisme est un sentiment
d’amoureux déçu du fait de la transformation
du rêve à la réalité de l’Europe qui s’est
emparée d’un projet politique (ce qui est un
processus normal en politique).
Il se confirme que l’Allemagne connaît les
mêmes difficultés quant au sentiment de
citoyenneté européenne parce qu’on a
« oublié » de communiquer sur les acquis
importants de la construction de l’UE et d’ex-
pliquer que l’Europe sera toujours le fruit
d’un compromis, compromis entre les
peuples et les nations européennes, imparfait
par nature. L’Europe est en crise et plusieurs
fossés se creusent :
g entre l’Europe et le peuple ;
g entre le politique et l’économique ;
g entre l’économique et le citoyen.
Le réflexe est de se replier vers la Nation.
L’Europe devient alors un bouc émissaire
facile, et si nécessaire on met en cause les
pays dominants, notamment, l’Allemagne.
On a vu l’histoire se répéter : déjà au début
des années 1980 parlait-on d’euro-sclérose
face à l’attitude de la Grèce. Actuellement, on
arrive à un point où on touche à la souverai-
neté directe des États (monnaie, fiscalité,
budgets…). Or, le lien entre le citoyen et
l’Europe n’a pas été construit. L’élection du
Parlement européen au suffrage universel
depuis 1979 ne suffit pas à établir ce lien, d’au-
tant qu’on a sous-estimé l’association des
Parlements nationaux et leur pouvoir de
communiquer et de créer le lien avec les
citoyens. Les États doivent cesser chacun de
chercher à transposer leurs modèles de pensée
nationaux à l’Europe entière. Il faut accepter
les différences de modèle. À l’égard du
citoyen, l’Europe doit redevenir concrète et
compréhensible. Cela pourrait se traduire par
des listes européennes par parti. Il faut égale-
ment accorder le droit de vote des citoyens
européens dans leur pays de résidence. Hormis
les aspects politiques, les urgences concrètes,
c’est l’organisation d’un marché du travail, la
formation des jeunes, à l’échelon européen !
Les députés européens témoignent que l’UE
est très démocratique. Le rôle du Parlement
européen est central dans cette construction
institutionnelle. L’UE est complexe et cette
complexité est liée à son caractère unique
dans l’histoire humaine. Alors que tous les
grands ensembles politiques ont été centri-
fuges, l’Europe a tâché d’agréger un ensem-
ble éclaté d’États sans fondement culturel et
linguistique commun. À cette démarche
contre-intuitive s’ajoute l’antagonisme entre
un Parlement massivement pro-européen et un
Conseil pro-gouvernemental. Il faut se souve-
nir que lorsque le Conseil cède sur plus d’inté-
gration, il cède sur sa propre souveraineté.
L’autre originalité de l’UE, c’est son histoire.
La CECA avait une ambition modeste : le
commerce plutôt que les obus. Or, faire du
commerce ensemble a engendré la libéralisa-
tion des échanges puis la libre circulation
puis le besoin d’une monnaie commune, qui
elle-même implique une intégration bancaire
et financière, voire économique et fiscale.
La démarche d’un engagement minimum qui
a créé des obligations successives de s’enga-
ger plus avant est difficile à comprendre. Les
peuples regardent des gens jouer aux cartes et
ils ne connaissent ni la règle du jeu, ni
combien il y a de cartes, ni à quoi correspon-
dent les cartes.
C’est pourquoi Bruxelles est perçu comme le
Père Fouettard qui impose ses décisions aux
Parlements nationaux. Par ailleurs osons le
dire, si l’Europe n’était pas là comme moteur
d’évolution, on aurait rien changé en France
depuis 25 ans !
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5. Or, il s’agit de faire naître une fierté sur
l’Europe et ses acquis présents, acquis sous-
estimés ou considérés comme un dû. Que se
passerait-il si l’Union européenne n’existait
pas ?
Il est possible de répondre de manière acadé-
mique : l’Union européenne a construit la
paix, garantit les droits de l’homme , etc. Ou
bien d’émettre une réponse qui variera selon
les intéressés : le céréalier du centre de la
France sait que c’est la Politique Agricole
Commune qui lui permet d’exister.
Notre réponse à nous s’appuie sur trois
grands principes politiques :
Tout d’abord, on n’est jamais crédité de ce
que l’on évite : alors souvenons-nous que
l’Union a donné pour la première fois les
moyens au continent de ne plus jamais refaire
la guerre ; de même que l’euro est un amor-
tisseur de chocs qui nous a évité les consé-
quences de dévaluations compétitives de
monnaies concurrentes.
L’on dit aussi que les bonnes choses n’ont pas
de mémoire, et tous les hommes politiques
peuvent témoigner que lorsqu’ils réussissent
quelque chose, il est considéré qu’ils n’ont fait
que leur travail. Ainsi, la Charte des droits
fondamentaux, un acquis considérable ou
simplement la libre circulation sans contrôle
aux frontières, le droit de travailler en Europe
sans être confronté à une clause de priorité des
nationaux, celui de vendre ses produits ou
services sans restriction liées à des normes
nationales discriminantes, la protection des
consommateurs, la monnaie unique qui évite
les risques de change, les équivalences de
diplôme… Tout cela est devenu un dû !
N’oublions pas enfin que la vie politique est
un rapport de force. Ce sont les gros
bataillons qui font évoluer les choses. Face
aux États-Unis, à la Chine, à l’Inde, la
réponse est européenne parce qu’alors elle
pèse 500 millions de citoyens donc elle est
entendue dans les instances mondiales. (Si
M. De Villepin, à l’occasion de la guerre en
Irak, s’était exprimé au nom des 500 millions
d’habitants, il aurait été entendu). La France,
c’est 63 millions autant que de pèlerins sur
le Gange chaque année !
Si l’on disposait d’un ministre des Affaires
étrangères apte à utiliser les liens avec les
mondes francophone, lusophone, anglophone
avec qui nous conservons par l’intermédiaire
de certains de nos États des liens affectifs
puissants, nous pourrions développer une
capacité d’influence diplomatique.
Si l’Europe n’existait pas, « les textes qui
nous permettent d’aller plus loin n’existe-
raient pas », tel que le Traité de Lisbonne qui
peut servir de socle au développement de
l’UE. Sans l’Europe, nous n’aurions pas
développé cette culture du compromis qui
nous permet, même si c’est complexe,
d’avancer ensemble.
Les pires ennemis de l’UE sont ceux qui
pensent que l’Europe peut et va tout résou-
dre. Il est aujourd’hui plus que jamais incon-
tournable de délimiter ce que l’Europe peut
faire et de lui donner les moyens institution-
nels et budgétaires de le faire.
Le projet d’Europe transcende les notions de
Nation, de race, de religion, d’État sans les
éliminer. Un lien substantiel avec le citoyen
est proposé à partir de valeurs citoyennes
collectives, au-delà de l’appartenance à un
seul État-nation ! Créer le désir de vivre
ensemble en assumant nos diversités, la fierté
partagée d’être européen comme un message
de tolérance à l’égard du monde.
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6. Les Européens, et particulièrement les
Français, ne sont pas assez conscients que
l’Europe est enviée de l’extérieur, parce
qu’elle a réussi à bâtir une Communauté
des peuples, à préserver la démocratie et la
paix. Elle représente un idéal politique. Est-
ce négligeable d’avoir construit et de main-
tenir une zone de paix et de droits de
l’homme alors que la guerre est partout, que
les droits sont reniés, que des femmes
meurent lapidées, que des enfants travail-
lent à 8 ans ? Est-ce négligeable d’avoir
créé un espace de respect des diversités,
porteur d’un message de tolérance à l’égard
du reste du monde ?
« Qu’est ce qui selon vous crée un sentiment
citoyen européen ? » (Eurobaromètre, février
2012). À 57 %, les interviewés répondent : la
démocratie et le respect des droits de
l'homme tandis qu’interrogés sur leur senti-
ment d’appartenance identitaire, six Français
sur dix affirment se sentir à la fois français et
européen et trois sur dix disent se sentir fran-
çais, mais pas vraiment européens.
Notre continent est un continent d’histoire de
guerres. L’Europe s’est faite pas à pas dans
un mouvement d’adaptation continue aux
temps présents, contre les différentes résis-
tances. Au départ, il y a l’idéal de paix euro-
péen de 1950, mais cet idéal semble dépassé.
Aujourd’hui, l’Europe c’est des réalités,
vécues comme des contraintes et avec un
mode d’emploi trop technique. Il manque de
l’ambition politique : le manque de courage
des gouvernements est évident ! À l’exté-
rieur, nous sommes perçus comme l’espace
où la qualité de vie est la meilleure du
monde. L’Union est avant tout un corpus de
valeurs que doivent respecter tous les États
membres. Il faut être ferme sur cela, de
récents évènements, par exemple en Hongrie,
peuvent faire craindre que l’UE est moins
prête à partir au combat, c’est regrettable.
Enfin, l’Europe reste la première puissance
mondiale. Elle doit s’exprimer d’une seule
voix. Et puis les médias ont une responsabi-
lité : ils faussent la donne en organisant des
débats «1-1 » entre pro et anti-européens, ça
n’est pas représentatif des proportions de
pensées.
La difficulté est que nous ne sommes pas un
État et que nous avons toujours choisi le
plus petit dénominateur commun. L’Europe
ne peut pas être incarnée aux yeux des
Européens si elle n’a pas de représentation
unique. On a aboli les frontières à l’inté-
rieur, mais on n’a pas identifié les frontières
externes de l’Europe. Un Américain sait
qu’il est américain, sait quand il sort de sa
frontière. Un Européen ne sait pas où
l’Europe s’arrête, or il n’y a pas de citoyen-
neté sans considération de la question poli-
tique des frontières.
Il y a une coïncidence historique intéres-
sante : toutes les institutions européennes
seront renouvelables en 2014. C’est le
moment d’avoir de l’ambition et de faire
porter la voix de l’Europe !
*
* *
Convaincre les Français, démontrer que la
citoyenneté européenne est une richesse
supplémentaire, telle est la mission des
Européens convaincus autant que de la
Représentation en France de la Commission
européenne. Cette Représentation tente de
parler aux citoyens directement et ce qui
ressort du terrain est clairement le manque de
liens entre le terrain et l’Europe et un degré
de méconnaissance absolu.
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7. Les missions sont multiples et se développent
à partir de trois axes :
g diffuser un message européen auprès du
public et surtout des « multiplicateurs » :
les élus, les médias et le monde associatif
dont le rôle de maillon entre le terrain et
Bruxelles est fondamental ;
g donner plus d’espace à l’Union euro-
péenne dans la presse et informer, voire
former la presse sur l’Europe. Enfin, la
représentation de la Commission euro-
péenne se consacre à une nouvelle
mission, plus politique dont l’objectif est
de rapporter à Bruxelles ce qui se passe en
France (opinions, etc.) ;
g relayer toutes les données et informations
disponibles sur l’Europe. À ce titre, le
multilinguisme reste essentiel comme
vecteur de proximité à l’égard des citoyens
et même si la traduction représente un coût
c’est un coût nécessaire pour le maintien
de la diversité culturelle.
Le Marché unique est trop souvent réduit à
un espace de libre échange à échelle de
l’Europe ; il est pourtant, depuis l’origine
du projet conçu comme porteur de cohé-
sion et doit plus que jamais continuer à
constituer « notre espace commun de
SOLIDARITES ».
…Tout ce qui aide à la mobilité géogra-
phique, aux échanges, à la solidarité (entre
États, entre générations, entre plus aisés et
moins aisés…) constituent le fondement
d’une Europe plus intégrée (sans être
uniforme) apte à mieux faire comprendre sa
richesse aux citoyens, à développer son poten-
tiel économique et s’affirmer à l’extérieur.
De même, la citoyenneté européenne donne
des droits en plus sans prétendre se substi-
tuer à la citoyenneté nationale. Les acquis
de la Charte des Droits fondamentaux de
l'UE (adoptée à Nice en 2000), rattachée au
Traité de Lisbonne le 12 décembre 2007,
sont importants : « L'Union se fonde sur les
valeurs indivisibles et universelles de
dignité humaine, de liberté, d'égalité et de
solidarité ; elle repose sur le principe de la
démocratie et le principe de l'État de droit.
Elle place la personne au cœur de son action
en instituant la citoyenneté de l'Union et en
créant un espace de liberté, de sécurité et de
justice. L'Union contribue à la préservation
et au développement de ces valeurs com-
munes dans le respect de la diversité des
cultures et des traditions des peuples de
l'Europe, ainsi que de l'identité nationale des
États membres et de l'organisation de leurs
pouvoirs publics au niveau national, régio-
nal et local ; elle cherche à promouvoir un
développement équilibré et durable et
assure la libre circulation des personnes, des
biens, des services et des capitaux, ainsi que
la liberté d'établissement ».
Faut-il être fier d’être européen ?
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