1. Histoire et état des lieux de l’Open Access
De tout temps, les chercheurs ont communiqué entre eux l’état de leurs recherches et leurs
découvertes afin d’échanger et de faire évoluer la connaissance.
A travers chaque époque les avancées techniques et technologiques ont fait progresser ce
partage d’informations mais ont été souvent accompagnées de réticences et de craintes surtout
de la part des plus conservateurs.
L’imprimerie fut par exemple un outil facilitant un début de démocratisation du partage du
savoir religieux et profane au grand dam de certains conservateurs religieux qui y voyaient la
perte de leur pouvoir dans leur rôle de médiateur avec la puissance divine.
Bien plus tard, de nouveaux intermédiaires vont apparaitre : les éditeurs scientifiques. Ils ont
pu centraliser, accroitre la visibilité et l’accessibilité des résultats de chercheurs qui y
trouvaient à la fois une reconnaissance et une légitimité d’autant plus que l’éditeur bénéficiait
d’un certain prestige. Ils ont cependant commencé à introduire et à renforcer au fil du temps
une dimension économique et un clivage entre créateur et diffuseur.
Petit à petit les éditeurs ont ralenti ces partages de pair à pair en facturant les revues
scientifiques suffisamment pour réduire l’accès à tous à ces nouvelles connaissances.
Aujourd'hui, le savoir est numérisé, et grâce au réseau internet et aux technologies
numériques, circule, se diffuse et se partage à la vitesse des réseaux, proche de celle de la
lumière, ce qui permet une dynamique collective, la coopération de communautés et
l’émergence de nouvelles connaissances.
Constatant cet état de fait qui vient bousculer et renouveler la dimension économique et
politique du partage des savoirs, des groupes de travail dans le domaine des sciences ont
commencé à promouvoir un nouveau mode de diffusion des savoirs scientifiques : l’Open
Access.
1. La genèse des archives ouvertes
En 2001, la Public Library of Science (PLOS) a publié une lettre ouverte, poussant les
éditeurs scientifiques à autoriser la mise à disposition en libre accès, dans des bibliothèques
publiques en ligne, des documents issus de la recherche qui sont publiés dans leurs revues.
En décembre 2001, une conférence pour promouvoir l’accès ouvert est organisée par l’Open
Society Institute. Il en résultera le 14 Février 2002 la publication d’un texte prônant le partage
du savoir scientifique : le Budapest Open Access Initiative (BOAI).
Lien vers le texte original : http://www.opensocietyfoundations.org/openaccess/read
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2. En juin 2003, dans le Maryland, un groupe de travail élabore une déclaration (Bethesda
Statement) afin de stimuler la discussion au sein de la communauté de recherche biomédicale
sur la façon de procéder pour atteindre, aussi rapidement que possible, l'objectif largement
partagé d'offrir un accès ouvert à la littérature scientifique fondamentale.
En octobre 2003, c’est à Berlin qu’est élaboré un texte (Berlin Declaration on Open Access to
Knowledge in the Sciences and Humanities) visant à promouvoir l’Open Access.
En 2001, en France, un système d’archivage de publications scientifiques en ligne, HAL, a été
créé à l’initiative du CNRS.
Dix ans plus tard, l’Open Society Institute a réaffirmé son attachement aux principes de
l’Open Access. http://www.opensocietyfoundations.org/openaccess/boai-10translations/french
2. Etat des lieux
Depuis maintenant plus d’une décennie, les archives ouvertes se sont développées dans le
monde entier. Des universités ont créé leur propre plateforme institutionnelle, d’autres
déposent dans des archives ouvertes nationales ou internationales, et depuis quelques temps
certains éditeurs scientifiques proposent même une partie de leur dépôt sur le mode Open
Access (exemple : Couperin).
De nombreuses initiatives ont vu le jour pour promouvoir l’Open Access, et des réflexions
sont régulièrement menées au niveau gouvernemental pour inciter les chercheurs à publier les
résultats de leurs recherches sur des archives ouvertes. Un des arguments les plus repris en
faveur de ce partage des connaissances scientifiques est que la recherche est généralement
financée par de l’argent public ; Il semblerait donc logique que les résultats de ces recherches
soient partagés gratuitement afin d’accélérer les avancées scientifiques. De plus, les instituts
de recherche et les universités doivent payés d’importantes sommes d’argent à des éditeurs
pour avoir accès aux résultats de la recherche, alors que leurs chercheurs sont les producteurs
principaux de ces savoirs.
De leurs côté, les éditeurs de revues scientifiques craignent de voir leurs revenus diminuer
s’ils ne sont plus les dépositaires exclusifs des savoirs scientifiques. Ils ne s’opposent plus au
principe de l’archivage ouvert en ligne, mais usent encore de pratiques contraignantes à même
de décourager les chercheurs désirant partager les résultats de leur recherche dans leurs
revues, et publier simultanément en accès libre.
10 ans après l’initiative de Budapest en faveur de l’Open Access, entre encouragement et
réalité, il faut admettre que l’accessibilité aux résultats des recherches financées sur fonds
publics reste encore modeste : en France de 5 à 10 %, des articles scientifiques, sont libres.
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3. 3. Enjeux et perspectives
3.1. Des enjeux ou comment tous être gagnants
Il ne faut pas croire que l’accès aux résultats scientifiques ne concerne que le microcosme des
chercheurs ou des éditeurs.
En effet, l’accès ouvert aux résultats de la recherche représente un enjeu démocratique pour le
partage de l’information entre les chercheurs mais aussi entre tous les citoyens.
Relever ce défi repose sur la capacité de tous les acteurs à comprendre la nature des enjeux
auxquels ils sont confrontés.
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Des enjeux scientifiques pour une visibilité nationale et/ou internationale et une
valorisation de la recherche non seulement pour les chercheurs mais aussi les
établissements.
Des enjeux économiques : un financement doit être prévu en concertation avec les
éditeurs, les financeurs et les établissements, sans omettre de garantir une équité
d’accès à l’information afin d’éviter une fracture sociale, et sans pour autant négliger
la problématique de la propriété intellectuelle.
des enjeux sociaux pour une meilleure appropriation des résultats de la recherche par
l’ensemble de la société et pour une véritable solidarité entre les chercheurs et en
particulier ceux des pays émergents ou trop pauvres pour financer les accès payants à
des éditeurs prestigieux.
3.2. Les perspectives
Le changement est possible mais il suppose une véritable concertation entre tous les acteurs :
chercheurs, éditeurs, établissements, documentaliste, financeurs, institutions…
Les établissements ont un rôle essentiel auprès des chercheurs. En effet, il semble
indispensable que ces derniers encouragent leurs chercheurs à devenir des acteurs de la
diffusion ouverte de leurs travaux grâce à une communication efficace et un accompagnement
technique permanent.
Les réticences et la défiance des chercheurs à l'égard de l'auto-archivage institutionnel, qui
craignent de se voir imposer une contrainte administrative supplémentaire chronophage,
pourront être levées par des mesures d’encouragement.
Ils devront peut-être passer par des mesures transitoires ou pérennes, coercitives ou
incitatives :
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des actions contraignantes à l’initiative des établissements doivent sans doute exister
afin de changer le comportement des chercheurs et obliger ces derniers à publier et
partager les résultats de leur recherche,
des actions d’informations relatives au cadre juridique de l’auto-archivage et de leurs
droits d’auteur, des limites de leur contrat de travail sont par ailleurs indispensables
pour les rassurer.
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des actions de formation relative à l’indexation et aux techniques de diffusion et de
mise en ligne sont aussi plus que nécessaires pour transformer ce qui aujourd’hui
semble anecdotique pour certains en une pratique naturelle.
Les éditeurs
Au départ les éditeurs étaient fortement opposés à un accès gratuit des contenus de recherche,
craignant de mettre leur modèle économique en danger.
Ils ont fini par accepter une accessibilité partielle et gratuite mais ne semblent pas vouloir
aller beaucoup plus loin malgré le développement d’archives ouvertes par d’autres acteurs du
monde scientifique.
Il faut espérer que cette concurrence qui gagne en taille, visibilité et légitimité les encourage à
modifier leurs politiques de diffusion du savoir scientifique.
Les universités
Elles ont un rôle déterminant à jouer à travers les enseignants et enseignants documentalistes
par la promotion des archives ouvertes auprès des étudiants.
Ces ressources en ligne représentent une source de savoirs riches, actualisés et en constante
évolution, qui vient compléter d’autres espaces documentaires mais surtout favorise l’autoformation et une visibilité internationale.
Elles doivent également inciter leurs chercheurs à publier sur les archives ouvertes.
Conclusion
Les pratiques de partage des savoirs sur des archives ouvertes connaissent une croissance
exponentielle qui va de pair avec le développement des technologies numériques.
Ce développement ne signifie cependant pas la disparition des éditeurs scientifiques qui
justifie leur légitimité par la garantie de la qualité des savoirs publiés pour les lecteurs, et la
garantie de notoriété et de visibilité aux auteurs.
Néanmoins
diffusion :
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un effet pervers semble apparaitre en mettant en concurrence 2 canaux de
un canal représenté par des éditeurs porteurs d’un savoir officiel, reconnu et validé où
l’auteur gagne autorité et prestige.
un canal libre, démocratique, participatif, porteur d’un savoir moins légitime où
l’auteur perd de la reconnaissance de ses pairs et de la visibilité internationale faute de
publier dans une revue prestigieuse.
Il faudra donc veiller à ce que les auteurs qui publient en Open Access ne soient pas pénalisés
par leur pratique, mais plutôt valorisés.
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Disponible sur le Web : http://www.couperin.org/groupes-de-travail-et-projets-deap/open-access/libreacces/257-libre-acces/1052-article-scientifique
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pour la formation à distance. Distances et savoirs, 2009/3 Vol.7, p. 443-456.
Salaün, Jean-Michel, Arsenault, Clément. Introduction aux sciences de l’information. Editions La
Découverte, Paris, 2010. p.118-126.
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06 avril 2013]. Disponible sur le Web : http://www.enseignementsuprecherche.gouv.fr/cid66992/discours-de-genevieve-fioraso-lors-des-5e-journees-open-access.html
Veille partagée sur l’Open Access réalisée sur Scoop.it, thématique sid-dmser avec filtre sur le tag
"Open Access". [en ligne], [consulté le 06 avril 2013]. Disponible sur le Web :
http://www.scoop.it/t/sid-dmser?tag=Open+Access
Suber, Peter. Open Access Overview. [en ligne], [consulté le 09 avril 2013].
Disponible sur le Web : http://legacy.earlham.edu/~peters/fos/overview.htm
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Terheck, professeur documentaliste, library specialist, Education nationale, France.
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