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Le puzzle de la performance
sur Triathlon – Distance Ironman
--- 1ère
partie : Analyse de l’activité ---
2. ©Karoly SPY | KS-Training 2
1. Introduction ...................................................................................................................... 3
2. Analyse de l’activité Triathlon ........................................................................................... 3
2.1 Les déterminants spécifiques de la performance dans les sports
de longue durée .......................................................................................... 3
2.1.1 Rendement énergétique vs coût énergétique ..................................... 4
2.1.2 Force musculaire et performance de longue durée ............................ 5
2.1.3 Les différentes formes de fatigues à l’exercice .................................... 5
2.2 La spécificité du Triathlon distance Ironman comme discipline
d’ultra-endurance ......................................................................................... 6
2.2.1 Intensité observée ............................................................................... 6
2.2.2 La demande énergétique ..................................................................... 6
2.2.3 Les troubles gastriques ........................................................................ 7
2.2.4 L’hyponatrémie .................................................................................... 8
2.2.5 Crampes musculaires à l’effort ............................................................ 9
2.2.6 Les dommages musculaires ............................................................... 10
2.2.7 Notion de pacing ................................................................................ 13
2.2.8 La spécificité des enchaînement sur la distance Ironman ................. 15
3. Conclusion ...................................................................................................................... 15
4. Bibliographie ................................................................................................................... 16
3. ©Karoly SPY | Innov-Training 3
1. Introduction
Le Triathlon, distance Ironman, consiste à enchaîner, sans arrêt du chronomètre, 3.8 Km de
natation, 180 Km de vélo et 42.195 Km de course à pied. Cette discipline est considérée comme
une épreuve d’ultra-endurance multivariée (3 modes de locomotion différents) de part sa durée
d’effort. En effet, le record sur la distance est de 8h18’13’’ chez les femmes et 7h35’39’’ chez les
hommes.
Cette épreuve exigeante requière des ressources importantes que ce soit au niveau physiologique,
musculo-squelettique, psychologique ou encore nutritionnel (Jones & Carter, 2000).
La mise en place d’un processus adaptatif du phénotype musculaire (masse musculaire,
métabolisme énergétique, réseau capillaire, types de fibres) chez le triathlète, soumis à l’exigence
des épreuves de longue durée, est un processus complexe.
Une parfaite connaissance ainsi qu’une compréhension des déterminants de l’activité sont
essentielles afin d’assembler le puzzle qui permettra l’atteinte de la performance optimale en lien
avec les capacités propres à chaque individu.
2. Analyse de l’activité Triathlon
2.1 Les déterminants spécifiques de la performance dans les sports de longue durée
Les exercices intenses et de longue durée nécessitent un apport d’oxygène important pour
permettre une production d’énergie et un maintien de l’activité contractile via le processus
oxydatif. Pour produire cette énergie, l’organisme dégrade les substrats énergétiques issus de
l’alimentation [cf. figure 1], en présence
d’oxygène, pour les transformer en
énergie chimique sous forme d’Adénosine
TriPhosphate (ATP). Cette énergie
chimique contenue dans la molécule
d’ATP (stockée dans les liaisons
phosphates) va permettre de produire, au
sein de la cellule musculaire, l’énergie
mécanique nécessaire à la contraction et
au relâchement musculaire.
La consommation maximale d’oxygène ( O2 max), montrant l’aptitude d’un sujet à prélever et à
utiliser l’oxygène au sein de la cellule musculaire pour produire de l’ATP, s’impose comme un
indicateur central de la performance aérobie. Toutefois, la O2 max ne suffit à elle seule à
expliquer les différences de performances interindividuelles au sein d’une population d’athlètes
ayant des valeurs similaires de O2 max (Costill, 1967 ; Foster & Lucia, 2007).
Figure 1
4. ©Karoly SPY | KS-Training 4
En effet, l’atteinte d’une performance dans une épreuve de longue durée est la résultante de
l’interaction de différents facteurs (Di Prampero, 2003 ; Nummela, 2006) [cf. figure 2] :
§ Le O2 max qui correspond au volume maximal d’oxygène qu’un individu peut consommer
par unité de temps au niveau musculaire lors d’un exercice à intensité sévère.
§ Le coût énergétique (CE) qui correspond à la quantité d’énergie dépensée par unité de
distance en fonction de la locomotion (natation, cyclisme, course à pied).
§ La Fraction d’utilisation du O2 max (F O2 max) qui représente le pourcentage du O2
max qui peut être maintenue durant l’épreuve
§ La capacité neuromusculaire à produire de la force qui est déterminée à partir d’un test
d’évaluation de la vitesse maximale anaérobie (VM.A.R.T)
Ces différents facteurs permettent d’estimer la performance sur une épreuve de longue durée
avec une marge d’erreur <8% (Di Prampero, 1986 ; Di Prampero, 1993 ; Capelli & al, 1998).
2.1.1 Rendement énergétique vs coût énergétique
Lors d’un exercice dynamique, l’énergie chimique contenue dans les liaisons phosphates de l’ATP
va permettre de maintenir le travail mécanique. La conversion d’énergie chimique en énergie
mécanique permet de se rendre compte du rendement énergétique de l’organisme. Lorsque le
rendement énergétique est relié à la consommation d’oxygène en fonction de la vitesse ou de la
puissance développée, on parle de coût énergétique (CE). Un faible CE va permettre à l’athlète de
produire une intensité plus élevée pour une même puissance métabolique. Le CE correspond ainsi
au lien entre puissance métabolique et puissance mécanique. Le rendement énergétique
correspond quant à lui à l’efficacité d’utilisation de l’énergie disponible.
Performance sur les épreuves de longue durée
Figure 2
5. ©Karoly SPY | Innov-Training 5
2.1.2 Force musculaire et performance de longue durée
La force développée et la vitesse de contraction permettent de maintenir une puissance
musculaire élevée lors d’un exercice de longue durée. L’augmentation ou le maintien de la
puissance mécanique sera assuré par une élévation ou une conservation de la force musculaire
produite. La force musculaire est ainsi un facteur important de la performance lors d’un exercice
de longue durée durant lequel des valeurs de puissances mécaniques élevées sont développées
par l’athlète (Coyle & al, 1991 ; Lucia & al, 1998 ; Borrani & al, 2003).
De plus, Billat (2013) a également récemment mis en évidence l’importance de la force comme
facteur limitant du O2 max.
2.1.3 Les différentes formes de fatigues à l’exercice
La fatigue musculaire lors d’un exercice peut être définie par une diminution de la capacité du
muscle à produire de la force ou de la puissance, que la tâche puisse être maintenue ou non
(Sogaard & al, 2006).
Pour réaliser la meilleure performance possible lors d’une épreuve de longue durée, l’athlète va
rechercher à produire et à maintenir la puissance la plus élevée possible. Dans ces conditions, une
fatigue va s’installer et qui aura comme effet délétère un déclin de la performance musculaire.
Deux types de fatigue pourront être distingués [cf. figure 3] :
§ La Fatigue centrale qui correspond à une réduction
de la commande motrice au niveau nerveux.
§ La fatigue périphérique qui occasionne des
changements métaboliques au niveau musculaire.
Cette fatigue périphérique surviendrait avant la
fatigue centrale (Lepers & al, 2002).
Lors d’un effort d’une durée prolongée (allant de 5h à 24h),
différentes études ont pu mettre en évidence une baisse de la force maximale volontaire (CMV) à
l’issue de l’épreuve (Lepers & al, 2002 ; Millet & al, 2003 ; Millet & al, 2011).
Lepers & al (2002) ont pu montrer une baisse progressive de CMV, au cours d’un effort de 5h
effectué en laboratoire sur ergocycle, allant de -8 à -10% entre la 1ère
et la 3ème
heure, de -16%
après la 4ème
heure et jusqu’à -18% à l’issue de la 5ème
heure.
L’activité neuromusculaire pourrait être impliquée dans l’apparition de la fatigue lors d’un
exercice prolongé (St Clair Gibson, 2001 ; Kay, 2001).
Par ailleurs, il a également été avancé un modèle alternatif de la fatigue dit « Modèle du
Gouverneur Central » (Noakes & al, 2004) selon lequel le cerveau régulerait de façon complexe
l’ensemble des systèmes physiologiques durant l’effort afin de prévenir toutes mises en danger de
l’organisme [cf. figure 4].
Figure 3
6. ©Karoly SPY | KS-Training 6
Figure 4
Durant l’exercice, le cerveau régulerait en continu l’intensité de l’exercice par une modification du
nombre d’unités motrices recrutées au niveau des muscles en activité. Selon ce modèle, la fatigue
ne serait donc pas un simple événement physiologique mais plutôt un système global qui
permettrait de protéger l’organisme contre la production d’un effort trop dangereux pour son
intégrité (St Clair Gibson & al, 2003).
2.2 La spécificité du Triathlon distance Ironman comme discipline d’ultra-endurance
2.2.1 Intensité observée
L’intensité d’effort lors d’un triathlon distance Ironman serait situer à environ 80% de FCmax
(Laursen & al, 2005).
Une étude récente (Munoz & al, 2013) portant sur 7 triathlètes ayant effectué l’Ironman
d’Autriche 2010 a pu analyser la distribution des intensités employées durant l’épreuve qui étaient
respectivement de 31% [±24] au seuil ventilatoire 1 (SV1), 65% [±22] entre les SV1 et le SV2, 4%
[±6] au seuil ventilatoire 2 (SV2). La partie natation et la partie cycliste de l’Ironman
s’effectueraient principalement entre le SV1 et le SV2 (Munoz & al, 2013).
2.2.2 La demande énergétique
Un triathlon distance Ironman engendre une demande énergétique très élevée de l’ordre de 8500
à 11500 Kcal (Laursen & Rhodes, 2001).
Dans un modèle de simulation d’un triathlon distance Ironman, Noakes (2000) a montré que les
réserves de glycogènes seraient pratiquement épuisées au bout de 4h30 de vélo réalisées à 71%
de O2 max. Malgré tout à l’issue des 180 Km de vélo, les triathlètes élites sont capables de courir
7. ©Karoly SPY | Innov-Training 7
à une intensité >66% de O2 max (Jeukendrup, 2005). Un apport exogène d’hydrates de carbone
est donc primordial.
De plus, l’optimisation du processus d’oxydation des graisses par un entraînement adapté s’avère
important pour permettre à l’organisme de faire face à la demande énergétique très élevée
durant l’épreuve. La mise en place d’une stratégie nutritionnelle personnalisée avant et pendant
doit être envisagée car elle constitue la clé pour améliorer la performance durant une épreuve
d’ultra-endurance du type Ironman.
2.2.3 Les troubles gastriques
Les troubles gastriques (TG) sont fréquemment rapportés par les athlètes pratiquant les sports
d’endurance et en particulier les disciplines d’ultra-endurance. Ces TG et les différents symptômes
associés [cf. tableau 1] engendrent des effets négatifs sur la performance. Ils sont responsables de
contre-performances durant les compétitions ou peuvent également avoir un impact sur la
récupération post-épreuve.
Tableau 1 - Symptômes TG
Ballonnements Nausée
Crampes abdominale Reflux gastrique
Diarrhée Saignements intestinaux
Flatulence Vomissement
Dans une étude portant sur des triathlètes lors d’une épreuve longue distance (Jeukendrup & al,
2000), il a été rapporté les chiffres suivants :
§ 93% déclarent avoir ressenti un symptôme de TG
§ 43% déclarent avoir eu de sérieux problèmes gastriques
§ Et 7% ont abandonné à cause de problèmes gastriques
L’interaction de différents facteurs serait susceptible de provoquer ces TG :
§ Age
§ Sexe
§ Statut d’entraînement
§ Intensité de l’effort
§ Durée de l’effort
§ Conditions environnementales
§ … … …
Les causes physiologiques et mécaniques de ces TG sont nombreuses :
§ Hypoperfusion intestinale (diminution du flux sanguin) qui provoquerait nausée,
vomissement, douleurs abdominales et diarrhée.
§ Mauvaise vidange gastrique.
§ Mauvaise absorption de l’eau et des glucides durant l’exercice de part une augmentation
de la perméabilité intestinale. Cette augmentation de la perméabilité intestinale, observée
8. ©Karoly SPY | KS-Training 8
à l’issue d’un marathon (Oktedalen & al, 1992), indiquerait des dommages au niveau de
l’intestin.
§ Au niveau mécanique ce serait principalement les chocs répétés lors de la partie pédestre
qui endommageraient la muqueuse intestinale et provoqueraient flatulences et diarrhée.
En effet, les symptômes sont plus fréquemment révélés par les coureurs que par les
cyclistes. Malgré tout la position aérodynamique durant la partie cycliste pourrait causer
des TG. L’entraînement spécifique permettra de réduire les effets négatifs provoqués par
les causes mécaniques.
§ Le stress psychologique peut également être une cause des TG et provoquerait des
épisodes diarrhéiques dans l’heure qui précède le début de la compétition.
La nutrition peut elle aussi avoir une forte influence dans les TG lors d’un exercice. Durant un
triathlon longue distance, les TG peuvent être associés à l’ingestion de fibres, de lipides et de
boissons glucidiques hypertonique dont l’osmolarité est élevée (>500 mOsm/L). La consommation
de produits laitiers peut également être reliée à l’apparition de TG. Pour limiter les risques de TG
durant l’exercice, il est préconisé de ne pas consommer d’aliments riches en protéines, lipides et
fibres ainsi que des produits laitiers dans les 24h avant l’épreuve mais également durant
l’épreuve.
Par ailleurs, l’ingestion de médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens augmenterait 3 à 5
fois le risque de TG (Gabriel & al, 1991).
Les notions de prévention seront développées dans la seconde partie du document consacrée à
l’entraînement.
2.2.4 L’hyponatrémie
Durant un effort de longue durée, on observe une augmentation de la température corporelle.
L’organisme va mettre en jeu différentes stratégies (thermorégulation) pour lutter contre
l’accumulation de cette chaleur endogène afin de prévenir un état d’hyperthermie qui pourrait
s’avérer préjudiciable à la performance mais également dangereux pour le maintien de
l’homéostasie corporelle. La principale stratégie adoptée par l’organisme sera le transfert de la
chaleur métabolique vers la périphérie cutanée pour qu’elle soit dissipée. Cette stratégie
correspond à la transpiration, elle s’accompagne d’une perte liquidienne importante, sous forme
de sueur, qui va occasionner une baisse du volume sanguin et exposer l’athlète à une
déshydratation. En parallèle ces pertes sudorales vont également s’accompagner d’une perte
importante de sodium. Pour lutter contre cette déshydratation, l’athlète va augmenter sa
consommation de liquide.
C’est à ce moment là que peut survenir l’hyponatrémie qui est souvent décrite dans les disciplines
d’ultra-endurance (>4h). L’hyponatrémie correspond à un déséquilibre hydrosodé causé par une
absorption trop importante d’eau par rapport au sodium. L’hyponatrémie correspond ainsi à la
chute de la concentration sanguine plasmatique en sodium en dessous d’une valeur de 135
mmol/L. Le risque d’hyponatrémie est encore plus accru lorsque l’activité est réalisée dans des
conditions extrêmes (chaleur). Dans la littérature scientifique, on peut relever une étude
9. ©Karoly SPY | Innov-Training 9
intéressante de Speedy & al (1999) réalisée lors de l’Ironman de Nouvelle Zélande en 1997 sur 330
triathlètes finishers (représentant 55% des finishers de l’épreuve), parmi lesquels 18% d’entre eux
étaient hyponatrémiques et dont une grande majorité devait subir une hospitalisation.
Les symptômes de l’hyponatrémie sont :
§ Douleurs musculaires
§ Nausées
§ Vomissements
§ Confusions
§ Vertiges
§ Maux de tête sévères
§ Douleurs abdominales
§ Diarrhée
Dans les cas extrêmes, l’hyponatrémie peut causer un coma, des séquelles neurologiques voir
dans des cas très sévères le décès.
L’hyponatrémie peut être considérée comme une hyperhydratation en eau ou boisson
hypotonique (à l’inverse de la déshydratation qui est une sous-hydratation). Les athlètes en
souffrant présentent une surcharge liquidienne pouvant dépasser jusqu’à 5% la masse corporelle
initiale.
Le traitement nécessite le repos dans une pièce fraiche avec restauration de l’équilibre
électrolytique en fonction des données de l’ionogramme sanguin (Melin, B & al, 2004).
Pour prévenir un état d’hyponatrémie, il est conseillé d’avoir un bon équilibre hydrosodique en ne
consommant pas plus qu’on dépense, de ne pas surconsommer de liquide, de boire en respectant
sa soif et de respecter une stratégie personnalisée avec une boisson énergétique adéquate. Il est
recommandé de boire, par petites gorgées régulières, entre 500 et 800 mL/h de boissons
énergétiques contenant environ 8% de glucides (maltodextrines et/ou fructose) et des électrolytes
(sodium, potassium).
A savoir qu’un apport en sodium fortement augmenté durant l’exercice ne prévient l’état
d’hyponatrémie et peut être même la cause de TG.
2.2.5 Crampes musculaires à l’effort
Lors d’un effort de longue durée, on observe une forte prévalence de crampes pendant et après la
compétition chez 50 à 60% des athlètes (Kantorowski & al, 1990 ; Manjara & al, 1996).
La crampe est une contraction musculaire spontanée, involontaire, soutenue et douloureuse qui
peut durer quelques secondes à plusieurs minutes. Dans la majorité des cas, elle est préjudiciable
à la performance. Chez les triathlètes de longue distance, celle-ci est généralement localisée au
niveau des quadriceps, des mollets ou des ischio-jambiers.
10. ©Karoly SPY | KS-Training 10
A l’heure actuelle, le mécanisme des crampes à l’effort n’est pas encore totalement élucidé.
Différents facteurs peuvent être avancés comme :
§ L’athlète peu entrainé à l’effort effectué
§ La durée de l’effort
§ La déshydratation et le déséquilibre des concentrations sériques en électrolytes
(magnésium, sodium, potassium, calcium, chlorure)
§ Ou encore un problème mécanique au niveau de l’appareil musculo-squelettique.
Cependant, différents travaux dans le domaine de l’ultra-endurance ne permettent pas de valider
ces hypothèses.
Il est également souvent rapporté que les crampes proviendraient d’un déficit en sodium, ce qui
pousse les athlètes d’endurance à utiliser fréquemment une supplémentation exogène en sodium
durant l’épreuve. Toutefois, il n’y aurait aucun effet sur la prévention des crampes par l’apport de
sodium (Schwellnus & al, 2010).
La survenue d’épisodes de crampes durant un effort de longue durée pourrait être principalement
associée à une fatigue neuromusculaire (Schwellnus & al, 2009). Cette fatigue neuromusculaire
perturberait l’activité réflexe médullaire et aurait comme conséquence d’altérer l’équilibre entre 2
types de récepteurs (organes tendineux de Golgi et fuseaux neuromusculaires) impliquaient dans
la commande motrice (Palazzetti, 2005).
Sur un aspect pratique de prévention, une stratégie d’entraînement consisterait à effectuer de
longues sessions d’entraînement à une intensité cible ou légèrement inférieure pour adapter le
phénotype musculaire aux exigences de l’effort de compétition. La réalisation régulière
d’étirements sur les muscles souvent sujets aux crampes peut également s’avérer intéressante
tout comme un renforcement musculaire spécifique. De plus, l’utilisation d’une stratégie de
pacing durant l’épreuve est également un gage de prévention des crampes.
2.2.6 Les dommages musculaires
Les dommages musculaires observés lors d’un triathlon distance Ironman seraient principalement
causés par les contractions excentriques lors de la partie pédestre (Suzuki & al., 2006 ; Nosaka &
al., 2010).
Ces dommages musculaires vont provoquer une sensation consciente de la douleur au niveau
musculaire. Cette sensation de douleur est provoquée par les nocicepteurs qui sont des
récepteurs sensoriels à l’origine du message nerveux qui provoque la douleur. Les fibres
nociceptives rejoignent la moelle par les racines dorsales puis par les voies ascendantes
La course à pied se caractérise par une succession de phases de freinage (action excentrique), lorsque
le pied entre en contact avec le sol, et de poussée (action concentrique). Lors de la phase excentrique,
le muscle activé résiste à une force externe supérieure à la force développée par les unités motrices
engagées.
11. ©Karoly SPY | Innov-Training 11
médullaires, le message douloureux est ensuite transmis aux centres supérieurs [cf. figure 5].
Figure 5 Figure 6
Les douleurs musculaires ressenties durant la partie pédestre vont provoquer une moindre
tolérance aux impacts au sol et une altération du cycle étirement-détente (CED).
La conséquence directe va être une dégradation de la braking-phase [cf. figure 6] associée à une
augmentation du temps de contact du pied au sol et une diminution de l’efficacité du complexe
musculo-tendineux permettant l’accumulation et restitution de l’énergie élastique. Le travail
musculaire lors de la phase de propulsion sera ainsi plus important, ce qui va affaiblir le système
contractile et avoir un effet néfaste sur la production de force (Horita & al, 1996 ; Horita & al,
1999).
On observe également des dommages musculaires à la fin d’un exercice prolongé de type
marathon [cf. figure 7].
Figure 7 - dommages musculaires pré et post marathon
La combinaison de la phase de freinage (excentrique) et de poussée (concentrique) correspond au
cycle étirement-détente (CED). Lors de la phase excentrique (étirement actif) le complexe musculo-
tendineux va accumuler de l’énergie élastique qui sera ensuite restituée pour accroitre l’efficacité de
la phase concentrique.
12. ©Karoly SPY | KS-Training 12
Ces dommages musculaires vont provoquer l’apparition retardée d’une sensation de douleur
diffuse et d’inconfort qu’on désigne sous le terme anglo-saxon de DOMS -Delayed Onset Muscle
Soreness- (Miles & Clarkson, 1994) et qu’on appelle communément des courbatures.
Ces douleurs débutent et s’intensifient dans les 48 heures post-exercice pour disparaître au bout
de 3 à 5 jours.
La période de récupération est généralement de type biphasique, montrant des baisses
fonctionnelles immédiates, suivies d’une récupération partielle ou totale à 2h qui précède de
nouvelles baisses pouvant perdurer plusieurs jours [cf. figure 8].
Figure 8 - baisse de perf max et d'activation maximale
La résorption des dommages musculaires nécessite un processus inflammatoire qui va s’étendre
en 3 phases (Armstrong, 1984) [cf. tableau 2].
Phase Description
Autogénique
Elle correspond aux 3 premières heures post-exercice et constitue un processus
d’auto-dégradation des structures endommagées
Phagocytaire
Elle débute à J+3-4h et s'étend jusqu'à J+48-96h. C'est à ce moment que l'athlète
ressent les plus fortes douleurs. Le siège de la lésion musculaire est envahi par de
nombreux phagocytes.
Régénération
Elle débute à J+4-6 et pourrait persister durant une à plusieurs semaines. Durant
cette phase, il y a une activation des cellules satellites (myoblastes, myotubes) qui va
permettre la réparation des tissus musculaires endommagés.
Tableau 2
L’athlète devra être attentif au fait que la douleur disparaît avant que le muscle ait retrouvé son
intégrité structurale et fonctionnelle. Une reprise progressive après des dommages musculaires
est importante pour ne pas mettre en danger les systèmes musculo-tendineux et articulaires.
Un travail musculaire adéquat, à base de répétitions de mouvements (repeated bout effect), va
permettre d’augmenter le niveau de tension appliqué aux structures musculo-tendineuses afin de
renforcer les muscles et les tendons et ainsi réduire les dommages musculaires (Clarkson & al,
1992). Les adaptations structurales et fonctionnelles pourront également rendre le système
musculo-tendineux plus résistant aux contraintes mécaniques et ainsi optimiser la production et le
13. ©Karoly SPY | Innov-Training 13
transfert de force (Kjaer, 2004).
Par ailleurs, différentes stratégies de récupération peuvent être employées pour traiter des DOMS
(Cheung & al, 2003) :
§ Récupération active immédiate
§ Etirements immédiats à chaud pour enlever certains points de contractures afin de
retrouver une homogénéité fonctionnelle entre les différents sarcomères et fibres
musculaires.
§ Respecter le travail de régénérescence musculaire en évitant les étirements à J+1, J+2 …,
les massages profonds, les footings de récupération et l’utilisation des anti-inflammatoires.
2.2.7 Notion de pacing
Le pacing correspond à la stratégie de gestion de l’effort qui sera la plus efficace et permettra à
l’athlète de dégager la puissance mécanique la plus élevée durant l’ensemble de l’épreuve.
Dans la pratique sportive, on peut distinguer différentes stratégies adoptées par les athlètes [cf.
tableau 3].
Désignation Description
All-out
Elle consiste à être au maximum de ses possibilités sur l’ensemble de l’épreuve. Cette
stratégie est généralement utilisée dans les disciplines explosives (exemple : sprint sur
100m en athlétisme).
Negativ-split
Elle consiste à une augmentation de l’intensité durant l’épreuve. Cette stratégie est
principalement employée par les athlètes de moyenne distance. Le but étant de retarder la
déplétion importante des substrats énergétiques.
Positive-split Elle consiste à une diminution de l’intensité durant l’épreuve. Cette stratégie est appliquée
dans les épreuves de ½ fond court
Equilibrée
Elle consiste à utiliser une intensité constante sur l’ensemble de l’épreuve. Cette stratégie
est principalement utilisée sur des courses ou l’on cherche à battre un record (exemple :
record du monde de l’heure en cyclisme).
Stochastique
Elle consiste à employer une intensité variable sur l’ensemble de l’épreuve. On retrouve
cette stratégie sur des épreuves dont les conditions du parcours sont changeantes
(dénivelé, vent).
Tableau 3
Dans les efforts d’ultra-endurance, il semblerait que les athlètes aient tendance à utiliser la
stratégie en positive split avec une diminution de l’intensité au fur et mesure de l’épreuve.
Abbiss & al (2006) ont étudié la stratégie d’allure employée par des triathlètes durant la partie
cycliste (180 Km) d’un triathlon distance Ironman en les équipant d’un capteur de puissance. Pour
ce faire ils ont analysé les données de puissance, cadence et vitesse sur chaque tour de 60 Km. Ils
ont pu mettre en évidence une diminution progressive de ces 3 paramètres à chaque tour. La
diminution des ces paramètres pourrait être engendrée par une déplétion en glycogène, une
fatigue neuromusculaire et une perception accrue de la fatigue psychologique.
14. ©Karoly SPY | KS-Training 14
En outre, la stratégie d’allure employée durant une épreuve pourrait également être régulée par
un système de contrôle intégratif du cerveau (Ulmer, 1996). D’après ce modèle de
téléoanticipation, l’expérience des exercices effectués antérieurement par l’athlète, la
connaissance de la durée ou de la distance permettrait au cerveau de traiter l’information
provenant des signaux afférents (arrivant au cerveau), via les systèmes périphériques, pour les
comparer et les traiter à partir d’un algorithme décisionnel pour fixer l’allure à adopter en
fonction de la nature de l’exercice (St Clair Gibson & al, 2006). L’intensité de l’exercice serait ainsi
régulée de manière non consciente par une modulation du nombre d’unités motrices recrutées
[cf. figure 4].
Il y aurait également une part consciente dans la régulation de l’intensité durant l’effort (Lambert
& al, 2005) [cf. figure 9].
Figure 9
En effet, l’athlète peut poursuivre l’exercice malgré l’apparition d’un certain degré de fatigue. Par
contre, l’augmentation de la perception de l’effort réduirait l’envie de l’athlète d’évoluer à une
intensité élevée.
Les processus conscients et non-conscients seraient complémentaires pour réguler au mieux
l’intensité durant un effort que ce soit durant les phases d’entraînement ou pendant une
compétition [cf. figure 10].
15. ©Karoly SPY | Innov-Training 15
Figure 10
2.2.8 La spécificité des enchaînement sur la distance Ironman
L’enchaînement vélo-course à pied peut s’avérer être le passage le plus difficile lors d’un triathlon
distance Ironman avec de multiples altérations physiologiques et biomécaniques par rapport à une
situation contrôle de course à pied isolée (Danner et Plowman, 1995 ; Gottschall et Palmer, 2000 ;
Guézennec et coll., 1996 ; Hausswirth et coll., 1996, 1997a ; Hue et coll., 1998 ; Millet et coll., 2000,
2001). On peut observer une augmentation des paramètres suivants :
§ Coût énergétique (CE)
§ VO2max
§ Ventilation
§ Fréquence cardiaque.
Les altérations de performance en course à pied lors d’un triathlon longue distance sont souvent à
mettre en relation avec la fatigue générée par la partie cycliste (Hausswirth et Lehenaff, 2001).
Dans ce contexte, la mise en place d’une stratégie d’allure spécifique lors de la partie cycliste, avec
l’utilisation d’un capteur de puissance, peut s’avérer être payante pour réduire les effets délétères
évoqués précédemment.
Millet & al (2001) mettent également en avant l’importance d’inclure des sessions
d’entraînement à base d’enchaînement spécifique entre les disciplines lors de la préparation afin
de limiter les altérations physiologiques et biomécaniques.
3. Conclusion
La connaissance des spécificités de la discipline est primordiale pour mettre en place une
préparation optimale pour permettre à l’athlète d’atteindre son objectif mais aussi pour réaliser
l’épreuve dans de bonnes conditions et avoir une récupération post-compétition satisfaisante.
La seconde partie de cet article traitera des aspects spécifiques de la préparation et de
l’entraînement.
16. ©Karoly SPY | KS-Training 16
4. Bibliographie
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