SlideShare une entreprise Scribd logo
1  sur  118
Télécharger pour lire hors ligne
Adapté par Dyslexia International asbl
© 2010 Dr Duncan Milne
Apprendre au
cerveau à lire
Dr Duncan Milne
Neuropsychologue
2
Apprendre au cerveau à lire
Préface
Comment le cerveau apprend-il à lire ? Comment apprend-
on à lire à un groupe de cerveaux distincts ou à un
type de cerveau déterminé ? La lecture est un processus
artificiel, pour lequel le cerveau n’a pas été conçu au
départ. Quelles en sont les parties impliquées lors de
ce processus créé par l’homme ? Lors de la lecture, des
images visuelles sont associées à des sons par une
série de connexions dans le cerveau pour ensuite être
transférées dans la partie frontale de l’hémisphère
gauche.
Ce livre expose les éléments de la science neurologique
expliquant la lecture, et examine quelles en sont les
implications pour l’enseignement de celle-ci. Apprendre
au cerveau à lire est un livre destiné aux enseignants, aux
parents et aux spécialistes de la lecture, qui fait appel à
la recherche sur le cerveau pour appuyer la théorie ainsi
que la pratique. Cet ouvrage passe en revue les principaux
développements de la recherche en imagerie cérébrale des
dix dernières années, ainsi que les évolutions parallèles
des théories qui sous-tendent l’enseignement de la lecture
et les meilleures pratiques scolaires.
L’exploration du cerveau permet d’étudier le fabuleux
processus de la lecture. Comment cette capacité se
développe-t-elle ? Comment l’apprentissage modifie-t-il
la façon dont le cerveau est configuré ? Quels sont les
endroits spécifiques du cerveau qui devraient être visés
pour la remédiation à la lecture ou pour un apprentissage
accéléré ? Ce livre explique comment le cerveau développe
des connexions lors de la lecture, et profitera à tous ceux
qui s’intéressent à l’apprentissage de celle-ci, à mesure
qu’ils prendront connaissance des résultats des dernières
recherches sur la capacité du cerveau à lire et à écrire.
Ce texte a été traduit de l’anglais Teaching the brain to read,
adapté au français, et n’inclut pas les éléments pertinents
pour l’anglais uniquement.
La traduction a été réalisée par des étudiants de l’ISTI
(Institut Supérieur de Traducteurs et Interprètes), Bruxelles,
supervisés par Marie-France Baeken.
Conception : Pauline Key-Kairis
3
Apprendre au cerveau à lire
Sommaire
Table des illustrations  5
Introduction  7
La diversité neurologique  16
Les origines du langage  16
La variation symétrique  17
Le paradoxe de la spécialisation pour la lecture  18
Résumé  21
Le cerveau lors de la lecture  23
Modules  24
Le module auditif (avant du cerveau)  24
Le module visuel (arrière du cerveau)  28
Les circuits de lecture  31
Le décodage (le circuit supérieur)  31
L’accès direct (le circuit inférieur)  34
Résumé  37
L’enseignement de la lecture  38
La méthode phonique et la méthode globale  38
Les méthodes phoniques synthétique et
analytique  43
La méthode mixte  46
Résumé  51
L’orthographe et la composition  52
Le rappel direct (le circuit inférieur)  52
L’encodage (le circuit supérieur)  54
L’orthographe inventée  56
La rédaction  59
Résumé  60
4
Apprendre au cerveau à lire
La dyslexie développementale  61
La dyslexie développementale et la dyslexie
acquise  61
La dyslexie développementale et les simples
faiblesses en lecture  63
Les recherches effectuées sur le cerveau des
dyslexiques  67
Résumé  72
Les procédés de lecture  74
Le procédé de lecture dyséidétique  81
Le procédé de lecture dysphonétique  82
Relation de cause à effet  84
Intervention  88
Résumé  93
Conclusion  95
Glossaire  101
Bibliographie  110
5
Apprendre au cerveau à lire
Table des illustrations
1.1	Les personnes illettrées et lettrées
1.2	L’électro-encéphalographie
1.3	L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle
1.4	La méthode multi-sensorielle du « trotteur »
2.1	Les ectopies au microscope
2.2	Le corps calleux hypertrophié
2.3	Les cerveaux symétriques de personnalités douées
2.4	La constellation des « dys » - les apprenants
différents
3.1	Les origines de l’alphabétisme
3.2	Les modules du langage
3.3	La conscience phonologique
3.4	La reconnaissance des symboles
3.5	Le stade logographique
3.6	Le stade phonologique
3.7	Le stade orthographique
3.8	L’accès lexical
3.9	Le lecteur expérimenté
4.1	La méthode phonique et la méthode globale
4.2	Les mots sémantiquement incongrus
4.3	Les méthodes phoniques synthétique et analytique
4.4	 Simulations informatisées des modèles de lecture
4.5	 (L’illustration n’est pas reprise)
4.6	 (L’illustration n’est pas reprise)
4.7	La méthode mixte
4.8	La lecture en groupe au moyen de méthodes
phoniques « avec lettres intégrées dans les mots »
6
Apprendre au cerveau à lire
4.9	Les questions à poser lors de la lecture assistée
5.1	L’orthographe par rappel direct
5.2	L’encodage
5.3	 (L’illustration n’est pas reprise)
5.4	 (L’illustration n’est pas reprise)
5.5	Relecture
6.1	La dyslexie acquise et la dyslexie développementale
6.2	La répartition de la lecture
6.3	Le modèle de décalage entre le QI et les
performances
6.4	La compensation chez les dyslexiques adultes
6.5	Les reconnexions dans le cerveau des dyslexiques
6.6	Le manque de latéralisation lors de la lecture dans
le cerveau d’un	 individu dyslexique
7.1	Les méthodes pour identifier les procédés de
lecture
7.2	Le procédé de lecture dysphonétique
7.3	Le procédé de lecture dyséidétique
7.4	Les variations de la symétrie bêta
7.5	Le déséquilibre audio-visuel
7.6	Les causes de variabilité de lecture
7.7	Les problèmes de lecture - organigramme
7.8	Le transcodage du visuel à l’auditif
7.9	Les lettres amovibles
7.10	Le transcodage de l’auditif au visuel
7.11	Les livres audio
7.12	La boîte aux lettres et les fiches pédagogiques
7.13	Les fiches analogiques
8.1	Les modules du langage
8.2	Le modèle de la méthode mixte
7
Apprendre au cerveau à lire
1
Introduction
Le cerveau humain reste sans aucun doute l’ensemble de
circuits le plus remarquable au monde. Son évolution, qui
a pris des millions d’années, a doté l’homme d’un système
lui permettant d’avoir accès aux informations, de calculer
ou de se rappeler d’un événement. Si le « matériel »
du cerveau a été conçu pour permettre à l’homme de
survivre, son « logiciel » possède des fonctions plus
complexes. Aujourd’hui, la quantité d’informations
disponibles augmente bien plus vite que la capacité du
cerveau à pouvoir l’absorber. Pour suivre ce rythme, pour
apprendre à lire, par exemple, cet organe doit fonctionner
de manière prodigieuse. Le savoir augmente de façon
exponentielle et la lecture reste le meilleur moyen pour
avoir accès à de nouvelles informations.
Grâce à la technologie moderne, les scientifiques
peuvent examiner l’intérieur du cerveau et le voir
fonctionner. Des expériences analysent la façon dont le
cerveau procède dans l’accomplissement de différentes
tâches. L’activité du cerveau lors de la résolution d’un
problème peut être examinée, par exemple. En employant
l’imagerie fonctionnelle pour étudier le cerveau, les
neuroscientifiques parviennent à comprendre en partie
comment le cerveau apprend, en quoi il se distingue et
quelles sont les meilleures conditions à l’apprentissage
(Illustration 1.1). En séparant les composants
indispensables à la lecture, les neuropsychologues
peuvent examiner les moyens les plus efficaces pour
enseigner au cerveau, afin de rendre l’apprentissage
plus rapide et plus aisé. Les spécialistes arrivent aussi à
mettre au point des techniques adaptées aux différences
d’apprentissage, par exemple à celles des apprenants
dyslexiques.
Les processus d’apprentissage tels que la lecture,
l’orthographe et l’écriture, fonctionnent grâce à un circuit
complexe de neurones qui relie des régions de traitement
spécialisées du cerveau. Les circuits du cerveau
intervenant dans la lecture se forment normalement dans
l’hémisphère gauche, dans la mesure où l’on observe une
prédominance dans cet hémisphère pour le langage dans
95 pour cent des cas. Toujours dans cet hémisphère,
8
Apprendre au cerveau à lire
il existe différents centres de traitement ayant des
spécialisations différentes. Ils sont connus parfois sous le
nom de modules et permettent à l’homme d’analyser les
informations provenant de ses sens. Différents modules
du langage de l’hémisphère gauche travaillent ensemble
pour accomplir des tâches telles que la lecture, l’écriture
et l’orthographe.
Alors que l’hémisphère gauche est presque toujours
dominant dans les fonctions du langage, la très grande
majorité des gens écrivent de la main droite. Ceci est
dû aux connexions croisées du cerveau, ce qui donne à
la plupart d’entre nous une meilleure maîtrise du côté
droit de notre corps. Cependant, il existe également
des connexions associées au même côté du corps, qui
permettent à chaque hémisphère d’envoyer des signaux
L’emploi de l’imagerie cérébrale a permis de comparer le
cerveau de personnes illettrées qui ne sont jamais allées à
l’école avec celui de personnes lettrées ayant été scolarisées
(Petersson et al. 2000). On a demandé à chaque participant
de répéter des mots inventés. Alors que les personnes
illettrées trouvaient cette tâche difficile, les personnes lettrées
la trouvaient au contraire assez simple. Dans le cerveau
des personnes scolarisées, il y a un système d’activation
complexe, particulièrement dans l’hémisphère gauche.
D’autre part, les personnes analphabètes présentent une
sous-activation considérable de l’hémisphère gauche. En
d’autres mots, ce sont les enseignants qui programment le
cerveau en mettant les bonnes connexions en place !
Illustration 1.1
Les personnes illettrées et
lettrées
9
Apprendre au cerveau à lire
aux côtés droit et gauche et d’en recevoir. De plus, les
deux hémisphères sont reliés entre eux par un gros
faisceau de fibres nerveuses appelé le corps calleux. Le
corps calleux veille à ce que l’information puisse passer
de gauche à droite et de droite à gauche. La distinction
entre hémisphère gauche et hémisphère droit est, à bien
des égards, une simplification excessive étant donné que
le corps calleux assure un usage des deux hémisphères
comme un tout intégré. On ne peut tout simplement
pas se passer d’un hémisphère. Lors de la lecture ou
de l’écriture, par exemple, nous employons en grande
partie notre hémisphère gauche, mais nous recevons
indéniablement de l’aide de notre hémisphère droit.
Le cerveau humain est constitué de milliards de cellules
cérébrales interconnectées. Le connexionnisme est une
théorie qui permet d’expliquer comment le cerveau
fonctionne et apprend grâce à un nombre presque infini
de connexions pouvant se former entre les cellules
du cerveau. Ce concept explique aussi la façon dont
les modules spécialisés du cerveau communiquent
entre eux. C’est à la fois dans et entre les régions du
cerveau que s’établissent les connexions qui créent une
matrice de traitement de l’information. Ces réseaux de
connexions fournissent des circuits de réaction et un
soutien auxiliaire pour l’apprentissage. Selon la théorie
du connexionnisme, la lecture est un processus d’auto-
apprentissage, c’est-à-dire que dès que le cerveau a
appris à lire un mot, il emploie ce savoir pour lire des
mots nouveaux. Le cerveau repère vite les mots qui
paraissent corrects et ceux qui doivent être vérifiés dans
un dictionnaire. Cette fonction d’auto-apprentissage du
cerveau implique qu’après la mise en place des bons
circuits, le cerveau continue à renforcer ces circuits en les
rendant plus performants. Cela prouve que le système de
lecture est intelligent, et que le cerveau n’aura finalement
plus besoin d’instructions explicites sur la manière de
procéder pour lire. En effet, à ce stade, le cerveau est apte
à apprendre seul.
Les recherches dans le domaine de la lecture se sont
nettement développées ces dernières années. La
méthode la plus communément employée pour l’étude
de la lecture est la recherche comportementale. Cette
méthode consiste à examiner le comportement du lecteur
lorsqu’il exécute plusieurs tâches de lecture, telles
que les tests de reconnaissance des mots, ainsi que de
10
Apprendre au cerveau à lire
perception phonémique et orthographique. La recherche
comportementale ne permet pas de donner directement
des réponses sur le fonctionnement du cerveau, étant
donné que par cette méthode, on ne fait qu’examiner le
produit final de la lecture. Néanmoins, elle permet de
clarifier certaines zones d’ombre sur le fonctionnement
du système de lecture grâce à l’observation de ces
différentes tâches de lecture. En joignant l’imagerie
fonctionnelle du cerveau à ces conclusions importantes, il
est possible de déterminer où et quand ces processus se
produisent.
Il existe de nombreux tests de lecture qui permettent
aux chercheurs de comprendre les points forts et les
points faibles des mécanismes de lecture. Des normes
sont établies à partir de tests standardisés sur un
large échantillon de lecteurs choisis pour représenter
l’ensemble de la population. La plupart de ces tests
de lecture examinent la capacité à lire en comparant
l’aptitude réelle du lecteur à celle qu’il est censé avoir
acquise, compte tenu de son âge. Ces tests permettent
de situer les compétences de lecture d’un enfant par
rapport à celles d’autres enfants du même âge. D’autres
tests comparent la capacité réelle à la capacité attendue
sur la base d’une compétence similaire. Par exemple, on
arrive à prévoir les compétences attendues en lecture
sur la base des capacités orthographiques, parce que la
lecture et l’orthographe sont intimement liées. Lorsqu’une
compétence diverge par rapport aux prévisions, on peut
identifier la combinaison inhabituelle de points forts et
de points faibles et mettre ainsi en place la méthode la
plus appropriée pour apprendre à l’enfant à lire.
Une autre technique de recherche pour l’étude du
processus de lecture est la simulation informatique.
Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer
le mécanisme de la reconnaissance des mots dans
le cerveau. Des simulations informatiques de ces
théories ont été créées pour déterminer la façon dont
le cerveau lit les mots. Les scientifiques peuvent aussi
avoir recours à des manipulations par simulation
informatique pour prédire un mode de lecture parmi
des individus dyslexiques. Pour qu’un modèle théorique
de la lecture soit efficace, il doit pouvoir expliquer les
différents modes de lecture signalés d’un point de vue
comportemental, et la façon dont le cerveau apprend à
lire.
11
Apprendre au cerveau à lire
L’imagerie fonctionnelle cérébrale est devenue depuis
peu une technique courante pour analyser le processus
de lecture. Cette technique peut servir à tester la façon
dont les différents sous-processus impliqués dans la
lecture interagissent au sein du cerveau. Les méthodes
les plus fréquentes sont l’électro-encéphalographie (EEG),
la magnéto-encéphalographie (MEG), la tomographie par
émission de positons (TEP) et l’imagerie pour résonance
magnétique fonctionnelle (IRMf) ; chacune de ces
techniques présente ses avantages et ses inconvénients
pour ce qui est du coût et de la qualité de l’image.
Une question à laquelle les scientifiques ont pu répondre
grâce aux techniques d’imagerie cérébrale est la suivante :
quand se produisent, dans le cerveau, des changements
liés à la lecture ? La résolution temporelle consiste à
savoir quand un changement intervient dans le cerveau,
ce qui permet l’examen de différentes fenêtres de temps
lors de la lecture. Par exemple, l’EEG démontre que l’accès
à un mot dans la base de données du cerveau prend entre
150 et 250 millièmes de seconde après lecture du mot,
alors que la prononciation d’un mot prend un peu plus
de temps, entre 300 et 500 millièmes de seconde après
lecture du mot.
L’EEG mesure les rythmes cérébraux grâce à l’application
d’électrodes sur le cuir chevelu (Illustration 1.2). Les
participants s’asseyent devant un écran d’ordinateur et
effectuent différents tests de lecture auxquels une limite
de temps a été fixée dans la procédure d’enregistrement
de l’EEG. L’EEG parvient à faire la moyenne de centaines
d’essais et à évaluer les réponses du cerveau à différents
types de mots. En variant les types de mots employés
lors des tests, on arrive à influencer les différents sous-
processus de lecture dans le cerveau. Par exemple, l’accès
aux mots très fréquents (comme « je », « que », « et ») est
rapide et direct, alors que l’accès aux mots non porteurs
de sens (comme « quirbeau », « fropème », « borette »)
prend plus de temps, car le cerveau doit décoder le mot
inconnu.
L’inconvénient de l’EEG est sa faible résolution spatiale
par rapport à sa résolution temporelle. La résolution
spatiale permet de pouvoir localiser exactement où ont
lieu les modifications dans le cerveau. La MEG fonctionne
en suivant le même principe que l’EEG, mais elle est
aussi équipée d’un gigantesque aimant qui enregistre en
même temps l’endroit où s’effectuent les changements
12
Apprendre au cerveau à lire
au niveau du cerveau. D’autres chercheurs ont employé
l’EEG dans un scanner IRMf pour obtenir des informations
tant spatiales que temporelles. Un des avantages de la
méthode de l’IRMf est son excellente précision concernant
l’information spatiale. Contrairement à l’EEG, le principe
de l’IRMf est de calculer les zones d’activation en fonction
des modifications du flux sanguin et du taux d’oxygène
(Illustration 1.3). Les chercheurs associent souvent
plusieurs tests pour n’isoler que le processus étudié.
Ainsi, en soustrayant des tâches d’identification de mots
à des tâches d’identification de lettres isolées, on obtient
l’activation des différents sous-composants de la lecture.
Illustration 1.2
L’électro-encéphalographie
Illustration 1.3
L’imagerie par résonance
magnétique fonctionnelle
L’électro-encéphalographie (ou EEG) consiste à appliquer des
électrodes sur le cuir chevelu afin de mesurer les rythmes
cérébraux. Le cuir chevelu est dégagé et on y applique une
solution saline ou du gel pour diminuer l’impédance.
L’EEG mesure les signaux électriques du cerveau qui passent
au travers du crâne. Plus il y aura d’électrodes placées sur
le cuir chevelu, meilleure sera la résolution spatiale. Le
point fort de l’EEG est de pouvoir déterminer quand ont lieu
les changements. L’enregistrement des signaux électriques
montre, au millième de seconde près, le moment où les
différentes réactions interviennent lors de la lecture.
Cette machine est un scanner à imagerie par résonance
magnétique fonctionnelle (IRMf) de l’Institut de Recherche
sur le Cerveau (Brain Research Institute) à Melbourne en
Australie. Si on trouve les IRM dans la plupart des hôpitaux,
cette machine est équipée d’un scanner fonctionnel qui
mesure non seulement la structure (ou la forme) du cerveau,
mais aussi les modifications du flux sanguin et du taux
d’oxygène lorsque le cerveau effectue diverses tâches ou
expériences. Le scanner IRMf n’emploie pas de traceur
radioactif (comme la tomographie par émission de positons),
ce qui rend son utilisation sûre pour les enfants et même pour
les bébés. Cette machine possède un aimant tesla 3, qui est
l’un des plus grands employés sur l’être humain. La tête de
la bobine contient un miroir de sorte qu’aucun mouvement
de la tête n’est nécessaire pour lire l’écran. Différents mots
sont présentés à l’écran, et d’un clic de souris, le participant
répond selon les exigences de la tâche de lecture. De plus, le
scanner enregistre plusieurs états du cerveau au repos pour
ensuite déterminer l’état normal du cerveau.
13
Apprendre au cerveau à lire
L’apprentissage implicite a lieu lorsqu’on apprend
quelque chose sans en avoir conscience. Ce mode
d’apprentissage, une des fonctions primitives du
cerveau, facilite l’apprentissage, car la conscience
n’accapare pas l’intégralité de la fonction cérébrale.
Beaucoup de processus dans le cerveau se passent au
niveau du subconscient, c’est-à-dire sans que l’on en soit
conscient. Quand on lit, par exemple, on ne parcourt
pas le « dictionnaire » de notre cerveau pour reconnaître
chaque mot étant donné que l’information est transmise
inconsciemment. La lecture est un mélange de processus
conscients et subconscients. Les activités conscientes
demandent plus d’énergie car elles font appel à la
mémoire de travail. Au début, nous sommes conscients
de lire, comme lorsque nous apprenons à rouler à vélo ou
à jouer du piano. Toutefois, lorsque nous commençons à
intégrer quelques éléments fondamentaux de lecture, nos
capacités de compréhension se développent dans notre
subconscient. Nous pouvons alors pleinement apprécier
la signification de ce que nous lisons consciemment et
laisser le « côté pratique » à notre subconscient. Cette
capacité à employer le subconscient fait du cerveau
une machine à lire plus rapide et plus précise. Tandis
que notre conscience comprend le sens, on peut porter
notre attention sur d’éventuelles erreurs au niveau du
subconscient, telles que l’accès à un mot faux. Les circuits
de réaction du subconscient détectent les erreurs pour
que des corrections automatiques puissent se faire.
L’apprentissage multi-sensoriel est une méthode
d’enseignement qui fournit des indications implicites
au subconscient. Lorsque les enfants apprennent de
manière implicite, ils découvrent les règles de relation
lettre-son sans s’en rendre compte, ce qui réduit le travail
de traitement conscient lors du décodage et va leur
permettre d’apprendre à lire plus facilement. Par exemple,
l’utilisation de lettres de couleur permet non seulement
d’apprendre plus facilement aux enfants à prononcer
correctement de nouveaux mots, mais son usage est aussi
très ludique. L’effet de création est une autre méthode
d’apprentissage implicite dont le but est de faciliter
l’apprentissage et de le rendre plus amusant, par la
création d’un nouveau mot. L’effet de génération, appelé
souvent « apprendre en faisant », facilite l’apprentissage
en demandant à l’enfant de créer quelque chose. En effet,
les enfants auront par exemple davantage de facilités
14
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 1.4
La méthode multi-sensorielle
du « trotteur »
La méthode multi-sensorielle vise les enfants ayant des
besoins d’apprentissage différents et prévient les difficultés
de lecture. L’apprentissage multi-sensoriel est comparable
à un trotteur dont les trois roues sont les mécanismes
kinesthésiques (tactiles), auditifs et visuels qui aident à
construire les circuits de lecture. Une fois les bons circuits de
lecture mis en place, ces roues peuvent être abandonnées
dans la mesure où le cerveau est totalement apte à apprendre
par lui-même.
15
Apprendre au cerveau à lire
pour apprendre un nouveau mot quand ils l’ont construit
eux-mêmes avec des lettres amovibles. La méthode multi-
sensorielle dans l’acquisition de nouvelles compétences
en lecture peut être comparée à un trotteur. En effet,
une fois ces compétences acquises, le « trotteur multi-
sensoriel » n’aura plus de raison d’être et l’enfant pourra
s’en passer (Illustration 1.4).
Ces dix dernières années, la connaissance du
fonctionnement de la lecture s’est considérablement
développée. Pour la première fois, le comportement
physiologique du cerveau peut être examiné lors du
processus de lecture.
Ce nouveau domaine passionnant de la neuroscience
cognitive permet d’intégrer les résultats des recherches
effectuées dans différentes disciplines comme la
médecine, l’enseignement, la neuropsychologie,
l’informatique et l’imagerie cérébrale. Si on examine la
lecture à travers ces différents domaines, un nouveau
concept apparaît, celui du cerveau comme « machine à
lire ».
16
Apprendre au cerveau à lire
2
La diversité neurologique
L’apprentissage de la lecture fait appel à de nombreuses
connexions complexes dans le cerveau. Il n’existe pas
deux lecteurs qui aient la même configuration de la
zone du cerveau impliquée dans la lecture. En effet, ces
connexions sont propres à chaque individu, tout comme
leurs empreintes digitales. La diversité neurologique
permet d’expliquer pourquoi le cerveau développe sa
propre façon d’apprendre à lire. Certaines personnes
apprennent à lire très vite et peuvent être en avance de
deux ans ou plus sur leurs camarades de classe, d’autres
apprennent à lire difficilement, quels que soient les
efforts qu’elles fournissent.
Les origines du langage
Selon les scientifiques, l’origine du langage remonterait
à deux millions d’années au moins. A l’origine, notre
langage n’était pas oral car la communication se faisait
par gestes. En l’espace de près de deux millions d’années,
le cerveau humain a évolué pour se doter de la capacité
de parole. On estime que la parole s’est développée il y a
150.000 à 250.000 ans, et qu’elle est une fonction innée
du cerveau, à l’instar de la marche ou de la respiration. La
faculté de parler procure à l’homme différents avantages,
en termes de survie, par rapport aux animaux. La
communication orale ne demande pas l’usage des mains,
ce qui permet de concilier travail et communication. Les
mères peuvent parler à leurs enfants tout en utilisant
leurs mains pour s’occuper d’eux. Le langage permet de
communiquer la nuit ou sans se voir. De nos jours, grâce
aux technologies modernes de communication, il est
possible de contacter instantanément des individus aux
quatre coins du monde.
Contrairement à la parole, l’écriture et la lecture sont
des inventions récentes. L’écriture date d’environ
quatre mille ans et, tout comme la télévision ou la
radio, elle a été conçue comme moyen supplémentaire
pour communiquer. L’apprentissage de la lecture et de
l’écriture dans l’enseignement traditionnel existe depuis
encore moins longtemps. Le développement d’un système
17
Apprendre au cerveau à lire
de communication écrite est si récent que le cerveau
n’a pas encore eu le temps d’évoluer et d’acquérir ces
compétences naturellement, étant donné que chaque
personne doit encore apprendre à lire et à écrire.
L’invention de l’écriture a donné naissance à l’opération
cognitive de la lecture, mais vu que la lecture est une
invention récente, celle-ci n’est pas une fonction cérébrale
transmise de manière héréditaire. C’est la raison pour
laquelle la lecture doit être construite sur les systèmes
existants du cerveau, grâce aux modules visuel et auditif.
La lecture est un processus complètement artificiel, et
il faut des années pour l’acquérir entièrement. Il n’est
dès lors pas étonnant que tant d’enfants éprouvent au
départ des difficultés pour apprendre à lire. Néanmoins,
la lecture est importante étant donné qu’elle constitue
un moyen très efficace d’acquisition rapide de nouvelles
informations.
La variation symétrique
La plupart des cerveaux sont asymétriques, car ils
favorisent l’hémisphère gauche, qui est d’ailleurs
l’hémisphère dominant pour la parole. Mais comment le
cerveau développe-t-il cette asymétrie ? Le cerveau fœtal
humain possède beaucoup plus de cellules cérébrales
que le cerveau adulte. Entre le sixième et le neuvième
mois de grossesse, le cerveau fœtal va subir un processus
d’élagage des synapses, au cours duquel les cellules du
cerveau migrent pour former des connexions entre elles.
Celles qui ne parviennent pas à former des connexions
meurent. Par asymétrie de l’hémisphère gauche du
cerveau humain, on entend la formation de connexions
entre les régions de l’hémisphère gauche. Ce processus
est le résultat de l’évolution qui a fait de l’hémisphère
gauche la zone dominante pour le langage. Les processus
liés au langage vont dès lors se former naturellement
dans l’hémisphère gauche, hémisphère qui présente
certains avantages de traitement de ces informations.
Plus tard, cette spécialisation unilatérale facilite
grandement l’apprentissage de la lecture, de l’écriture
et de l’orthographe. Ainsi l’information ne doit pas être
« dupliquée » par chaque hémisphère.
Les mécanismes de l’évolution de l’être humain créent
la diversité de façon aléatoire. Le cerveau peut se
« rebeller » contre le processus de migration des cellules
18
Apprendre au cerveau à lire
par une anomalie appelée « ectopie ». Les ectopies sont
des groupes de cellules cérébrales qui se forment pour
perturber la migration entre le sixième et le neuvième
mois de grossesse, réduisant ainsi le développement
d’une asymétrie en faveur de l’hémisphère gauche
(Illustration 2.1). Cette perturbation entraînera la mort de
moins de cellules, ainsi que la formation de connexions
anormales.
On a recours à la recherche animale pour examiner les
effets des ectopies sur le développement du cerveau
fœtal. Si la migration des cellules du cerveau fœtal
chez les rongeurs est interrompue à la suite de lésions
microscopiques, des connexions anormales se forment
alors avec d’autres régions du cerveau. Par exemple,
si l’hémisphère gauche est perturbé, des connexions
supplémentaires se forment dans l’hémisphère droit.
Certains animaux développent naturellement des
différences neurologiques. Environ la moitié des souris
brunes de Nouvelle-Zélande développent des ectopies,
ce qui entraîne de nouvelles connexions et induit des
différences dans la perception spatiale.
Le paradoxe de la spécialisation pour la
lecture
La découverte d’ectopies explique la façon dont les
gènes de chaque personne peuvent modifier le degré
d’asymétrie du cerveau et par conséquent affecter
l’apprentissage de la lecture. Les différences de symétrie
peuvent donc avoir des effets sur la connectivité inter- et
intra-hémisphérique, ce qui entraîne des différences de
fonctionnement au cours de la lecture (Illustration 2.2).
Illustration 2.1
Les ectopies au microscope
Illustration 2.2
Le corps calleux hypertrophié
De minuscules ectopies perturbent le processus de migration
des neurones du cerveau, occasionnant des différences de
connectivité, de réseau cérébral et de symétrie entre les
hémisphères.
Les ectopies créent des symétries dans le cerveau. Les
cerveaux symétriques peuvent présenter une hypertrophie
au niveau du corps calleux, c’est-à-dire le faisceau de nerfs
qui relie les deux hémisphères, ce qui génère des différences
dans le traitement inter-hémisphérique.
19
Apprendre au cerveau à lire
Cette perturbation n’aurait posé aucun problème à l’ère
de la chasse et de la cueillette, étant donné que la lecture
n’existait pas encore. À cette époque (pré-lecture), le
cerveau symétrique permettait aux tribus de concevoir les
choses différemment (comme employer un boomerang
alors que tout le monde possédait une lance). Des
activités, telles que la création de nouvelles armes pour
la chasse ou de nouveaux outils pour l’agriculture, ont
sans doute nécessité le développement d’un cerveau plus
symétrique pour penser différemment ; voilà pourquoi la
diversité neurologique constitue une part importante de
l’évolution. Il est primordial d’avoir différentes façons
d’appréhender un problème au sein d’un groupe. Par la
présence de cerveaux symétriques et asymétriques dans
un même groupe, les synergies entraînent une meilleure
résolution des problèmes. Des cas anecdotiques attirent
l’attention sur une longue liste de scientifiques dotés
de grandes capacités créatrices, en dépit des difficultés
qu’ils ont rencontrées pour apprendre à lire. Ils ont
contribué à la société en pensant différemment et en
mettant au point de nouveaux savoir-faire. Parmi ces
personnes connues qui ont éprouvé des difficultés pour
apprendre à lire, on peut citer Léonard de Vinci, Albert
Einstein, Thomas Edison et Winston Churchill (Illustration
2.3). Il est intéressant de noter que, après avoir surmonté
des difficultés d’apprentissage, Michael Faraday, James
Maxwell et Nikola Tesla ont chacun contribué à découvrir
les principes mathématiques sur lesquels repose
l’imagerie cérébrale.
La diversité est essentielle pour l’évolution, dans la
mesure où elle permet de développer de meilleures
compétences pour résoudre des problèmes. Les
êtres humains travaillent généralement en groupe et
communiquent avec les autres dans leur environnement.
Grâce à la diversité des types de cerveau, de nouvelles
idées peuvent être discutées, débattues et conçues selon
différents points de vue et différents angles. Dans une
classe, il existe habituellement des groupes d’enfants
aux capacités multiples, non seulement en termes de
vécu, mais aussi en termes de diversité neurologique.
Certains enfants ont des problèmes de lecture (dyslexie),
d’autres de coordination (dyspraxie), et d’autres encore
d’écriture (dysgraphie). D’autres enfin ont des problèmes
de concentration (TDAH, c’est-à-dire trouble déficitaire
de l’attention avec hyperactivité), de communication
Illustration 2.3
Les cerveaux symétriques de
personnalités douées.
Certaines célébrités ont eu
beaucoup du mal à apprendre
à lire, comme Léonard de Vinci,
Einstein, Edison et Churchill
(West, 1997).
20
Apprendre au cerveau à lire
verbale (dysphasie), d’orthographe (dysorthographie)
ou de mathématiques (dyscalculie). Tous ces problèmes
sont à bien des égards créés par l’homme. En effet,
ces difficultés spécifiques ont pour cause la diversité
neurologique, qui au départ fut conçue pour aider à la
résolution de problèmes au sein d’un groupe, et non pas
pour créer des difficultés d’apprentissage. Ainsi, bien des
différences d’apprentissage découlent d’un mécanisme
d’évolution conçu pour accroître la diversité.
Illustration 2.4
La constellation des «  dys »
Il existe un grand nombre de
difficultés d’apprentissage qui
forme une constellation (Habib,
2003b). Les scientifiques
reconnaissent aujourd’hui
que tous ces troubles sont
distincts, bien que des liens
entre ces éléments de la
constellation soient courants.
La constellation des « dys » est
très paradoxale : le point faible
de l’un peut être le point fort
de l’autre.
Le concept de la constellation des « dys » décrit par
Habib (2003b) est utilisé pour caractériser différentes
difficultés d’apprentissage et leurs relations (Illustration
2.4). Cette constellation est loin d’avoir livré tous ses
secrets et nombre d’éléments la constituant ne sont
considérés que depuis peu comme des troubles distincts.
Les chercheurs travaillant dans ce domaine parlent de ces
nouvelles typologies en utilisant l’expression « nouvelle
neuropsychologie ». Toute une série de questions,
actuellement à l’état de projets de recherche, sont en
attente d’être résolues par des expériences.
Les différentes « étoiles » formant la constellation des
« dys » sont les suivantes :
–	La dyslexie est un trouble affectant la capacité à
acquérir les aptitudes pour la lecture. Les dyslexiques
peuvent avoir du mal à prononcer des mots ou lire les
mots dans leur forme globale.
–	La dyscalculie est un trouble qui affecte la capacité à
acquérir des aptitudes arithmétiques. Les personnes
21
Apprendre au cerveau à lire
atteintes de dyscalculie peuvent avoir des difficultés à
lire l’heure, à calculer ou à mesurer.
–	La dysgraphie est un trouble qui affecte la capacité
à acquérir les aptitudes pour écrire. Les personnes
atteintes de dysgraphie n’ont pas une bonne
coordination motrice, en particulier lorsqu’il s’agit de
former des lettres.
–	La dysorthographie est un trouble qui affecte la
capacité à assimiler les règles orthographiques. Les
personnes souffrant de dysorthographie ont des
problèmes pour se rappeler les mots au moyen de leur
mémoire visuelle.
–	La dyspraxie est un trouble qui affecte l’apprentissage
et l’équilibre moteur. Les personnes atteintes de
dyspraxie ont des problèmes de coordination, et
parfois même des problèmes de coordination œil/main.
–	La dysphasie est un trouble qui affecte le
développement du langage oral. Les personnes
souffrant de cette pathologie éprouvent des difficultés
à trouver les bons mots pour s’exprimer.
–	Le TDAH, ou trouble déficitaire de l’attention avec
hyperactivité, est un trouble affectant l’attention. Les
enfants atteints de TDAH sont souvent impulsifs et
n’arrivent pas à maintenir leur concentration.
Pour enseigner à des individus dont les connexions du
cerveau sont différentes, il faut les encourager de manière
positive afin d’établir un climat propice à la confiance et à
la motivation. Apprendre est un plaisir, mais l’échec peut
être traumatisant. Les enfants aux capacités contrastées
se demandent pourquoi ils excellent dans certains
domaines et non dans d’autres. Il faut alors leur expliquer
que le cerveau n’a jamais été conçu pour lire et que nous
avons tous nos forces et nos faiblesses.
Résumé
La diversité neurolinguistique a marqué l’évolution des
êtres humains. Elle constitue un aspect essentiel de
l’évolution car plus il y a de cerveaux différents, meilleure
sera la résolution de problèmes au sein d’un groupe. La
diversité neurologique signifie que certaines personnes
ont un réseau de connexions dans leur cerveau différent
de celui des autres, ce qui leur apporte des avantages
potentiels en termes de créativité, d’idées originales, et de
22
Apprendre au cerveau à lire
résolution de problèmes visuels et spatiaux. L’ironie de la
chose est que ces avantages peuvent exister au détriment
de la lecture. Il n’en reste pas moins qu’avec une
instruction, une prévention et une motivation adéquates,
chaque enfant peut apprendre à lire. En agissant de la
sorte, les enfants peuvent apprendre à tirer profit de
leurs talents dans le monde lettré qui est le nôtre.
23
Apprendre au cerveau à lire
3
Le cerveau lors de la lecture
Lors de la lecture, nous activons un circuit complexe de
régions et de connexions spécialisées dans le cerveau.
L’architecture de neurones responsable de la lecture
détermine quelles sont les parties du cerveau qui
seront employées pour les différentes composantes
du processus de lecture. Au fil du temps, l’homme a
développé différents modules (zones de traitement),
capables de traiter les informations provenant de diverses
modalités, telles que les images ou les sons. C’est en
fonction de son environnement que l’homme a appris
à développer des liens et circuits entre ces modules,
afin que puissent s’établir des connexions pour lire
efficacement (Illustration 3.1). Les bases de la lecture sont
les modules à partir desquels les circuits de lecture se
forment. Ces circuits de lecture et ces connexions entre
les modules aident à comprendre comment le cerveau lit
les mots.
Il y a deux millions d’années, ni la lecture, ni la parole
n’existaient. La communication se faisait alors par gestes.
Il a fallu près de deux millions d’années au cerveau pour
développer la parole, qui est considérée comme une capacité
innée, à l’instar de la marche et de la respiration. Il y a à
peine 4.000 ans que l’homme a inventé l’écriture, et que
l’opération cognitive de la lecture a donc vu le jour. Mais
4.000 ans n’ont pas suffi au cerveau pour développer des
processus de lecture. C’est pourquoi le cerveau doit employer
des mécanismes plus anciens, les modules visuel et auditif,
et les relier à l’aide de circuits de lecture. Il faut apprendre
à établir ces liens étant donné qu’ils ne se développent pas
naturellement comme le langage. Dans le monde lettré qui
est le nôtre, le cerveau a besoin de former des circuits de
lecture afin qu’il puisse rapidement acquérir de nouvelles
informations.
Illustration 3.1
Les origines de l’alphabétisme
24
Apprendre au cerveau à lire
Modules
Lors de la lecture, le cerveau mobilise deux modules
importants :
1	Un module auditif à l’avant du cerveau, chargé du
traitement de la parole ;
2	Un module visuel à l’arrière du cerveau, chargé de
l’accès aux images visuelles.
Les modules sont des régions du cerveau qui ont
développé des spécialisations pour le traitement
d’informations provenant de modalités différentes
(Illustration 3.2). Les modules auditif et visuel de lecture
sont eux-mêmes composés de mécanismes sous-traitants,
spécialisés dans différents domaines : les sons et les
prononciations dans le module auditif, les lettres et les
mots dans le module visuel.
Le module auditif (avant du cerveau)
Le module auditif à l’avant du cerveau est le siège de deux
sous-composants que l’on emploie lors de la lecture : les
prononciations et les phonèmes.
Les prononciations
Les prononciations des mots que nous apprenons
au cours de notre vie sont stockées dans le module
auditif, à l’avant du cerveau. La fluence verbale est une
mesure du nombre de mots de la langue parlée qu’un
enfant connaît, reconnaît et emploie. En outre, le fait de
posséder une certaine fluence verbale est une condition
importante pour apprendre à lire, puisque la parole est
la résultante que nous produisons au cours de la lecture.
Pour que des connexions puissent se faire entre les
prononciations et les formes globales des mots, il faut
que les prononciations soient déjà présentes. Les enfants
développent naturellement une certaine fluence verbale
au travers de leur exposition constante à des mots de
vocabulaire nouveaux, étant donné que la parole est
une compétence naturelle, alors que la lecture ne l’est
pas. Les parents et les enseignants ont la responsabilité
d’expliquer le sens des mots que les enfants ne
connaissent pas et devraient les encourager à employer
des mots nouveaux. Toute forme de communication
aux enfants, y compris la lecture d’histoires, les aide à
25
Apprendre au cerveau à lire
Il y a deux modules dans le cerveau qui forment les bases
de construction des circuits de lecture. À l’avant du cerveau,
on trouve le module auditif, responsable de la conscience
phonémique, qui est le siège de deux sous-composants : la
zone de prononciations, qui comporte tous les mots que nous
pouvons prononcer, et la zone des phonèmes, qui comporte
les petites unités de sons qui composent les mots. La
conscience phonémique se développe lorsqu’on apprend que
les mots de la langue parlée sont composés de petites unités
de sons que l’on peut manipuler pour former de nouveaux
mots. À l’arrière du cerveau, on trouve le module visuel,
responsable de la conscience graphémique, qui est le siège
de deux sous-composants : une zone de formes de mots, qui
comporte des images de mots entiers, et une zone de formes
de lettres, qui comporte les formes des lettres. La conscience
graphémique se développe lorsqu’on comprend que les mots
sont composés de différentes combinaisons de formes de
lettres.
Illustration 3.2
Les modules du langage
26
Apprendre au cerveau à lire
développer une certaine fluence verbale dans le module
auditif.
Les phonèmes
À l’avant du cerveau, il existe aussi un sous-composant
des phonèmes dans le module auditif, comportant
des représentations d’unités de son plus petites que
la prononciation des mots entiers. Quand les enfants
ont acquis la conscience phonémique, ils sont capables
de découper les prononciations des mots en unités
phonémiques de son dans le module auditif. Ils
comprennent ainsi que les mots de la langue parlée sont
composés d’unités de son plus petites qui peuvent être à
leur tour manipulées. Ils prennent aussi conscience des
différentes unités de son. La plus grande unité de son
dans un mot est la syllabe (p. ex. municipal :
/mu/-/ni/-/ci/-/pal/), suivie au niveau sous-syllabique par
l’unité d’attaque / rime (p.ex. pomme :  /p/-/om/ ). La plus
petite unité est le phonème (par ex. pomme : /p/‑/o/‑/m/).
Alors que la conscience phonémique est spécifique
aux unités phonémiques individuelles ( /p/‑/o/‑/m/ ), la
conscience phonologique concerne également de plus
grandes unités de son dans les mots ( /p/‑/om/ ou
/mu/‑/ni/‑/ci/‑/pal/ ). Le développement de la conscience
des sons dans les mots est une condition préalable pour
apprendre à lire puisqu’elle nous prépare à découper
et à prononcer des mots (décodage). La conscience
phonémique est, en soi, un très bon indice pour prédire
les habiletés ultérieures de lecture.
Comment enseigne-t-on la conscience phonémique
à l’avant du cerveau ? L’emploi de jeux et d’activités
ludiques constitue l’une des stratégies les plus efficaces
pour développer la conscience phonémique. Des groupes
d’images ou d’objets peuvent être utilisés dans un jeu
de devinettes dans lequel on demande aux enfants
d’identifier une image dont ils connaissent le son initial,
par exemple l’image d’une balle, en leur disant : « je
cherche quelque chose qui commence par le son  / b / ».
Ce jeu de devinette permet aux enfants de comprendre
que les mots sont composés d’unités de son, et leur
apprend à isoler ces mêmes unités de son dans les
mots. Les comptines constituent un excellent moyen de
commencer à développer la conscience phonologique,
grâce à leur répétition, leur rythme et leurs rimes. Les
enfants entendent continuellement les mêmes sons dans
27
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 3.3
La conscience phonologique
les mots qui constituent les comptines. Les jeux de rimes
permettent aux enfants de comparer les sons de mots
qui désignent des images afin de trouver quelles images
partagent les mêmes sons. Les enfants ne doivent pas
nécessairement avoir complètement assimilé une unité de
son avant de se familiariser avec une autre (Illustration
3.3). Au début, les enfants auront probablement plus de
facilité à acquérir des unités de son plus larges, étant
donné que les unités phonémiques plus petites sont
Il existe six opérations principales de conscience phonémique
que l’on peut utiliser pour manipuler les sons des mots :
« faire correspondre » (est-ce que « faire » et « fatigué »
commencent par le même son ?), « isoler » (quel est le son du
milieu dans « tir » ?), « substituer » (remplace le son /m/ dans
« manger » par le son /r/), « assembler » (assemble ces sons :
/l/, /a/, /k/), « segmenter » (sépare les sons dans « lac ») et
« supprimer » (dis « plier » sans le son /p/). On distingue aussi
différentes unités de son que l’on peut identifier et manipuler
(Goswami, 2003). La plus grande unité de son est la syllabe,
suivie au niveau sous-syllabique par l’unité d’attaque/rime. La
plus petite unité de son est le phonème. Lorsque les enfants
peuvent effectuer ces diverses opérations de manipulation
des unités de son, ils prennent conscience des unités
phonologiques.
28
Apprendre au cerveau à lire
plus difficiles à isoler. Les enfants peuvent développer la
conscience syllabique en frappant dans les mains pour
chaque syllabe du mot, par exemple en frappant dans les
mains trois fois pour le mot « crocodile » (« cro / co / dile »).
Toutes ces activités contribuent au développement du
module auditif, à l’avant du cerveau.
Le module visuel (arrière du cerveau)
Le module visuel à l’arrière du cerveau est le siège de
deux sous-composants utilisés lors de la lecture : la
reconnaissance de la forme des mots et l’identification de
la forme des lettres.
La reconnaissance des mots
La zone de reconnaissance des mots dans le module
visuel sert à reconnaître les formes des mots entiers. Au
cours du développement normal, les enfants commencent
par reconnaître des symboles. Par exemple, en voyant
les arches jaunes de la marque McDonalds, ils disent
« McDonalds ». Leur cerveau active la forme visuelle des
arches jaunes dans le module visuel à l’arrière du cerveau,
et transmet ces informations au sous-composant de
prononciation à l’avant du cerveau (Illustration 3.4).
Les enfants peuvent également reconnaître des mots
simples tels que le STOP des panneaux de signalisation,
sans qu’on leur ait appris au préalable à quels sons les
lettres correspondent. Lors de ce type de lecture, appelé
stade logographique, l’apprenant se souvient de mots
grâce à leurs caractéristiques visuelles (Illustration 3.5).
Ainsi, le mot moto, dont les deux « o » ressemblent à des
roues, permet aux enfants d’identifier le mot rien qu’à ses
caractéristiques visuelles. Des jeux de rime, ainsi que des
fiches peuvent être utilisés pour familiariser les enfants
aux formes globales des mots dans le but d’établir et
d’enrichir le module de la forme visuelle des mots. En
effet, les mots les plus fréquents peuvent être présentés
sur des cartes (aimantées) de telle manière que leur
contour global soit mis en évidence. De cette manière, le
contour global du mot facilite sa reconnaissance précoce.
L’identification des lettres
Le sous-composant d’identification des lettres dans le
module visuel est spécialisé dans l’identification les
29
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 3.4
La reconnaissance des
symboles
Avant que les enfants n’apprennent à lire, ils commencent
par reconnaître des objets ou des mots familiers. Par
exemple, en voyant les arches jaunes de McDonalds, ils
diront « McDonalds ». Dans ce cas, ils accèdent à la forme
complète de l’image dans le module visuel, et l’associent à
la prononciation dans le sous-composant de prononciation
du module auditif. Cette étape logographique précoce est un
précurseur au développement du circuit inférieur de lecture.
lettres de l’alphabet. On note parfois des inversions
de lettres chez les enfants qui commencent à écrire
les lettres, car leur cerveau effectue un traitement
spatial pour apprendre la forme correcte des lettres. Le
C’est lors du stade logographique que les enfants
apprennent à reconnaître des mots simples, sur la base de
leur contour global. Par exemple, les enfants apprennent
le mot « moto » en se rappelant que les deux « o »
représentent les deux roues. Cet apprentissage direct peut
se produire préalablement à toute instruction concernant les
correspondances entre lettres et sons. En fait, le cerveau
mémorise plutôt les mots entiers et les identifie directement.
Illustration 3.5
Le stade logographique
30
Apprendre au cerveau à lire
traitement spatial implique une bonne compréhension
des propriétés physiques des lettres dans l’espace. Une
manière d’exploiter ce traitement spatial est l’approche
kinesthésique. La présentation de lettres en papier de
verre permet aux enfants de sentir la forme des lettres
et de les visualiser. En plaçant une feuille de papier sur
une lettre en papier de verre, les enfants peuvent tracer
la forme de la lettre eux-mêmes avant d’avoir vraiment
développé des compétences à l’écrit. Ils peuvent utiliser
de la pâte à modeler pour construire les formes des
lettres. De grandes lettres découpées dans du carton
permettent également de sentir les formes des lettres,
de les visualiser et d’en tracer les éléments. Une autre
activité ludique consiste à coller des objets ou des images
qui commencent tous ou toutes par la même lettre sur
une grande forme en carton correspondant à cette lettre.
On peut ainsi montrer aux enfants des exemples de
mots pour leur montrer que ceux-ci sont composés de
lettres. On appelle conscience graphémique la capacité à
identifier les formes des lettres et à ensuite reconnaître la
forme globale des mots.
Les parents et les enseignants demandent souvent
conseil pour préparer au mieux les enfants à lire. Bien
qu’il n’y ait pas de façon naturelle pour enseigner la
lecture, étant donné que celle-ci demeure un processus
artificiel, les bases de la lecture devraient être enseignées
de manière à correspondre au développement naturel
de l’enfant. La majeure partie de ce travail préparatoire
pour enseigner la lecture peut se faire à l’aide de jeux
et d’activités ludiques. Pour préparer le cerveau à lire, il
faut activer deux modules importants: le module auditif
et le module visuel. Lorsque les enfants apprennent
que la langue parlée est faite d’unités de sons plus
petites, ils développent la conscience phonémique
dans le module auditif ; et lorsque les enfants prennent
conscience du fait que les mots écrits sont constitués
de lettres, ils développent la conscience graphémique
dans le module visuel. À ce stade, le cerveau est prêt à
commencer à développer les circuits de lecture entre ces
modules, circuits qui formeront la base de leurs habiletés
ultérieures de lecture.
31
Apprendre au cerveau à lire
Les circuits de lecture
Cet ouvrage aborde le processus d’acquisition de la
lecture en se basant sur le modèle neurologique cognitif,
selon lequel la lecture est une opération cognitive
complexe ayant lieu dans le cerveau, et qui doit être
apprise explicitement. Lors de la lecture, l’information
est transférée du module visuel à l’arrière du cerveau au
module auditif à l’avant du cerveau. La lecture passe par
la perception visuelle du mot à l’arrière du cerveau et
relie ensuite cette information aux sons correspondants à
l’avant du cerveau.
Au sein de ce flux directionnel d’informations, deux
circuits principaux permettent de lire des mots : un circuit
supérieur et un circuit inférieur.
Le décodage (le circuit supérieur)
Le circuit supérieur permet de décoder et de prononcer
les mots. Le terme scientifique utilisé pour désigner
ce processus est la « conversion des graphèmes en
phonèmes ». Le circuit supérieur prend naissance
à l’arrière du cerveau dans le sous-composant
d’identification des lettres du module visuel. Après
avoir analysé les lettres d’un mot et leurs positions
respectives, l’information est transmise par ce circuit
supérieur au sous-composant des phonèmes du module
auditif à l’avant du cerveau (Illustration 3.6). Pour que
le mot puisse être décodé, chaque lettre est associée au
son correspondant. Ce circuit se développe au cours de
l’apprentissage des correspondances entre les graphèmes
et les phonèmes (méthodes phoniques).
La formation du circuit supérieur dans le cerveau fournit
un nouveau mécanisme pour lire des mots inconnus
(Illustrations 3.7 et 3.8). Au lieu de deviner les mots sur
la base d’indices picturaux, on peut décoder les mots
en déterminant la prononciation la plus probable. Le
circuit supérieur permet de décoder un mot inconnu sur
la base de la connaissance des relations entre lettres et
sons. Étant donné que la plupart des mots sont nouveaux
quand on apprend à lire, le circuit supérieur est un outil
très puissant permettant d’apprendre des mots nouveaux
puisqu’il nous aide à déchiffrer le code phonologique.
32
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 3.6
Le stade phonologique
Essayez de lire le mot grec kαλησπέρα. Vous éprouverez des
difficultés à décoder ce mot, à moins que vous ne sachiez que
la lettre ρ se prononce /r/ en grec. Une fois que les lettres
et que leurs sons correspondants sont appris, on peut alors
associer les formes des lettres aux phonèmes. C’est alors
que l’on emploie la conscience phonémique pour assembler
ces sons de manière à prononcer /kalispera/, ce qui signifie
« bonne après-midi » en grec.
Le sous-composant des phonèmes à l’avant du cerveau
n’est pas seulement spécialisé dans la reconnaissance des
unités de son dans les mots, mais il permet également de
manipuler les sons. La manipulation des sons se définit
comme la capacité à traiter les petites unités de sons au
sein des mots. Différentes manipulations correspondent à
différentes opérations de conscience phonologique. Bien
que l’on puisse enseigner ces opérations exclusivement
par la manipulation des son, elles sont souvent plus
faciles à acquérir à l’aide du support visuel des lettres.
33
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 3.7
Le stade orthographique
En lisant le mot « lac » pour la première fois, nous ne
disposons pas d’entrée pour ce mot dans la zone de
reconnaissance des formes des mots du module visuel à
l’arrière du cerveau. Dès lors, nous prononçons ce mot en
employant le circuit supérieur qui fait correspondre les formes
des lettres aux phonèmes. La conscience phonémique nous
permet d’assembler les sons pour prononcer le mot. Dès
l’instant où l’on peut voir et entendre le mot simultanément,
le cerveau l’enregistre dans sa globalité, créant ainsi une
entrée dans le sous-composant de la forme du mot dans
le module visuel, qui est relié au sous-composant de la
prononciation dans le module auditif à l’avant du cerveau. Ce
processus de mémorisation de la forme globale d’un mot est
appelé lexicalisation.
Les enfants peuvent alors constater que la manipulation
des lettres induit la manipulation des sons. Ceci constitue
la base du développement des habiletés de décodage et
de la mise en place du circuit supérieur de lecture dans le
cerveau.
34
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 3.8
L’accès lexical
Lorsque nous voyons le mot « lac » et que nous connaissons
ce mot, nous avons automatiquement accès à celui-ci dans
le sous-composant de la forme des mots de notre module
visuel. Le circuit inférieur se connecte rapidement au sous-
composant de la prononciation dans le module auditif, ce qui
nous permet de prononcer ce mot.
L’accès direct (le circuit inférieur)
C’est lorsque les enfants reconnaissent des symboles
(tels que les arches jaunes de McDonalds) ou des mots
simples en se fondant sur leurs caractéristiques visuelles
globales (tels que le mot « moto ») qu’ils s’apprêtent à lire.
Dans les exemples ci-dessus, les enfants ont directement
accès au sous-composant de la prononciation dans le
module auditif. Le circuit inférieur de lecture va du sous-
composant de la reconnaissance du mot dans le module
visuel à l’arrière du cerveau au sous-composant de la
prononciation du mot (sortie vocale) dans le module
35
Apprendre au cerveau à lire
auditif à l’avant du cerveau. Ainsi, aucune connaissance
des lettres, ni des relations entre les lettres et les sons,
n’est utilisée pour lire les mots à ce stade logographique
précoce.
Une fois que le circuit supérieur de lecture s’est
développé et que les mots nouveaux peuvent être
décodés, le cerveau peut alors enregistrer un mot
directement dans sa globalité pour stocker sa forme
visuelle associée à sa prononciation dans le circuit
inférieur. Ainsi, il existe deux façons de créer une
représentation du mot dans la banque de mots du
cerveau, située dans le circuit inférieur. La première est
l’apprentissage direct à partir de la signification ou de
l’association d’une image sans la décoder. C’est le cas
pour l’enfant qui apprend le mot moto en fonction de
ses caractéristiques visuelles globales. La seconde est
l’apprentissage par décodage qui a lieu dans le circuit
supérieur où le mot est décodé, ce qui permet d’établir
une correspondance entre l’identification de la forme du
mot et sa prononciation.
À l’âge adulte, les circuits de lecture supérieur et
inférieur sont censés être complètement développés.
Lors de la lecture, le circuit inférieur est aux commandes,
permettant ainsi d’accéder directement à la banque de
mots du cerveau. Les lecteurs expérimentés disposent
d’une connaissance étendue des mots. Leur circuit
inférieur accède directement à la plupart des mots qu’ils
lisent. Grâce à sa rapidité et à sa précision, ce circuit est
le plus efficace. Le lecteur ne doit pas décoder chaque
mot, vu que cela lui prendrait trop de temps ; d’ailleurs,
ce ne serait d’aucune utilité puisque ces mots sont déjà
présents dans sa banque de mots. C’est seulement au
moment où l’on rencontre un mot qu’on ne connaît pas
qu’on dépend du circuit supérieur pour le décoder. Des
expériences scientifiques ont démontré que le circuit
inférieur fonctionne beaucoup plus rapidement que le
circuit supérieur et que le circuit inférieur se renforce
au fil du temps. Cependant, le circuit supérieur est
nécessaire pour lire des pseudo-mots dépourvus de sens
(comme « grovibe ») étant donné que ces mots ne sont pas
stockés dans la banque de mots du circuit inférieur et
doivent donc être décodés (Illustration 3.9).
36
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 3.9
Le lecteur expérimenté
Le lecteur expérimenté se sert essentiellement du circuit
inférieur pour lire les mots, car ce circuit est rapide et
efficace. Le circuit inférieur accède aux mots en l’espace
de 150 à 250 millièmes de seconde après la lecture. Ce
circuit est donc bien plus rapide que le circuit supérieur qui
accède aux mots dans un délai de 300 à 500 millièmes de
seconde après la lecture. La recherche en imagerie cérébrale
a démontré que le circuit inférieur montre des réseaux
d’activations plus forts pour les mots connus que pour les
mots inconnus, et que l’activation dans le circuit inférieur
augmente avec l’âge à mesure que l’on apprend plus de mots
(Pugh et al., 2000). Le circuit supérieur joue encore un rôle
important dans le décodage de mots inconnus et présente un
réseau d’activations plus fort pour les mots inconnus que pour
les mots connus.
37
Apprendre au cerveau à lire
Résumé
Les modules visuel et auditif du cerveau humain sont
connectés par deux circuits. On a directement accès aux
mots connus à l’aide du circuit inférieur où se trouve
la banque de mots du cerveau. Le circuit inférieur relie
la forme visuelle des mots à l’arrière du cerveau aux
prononciations (sortie vocale) à l’avant du cerveau. Les
mots qui ne peuvent être reconnus sont traités par le
circuit inférieur, qui détermine la prononciation la plus
probable. Le circuit supérieur se charge du décodage, en
associant l’identification des lettres à l’arrière du cerveau
aux phonèmes du module auditif à l’avant du cerveau.
C’est dans ce module que les sons sont assemblés pour
produire la prononciation du mot. Cette information est
ensuite renvoyée au circuit inférieur afin qu’une nouvelle
entrée dans la banque de mots du cerveau puisse être
créée. Ainsi, dès que l’on revoit ce mot, le circuit inférieur
peut y accéder directement.
38
Apprendre au cerveau à lire
4
L’enseignement de la lecture
Les pédagogues ont développé différentes méthodes pour
apprendre à lire au cerveau sur la base d’observations
et, depuis peu, des conseils fournis par la recherche
pédagogique. À l’aide de l’imagerie cérébrale, les
neuroscientifiques arrivent aujourd’hui à examiner
directement la façon dont l’enseignement de la lecture
peut influencer le développement de l’apprentissage de
la lecture dans le cerveau. Ils parviennent aussi à isoler
les composants du système de lecture pour envisager les
méthodes d’apprentissage de la lecture les plus efficaces.
Quand on apprend de nouveaux mots, soit le circuit
inférieur, soit le circuit supérieur du cerveau peut être
employé. Pour lire des mots nouveaux isolés, la méthode
la plus efficace est le décodage des mots par le circuit
supérieur. Néanmoins, le circuit inférieur joue un rôle
important dans le décodage de nouveaux mots selon
le sens ou le contexte. Le cerveau emploie souvent une
combinaison de ces deux circuits, ce qui implique un
décodage partiel pour trouver un mot qui corresponde
au sens de la phrase ainsi qu’aux relations entre lettres et
sons du mot.
La méthode phonique et la méthode
globale
Il existe deux méthodes principales pour enseigner la
lecture. La première est la méthode phonique dont le but
est d’apprendre aux enfants à reconnaître les sons et les
lettres individuelles. L’autre est la méthode globale dont
le but est d’enseigner aux enfants à reconnaître la forme
globale des mots dans un contexte de sens. Ces deux
méthodes d’apprentissage visent différents circuits du
cerveau (Illustration 4.1).
L’instruction phonique stimule le circuit supérieur
du cerveau. Ce circuit traite les formes des lettres
individuelles à l’arrière du cerveau et les relie aux sons
correspondants à l’avant du cerveau. La méthode globale
active le circuit de lecture inférieur du cerveau qui traite
les formes globales des mots à l’arrière du cerveau et
39
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 4.1
La méthode phonique et la
méthode globale
Les deux méthodes courantes d’apprentissage de la lecture
sont la méthode phonique et la méthode globale. Chacune
cible un circuit différent du cerveau. La méthode phonique
stimule le circuit supérieur, fournissant des stratégies
pour décoder des mots nouveaux, tandis que la méthode
globale fait appel au circuit inférieur dans le but d’accroître
la compréhension globale par l’apprentissage de mots en
contexte. Alors que des débats font toujours rage sur les
avantages et inconvénients des méthodes phonique et
globale, ces dernières sont tout aussi importantes l’une que
l’autre pour le développement des circuits de lecture. Il existe
une méthode dite mixte dans les programmes d’apprentissage
de la lecture, qui consiste en un mélange synergique entre la
méthode globale et la méthode phonique.
40
Apprendre au cerveau à lire
les relie à leur prononciation à l’avant de celui-ci. Alors
que le circuit supérieur comporte un ensemble de règles
qui sont utilisées pour décoder des mots nouveaux , le
circuit inférieur stocke le vocabulaire de telle manière
que l’on puisse directement reconnaître un mot quand
on le rencontre de nouveau. Quand on commence à lire
couramment, on fait moins appel au circuit supérieur
puisque la plupart des mots que l’on lit sont déjà stockés
dans le circuit inférieur. Le circuit supérieur est utile
pour apprendre des mots nouveaux car il constitue
une stratégie (indépendante du sens) pour déchiffrer
la prononciation d’un mot. Ce circuit analyse les traits
visuels d’un mot nouveau et détermine ensuite la
prononciation la plus probable en se basant sur les règles
de correspondance entre lettres et sons.
Bien qu’aucune méthode pédagogique ne soit purement
phonique (sans contact avec des textes), ou purement
globale (sans instruction de décodage), ces deux
méthodes élaborent des façons différentes de lire
des mots inconnus. La méthode phonique favorise le
décodage de mots pour déterminer la prononciation la
plus probable. La méthode globale, quant à elle, anticipe
plutôt la prononciation d’un mot inconnu sur la base du
sens de la phrase et du contexte du mot dans le récit.
Alors que la lecture de mots inconnus isolés de tout
contexte nécessite un décodage pour déterminer la
prononciation la plus probable, il est possible de décoder
des mots inconnus présentés dans un contexte ou
d’en deviner le sens grâce à des indices contextuels. La
recherche en électro-encéphalographie (EEG) a démontré
que le cerveau prédit les mots dans une phrase sur
la base du sens. Lorsqu’on lit une phrase qui n’a pas
totalement du sens, le cerveau réagira au mot qui n’a
pas sa place dans la phrase. Ces mots-là sont appelés
« sémantiquement incongrus ». Par exemple, quand on lit
la phrase « Elle a bu un grand verre d’ongles », c’est le mot
« ongles » qui produit une incohérence. Après la lecture
du mot « ongles », il faut attendre 400 millièmes de
seconde pour que le cerveau réagisse en disant : « Attends
un peu, il y a quelque chose qui ne va pas ici », et un
potentiel électrique négatif est produit (Illustration 4.2).
Ceci démontre que le cerveau exploite le sens quand il lit
des mots en contexte afin de prédire la prononciation la
plus probable d’un mot inconnu.
41
Apprendre au cerveau à lire
Les disparités d’apprentissage d’un individu à l’autre
alimentent la polémique sur les méthodes phonique et
globale. Un programme strictement axé sur la méthode
globale ou la méthode phonique néglige le développement
soit du circuit supérieur, soit du circuit inférieur. Alors
que certains enfants peuvent développer implicitement
certaines aptitudes qui ne leur sont pas instruites, la
plupart des apprenants ont besoin d’un enseignement
explicite. L’enseignement fondamentaliste de la méthode
phonique ou globale ne répond pas à tous les besoins
d’apprentissage et mène à des disparités des compétences
en lecture des différents enfants.
Ainsi, dans une même classe, les enfants présentent des
capacités inégales et ne se situent pas tous au même
stade de développement. Certains auront besoin de la
méthode phonique pour décoder rapidement des mots
nouveaux, tandis que d’autres auront déjà compris les
relations entre lettres et sons et auront besoin de textes
contextuels. Pour cette raison, les enseignants devraient
opter pour une combinaison équilibrée des deux
méthodes en veillant à répondre aux besoins spécifiques
de chaque enfant de la classe. Sans cette combinaison
équilibrée des deux méthodes, des irrégularités risquent
de se développer entre les forces et les faiblesses relatives
des circuits supérieur et inférieur. Les enfants à qui l’on
enseigne exclusivement la méthode phonique auront des
difficultés à identifier des mots dans un texte porteur de
sens, ce qui est l’une des fonctions du circuit inférieur,
Illustration 4.2
Les mots
sémantiquement
incongrus
Lisez cette phrase : « Elle a bu un grand verre d’ongles ». N’y
a-t-il pas quelque chose de bizarre ? Le mot « ongles » n’y
a pas sa place. La recherche en électro-encéphalographie
montre qu’un potentiel électrique négatif est produit
400 millièmes de seconde après la lecture du mot « ongles »,
ce qui prouve que le cerveau peut utiliser le contexte de la
phrase pour faciliter la lecture.
42
Apprendre au cerveau à lire
mais décoderont les mots sans grande difficulté grâce
au circuit supérieur. Les enfants à qui l’on enseigne
exclusivement la méthode globale éprouveront des
difficultés à prononcer des mots nouveaux en utilisant
Illustration 4.3
Les méthodes phoniques
synthétique et analytique
Il existe deux manières courantes d’enseigner la méthode
phonique : la méthode phonique synthétique et la méthode
phonique analytique. La méthode phonique synthétique
enseigne les relations lettre/son au circuit supérieur du
cerveau. Généralement, la méthode phonique synthétique
comporte une forte composante auditive basée sur les 36
phonèmes que compte la langue française. La méthode
phonique analytique est une méthode plus visuelle qui recourt
aux séquences communes de mots déjà appris afin de faciliter
le décodage de mots nouveaux. Concrètement, ces opérations
recourent à des connexions entre le circuit inférieur du
cerveau qui fournit le mot analogue, et le circuit supérieur qui
détermine les relations lettre/son.
43
Apprendre au cerveau à lire
le circuit supérieur du cerveau, mais développeront de
bonnes capacités de lecture en contexte grâce au circuit
inférieur.
Les méthodes phoniques synthétique et
analytique
Il existe deux manières d’enseigner la méthode phonique :
la méthode phonique synthétique et la méthode phonique
analytique (Illustration 4.3).
La méthode phonique synthétique enseigne les 36 sons
de la langue française ainsi que leurs relations avec les
lettres correspondantes. Cette méthode s’avère efficace
dans la mesure où elle fournit un outil pour décoder
n’importe quel mot nouveau. Néanmoins, certains enfants
peuvent éprouver des difficultés à identifier les phonèmes
vu que ces derniers constituent de très petites unités de
son. Ces difficultés sont compréhensibles étant donné la
nature artificielle des phonèmes eux-mêmes. Par exemple,
certains phonèmes tels que le  / b / sont imprononçables
individuellement sans la voyelle  / e / . Néanmoins, la
capacité de l’enfant à manipuler les sons individuels et
les relations lettre / son constitue un excellent moyen de
prédiction des habiletés ultérieures de lecture.
La méthode phonique analytique s’appuie sur les radicaux
de mots que le cerveau connaît déjà afin d’en décoder de
nouveaux (Illustration 4.4). Des recherches ont démontré
que les enfants développent cette aptitude dès les
premiers stades de l’apprentissage de la lecture. Avec la
méthode phonique analytique, le cerveau a recours aux
relations lettre / son courantes constituant des « familles
de mots ». Il analyse les mots nouveaux au moyen des
séquences déjà apprises. Cette méthode fait moins
appel à la mémoire de travail puisque la co-articulation
(assemblage de sons) est déjà faite. Par exemple, il est
facile de décoder « trace » en  / tr /  / ace / , car le cerveau
reconnaît facilement les séquences de lettres d’autres
mots (telles que « truc » et « très », ainsi que « place » et
« race »), alors que la méthode phonique synthétique exige
davantage de traitement pour décoder  / t /  / r /  / a /  / s / .
Certains mots comportant diverses voyelles variables sont
immédiatement reconnaissables grâce aux mots similaires
sur le plan visuel.
44
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 4.4
Simulations informatisées des
modèles de lecture
Le cerveau est tellement doué pour décoder des mots
inconnus en se fondant sur des mots déjà appris que les
scientifiques ont créé des simulations de lecture informatisées
pour expliquer le processus de lecture (Share, 1995). Le
modèle connexionniste lit un nouveau mot en décomposant
des séquences similaires de mots déjà appris. Dans cette
expérience, l’ordinateur est capable de lire une liste de
mots dépourvus de sens avec un taux d’exactitude de 66%
après avoir acquis 2.897 mots de base. Un autre modèle
informatisé, appelé modèle à double voie en cascade, adopte
les mêmes principes, mais possède également un mécanisme
de décodage lettre/son similaire au fonctionnement du circuit
supérieur du cerveau. Il lit la même liste de mots dépourvus
de sens avec un taux d’exactitude de 98%, après avoir acquis
les 2.897 mots de base. Les participants humains, après avoir
acquis le même nombre de mots de base, lisent les mots
dépourvus de sens avec un taux d’exactitude de 91%. Ainsi,
si l’on veut expliquer la façon dont le cerveau décode de
nouveaux mots, il faut accepter le fait que le cerveau possède
un mécanisme de décodage direct (le circuit supérieur), sans
toutefois perdre de vue qu’il existe aussi des connexions
entre les mots déjà appris et ce mécanisme de décodage.
Ces connexions sont connues sous le nom de connexions
analytiques. Le facteur d’erreur humaine doit également être
pris en considération.
45
Apprendre au cerveau à lire
La méthode phonique synthétique recourt au circuit
supérieur du cerveau pour lire en développant une
compréhension des relations lettre / son qui permettent
le décodage des mots nouveaux, alors que la méthode
phonique analytique implique une activation plus centrale
représentant l’interconnexion entre les deux circuits
de lecture. La méthode phonique analytique exploite
l’analogie, qui implique une analyse des séquences
de lettres courantes et de leurs sons correspondants,
en transférant ces informations de mots connus pour
identifier les mots inconnus. Pour ce faire, le décodage
d’un mot inconnu se fait en comparant les mots connus
ayant des relations lettre / son semblables.
Les recherches récentes en IRMf, menées par Beneventi
et ses collègues, ont montré que le traitement de la plus
petite unité de son, le phonème, s’opère dans le circuit
supérieur et que le traitement d’une unité de son plus
grande, la rime, (telle que la terminaison –ime) a lieu
dans une zone plus centrale entre les circuits inférieur et
supérieur de lecture. Le traitement analytique de la rime
est plus rapide que le traitement des phonèmes. Dans
l’hémisphère gauche, les deux circuits de lecture sont en
effet reliés et se soutiennent mutuellement. L’intégration
de ces deux circuits offre un soutien supplémentaire
au décodage, non seulement en se basant sur le sens
et le contexte, mais aussi sur l’analogie entre les mots.
La banque de mots du cerveau dans le circuit inférieur
ne contient pas une liste de mots classés par ordre
alphabétique comme un dictionnaire ordinaire. La banque
de mots du cerveau est plutôt multidimensionnelle.
Alors que certains mots sont regroupés selon le sens,
d’autres sont regroupés selon les sons. Ce processus se
produit au niveau du subconscient. Au niveau de l’activité
consciente, l’assemblage phonologique permet alors de
manipuler les sons de mots nouveaux pour trouver des
séquences communes. Il est possible d’identifier les sons
individuels d’un mot nouveau et de les comparer avec
les mots qui y ressemblent. Dans le cerveau, la méthode
phonique analytique permet la formation de connexions
entre différents sons, lettres et formes globales des mots
pour les mots nouveaux qui sont appris.
La méthode phonique synthétique implique
l’apprentissage des relations entre les sons correspondant
aux différentes combinaisons de lettres de la langue
française. Habituellement, cette méthode est introduite
46
Apprendre au cerveau à lire
avec les associations lettre-nom / lettre-son, les
associations lettre-nom / image ou les actions liées aux
sons initiaux de mots déjà connus. Une fois les enfants
familiarisés aux lettres et aux sons correspondants, on
peut utiliser des lettres amovibles pour créer de nouveaux
mots. Les mots CVC (consonne-voyelle-consonne) sont
faciles à manipuler vu qu’ils constituent des syllabes
fermées, qu’ils comportent une voyelle courte et qu’ils
contiennent des règles lettre / son faciles à suivre (par
exemple « sac », « bol », « tir »). Le composant –VC à la
fin des mots CVC est le radical de la rime. Grâce à la
méthode phonique analytique, les enfants peuvent se
rendre compte que les mots qui se terminent par le
même radical partagent la même séquence de sons. Ils
peuvent alors manipuler le son initial pour former de
nouveaux mots. Par exemple, on peut remplacer le  / b / du
mot « bol » par le son  / k / pour former le mot « col ». Les
enfants peuvent aussi accomplir d’autres opérations avec
les mots CVC à l’aide de lettres amovibles de l’alphabet.
Les lettres peuvent être assemblées pour fusionner des
sons, ce qu’on appelle la co-articulation, ou séparées pour
illustrer la segmentation, l’isolation ou la suppression.
Les enfants peuvent aussi substituer des lettres à d’autres
pour former de nouveaux mots. Par exemple, ils peuvent
remplacer le son  / è / de « sel » par le son  / o / pour faire
« sol ». Une fois que les enfants maîtrisent ces opérations,
ils comprennent que les mots sont constitués de
différentes unités de son qui correspondent à différentes
lettres, qui peuvent à leur tour être manipulées. Un
travail au niveau des mots en utilisant des lettres
amovibles combine les méthodes phoniques synthétique
et analytique, ainsi que la conscience phonémique en
une seule leçon. Néanmoins, la méthode phonique ne
constitue qu’une partie d’un programme d’apprentissage
plus large, et devrait être intégrée dans le contexte de la
lecture réelle.
La méthode mixte
La méthode mixte implique le développement de
programmes de lecture qui visent le circuit supérieur
(méthode phonique synthétique), le circuit inférieur
(méthode globale) et les connexions entre les deux circuits
(méthode phonique analytique). Le développement
des deux circuits de lecture au moyen d’instructions
47
Apprendre au cerveau à lire
Illustration 4.7
La méthode mixte
Comment la méthode mixte agit-elle dans le cerveau ? Le
cerveau possède deux modules : un module visuel à l’arrière
du cerveau et un module auditif à l’avant du cerveau. Dès
que l’on comprend, en utilisant le module auditif, que les
mots prononcés sont constitués de petites unités de son,
on développe la conscience phonémique. Une fois que l’on
a appris, en employant le module visuel, que les mots sont
constitués de lettres, on a alors développé la conscience
graphémique. C’est ainsi que l’on peut créer des circuits
de lecture entre ces deux modules. La méthode phonique
synthétique apprend aux enfants à identifier la forme
d’une lettre et à l’associer à un phonème, alors que la
méthode globale permet d’associer le sous-composant de
la reconnaissance de la forme d’un mot à la prononciation.
Enfin, la méthode phonique analytique permet l’utilisation
de mots déjà appris pour décoder de nouveaux mots (par
analogie).
48
Apprendre au cerveau à lire
explicites est un élément essentiel de la méthode de
lecture mixte (Illustration 4.7). Les méthodes mixtes
doivent également présenter une certaine souplesse pour
permettre d’enseigner à des groupes d’enfants ayant des
compétences et des besoins différents. La philosophie
de la méthode mixte est de maintenir un équilibre entre
la lecture faite aux enfants, celle faite avec les enfants et
celle effectuée par les enfants. Lorsqu’un texte est trop
compliqué pour que les enfants le lisent seuls, on peut
utiliser les approches de lecture partagée ou guidée.
La lecture en groupe est largement utilisée pour
familiariser les enfants aux textes. L’instituteur encourage
un groupe d’élèves à lire en même temps que lui. La
lecture en groupe rend le texte accessible aux enfants,
ceux-ci appréciant la sensation que leur procure alors
la lecture. Pour une lecture en groupe, il convient
de sélectionner des textes prévisibles contenant des
répétitions. Ainsi, les enfants prennent goût à la lecture
à la fois en reconnaissant les mots et en comprenant
le sens. Lors d’une lecture en groupe, les enseignants
peuvent adapter aux compétences de chaque enfant
leurs questions portant sur les phonèmes, les mots,
la grammaire et le sens. Les exercices de questions et
réponses, dirigés par les enseignants, et avec leur soutien,
s’appellent « l’échafaudage ». Avec l’aide des professeurs,
l’attention des élèves peut être attirée explicitement sur
les règles lettre / son, sur la place de ces lettres dans les
mots, sur les mots et leur place dans la phrase, et sur le
sens général du texte. Le soutien auditif peut venir de
la lecture en groupe elle-même ou de la répétition du
texte pendant des activités d’écoute. Quand les enfants
commencent à éprouver la sensation de lire en écoutant
une histoire, il faut les encourager à lire eux-mêmes le
texte pour qu’ils puissent décoder et lire les lettres, les
mots et les phrases. Les élèves acquièrent de la fluence
et du vocabulaire tout en lisant. En employant des textes
contenant des sons représentés par des lettres intégrées
dans des mots, les enfants prennent conscience des sons
que produisent ces lettres et du fait que les mots sont
constitués de lettres, et les phrases, de mots. De cette
manière, les relations apprises par le travail au niveau
des mots, à l’aide des méthodes phoniques synthétique et
analytique, peuvent être transférées des mots isolés aux
mots pris dans leur contexte. La mise en évidence d’une
lettre ou d’un son spécifique dans un texte permet aux
enfants de mieux comprendre la relation lettre / son et sa
49
Apprendre au cerveau à lire
place au sein des mots. Cette mise en évidence facilite le
découpage d’un mot en différentes unités de son, étant
donné que la division a déjà été réalisée. La répétition
d’une lettre ou d’un son mis en évidence dans tout le
texte permet un renforcement implicite (Illustration 4.8).
La lecture assistée fait partie intégrante d’un programme
de méthode mixte, et sert à rendre des textes accessibles
à des enfants ayant différents niveaux de lecture. Une
fois que les enfants ont acquis des capacités de lecture
et d’écriture, ils peuvent tenter par eux-mêmes de
décoder un texte nouveau. La lecture assistée implique
un enseignement à un petit groupe composé d’enfants
pourvus de capacités similaires. Le professeur écoute
les enfants lire une histoire et les assiste si nécessaire.
L’attention des enfants peut être attirée sur différents
aspects de l’histoire pour s’assurer qu’ils suivent bien le
Illustration 4.8
La lecture en groupe au moyen
de méthodes phoniques « avec
lettres intégrées dans les
mots »
La lecture en groupe au moyen de méthodes phoniques « avec
lettres intégrées dans les mots » est utilisée pour enseigner
à la fois la méthode phonique synthétique et la méthode
phonique analytique dans le cadre de la lecture réelle. Les
éléments du processus de lecture sont expliqués aux enfants
au cours d’une leçon de groupe. Le professeur pose des
questions de façon à adapter l’enseignement aux besoins du
groupe d’enfants ayant tous des compétences différentes, et
les enfants peuvent apprendre les uns des autres au cours
de ces discussions de groupe. L’approche multi-sensorielle
soutient les enfants ayant des styles d’apprentissage
différents et fait en sorte que tous les enfants soient sur la
voie de l’acquisition des compétences en lecture.
50
Apprendre au cerveau à lire
sens pendant la lecture. Lorsqu’un enfant est confronté
à un mot qu’il ne peut pas lire, le professeur l’assiste
alors pour l’amener à utiliser une méthode efficace
pour déchiffrer le mot. La plupart du temps, la méthode
initiale impose à l’enfant de relire la phrase depuis le
début, jusqu’au mot inconnu. Ensuite, l’enfant essaie
de deviner le sens du mot en se basant sur ce qu’il a lu
précédemment. S’il ne comprend toujours pas le mot, il
peut alors continuer à lire jusqu’à la fin de la phrase et
essayer à nouveau de déchiffrer le mot en fonction du
sens de la phrase complète. L’illustration 4.9 montre le
type de questions que le professeur peut poser lors de la
lecture assistée.
Inversement, la méthode peut être fondée sur la
phonologie, soit en décodant le mot lettre par lettre, en
ayant recours à la méthode phonique synthétique, soit en
utilisant la méthode phonique analytique pour examiner
des mots qui se ressemblent afin d’avoir des indices
supplémentaires sur la prononciation d’un mot inconnu.
Parfois, il est utile d’isoler les mots les plus difficiles et
d’en discuter avec les élèves avant d’entamer la lecture.
Cette étape peut être effectuée lors de l’introduction du
livre. Avoir les mots difficiles fraîchement en mémoire
permet de consolider la fluence verbale lors de la lecture
assistée. Pour la lecture assistée, il convient de choisir
des textes d’un niveau approprié pour que les enfants
puissent lire la plupart des mots (90-95% d’exactitude),
sinon ils se sentiront frustrés et ne comprendront plus le
sens.
Il faut encourager la lecture individuelle car elle permet
aux enfants de lire pour leur plaisir. Le matériel de
lecture mis à disposition devrait inclure une gamme de
livres comprenant de la fiction et d’autres genres pour
stimuler l’envie de lire. Le niveau de lecture approprié
pour une lecture individuelle est de l’ordre de 95% de
mots compris, c’est pourquoi il est très important de
motiver les enfants lorsqu’ils apprennent à lire. On
associe à la lecture deux types de motivations pour
un enfant : la motivation intrinsèque et la motivation
extrinsèque. La motivation intrinsèque de l’enfant l’amène
à lire par intérêt personnel, pour explorer le monde
nouveau de la lecture et pour découvrir des sujets qui
le passionnent. Les enfants motivés intrinsèquement
prennent du plaisir en lisant. Quand ils sont confrontés
à une difficulté, ils veulent s’en sortir par eux-mêmes. Ils
Illustration 4.9
Les questions à poser lors de la
lecture assistée
51
Apprendre au cerveau à lire
persistent et se plaisent à accomplir une tâche difficile.
Les enfants motivés intrinsèquement passent une grande
partie de leur temps à lire parce qu’ils en retirent une
satisfaction cognitive et émotionnelle. Pour évaluer la
motivation intrinsèque, on emploie des variables telles
que la curiosité et l’implication. Lorsqu’on éveille la
curiosité d’un enfant, celui-ci va se concentrer sur la
description des événements et va faire preuve d’un
intérêt plus prononcé pour la suite de l’histoire. Des
efforts plus importants d’ordre cognitif aboutissent à
des jugements plus justes et à une compréhension plus
approfondie du texte. La motivation extrinsèque implique
la participation à la lecture résultant d’exigences et de
valeurs extérieures. Elle est mesurée à l’aide de variables
telles que la reconnaissance, les résultats scolaires, les
valeurs sociales, la compétition et la conformité. Les
enfants dont la motivation est extrinsèque lisent pour
éviter des conséquences négatives et pour recevoir
des récompenses extérieures plutôt que pour leur
satisfaction cognitive et émotionnelle. Malheureusement,
la motivation extrinsèque s’avère être improductive pour
la compréhension du texte, étant donné que le lecteur ne
prête que peu d’attention à certains aspects de celui-ci, ce
qui entraîne des méthodes d’apprentissage inefficaces et
des déductions erronées. La motivation extrinsèque a des
effets négatifs sur l’envie de lire alors que la motivation
intrinsèque augmente la compréhension ainsi que la
quantité de textes que les enfants liront pour leur propre
plaisir.
Résumé
La recherche pédagogique et les méthodes utilisées
en classe offrent une série de techniques pour un
enseignement efficace de la lecture. Alors que la
recherche avancée sur le cerveau n’existait pas lorsque
ces méthodes d’instruction ont vu le jour, elle permet
aujourd’hui de leur donner une légitimité scientifique.
Il n’est plus nécessaire de débattre pour savoir si une
technique est meilleure qu’une autre. Nous avons
une vue plus globale. Différentes approches ciblent
différentes parties du cerveau lors de la lecture, et il faut
s’efforcer de cibler simultanément plusieurs modules,
circuits et connexions afin de produire des synergies
d’apprentissage et de former des enfants qui aiment lire.
52
Apprendre au cerveau à lire
5
L’orthographe et la
composition
L’orthographe mobilise tant le circuit supérieur que le
circuit inférieur de l’hémisphère gauche du cerveau.
Tandis que la lecture s’effectue de l’arrière à l’avant du
cerveau (du visuel à l’auditif), l’orthographe, quant à elle,
s’effectue de l’avant à l’arrière du cerveau (de l’auditif au
visuel). L’orthographe aboutit à des mots écrits, tandis
que la lecture aboutit à la prononciation des mots.
L’obtention de l’orthographe d’un mot passe par sa
prononciation à l’avant du cerveau, et ensuite par l’accès
à sa forme visuelle à l’arrière du cerveau. Ce processus
implique un changement directionnel dans le circuit
inférieur de l’hémisphère gauche.
Le rappel direct (le circuit inférieur)
Le circuit inférieur du cerveau contient une banque de
mots reliée au sous-composant de la prononciation à
l’avant du cerveau ainsi qu’au sous-composant de la
forme visuelle des mots à l’arrière du cerveau (Illustration
5.1). Cette banque de mots comporte les formes
complètes des mots, ce qui permet un rappel direct
lorsqu’il faut les orthographier. Le cerveau ne contient
pas de banques de mots différentes pour la lecture,
l’orthographe et l’écriture, c’est plutôt chaque habileté
(lecture, orthographe et écriture) qui fait appel à l’unique
banque de mots du cerveau, à l’aide de différentes
entrées et sorties (« directionnalité »). Le fait d’avoir une
seule banque de mots qui relie toutes les propriétés
importantes des mots explique pourquoi les capacités à
lire, à orthographier et à écrire sont si intimement liées.
La banque de mots du cerveau peut développer un
ensemble de mots rapidement connus « par cœur » au
moyen de l’exposition répétée à de nouveaux mots par la
lecture et l’écriture. Grâce à ces expositions répétées, on
obtient non seulement un accès rapide à la prononciation
correcte du mot au cours de la lecture, mais aussi une
image visuelle de la forme du mot entier, qui peut être
utilisée lorsqu’il faut l’orthographier. Ces représentations
53
Apprendre au cerveau à lire
de mots commenceront à s’affaiblir si elles ne sont pas
constamment renforcées par la lecture et l’orthographe.
Les mots utilisés moins fréquemment sont les plus
difficiles à lire ou à orthographier. La vitesse de lecture
peut ralentir si l’on passe de son roman préféré à un sujet
spécifique ne relevant pas de la fiction. Il en va de même
pour l’orthographe. Lorsque l’on essaie d’orthographier
un mot rarement rencontré ou utilisé, il est probable
que la banque de mots n’ait emmagasiné qu’une vague
représentation de celui-ci qui ne nous reviendra pas
facilement en mémoire. De ce fait, il sera difficile de
l’orthographier correctement. Le circuit inférieur peut se
résumer par l’expression suivante : « apprenez bien le mot
ou oubliez-le ».
Illustration 5.1
L’orthographe par rappel direct
La plupart des formes orthographiques des mots impliquent
un lien direct allant du sous-composant de la prononciation
au sous-composant de la forme visuelle du mot. C’est ce lien
qui permet d’accéder directement à l’orthographe correcte du
mot sans avoir à le prononcer à haute voix. Le circuit inférieur
permet également d’accéder aux orthographes correctes des
mots irréguliers, souvent très difficiles à encoder.
54
Apprendre au cerveau à lire
L’acquisition de l’orthographe des mots les plus
souvent utilisés constitue un gain de temps et d’énergie
considérable pour les apprentis lecteurs, dans la mesure
où ces mots constituent plus de la moitié des mots
couramment lus et orthographiés. Nombre de ces mots
fréquents sont directement appris en utilisant le circuit
inférieur. Les mots très fréquents sont vite appris par
le biais de la lecture, et possèdent rapidement une
représentation dans la banque de mots du cerveau.
On peut avoir accès à la forme d’un mot à partir de sa
prononciation. Lorsque les mots ont été mémorisés
correctement, le rappel direct fournit des orthographes
parfaites. Dans ce cas, le mot n’est plus considéré
simplement comme un groupe de lettres, mais comme
un mot dans sa globalité, rattaché à une prononciation,
un sens et une orthographe. Il n’en reste pas moins que,
souvent, l’habilité à orthographier correctement n’est
pas aussi simple que l’accès à la forme globale du mot.
Le cerveau ne peut pas toujours se rappeler les mots
qu’il veut orthographier. Il arrive parfois que, lorsqu’il
tente de se souvenir de l’orthographe du mot, le circuit
inférieur ne fournisse aucune réponse. En effet, au début
de l’apprentissage de l’orthographe, seule une poignée de
mots est directement accessible. Lorsque l’orthographe
n’est pas directement accessible depuis la banque de
mots, on peut utiliser le circuit supérieur du cerveau pour
orthographier le mot de la manière la plus probable.
L’encodage (le circuit supérieur)
Alors que le circuit inférieur du cerveau est une base
de données qui emmagasine les différentes propriétés
des mots entiers, le circuit supérieur du cerveau est
spécialisé dans la reconnaissance des relations lettre / son
dans les mots. Parfois, le cerveau doit compter sur le
circuit supérieur pour décoder un mot nouveau lors de la
lecture. Le décodage permet d’estimer la prononciation
la plus plausible du mot en se basant sur la séquence
que forment ses lettres constitutives. Le décodage est
également appelé conversion de graphèmes en phonèmes
dans la mesure où il implique la prise en compte d’une
séquence de lettres (graphème) et son association au
son correspondant (phonème). Orthographier des mots
inconnus est une opération qui fait également appel au
circuit supérieur du cerveau, mais dans le sens opposé.
55
Apprendre au cerveau à lire
L’estimation de l’orthographe de mots inconnus est
appelée l’encodage, et fonctionne de l’avant à l’arrière du
cerveau (Illustration 5.2).
L’encodage est le processus d’estimation de l’orthographe
la plus probable d’un mot sur la base d’unités de son.
Il porte également le nom de conversion de phonèmes
Illustration 5.2
L’encodage
L’encodage est une opération orthographique qui fait appel
au circuit supérieur. Plutôt que d’aller des formes des lettres
aux sons des phonèmes (décodage), cette opération va des
sons des phonèmes aux formes des lettres (encodage). Le
processus d’encodage ne fournira pas toujours l’orthographe
correcte, mais il en ressortira une suggestion probable,
qui peut être vérifiée par la suite dans le dictionnaire. Les
orthographes inventées permettent aux enfants de continuer
à écrire sans être gênés par une orthographe inconnue.
L’usage d’orthographes inventées par les personnes qui
commencent à écrire leur permet de produire des histoires
plus longues, et d’acquérir un meilleur vocabulaire et des
structures grammaticales plus complexes.
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne
Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne

Contenu connexe

Tendances

ευριπίδη ελένη συνολική θεώρηση
ευριπίδη ελένη συνολική θεώρησηευριπίδη ελένη συνολική θεώρηση
ευριπίδη ελένη συνολική θεώρησηAngeliki Chroni
 
AB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemi
AB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemiAB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemi
AB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemiFaruk YÜKSEL
 
Approche service en gestion hospitalière
Approche service en gestion hospitalière Approche service en gestion hospitalière
Approche service en gestion hospitalière Younes Elghazouani
 
Groupe Keolis - L'Essentiel
Groupe Keolis - L'EssentielGroupe Keolis - L'Essentiel
Groupe Keolis - L'EssentielKeolis
 
Présentation de la stratégie de la marque territoriale Only Lyon
Présentation de la stratégie de la marque territoriale Only LyonPrésentation de la stratégie de la marque territoriale Only Lyon
Présentation de la stratégie de la marque territoriale Only LyonCamille Coste
 
Ευρωπαϊκή Ένωση
Ευρωπαϊκή ΈνωσηΕυρωπαϊκή Ένωση
Ευρωπαϊκή Ένωσηchavalesnick
 
πούσι (λογοτεχνία β λυκείου)
πούσι (λογοτεχνία β  λυκείου)πούσι (λογοτεχνία β  λυκείου)
πούσι (λογοτεχνία β λυκείου)Eleni Papadopoulou
 

Tendances (8)

ευριπίδη ελένη συνολική θεώρηση
ευριπίδη ελένη συνολική θεώρησηευριπίδη ελένη συνολική θεώρηση
ευριπίδη ελένη συνολική θεώρηση
 
AB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemi
AB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemiAB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemi
AB ülkelerinde turizm hareketleri ve AB'de turizmin yeri ve önemi
 
Approche service en gestion hospitalière
Approche service en gestion hospitalière Approche service en gestion hospitalière
Approche service en gestion hospitalière
 
Groupe Keolis - L'Essentiel
Groupe Keolis - L'EssentielGroupe Keolis - L'Essentiel
Groupe Keolis - L'Essentiel
 
Présentation de la stratégie de la marque territoriale Only Lyon
Présentation de la stratégie de la marque territoriale Only LyonPrésentation de la stratégie de la marque territoriale Only Lyon
Présentation de la stratégie de la marque territoriale Only Lyon
 
Le marché du tourisme en ligne
Le marché du tourisme en ligneLe marché du tourisme en ligne
Le marché du tourisme en ligne
 
Ευρωπαϊκή Ένωση
Ευρωπαϊκή ΈνωσηΕυρωπαϊκή Ένωση
Ευρωπαϊκή Ένωση
 
πούσι (λογοτεχνία β λυκείου)
πούσι (λογοτεχνία β  λυκείου)πούσι (λογοτεχνία β  λυκείου)
πούσι (λογοτεχνία β λυκείου)
 

En vedette

IRDNA Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...
IRDNA  Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...IRDNA  Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...
IRDNA Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...Edouard Brauer
 
presentacio_llei_catalana_educacio
presentacio_llei_catalana_educaciopresentacio_llei_catalana_educacio
presentacio_llei_catalana_educacioatallada
 
19 2 Victor Sanchez
19 2 Victor Sanchez19 2 Victor Sanchez
19 2 Victor Sanchezyoulivek
 
5 Jorge Maestre
5 Jorge Maestre5 Jorge Maestre
5 Jorge Maestreyoulivek
 
Chut1bb
Chut1bbChut1bb
Chut1bbdov404
 
Introducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parte
Introducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parteIntroducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parte
Introducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parteTelmo Viteri
 
Mon Lycée(Victoria)
Mon Lycée(Victoria)Mon Lycée(Victoria)
Mon Lycée(Victoria)olivier79
 
Circulatorio2008
Circulatorio2008Circulatorio2008
Circulatorio2008doctor98
 
Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...
Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...
Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...Fernando Tricas García
 
p20 + m - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salido
p20 + m  - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salidop20 + m  - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salido
p20 + m - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María SalidoMak Makygregor
 
Soloparamisamigas
SoloparamisamigasSoloparamisamigas
Soloparamisamigasmedara
 
Caractarísticas do Guión Multimedia
Caractarísticas do Guión MultimediaCaractarísticas do Guión Multimedia
Caractarísticas do Guión Multimediaxpereira
 
Programa foro emakunde
Programa foro emakundePrograma foro emakunde
Programa foro emakundeMak Makygregor
 
Bien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal Métro
Bien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal MétroBien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal Métro
Bien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal MétroL'Événement Carrières
 
Semana 02 de Economía
Semana 02 de EconomíaSemana 02 de Economía
Semana 02 de EconomíaLarry Mendoza
 

En vedette (20)

IRDNA Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...
IRDNA  Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...IRDNA  Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...
IRDNA Institut indépendant de Recherche et Développement en Neurosciences Ap...
 
Revivre J avance 201611
Revivre J avance 201611Revivre J avance 201611
Revivre J avance 201611
 
Lago Puelo
Lago PueloLago Puelo
Lago Puelo
 
presentacio_llei_catalana_educacio
presentacio_llei_catalana_educaciopresentacio_llei_catalana_educacio
presentacio_llei_catalana_educacio
 
19 2 Victor Sanchez
19 2 Victor Sanchez19 2 Victor Sanchez
19 2 Victor Sanchez
 
5 Jorge Maestre
5 Jorge Maestre5 Jorge Maestre
5 Jorge Maestre
 
Chut1bb
Chut1bbChut1bb
Chut1bb
 
La Robotica
La RoboticaLa Robotica
La Robotica
 
Introducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parte
Introducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parteIntroducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parte
Introducción a las nuevas tecnologías aplicadas a la educación - segunda parte
 
Mon Lycée(Victoria)
Mon Lycée(Victoria)Mon Lycée(Victoria)
Mon Lycée(Victoria)
 
Circulatorio2008
Circulatorio2008Circulatorio2008
Circulatorio2008
 
Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...
Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...
Marco general para el diseño de un plan de estudios. Grado de Ingeniería Info...
 
p20 + m - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salido
p20 + m  - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salidop20 + m  - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salido
p20 + m - Presentación de Noemí Pastor, Idoia Llano y María Salido
 
Soloparamisamigas
SoloparamisamigasSoloparamisamigas
Soloparamisamigas
 
LeçOn 2
LeçOn 2LeçOn 2
LeçOn 2
 
Caractarísticas do Guión Multimedia
Caractarísticas do Guión MultimediaCaractarísticas do Guión Multimedia
Caractarísticas do Guión Multimedia
 
Programa foro emakunde
Programa foro emakundePrograma foro emakunde
Programa foro emakunde
 
Bien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal Métro
Bien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal MétroBien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal Métro
Bien se préparer aux entrevues d'emploi - Journal Métro
 
Semana 02 de Economía
Semana 02 de EconomíaSemana 02 de Economía
Semana 02 de Economía
 
Abrazo Especial
Abrazo EspecialAbrazo Especial
Abrazo Especial
 

Similaire à Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne

La dyslexie et le cerveau
La dyslexie et le cerveauLa dyslexie et le cerveau
La dyslexie et le cerveauFormation 3.0
 
Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...
Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...
Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...Dyslexia International
 
Livret pedagogie-neuropsychologie
Livret pedagogie-neuropsychologieLivret pedagogie-neuropsychologie
Livret pedagogie-neuropsychologiechlaine
 
Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...
Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...
Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...Bibdoc 37
 
Théorie des 4 cerveaux
Théorie des 4 cerveauxThéorie des 4 cerveaux
Théorie des 4 cerveauxMarie Bo
 
Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)
Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)
Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)Anne Petit
 
Remédiation-en-lecture.pptx
Remédiation-en-lecture.pptxRemédiation-en-lecture.pptx
Remédiation-en-lecture.pptxSaidErraji2
 
35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...
35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...
35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...Pierre-Majorique Léger
 
1 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_2
1 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_21 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_2
1 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_2TICE10AUBE
 
Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain
Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain
Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain LesDéclics
 
"Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques"
"Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques""Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques"
"Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques"Atelier Canopé de l'Essonne
 
Comprehension en lecture au cp
Comprehension en lecture au cpComprehension en lecture au cp
Comprehension en lecture au cpInspection de Lure
 
7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz
7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz
7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 HertzTocup
 
Neuropsychophysiologie
NeuropsychophysiologieNeuropsychophysiologie
NeuropsychophysiologieElsa von Licy
 

Similaire à Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne (20)

La dyslexie et le cerveau
La dyslexie et le cerveauLa dyslexie et le cerveau
La dyslexie et le cerveau
 
Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...
Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...
Les troubles de l’apprentissage de la lecture Mercredi 02 février 2005 Journé...
 
Livret pedagogie-neuropsychologie
Livret pedagogie-neuropsychologieLivret pedagogie-neuropsychologie
Livret pedagogie-neuropsychologie
 
20121108 gdp2 fr
20121108 gdp2 fr20121108 gdp2 fr
20121108 gdp2 fr
 
Neuro sciences
Neuro sciencesNeuro sciences
Neuro sciences
 
Cogmaster_Ep4bis
Cogmaster_Ep4bisCogmaster_Ep4bis
Cogmaster_Ep4bis
 
Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...
Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...
Canope 37 - Sciences cognitives et enseignement : les neurosciences au servic...
 
Théorie des 4 cerveaux
Théorie des 4 cerveauxThéorie des 4 cerveaux
Théorie des 4 cerveaux
 
Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)
Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)
Apprendre à apprendre : ça s'apprend ! (Le mindmapping)
 
Remédiation-en-lecture.pptx
Remédiation-en-lecture.pptxRemédiation-en-lecture.pptx
Remédiation-en-lecture.pptx
 
35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...
35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...
35 000 micro-décisions par jour : Comment mesurer et réduire l'effort cogniti...
 
1 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_2
1 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_21 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_2
1 2 methodes_et_manuels_lien_xxi_2
 
Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain
Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain
Mieux se connaitre- Des généralités sur le cerveau humain
 
"Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques"
"Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques""Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques"
"Les dys : point de vue cognitif et implications pédagogiques"
 
Comprehension en lecture au cp
Comprehension en lecture au cpComprehension en lecture au cp
Comprehension en lecture au cp
 
Pfe Feraa
Pfe FeraaPfe Feraa
Pfe Feraa
 
7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz
7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz
7 Cerveaux du corps humain, Lumière photonique, l'Eau, 432 Hertz
 
Comprehension claire sansvideo
Comprehension claire sansvideoComprehension claire sansvideo
Comprehension claire sansvideo
 
Neuropsychophysiologie
NeuropsychophysiologieNeuropsychophysiologie
Neuropsychophysiologie
 
UX dans un monde de distraction
UX dans un monde de distractionUX dans un monde de distraction
UX dans un monde de distraction
 

Plus de Dyslexia International

De l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, F
De l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, FDe l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, F
De l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, FDyslexia International
 
Les eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, S
Les eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, SLes eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, S
Les eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, SDyslexia International
 
Les troubles specifiques de la lecture – Ramus, F
Les troubles specifiques de la lecture – Ramus, FLes troubles specifiques de la lecture – Ramus, F
Les troubles specifiques de la lecture – Ramus, FDyslexia International
 
A new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry Chasty
A new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry ChastyA new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry Chasty
A new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry ChastyDyslexia International
 
EN report on the World Dyslexia Forum 2010
EN report on the World Dyslexia Forum 2010EN report on the World Dyslexia Forum 2010
EN report on the World Dyslexia Forum 2010Dyslexia International
 
Russian by Professor Elena Grigorenko: Report
Russian by Professor Elena Grigorenko: ReportRussian by Professor Elena Grigorenko: Report
Russian by Professor Elena Grigorenko: ReportDyslexia International
 
French by Professor José Morais: Report
French by Professor José Morais: ReportFrench by Professor José Morais: Report
French by Professor José Morais: ReportDyslexia International
 
English by Professor Jenny Thompson: Report
English by Professor Jenny Thompson: ReportEnglish by Professor Jenny Thompson: Report
English by Professor Jenny Thompson: ReportDyslexia International
 
'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by Ms E....
'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by  Ms E....'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by  Ms E....
'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by Ms E....Dyslexia International
 
'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...
'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...
'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...Dyslexia International
 
'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila
'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila
'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude AnttilaDyslexia International
 
'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...
'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...
'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...Dyslexia International
 
'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais
'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais
'The roots of dyslexia in French' by Professor José MoraisDyslexia International
 
'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...
'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...
'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...Dyslexia International
 

Plus de Dyslexia International (20)

De l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, F
De l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, FDe l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, F
De l'origine biologique de la dyslexie – Ramus, F
 
Les eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, S
Les eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, SLes eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, S
Les eleves en difficulte d'apprentissage de la lecture – Valdois, S
 
Les troubles specifiques de la lecture – Ramus, F
Les troubles specifiques de la lecture – Ramus, FLes troubles specifiques de la lecture – Ramus, F
Les troubles specifiques de la lecture – Ramus, F
 
Article fluss developpements
Article fluss developpementsArticle fluss developpements
Article fluss developpements
 
Inser ndyslexie synthese
Inser ndyslexie syntheseInser ndyslexie synthese
Inser ndyslexie synthese
 
Centile et écart type
Centile et écart typeCentile et écart type
Centile et écart type
 
Ad ochecklist fr
Ad ochecklist frAd ochecklist fr
Ad ochecklist fr
 
A new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry Chasty
A new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry ChastyA new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry Chasty
A new approach to addressing literacy worldwide, by Dr Harry Chasty
 
EN report on the World Dyslexia Forum 2010
EN report on the World Dyslexia Forum 2010EN report on the World Dyslexia Forum 2010
EN report on the World Dyslexia Forum 2010
 
Russian by Professor Elena Grigorenko: Report
Russian by Professor Elena Grigorenko: ReportRussian by Professor Elena Grigorenko: Report
Russian by Professor Elena Grigorenko: Report
 
French by Professor José Morais: Report
French by Professor José Morais: ReportFrench by Professor José Morais: Report
French by Professor José Morais: Report
 
English by Professor Jenny Thompson: Report
English by Professor Jenny Thompson: ReportEnglish by Professor Jenny Thompson: Report
English by Professor Jenny Thompson: Report
 
Report Chinese by Professor Alice Lai
Report Chinese by Professor Alice LaiReport Chinese by Professor Alice Lai
Report Chinese by Professor Alice Lai
 
'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by Ms E....
'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by  Ms E....'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by  Ms E....
'Free and accessible technologies supporting teachers and trainers' by Ms E....
 
'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...
'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...
'Using digital learning technologies to support special needs' by Professor D...
 
'Good practice' by Dr Harry Chasty
'Good practice' by Dr Harry Chasty'Good practice' by Dr Harry Chasty
'Good practice' by Dr Harry Chasty
 
'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila
'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila
'L'enseignement en Finlande' by Ms Claude Anttila
 
'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...
'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...
'La dyslexia : Les bonnes pratiques en langue espagnole' by Professor Jésus A...
 
'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais
'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais
'The roots of dyslexia in French' by Professor José Morais
 
'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...
'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...
'Good Practice in interventions for teaching dyslexic learners and teacher tr...
 

Dernier

SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdfSKennel
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdfSKennel
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdfSKennel
 
Bibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdf
Bibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdfBibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdf
Bibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdfBibdoc 37
 
PIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdf
PIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdfPIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdf
PIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdfRiDaHAziz
 
LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...
LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...
LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...Faga1939
 
Bibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdf
Bibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdfBibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdf
Bibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdfBibdoc 37
 
Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024
Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024
Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024Alain Marois
 
Le Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directe
Le Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directeLe Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directe
Le Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directeXL Groupe
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdfSKennel
 
PIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdf
PIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdfPIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdf
PIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdfRiDaHAziz
 
Cours SE Gestion des périphériques - IG IPSET
Cours SE Gestion des périphériques - IG IPSETCours SE Gestion des périphériques - IG IPSET
Cours SE Gestion des périphériques - IG IPSETMedBechir
 
Principe de fonctionnement d'un moteur 4 temps
Principe de fonctionnement d'un moteur 4 tempsPrincipe de fonctionnement d'un moteur 4 temps
Principe de fonctionnement d'un moteur 4 tempsRajiAbdelghani
 
Cours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSET
Cours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSETCours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSET
Cours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSETMedBechir
 
Annie Ernaux Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .
Annie   Ernaux  Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .Annie   Ernaux  Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .
Annie Ernaux Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .Txaruka
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdfSKennel
 
Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024
Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024
Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024Gilles Le Page
 
Bernard Réquichot.pptx Peintre français
Bernard Réquichot.pptx   Peintre françaisBernard Réquichot.pptx   Peintre français
Bernard Réquichot.pptx Peintre françaisTxaruka
 

Dernier (19)

SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_FormationRecherche.pdf
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Bilan.pdf
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_IA.pdf
 
Bibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdf
Bibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdfBibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdf
Bibdoc 2024 - Ecologie du livre et creation de badge.pdf
 
PIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdf
PIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdfPIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdf
PIE-A2-P4-support stagiaires sept 22-validé.pdf
 
LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...
LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...
LA MONTÉE DE L'ÉDUCATION DANS LE MONDE DE LA PRÉHISTOIRE À L'ÈRE CONTEMPORAIN...
 
Bibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdf
Bibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdfBibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdf
Bibdoc 2024 - Les maillons de la chaine du livre face aux enjeux écologiques.pdf
 
Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024
Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024
Zotero avancé - support de formation doctorants SHS 2024
 
Le Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directe
Le Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directeLe Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directe
Le Lean sur une ligne de production : Formation et mise en application directe
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Atelier_EtudiantActeur.pdf
 
PIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdf
PIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdfPIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdf
PIE-A2-P 5- Supports stagiaires.pptx.pdf
 
Cours SE Gestion des périphériques - IG IPSET
Cours SE Gestion des périphériques - IG IPSETCours SE Gestion des périphériques - IG IPSET
Cours SE Gestion des périphériques - IG IPSET
 
Principe de fonctionnement d'un moteur 4 temps
Principe de fonctionnement d'un moteur 4 tempsPrincipe de fonctionnement d'un moteur 4 temps
Principe de fonctionnement d'un moteur 4 temps
 
Cours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSET
Cours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSETCours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSET
Cours SE Le système Linux : La ligne de commande bash - IG IPSET
 
Annie Ernaux Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .
Annie   Ernaux  Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .Annie   Ernaux  Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .
Annie Ernaux Extérieurs. pptx. Exposition basée sur un livre .
 
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdfSciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdf
SciencesPo_Aix_InnovationPédagogique_Conférence_SK.pdf
 
Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024
Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024
Presentation de la plateforme Moodle - avril 2024
 
Bernard Réquichot.pptx Peintre français
Bernard Réquichot.pptx   Peintre françaisBernard Réquichot.pptx   Peintre français
Bernard Réquichot.pptx Peintre français
 
DO PALÁCIO À ASSEMBLEIA .
DO PALÁCIO À ASSEMBLEIA                 .DO PALÁCIO À ASSEMBLEIA                 .
DO PALÁCIO À ASSEMBLEIA .
 

Apprendre au cerveau à lire final – Duncan Milne

  • 1. Adapté par Dyslexia International asbl © 2010 Dr Duncan Milne Apprendre au cerveau à lire Dr Duncan Milne Neuropsychologue
  • 2. 2 Apprendre au cerveau à lire Préface Comment le cerveau apprend-il à lire ? Comment apprend- on à lire à un groupe de cerveaux distincts ou à un type de cerveau déterminé ? La lecture est un processus artificiel, pour lequel le cerveau n’a pas été conçu au départ. Quelles en sont les parties impliquées lors de ce processus créé par l’homme ? Lors de la lecture, des images visuelles sont associées à des sons par une série de connexions dans le cerveau pour ensuite être transférées dans la partie frontale de l’hémisphère gauche. Ce livre expose les éléments de la science neurologique expliquant la lecture, et examine quelles en sont les implications pour l’enseignement de celle-ci. Apprendre au cerveau à lire est un livre destiné aux enseignants, aux parents et aux spécialistes de la lecture, qui fait appel à la recherche sur le cerveau pour appuyer la théorie ainsi que la pratique. Cet ouvrage passe en revue les principaux développements de la recherche en imagerie cérébrale des dix dernières années, ainsi que les évolutions parallèles des théories qui sous-tendent l’enseignement de la lecture et les meilleures pratiques scolaires. L’exploration du cerveau permet d’étudier le fabuleux processus de la lecture. Comment cette capacité se développe-t-elle ? Comment l’apprentissage modifie-t-il la façon dont le cerveau est configuré ? Quels sont les endroits spécifiques du cerveau qui devraient être visés pour la remédiation à la lecture ou pour un apprentissage accéléré ? Ce livre explique comment le cerveau développe des connexions lors de la lecture, et profitera à tous ceux qui s’intéressent à l’apprentissage de celle-ci, à mesure qu’ils prendront connaissance des résultats des dernières recherches sur la capacité du cerveau à lire et à écrire. Ce texte a été traduit de l’anglais Teaching the brain to read, adapté au français, et n’inclut pas les éléments pertinents pour l’anglais uniquement. La traduction a été réalisée par des étudiants de l’ISTI (Institut Supérieur de Traducteurs et Interprètes), Bruxelles, supervisés par Marie-France Baeken. Conception : Pauline Key-Kairis
  • 3. 3 Apprendre au cerveau à lire Sommaire Table des illustrations  5 Introduction  7 La diversité neurologique  16 Les origines du langage  16 La variation symétrique  17 Le paradoxe de la spécialisation pour la lecture  18 Résumé  21 Le cerveau lors de la lecture  23 Modules  24 Le module auditif (avant du cerveau)  24 Le module visuel (arrière du cerveau)  28 Les circuits de lecture  31 Le décodage (le circuit supérieur)  31 L’accès direct (le circuit inférieur)  34 Résumé  37 L’enseignement de la lecture  38 La méthode phonique et la méthode globale  38 Les méthodes phoniques synthétique et analytique  43 La méthode mixte  46 Résumé  51 L’orthographe et la composition  52 Le rappel direct (le circuit inférieur)  52 L’encodage (le circuit supérieur)  54 L’orthographe inventée  56 La rédaction  59 Résumé  60
  • 4. 4 Apprendre au cerveau à lire La dyslexie développementale  61 La dyslexie développementale et la dyslexie acquise  61 La dyslexie développementale et les simples faiblesses en lecture  63 Les recherches effectuées sur le cerveau des dyslexiques  67 Résumé  72 Les procédés de lecture  74 Le procédé de lecture dyséidétique  81 Le procédé de lecture dysphonétique  82 Relation de cause à effet  84 Intervention  88 Résumé  93 Conclusion  95 Glossaire  101 Bibliographie  110
  • 5. 5 Apprendre au cerveau à lire Table des illustrations 1.1 Les personnes illettrées et lettrées 1.2 L’électro-encéphalographie 1.3 L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle 1.4 La méthode multi-sensorielle du « trotteur » 2.1 Les ectopies au microscope 2.2 Le corps calleux hypertrophié 2.3 Les cerveaux symétriques de personnalités douées 2.4 La constellation des « dys » - les apprenants différents 3.1 Les origines de l’alphabétisme 3.2 Les modules du langage 3.3 La conscience phonologique 3.4 La reconnaissance des symboles 3.5 Le stade logographique 3.6 Le stade phonologique 3.7 Le stade orthographique 3.8 L’accès lexical 3.9 Le lecteur expérimenté 4.1 La méthode phonique et la méthode globale 4.2 Les mots sémantiquement incongrus 4.3 Les méthodes phoniques synthétique et analytique 4.4 Simulations informatisées des modèles de lecture 4.5 (L’illustration n’est pas reprise) 4.6 (L’illustration n’est pas reprise) 4.7 La méthode mixte 4.8 La lecture en groupe au moyen de méthodes phoniques « avec lettres intégrées dans les mots »
  • 6. 6 Apprendre au cerveau à lire 4.9 Les questions à poser lors de la lecture assistée 5.1 L’orthographe par rappel direct 5.2 L’encodage 5.3 (L’illustration n’est pas reprise) 5.4 (L’illustration n’est pas reprise) 5.5 Relecture 6.1 La dyslexie acquise et la dyslexie développementale 6.2 La répartition de la lecture 6.3 Le modèle de décalage entre le QI et les performances 6.4 La compensation chez les dyslexiques adultes 6.5 Les reconnexions dans le cerveau des dyslexiques 6.6 Le manque de latéralisation lors de la lecture dans le cerveau d’un individu dyslexique 7.1 Les méthodes pour identifier les procédés de lecture 7.2 Le procédé de lecture dysphonétique 7.3 Le procédé de lecture dyséidétique 7.4 Les variations de la symétrie bêta 7.5 Le déséquilibre audio-visuel 7.6 Les causes de variabilité de lecture 7.7 Les problèmes de lecture - organigramme 7.8 Le transcodage du visuel à l’auditif 7.9 Les lettres amovibles 7.10 Le transcodage de l’auditif au visuel 7.11 Les livres audio 7.12 La boîte aux lettres et les fiches pédagogiques 7.13 Les fiches analogiques 8.1 Les modules du langage 8.2 Le modèle de la méthode mixte
  • 7. 7 Apprendre au cerveau à lire 1 Introduction Le cerveau humain reste sans aucun doute l’ensemble de circuits le plus remarquable au monde. Son évolution, qui a pris des millions d’années, a doté l’homme d’un système lui permettant d’avoir accès aux informations, de calculer ou de se rappeler d’un événement. Si le « matériel » du cerveau a été conçu pour permettre à l’homme de survivre, son « logiciel » possède des fonctions plus complexes. Aujourd’hui, la quantité d’informations disponibles augmente bien plus vite que la capacité du cerveau à pouvoir l’absorber. Pour suivre ce rythme, pour apprendre à lire, par exemple, cet organe doit fonctionner de manière prodigieuse. Le savoir augmente de façon exponentielle et la lecture reste le meilleur moyen pour avoir accès à de nouvelles informations. Grâce à la technologie moderne, les scientifiques peuvent examiner l’intérieur du cerveau et le voir fonctionner. Des expériences analysent la façon dont le cerveau procède dans l’accomplissement de différentes tâches. L’activité du cerveau lors de la résolution d’un problème peut être examinée, par exemple. En employant l’imagerie fonctionnelle pour étudier le cerveau, les neuroscientifiques parviennent à comprendre en partie comment le cerveau apprend, en quoi il se distingue et quelles sont les meilleures conditions à l’apprentissage (Illustration 1.1). En séparant les composants indispensables à la lecture, les neuropsychologues peuvent examiner les moyens les plus efficaces pour enseigner au cerveau, afin de rendre l’apprentissage plus rapide et plus aisé. Les spécialistes arrivent aussi à mettre au point des techniques adaptées aux différences d’apprentissage, par exemple à celles des apprenants dyslexiques. Les processus d’apprentissage tels que la lecture, l’orthographe et l’écriture, fonctionnent grâce à un circuit complexe de neurones qui relie des régions de traitement spécialisées du cerveau. Les circuits du cerveau intervenant dans la lecture se forment normalement dans l’hémisphère gauche, dans la mesure où l’on observe une prédominance dans cet hémisphère pour le langage dans 95 pour cent des cas. Toujours dans cet hémisphère,
  • 8. 8 Apprendre au cerveau à lire il existe différents centres de traitement ayant des spécialisations différentes. Ils sont connus parfois sous le nom de modules et permettent à l’homme d’analyser les informations provenant de ses sens. Différents modules du langage de l’hémisphère gauche travaillent ensemble pour accomplir des tâches telles que la lecture, l’écriture et l’orthographe. Alors que l’hémisphère gauche est presque toujours dominant dans les fonctions du langage, la très grande majorité des gens écrivent de la main droite. Ceci est dû aux connexions croisées du cerveau, ce qui donne à la plupart d’entre nous une meilleure maîtrise du côté droit de notre corps. Cependant, il existe également des connexions associées au même côté du corps, qui permettent à chaque hémisphère d’envoyer des signaux L’emploi de l’imagerie cérébrale a permis de comparer le cerveau de personnes illettrées qui ne sont jamais allées à l’école avec celui de personnes lettrées ayant été scolarisées (Petersson et al. 2000). On a demandé à chaque participant de répéter des mots inventés. Alors que les personnes illettrées trouvaient cette tâche difficile, les personnes lettrées la trouvaient au contraire assez simple. Dans le cerveau des personnes scolarisées, il y a un système d’activation complexe, particulièrement dans l’hémisphère gauche. D’autre part, les personnes analphabètes présentent une sous-activation considérable de l’hémisphère gauche. En d’autres mots, ce sont les enseignants qui programment le cerveau en mettant les bonnes connexions en place ! Illustration 1.1 Les personnes illettrées et lettrées
  • 9. 9 Apprendre au cerveau à lire aux côtés droit et gauche et d’en recevoir. De plus, les deux hémisphères sont reliés entre eux par un gros faisceau de fibres nerveuses appelé le corps calleux. Le corps calleux veille à ce que l’information puisse passer de gauche à droite et de droite à gauche. La distinction entre hémisphère gauche et hémisphère droit est, à bien des égards, une simplification excessive étant donné que le corps calleux assure un usage des deux hémisphères comme un tout intégré. On ne peut tout simplement pas se passer d’un hémisphère. Lors de la lecture ou de l’écriture, par exemple, nous employons en grande partie notre hémisphère gauche, mais nous recevons indéniablement de l’aide de notre hémisphère droit. Le cerveau humain est constitué de milliards de cellules cérébrales interconnectées. Le connexionnisme est une théorie qui permet d’expliquer comment le cerveau fonctionne et apprend grâce à un nombre presque infini de connexions pouvant se former entre les cellules du cerveau. Ce concept explique aussi la façon dont les modules spécialisés du cerveau communiquent entre eux. C’est à la fois dans et entre les régions du cerveau que s’établissent les connexions qui créent une matrice de traitement de l’information. Ces réseaux de connexions fournissent des circuits de réaction et un soutien auxiliaire pour l’apprentissage. Selon la théorie du connexionnisme, la lecture est un processus d’auto- apprentissage, c’est-à-dire que dès que le cerveau a appris à lire un mot, il emploie ce savoir pour lire des mots nouveaux. Le cerveau repère vite les mots qui paraissent corrects et ceux qui doivent être vérifiés dans un dictionnaire. Cette fonction d’auto-apprentissage du cerveau implique qu’après la mise en place des bons circuits, le cerveau continue à renforcer ces circuits en les rendant plus performants. Cela prouve que le système de lecture est intelligent, et que le cerveau n’aura finalement plus besoin d’instructions explicites sur la manière de procéder pour lire. En effet, à ce stade, le cerveau est apte à apprendre seul. Les recherches dans le domaine de la lecture se sont nettement développées ces dernières années. La méthode la plus communément employée pour l’étude de la lecture est la recherche comportementale. Cette méthode consiste à examiner le comportement du lecteur lorsqu’il exécute plusieurs tâches de lecture, telles que les tests de reconnaissance des mots, ainsi que de
  • 10. 10 Apprendre au cerveau à lire perception phonémique et orthographique. La recherche comportementale ne permet pas de donner directement des réponses sur le fonctionnement du cerveau, étant donné que par cette méthode, on ne fait qu’examiner le produit final de la lecture. Néanmoins, elle permet de clarifier certaines zones d’ombre sur le fonctionnement du système de lecture grâce à l’observation de ces différentes tâches de lecture. En joignant l’imagerie fonctionnelle du cerveau à ces conclusions importantes, il est possible de déterminer où et quand ces processus se produisent. Il existe de nombreux tests de lecture qui permettent aux chercheurs de comprendre les points forts et les points faibles des mécanismes de lecture. Des normes sont établies à partir de tests standardisés sur un large échantillon de lecteurs choisis pour représenter l’ensemble de la population. La plupart de ces tests de lecture examinent la capacité à lire en comparant l’aptitude réelle du lecteur à celle qu’il est censé avoir acquise, compte tenu de son âge. Ces tests permettent de situer les compétences de lecture d’un enfant par rapport à celles d’autres enfants du même âge. D’autres tests comparent la capacité réelle à la capacité attendue sur la base d’une compétence similaire. Par exemple, on arrive à prévoir les compétences attendues en lecture sur la base des capacités orthographiques, parce que la lecture et l’orthographe sont intimement liées. Lorsqu’une compétence diverge par rapport aux prévisions, on peut identifier la combinaison inhabituelle de points forts et de points faibles et mettre ainsi en place la méthode la plus appropriée pour apprendre à l’enfant à lire. Une autre technique de recherche pour l’étude du processus de lecture est la simulation informatique. Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer le mécanisme de la reconnaissance des mots dans le cerveau. Des simulations informatiques de ces théories ont été créées pour déterminer la façon dont le cerveau lit les mots. Les scientifiques peuvent aussi avoir recours à des manipulations par simulation informatique pour prédire un mode de lecture parmi des individus dyslexiques. Pour qu’un modèle théorique de la lecture soit efficace, il doit pouvoir expliquer les différents modes de lecture signalés d’un point de vue comportemental, et la façon dont le cerveau apprend à lire.
  • 11. 11 Apprendre au cerveau à lire L’imagerie fonctionnelle cérébrale est devenue depuis peu une technique courante pour analyser le processus de lecture. Cette technique peut servir à tester la façon dont les différents sous-processus impliqués dans la lecture interagissent au sein du cerveau. Les méthodes les plus fréquentes sont l’électro-encéphalographie (EEG), la magnéto-encéphalographie (MEG), la tomographie par émission de positons (TEP) et l’imagerie pour résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) ; chacune de ces techniques présente ses avantages et ses inconvénients pour ce qui est du coût et de la qualité de l’image. Une question à laquelle les scientifiques ont pu répondre grâce aux techniques d’imagerie cérébrale est la suivante : quand se produisent, dans le cerveau, des changements liés à la lecture ? La résolution temporelle consiste à savoir quand un changement intervient dans le cerveau, ce qui permet l’examen de différentes fenêtres de temps lors de la lecture. Par exemple, l’EEG démontre que l’accès à un mot dans la base de données du cerveau prend entre 150 et 250 millièmes de seconde après lecture du mot, alors que la prononciation d’un mot prend un peu plus de temps, entre 300 et 500 millièmes de seconde après lecture du mot. L’EEG mesure les rythmes cérébraux grâce à l’application d’électrodes sur le cuir chevelu (Illustration 1.2). Les participants s’asseyent devant un écran d’ordinateur et effectuent différents tests de lecture auxquels une limite de temps a été fixée dans la procédure d’enregistrement de l’EEG. L’EEG parvient à faire la moyenne de centaines d’essais et à évaluer les réponses du cerveau à différents types de mots. En variant les types de mots employés lors des tests, on arrive à influencer les différents sous- processus de lecture dans le cerveau. Par exemple, l’accès aux mots très fréquents (comme « je », « que », « et ») est rapide et direct, alors que l’accès aux mots non porteurs de sens (comme « quirbeau », « fropème », « borette ») prend plus de temps, car le cerveau doit décoder le mot inconnu. L’inconvénient de l’EEG est sa faible résolution spatiale par rapport à sa résolution temporelle. La résolution spatiale permet de pouvoir localiser exactement où ont lieu les modifications dans le cerveau. La MEG fonctionne en suivant le même principe que l’EEG, mais elle est aussi équipée d’un gigantesque aimant qui enregistre en même temps l’endroit où s’effectuent les changements
  • 12. 12 Apprendre au cerveau à lire au niveau du cerveau. D’autres chercheurs ont employé l’EEG dans un scanner IRMf pour obtenir des informations tant spatiales que temporelles. Un des avantages de la méthode de l’IRMf est son excellente précision concernant l’information spatiale. Contrairement à l’EEG, le principe de l’IRMf est de calculer les zones d’activation en fonction des modifications du flux sanguin et du taux d’oxygène (Illustration 1.3). Les chercheurs associent souvent plusieurs tests pour n’isoler que le processus étudié. Ainsi, en soustrayant des tâches d’identification de mots à des tâches d’identification de lettres isolées, on obtient l’activation des différents sous-composants de la lecture. Illustration 1.2 L’électro-encéphalographie Illustration 1.3 L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle L’électro-encéphalographie (ou EEG) consiste à appliquer des électrodes sur le cuir chevelu afin de mesurer les rythmes cérébraux. Le cuir chevelu est dégagé et on y applique une solution saline ou du gel pour diminuer l’impédance. L’EEG mesure les signaux électriques du cerveau qui passent au travers du crâne. Plus il y aura d’électrodes placées sur le cuir chevelu, meilleure sera la résolution spatiale. Le point fort de l’EEG est de pouvoir déterminer quand ont lieu les changements. L’enregistrement des signaux électriques montre, au millième de seconde près, le moment où les différentes réactions interviennent lors de la lecture. Cette machine est un scanner à imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) de l’Institut de Recherche sur le Cerveau (Brain Research Institute) à Melbourne en Australie. Si on trouve les IRM dans la plupart des hôpitaux, cette machine est équipée d’un scanner fonctionnel qui mesure non seulement la structure (ou la forme) du cerveau, mais aussi les modifications du flux sanguin et du taux d’oxygène lorsque le cerveau effectue diverses tâches ou expériences. Le scanner IRMf n’emploie pas de traceur radioactif (comme la tomographie par émission de positons), ce qui rend son utilisation sûre pour les enfants et même pour les bébés. Cette machine possède un aimant tesla 3, qui est l’un des plus grands employés sur l’être humain. La tête de la bobine contient un miroir de sorte qu’aucun mouvement de la tête n’est nécessaire pour lire l’écran. Différents mots sont présentés à l’écran, et d’un clic de souris, le participant répond selon les exigences de la tâche de lecture. De plus, le scanner enregistre plusieurs états du cerveau au repos pour ensuite déterminer l’état normal du cerveau.
  • 13. 13 Apprendre au cerveau à lire L’apprentissage implicite a lieu lorsqu’on apprend quelque chose sans en avoir conscience. Ce mode d’apprentissage, une des fonctions primitives du cerveau, facilite l’apprentissage, car la conscience n’accapare pas l’intégralité de la fonction cérébrale. Beaucoup de processus dans le cerveau se passent au niveau du subconscient, c’est-à-dire sans que l’on en soit conscient. Quand on lit, par exemple, on ne parcourt pas le « dictionnaire » de notre cerveau pour reconnaître chaque mot étant donné que l’information est transmise inconsciemment. La lecture est un mélange de processus conscients et subconscients. Les activités conscientes demandent plus d’énergie car elles font appel à la mémoire de travail. Au début, nous sommes conscients de lire, comme lorsque nous apprenons à rouler à vélo ou à jouer du piano. Toutefois, lorsque nous commençons à intégrer quelques éléments fondamentaux de lecture, nos capacités de compréhension se développent dans notre subconscient. Nous pouvons alors pleinement apprécier la signification de ce que nous lisons consciemment et laisser le « côté pratique » à notre subconscient. Cette capacité à employer le subconscient fait du cerveau une machine à lire plus rapide et plus précise. Tandis que notre conscience comprend le sens, on peut porter notre attention sur d’éventuelles erreurs au niveau du subconscient, telles que l’accès à un mot faux. Les circuits de réaction du subconscient détectent les erreurs pour que des corrections automatiques puissent se faire. L’apprentissage multi-sensoriel est une méthode d’enseignement qui fournit des indications implicites au subconscient. Lorsque les enfants apprennent de manière implicite, ils découvrent les règles de relation lettre-son sans s’en rendre compte, ce qui réduit le travail de traitement conscient lors du décodage et va leur permettre d’apprendre à lire plus facilement. Par exemple, l’utilisation de lettres de couleur permet non seulement d’apprendre plus facilement aux enfants à prononcer correctement de nouveaux mots, mais son usage est aussi très ludique. L’effet de création est une autre méthode d’apprentissage implicite dont le but est de faciliter l’apprentissage et de le rendre plus amusant, par la création d’un nouveau mot. L’effet de génération, appelé souvent « apprendre en faisant », facilite l’apprentissage en demandant à l’enfant de créer quelque chose. En effet, les enfants auront par exemple davantage de facilités
  • 14. 14 Apprendre au cerveau à lire Illustration 1.4 La méthode multi-sensorielle du « trotteur » La méthode multi-sensorielle vise les enfants ayant des besoins d’apprentissage différents et prévient les difficultés de lecture. L’apprentissage multi-sensoriel est comparable à un trotteur dont les trois roues sont les mécanismes kinesthésiques (tactiles), auditifs et visuels qui aident à construire les circuits de lecture. Une fois les bons circuits de lecture mis en place, ces roues peuvent être abandonnées dans la mesure où le cerveau est totalement apte à apprendre par lui-même.
  • 15. 15 Apprendre au cerveau à lire pour apprendre un nouveau mot quand ils l’ont construit eux-mêmes avec des lettres amovibles. La méthode multi- sensorielle dans l’acquisition de nouvelles compétences en lecture peut être comparée à un trotteur. En effet, une fois ces compétences acquises, le « trotteur multi- sensoriel » n’aura plus de raison d’être et l’enfant pourra s’en passer (Illustration 1.4). Ces dix dernières années, la connaissance du fonctionnement de la lecture s’est considérablement développée. Pour la première fois, le comportement physiologique du cerveau peut être examiné lors du processus de lecture. Ce nouveau domaine passionnant de la neuroscience cognitive permet d’intégrer les résultats des recherches effectuées dans différentes disciplines comme la médecine, l’enseignement, la neuropsychologie, l’informatique et l’imagerie cérébrale. Si on examine la lecture à travers ces différents domaines, un nouveau concept apparaît, celui du cerveau comme « machine à lire ».
  • 16. 16 Apprendre au cerveau à lire 2 La diversité neurologique L’apprentissage de la lecture fait appel à de nombreuses connexions complexes dans le cerveau. Il n’existe pas deux lecteurs qui aient la même configuration de la zone du cerveau impliquée dans la lecture. En effet, ces connexions sont propres à chaque individu, tout comme leurs empreintes digitales. La diversité neurologique permet d’expliquer pourquoi le cerveau développe sa propre façon d’apprendre à lire. Certaines personnes apprennent à lire très vite et peuvent être en avance de deux ans ou plus sur leurs camarades de classe, d’autres apprennent à lire difficilement, quels que soient les efforts qu’elles fournissent. Les origines du langage Selon les scientifiques, l’origine du langage remonterait à deux millions d’années au moins. A l’origine, notre langage n’était pas oral car la communication se faisait par gestes. En l’espace de près de deux millions d’années, le cerveau humain a évolué pour se doter de la capacité de parole. On estime que la parole s’est développée il y a 150.000 à 250.000 ans, et qu’elle est une fonction innée du cerveau, à l’instar de la marche ou de la respiration. La faculté de parler procure à l’homme différents avantages, en termes de survie, par rapport aux animaux. La communication orale ne demande pas l’usage des mains, ce qui permet de concilier travail et communication. Les mères peuvent parler à leurs enfants tout en utilisant leurs mains pour s’occuper d’eux. Le langage permet de communiquer la nuit ou sans se voir. De nos jours, grâce aux technologies modernes de communication, il est possible de contacter instantanément des individus aux quatre coins du monde. Contrairement à la parole, l’écriture et la lecture sont des inventions récentes. L’écriture date d’environ quatre mille ans et, tout comme la télévision ou la radio, elle a été conçue comme moyen supplémentaire pour communiquer. L’apprentissage de la lecture et de l’écriture dans l’enseignement traditionnel existe depuis encore moins longtemps. Le développement d’un système
  • 17. 17 Apprendre au cerveau à lire de communication écrite est si récent que le cerveau n’a pas encore eu le temps d’évoluer et d’acquérir ces compétences naturellement, étant donné que chaque personne doit encore apprendre à lire et à écrire. L’invention de l’écriture a donné naissance à l’opération cognitive de la lecture, mais vu que la lecture est une invention récente, celle-ci n’est pas une fonction cérébrale transmise de manière héréditaire. C’est la raison pour laquelle la lecture doit être construite sur les systèmes existants du cerveau, grâce aux modules visuel et auditif. La lecture est un processus complètement artificiel, et il faut des années pour l’acquérir entièrement. Il n’est dès lors pas étonnant que tant d’enfants éprouvent au départ des difficultés pour apprendre à lire. Néanmoins, la lecture est importante étant donné qu’elle constitue un moyen très efficace d’acquisition rapide de nouvelles informations. La variation symétrique La plupart des cerveaux sont asymétriques, car ils favorisent l’hémisphère gauche, qui est d’ailleurs l’hémisphère dominant pour la parole. Mais comment le cerveau développe-t-il cette asymétrie ? Le cerveau fœtal humain possède beaucoup plus de cellules cérébrales que le cerveau adulte. Entre le sixième et le neuvième mois de grossesse, le cerveau fœtal va subir un processus d’élagage des synapses, au cours duquel les cellules du cerveau migrent pour former des connexions entre elles. Celles qui ne parviennent pas à former des connexions meurent. Par asymétrie de l’hémisphère gauche du cerveau humain, on entend la formation de connexions entre les régions de l’hémisphère gauche. Ce processus est le résultat de l’évolution qui a fait de l’hémisphère gauche la zone dominante pour le langage. Les processus liés au langage vont dès lors se former naturellement dans l’hémisphère gauche, hémisphère qui présente certains avantages de traitement de ces informations. Plus tard, cette spécialisation unilatérale facilite grandement l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et de l’orthographe. Ainsi l’information ne doit pas être « dupliquée » par chaque hémisphère. Les mécanismes de l’évolution de l’être humain créent la diversité de façon aléatoire. Le cerveau peut se « rebeller » contre le processus de migration des cellules
  • 18. 18 Apprendre au cerveau à lire par une anomalie appelée « ectopie ». Les ectopies sont des groupes de cellules cérébrales qui se forment pour perturber la migration entre le sixième et le neuvième mois de grossesse, réduisant ainsi le développement d’une asymétrie en faveur de l’hémisphère gauche (Illustration 2.1). Cette perturbation entraînera la mort de moins de cellules, ainsi que la formation de connexions anormales. On a recours à la recherche animale pour examiner les effets des ectopies sur le développement du cerveau fœtal. Si la migration des cellules du cerveau fœtal chez les rongeurs est interrompue à la suite de lésions microscopiques, des connexions anormales se forment alors avec d’autres régions du cerveau. Par exemple, si l’hémisphère gauche est perturbé, des connexions supplémentaires se forment dans l’hémisphère droit. Certains animaux développent naturellement des différences neurologiques. Environ la moitié des souris brunes de Nouvelle-Zélande développent des ectopies, ce qui entraîne de nouvelles connexions et induit des différences dans la perception spatiale. Le paradoxe de la spécialisation pour la lecture La découverte d’ectopies explique la façon dont les gènes de chaque personne peuvent modifier le degré d’asymétrie du cerveau et par conséquent affecter l’apprentissage de la lecture. Les différences de symétrie peuvent donc avoir des effets sur la connectivité inter- et intra-hémisphérique, ce qui entraîne des différences de fonctionnement au cours de la lecture (Illustration 2.2). Illustration 2.1 Les ectopies au microscope Illustration 2.2 Le corps calleux hypertrophié De minuscules ectopies perturbent le processus de migration des neurones du cerveau, occasionnant des différences de connectivité, de réseau cérébral et de symétrie entre les hémisphères. Les ectopies créent des symétries dans le cerveau. Les cerveaux symétriques peuvent présenter une hypertrophie au niveau du corps calleux, c’est-à-dire le faisceau de nerfs qui relie les deux hémisphères, ce qui génère des différences dans le traitement inter-hémisphérique.
  • 19. 19 Apprendre au cerveau à lire Cette perturbation n’aurait posé aucun problème à l’ère de la chasse et de la cueillette, étant donné que la lecture n’existait pas encore. À cette époque (pré-lecture), le cerveau symétrique permettait aux tribus de concevoir les choses différemment (comme employer un boomerang alors que tout le monde possédait une lance). Des activités, telles que la création de nouvelles armes pour la chasse ou de nouveaux outils pour l’agriculture, ont sans doute nécessité le développement d’un cerveau plus symétrique pour penser différemment ; voilà pourquoi la diversité neurologique constitue une part importante de l’évolution. Il est primordial d’avoir différentes façons d’appréhender un problème au sein d’un groupe. Par la présence de cerveaux symétriques et asymétriques dans un même groupe, les synergies entraînent une meilleure résolution des problèmes. Des cas anecdotiques attirent l’attention sur une longue liste de scientifiques dotés de grandes capacités créatrices, en dépit des difficultés qu’ils ont rencontrées pour apprendre à lire. Ils ont contribué à la société en pensant différemment et en mettant au point de nouveaux savoir-faire. Parmi ces personnes connues qui ont éprouvé des difficultés pour apprendre à lire, on peut citer Léonard de Vinci, Albert Einstein, Thomas Edison et Winston Churchill (Illustration 2.3). Il est intéressant de noter que, après avoir surmonté des difficultés d’apprentissage, Michael Faraday, James Maxwell et Nikola Tesla ont chacun contribué à découvrir les principes mathématiques sur lesquels repose l’imagerie cérébrale. La diversité est essentielle pour l’évolution, dans la mesure où elle permet de développer de meilleures compétences pour résoudre des problèmes. Les êtres humains travaillent généralement en groupe et communiquent avec les autres dans leur environnement. Grâce à la diversité des types de cerveau, de nouvelles idées peuvent être discutées, débattues et conçues selon différents points de vue et différents angles. Dans une classe, il existe habituellement des groupes d’enfants aux capacités multiples, non seulement en termes de vécu, mais aussi en termes de diversité neurologique. Certains enfants ont des problèmes de lecture (dyslexie), d’autres de coordination (dyspraxie), et d’autres encore d’écriture (dysgraphie). D’autres enfin ont des problèmes de concentration (TDAH, c’est-à-dire trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité), de communication Illustration 2.3 Les cerveaux symétriques de personnalités douées. Certaines célébrités ont eu beaucoup du mal à apprendre à lire, comme Léonard de Vinci, Einstein, Edison et Churchill (West, 1997).
  • 20. 20 Apprendre au cerveau à lire verbale (dysphasie), d’orthographe (dysorthographie) ou de mathématiques (dyscalculie). Tous ces problèmes sont à bien des égards créés par l’homme. En effet, ces difficultés spécifiques ont pour cause la diversité neurologique, qui au départ fut conçue pour aider à la résolution de problèmes au sein d’un groupe, et non pas pour créer des difficultés d’apprentissage. Ainsi, bien des différences d’apprentissage découlent d’un mécanisme d’évolution conçu pour accroître la diversité. Illustration 2.4 La constellation des «  dys » Il existe un grand nombre de difficultés d’apprentissage qui forme une constellation (Habib, 2003b). Les scientifiques reconnaissent aujourd’hui que tous ces troubles sont distincts, bien que des liens entre ces éléments de la constellation soient courants. La constellation des « dys » est très paradoxale : le point faible de l’un peut être le point fort de l’autre. Le concept de la constellation des « dys » décrit par Habib (2003b) est utilisé pour caractériser différentes difficultés d’apprentissage et leurs relations (Illustration 2.4). Cette constellation est loin d’avoir livré tous ses secrets et nombre d’éléments la constituant ne sont considérés que depuis peu comme des troubles distincts. Les chercheurs travaillant dans ce domaine parlent de ces nouvelles typologies en utilisant l’expression « nouvelle neuropsychologie ». Toute une série de questions, actuellement à l’état de projets de recherche, sont en attente d’être résolues par des expériences. Les différentes « étoiles » formant la constellation des « dys » sont les suivantes : – La dyslexie est un trouble affectant la capacité à acquérir les aptitudes pour la lecture. Les dyslexiques peuvent avoir du mal à prononcer des mots ou lire les mots dans leur forme globale. – La dyscalculie est un trouble qui affecte la capacité à acquérir des aptitudes arithmétiques. Les personnes
  • 21. 21 Apprendre au cerveau à lire atteintes de dyscalculie peuvent avoir des difficultés à lire l’heure, à calculer ou à mesurer. – La dysgraphie est un trouble qui affecte la capacité à acquérir les aptitudes pour écrire. Les personnes atteintes de dysgraphie n’ont pas une bonne coordination motrice, en particulier lorsqu’il s’agit de former des lettres. – La dysorthographie est un trouble qui affecte la capacité à assimiler les règles orthographiques. Les personnes souffrant de dysorthographie ont des problèmes pour se rappeler les mots au moyen de leur mémoire visuelle. – La dyspraxie est un trouble qui affecte l’apprentissage et l’équilibre moteur. Les personnes atteintes de dyspraxie ont des problèmes de coordination, et parfois même des problèmes de coordination œil/main. – La dysphasie est un trouble qui affecte le développement du langage oral. Les personnes souffrant de cette pathologie éprouvent des difficultés à trouver les bons mots pour s’exprimer. – Le TDAH, ou trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité, est un trouble affectant l’attention. Les enfants atteints de TDAH sont souvent impulsifs et n’arrivent pas à maintenir leur concentration. Pour enseigner à des individus dont les connexions du cerveau sont différentes, il faut les encourager de manière positive afin d’établir un climat propice à la confiance et à la motivation. Apprendre est un plaisir, mais l’échec peut être traumatisant. Les enfants aux capacités contrastées se demandent pourquoi ils excellent dans certains domaines et non dans d’autres. Il faut alors leur expliquer que le cerveau n’a jamais été conçu pour lire et que nous avons tous nos forces et nos faiblesses. Résumé La diversité neurolinguistique a marqué l’évolution des êtres humains. Elle constitue un aspect essentiel de l’évolution car plus il y a de cerveaux différents, meilleure sera la résolution de problèmes au sein d’un groupe. La diversité neurologique signifie que certaines personnes ont un réseau de connexions dans leur cerveau différent de celui des autres, ce qui leur apporte des avantages potentiels en termes de créativité, d’idées originales, et de
  • 22. 22 Apprendre au cerveau à lire résolution de problèmes visuels et spatiaux. L’ironie de la chose est que ces avantages peuvent exister au détriment de la lecture. Il n’en reste pas moins qu’avec une instruction, une prévention et une motivation adéquates, chaque enfant peut apprendre à lire. En agissant de la sorte, les enfants peuvent apprendre à tirer profit de leurs talents dans le monde lettré qui est le nôtre.
  • 23. 23 Apprendre au cerveau à lire 3 Le cerveau lors de la lecture Lors de la lecture, nous activons un circuit complexe de régions et de connexions spécialisées dans le cerveau. L’architecture de neurones responsable de la lecture détermine quelles sont les parties du cerveau qui seront employées pour les différentes composantes du processus de lecture. Au fil du temps, l’homme a développé différents modules (zones de traitement), capables de traiter les informations provenant de diverses modalités, telles que les images ou les sons. C’est en fonction de son environnement que l’homme a appris à développer des liens et circuits entre ces modules, afin que puissent s’établir des connexions pour lire efficacement (Illustration 3.1). Les bases de la lecture sont les modules à partir desquels les circuits de lecture se forment. Ces circuits de lecture et ces connexions entre les modules aident à comprendre comment le cerveau lit les mots. Il y a deux millions d’années, ni la lecture, ni la parole n’existaient. La communication se faisait alors par gestes. Il a fallu près de deux millions d’années au cerveau pour développer la parole, qui est considérée comme une capacité innée, à l’instar de la marche et de la respiration. Il y a à peine 4.000 ans que l’homme a inventé l’écriture, et que l’opération cognitive de la lecture a donc vu le jour. Mais 4.000 ans n’ont pas suffi au cerveau pour développer des processus de lecture. C’est pourquoi le cerveau doit employer des mécanismes plus anciens, les modules visuel et auditif, et les relier à l’aide de circuits de lecture. Il faut apprendre à établir ces liens étant donné qu’ils ne se développent pas naturellement comme le langage. Dans le monde lettré qui est le nôtre, le cerveau a besoin de former des circuits de lecture afin qu’il puisse rapidement acquérir de nouvelles informations. Illustration 3.1 Les origines de l’alphabétisme
  • 24. 24 Apprendre au cerveau à lire Modules Lors de la lecture, le cerveau mobilise deux modules importants : 1 Un module auditif à l’avant du cerveau, chargé du traitement de la parole ; 2 Un module visuel à l’arrière du cerveau, chargé de l’accès aux images visuelles. Les modules sont des régions du cerveau qui ont développé des spécialisations pour le traitement d’informations provenant de modalités différentes (Illustration 3.2). Les modules auditif et visuel de lecture sont eux-mêmes composés de mécanismes sous-traitants, spécialisés dans différents domaines : les sons et les prononciations dans le module auditif, les lettres et les mots dans le module visuel. Le module auditif (avant du cerveau) Le module auditif à l’avant du cerveau est le siège de deux sous-composants que l’on emploie lors de la lecture : les prononciations et les phonèmes. Les prononciations Les prononciations des mots que nous apprenons au cours de notre vie sont stockées dans le module auditif, à l’avant du cerveau. La fluence verbale est une mesure du nombre de mots de la langue parlée qu’un enfant connaît, reconnaît et emploie. En outre, le fait de posséder une certaine fluence verbale est une condition importante pour apprendre à lire, puisque la parole est la résultante que nous produisons au cours de la lecture. Pour que des connexions puissent se faire entre les prononciations et les formes globales des mots, il faut que les prononciations soient déjà présentes. Les enfants développent naturellement une certaine fluence verbale au travers de leur exposition constante à des mots de vocabulaire nouveaux, étant donné que la parole est une compétence naturelle, alors que la lecture ne l’est pas. Les parents et les enseignants ont la responsabilité d’expliquer le sens des mots que les enfants ne connaissent pas et devraient les encourager à employer des mots nouveaux. Toute forme de communication aux enfants, y compris la lecture d’histoires, les aide à
  • 25. 25 Apprendre au cerveau à lire Il y a deux modules dans le cerveau qui forment les bases de construction des circuits de lecture. À l’avant du cerveau, on trouve le module auditif, responsable de la conscience phonémique, qui est le siège de deux sous-composants : la zone de prononciations, qui comporte tous les mots que nous pouvons prononcer, et la zone des phonèmes, qui comporte les petites unités de sons qui composent les mots. La conscience phonémique se développe lorsqu’on apprend que les mots de la langue parlée sont composés de petites unités de sons que l’on peut manipuler pour former de nouveaux mots. À l’arrière du cerveau, on trouve le module visuel, responsable de la conscience graphémique, qui est le siège de deux sous-composants : une zone de formes de mots, qui comporte des images de mots entiers, et une zone de formes de lettres, qui comporte les formes des lettres. La conscience graphémique se développe lorsqu’on comprend que les mots sont composés de différentes combinaisons de formes de lettres. Illustration 3.2 Les modules du langage
  • 26. 26 Apprendre au cerveau à lire développer une certaine fluence verbale dans le module auditif. Les phonèmes À l’avant du cerveau, il existe aussi un sous-composant des phonèmes dans le module auditif, comportant des représentations d’unités de son plus petites que la prononciation des mots entiers. Quand les enfants ont acquis la conscience phonémique, ils sont capables de découper les prononciations des mots en unités phonémiques de son dans le module auditif. Ils comprennent ainsi que les mots de la langue parlée sont composés d’unités de son plus petites qui peuvent être à leur tour manipulées. Ils prennent aussi conscience des différentes unités de son. La plus grande unité de son dans un mot est la syllabe (p. ex. municipal : /mu/-/ni/-/ci/-/pal/), suivie au niveau sous-syllabique par l’unité d’attaque / rime (p.ex. pomme :  /p/-/om/ ). La plus petite unité est le phonème (par ex. pomme : /p/‑/o/‑/m/). Alors que la conscience phonémique est spécifique aux unités phonémiques individuelles ( /p/‑/o/‑/m/ ), la conscience phonologique concerne également de plus grandes unités de son dans les mots ( /p/‑/om/ ou /mu/‑/ni/‑/ci/‑/pal/ ). Le développement de la conscience des sons dans les mots est une condition préalable pour apprendre à lire puisqu’elle nous prépare à découper et à prononcer des mots (décodage). La conscience phonémique est, en soi, un très bon indice pour prédire les habiletés ultérieures de lecture. Comment enseigne-t-on la conscience phonémique à l’avant du cerveau ? L’emploi de jeux et d’activités ludiques constitue l’une des stratégies les plus efficaces pour développer la conscience phonémique. Des groupes d’images ou d’objets peuvent être utilisés dans un jeu de devinettes dans lequel on demande aux enfants d’identifier une image dont ils connaissent le son initial, par exemple l’image d’une balle, en leur disant : « je cherche quelque chose qui commence par le son  / b / ». Ce jeu de devinette permet aux enfants de comprendre que les mots sont composés d’unités de son, et leur apprend à isoler ces mêmes unités de son dans les mots. Les comptines constituent un excellent moyen de commencer à développer la conscience phonologique, grâce à leur répétition, leur rythme et leurs rimes. Les enfants entendent continuellement les mêmes sons dans
  • 27. 27 Apprendre au cerveau à lire Illustration 3.3 La conscience phonologique les mots qui constituent les comptines. Les jeux de rimes permettent aux enfants de comparer les sons de mots qui désignent des images afin de trouver quelles images partagent les mêmes sons. Les enfants ne doivent pas nécessairement avoir complètement assimilé une unité de son avant de se familiariser avec une autre (Illustration 3.3). Au début, les enfants auront probablement plus de facilité à acquérir des unités de son plus larges, étant donné que les unités phonémiques plus petites sont Il existe six opérations principales de conscience phonémique que l’on peut utiliser pour manipuler les sons des mots : « faire correspondre » (est-ce que « faire » et « fatigué » commencent par le même son ?), « isoler » (quel est le son du milieu dans « tir » ?), « substituer » (remplace le son /m/ dans « manger » par le son /r/), « assembler » (assemble ces sons : /l/, /a/, /k/), « segmenter » (sépare les sons dans « lac ») et « supprimer » (dis « plier » sans le son /p/). On distingue aussi différentes unités de son que l’on peut identifier et manipuler (Goswami, 2003). La plus grande unité de son est la syllabe, suivie au niveau sous-syllabique par l’unité d’attaque/rime. La plus petite unité de son est le phonème. Lorsque les enfants peuvent effectuer ces diverses opérations de manipulation des unités de son, ils prennent conscience des unités phonologiques.
  • 28. 28 Apprendre au cerveau à lire plus difficiles à isoler. Les enfants peuvent développer la conscience syllabique en frappant dans les mains pour chaque syllabe du mot, par exemple en frappant dans les mains trois fois pour le mot « crocodile » (« cro / co / dile »). Toutes ces activités contribuent au développement du module auditif, à l’avant du cerveau. Le module visuel (arrière du cerveau) Le module visuel à l’arrière du cerveau est le siège de deux sous-composants utilisés lors de la lecture : la reconnaissance de la forme des mots et l’identification de la forme des lettres. La reconnaissance des mots La zone de reconnaissance des mots dans le module visuel sert à reconnaître les formes des mots entiers. Au cours du développement normal, les enfants commencent par reconnaître des symboles. Par exemple, en voyant les arches jaunes de la marque McDonalds, ils disent « McDonalds ». Leur cerveau active la forme visuelle des arches jaunes dans le module visuel à l’arrière du cerveau, et transmet ces informations au sous-composant de prononciation à l’avant du cerveau (Illustration 3.4). Les enfants peuvent également reconnaître des mots simples tels que le STOP des panneaux de signalisation, sans qu’on leur ait appris au préalable à quels sons les lettres correspondent. Lors de ce type de lecture, appelé stade logographique, l’apprenant se souvient de mots grâce à leurs caractéristiques visuelles (Illustration 3.5). Ainsi, le mot moto, dont les deux « o » ressemblent à des roues, permet aux enfants d’identifier le mot rien qu’à ses caractéristiques visuelles. Des jeux de rime, ainsi que des fiches peuvent être utilisés pour familiariser les enfants aux formes globales des mots dans le but d’établir et d’enrichir le module de la forme visuelle des mots. En effet, les mots les plus fréquents peuvent être présentés sur des cartes (aimantées) de telle manière que leur contour global soit mis en évidence. De cette manière, le contour global du mot facilite sa reconnaissance précoce. L’identification des lettres Le sous-composant d’identification des lettres dans le module visuel est spécialisé dans l’identification les
  • 29. 29 Apprendre au cerveau à lire Illustration 3.4 La reconnaissance des symboles Avant que les enfants n’apprennent à lire, ils commencent par reconnaître des objets ou des mots familiers. Par exemple, en voyant les arches jaunes de McDonalds, ils diront « McDonalds ». Dans ce cas, ils accèdent à la forme complète de l’image dans le module visuel, et l’associent à la prononciation dans le sous-composant de prononciation du module auditif. Cette étape logographique précoce est un précurseur au développement du circuit inférieur de lecture. lettres de l’alphabet. On note parfois des inversions de lettres chez les enfants qui commencent à écrire les lettres, car leur cerveau effectue un traitement spatial pour apprendre la forme correcte des lettres. Le C’est lors du stade logographique que les enfants apprennent à reconnaître des mots simples, sur la base de leur contour global. Par exemple, les enfants apprennent le mot « moto » en se rappelant que les deux « o » représentent les deux roues. Cet apprentissage direct peut se produire préalablement à toute instruction concernant les correspondances entre lettres et sons. En fait, le cerveau mémorise plutôt les mots entiers et les identifie directement. Illustration 3.5 Le stade logographique
  • 30. 30 Apprendre au cerveau à lire traitement spatial implique une bonne compréhension des propriétés physiques des lettres dans l’espace. Une manière d’exploiter ce traitement spatial est l’approche kinesthésique. La présentation de lettres en papier de verre permet aux enfants de sentir la forme des lettres et de les visualiser. En plaçant une feuille de papier sur une lettre en papier de verre, les enfants peuvent tracer la forme de la lettre eux-mêmes avant d’avoir vraiment développé des compétences à l’écrit. Ils peuvent utiliser de la pâte à modeler pour construire les formes des lettres. De grandes lettres découpées dans du carton permettent également de sentir les formes des lettres, de les visualiser et d’en tracer les éléments. Une autre activité ludique consiste à coller des objets ou des images qui commencent tous ou toutes par la même lettre sur une grande forme en carton correspondant à cette lettre. On peut ainsi montrer aux enfants des exemples de mots pour leur montrer que ceux-ci sont composés de lettres. On appelle conscience graphémique la capacité à identifier les formes des lettres et à ensuite reconnaître la forme globale des mots. Les parents et les enseignants demandent souvent conseil pour préparer au mieux les enfants à lire. Bien qu’il n’y ait pas de façon naturelle pour enseigner la lecture, étant donné que celle-ci demeure un processus artificiel, les bases de la lecture devraient être enseignées de manière à correspondre au développement naturel de l’enfant. La majeure partie de ce travail préparatoire pour enseigner la lecture peut se faire à l’aide de jeux et d’activités ludiques. Pour préparer le cerveau à lire, il faut activer deux modules importants: le module auditif et le module visuel. Lorsque les enfants apprennent que la langue parlée est faite d’unités de sons plus petites, ils développent la conscience phonémique dans le module auditif ; et lorsque les enfants prennent conscience du fait que les mots écrits sont constitués de lettres, ils développent la conscience graphémique dans le module visuel. À ce stade, le cerveau est prêt à commencer à développer les circuits de lecture entre ces modules, circuits qui formeront la base de leurs habiletés ultérieures de lecture.
  • 31. 31 Apprendre au cerveau à lire Les circuits de lecture Cet ouvrage aborde le processus d’acquisition de la lecture en se basant sur le modèle neurologique cognitif, selon lequel la lecture est une opération cognitive complexe ayant lieu dans le cerveau, et qui doit être apprise explicitement. Lors de la lecture, l’information est transférée du module visuel à l’arrière du cerveau au module auditif à l’avant du cerveau. La lecture passe par la perception visuelle du mot à l’arrière du cerveau et relie ensuite cette information aux sons correspondants à l’avant du cerveau. Au sein de ce flux directionnel d’informations, deux circuits principaux permettent de lire des mots : un circuit supérieur et un circuit inférieur. Le décodage (le circuit supérieur) Le circuit supérieur permet de décoder et de prononcer les mots. Le terme scientifique utilisé pour désigner ce processus est la « conversion des graphèmes en phonèmes ». Le circuit supérieur prend naissance à l’arrière du cerveau dans le sous-composant d’identification des lettres du module visuel. Après avoir analysé les lettres d’un mot et leurs positions respectives, l’information est transmise par ce circuit supérieur au sous-composant des phonèmes du module auditif à l’avant du cerveau (Illustration 3.6). Pour que le mot puisse être décodé, chaque lettre est associée au son correspondant. Ce circuit se développe au cours de l’apprentissage des correspondances entre les graphèmes et les phonèmes (méthodes phoniques). La formation du circuit supérieur dans le cerveau fournit un nouveau mécanisme pour lire des mots inconnus (Illustrations 3.7 et 3.8). Au lieu de deviner les mots sur la base d’indices picturaux, on peut décoder les mots en déterminant la prononciation la plus probable. Le circuit supérieur permet de décoder un mot inconnu sur la base de la connaissance des relations entre lettres et sons. Étant donné que la plupart des mots sont nouveaux quand on apprend à lire, le circuit supérieur est un outil très puissant permettant d’apprendre des mots nouveaux puisqu’il nous aide à déchiffrer le code phonologique.
  • 32. 32 Apprendre au cerveau à lire Illustration 3.6 Le stade phonologique Essayez de lire le mot grec kαλησπέρα. Vous éprouverez des difficultés à décoder ce mot, à moins que vous ne sachiez que la lettre ρ se prononce /r/ en grec. Une fois que les lettres et que leurs sons correspondants sont appris, on peut alors associer les formes des lettres aux phonèmes. C’est alors que l’on emploie la conscience phonémique pour assembler ces sons de manière à prononcer /kalispera/, ce qui signifie « bonne après-midi » en grec. Le sous-composant des phonèmes à l’avant du cerveau n’est pas seulement spécialisé dans la reconnaissance des unités de son dans les mots, mais il permet également de manipuler les sons. La manipulation des sons se définit comme la capacité à traiter les petites unités de sons au sein des mots. Différentes manipulations correspondent à différentes opérations de conscience phonologique. Bien que l’on puisse enseigner ces opérations exclusivement par la manipulation des son, elles sont souvent plus faciles à acquérir à l’aide du support visuel des lettres.
  • 33. 33 Apprendre au cerveau à lire Illustration 3.7 Le stade orthographique En lisant le mot « lac » pour la première fois, nous ne disposons pas d’entrée pour ce mot dans la zone de reconnaissance des formes des mots du module visuel à l’arrière du cerveau. Dès lors, nous prononçons ce mot en employant le circuit supérieur qui fait correspondre les formes des lettres aux phonèmes. La conscience phonémique nous permet d’assembler les sons pour prononcer le mot. Dès l’instant où l’on peut voir et entendre le mot simultanément, le cerveau l’enregistre dans sa globalité, créant ainsi une entrée dans le sous-composant de la forme du mot dans le module visuel, qui est relié au sous-composant de la prononciation dans le module auditif à l’avant du cerveau. Ce processus de mémorisation de la forme globale d’un mot est appelé lexicalisation. Les enfants peuvent alors constater que la manipulation des lettres induit la manipulation des sons. Ceci constitue la base du développement des habiletés de décodage et de la mise en place du circuit supérieur de lecture dans le cerveau.
  • 34. 34 Apprendre au cerveau à lire Illustration 3.8 L’accès lexical Lorsque nous voyons le mot « lac » et que nous connaissons ce mot, nous avons automatiquement accès à celui-ci dans le sous-composant de la forme des mots de notre module visuel. Le circuit inférieur se connecte rapidement au sous- composant de la prononciation dans le module auditif, ce qui nous permet de prononcer ce mot. L’accès direct (le circuit inférieur) C’est lorsque les enfants reconnaissent des symboles (tels que les arches jaunes de McDonalds) ou des mots simples en se fondant sur leurs caractéristiques visuelles globales (tels que le mot « moto ») qu’ils s’apprêtent à lire. Dans les exemples ci-dessus, les enfants ont directement accès au sous-composant de la prononciation dans le module auditif. Le circuit inférieur de lecture va du sous- composant de la reconnaissance du mot dans le module visuel à l’arrière du cerveau au sous-composant de la prononciation du mot (sortie vocale) dans le module
  • 35. 35 Apprendre au cerveau à lire auditif à l’avant du cerveau. Ainsi, aucune connaissance des lettres, ni des relations entre les lettres et les sons, n’est utilisée pour lire les mots à ce stade logographique précoce. Une fois que le circuit supérieur de lecture s’est développé et que les mots nouveaux peuvent être décodés, le cerveau peut alors enregistrer un mot directement dans sa globalité pour stocker sa forme visuelle associée à sa prononciation dans le circuit inférieur. Ainsi, il existe deux façons de créer une représentation du mot dans la banque de mots du cerveau, située dans le circuit inférieur. La première est l’apprentissage direct à partir de la signification ou de l’association d’une image sans la décoder. C’est le cas pour l’enfant qui apprend le mot moto en fonction de ses caractéristiques visuelles globales. La seconde est l’apprentissage par décodage qui a lieu dans le circuit supérieur où le mot est décodé, ce qui permet d’établir une correspondance entre l’identification de la forme du mot et sa prononciation. À l’âge adulte, les circuits de lecture supérieur et inférieur sont censés être complètement développés. Lors de la lecture, le circuit inférieur est aux commandes, permettant ainsi d’accéder directement à la banque de mots du cerveau. Les lecteurs expérimentés disposent d’une connaissance étendue des mots. Leur circuit inférieur accède directement à la plupart des mots qu’ils lisent. Grâce à sa rapidité et à sa précision, ce circuit est le plus efficace. Le lecteur ne doit pas décoder chaque mot, vu que cela lui prendrait trop de temps ; d’ailleurs, ce ne serait d’aucune utilité puisque ces mots sont déjà présents dans sa banque de mots. C’est seulement au moment où l’on rencontre un mot qu’on ne connaît pas qu’on dépend du circuit supérieur pour le décoder. Des expériences scientifiques ont démontré que le circuit inférieur fonctionne beaucoup plus rapidement que le circuit supérieur et que le circuit inférieur se renforce au fil du temps. Cependant, le circuit supérieur est nécessaire pour lire des pseudo-mots dépourvus de sens (comme « grovibe ») étant donné que ces mots ne sont pas stockés dans la banque de mots du circuit inférieur et doivent donc être décodés (Illustration 3.9).
  • 36. 36 Apprendre au cerveau à lire Illustration 3.9 Le lecteur expérimenté Le lecteur expérimenté se sert essentiellement du circuit inférieur pour lire les mots, car ce circuit est rapide et efficace. Le circuit inférieur accède aux mots en l’espace de 150 à 250 millièmes de seconde après la lecture. Ce circuit est donc bien plus rapide que le circuit supérieur qui accède aux mots dans un délai de 300 à 500 millièmes de seconde après la lecture. La recherche en imagerie cérébrale a démontré que le circuit inférieur montre des réseaux d’activations plus forts pour les mots connus que pour les mots inconnus, et que l’activation dans le circuit inférieur augmente avec l’âge à mesure que l’on apprend plus de mots (Pugh et al., 2000). Le circuit supérieur joue encore un rôle important dans le décodage de mots inconnus et présente un réseau d’activations plus fort pour les mots inconnus que pour les mots connus.
  • 37. 37 Apprendre au cerveau à lire Résumé Les modules visuel et auditif du cerveau humain sont connectés par deux circuits. On a directement accès aux mots connus à l’aide du circuit inférieur où se trouve la banque de mots du cerveau. Le circuit inférieur relie la forme visuelle des mots à l’arrière du cerveau aux prononciations (sortie vocale) à l’avant du cerveau. Les mots qui ne peuvent être reconnus sont traités par le circuit inférieur, qui détermine la prononciation la plus probable. Le circuit supérieur se charge du décodage, en associant l’identification des lettres à l’arrière du cerveau aux phonèmes du module auditif à l’avant du cerveau. C’est dans ce module que les sons sont assemblés pour produire la prononciation du mot. Cette information est ensuite renvoyée au circuit inférieur afin qu’une nouvelle entrée dans la banque de mots du cerveau puisse être créée. Ainsi, dès que l’on revoit ce mot, le circuit inférieur peut y accéder directement.
  • 38. 38 Apprendre au cerveau à lire 4 L’enseignement de la lecture Les pédagogues ont développé différentes méthodes pour apprendre à lire au cerveau sur la base d’observations et, depuis peu, des conseils fournis par la recherche pédagogique. À l’aide de l’imagerie cérébrale, les neuroscientifiques arrivent aujourd’hui à examiner directement la façon dont l’enseignement de la lecture peut influencer le développement de l’apprentissage de la lecture dans le cerveau. Ils parviennent aussi à isoler les composants du système de lecture pour envisager les méthodes d’apprentissage de la lecture les plus efficaces. Quand on apprend de nouveaux mots, soit le circuit inférieur, soit le circuit supérieur du cerveau peut être employé. Pour lire des mots nouveaux isolés, la méthode la plus efficace est le décodage des mots par le circuit supérieur. Néanmoins, le circuit inférieur joue un rôle important dans le décodage de nouveaux mots selon le sens ou le contexte. Le cerveau emploie souvent une combinaison de ces deux circuits, ce qui implique un décodage partiel pour trouver un mot qui corresponde au sens de la phrase ainsi qu’aux relations entre lettres et sons du mot. La méthode phonique et la méthode globale Il existe deux méthodes principales pour enseigner la lecture. La première est la méthode phonique dont le but est d’apprendre aux enfants à reconnaître les sons et les lettres individuelles. L’autre est la méthode globale dont le but est d’enseigner aux enfants à reconnaître la forme globale des mots dans un contexte de sens. Ces deux méthodes d’apprentissage visent différents circuits du cerveau (Illustration 4.1). L’instruction phonique stimule le circuit supérieur du cerveau. Ce circuit traite les formes des lettres individuelles à l’arrière du cerveau et les relie aux sons correspondants à l’avant du cerveau. La méthode globale active le circuit de lecture inférieur du cerveau qui traite les formes globales des mots à l’arrière du cerveau et
  • 39. 39 Apprendre au cerveau à lire Illustration 4.1 La méthode phonique et la méthode globale Les deux méthodes courantes d’apprentissage de la lecture sont la méthode phonique et la méthode globale. Chacune cible un circuit différent du cerveau. La méthode phonique stimule le circuit supérieur, fournissant des stratégies pour décoder des mots nouveaux, tandis que la méthode globale fait appel au circuit inférieur dans le but d’accroître la compréhension globale par l’apprentissage de mots en contexte. Alors que des débats font toujours rage sur les avantages et inconvénients des méthodes phonique et globale, ces dernières sont tout aussi importantes l’une que l’autre pour le développement des circuits de lecture. Il existe une méthode dite mixte dans les programmes d’apprentissage de la lecture, qui consiste en un mélange synergique entre la méthode globale et la méthode phonique.
  • 40. 40 Apprendre au cerveau à lire les relie à leur prononciation à l’avant de celui-ci. Alors que le circuit supérieur comporte un ensemble de règles qui sont utilisées pour décoder des mots nouveaux , le circuit inférieur stocke le vocabulaire de telle manière que l’on puisse directement reconnaître un mot quand on le rencontre de nouveau. Quand on commence à lire couramment, on fait moins appel au circuit supérieur puisque la plupart des mots que l’on lit sont déjà stockés dans le circuit inférieur. Le circuit supérieur est utile pour apprendre des mots nouveaux car il constitue une stratégie (indépendante du sens) pour déchiffrer la prononciation d’un mot. Ce circuit analyse les traits visuels d’un mot nouveau et détermine ensuite la prononciation la plus probable en se basant sur les règles de correspondance entre lettres et sons. Bien qu’aucune méthode pédagogique ne soit purement phonique (sans contact avec des textes), ou purement globale (sans instruction de décodage), ces deux méthodes élaborent des façons différentes de lire des mots inconnus. La méthode phonique favorise le décodage de mots pour déterminer la prononciation la plus probable. La méthode globale, quant à elle, anticipe plutôt la prononciation d’un mot inconnu sur la base du sens de la phrase et du contexte du mot dans le récit. Alors que la lecture de mots inconnus isolés de tout contexte nécessite un décodage pour déterminer la prononciation la plus probable, il est possible de décoder des mots inconnus présentés dans un contexte ou d’en deviner le sens grâce à des indices contextuels. La recherche en électro-encéphalographie (EEG) a démontré que le cerveau prédit les mots dans une phrase sur la base du sens. Lorsqu’on lit une phrase qui n’a pas totalement du sens, le cerveau réagira au mot qui n’a pas sa place dans la phrase. Ces mots-là sont appelés « sémantiquement incongrus ». Par exemple, quand on lit la phrase « Elle a bu un grand verre d’ongles », c’est le mot « ongles » qui produit une incohérence. Après la lecture du mot « ongles », il faut attendre 400 millièmes de seconde pour que le cerveau réagisse en disant : « Attends un peu, il y a quelque chose qui ne va pas ici », et un potentiel électrique négatif est produit (Illustration 4.2). Ceci démontre que le cerveau exploite le sens quand il lit des mots en contexte afin de prédire la prononciation la plus probable d’un mot inconnu.
  • 41. 41 Apprendre au cerveau à lire Les disparités d’apprentissage d’un individu à l’autre alimentent la polémique sur les méthodes phonique et globale. Un programme strictement axé sur la méthode globale ou la méthode phonique néglige le développement soit du circuit supérieur, soit du circuit inférieur. Alors que certains enfants peuvent développer implicitement certaines aptitudes qui ne leur sont pas instruites, la plupart des apprenants ont besoin d’un enseignement explicite. L’enseignement fondamentaliste de la méthode phonique ou globale ne répond pas à tous les besoins d’apprentissage et mène à des disparités des compétences en lecture des différents enfants. Ainsi, dans une même classe, les enfants présentent des capacités inégales et ne se situent pas tous au même stade de développement. Certains auront besoin de la méthode phonique pour décoder rapidement des mots nouveaux, tandis que d’autres auront déjà compris les relations entre lettres et sons et auront besoin de textes contextuels. Pour cette raison, les enseignants devraient opter pour une combinaison équilibrée des deux méthodes en veillant à répondre aux besoins spécifiques de chaque enfant de la classe. Sans cette combinaison équilibrée des deux méthodes, des irrégularités risquent de se développer entre les forces et les faiblesses relatives des circuits supérieur et inférieur. Les enfants à qui l’on enseigne exclusivement la méthode phonique auront des difficultés à identifier des mots dans un texte porteur de sens, ce qui est l’une des fonctions du circuit inférieur, Illustration 4.2 Les mots sémantiquement incongrus Lisez cette phrase : « Elle a bu un grand verre d’ongles ». N’y a-t-il pas quelque chose de bizarre ? Le mot « ongles » n’y a pas sa place. La recherche en électro-encéphalographie montre qu’un potentiel électrique négatif est produit 400 millièmes de seconde après la lecture du mot « ongles », ce qui prouve que le cerveau peut utiliser le contexte de la phrase pour faciliter la lecture.
  • 42. 42 Apprendre au cerveau à lire mais décoderont les mots sans grande difficulté grâce au circuit supérieur. Les enfants à qui l’on enseigne exclusivement la méthode globale éprouveront des difficultés à prononcer des mots nouveaux en utilisant Illustration 4.3 Les méthodes phoniques synthétique et analytique Il existe deux manières courantes d’enseigner la méthode phonique : la méthode phonique synthétique et la méthode phonique analytique. La méthode phonique synthétique enseigne les relations lettre/son au circuit supérieur du cerveau. Généralement, la méthode phonique synthétique comporte une forte composante auditive basée sur les 36 phonèmes que compte la langue française. La méthode phonique analytique est une méthode plus visuelle qui recourt aux séquences communes de mots déjà appris afin de faciliter le décodage de mots nouveaux. Concrètement, ces opérations recourent à des connexions entre le circuit inférieur du cerveau qui fournit le mot analogue, et le circuit supérieur qui détermine les relations lettre/son.
  • 43. 43 Apprendre au cerveau à lire le circuit supérieur du cerveau, mais développeront de bonnes capacités de lecture en contexte grâce au circuit inférieur. Les méthodes phoniques synthétique et analytique Il existe deux manières d’enseigner la méthode phonique : la méthode phonique synthétique et la méthode phonique analytique (Illustration 4.3). La méthode phonique synthétique enseigne les 36 sons de la langue française ainsi que leurs relations avec les lettres correspondantes. Cette méthode s’avère efficace dans la mesure où elle fournit un outil pour décoder n’importe quel mot nouveau. Néanmoins, certains enfants peuvent éprouver des difficultés à identifier les phonèmes vu que ces derniers constituent de très petites unités de son. Ces difficultés sont compréhensibles étant donné la nature artificielle des phonèmes eux-mêmes. Par exemple, certains phonèmes tels que le  / b / sont imprononçables individuellement sans la voyelle  / e / . Néanmoins, la capacité de l’enfant à manipuler les sons individuels et les relations lettre / son constitue un excellent moyen de prédiction des habiletés ultérieures de lecture. La méthode phonique analytique s’appuie sur les radicaux de mots que le cerveau connaît déjà afin d’en décoder de nouveaux (Illustration 4.4). Des recherches ont démontré que les enfants développent cette aptitude dès les premiers stades de l’apprentissage de la lecture. Avec la méthode phonique analytique, le cerveau a recours aux relations lettre / son courantes constituant des « familles de mots ». Il analyse les mots nouveaux au moyen des séquences déjà apprises. Cette méthode fait moins appel à la mémoire de travail puisque la co-articulation (assemblage de sons) est déjà faite. Par exemple, il est facile de décoder « trace » en  / tr /  / ace / , car le cerveau reconnaît facilement les séquences de lettres d’autres mots (telles que « truc » et « très », ainsi que « place » et « race »), alors que la méthode phonique synthétique exige davantage de traitement pour décoder  / t /  / r /  / a /  / s / . Certains mots comportant diverses voyelles variables sont immédiatement reconnaissables grâce aux mots similaires sur le plan visuel.
  • 44. 44 Apprendre au cerveau à lire Illustration 4.4 Simulations informatisées des modèles de lecture Le cerveau est tellement doué pour décoder des mots inconnus en se fondant sur des mots déjà appris que les scientifiques ont créé des simulations de lecture informatisées pour expliquer le processus de lecture (Share, 1995). Le modèle connexionniste lit un nouveau mot en décomposant des séquences similaires de mots déjà appris. Dans cette expérience, l’ordinateur est capable de lire une liste de mots dépourvus de sens avec un taux d’exactitude de 66% après avoir acquis 2.897 mots de base. Un autre modèle informatisé, appelé modèle à double voie en cascade, adopte les mêmes principes, mais possède également un mécanisme de décodage lettre/son similaire au fonctionnement du circuit supérieur du cerveau. Il lit la même liste de mots dépourvus de sens avec un taux d’exactitude de 98%, après avoir acquis les 2.897 mots de base. Les participants humains, après avoir acquis le même nombre de mots de base, lisent les mots dépourvus de sens avec un taux d’exactitude de 91%. Ainsi, si l’on veut expliquer la façon dont le cerveau décode de nouveaux mots, il faut accepter le fait que le cerveau possède un mécanisme de décodage direct (le circuit supérieur), sans toutefois perdre de vue qu’il existe aussi des connexions entre les mots déjà appris et ce mécanisme de décodage. Ces connexions sont connues sous le nom de connexions analytiques. Le facteur d’erreur humaine doit également être pris en considération.
  • 45. 45 Apprendre au cerveau à lire La méthode phonique synthétique recourt au circuit supérieur du cerveau pour lire en développant une compréhension des relations lettre / son qui permettent le décodage des mots nouveaux, alors que la méthode phonique analytique implique une activation plus centrale représentant l’interconnexion entre les deux circuits de lecture. La méthode phonique analytique exploite l’analogie, qui implique une analyse des séquences de lettres courantes et de leurs sons correspondants, en transférant ces informations de mots connus pour identifier les mots inconnus. Pour ce faire, le décodage d’un mot inconnu se fait en comparant les mots connus ayant des relations lettre / son semblables. Les recherches récentes en IRMf, menées par Beneventi et ses collègues, ont montré que le traitement de la plus petite unité de son, le phonème, s’opère dans le circuit supérieur et que le traitement d’une unité de son plus grande, la rime, (telle que la terminaison –ime) a lieu dans une zone plus centrale entre les circuits inférieur et supérieur de lecture. Le traitement analytique de la rime est plus rapide que le traitement des phonèmes. Dans l’hémisphère gauche, les deux circuits de lecture sont en effet reliés et se soutiennent mutuellement. L’intégration de ces deux circuits offre un soutien supplémentaire au décodage, non seulement en se basant sur le sens et le contexte, mais aussi sur l’analogie entre les mots. La banque de mots du cerveau dans le circuit inférieur ne contient pas une liste de mots classés par ordre alphabétique comme un dictionnaire ordinaire. La banque de mots du cerveau est plutôt multidimensionnelle. Alors que certains mots sont regroupés selon le sens, d’autres sont regroupés selon les sons. Ce processus se produit au niveau du subconscient. Au niveau de l’activité consciente, l’assemblage phonologique permet alors de manipuler les sons de mots nouveaux pour trouver des séquences communes. Il est possible d’identifier les sons individuels d’un mot nouveau et de les comparer avec les mots qui y ressemblent. Dans le cerveau, la méthode phonique analytique permet la formation de connexions entre différents sons, lettres et formes globales des mots pour les mots nouveaux qui sont appris. La méthode phonique synthétique implique l’apprentissage des relations entre les sons correspondant aux différentes combinaisons de lettres de la langue française. Habituellement, cette méthode est introduite
  • 46. 46 Apprendre au cerveau à lire avec les associations lettre-nom / lettre-son, les associations lettre-nom / image ou les actions liées aux sons initiaux de mots déjà connus. Une fois les enfants familiarisés aux lettres et aux sons correspondants, on peut utiliser des lettres amovibles pour créer de nouveaux mots. Les mots CVC (consonne-voyelle-consonne) sont faciles à manipuler vu qu’ils constituent des syllabes fermées, qu’ils comportent une voyelle courte et qu’ils contiennent des règles lettre / son faciles à suivre (par exemple « sac », « bol », « tir »). Le composant –VC à la fin des mots CVC est le radical de la rime. Grâce à la méthode phonique analytique, les enfants peuvent se rendre compte que les mots qui se terminent par le même radical partagent la même séquence de sons. Ils peuvent alors manipuler le son initial pour former de nouveaux mots. Par exemple, on peut remplacer le  / b / du mot « bol » par le son  / k / pour former le mot « col ». Les enfants peuvent aussi accomplir d’autres opérations avec les mots CVC à l’aide de lettres amovibles de l’alphabet. Les lettres peuvent être assemblées pour fusionner des sons, ce qu’on appelle la co-articulation, ou séparées pour illustrer la segmentation, l’isolation ou la suppression. Les enfants peuvent aussi substituer des lettres à d’autres pour former de nouveaux mots. Par exemple, ils peuvent remplacer le son  / è / de « sel » par le son  / o / pour faire « sol ». Une fois que les enfants maîtrisent ces opérations, ils comprennent que les mots sont constitués de différentes unités de son qui correspondent à différentes lettres, qui peuvent à leur tour être manipulées. Un travail au niveau des mots en utilisant des lettres amovibles combine les méthodes phoniques synthétique et analytique, ainsi que la conscience phonémique en une seule leçon. Néanmoins, la méthode phonique ne constitue qu’une partie d’un programme d’apprentissage plus large, et devrait être intégrée dans le contexte de la lecture réelle. La méthode mixte La méthode mixte implique le développement de programmes de lecture qui visent le circuit supérieur (méthode phonique synthétique), le circuit inférieur (méthode globale) et les connexions entre les deux circuits (méthode phonique analytique). Le développement des deux circuits de lecture au moyen d’instructions
  • 47. 47 Apprendre au cerveau à lire Illustration 4.7 La méthode mixte Comment la méthode mixte agit-elle dans le cerveau ? Le cerveau possède deux modules : un module visuel à l’arrière du cerveau et un module auditif à l’avant du cerveau. Dès que l’on comprend, en utilisant le module auditif, que les mots prononcés sont constitués de petites unités de son, on développe la conscience phonémique. Une fois que l’on a appris, en employant le module visuel, que les mots sont constitués de lettres, on a alors développé la conscience graphémique. C’est ainsi que l’on peut créer des circuits de lecture entre ces deux modules. La méthode phonique synthétique apprend aux enfants à identifier la forme d’une lettre et à l’associer à un phonème, alors que la méthode globale permet d’associer le sous-composant de la reconnaissance de la forme d’un mot à la prononciation. Enfin, la méthode phonique analytique permet l’utilisation de mots déjà appris pour décoder de nouveaux mots (par analogie).
  • 48. 48 Apprendre au cerveau à lire explicites est un élément essentiel de la méthode de lecture mixte (Illustration 4.7). Les méthodes mixtes doivent également présenter une certaine souplesse pour permettre d’enseigner à des groupes d’enfants ayant des compétences et des besoins différents. La philosophie de la méthode mixte est de maintenir un équilibre entre la lecture faite aux enfants, celle faite avec les enfants et celle effectuée par les enfants. Lorsqu’un texte est trop compliqué pour que les enfants le lisent seuls, on peut utiliser les approches de lecture partagée ou guidée. La lecture en groupe est largement utilisée pour familiariser les enfants aux textes. L’instituteur encourage un groupe d’élèves à lire en même temps que lui. La lecture en groupe rend le texte accessible aux enfants, ceux-ci appréciant la sensation que leur procure alors la lecture. Pour une lecture en groupe, il convient de sélectionner des textes prévisibles contenant des répétitions. Ainsi, les enfants prennent goût à la lecture à la fois en reconnaissant les mots et en comprenant le sens. Lors d’une lecture en groupe, les enseignants peuvent adapter aux compétences de chaque enfant leurs questions portant sur les phonèmes, les mots, la grammaire et le sens. Les exercices de questions et réponses, dirigés par les enseignants, et avec leur soutien, s’appellent « l’échafaudage ». Avec l’aide des professeurs, l’attention des élèves peut être attirée explicitement sur les règles lettre / son, sur la place de ces lettres dans les mots, sur les mots et leur place dans la phrase, et sur le sens général du texte. Le soutien auditif peut venir de la lecture en groupe elle-même ou de la répétition du texte pendant des activités d’écoute. Quand les enfants commencent à éprouver la sensation de lire en écoutant une histoire, il faut les encourager à lire eux-mêmes le texte pour qu’ils puissent décoder et lire les lettres, les mots et les phrases. Les élèves acquièrent de la fluence et du vocabulaire tout en lisant. En employant des textes contenant des sons représentés par des lettres intégrées dans des mots, les enfants prennent conscience des sons que produisent ces lettres et du fait que les mots sont constitués de lettres, et les phrases, de mots. De cette manière, les relations apprises par le travail au niveau des mots, à l’aide des méthodes phoniques synthétique et analytique, peuvent être transférées des mots isolés aux mots pris dans leur contexte. La mise en évidence d’une lettre ou d’un son spécifique dans un texte permet aux enfants de mieux comprendre la relation lettre / son et sa
  • 49. 49 Apprendre au cerveau à lire place au sein des mots. Cette mise en évidence facilite le découpage d’un mot en différentes unités de son, étant donné que la division a déjà été réalisée. La répétition d’une lettre ou d’un son mis en évidence dans tout le texte permet un renforcement implicite (Illustration 4.8). La lecture assistée fait partie intégrante d’un programme de méthode mixte, et sert à rendre des textes accessibles à des enfants ayant différents niveaux de lecture. Une fois que les enfants ont acquis des capacités de lecture et d’écriture, ils peuvent tenter par eux-mêmes de décoder un texte nouveau. La lecture assistée implique un enseignement à un petit groupe composé d’enfants pourvus de capacités similaires. Le professeur écoute les enfants lire une histoire et les assiste si nécessaire. L’attention des enfants peut être attirée sur différents aspects de l’histoire pour s’assurer qu’ils suivent bien le Illustration 4.8 La lecture en groupe au moyen de méthodes phoniques « avec lettres intégrées dans les mots » La lecture en groupe au moyen de méthodes phoniques « avec lettres intégrées dans les mots » est utilisée pour enseigner à la fois la méthode phonique synthétique et la méthode phonique analytique dans le cadre de la lecture réelle. Les éléments du processus de lecture sont expliqués aux enfants au cours d’une leçon de groupe. Le professeur pose des questions de façon à adapter l’enseignement aux besoins du groupe d’enfants ayant tous des compétences différentes, et les enfants peuvent apprendre les uns des autres au cours de ces discussions de groupe. L’approche multi-sensorielle soutient les enfants ayant des styles d’apprentissage différents et fait en sorte que tous les enfants soient sur la voie de l’acquisition des compétences en lecture.
  • 50. 50 Apprendre au cerveau à lire sens pendant la lecture. Lorsqu’un enfant est confronté à un mot qu’il ne peut pas lire, le professeur l’assiste alors pour l’amener à utiliser une méthode efficace pour déchiffrer le mot. La plupart du temps, la méthode initiale impose à l’enfant de relire la phrase depuis le début, jusqu’au mot inconnu. Ensuite, l’enfant essaie de deviner le sens du mot en se basant sur ce qu’il a lu précédemment. S’il ne comprend toujours pas le mot, il peut alors continuer à lire jusqu’à la fin de la phrase et essayer à nouveau de déchiffrer le mot en fonction du sens de la phrase complète. L’illustration 4.9 montre le type de questions que le professeur peut poser lors de la lecture assistée. Inversement, la méthode peut être fondée sur la phonologie, soit en décodant le mot lettre par lettre, en ayant recours à la méthode phonique synthétique, soit en utilisant la méthode phonique analytique pour examiner des mots qui se ressemblent afin d’avoir des indices supplémentaires sur la prononciation d’un mot inconnu. Parfois, il est utile d’isoler les mots les plus difficiles et d’en discuter avec les élèves avant d’entamer la lecture. Cette étape peut être effectuée lors de l’introduction du livre. Avoir les mots difficiles fraîchement en mémoire permet de consolider la fluence verbale lors de la lecture assistée. Pour la lecture assistée, il convient de choisir des textes d’un niveau approprié pour que les enfants puissent lire la plupart des mots (90-95% d’exactitude), sinon ils se sentiront frustrés et ne comprendront plus le sens. Il faut encourager la lecture individuelle car elle permet aux enfants de lire pour leur plaisir. Le matériel de lecture mis à disposition devrait inclure une gamme de livres comprenant de la fiction et d’autres genres pour stimuler l’envie de lire. Le niveau de lecture approprié pour une lecture individuelle est de l’ordre de 95% de mots compris, c’est pourquoi il est très important de motiver les enfants lorsqu’ils apprennent à lire. On associe à la lecture deux types de motivations pour un enfant : la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque. La motivation intrinsèque de l’enfant l’amène à lire par intérêt personnel, pour explorer le monde nouveau de la lecture et pour découvrir des sujets qui le passionnent. Les enfants motivés intrinsèquement prennent du plaisir en lisant. Quand ils sont confrontés à une difficulté, ils veulent s’en sortir par eux-mêmes. Ils Illustration 4.9 Les questions à poser lors de la lecture assistée
  • 51. 51 Apprendre au cerveau à lire persistent et se plaisent à accomplir une tâche difficile. Les enfants motivés intrinsèquement passent une grande partie de leur temps à lire parce qu’ils en retirent une satisfaction cognitive et émotionnelle. Pour évaluer la motivation intrinsèque, on emploie des variables telles que la curiosité et l’implication. Lorsqu’on éveille la curiosité d’un enfant, celui-ci va se concentrer sur la description des événements et va faire preuve d’un intérêt plus prononcé pour la suite de l’histoire. Des efforts plus importants d’ordre cognitif aboutissent à des jugements plus justes et à une compréhension plus approfondie du texte. La motivation extrinsèque implique la participation à la lecture résultant d’exigences et de valeurs extérieures. Elle est mesurée à l’aide de variables telles que la reconnaissance, les résultats scolaires, les valeurs sociales, la compétition et la conformité. Les enfants dont la motivation est extrinsèque lisent pour éviter des conséquences négatives et pour recevoir des récompenses extérieures plutôt que pour leur satisfaction cognitive et émotionnelle. Malheureusement, la motivation extrinsèque s’avère être improductive pour la compréhension du texte, étant donné que le lecteur ne prête que peu d’attention à certains aspects de celui-ci, ce qui entraîne des méthodes d’apprentissage inefficaces et des déductions erronées. La motivation extrinsèque a des effets négatifs sur l’envie de lire alors que la motivation intrinsèque augmente la compréhension ainsi que la quantité de textes que les enfants liront pour leur propre plaisir. Résumé La recherche pédagogique et les méthodes utilisées en classe offrent une série de techniques pour un enseignement efficace de la lecture. Alors que la recherche avancée sur le cerveau n’existait pas lorsque ces méthodes d’instruction ont vu le jour, elle permet aujourd’hui de leur donner une légitimité scientifique. Il n’est plus nécessaire de débattre pour savoir si une technique est meilleure qu’une autre. Nous avons une vue plus globale. Différentes approches ciblent différentes parties du cerveau lors de la lecture, et il faut s’efforcer de cibler simultanément plusieurs modules, circuits et connexions afin de produire des synergies d’apprentissage et de former des enfants qui aiment lire.
  • 52. 52 Apprendre au cerveau à lire 5 L’orthographe et la composition L’orthographe mobilise tant le circuit supérieur que le circuit inférieur de l’hémisphère gauche du cerveau. Tandis que la lecture s’effectue de l’arrière à l’avant du cerveau (du visuel à l’auditif), l’orthographe, quant à elle, s’effectue de l’avant à l’arrière du cerveau (de l’auditif au visuel). L’orthographe aboutit à des mots écrits, tandis que la lecture aboutit à la prononciation des mots. L’obtention de l’orthographe d’un mot passe par sa prononciation à l’avant du cerveau, et ensuite par l’accès à sa forme visuelle à l’arrière du cerveau. Ce processus implique un changement directionnel dans le circuit inférieur de l’hémisphère gauche. Le rappel direct (le circuit inférieur) Le circuit inférieur du cerveau contient une banque de mots reliée au sous-composant de la prononciation à l’avant du cerveau ainsi qu’au sous-composant de la forme visuelle des mots à l’arrière du cerveau (Illustration 5.1). Cette banque de mots comporte les formes complètes des mots, ce qui permet un rappel direct lorsqu’il faut les orthographier. Le cerveau ne contient pas de banques de mots différentes pour la lecture, l’orthographe et l’écriture, c’est plutôt chaque habileté (lecture, orthographe et écriture) qui fait appel à l’unique banque de mots du cerveau, à l’aide de différentes entrées et sorties (« directionnalité »). Le fait d’avoir une seule banque de mots qui relie toutes les propriétés importantes des mots explique pourquoi les capacités à lire, à orthographier et à écrire sont si intimement liées. La banque de mots du cerveau peut développer un ensemble de mots rapidement connus « par cœur » au moyen de l’exposition répétée à de nouveaux mots par la lecture et l’écriture. Grâce à ces expositions répétées, on obtient non seulement un accès rapide à la prononciation correcte du mot au cours de la lecture, mais aussi une image visuelle de la forme du mot entier, qui peut être utilisée lorsqu’il faut l’orthographier. Ces représentations
  • 53. 53 Apprendre au cerveau à lire de mots commenceront à s’affaiblir si elles ne sont pas constamment renforcées par la lecture et l’orthographe. Les mots utilisés moins fréquemment sont les plus difficiles à lire ou à orthographier. La vitesse de lecture peut ralentir si l’on passe de son roman préféré à un sujet spécifique ne relevant pas de la fiction. Il en va de même pour l’orthographe. Lorsque l’on essaie d’orthographier un mot rarement rencontré ou utilisé, il est probable que la banque de mots n’ait emmagasiné qu’une vague représentation de celui-ci qui ne nous reviendra pas facilement en mémoire. De ce fait, il sera difficile de l’orthographier correctement. Le circuit inférieur peut se résumer par l’expression suivante : « apprenez bien le mot ou oubliez-le ». Illustration 5.1 L’orthographe par rappel direct La plupart des formes orthographiques des mots impliquent un lien direct allant du sous-composant de la prononciation au sous-composant de la forme visuelle du mot. C’est ce lien qui permet d’accéder directement à l’orthographe correcte du mot sans avoir à le prononcer à haute voix. Le circuit inférieur permet également d’accéder aux orthographes correctes des mots irréguliers, souvent très difficiles à encoder.
  • 54. 54 Apprendre au cerveau à lire L’acquisition de l’orthographe des mots les plus souvent utilisés constitue un gain de temps et d’énergie considérable pour les apprentis lecteurs, dans la mesure où ces mots constituent plus de la moitié des mots couramment lus et orthographiés. Nombre de ces mots fréquents sont directement appris en utilisant le circuit inférieur. Les mots très fréquents sont vite appris par le biais de la lecture, et possèdent rapidement une représentation dans la banque de mots du cerveau. On peut avoir accès à la forme d’un mot à partir de sa prononciation. Lorsque les mots ont été mémorisés correctement, le rappel direct fournit des orthographes parfaites. Dans ce cas, le mot n’est plus considéré simplement comme un groupe de lettres, mais comme un mot dans sa globalité, rattaché à une prononciation, un sens et une orthographe. Il n’en reste pas moins que, souvent, l’habilité à orthographier correctement n’est pas aussi simple que l’accès à la forme globale du mot. Le cerveau ne peut pas toujours se rappeler les mots qu’il veut orthographier. Il arrive parfois que, lorsqu’il tente de se souvenir de l’orthographe du mot, le circuit inférieur ne fournisse aucune réponse. En effet, au début de l’apprentissage de l’orthographe, seule une poignée de mots est directement accessible. Lorsque l’orthographe n’est pas directement accessible depuis la banque de mots, on peut utiliser le circuit supérieur du cerveau pour orthographier le mot de la manière la plus probable. L’encodage (le circuit supérieur) Alors que le circuit inférieur du cerveau est une base de données qui emmagasine les différentes propriétés des mots entiers, le circuit supérieur du cerveau est spécialisé dans la reconnaissance des relations lettre / son dans les mots. Parfois, le cerveau doit compter sur le circuit supérieur pour décoder un mot nouveau lors de la lecture. Le décodage permet d’estimer la prononciation la plus plausible du mot en se basant sur la séquence que forment ses lettres constitutives. Le décodage est également appelé conversion de graphèmes en phonèmes dans la mesure où il implique la prise en compte d’une séquence de lettres (graphème) et son association au son correspondant (phonème). Orthographier des mots inconnus est une opération qui fait également appel au circuit supérieur du cerveau, mais dans le sens opposé.
  • 55. 55 Apprendre au cerveau à lire L’estimation de l’orthographe de mots inconnus est appelée l’encodage, et fonctionne de l’avant à l’arrière du cerveau (Illustration 5.2). L’encodage est le processus d’estimation de l’orthographe la plus probable d’un mot sur la base d’unités de son. Il porte également le nom de conversion de phonèmes Illustration 5.2 L’encodage L’encodage est une opération orthographique qui fait appel au circuit supérieur. Plutôt que d’aller des formes des lettres aux sons des phonèmes (décodage), cette opération va des sons des phonèmes aux formes des lettres (encodage). Le processus d’encodage ne fournira pas toujours l’orthographe correcte, mais il en ressortira une suggestion probable, qui peut être vérifiée par la suite dans le dictionnaire. Les orthographes inventées permettent aux enfants de continuer à écrire sans être gênés par une orthographe inconnue. L’usage d’orthographes inventées par les personnes qui commencent à écrire leur permet de produire des histoires plus longues, et d’acquérir un meilleur vocabulaire et des structures grammaticales plus complexes.