2. Remerciements
Remerciements :
Je tiens à remercier ici Marie-France Lebouc qui a accepté de diriger, avec succès, ce
mémoire et qui lui a insufflé un certain réalisme, ainsi qu’une forme de rigueur
franchement salutaire. Je remercie également Olivier Clain qui a bien voulu codiriger ce
projet, pour son apport intellectuel essentiel, mais aussi et peut-être plus encore pour son
habileté psychologique. Comme il a dirigé déjà de nombreux travaux académiques, je ne
peux que reprendre ici le commentaire fort juste que j’ai pu lire ou deviner presque
partout à son égard : c’est un pédagogue tout à fait exceptionnel.
Dans la même veine, je pense aujourd’hui à notre vieux professeur de philosophie en
classes préparatoires à l’externat Sainte-Marie de Lyon : Bruno Roche. J’espère qu’il
continuera à transmettre le désir de penser à des générations d’élèves. Je l’espère pour lui,
mais surtout pour eux. Et comme nous sommes maintenant six années en arrière dans la
capitale des Gaules, je salue aussi mes camarades des classes préparatoires. Pour des raisons
obscures, il m’apparaît clairement que ce travail leur doit quelque chose.
Il doit également beaucoup à mes amis d’une autre capitale : Québec. Ceux du 50 rue
Sainte Ursule en particulier. Simon en tête, puisque la proximité intellectuelle de nos
travaux de recherche m’a permis de sortir de mon isolement et d’entamer, souvent de
manière agréablement dilettante, de belles confrontations.
Je ne terminerai pas sans remercier un peu plus fort mes chers parents pour leur appui
financier et moral, et pour tout le reste bien sûr. J’espère qu’ils liront ce mémoire, qu’ils le
liront avec plaisir, et ne regretteront pas leur investissement. Pour toutes les raisons qu’il
serait fastidieux d’énumérer ici, rien de tout cela n’aurait été possible sans eux.
ii
3. Résumé
Bien que l’organisation donne lieu à un champ de connaissance spécifique, la définition de
cet objet théorique sous forme d’énoncé synthétique constitue un problème récurrent.
Après avoir mis en évidence un savoir normalisé, dans ce que nous aurons défini comme la
théorie des organisations, nous pourrons identifier une liste de définitions représentatives
du champ. L’analyse de cette liste éclairera les difficultés qui ont pu être rencontrées par
les théoriciens pour définir l’organisation et les stratégies mises en place pour y faire face.
Ceci nous conduira à proposer une stratégie alternative : dans la théorie générale des
sociétés de Michel Freitag, nous irons chercher un surplomb sociohistorique pour mieux
comprendre les organisations. Ancrés dans cette perspective globale, nous serons à même
d’échafauder concrètement une définition et sa formulation qui permettent de saisir
l’organisation dans ses aspects les plus postmodernes, c’est-à-dire, à bien des égards, les
plus actuels.
ii
4. TABLE DES MATIÈRES
Remerciements :........................................................................................................................ ii
Résumé....................................................................................................................................... ii
Table des matières ....................................................................................................................iii
Liste des tableaux...................................................................................................................... vi
Liste des figures ........................................................................................................................ vi
Introduction............................................................................................................................... 1
Chapitre 1 : Les définitions de l’organisation dans le champ................................................. 6
1.1 La théorie des organisations et son champ disciplinaire............................................. 8
1.1.1 Mise en perspective historique des développements théoriques sur les
organisations.......................................................................................................................... 8
1.1.2 Comment comprendre le champ disciplinaire associé à la théorie des
organisations........................................................................................................................ 12
1.2 Les définitions de l’organisation dans la théorie des organisations .......................... 16
1.2.1 Méthode de sélection des définitions................................................................. 16
1.2.1.1 « Théoriciens majeurs », « développements théoriques majeurs » et
« ouvrages phares » : définition des concepts et méthode de sélection ........................ 16
1.2.1.2 Les définitions de l’organisation par les théoriciens majeurs du champ...... 24
1.2.2 Liste des définitions............................................................................................. 25
1.3 Les définitions de l’organisation dans la théorie des organisations : enjeux et
stratégies .................................................................................................................................. 34
1.3.1 Évolution du sens du mot organisation, modification du concept, et enjeux de
la définition dans le champ................................................................................................. 35
1.3.2 Stratégie 1 : les définitions exploratoires, hétérogénéité des développements et
problèmes de l’intégration de connaissances..................................................................... 38
1.3.3 Stratégie 2 : définitions synthétiques, difficultés et développement d’une
stratégie alternative............................................................................................................. 41
Conclusion et formulation d’une stratégie alternative de définition ................................... 44
Chapitre 2 : Michel Freitag , l’organisation pensée comme la structure sociale
caractéristique de la postmodernité ....................................................................................... 45
2.1 L’œuvre de Michel Freitag.......................................................................................... 45
2.1.1 Mise en perspective de l’œuvre .......................................................................... 45
2.1.2 Les fondements théoriques de l’analyse freitagienne des sociétés.................... 48
2.1.2.1 Présentation des fondements de l’analyse freitagienne de la société ........... 48
2.1.2.2 Originalité de Freitag ...................................................................................... 54
2.1.2.3 Principales critiques de l’analyse des sociétés de Freitag .............................. 55
2.2 La typologie des sociétés de Freitag............................................................................ 56
2.2.1 La société primitive et le mode de reproduction formel culturel-symbolique 56
2.2.1.1 La société primitive ......................................................................................... 56
iii
5. 2.2.1.2 Apparition de la contradiction dans les sociétés primitives.......................... 59
2.2.2 La société traditionnelle et le mode de reproduction formel politico-
institutionnel ....................................................................................................................... 60
2.2.2.1 La société traditionnelle.................................................................................. 60
2.2.2.2 La critique de la tradition et le passage à la modernité ................................. 62
2.2.3 La société moderne et le mode de reproduction formel politico-institutionnel
64
2.2.3.1 La société moderne.......................................................................................... 64
2.2.3.2 La subversion de la modernité........................................................................ 66
2.2.4 La société postmoderne et le mode de régulation décisionnel-opérationnel... 70
2.2.5 Schéma récapitulatif des principales caractéristiques des idéaltypes de société
chez Freitag.......................................................................................................................... 76
2.3 L’organisation dans la postmodernité ........................................................................ 77
2.3.1 L’organisation, la puissance caractéristique de l’espace social postmoderne ... 78
2.3.1.1 Avènement de l’organisation.......................................................................... 78
2.3.1.2 Les éléments de la puissance........................................................................... 81
2.3.1.3 L’individu face à l’organisation....................................................................... 83
2.3.2 Le concept d’organisation chez Freitag.............................................................. 84
2.3.2.1 « L’opérativité interne des organisations autonomisées » ............................. 85
2.4 Freitag et l’étude de l’organisation ......................................................................... 89
2.4.1 La transformation de la science dans la postmodernité ................................ 90
2.4.2 L’émergence de l’organisation en tant que concept dans la pensée
postmoderne .................................................................................................................... 91
Conclusion ........................................................................................................................... 93
Chapitre 3 : Vers une définition de l’organisation tirée de la sociologie de M. Freitag ...... 95
3.1 L’organisation dans la postmodernité : quels sont les éléments caractéristiques de
l’organisation dans la postmodernité ?................................................................................... 96
3.1.1 Rappel des éléments vus dans le deuxième chapitre du mémoire.................... 96
3.1.1.1 Liste des éléments apparemment indispensables à inclure dans notre
définition ......................................................................................................................... 98
3.2 De l’institution à l’organisation, traits caractéristiques de l’organisation par
opposition à L’institution chez Freitag................................................................................. 101
3.2.1 L’institution en sociologie et en théorie des organisations ............................. 102
3.2.1.1 Présentation des principaux auteurs et perspectives en théorie des
organisations et en sociologie ....................................................................................... 102
3.2.1.2 Les différentes visions de l’institution, synthèse et proposition de typologie
105
3.2.1.3 Logique de l’institution : l’ipséité ................................................................. 106
3.2.2 L’institution chez Freitag .................................................................................. 108
3.3 Opposition entre l’institution et l’organisation chez Freitag.................................. 110
3.3.1 Continuum 1, la finalité : opposition entre idéologique et pragmatique ....... 112
iv
6. 3.3.2 Continuum 2, relation à l’individu : opposition entre holisme et
individualisme ................................................................................................................... 116
3.3.3 Continuum 3, relation à l’environnement : opposition entre stabilité et
plasticité 123
3.3.4 Dynamique interne des organisations : la résilience....................................... 127
3.3.5 Schéma de synthèse........................................................................................... 130
3.4 Formulation d’une définition de l’organisation............................................................. 131
3.4.1 La stratégie de définition : de la stratégie d’exploration du concept à l’enjeu de la
stratégie de formulation.................................................................................................... 131
3.4.1.1 Commentaire sur la stratégie de définition proposée.................................. 131
3.4.1.2 Force et faiblesse de notre stratégie ............................................................. 132
3.4.1.3 Intégration des définitions relevées dans la première partie à la théorie
générale des sociétés de Freitag et au concept d’organisation que nous en avons tiré
134
3.4.2 La stratégie de formulation d’une définition de l’organisation....................... 138
Conclusion ............................................................................................................................. 142
Bibliographie ......................................................................................................................... 144
Chapitre 1 .......................................................................................................................... 144
Chapitre 2 .......................................................................................................................... 146
Chapitre 3 .......................................................................................................................... 149
Index ...................................................................................................................................... 151
v
7. LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 - Les théoriciens majeurs du champ leurs ouvrages phares et le nombre de
manuels où ils sont cités comme occurrence majeure .................................................. 21
Tableau 2 - Aperçut sommaire des idéaltypes de Freitag (Gagné et Warren, 1998, p. 134).
.................................................................................................................................................. 54
Tableau 3 - Récapitulatif des principales caractéristiques des idéaltypes de société chez
Freitag .............................................................................................................................. 77
Tableau 4 - Récapitulatif des principales caractéristiques des organisations chez Freitag 100
Tableau 5 - Continuums des caractéristiques où les organisations et les institutions se
distinguent de manière caractéristique et tendancielle .............................................. 112
LISTE DES FIGURES
Figure 1 - Le paradoxe critique de la postmodernité : régression de la réflexivité dans la
mise en place des normes dans un champ social fait de pratiques sociales toujours plus
hétérogènes...................................................................................................................... 76
Figure 2 - Degré de contrainte et de formalisation des institutions telles que perçues par
des théoriciens clefs en sociologie et en théorie des organisations ............................ 106
Figure 3 - Continuum de la finalité...................................................................................... 115
Figure 4 - Continuum de la relation à l’individu................................................................. 122
Figure 5 - Continuum de la relation à l’environnement..................................................... 126
Figure 6 - Récapitulatif de la modélisation proposée pour opposer les institutions aux
organisations.................................................................................................................. 130
vi
8. INTRODUCTION
Dès mes premiers contacts avec la théorie des organisations sur les bancs de l’école de
commerce, j’ai été fasciné par ce champ. Son opulent cortège de développements
théoriques et son improbable capacité à réunir des auteurs comme Weber, Taylor et
Simon autour d’un même objet théorique m’ont immédiatement fait pardonner ce qui
apparaît bien souvent comme la tache noire de la théorie des organisations : le problème
de la multidisciplinarité et de l’intégration des connaissances. À mes yeux, l’aspect
multidisciplinaire du champ n’a rien de désolant et relève au contraire d’un
cosmopolitisme tout à fait essentiel et représentatif de notre contemporanéité dont le
champ pourrait plutôt s’enorgueillir.
Malgré cela, j’étais très frustré par quelque chose que j’ai mis un certain temps à identifier
dans le cadre du processus intellectuel que constitue ce mémoire… Faire coexister des
développements paradoxaux n’est pas forcément si contradictoire dès que l’on prend la
mesure de la complexité de la réalité, plus particulièrement de la réalité organisationnelle,
de ses fluctuations rapides, et de la relative nouveauté du phénomène. En revanche, tous
ces développements donnent parfois l’impression de venir s’accumuler à l’aveuglette et de
dévoiler les facettes d’un phénomène très vaste sans lui donner pour autant toute sa
dimension. Ces mille et une propositions pour mieux appréhender l’organisation aiguisent
l’appétit de connaître et laissent penser qu’une réalité organisationnelle se développe et
s’enracine dans des dimensions sociologiques et historiques plus larges qui englobent et
vitalisent la perspective organisationnelle proprement dite. Car la perspective
organisationnelle existe, et, c’est mon sentiment, se constitue bel et bien comme champ de
connaissance indépendant au-delà des domaines d’investigation consacrés à l’organisation
dans d’autres champs disciplinaires tels que la sociologie ou la psychologie.
9. C’est pourquoi dans le premier chapitre de ce mémoire nous1 chercherons d’abord à
clarifier comment toute cette production intellectuelle riche et variée se dépose, surtout
depuis les années 1950, dans le champ de connaissance de la théorie des organisations et se
sédimente en quelque sorte sous la forme d’un savoir normalisé qui véhicule une certaine
normalisé,
vision de l’organisation. Nous le verrons, la constitution d’un savoir normalisé découle
largement de la capacité de la théorie des organisations à se constituer comme « une
discipline établie » (Desreumaux, 2005, p. 8). Dès lors que l’on parle d’un savoir normalisé,
on comprend un ensemble de théories propres à un champ de connaissance qui ont résisté
à l’épreuve du temps et du débat pour finir par bénéficier d’un relatif consensus au sein du
champ. Des citations et des reproductions fréquentes de ces théories viennent valider un
tel consensus tout en le renforçant. Si tant est que la théorie des organisations soit
effectivement parvenue à faire émerger une certaine conception de l’organisation en tant
que champ de connaissance, c'est-à-dire au-delà des contributions individuelles de ses
différents auteurs, cette conception doit logiquement apparaître dans le cadre d’un savoir
normalisé. Celui-ci constitue en effet le moment de la mise en commun et de la
confrontation des différentes perspectives. Une fois cette mise au point effectuée, c’est
plus précisément dans le moment de dépassement synthétique que constitue la
formulation d’une définition que nous irons saisir la vision de l’organisation propre à la
théorie des organisations. Dans la mesure où ils sont dédiés au champ, les manuels de
synthèse vont justement chercher à rendre compte de cette œuvre commune en
recueillant de manière privilégiée le savoir normalisé qui constitue les fondements du
champ compris comme entreprise collective. C’est pourquoi notre démarche consistera à
interroger les manuels de synthèse du champ pour élaborer une liste de définitions de
l’organisation représentative du champ en déployant une méthode que nous prendrons
soin d’expliciter. Dans la dernière partie de ce premier chapitre, nous confronterons ces
différentes définitions pour cerner les enjeux de la définition dans le
1
Dans cette introduction le nous renvoie à la présentation du cheminement intellectuel que nous proposons
d’effectuer en compagnie du lecteur dans le cadre de ce mémoire. Le nous s’oppose au je, dont l’utilisation
signale qu’il est question de l’expérience et des convictions personnelles, qui bien qu’essentielles dans la
genèse de ce mémoire, ne font pas directement l’objet d’une mise en commun dans la suite de ce travail.
2
10. champ. Malheureusement, et sans coup de théâtre, nous verrons que la liste de définitions
formulées par des auteurs reconnus à vocation représentative du champ traduit une gêne
réelle à produire une définition globale de l’organisation sous la forme d’un énoncé
synthétique. Mais cette liste va aussi nous permettre d’analyser les stratégies de définition
dans le champ, de comprendre ce qui pose problème et surtout de proposer une stratégie
alternative de définition.
À ce stade, il faut souligner l’apport d’Olivier Clain qui m’a encouragé à faire connaissance
avec l’œuvre de Michel Freitag. Avec Freitag, j’étais intellectuellement en présence d’un
des derniers auteurs à proposer une analyse globale des sociétés, et qui plus est d’un auteur
qui rend très bien compte dans son analyse de l’époque, de la montée en force d’une
nouvelle structure sociale : l’organisation. Il m’a alors été possible de reprendre le travail,
inachevé à mon sens, de définition de l’organisation autour d’une nouvelle stratégie, celle
d’une prise de recul grâce à un surplomb sociohistorique. Gagné et Warren illustrent la
démarche de Freitag par une traduction libre d’Héraclite : « pour parler d’une chose avec
intelligence, il faut se placer du point de vue de ce qui l’engendre, tout comme la réalité de
la Cité découle de la Loi qu’elle s’est donnée » (Gagné et Warren, 2003, p. 336).
De ce point de vue, la théorie générale des sociétés de Freitag devrait également satisfaire
notre aspiration à un dépassement de l’apparent morcellement qui semble régner dans la
théorie des organisations, qui, nous l’aurons vu, propose des définitions variées et parfois
même contradictoires pas toujours faciles à articuler entre elles sans un cadre intégrateur.
Les développements théoriques de Michel Freitag présentent, en effet, trois qualités
essentielles par rapport au projet de compréhension des organisations tel que nous venons
de l’énoncer.
Premièrement, Freitag témoigne d’une volonté de compréhension globale des sociétés
humaines dans le cadre d’une « sociologie compréhensive » (Freitag, 1986, p. 17).
3
11. Deuxièmement, pour comprendre les sociétés, il va proposer une typologie sociohistorique
pour caractériser l’ensemble des sociétés humaines et la manière dont elles tendent à se
développer à travers le temps.
Troisièmement, Freitag voit en l’organisation la structure sociale fondamentale des
sociétés contemporaines qui accompagne une évolution sociohistorique majeure : le
passage de la société moderne à la société postmoderne.
Ainsi dans le deuxième chapitre de ce travail, la théorie générale du sociologue
reconstituée avec détail nous permettra de réinsérer solidement l’organisation dans une
perspective sociohistorique plus large. Mieux, elle positionnera l’organisation comme le
fruit d’un vaste processus intelligible et explicité dont la genèse historique dans la
temporalité longue des sociétés et les prolongements théoriques dépassent forcément
l'urgence de notre actualité. Notre stratégie de compréhension sera donc celle d’une mise
en perspective sociohistorique. Après avoir brièvement exposé l’œuvre de Michel Freitag,
nous entrerons dans une analyse plus serrée des fondements conceptuels sur lesquels
repose son analyse sociohistorique des sociétés. Dans un deuxième temps, cette base
théorique nous permettra d’appréhender la typologie des sociétés de Freitag que nous
décrirons, pas à pas, afin de bien saisir ce qu’est la postmodernité, dont l’organisation est la
structure sociale dominante chez Freitag. Enfin dans le dernier moment de ce chapitre,
forts de notre compréhension de la postmodernité, nous serons en mesure de replacer
analytiquement l’organisation dans son cadre sociohistorique.
Il ne me semble pas qu’une telle perspective réduise l’organisation à une dimension
sociohistorique, je crois au contraire qu’elle lui donne toute sa dimension2. Mais elle est
2Ce point repose sur l’idée qu’il existe bien un donné organisationnel qui implique que l’organisation
apparaisse d’abord historiquement et sociologiquement, mais surtout que sa constitution comme objet
d’étude soit largement liée à la place qu’elle prend peu à peu dans la société. Ce lien entre la montée des
organisations dans nos sociétés et l’émergence de la théorie des organisations et d’ailleurs très largement
confirmé dans les ouvrages de synthèse que nous allons passer en revue par la suite. Autrement dit, dans le
cas de l’organisation la perspective sociohistorique domine la perspective organisationnelle que propose le
champ de la théorie des organisations et c’est la raison pour laquelle on parle de surplomb.
4
12. condamnée à rester muette ou sans conséquence, si tout en gardant son système, on ne
sort de la perspective freitagienne qui est avant tout sociologique pour proposer une
analyse à une échelle plus organisationnelle.
C’est dans ce but qu’un travail conceptuel sera entrepris dans le dernier chapitre de ce
mémoire pour extraire le concept d’organisation. Une fois libéré de la gangue idéologique,
qui obscurcit parfois sa compréhension3, le système freitagien va se révéler fécond et
robuste. Fermement inscrite dans une théorie générale de la société, l’organisation chez
Freitag autorisera une comparaison particulièrement intéressante, d’un point de vue
conceptuel, avec la structure sociale à laquelle elle succède : l’institution. Cette
comparaison nous permettra de considérablement préciser le concept d’organisation chez
Freitag dans une perspective proprement organisationnelle. Sur la base de cette
compréhension enrichie, nous consacrerons la troisième partie de ce dernier chapitre à
l’échafaudage d’une définition de l’organisation tirée de notre travail sous la forme d’un
énoncé synthétique. Cet exercice de formalisation va révéler les forces, mais également
certaines faiblesses de la stratégie de définition que nous avons déployée. Par ailleurs, en
évaluant notre définition sur les mêmes critères que les définitions extraites du champ au
premier chapitre, nous serons à même de mieux comprendre l’apport de notre travail en
théorie des organisations. Sans trop enlever au suspens, nous pouvons d’ores et déjà dire
ici, que notre démarche avec ses inévitables imperfections va néanmoins permettre une
intégration solide des définitions représentatives du champ que nous aurons relevées dans
le premier chapitre.
Note : Tout au long de ce mémoire, le singulier organisation reverra au concept
d’organisation alors que le pluriel les organisations sera utilisé en référence à la réalité
sociale qui se cache derrière le concept d’organisation. Cette convention sera également
appliquée également entre le concept d’institution et la réalité des institutions.
3Même si le mot de « neutralité axiomatique » en sociologie ferait sûrement tressaillir Freitag, nous
chercherons à conserver une posture impartiale. Cette disposition d’esprit va nous permettre d’aller chercher
directement le système logique qui sous-tend la théorie générale des sociétés de Freitag.
5
13. CHAPITRE 1 :
L’ORGANISATION
LES DÉFINITIONS DE L’ORGANISATION DANS LE CHAMP
Pour établir la liste des manuels qui allaient servir de socle à l’étude menée dans ce
premier chapitre, notre premier critère a été de choisir des ouvrages didactiques où l’effort
de synthèse et de mise en ordre du champ que nous avons associé au savoir normalisé est
en quelque sorte porté à l’extrême (Plane, 2003, p. 8 ; Séguin et Chanlat, 1983, p. VII ;
Hatch, 2000, p. 8 ; Shafritz et Ott, 2001, p. 2 ; Handel, 2003, p. IX ; Scott, 2003, p. XI ;
Desreumaux, 2005, p. 6 ; Bélanger et Mercier, 2006, p. XII). Afin de conforter cet ancrage
dans le savoir normalisé du champ, nous avons choisi des ouvrages qui présentent les
réflexions théoriques liées à l’organisation dans un contexte académique, c’est-à-dire des
manuels à vocation académique4. Ainsi, tous les ouvrages que nous avons retenus ont en
commun de constater l’existence de développements théoriques majeurs identifiables qui
ont eu une influence décisive sur le champ (Plane, 2003, p. 8 ; Séguin et Chanlat, 1983,
p. VII ; Hatch, 2005, p. 129 ; Shafritz et Ott, 2001, p. 3 ; Handel, 2003, p. IX ; Scott, 2003,
p. 107-108 ; Desreumaux, 2005, p. 129 ; Bélanger et Mercier, 2006, p. XII). Ces deux
critères visent à éliminer, d’un côté les ouvrages plus polémiques et/ou avant-gardistes qui
viennent remettre en cause le consensus que constitue le savoir normalisé et de l’autre
ceux plus opérationnels et souvent de nature prescriptive qui ne l’explicite pas en tant
qu’ensemble théorique cohérent au-delà des différentes théories qui lui sont associées.
En même temps, des perspectives variées se côtoient en théorie des organisations qui
entrent parfois en conflit dans le cadre de ce qui peut prendre des allures de « paradigm
4 Le fait qu’il s’agisse de manuels « académiques » n’est pas anodin, cela renforce l’idée que nous nous situons
bien dans un champ de connaissance spécifique d’une part et que ce champ fait l’objet d’une synthèse et d’un
enseignement d’autre part. Cette contrainte nous a, par exemple, conduits à ne pas retenir le best-seller
Image of Organisations qui ne s’adresse pas en premier lieu à un public académique, et met un peu en
sourdine la structuration théorique du champ au profit d’une synthèse des idées démocratisées parfois
jusqu’au schéma, et regroupées par « métaphores ».
6
14. war » (Watson, 2006, p. 369). Pour contrebalancer la vision un peu orthodoxe5 du champ
que donnent à voir nos différents manuels de synthèse, nous avons souhaité retenir
également Théorie des organisations : de l'intérêt de perspectives multiples de Hatch qui
propose de manière plus iconoclaste une synthèse résolument perspectiviste des
développements dans le champ. En postulant qu’il y a bien un progrès des connaissances
ou à défaut, de la connaissance des connaissances que nous avons sur l’organisation, nous
avons favorisé des ouvrages récemment (ré)édités, en nous limitant aux années 2000 et
plus. C’est aussi une manière de nous assurer que nos ouvrages intègrent, tant que faire se
peut, les développements les plus récents du champ. Ici aussi, nous avons souhaité inclure
un ouvrage témoin. Ainsi, pour disposer d’une mise en perspective temporelle et dans la
mesure où il s’agit d’un classique (Desreumaux, 2005, p. 273) et d’un ouvrage pionnier en
langue française (Chanlat et Séguin, 1983, p. VII), nous avons aussi retenu l’ouvrage de
Chanlat et Séguin : L'Analyse des organisations : une anthologie sociologique. D’autre
part, comme nous allons le voir, le champ de l’étude des organisations est largement
influencé par la sociologie. Pour respecter notre objectif de représentativité, il fallait
rendre compte de cette influence. C’est pourquoi une part significative de ces ouvrages de
synthèse devaient avoir été écrits par des auteurs qui se présentent comme explicitement
héritiers d’une tradition sociologique : la sociologie des organisations (Handel et Chanlat
et Séguin). Enfin, même si l’on peut penser que le cœur de la théorie des organisations est
en Amérique du Nord (Bélanger et Mercier, 2006, p. VII), nous avons choisi de maintenir
une parité entre les auteurs francophones et anglophones.
En appliquant ces quatre critères, parmi les différents manuels de la théorie des
organisations disponibles à la bibliothèque de l’Université Laval, on aboutit à une liste de 8
manuels.
5
Notre mode de sélection, il est vrai, vient renforcer cette apparente orthodoxie en minimisant les
polémiques réelles d’ordre épistémologique qui agitent perpétuellement le champ. Nous assumons ce biais
dans la mesure où, comme nous l’avons dit, nous cherchons en premier lieu à élaborer une liste de
définitions de l’organisation représentatives du champ.
7
15. Séguin, F. et Chanlat, J.-F. (1983), L'Analyse des organisations : une anthologie
sociologique, Saint-Jean-sur-Richelieu, Éditions Préfontaine inc.
Shafritz, J. M. et Ott, J. S. (2001), Classics of Organization Theory, Belmont,
Wadsworth/Thomson Learning.
Bélanger, L. et Mercier, J. (2006), Auteurs et textes classiques de la théorie des
organisations, Québec, Les Presses de l'Université Laval.
Scott, W. R. (2003), Organizations : Rational, Natural, and Open Systems, Upper
Saddle River, Prentice Hall.
Hatch, M. J. (2000), Théorie des organisations : de l'intérêt de perspectives
multiples, Paris/Bruxelles, De Boeck Université.
Desreumaux, A. (2005), Théorie des organisations, Colombelles, Éditions EMS
management & société.
Plane, J.-M. (2003), Théorie des organisations, Paris, Dunod.
Handel, M. J. (2003), The Sociology of Organizations : Classic, Contemporary, and
Critical Readings, Thousand Oaks, Sage Publications.
1.1 LA THÉORIE DES ORGANISATIONS ET SON CHAMP DISCIPLINAIRE
DES ORGANISATIONS DISCIPLINAIRE
Dans cette partie, nous clarifierons deux notions fondamentales pour la suite de ce
mémoire : la théorie des organisations et le champ auquel elle est associée. En nous
appuyant sur les huit ouvrages de synthèse cités précédemment, nous structurerons notre
réflexion autour de deux axes :
• Le premier, qui semble dégager un relatif consensus, est celui de l’histoire du
champ.
• Le second, sujet de débat, concerne la manière dont on peut tracer les contours de
ce champ.
1.1.1 Mise en perspective historique des développements théoriques sur les organisations
La moitié des auteurs de notre sélection reconnaissent explicitement qu’une évolution
socio-économique majeure est à l’origine de l’émergence du champ. Il s’agit de la
8
16. révolution industrielle et de son processus d’industrialisation, au cours duquel on assiste à
la multiplication des organisations notamment sous la forme de l’entreprise privée (Scott,
2003, p. 4). Plus précisément au XVIIIe siècle, en Angleterre, l’émergence des nouvelles
sources d’énergie hydraulique et à vapeur favorisent la concentration des moyens de
production au sein d’une seule localisation : la manufacture (Scott, 2003, p. 155 ; Hatch,
2000, p. 35 ; Shafritz et Ott, 2001, p. 27). Alors que le processus de production tend à se
concentrer au sein des manufactures, on assiste à une modification de la manière de
travailler et notamment à la division et à la répartition des tâches. Il devient aussi plus
facile d’observer et de contrôler l’organisation du travail, et l’on voit apparaître une
volonté de rationaliser l’activité de production qui se focalise plus particulièrement sur les
questions de l’organisation du travail (Bélanger et Mercier, 2006, p. 11). Par la suite au XXe
siècle, à mesure que les organisations se multiplient et gagnent en complexité, un
management toujours plus subtil devient nécessaire à leur bon fonctionnement. Cette
complexification va appeler une approche plus structurée pour comprendre et gérer les
organisations (Shafritz et Ott, 2001, p. 1).
L’émergence d’un champ disciplinaire consacré aux organisations est donc profondément
liée au poids grandissant que celles-ci vont prendre dans la société (Shafritz et Ott, 2001,
p. VII et Plane, 2003, p. 119). L’essor des organisations dans nos sociétés est d’ailleurs
explicitement souligné dans quatre de nos manuels : Handel et Desreumaux rappellent que
nous vivons dans une société des organisations (Handel, 2003, p. 1 ; Desreumaux, 2005,
p. 32), Chanlat et Séguin préfèrent le terme de société d’organisations formelles (Séguin et
Chanlat, 1983, p. 3). Le poids grandissant des organisations se comprend bien sûr par leur
accroissement en nombre (Scott, 2003, p. 4), mais aussi par la multiplication des fonctions
qu’elles occupent désormais dans la société contemporaine (Scott, 2003, p. 4 ; Handel,
2003, p. 1 ; Séguin et Chanlat, 1983, p. 3), et par leur impact sur les relations
interpersonnelles (Scott, 2003, p. 4). Scott propose le terme d’« ubiquité » pour qualifier
l’omniprésence des organisations dans nos sociétés (Scott, 2003, p. 4).
9
17. C’est dans ce contexte que va se structurer le champ. Bien entendu, la plupart des auteurs
reconnaissent l’existence de développements théoriques directement rattachables au
champ avant que celui-ci ne se constitue véritablement en discipline établie. On peut
retrouver des réflexions proches des développements théoriques du champ dès l’aube de
l’humanité. Desreumaux nous signale des « bribes de théorisation datant de 4000 av. J.-C. »
(Desreumaux, 2005, p. 8). Shafritz et Ott évoquent l’exemple assez célèbre tiré de la bible :
dans le livre de l’exode, le beau-père de Moïse prodigue à celui-ci des conseils pour
déléguer dans le cadre de l’administration de la justice.
Avec la révolution industrielle apparaissent les premiers auteurs qui vont façonner ce qui
deviendra la perspective organisationnelle. Certains auteurs considèrent que l’étude
approfondie de la division du travail menée par Adam Smith dans son très célèbre De la
richesse des nations de 1776 en fait le père fondateur de la théorie des organisations
(Hatch, 2000, p. 41 ; Shafritz et Ott, 2001, p. 27). D’autres estiment qu’une analyse plus
systémique des organisations est nécessaire à l’éclosion de la discipline et préfèrent
évoquer Weber comme père fondateur (Handel, 2003, p. 5 ; Plane, 2003, p. 9) reléguant
ainsi Adam Smith au rang de simple influence (Plane, 2003, p. 9). Pour Desreumaux, il
faut attendre des développements pragmatiques qui visent clairement l’aide à la gestion
pour pouvoir parler de théorie des organisations, Fayol et Taylor deviennent dans ce cas
les fondateurs du champ (Desreumaux, 2005, p. 10).
Après la Deuxième Guerre mondiale, le champ semble peu à peu s’institutionnaliser pour
devenir une « discipline établie » (Desreumaux, 2005, p. 8). Par discipline établie nous
établie,
entendons une discipline qui présente certains nombres d’« attributs académiques »
(Desreumaux, 2005, p. 8), et l’on reprendra la liste de critères établis par Desreumaux :
10
18. – présence de nombreux cursus de formation […]
– existence de revues spécialisées (par exemple, Organization Science,
_Organization Studies, Organizations) ;
– existence de “handbooks” […]
– existence de congrès académiques dédiés.
(Desreumaux, 2005, p. 8)6
C’est notamment la traduction assez tardive des travaux de Weber en anglais d’une part
(Scott, 2003, p. 10), et d’autre part l’idée que l’on puisse formuler des théories applicables à
toutes les organisations (Bélanger et Mercier, 2006, p. 2) qui vont imprimer un nouvel élan
à la théorie des organisations et lui permettre de se constituer comme discipline établie.
En effet, la traduction et la diffusion des travaux de Weber sur la bureaucratie redessinent
les contours du champ. Au-delà de la technique de gestion, le champ va désormais
s’intéresser aux organisations dans un sens contemporain. C'est-à-dire prises dans leur
globalité, comme structures sociales dont la multiplication connote une évolution majeure
et introduit de nouveaux enjeux et axes de réflexion à l’échelle de la société. Quant à l’idée
de formuler des théories applicables à toutes les organisations, elle conduit à la recherche
de théories généralisables à l’ensemble des organisations prises dans leur double
acceptation de processus et de structure, et non plus simplement des lois concernant
l’organisation du travail.
La théorie des organisations apparaît donc comme un sous-champ de la sociologie : dans
les années 1950, Robert K. Merton, alors professeur à la Columbia University, entame un
travail de synthèse et de compilation avec ses étudiants qui fait des organisations un
champ d’investigation à part. Mais la théorie des organisations se développe aussi à
l’extérieur de la sociologie, où elle se constitue en tant que champ pluridisciplinaire. Ainsi,
au même moment, le futur prix Nobel Herbert Simon, alors responsable du département
de management industriel au Carnegie Institute of Technology, met en place une équipe
pluridisciplinaire de chercheurs pour travailler sur les comportements organisationnels
(Scott, 2003, p. 10). Dans les années 1960, des revues spécialisées et des manuels viennent
6
La structuration du champ comme discipline établie est critique dans notre démarche. Comme nous l’avons
signalé dans l’introduction, c’est bien sur une telle hypothèse que nous avons bâti notre méthodologie.
11
19. renforcer le positionnement de la théorie des organisations comme discipline établie
(Scott, 2003, p. 10).
Le monde francophone s’intéresse de façon un peu plus tardive aux organisations. En
France, Crozier fait figure de pionniers avec la fondation en 1962 du C.S.O. (centre de
sociologie des organisations) et il faut attendre les années 1970-1980 pour voir l’éclosion
d’autres centres de recherche tels que le Centre de Recherche en Gestion à Polytechnique,
le Centre de Gestion Scientifique (Mines), le GLYSI (Groupe Lyonnais de Sociologie
Industrielle) à Lyon où le LEST (Laboratoire d’Économie et de Sociologie du Travail)
d’Aix-en-Provence. Les théoriciens francophones sont traditionnellement très liés à la
sociologie (Chanlat, 1994, p. 49-50). Comme le souligne Chanlat, le champ connaît un
développement plus rapide au Québec. Pour Chanlat, le Québec a en effet la chance de se
situer à la charnière entre le monde francophone et le monde anglophone (Chanlat, 1994,
p. 47), ce qui lui offre une certaine proximité avec les deux traditions.
1.1.2 Comment comprendre le champ disciplinaire associé à la théorie des organisations
Ce qu’est exactement le champ de la théorie des organisations n’est pas encore clairement
défini et l’on relève dans chacun de nos ouvrages une définition différente de la théorie
des organisations. Au début des années 80, Séguin et Chanlat doutaient de l’existence
même d’un tel champ :
Il n’y a donc pas une science de l’organisation, mais des sciences de
l’organisation, c’est-à-dire des sciences telles l’économie, la science
politique, la psychologie, la sociologie dont un des objets d’étude est
l’organisation ou certains de ses composants. Jusqu’à ce jour, cette
multidisciplinarité n’a pas réussi à fonder ce qu’on pourrait appeler la
théorie des organisations, c’est-à-dire un corpus unifié de propositions
concernant l’organisation.
(Séguin et Chanlat, 1983, p. 5)
Dans nos autres ouvrages de synthèse, ce pessimisme laisse place depuis les années 2000 à
des opinions divergentes, mais qui contestent de moins en moins l’existence de la théorie
12
20. des organisations comme champ indépendant, au prix d’une réévaluation des conditions
qui lui permettent de se constituer comme tel. Ainsi, pour Hatch, il s’agit d’un « champ
d’études » (Hatch, 2000, p. 17), pour Handel c’est « un sous-champ central et dynamique
de la sociologie » (Handel, 2000, p. IX), Bélanger et Mercier parlent d’« étude systémique
des organisations » (Bélanger et Mercier, 2006, p. 1), pour Desreumaux c’est « un corps
non homogène issu de plusieurs sciences » (Desreumaux, 2005, p. 6), pour Shafritz et Ott,
la théorie des organisations est « la somme des théories qui cherchent à expliquer les
comportements des organisations et des individus qui la composent dans les différents
contextes » (Shafritz et Ott, 2001, p. 3), enfin pour Plane la théorie des organisations « est
un champ de connaissance fondamental en termes d’enseignement » (Plane, 2003, p. 7).
Certes la théorie des organisations n’apparaît toujours pas comme « un corpus unifié de
proposition concernant l’organisation ». Ni même comme « un champ disciplinaire », c’est-
à-dire comme champ de pratique des producteurs de connaissance, en raison des
désaccords apparemment irréconciliables entre les différents paradigmes (de la
psychologie à l’économie) dans lesquels évoluent les théoriciens contributeurs du champ
(Desreumaux, 2005, p. 9). Pourtant, la théorie des organisations semble être parvenue à se
constituer comme discipline établie, c'est-à-dire comme un champ de connaissance plutôt
que comme champ de pratique des producteurs de connaissance.
Quand on cherche à préciser les contours du champ de la théorie des organisations, on
retrouve dans nos huit ouvrages de synthèses au moins deux questions qui font débat : la
multidisciplinarité et le problème de l’intégration des connaissances d’une part et le
positionnement de la théorie des organisations par rapport à la sociologie d’autre part.
Tous les auteurs soulignent d’une manière ou d’une autre la question de la
multidisciplinarité dans la théorie des organisations (Hatch, 2000, p. 17 ; Handel, 2003,
p. 3 ; Bélanger et Mercier, 2006, p. XIII ; Séguin et Chanlat, 1983, p. 5 ; Scott, 2003, p. 9 ;
Shafritz et Ott, 2001, p. 6 ; Plane, 2003, p. 7). La théorie des organisations apparaît donc
13
21. comme un champ profondément multidisciplinaire. À ce propos, Bélanger et Mercier
identifient :
[…] Sept disciplines qui contribuent directement à la théorie des
organisations : la sociologie, la psychologie, l’anthropologie culturelle, la
science politique, l’économie, l’administration des affaires et
l’administration publique.
(Bélanger et Mercier, 2006, p. XIII)
Si l’on observe un solide consensus parmi les auteurs en ce qui concerne le caractère
multidisciplinaire de la théorie des organisations, les points de vue divergent quant aux
conclusions qu’il faut en tirer. Au début des années 80, Séguin et Chanlat parlaient tout
simplement de « cul-de-sac » (Séguin et Chanlat, 1983, p. 5). L’impossibilité de lier les
développements théoriques de l’organisation par-delà les différentes disciplines réduisait
l’organisation à une extension du domaine d’investigation des « sciences telles l’économie,
la science politique, la psychologie, la sociologie ». Depuis les années 2000, les auteurs de
notre sélection semblent tirer un constat plus optimiste de la multidisciplinarité dans le
champ. Si Desreumaux évoque des connaissances hétéroclites et conflictuelles, il reconnaît
toutefois au champ le statut de discipline établie (Desreumaux, 2005, p. 8-9). De son côté,
Hatch remarque bien que les différentes théories du champ ne sont pas en harmonie les
unes avec les autres (Hatch, 2000, p. 17), mais prend le parti de célébrer « l’intérêt des
perspectives multiples ». Scott, pour sa part, relève une reconnaissance grandissante pour
la théorie des organisations en tant que champ d’investigation et comme cursus de
formation. Quant à Shafritz et Ott, ils tendent à penser que la théorie des organisations
parvient bien à produire quelque chose de cumulatif (Shafritz et Ott, 2001, p. 6).
Finalement, le lien entre les différentes théories de l’organisation ne s’est pas fait sur un
plan théorique, mais plutôt métathéorique, et plus précisément sur un plan académique
comme nous l’avons décrit avec le concept de « discipline établie ». À ce titre, le fait que
l’organisation soit devenue un « champ de connaissance fondamental en termes
d’enseignement » joue un rôle très important dans l’intégration de ces connaissances
multidisciplinaires.
14
22. La question récurrente de savoir si oui ou non la théorie des organisations offre une
intégration relativement convaincante des différents développements théoriques sur
l’organisation est critique, car c’est elle qui va conditionner son émancipation vis-à-vis de
la sociologie. Handel souligne d’ailleurs les tensions qui existent entre les deux disciplines
(Handel, 2000, p. 3).
Certains auteurs, considérant qu’une telle émancipation n’a pas eu lieu, préfèrent parler de
sociologie des organisations (Handel, 2003, p. X ; Séguin et Chanlat, 1983, p. 3), et ce
faisant ramènent l’étude des organisations à un sous-champ de la sociologie. D’autres, plus
nombreux, considèrent au contraire la théorie des organisations en premier lieu comme
un champ multidisciplinaire de connaissance à part (Bélanger et Mercier, 2006, p. 1 ;
Desreumaux, 2005, p. 6 ; Shafritz et Ott, 2001, p. 2 ; Plane, 2003, p. 7). Scott propose une
définition hybride intéressante :
The study of organizations is both a specialized field of inquiry within the
discipline of sociology and an increasingly recognized focus of
multidisciplinary research and training.
(Scott, 2003, p. 10)
Ainsi, les auteurs qui reconnaissent l’existence d’un champ multidisciplinaire
d’investigation des organisations auront tendance à utiliser l’appellation relativement
consensuelle : « la théorie des organisations » (Hatch, Bélanger et Mercier, Desreumaux,
Shafritz et Ott, Plane). Les autres parleront plus volontiers de sociologie des organisations
(Séguin et Chanlat, Handel).
Dans la mesure où, comme Scott, nous pensons qu’un champ multidisciplinaire
indépendant émerge de l’étude des organisations, et qu’il nous apparaît comme Shafritz et
Ott que ce champ est parvenu à produire quelque chose de relativement cumulatif : nous
avons donc choisi le terme la théorie des organisations, pour désigner le champ de
connaissance dans lequel nous allons travailler dans ce mémoire.
15
23. 1.2 LES DÉFINITIONS DE L’ORGANISATION DANS LA THÉORIE DES
DANS
ORGANISATIONS
Dans cette partie, notre objectif sera de mettre en place une liste de définitions
représentatives dans le champ de la théorie des organisations. Nous verrons dans un
premier temps la méthode proposée pour sélectionner des définitions représentatives à
l’intérieur du champ disciplinaire. Puis nous aboutirons à une liste de définitions de
l’organisation qui ont été posées dans la théorie des organisations. Définitions que nous
commenterons une à une.
1.2.1 Méthode de sélection des définitions
définitions
1.2.1.1 « Théoriciens majeurs », « développements théoriques majeurs » et « ouvrages
phares » : définition des concepts et méthode de sélection
Comme nous l’avons signalé, notre démarche repose sur l’idée que la théorie des
organisations en se constituant comme champ de connaissance est parvenue à mettre en
place un savoir normalisé que l’on peut trouver de manière privilégiée dans les manuels de
synthèse. En suivant cette idée, il était logique d’analyser la manière dont les manuels
venaient restituer ce savoir normalisé et les possibilités qui s’offraient à nous pour élaborer
une liste de définitions représentatives du champ.
En assimilant la notion de représentativité du champ à celle de consensus, nous avons
distingué dans ces manuels les éléments dans leur présentation de la théorie des
organisations qui divergeaient de ceux qui convergeaient. On constate de manière
frappante que si l’agencement et la mise en relation des différentes théories du champ, par
exemple sous forme de courant ou d’école, varient considérablement d’un auteur à un
autre, on trouve en revanche un certain consensus sur les textes et surtout sur les
théoriciens les plus importants dans le champ. Dans ces manuels, les auteurs ont été en
mesure de proposer une sélection des théoriciens les plus influents du champ qui est
relativement stable d’un auteur à une autre. Selon les ouvrages, cette sélection a été
effectuée en retenant les théoriciens les plus connus, les plus reproduits et les plus cités
16
24. (Schafritz et Ott, 2001, p. 3 et Handel, 2003, p. 9). L’épreuve du temps est également
évoquée comme critère de sélection (Schafritz et Ott, 2001, p. 3, Bélanger et Mercier,
2006, p. XII ; Plane, 2003, p. 8) qui permet à travers la reconnaissance des critiques
(Schafritz et Ott, 2001, p. VII) de dégager une certaine orthodoxie concernant les grands
théoriciens du champ (Desreumaux, 2005, p. 129, Plane, 2003, p. 8, Scott, 2003, p. 109 et
Hatch, 2000, p. 18), et leurs textes fondamentaux (Séguin et Chanlat, 1983, p. VII ;
Schafritz et Ott, 2001, p. VII). On conçoit assez bien qu’une orthodoxie fondée sur la
notoriété des théoriciens et la reconnaissance de l’importance de leur apport théorique est
bien plus aisée à mettre en place, dans le cadre de la multidisciplinarité du champ, que ne
l’aurait été une orthodoxie sur la nature du phénomène organisationnel, et sur les lois qui
le régissent comme un « corpus unifié de propositions concernant les organisations »
(Séguin et Chanlat, 1983, p. 5). C’est pourquoi, si un savoir normalisé existe bien dans le
champ, il consiste largement à identifier les théoriciens et les textes les plus importants de
la théorie des organisations. On comprend également que la restitution du savoir
normalisé dans nos ouvrages de synthèse nous conduit à faire le choix de représenter le
champ dans la diversité des développements théoriques qui le caractérise plutôt que dans
un consensus artificiel sur une unique théorie de l’organisation.
Par ailleurs, prolongement logique d’un savoir normalisé qui se construit à partir d’une
orthodoxie de notoriété, la plupart des manuels que nous avons sélectionnés structurent
leur présentation du champ autour des théoriciens et des différentes écoles de pensée
plutôt qu’en partant des développements théoriques qui ont marqué le champ (Séguin et
Chanlat, Bélanger et Mercier, Scott, Hatch, Desreumaux et Plane). Utiliser les théoriciens
comme clef de comparaison apparaît donc comme un bon moyen de mettre en relation les
différents manuels. Les noms des théoriciens sont donnés de manière définitive et fixe. À
l’inverse, les nomenclatures, les classifications et même les traductions des écoles et
courants de pensée comme des développements théoriques majeurs, varient d’un auteur à
un autre et font plus souvent l’objet de controverses. De même, les textes nous
apparaissaient comme une base de comparaison moins convaincante dans la mesure où la
17
25. moitié de nos ouvrages de synthèses ne sont pas des anthologies et ne se structurent pas en
premier lieu autour des textes. Les théoriciens (ou leur nom) constituent donc le meilleur
dénominateur commun pour comparer les manuels de notre sélection et mettre en
évidence les théoriciens qui ont le plus influencé le champ.
Notre démarche consistera alors dans un premier temps à dégager les théoriciens majeurs
de ces différents manuels. Par la suite, nous préciserons leur influence sur le champ en les
liant à un développement théorique majeur, c'est-à-dire au développement qui a fait leur
notoriété dans le champ. Enfin, pour associer ces développements théoriques majeurs à
une définition, il a fallu déterminer ce que nous avons appelé des ouvrages phares, c’est-à-
dire des ouvrages dans lesquels les théoriciens majeurs ont exprimé de manière privilégiée
leur développement théorique majeur. Une fois ces ouvrages phares identifiés, il devient
possible de chercher la définition de l’organisation (si elle existe) qui sous-tend ou, à
défaut, qui est associée dans le texte par le théoricien au développement théorique majeur
qui a influencé le champ. Nos définitions sont donc représentatives du champ, car elles
sont associées aux développements qui ont marqué le champ que l’on retrouve en
analysant le savoir normalisé de nos manuels de synthèse. Il faut souligner que notre
démarche présente une bonne adéquation à la structuration de ce champ de connaissance :
l’aspect multidisciplinaire de la théorie des organisations tend à favoriser une certaine
« balkanisation du domaine des études organisationnelles » (Desreumaux, 2005, p. 129).
Cette balkanisation a facilité notre travail. L’aspect discontinu des développements
théoriques du champ favorise le regroupement des théories dans la structure : [un
théoricien majeur ↔ un développement théorique majeur ↔ un ouvrage phare] Ainsi la
phare].
plupart du temps, un théoricien majeur correspond bien à un unique développement
théorique majeur dans un unique ouvrage phare ce qui confère une bonne cohérence
d’ensemble à notre démarche. Flagrante dans nos ouvrages de synthèse qui prennent la
forme d’une anthologie, cette structure est un peu moins évidente chez Hatch, Scott et
Desreumaux, qui favorisent une approche thématique. Un théoricien peut alors être cité
pour plusieurs de ses développements.
18
26. Pour les huit ouvrages de synthèse sélectionnés au début du premier chapitre, nous avons
listé les théoriciens qui apparaissaient dans le cadre d’une occurrence majeure. Par
occurrence majeure nous entendons soit un théoricien dont le texte a été sélectionné
majeure,
lorsqu’il s’agissait d’anthologies (Shafritz et Ott, Séguin et Chanlat, Bélanger et Mercier,
Handel) soit un théoricien mentionné dans un schéma de synthèse global lorsqu’il
s’agissait d’un manuel favorisant une approche thématique (Hatch, 2000, p. 19 ;
Desreumaux, 2005, p. 130-144 ; Scott, 2003, p. 107-108). L’ouvrage de Plane ne présentant
pas un tel schéma, c’est le sommaire qui nous a servi pour établir une liste d’occurrences
majeures, car le plan de l’ouvrage est structuré autour de théoriciens clefs. De cette
manière, nous avons identifié les théoriciens qui pour les manuels de notre sélection font
date dans le champ. En appliquant cette méthode, on détermine une liste de 342
théoriciens. On obtient en moyenne 42 occurrences majeures par ouvrage avec un écart
type de 21,69. Notre méthode de définition des occurrences majeures nous semble donc
satisfaisante au vu de la relative uniformité statistique dans la distribution des résultats.
Cette uniformité laisse penser que tous les ouvrages de synthèse ont été assez bien
représentés dans l’établissement de cette liste de théoriciens. Ensuite, nous avons établi
une liste de théoriciens majeurs Nous définissons maintenant un théoricien majeur
majeurs.
comme un théoricien qui totalise quatre occurrences majeures ou plus dans la liste des 8
ouvrages de synthèse. Ainsi, nous nous assurons qu’un théoricien que nous définissons
comme majeur est présent sous forme d’occurrence majeure dans au moins la moitié des
manuels de notre sélection. En quelque sorte, il est élu théoricien majeur à la majorité
relative. Pour chacun de ces théoriciens, nous avons cherché les ouvrages qu’il a écrit et
qui sont considérés comme des classiques. Pour ce faire, nous avons comparé les
bibliographies pour les manuels, les textes sélectionnés dans les anthologies, et la
chronologie de Shafritz et Ott engagés dans une démarche similaire qui proposent dans
leur ouvrage de relever les dates clefs de la théorie des organisations (Shafritz et Ott, 2001,
p.8-25). Généralement un consensus apparaît sur les ouvrages phares. C’est-à-dire que
pour tous les théoriciens majeurs que nous avons déterminés, un ouvrage apparaît comme
19
27. étant sensiblement plus cité que les autres et/ou comme faisant date dans la chronologie de
Shafritz et Ott. C’est ce que nous avons identifié comme étant un ouvrage phare. Ce qui
phare
est développé dans cet ouvrage phare, c’est ce que nous appelons un développement
théorique majeur Toutefois, pour certains théoriciens, la mise en avant d’un ouvrage
majeur.
phare semblait moins évidente, en cas de doute, nous avons laissé la cellule grisée. On
obtient le tableau suivant qui regroupe dans sa première colonne les théoriciens majeurs
du champ, le nombre d’ouvrages où ils apparaissent comme occurrence majeure et leur
ouvrage phare :
20
28. Théoriciens Total des manuels Ouvrages phares Année de la
majeurs où ils apparaissent publication
comme occurrence originale
majeure
F. W. Taylor 8 Taylor, F. W. (1998), The principles of scientific management , 1911
Norcross, Engineering & Management Press.
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Tableau 1 - Les théoriciens majeurs du champ, leurs ouvrages phares et le nombre de
manuels où ils sont cités comme occurrence majeure
21
29. Dans certains cas l’ouvrage phare d’un théoricien majeur et en fait co-écrit avec un autre
théoricien. Pour appliquer rigoureusement la méthode que nous avons définie en p. 18, on
retient alors uniquement le théoricien qui a été préalablement identifié comme un
théoricien majeur. Dans d’autres cas, deux théoriciens que nous avons identifiés comme
théoriciens majeurs apparaissent de façon quasi systématique dans nos occurrences
majeures dans le cadre d’une collaboration. On parlera alors de collaboration majeure et
majeure,
l’on retient les deux théoriciens comme théoriciens majeurs. Ce qui explique que nous
ayons au final 17 lignes et 17 ouvrages phares dans ce tableau. Les regroupements dans des
collaborations majeures que nous avons effectués correspondent aux collaborations
suivantes :
• Burns et Stalker retenus pour les premiers pas des théories de la contingence et
surtout le continuum système mécaniste vs. système organiciste (Bélanger et
Mercier, Handel, Desreumaux, Shafritz et Ott).
• DiMaggio et Powell pour le néo-institutionnalisme (Bélanger et Mercier, Handel,
Scott, Desreumaux).
• March et Simon pour l’école de la prise de décision (Hatch, Bélanger et Mercier),
parfois appelée école de la rationalité limitée (Scott) ou encore école de Carnegie
(Desreumaux).
Concernant Mintzberg et Scott, il n’était pas évident de relier ces deux auteurs très
prolifiques à un unique développement théorique, et par conséquent à un unique ouvrage
phare. Pour Mintzberg nous avons choisi de présenter deux ouvrages phares liés aux deux
types de développements intellectuels avec lesquels il est le plus souvent associé dans nos
ouvrages de synthèse. Les questions de pouvoir et de politique avec : Power In and
Around Organizations. Les développements systémiques autour de la structure des
organisations avec : Le management : voyage au centre des organisations. Quant à Scott,
c’est l’ouvrage qu’il cite lui-même dans son manuel que nous avons retenu : Formal
Organizations : a Comparative Approach. Il a écrit cet ouvrage en collaboration avec P. M.
Blau.
22
30. Plus généralement, les résultats semblent être cohérents. On peut certes s’étonner de ne
pas voir figurer certains très grands théoriciens tels qu’Etzioni, Perrow, Weick ou encore
Smircich… Mais il faut aussi reconnaître que Taylor, Simon, Mintzberg ou Ouchi ont
sûrement leur place parmi les théoriciens majeurs de la théorie des organisations. La
légitimité de notre travail repose pour beaucoup sur la synthèse qui a été réalisée au
préalable par les auteurs dans l’élaboration de leurs ouvrages de synthèse. En réalité notre
démarche est assez vulnérable à une critique basée sur les exclusions que sa logique
interne en tant que telle rend nécessaire. Il est sûrement plus intéressant de commenter
nos résultats sur les inclusions que nous avons effectuées. De ce point de vue, la plus
grosse faiblesse de cette méthode serait plutôt de favoriser les théoriciens les plus
classiques et aussi les plus anciens au détriment des développements les plus récents. En
effet, on observe que les auteurs plus classiques bénéficient d’un relatif consensus dans les
ouvrages de synthèse. C’est donc sans surprise que l’on retrouve un nombre d’occurrences
majeures maximales (7 et 8) avec le trio : Taylor/Weber/Fayol, et un nombre
d’occurrences majeures minimales pour les développements théoriques les plus récents :
Hannan/Dimaggio. C’est aussi ce qui explique que l’on ne trouve aucun développement
récent, c’est-à-dire datant de moins de cinq ans, dans la liste, et ce, alors que tous nos
ouvrages de synthèse à l’exception de celui de Séguin et Chanlat sont postérieurs à janvier
2000. Mais cette observation permet aussi de penser que même en théorie des
organisations le temps fait son œuvre et finit par fossiliser certains théoriciens et
développements théoriques comme des éléments traditionnels du champ. À ce titre, la
théorie des organisations apparaît bien comme une discipline établie qui véhicule un
héritage théorique, c’est-à-dire un savoir normalisé. En outre dans la mesure où cet
héritage théorique ne peut pas être rattaché directement à un champ autre que la théorie
des organisations, nous sommes également amenés à penser que la théorie des
organisations a bien opéré une forme d’émancipation en tant que champ de connaissance
autonome plutôt que comme sous-champ de la sociologie. Cette constatation vient
opportunément renforcer la charpente méthodologique de ce premier chapitre et notre
23
31. choix de postuler l’existence d’un savoir normalisé d’où il serait possible de tirer des
définitions représentatives du champ.
1.2.1.2 Les définitions de l’organisation par les théoriciens majeurs du champ
À partir de notre tableau, nous avons ensuite cherché pour chaque théoricien
majeur/collaboration majeure une ou plusieurs définitions de l’organisation si possible
dans le cadre de l’ouvrage phare que nous avions déterminé. Cela ne signifie pas forcément
que la définition de l’organisation que nous avons obtenue corresponde à une définition
posée spécifiquement pour servir le développement théorique dans lequel elle s’inscrit. Au
contraire, nous avons cherché à ne pas favoriser les définitions illustratives du type
l’organisation « comme un système ouvert », « comme un organisme », « comme »… Qu’on
peut trouver, par exemple, chez Gareth Morgan pour rendre plus accessible les différentes
perspectives sur l’organisation. À ces définitions qui choisissent de mettre en lumière une
dimension particulière de l’organisation, nous avons préféré, dans la mesure du possible,
des définitions qui visent le phénomène organisationnel dans sa globalité. Enfin, notons
que ce que nous avons compris ici comme définitions sont des extraits qui respectent au
moins quatre critères :
• L’extrait est court (disons moins d’une page même si dans certains cas, on a
regroupé des éléments d’un texte originellement séparés de plus d’une page).
L’effort synthétique qui, pour nous, est au cœur du mouvement de définition doit
naturellement se traduire par une certaine concision de l’énoncé synthétique
auquel il aboutit. Ce critère est donc un critère d’efficacité dans la formulation.
Nous postulons que l’enjeu général d’une définition est aussi de parvenir à
délimiter un objet avec une certaine économie de moyens.
• L’extrait procède d’un effort de synthèse sur son objet : l’organisation. Il cherche à
décrire l’organisation prise globalement par opposition à la définition d’une partie
de l’organisation comme la direction, le leadership ou encore la culture
organisationnelle.
• C’est un extrait autosuffisant, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un extrait de texte d’une
longueur inférieure à une page qui signifie quelque chose. À la seule lecture de cet
extrait on peut commencer à se faire une idée de ce qu’est l’organisation telle que le
théoricien l’entend.
24
32. • Cette définition est posée intentionnellement par le théoricien.
Comme parfois d’autres termes ont pu se substituer au mot organisation, nous avons relevé
aussi des définitions qui n’utilisent pas le mot organisation, mais qui semblent faire
référence à l’idée que nous nous faisons habituellement des organisations. C’est-à-dire, à
minima, un groupement d’individus dans un cadre particulier, par exemple une entreprise
privée, un club de sport, une association de militants, etc.
1.2.2 Liste des définitions
Voici la liste, par théoricien dans l’ordre alphabétique, des définitions de l’organisation
que nous avons relevées :
dans le champ et Scott qualifie cette définition
C. Barnard : de « influential definition » (Scott, 2003, p. 26).
The functions of the executive T. Burns et G. M. Stalker :
Formal organization is that kind of
cooperation among men that is conscious, The management of innovation
deliberate, and purposeful.
(Barnard, 1938, p. 4) We have tried to argue that these are two
formally contrasted forms of management
Formal organizations arise out of and are
system. These we shall call the mechanistic
necessary to informal organization; but
and organic forms.
when formal organizations come into
A mechanistic management system is
operation, they create and require informal
appropriate to stable conditions […] The
organizations.
organic form is appropriate to changing
(Barnard, 1938, p. 120)
conditions […] Finally the two forms of
systems represent a polarity not a
On notera comment cette définition vient se dichotomy : there are as we have tried to
structurer autour de l’opposition entre
show, intermediate stages between the
extremities empirically known by us.
organisation formelle et organisation (Burns et Stalker, 1962, p. 119-121)
informelle. Avec la notion d’organisation Dans cet ouvrage phare, on note qu’aucune
informelle, Barnard met en lumière toute une définition n’est réellement posée pour
dimension de l’organisation. Pour cette l’organisation. Celle-ci est présentée comme
approche, il est reconnu comme un pionnier
25
33. une polarisation entre deux extrémités : la organisations : « les organisations
forme mécaniste et la forme organique. C’est bureaucratiques ». Elle se construit pour ainsi
pourquoi en guise de définition nous dire en contrepoint ou en réaction à l’idéaltype
proposons ce découpage qui rentre de la bureaucratie développé par Weber, et se
péniblement dans les critères que nous avons comprend mieux de cette manière. Au moyen
énoncés plus haut. En pensant les organisations d’une critique efficace, Crozier va remettre en
comme structurellement corrélées à leur cause l’idéal wébérien de la bureaucratie, qui a
environnement, Burns et Stalker posent les pourtant eu une influence considérable sur le
bases de la théorie de la contingence champ.
structurelle.
P. DiMaggio et W. W. Powell :
M. Crozier :
The Iron Cage Revisited : Institutional
Le phénomène bureaucratique : essai sur les Isomorphism and Collective Rationality in
tendances bureaucratiques des systèmes Organizational Fields
d'organisations modernes et sur leurs relations
«Organizations are still becoming
en France avec le système social et culturel
homogeneous and bureaucracy remains the
common organizational form […] why
Une organisation bureaucratique serait une there is such startling homogeneity of
organisation qui n'arrive plus à se corriger organizational forms and practices […]the
en fonction de ses erreurs […] le modèle concept that best captures the process of
sous-jacent qui caractérise un système homogenization is isomorphism [...]
bureaucratique d'organisation […] pourrait coercive isomorphism [...] Mimetic
se résumer ainsi : la rigidité avec laquelle processes [...] normative pressures.
sont définis le contenu des tâches, les (DiMaggio et Powell, 1983, p. 147-152)
rapports entre les tâches et le réseau
humain nécessaire à leur accomplissement, Définition qui se construit doublement en
rendent difficiles les communications des écho. Écho explicite à Weber présent dès le
groupes entre eux et avec leur
titre et rappelé dans la première phrase de
environnement. Les difficultés qui en
résultent [...] sont utilisées par les individus l’article. Écho implicite, aux théoriciens qui
[...] pour améliorer leur position au sein de cherchent à expliquer la diversité des formes
l'organisation.
(Crozier, 1963, p. 142-161) de l’organisation. Comme dans le cadre de
l’écologie des populations où Hannan et
On voit bien ici que cette définition est une
Freeman posent la question « pourquoi y a-t-il
définition d’une catégorie particulière des
tant de sortes d’organisation » (Hannan et
26
34. Freeman, cité par Bélanger et Mercier, 2006, M. Hannan :
p. 460). Les auteurs décident ici de renverser la
Organizational ecology
perspective en posant la question inverse :
« why there is such a startling homogeneity of Une population d'organisations est
organizational forms and practices.» (DiMaggio constituée de toutes les organisations
possédant une forme commune à
et Powell, 1983, p. 147). On pressent
l'intérieur d'une frontière particulière.
également en filigrane les théories néo- C'est-à-dire, la population est la forme telle
institutionnalistes que nous expliciterons dans qu'elle existe, ou se réalise, à l'intérieur
d'un système spécifié.
le dernier chapitre de ce mémoire. (Hannan et Freeman, cités par Bélanger et
Mercier, 2006, p. 459).
H. Fayol :
Les auteurs font le choix délibéré de placer
l’analyse au niveau de l’environnement :
Administration industrielle et générale
2° Organisation. Nous plaidons en faveur du développement
Organiser une entreprise, c'est la munir de […] d’une théorie et d’une recherche au
tout ce qui est utile à son fonctionnement : niveau de la population (et éventuellement
matière, outillage, capitaux, personnel. de la communauté).
(Hannan et Freeman, cité par Bélanger et
On peut faire dans cet ensemble, deux Mercier, 2006, p. 460).
grandes divisions : l'organisme matériel et
l'organisme social. Ils introduisent ainsi une perspective propice à
Il ne sera question que de ce dernier ici. leur développement sur l’écologie des
Pourvu des ressources matérielles
organisations qui, dans une certaine mesure,
nécessaires, le personnel, le corps social,
doit être capable de remplir six fonctions rompt avec la perspective organisationnelle qui
essentielles, c'est-à-dire d'exécuter toutes avait pu se développer dans le champ
les opérations que comporte l'entreprise.
(Fayol, 1979, p. 64) jusqu’alors.
On voit dans cette définition comment la
P. R. Lawrence :
notion d’organisation diverge sensiblement de
notre conception contemporaine des Organization and environment : managing
organisations telle que nous l’avons esquissée differentiation and integration
plus haut. Cette définition vient placer l’accent
We find it useful to view an organization
sur l’activité plutôt que sur la structure dans le as an open system in which the behaviours
cadre d’une activité de production industrielle. of members are themselves interrelated
(Lawrence et Lorsch, 1957, p. 6)
27
35. En définissant l’organisation comme un définition de cette liste à poser sans ambiguïté
système ouvert, Lawrence et Lorsh vont mettre l’organisation comme structure sociale, ce qui
en évidence la nécessité de prendre en compte constitue une avancée en vue de la constitution
l’environnement dans l’étude des du concept contemporain d’organisation.
organisations. Ceci les amène à contester la
possibilité d’un one best way, c’est-à-dire d’une
E. Mayo :
méthode de gestion des organisations à visée
universelle que les théoriciens classiques The human problems of an industrial
pensaient pouvoir élaborer. À la place ils civilization.
proposent la théorie de la contingence
Bien que E. Mayo puisse être considéré comme
organisationnelle, qui préconise une adaptation
le fondateur d'une discipline du management
contextuelle de l’organisation à son
(les ressources humaines), on ne trouve pas
environnement. Ils ouvrent ainsi la voie à des
facilement de définition de l’organisation chez
réflexions sur la diversité des organisations et
lui. Néanmoins, en introduction de son
sur leur relation à l’environnement.
ouvrage phare, un de ses proches
J. G. March : collaborateurs, Roethlisberger, va nous éclairer
sur la définition implicite qui fonde le cadre
Organizations
conceptuel de Mayo :
« Organizations are assemblages of
What Mayo is saying is: Let’s study
interacting human beings and they are the
organizations as natural organic wholes or
largest assemblages in our society that have systems striving to survive and maintain
anything resembling a central coordinative
their equilibrium in different
system… The high specificity of structure
environments
and coordination within organizations –as (Roethlisberger dans Mayo, 1960, p. XIV)
contrasted with the diffuse and variable
relations among organizations and among Ici la notion d’équilibre renvoie d’abord à des
unorganized individuals– marks off the équilibres humains. Sur la base des très
individual organization as a sociological
célèbres expériences de Hawthorne, Mayo va
unit comparable in significance to the
individual organism in biology. démontrer l’importance de ces équilibres dans
(March et Simon, 1958, p. 4)
l’organisation. Quelques années avant Barnard
et de manière plus universitaire, les
C’est une définition qui répond bien à nos
développements de Mayo rendent possible une
critères. Elle est notamment la première
28
36. autre manière de penser les comportements Y du management le passage d’une conception
humains, introduisant notamment la de l’organisation comme l’action d’organiser à
psychologie dans le champ. Il enrichie ainsi la une conception de l’organisation comme
vision de l’organisation, ce qui se traduit dans structure sociale que dénote l’apparition du
son ouvrage phare par le passage de la notion concept de membre dans sa définition :
d’ « industrial organization » (Mayo, 1960, p. 1)
The textbook principles of organization-
très proche de l’organisation au sens ou
hierarchical structure, authority, unity of
l’entendent les théoriciens classiques comme command, task specialization, division of
« the area controlled by factory organization staff and line, span of control, equality of
responsibility and authority, etc. Comprise
and executive policy » (Mayo, 1960, p. 165) à a logical persuasive set of assumptions,
celle d’« administration » (Mayo, 1960, p. 165), which have had a profound influence upon
managerial behaviour over several
dans un sens plus contemporain et assez
generations.
proche de celui de Weber. Cependant, on (Mc Gregor, 1960, p. 15)
comprend bien que la notion d’organisation est The control principle that derives from
encore floue chez ce théoricien. theory X is that of direction and control
made trough the exercise of authority […]
D. McGregor : Theory Y is that of the integration : the
creation of conditions such that the
The human side of enterprise members of the organization can achieve
their own goal best by directing their
effort toward the success of the enterprise.
Aucune trace de définition explicite dans les 8
(Mc Gregor, 1960, p. 49)
ouvrages de synthèses. Ni dans son ouvrage
H. Mintzberg :
phare cité ci-dessus. Dans son ouvrage phare,
D. McGregor développe une compréhension Le management : voyage au centre des
des organisations qui n’est pas ce que nous organisations :
avons appelé la compréhension contemporaine
Pour moi l’organisation se définit comme
des organisations. Par organisation, il fait
une action collective à la poursuite de la
plutôt référence, comme Fayol, à l’action réalisation d’une mission commune.
(Mintzberg, 2004, p. 12)
d’organiser. Cette notion évolue au cours de
son ouvrage. Ainsi, on trouve dans le cadre de Pour deux raisons, on peut penser que cette
son célèbre développement théorique autour définition a été formulée à reculons. D’une
de l’opposition entre la Théorie X et la Théorie part, car elle est immédiatement suivie dans
29
37. l’ouvrage auquel nous faisons référence par
une remarque un peu ironique, où Mintzberg
nous signale qu’il s’agit d’une bien « drôle » de
définition pour désigner des organisations
telles que GM … D’autre part, car elle
ressemble beaucoup à d’autres définitions de
l’organisation, assez génériques, dont
Mintzberg ne peut pas ne pas avoir
connaissance. Par exemple, Chanlat et Séguin
nous offrent un abrégé de la définition
implicite qu’ont les différents penseurs en
Les 6 parties de base de l’organisation
théorie des organisations qu’ils réunissent sous (Mintzberg, 2004, p. 155)
le label « fonctionnaliste » : « l’organisation
C’est en faisant varier les aires et les
devient alors un système d’efforts humains
emplacements des sous-ensembles de ce logo
concertés » (Chanlat, 1992, p. 33).
que Freitag va pouvoir caractériser les
différents types d’organisations.
À l’inverse, Mintzberg paraît, tout à fait
reconnaître sa vision des organisations dans ses
Ouchi :
diagrammes :
Theory Z : how American business can meet
J’introduirai ici un diagramme qui depuis the Japanese challenge
ses premiers développements dans mon
livre Structure et dynamique des
Au début des années 80, le succès des firmes
organisations, est devenu, en un certain
sens, mon logo personnel, le symbole de japonaises sur le marché américain inquiète et
mes travaux. intrigue. Dans son ouvrage phare, Ouchi va
(Mintzberg cité par Bélanger et Mercier, 2006,
p. 249) chercher à expliciter les éléments qui font la
réussite de ces entreprises et à comprendre
comment les entreprises américaines
Nous avons donc choisi de reproduire ici le
pourraient se les réapproprier malgré les
« logo » en question, à titre de définition :
différences de culture. Sa démarche le conduit
à la formulation d’une théorie Z qui vise à
mettre en place un idéal théorique,
30