Livre Blanc sur les « Investissements
français en Turquie : retour d’expérience ». Publié par la mission économique de Turquie, UBIFRANCE et la Chambre de Commerce Franco-Turque. Février 2010.
Heliosthana", un pays Méditerranéen à énergie durable
Livre Blanc Investissements Turquie
1.
Investissements français en
Turquie : retour d’expérience
Livre Blanc
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2. Préface
C’est un grand plaisir pour moi de préfacer cette excellente initiative
que constitue ce premier Livre Blanc, intitulé « Investissements
français en Turquie : retour d’expérience ». Tout le mérite en revient
à la section des Conseillers du Commerce Extérieur de la France en
Turquie et tout particulièrement à son Président de 2008 à novembre
2009. Gérard Lanfrey a en effet, eu la bonne idée de réaliser, avec le
concours de la Chambre Française de Commerce en Turquie, de la
Mission Ubifrance à Istanbul et du Service Economique Régional de
l’Ambassade de France en Turquie, cette étude qui constitue une documentation unique sur
la manière dont les entreprises françaises conduisent leurs investissements en Turquie.
Si nos relations économiques avec la Turquie reposent sur des bases solides et diverses, ce
livre Blanc vise à pallier une certaine méconnaissance des entreprises françaises quant à
l’accès au marché turc.
Ce document se démarque des guides juridiques ou fiscaux. Le parti retenu a en effet été
celui de relater des expériences, les succès mais aussi les difficultés rencontrées par nos
entreprises. Les témoignages recueillis auprès de 43 entreprises donnent une opinion
générale globalement positive sur l’opportunité d’investir en Turquie.
Au‐delà des chiffres, ce document nous éclaire sur l’histoire de l’investissement français en
Turquie et permet, dans le même temps, de découvrir au hasard des expériences des uns et
des autres ce qu’est la Turquie d’aujourd’hui, à savoir une économie dynamique, la 17e
économie mondiale, membre du G20 et dont l’ambition est de devenir en 2050 l’une des 10
premières économies mondiales. Un pays où les élites sont parfaitement formées et qui est
également un formidable pont entre l’Europe et le Moyen‐Orient avec, dans ce pays
stratégique, Istanbul qui est devenue aujourd’hui une grande métropole d’envergure
mondiale.
Investir en Turquie, ce n’est pas seulement conquérir un marché intérieur de 72 millions
d’habitants, bénéficier d’un coût de la main d’œuvre ou d’un savoir‐faire attractifs, c’est
aussi trouver une excellente base pour lancer des investissements au Moyen Orient, en Asie
centrale ou en Afrique.
La présence de nos sociétés en Turquie a été multipliée par vingt au cours des vingt
dernières années. Désormais au second rang des investisseurs étrangers, avec près de 300
2
3. entreprises implantées employant plus de 70 000 salariés, notre pays mobilise dans ce
domaine des capitaux d’un montant très significatif. Les témoignages rapportés dans le Livre
Blanc montrent qu’une marge de progression importante existe encore. Malgré la récession
qui a frappé la Turquie durant l’année 2009, un nombre croissant de nos entreprises
envisagent une progression rapide de leurs chiffres d’affaires dans les années à venir.
Les témoignages recueillis montrent également que travailler en Turquie n’est pas toujours
aisé. Les difficultés sont nombreuses, qu’il s’agisse des pesanteurs administratives,
d’obstacles non tarifaires ou de la protection de la propriété intellectuelle.
Le message principal de ce Livre Blanc est que les difficultés normales d’accès au marché
turc n’empêchent pas, bien au contraire, nos entreprises de réussir et d’envisager l’avenir
avec sérénité. Elles ont toutes pris conscience que se priver d’aller en Turquie signifierait
renoncer à des opportunités majeures et négliger le carrefour stratégique que constitue ce
grand pays ami. Oui, ce Livre Blanc est bien une invitation à poursuivre notre offensive
économique pacifique dans ce grand partenaire de la France dont le rapprochement avec
l’Union européenne permet aussi de multiplier les opportunités de travail en commun.
3
4. Introduction
La Turquie est devenue depuis plusieurs années une destination attractive pour les
investisseurs. Un contexte politique stabilisé, ainsi que des résultats économiques
impressionnants obtenus grâce à la mise en œuvre de politiques de gestion rigoureuse, ont
en effet permis d’améliorer de façon significative l’afflux des IDE en Turquie. Depuis 2005,
les flux d’IDE dirigés vers le site turc ont connu une accentuation notable, qui a culminé en
valeur absolue à 22 Mds USD en 2007 et est demeurée à un bon niveau en 2008, à 18,2 Mds
USD.
Des IDE d’origine française qui fournissent un socle d’implantation solide
L'essor des investissements français en Turquie date de la seconde moitié des années 80. La
présence française est ainsi plus récente que celle de certains concurrents européens
(Allemagne, Italie, notamment), mais elle a connu des avancées importantes au cours des
quinze dernières années. Le nombre d’implantations est ainsi passé de 15 en 1985 à un
chiffre voisin de 300 aujourd’hui, concentrant plus de 70.000 emplois. Les investissements
français en Turquie sont répartis pour 63 % dans les services (dont 27 % consacrés à des
activités d’import et d’export) et pour 37 % dans l’industrie. Les principaux secteurs
concernés sont l’automobile (y compris les équipementiers), le BTP (matériaux de
construction, pour l’essentiel), les services financiers (banque, assurance), le textile, le
matériel électrique, les TIC, et les services de transport et de logistique.
Selon les statistiques françaises, les opérateurs nationaux ont investi 657 MEUR sur le
territoire turc en 2008, soit 0,5% des flux d’IDE dirigés vers le reste du monde. La Turquie se
classe ainsi au 25ème rang des destinations mondiales (28ème en 2007) privilégiées par notre
pays au cours de l’exercice.
En termes de stocks, notre pays occupe fin 2008 le 2ème rang des investisseurs étrangers en
Turquie, derrière les Pays‐Bas. La Turquie représente ainsi, pour l’IDE français, le 24ème site
d’accueil à l’échelle mondiale.
Ces chiffres minorent néanmoins le poids réel de nos investissements, qui transitent en
grande partie par des pays tiers et ne sont donc pas comptabilisés comme français. Surtout
l’investissement tel qu’il est mesuré ne donne pas une image fidèle de la présence et de
l’activité de nos entreprises, dont l’intensité capitalistique est extrêmement variable selon
les secteurs.
Les entreprises françaises ont une carte importante à jouer avec la Turquie
Pour les démarches d’investissements des opérateurs français, la Turquie affiche des
facteurs d’attractivité nombreux : un potentiel de développement et de demande locale
élevé, par suite de l’existence d’une population jeune, ouverte sur le monde et sur le modèle
de consommation occidental ; des déterminants favorables pour la gestion des relations
sociales ou partenariales (cadre juridique proche des standards européens, outil industriel
développé et diversifié, tissu d’entreprises particulièrement dense, façonné autour de PME,
4
5. ressources humaines aux fortes capacités d’adaptation, qualifiées, travailleuses et
motivées).
A l’ensemble de ces atouts s’ajoutent les capacités de rayonnement offertes par un pays «
carrefour», situé à la croisée de plusieurs continents et susceptible de favoriser des
synergies profitables avec les grands ensembles régionaux voisins (Union pour la
Méditerranée, ensemble EUROMED, BSEC, Proche et Moyen Orient, pays d’Asie centrale).
Economie émergente, de grande taille et proche de l’Europe, elle représente, pour les
opérateurs français, une destination particulièrement attrayante. Au‐delà, des liens
d’histoire particulièrement anciens et des liens de culture étroits illustrés par la présence
d’une tradition francophone toujours vivace ne peuvent qu’aider notre pays et ses
entreprises à se rapprocher davantage encore, pour l’avenir, d’un partenaire qui a vocation à
tenir une place éminente dans l’effort d’internationalisation du tissu économique français.
Pour donner une image plus fidèle du développement de la présence des entreprises
françaises en Turquie, dans toutes ses dimensions, le Service Economique Régional
d’Ankara de l’Ambassade de France en Turquie, la Mission économique‐Ubifrance d’Istanbul,
les Conseillers du commerce extérieur de Turquie et la Chambre de Commerce et d’Industrie
française en Turquie ont conjointement décidé de la rédaction d’un livre blanc. Ce
document, public, a été établi principalement sur la base d’un questionnaire envoyé aux
responsables de 43 sociétés françaises implantées en Turquie, ainsi que par le bais
d’entretiens réalisés en face‐à‐face avec certains d’entre eux. Ces sociétés ont été
sélectionnées pour obtenir un échantillon représentatif de notre présence – même s’il est
nécessairement imparfait – en termes de secteur d’activité, de taille et de localisation
géographique. On y retrouve aussi bien CarrefourSA, premier employeur français du pays,
avec un peu plus de 7200 salariés, que des entreprises qui y comptent moins de 10 salariés.
Même si aucune entreprise ayant échoué dans son implantation en Turquie n’a été
interviewée – l’intégralité du travail de recherche pour ce rapport ayant été réalisé sur place
– il a été pris soin de ne pas écarter les témoignages d’entreprises qui ont connu ou
connaissent encore des difficultés, parfois importantes, du fait de leur implantation en
Turquie. La liste des entreprises interviewées figure en annexe à ce rapport ; s’y ajoutent
quelques autres qui ont souhaité témoigner de manière anonyme.
Le rapport s’articule autour de quatre grandes questions, auxquelles il s’efforce de
répondre objectivement, à la lumière des expériences vécues par les entreprises
rencontrées :
Depuis quand et où les entreprises françaises s’implantent‐elles en Turquie ?
Pourquoi ces entreprises viennent‐elles en Turquie ?
Quelles sont les difficultés rencontrées et quelles solutions ont pu être trouvées ?
Quel est l’impact de ces implantations, pour les entreprises comme pour l’économie
française ?
5
6. Le développement des implantations françaises en Turquie est un
phénomène encore récent (I)
Les trois vagues successives d’implantation
Les groupes précurseurs des années 1980
L’essor des investissements français en Turquie date de la 2e moitié des années quatre‐
vingt. En effet, au cours des deux dernières décennies, les sociétés françaises ont pris le
chemin de la Turquie où le nombre des implantations tricolores s’est accru de 15 en 1985 à
près de 290 fin 2008. L’effectif total employé par les implantations françaises en Turquie –
tous types de structures confondus – dépasse aujourd’hui les 70 000 salariés.
Dans la chronologie des implantations françaises, deux entreprises font figure de pionniers,
avec une implantation antérieure aux années 1980
Air France, avec l'ouverture d'une liaison aérienne avec la Turquie dès 1933, fait figure de
pionnière parmi les entreprises françaises présentes en Turquie. En effet, d'après le rapport
d'exploitation d'Air France du 31 décembre 1933, la ligne Bucarest‐Istanbul est exploitée
trois fois par semaine en correspondance avec la ligne Paris‐Bucarest. Bien que la desserte
de la Turquie par Air France soit suspendue en 1935 suite à la concurrence d'une ligne créée
par la Lufthansa entre Berlin et Istanbul, celle‐ci reprend dès la fin de la deuxième Guerre
Mondiale. En octobre 1946, la France et la Turquie signent un accord sur les communications
aériennes entre les deux pays qui prévoit notamment une route Paris‐Ankara via Marseille,
Tunis, Le Caire, et une route Paris‐Istanbul‐Ankara, via l'Europe Centrale.
La création de la société Oyak‐Renault, détenue à l’époque à hauteur de 44% par Renault,
43% par Oyak (caisse de retraite de l'armée) et 13% par la banque turque Yapı Kredi,
inaugure la présence industrielle française en Turquie. Au début de l'aventure du groupe
français et selon la législation de l'époque, il fallait obligatoirement, pour pouvoir s'installer
en Turquie, avoir un partenaire local, le partenaire étranger ne pouvant être majoritaire non
plus. À cette époque, Oyak souhaitait mettre sur pied son propre projet d'investissement
dans le secteur automobile avec une tentative d'alliance pour obtenir une licence. Ceci en
vue de créer une usine automobile en Turquie centrée essentiellement sur une activité
d'assemblage des véhicules qui seraient ensuite commercialisés sur le marché turc à partir
de pièces et organes détachés. Vu l'ampleur de l'investissement, les discussions conduites à
la base en vue de la conclusion d'un contrat de licence ont subitement changé de direction
pour basculer vers une négociation visant un partenariat. Les responsables de Renault,
informés du projet d'investissement d'Oyak dans l'industrie automobile, ont alors proposé
un rendez‐vous de prise de contact. Ce n’est toutefois que lorsque les négociations initiales
engagées avec un autre constructeur européen ont achoppé, que les contacts entamés entre
Oyak et Renault ont pu aboutir en 1969, posant la première pierre du partenariat franco‐
turc.
6
7. Bien que la Turquie soit liée à l'Union européenne par un accord d'association depuis 1963,
la présence d’entreprises françaises et étrangères est restée très limitée durant les années
1960 et 1970. Mises à part les exceptions précitées, c'est donc seulement vers la fin des
années 1980, mais surtout les années 1990 que s’est enclenché le premier véritable
mouvement d'implantation de nos entreprises en Turquie, avec l'arrivée de grands groupes
industriels.
Chaîne de montage de l’usine Oyak‐Renault à Bursa
Les grands groupes industriels ouvrent la voie à la fin des années 1980
Il faut attendre la fin des années 1980 et l'ouverture économique décidée à cette époque,
notamment en ce qui concerne les importations, (voir encadré) pour que les premiers
grands groupes industriels français arrivent sur le marché turc. Dès 1988, Rhone Poulenc,
déjà présent sur le marché pharmaceutique local, de la vaccination, des produits chimiques
et des pesticides, en collaboration avec la plus grande entreprise pharmaceutique turque
Eczacıbaşı, renforce son implantation en Turquie. La filiale turque de Rhodia reprend en
1998 les activités chimie de Rhone Poulenc.
Disposant de nombreux réseaux en Turquie depuis plusieurs années, Saint‐Gobain PAM y
ouvre un bureau de représentation à Istanbul, en 1987. Initialement situé au Liban, mais
déplacé à cause de la guerre civile, ce bureau a pour objectif de promouvoir des produits tels
que les canalisations et les équipements pour le marché de l’eau, et s’inscrit donc dans une
logique de représentation régionale.
Sanofi‐Aventis, un des leaders mondiaux dans le domaine pharmaceutique, s’implante lui
aussi en Turquie à la fin des années 1980. Le groupe y accorde des licences de fabrication à
7
8. des entreprises turques, avant d’en reprendre le contrôle et créer lui‐même une filiale et
une implantation industrielle en coopération avec Zentiva Eczacıbaşı.
Dans le secteur automobile, l'équipementier Valéo réalise en 1989 son premier
investissement en Turquie et fonde une coentreprise avec des partenaires locaux avant le
rachat de 100% des parts dès 1993.
Dans la perspective de développer ses parts de marchés au sein d’un pays à fort potentiel de
croissance, L'Oréal crée une filiale en Turquie en 1990. D'abord créée pour permettre un
accès direct au marché turc des cosmétiques et la vente de la plupart de ses produits phares,
la filiale initie par la suite un processus de production pour certaines lignes comme les
produits capillaires.
Le régime des importations en Turquie
Depuis les années 1980, la Turquie a progressivement libéralisé son régime des
importations. Un accord douanier est entré en vigueur le 1er janvier 1996 avec l’Union
européenne, qui a conduit à la suppression progressive et réciproque des droits de douane
sur les produits industriels importés et la part industrielle des produits agricoles
transformés (les services, les produits agricoles et la part agricole des produits agro‐
industriels ne sont pas concernés). En vertu de cet accord, la Turquie harmonise
progressivement ses droits de douane pour les importations en provenance de pays tiers
avec le tarif extérieur commun de l’UE. La Turquie a adopté en 2002 le système de
préférences généralisées (SPG) établi par l’Union européenne, qui consiste à appliquer des
tarifs douaniers préférentiels à des pays tiers. Le SPG concernait en 2002 l’importation de
2450 produits industriels, en provenance de 178 pays comprenant les pays en
développement et les pays les moins avancés / PMA (afin de favoriser leurs exportations).
En 2003, 428 produits ont été ajoutés à cette liste. Les produits industriels de Macédoine et
de Bosnie‐Herzégovine ont obtenu la possibilité de rentrer sans droits de douane sur le
marché turc.
La grande vague des années 1990
Le premier afflux significatif d'implantations françaises en Turquie intervient dans le courant
des années 1990, dans tous les secteurs, mais avec une intensité qui dépend de la maturité
des marchés et des conditions d'accueil des investissements étrangers.
La présence française se diversifie sectoriellement, mais les grands groupes prédominent
encore
Alors que les grands groupes industriels avaient initié le processus d'implantation des
entreprises en Turquie, l'arrivée de Groupama en 1991 témoigne de la progressive ouverture
à d'autres secteurs de l'économie. En 1991, Gan prend ainsi une participation de 30% dans le
capital de Güneş Sigorta, qui a été progressivement renforcée par achat de titres en bourse
pour atteindre un total de 36% du capital.
Dans le domaine de la construction, le cimentier Vicat réalise son premier investissement en
Turquie en 1991, avec le rachat d'une participation majoritaire dans Konya Çimento, peu
après le processus de privatisation de l'industrie cimentière dans le pays.
8
9. L’année 1991 est aussi marquée par l’arrivée d’un des plus grands groupes français, le
pétrolier Total. Les deux entreprises, Total et Elf, présentes depuis 1991, ont fusionné en
2002 sous le nom de Total Oil Türkiye à la suite de la fusion intervenue à l’échelle mondiale.
Sodexo, un des leaders mondiaux des services de restauration collective, fait aussi partie des
entreprises françaises qui ont choisi de se développer en Turquie dès le début des années
1990. Arrivée en 1992 avec pour seule activité la restauration collective, l’entreprise a
progressivement étendu ses activités dans le pays.
Dans le cadre de sa stratégie de développement international, Carrefour ouvre son premier
hypermarché en 1993 à Istanbul puis son premier centre commercial deux ans plus tard à
Adana. En 1996, Carrefour prend le nom de CarrefourSA en Turquie après la création d’une
coentreprise avec le groupe Sabanci.
Michelin, dont les pneumatiques sont commercialisés en Turquie depuis 1936 par des
importateurs, décide d’ouvrir une agence commerciale à Istanbul en 1996 et tirer avantage
d’une présence directe dans le pays.
L’importance du secteur automobile en Turquie
L’automobile est un secteur particulièrement dynamique en Turquie, puisqu’il regroupe 15
constructeurs (dont 5 fabriquent des voitures particulières) et plus d’un millier
d’équipementiers. Cette activité représente le 1er poste d’exportations du pays (devant
l’habillement) avec 21,2 Mds USD (TIM, chiffres 2007) et le 1er poste d’échange entre la
France et la Turquie.
L’industrie de l’équipement automobile s’est développée à partir des années 1970, du fait
de l’implantation des constructeurs automobiles – principalement Renault et Fiat ‐ qui ont
attiré dans leur sillage un certain nombre d’équipementiers mondiaux. Il s’agissait alors
d’une industrie d’assemblage, orientée uniquement vers le marché local et protégée par
des barrières douanières. L’entrée en vigueur, en janvier 1996, de l’accord douanier avec
l’Union européenne a provoqué une mutation rapide du secteur. La Turquie est devenue
aujourd’hui une plate‐forme de production de véhicules destinée tant au marché local qu’à
l’exportation, notamment vers les marchés d’Europe de l’Ouest. Entre 2000 et 2007, les
exportations de véhicules automobiles ont été presque multipliées par plus de 8 et
représentent aujourd’hui 75 % de la production. Quant aux importations, qui ne
représentaient que 11 % des ventes locales en 1995, elles se sont renforcées depuis
l’entrée en vigueur de l’accord d’union douanière et représentent aujourd’hui environ 58 %
des ventes. Oyak‐Renault est le 1er fabricant local de véhicules particuliers (et le 2ème
producteur automobile en Turquie après Ford), avec 42 % de la production en 2007, suivi
de Toyota (25 % des VP) et de Tofas‐Fiat (16 %). Sur le plan géographique, les
équipementiers automobiles se concentrent principalement dans la région de Marmara,
notamment à Bursa où l’on trouve 2 unités de production d’automobiles (Fiat, Renault) et
2 zones industrielles dédiées. Les autres sites de production sont situés à Adana, Ankara,
Istanbul, Izmir, Kocaeli, Konya et Manisa.
9
10. L'approfondissement des années 2000
Les années 2000 sont marquées par l’arrivée de nombreuses entreprises françaises en
Turquie. Jusqu’alors largement dominés par des grands groupes, les investissements français
se diversifient et des entreprises de taille plus modeste font leur apparition en grand
nombre. Le processus de diversification sectorielle continue.
Des entreprises de taille plus modeste s'implantent
Bien que filiale d’un des géants mondiaux du domaine agroalimentaire, Danone Hayat
représente cette dernière génération d’investissements français de plus petite taille, qui se
sont multipliés ces dix dernières années. D’abord établie sous la forme d’une coentreprise
avec le groupe Sabanci entre 1998 et 2004, Danone Hayat a continué en tant que filiale à
100% de la maison mère, dans la production et la commercialisation d’eau minérale, à partir
de 5 usines de production réparties entre Istanbul, Pozanti, Hendek, Bolu, Izmir et Finike.
Parmi les exemples les plus emblématiques de cette évolution du profil des entreprises qui
investissent en Turquie depuis une dizaine d’année figure Aromatech, créée en France en
1987, avec pour objet la production d’arômes pour l’industrie alimentaire. Cette société
compte aujourd’hui 6 filiales dans le monde : en Algérie, Chine, Etats‐Unis, Thaïlande,
Tunisie et depuis 1999, en Turquie. Après plusieurs années de collaboration avec un agent
local, le groupe Aromatech a décidé de construire sur place un centre de recherche,
développement et de production.
L’aventure d’Aromatech en Turquie
La société Aromatech a été créée en 1987. Son siège social est basé dans le Sud de la
France, à Grasse, capitale mondiale des arômes et des parfums. Une région dynamique,
dont l’image de marque est reconnue dans le monde entier grâce au savoir‐faire unique de
ses industriels et à la qualité de ses produits aromatiques. Depuis, Aromatech s’impose
comme l’un des principaux acteurs de l’industrie des arômes alimentaires.
Aromatech est présent en Turquie depuis 1999, date de création de la seconde filiale du
groupe à Istanbul. Elle est aujourd’hui un acteur important sur le marché national et dans
la région, avec une part croissante de chiffre d'affaires sur des pays tels que l'Ouzbékistan,
le Turkménistan, l'Azerbaïdjan, la Syrie... et l’Irak.
Le Groupe Aromatech a exposé au salon Gateway to Iraq, 4ème salon international du
Commerce et de l’Industrie en Irak et 2ème salon international de l’alimentation et des
technologies, qui a eu lieu du 21 au 24 mai 2009 à Gaziantep, Middle East Exhibition Centre
(Turquie).
Durant ce salon Gateway to Iraq, Aromatech Turquie a exposé sur le Pavillon France et a
proposé sur son stand des dégustations de ses derniers développements d’arômes pour
boissons, sirops, eaux aromatisées, thés glacés, biscuits, confiserie...
10
11. Au début de l’année 2009, Aromatech Turquie s’est installée dans ses nouveaux locaux sur
3 niveaux à Istanbul. Après 2 mois de travaux et d’importants investissements réalisés afin
d’aménager l’usine de production selon les normes HACCP, Aromatech Turquie est
actuellement opérationnelle. Ce déménagement a été accompagné d’acquisitions de
nouveaux matériels de production et de laboratoires. Ces nouveaux locaux permettent
également à Aromatech Turquie d’agrandir ses laboratoires d’applications et de
développement d’arômes salés.
Le secteur vétérinaire suscite aussi l’intérêt d’investisseurs français. Ceva Santé Animale,
implanté à Libourne, en Gironde, rachète en 2005 un important laboratoire vétérinaire turc,
Dogu Ilaç Veteriner Ürünleri (DIF). Présent depuis le début des années 1990 en Turquie à
travers un réseau de distributeurs, le groupe français préfère lui aussi créer une filiale, CEVA
DIF ILAC A.S. Cette filiale, qui emploie aujourd’hui 53 personnes, fait fabriquer par trois
façonniers turcs – contrat de manufacturing – certains de ses produits pharmaceutiques
vétérinaires (soit environ 50% de ses produits).
CEVA DIF ILAC A.S. à la rencontre de nouveaux clients et des éleveurs
Le sous‐secteur du retraitement des déchets industriels est également en pleine expansion
en Turquie, grâce notamment au renforcement des normes environnementales édictées par
les autorités turques. C’est sur ce créneau qu’opère Chimirec‐Ekasan, filiale du groupe
français Chimirec depuis 2006 et qui emploie aujourd’hui 24 personnes en Turquie. Après le
rachat d’une société turque existante, Chimirec‐Ekasan s’est spécialisée dans la vente de
services pour la collecte et le transit de déchets industriels dangereux. Parmi ses clients
figurent de grands groupes français, comme Total Oil Türkiye, et étrangers, comme Siemens,
Coca Cola, ainsi que de nombreuses entreprises locales.
En 2006 et 2007, deux groupes français, Darty et Sephora, ont effectué un investissement
remarqué en Turquie dans le secteur de la distribution. Darty, spécialiste de la distribution
de produits électrodomestiques, après avoir ouvert ses premiers magasins en Italie (2004) et
en Suisse (2005) choisit la Turquie en mai 2006 pour continuer son développement
international. La société mère, Kesa Electricals, ouvre le premier magasin Darty à Istanbul en
11
12. décembre 2006. En février 2009, l’enseigne comptait 11 magasins, dont 3 en dehors
d’Istanbul (à Ankara, Izmir et Izmit) et un site commercial marchand. Sephora, marque du
groupe français LVMH, après une ouverture puis une fermeture d’un magasin en 2000‐2001,
revient en Turquie en 2007, sous la forme d’une coentreprise avec UNITIM, groupe
spécialisé dans la distribution de marques étrangères en Turquie. Cette filiale de Sephora
France possède aujourd’hui 6 magasins en Turquie, à Ankara, Istanbul et Izmir.
Le secteur agricole fait aussi partie des secteurs dans lesquels les entreprises françaises
investissent en nombre. Vilmorin, quatrième semencier mondial, producteur et distributeur
de plantes potagères et de grandes cultures innovantes dédiées aux marchés des
productions maraîchères et agricoles, a débuté en Turquie en 1986 en partenariat avec la
société Anadolu Tohum à hauteur de 33%. Avec la crise de 2001, les parts de Vilmorin sont
passées à 47,5% avant un rachat et une implantation avec 100% de capitaux français
désormais. Cette entreprise fournit un service complet de produits et de conseils aux
agriculteurs turcs. La société emploie 17 ingénieurs agronomes et des techniciens, soit au
total 45 personnes en contact direct sur le terrain avec les agriculteurs.
Les investissements français et étrangers alimentent de nouveaux investissements français
Le développement important des investissements français durant les années 1990 a entraîné
l’arrivée d’autres entreprises françaises sur le territoire turc, venues fournir, au plus près,
des biens ou services aux entreprises préalablement installées.
PROteameast Istanbul Logistics & project Ltd représente une bonne illustration d’entreprises
françaises de taille plus limitée mais qui constitue un vivier essentiel pour attirer d’autres
investissements en Turquie. Cette entreprise prestataire de services dans les métiers du
transport et de la logistique, installée en Turquie depuis 2003, travaille en effet avec d’autres
sociétés françaises pour lesquelles elle sert parfois d’agent de mise en relation vis‐à‐vis des
entreprises turques. Ses activités, diversifiées, couvrent le secteur des transports
internationaux par la route, la mer, les airs. Elle s’est aussi spécialisée dans le transport de
colis hors gabarits (poids et/ou dimensions), le groupage aérien entre la France et la Turquie
et les opérations de douane associées à ces processus. Si les entreprises qui font appel à
l’expertise de PROteameast sont originaires de différents pays, on retrouve toutefois parmi
sa clientèle bon nombre d’entreprises françaises (Alstom, Ondeo, Saint‐Gobain, Air
Liquide…).
12
13.
L’ENTREPRISE DE TRANSPORT ET LOGISTIQUE PROTEAMEASTEAST
La société A. Raymond, spécialiste des systèmes de fixation par clipage et collage, d’abord
pour le marché automobile, puis pour l’industrie et le bâtiment, fait aussi partie des
entreprises françaises arrivées récemment en Turquie. Après l’achat de terrain et la
construction de l’usine à Gebze en 2005, le groupe, qui emploie 47 personnes en Turquie, a
pu commencer son activité fin 2006. A. Raymond s’est installée en Turquie sur la demande
de son client Delphi, un des plus grands concepteurs et fournisseurs de pièces détachées
destinées au marché automobile.
Cet investissement est donc indirectement lié à la forte présence française dans le secteur
automobile turc. De manière plus générale, l’implantation de Renault en Turquie il y a 40 ans
a attiré de nombreux équipementiers français : Valeo, Faurecia, Plastic Omnium, MGI
Coutier, Mecaplast, EM Technologies.
Présent en Turquie depuis juillet 2002, le groupe de logistique (stockage, supply‐chain, etc.)
et de transport GEFCO, illustre le cas d’une entreprise ayant fait le choix, à l’origine, de venir
en Turquie pour accompagner le développement des activités du groupe PSA. Offrant des
prestations de services au marché automobile en priorité, GEFCO a aussi développé son
activité vers d’autres secteurs.
SNOP Izmit Metal, implantée à Gebze, fait partie des entreprises les plus récemment arrivées
dans le secteur automobile. Ce groupe, fournisseur de pièces de structure automobile, a
aussi choisi de rejoindre la Turquie en 2008 pour accompagner Renault.
Les sociétés qui avaient déjà investi développent leur présence
La plupart des grands groupes implantés en Turquie depuis la fin des années 1980 ou durant
les années 1990 ont choisi de développer et / ou de diversifier leurs activités depuis le début
des années 2000. Une fois présentes sur le marché local, les entreprises françaises profitent
du potentiel de l’économie turque pour accroître leurs activités.
C’est notamment le cas du cimentier Vicat. Après avoir réalisé son premier investissement
en Turquie à Konya en 1991, grâce au rachat d’une part majoritaire dans Konya Cimento,
Vicat rentre au capital de la société Bastas Cimento à Ankara dès 1994, pour devenir ensuite
majoritaire en 1997.
Sodexo, qui emploie plus de 3500 personnes actuellement, a vu ses activités rapidement
évoluer. En 1992, date d’arrivée du groupe en Turquie, seule la restauration collective faisait
13
14. partie des activités. Progressivement le management de service est venu s’agréger aux
activités de Sodexo. Ce marché a été ouvert par Sodexo, qui en demeure le leader.
Après avoir ouvert son premier hypermarché en 1993 à Istanbul, Carrefour, qui est devenu
CarrefourSA après la création d’une coentreprise avec le groupe Sabanci en 1996, n’a cessé
d’accroître son activité. La partie la plus visible de ce développement sont les opérations
immobilières et l’ouverture de nouveaux magasins dans la plupart des régions de Turquie. Le
16 avril 2009, Carrefour a ainsi ouvert son 23ème hypermarché à Pendik, dans la banlieue
d’Istanbul. Dans la catégorie supermarché, CarrefourSA Express a ouvert sa 100ème
implantation à Ankara en février 2008. Le groupe français a aussi procédé à l’ouverture en
Turquie de certaines autres de ses marques, comme le premier supermarché Champion en
2000 ou à l’acquisition de la chaîne de supermarchés Gima en 2005.
Les grands groupes confirment leur intérêt pour la Turquie
La fin des années 1990 et le début des années 2000, s’ils ont permis la diversification
sectorielle et l’arrivée d’entreprises de moins grande taille, ont aussi été caractérisés par des
investissements, plus ou moins importants, de grands groupes français, comme ALSTOM.
ALSTOM entretient depuis très longtemps des liens étroits avec la Turquie, sans forcément y
être implanté : les trains électriques E‐8000, dont le contrat a été signé en janvier 1952, sont
toujours en service commercial et les centrales hydro‐électriques Seyhan 1 et 2, en service
depuis 1956, fournissent toujours au réseau turc une puissance de 120 Méga Watts. C’est
donc dès les années 1950, date à partir de laquelle le besoin de partenaires industriels s’est
fait sentir que ce pays a pris de l’importance pour ALSTOM. Mais c’est seulement depuis
1999 qu’a été créée la filiale de droit turc ALSTOM Turquie. Si ALSTOM ne produit pas en
Turquie, elle est présente aujourd’hui pour la vente d’équipements électromécaniques pour
la production d’énergie électrique – notamment des turbines et générateurs – ainsi que pour
la fourniture de service de maintenance et de réhabilitation de centrales électriques, pour la
vente de matériel ferroviaire roulant ainsi que pour certaines infrastructures ferroviaires
(partie électromécanique : électrification, pose de la voie, signalisation).
14
15. Un exemple d’investissement majeur en Turquie : AREVA T&D
Le 27 juillet 2008, M. Zafer Caglayan, Ministre de l’industrie de Turquie, et M. Ghislain
Lescuyer, Vice‐président Exécutif de la Business Unit Produits d’AREVA T&D, ont posé la
première pierre de la nouvelle usine de transformateurs de distribution de Gebze, dans la
région de Kocaeli. Cette cérémonie d’ouverture s’inscrivait dans un programme
d’investissement de 75 millions d’euros, destiné à faire de Gebze la plus grande zone
industrielle d’AREVA T&D à ce jour.
AREVA T&D est parfaitement positionné pour accompagner l’essor de la demande
d’électricité en Turquie. Ce programme d’investissement massif va lui permettre de doubler
ses capacités dans cette région, tout en continuant à exporter ses produits dans le monde
entier. Le programme sera en outre secondé par un plan de recrutement ambitieux : 850
nouveaux emplois directs vont être créés, ce qui portera l’effectif total à 2400 salariés.
« Cette nouvelle usine est un investissement clé, destiné à satisfaire la demande toujours
plus forte d’équipements électriques en Turquie, où nous sommes présents depuis cinquante
ans. De plus, elle renforcera l’orientation stratégique mondiale d’AREVA T&D qui fait de la
Turquie un pôle régional pour suivre notre croissance dans la région et dans le monde
entier.» a souligné Philippe Guillemot, Président‐Directeur Général d’AREVA T&D.
Le pôle Transmission et Distribution d'AREVA joue un rôle actif dans le monde entier. Il
conçoit, fabrique et met en service une gamme complète d'équipements, systèmes et
services lors des divers stades du transfert d'électricité, du générateur à l'utilisateur.
La présence des constructeurs automobiles français en Turquie n’est pas seulement assurée
par Renault. Le groupe Peugeot, devenu PSA, est implanté en Turquie depuis les années
1980. En 1981, Peugeot a démarré une activité industrielle à travers un licencié, Karsan, pour
la production de véhicules utilitaires. Plus récemment, en 2007, le constructeur s’est associé,
dans le cadre d’un accord de coopération, au tandem Tofas‐Fiat, pour la production d’un
véhicule utilitaire d’entrée de gamme, le Bipper, commercialisé sur les marchés étrangers
par chacun des trois partenaires. En matière commerciale, on retiendra, de 1995 à 2000, la
présence en Turquie de deux réseaux de distribution distincts : d’une part, le réseau Peugeot
Otomotiv AS, filiale à 100% du groupe PSA, qui a distribué pendant 5 ans les véhicules
particuliers Peugeot, et d’autre part, Karsan Pazarlama pour la production et la distribution
des véhicules utilitaires. En mars 2000, la société Peugeot Otomotiv Pazarlama AS, filiale du
groupe PSA, en joint‐venture avec le groupe Kiraça, voit le jour pour distribuer la totalité de
la gamme de produits Peugeot. Depuis décembre 2002, avec la cession des parts de Kiraça,
la société est devenue filiale à 100% du groupe PSA.
Dans le domaine bancaire, le groupe BNP‐Paribas a manifesté de longue date son intérêt
pour le marché turc. Paribas fut l’un des actionnaires historiques de la Banque Ottomane et
la BNP a conclu en 1985 un accord de partenariat avec AK Bank pour créer ce qui devait par
la suite devenir la BNP AK DRESDER Bank A.Ş (fusionnée avec AK Bank en 2005). Le groupe a
15
16. ouvert un bureau de représentation à Istanbul en 1989. A l’automne 2004, il s’est porté
acquéreur de 50% du holding de tête du groupe bancaire TEB, opération concrétisée en
février 2005. Le groupe TEB, qui compte aujourd’hui près de 7000 employés, offre une large
gamme de services : leasing (TEB‐leasing), factoring (TEB‐factoring), assurance (TEB‐
Insurance), opération de haut de bilan (TEB Investment). L’établissement est également
présent dans l’activité de conseil financier et de la gestion d’une clientèle de particuliers
haut de gamme (gestion de fortune).
Les investissements personnels de Français en Turquie
Même si le phénomène existe depuis plusieurs années, en particulier depuis l’ouverture de
l’économie turque à la fin des années 1980, un nombre non négligeable d’entreprises ont
été créées en Turquie avec des capitaux français, parfois sous forme d’investissement
personnel. Bien que souvent de petite taille, leurs activités diverses n’en demeurent pas
moins essentielles pour le développement des implantations françaises en Turquie.
Le cabinet de conseil « LDS Consulting & Business Developement Ltd », implanté en Turquie
depuis 1992, fait partie de ces entreprises de petites tailles qui contribuent à faciliter l’accès
au marché turc pour les grands groupes et les PME françaises. Après avoir quitté
l’administration française en 1990 et pris la direction, pour deux ans, d’un groupe français
présent en Turquie, Yves‐Marie Laeounan fonde en 1992 avec des partenaires turcs une
activité de conseil en implantation, orientée vers les sociétés françaises. Avec de nombreux
clients tel que Sodexho – entreprise de restauration collective, devenue Sodexo –, Carrefour
ou encore Saint‐Gobain, Yves‐Marie Laouenan et ses partenaires ont permis d’apporter
l’expertise ainsi que la connaissance du terrain tant recherchées des nouveaux investisseurs.
Si PROteameasteast Istanbul Logistics & project Ltd. représente une catégorie atypique
puisque l’entreprise n’a pas de société mère en France, elle n’en demeure pas moins une
bonne illustration de l’arrivée, ou la naissance, sous forme d’investissements personnels,
d’entreprises françaises de taille plus limitée en Turquie mais qui constitue un vivier
essentiel pour attirer d’autres investissements.
En 2005, M. Vincent lance sa propre agence de publicité « Bed and Breakfast » après avoir
découvert le potentiel de l’économie turque quelques années auparavant en tant
qu’expatrié, d’abord, pour une agence basée à Paris, puis pour une agence américaine. Si
« Bed and Breakfast » n’a pas de maison‐mère en France, elle inscrit sa présence en Turquie
dans le cadre d’un partenariat avec le groupe français de communication Aastuce, qui
possède 49% de son capital.
Interview de Yves‐Marie Louenan, LDS Consulting & Business Development Ltd.
« Nommé en Turquie en 1986 par la DREE (Ministère de l’Economie et des Finances) en tant
que Chef du Poste d’Expansion Economique d’Istanbul, j’ai décidé de quitter
l’administration française début 1990 pour prendre la direction de la filiale turque de
Ciments Français (2500 salariés), constituée à la suite de la privatisation de trois
cimenteries acquise par ce groupe à l’Etat Turc. Lors de la cession du groupe Ciments
Français à la société italienne ITALCIMENTI, j’ai dû quitter mes fonctions fin 1992.
16
17. J’ai alors fondé à Istanbul avec des partenaires Turcs (un avocat, un cadre bancaire et
plusieurs hommes d’affaires) une activité de Conseil en Implantation, orientée vers les
sociétés Françaises.
Mon premier Client fût SODEXHO (Restauration Collective) dont je rencontrai le Président
Pierre BELLON pour l’informer d’une opportunité d’implantation au travers d’un partenariat
avec une Fondation Educative Turque. Conclu après un an de négociations, ce partenariat
fût dissous deux ans plus tard lorsque SODEXHO racheta les parts de son associé local, ce
qui permit à ce Groupe Français de devenir aujourd’hui le premier ou le deuxième opérateur
de son secteur en Turquie, où il emploie plus de 5000 salariés.
Mon deuxième Client fût le Groupe CORA‐MATCH (supermarchés et hypermarchés) pour
lequel j’ai recherché et contribué à négocier un partenariat local et jeté les bases d’un
programme de développement immobilier.
CORA‐Match ayant renoncé à son projet d’implantation deux ans après pour des raisons
« intestines », j’ai alors présenté deux projets majeurs d’implantation immobilières mis au
point pour ce Groupe à CARREFOUR Turquie, qui en fît l’acquisition, ce qui m’a également
amené ensuite à engager une collaboration libre avec CARREFOUR Turquie pour trois
autres sites (m’associant personnellement dans l’acquisition de deux d’entre eux, pris à bail
ensuite par CARREFOUR).
Par la suite, et après l’entrée de la Turquie dans l’Union Douanière, j’ai également coopéré
avec le GIE DOUANEXPORT, SLIGOS et BULL pour la négociation de la cession aux Douanes
de Turquie de «SOFIX », système d’automatisation des procédures douanières.
A la suite du décès de mon principal associé Turc en 2004, j’ai engagé une collaboration
libre au sein de ma structure avec un autre associé, Jacqueline de SORIA (HEC ISA ;
précédemment en charge du développement « Turquie » pour le Groupe ACCOR et
également CCEF), qui y exerce aujourd’hui une activité indépendante dans le secteur de
l’Hôtellerie et du Tourisme, tout en contribuant à des projets communs.
Depuis trois ans, notre Cabinet s’est adapté à l’évolution du marché :
‐ en 2006‐2007, nous avons piloté l’implantation industrielle de deux PME françaises du
secteur de la sous‐traitance automobile (A‐RAYMOND, Grenoble / EMT Composants –
CAEN), pour lesquelles nous avons développé des prestations de « sourcing » de sites
industriels et organisé et supervisé la construction de leurs usines respectives (6.500 m2
couverts chacune) dans des zones industrielles d’IZMIT.
‐ en 2007‐2008 : sourcing de deux sites industriels dans la région d’Istanbul pour des filiales
locales de production du Groupe Saint Gobain.
‐ en 2007‐2008 : initiation et aide à la négociation d’une prise de participation de 50% dans
17
18. la société turque POLAT ENERJI A.S par EDF E.N., dont nous hébergeons aujourd’hui la
structure d’investissement locale, dans laquelle nous détenons une participation. Cette
opération, qui gère aujourd’hui une production de 50 MW qui sera portée à 120 MW d’ici
quelques mois et à près de 400 MW en 2012) se donne pour objectif de devenir le premier
opérateur du secteur de l’énergie éolienne en Turquie et, également, de développer
ultérieurement dans ce pays une activité de référence dans le secteur de l’Energie Solaire
(Photo‐voltaïque) ».
La présence géographique de nos entreprises se diversifie peu
La présence française en Turquie peut être estimée, selon les dernières données recueillies
par la Mission économique – Ubifrance d’Istanbul, fin 2008, à près de 290 entreprises
employant près de 70.000 personnes, contre 258 fin 2007 et 240 fin 2006. En 1985, au début
de l’ouverture internationale de l’économie turque, seulement 15 sociétés françaises étaient
implantées.
La répartition géographique de la présence française reste très inégale sur le territoire turc,
à l’image des inégalités dans le développement économique du pays : Istanbul concentre
71% des implantations françaises contre 7% pour la capitale Ankara, 5% pour la région
d’Izmir, 5% pour la région de Bursa, et 7% pour le reste du pays. A titre comparatif, fin 2007,
la répartition géographique de l’ensemble des entreprises présentes en Turquie était la
suivante : Istanbul (18,7%) ; la région de Marmara (15,3%) ; la région égéenne (16,5%) ; la
région méditerranéenne (12,8%) ; l’Anatolie de l’Ouest (10,3%) ; l’Anatolie centrale (4,8%) ;
la région de la Mer Noire (10,8%) ; l’Anatolie de l’Est (5%) et l’Anatolie du Sud‐Est (5,8%).
Parmi les entreprises françaises interrogées, présentes en Turquie et implantées dans une
autre ville qu’Istanbul, on peut citer les exemples suivants :
La région de Kocaeli‐Gebze, qui constitue en quelque sorte un continuum industriel de
près de 200km avec la région d’Istanbul, est une région à forte implantation industrielle.
Les entreprises françaises y sont présentes, notamment depuis la fin de la crise qu’a
connue la Turquie en 2001. Chimirec‐Ekasan, qui s’est spécialisée dans la vente de
service pour la collecte et le transit de déchets industriels dangereux, est présent à
Gebze depuis 2006 ; SNOP Izmit Metal, également implantée à Gebze, fait partie des
entreprises les plus récemment arrivées en tant que fournisseur de pièces de structure
automobile. Areva T&D, même si son siège social ne se situe pas dans cette région, y est
fortement implantée, notamment depuis la construction, lancée en juillet 2008, d’une
nouvelle usine de transformateurs (cf. encadré)
La région de Bursa est marquée par l’activité de nombreuses entreprises, françaises et
étrangères, dans le secteur automobile : plusieurs filiales de sociétés françaises y sont
présentes et/ou exercent une activité de production comme Renault, Plastic‐Omnium,
Valeo, Peugeot.
La région d’Izmir et plus généralement la région égéenne : on constate une
augmentation récente des investissements français dans cette région qui semble
bénéficier des nombreux atouts. Elle présente en effet l’avantage d’une moindre
18
19. saturation qu’Istanbul et dispose d’infrastructures de grande qualité, notamment de
l’ouverture sur la mer Egée grâce au port d’Izmir, le plus important de Turquie. Parmi les
entreprises interrogées, la réussite de l’implantation de Schneider Electric, présente
depuis 1987, semble avoir favorisé de nouveaux investissements, plus récents : GFI
aerospace, devenue LISI aerospace, a racheté en 2001 FT Bestas, une usine où sont
fabriquées des fixations pour l’industrie aéronautique ; Larth havlu, filiale du groupe
Atlantic Industries, fabrique dans la région d’Izmir, des sèche‐serviettes depuis l’été
2007 ;
A noter, enfin, l’investissement de Veolia Eau en 2003 dans la région d’Izmir : le groupe
français exploite et gère les services eau et assainissement avec le syndicat de
communes de Cesme et Alaçati.
Schneider a créé un réseau de 100 partenaires et exporte à partir de la Turquie
Schneider Electric, l’un des premiers fabricants mondiaux d’équipements de distribution
électrique et d’automatismes industriels (marques Merlin Gerin, Square D, Télémécanique)
est implanté en Turquie depuis 1987. A l’époque, le groupe, qui a réalisé en 2002 plus de 9
milliards d’euros de chiffres d’affaires, arrive en Turquie en créant en direct une filiale
baptisée Schneider Electric Turquie détenue à 100% par Schneider Electric SAS. L’objectif
est de profiter de l’essor économique du pays, de mettre un pied sur un territoire au fort
potentiel industriel. Bref de capter la demande d’un pays émergent où les dépenses en
matériels électriques sont toujours très importantes.
Au fil des années, la présence de Schneider va se renforcer, accompagnant le
développement du pays, la demande en équipements électriques évoluant parallèlement à
la montée en puissance du réseau électrique du pays ainsi que du développement du
secteur du BTP. Aujourd’hui, Schneider dispose d’une organisation commerciale complète
avec 13 agences et un réseau de 100 partenaires, d’un site de production avec une usine à
Izmir ainsi que d’un centre de distribution près d’Istanbul. Le numéro 1 mondial des
disjoncteurs, interrupteurs et autres prises électriques emploie désormais un total de 400
personnes en Turquie.
« Le bilan est positif » juge le groupe lorsqu’on l’interroge sur les principaux
enseignements de sa présence dans le pays. Il souligne notamment la qualité du site de
production d’Izmir. L’usine a été choisie pour satisfaire les besoins mondiaux de Schneider
Electric pour la fourniture de tableaux de moyenne tension. Un signe de reconnaissance du
travail fourni à Izmir et du savoir‐faire turc.
La capitale, Ankara, accueille aussi quelques entreprises françaises : Vicat, présent dans
le secteur cimentier, du béton prêt à l’emploi et des granulats en Turquie depuis 1991
suite à acquisitions et développement organique ; Lafarge est présent dans le secteur du
19
20. plâtre grâce à la coentreprise établie avec Dalsan : si le siège et une usine sont à Ankara,
le groupe possède aussi une autre usine à Gebze.
Relativement peu d’entreprises françaises sont présentes dans les autres régions de
Turquie. Özmaya Sanayi A.S, filiale à 100% du groupe Lesaffre, qui possède, depuis 1992,
une usine à Amasya, un bureau commercial à Ankara, une compagnie de distribution à
Istanbul, Izmir et à Ankara, et dont la direction générale et une usine de production sont
à Ceyhan (Adana) est l’exception qui confirme la règle.
Témoignage de Jose Juan Berruga, Directeur général d’Özmaya
La Turquie est une puissance mondiale en levure
« Sa consommation annuelle est l’une des plus importantes du monde et sa capacité de
production installée est pratiquement trois fois supérieure à la demande interne. La
Turquie est donc l’un des plus grands exportateurs de levure de boulangerie du monde. Le
secteur de la boulangerie en Turquie est en train de changer très rapidement et de
s’orienter vers la spécialisation et la diversification pour abaisser les coûts de production
et élargir la gamme de pains proposés. En même temps, les exigences de respect des
réglementations sanitaires deviennent chaque jour plus importantes. Dans ce contexte,
nous avons décidé d’accompagner les boulangers dans leur démarche pour les appuyer
techniquement et commercialement en diversifiant et en adaptant notre offre de produits
et services. La compagnie Özmaya est détenue à 100 % par le Groupe français Lesaffre,
leader mondial dans la production de levures de boulangerie. Lesaffre a acheté les usines
d’Amasya et de Ceyhan en 1992 et a investi un total de 100 M EUR. Aujourd’hui, Özmaya
est leader sur le marché turc et exporte ses plus de 10 types de levures vers plus de 25
pays d’Afrique, du Moyen Orient et d’Asie centrale. Nous avons été les premiers à
commercialiser les produits dérivés de nos unités de dépollution des eaux résiduaires, dans
les domaines de l’alimentation animale et des fertilisants. Forte d’une équipe de 300
collaborateurs et d’un réseau de plus de 250 distributeurs, Özmaya base sa stratégie sur
une technologie leader et sur la connaissance du métier de la boulangerie, grâce à son
centre de recherche en boulangerie situé à Ceyhan. »
20
21. Le poids de la Turquie pour nos sociétés reste encore modeste, avec quelques
exceptions, mais son importance est stratégique
Le caractère récent du phénomène d’implantation des sociétés françaises en Turquie et le
manque de maturité de certains marchés, qui commencent juste à décoller, expliquent que
la Turquie ne représente encore, bien souvent, qu’une petite fraction de l’activité mondiale
de nos sociétés.
A quelques exceptions près, la Turquie ne contribue encore que faiblement à l’activité globale
de nos sociétés
Quelques groupes se singularisent par le fait que la Turquie représente déjà une fraction très
importante de leur chiffre d’affaires, supérieure à 10%.
C’est le cas d’Anadolu Tohum, société spécialisée dans la production et la vente de graines et
de semences agricoles. Le chiffre d’affaires réalisé par cette entreprise, filiale à 100% de
Vilmorin, représente en effet 18% du chiffre d’affaires de cette dernière1. Cette situation
reflète l’importance du marché turc pour les semences et la fourniture de services aux
exploitations agricoles. Anadolu Tohum, en plus de produire des graines, fait bénéficier aussi
ses clients de ses activités de conseils aux agriculteurs, grâce à l’expérience de ses 17
ingénieurs agronomes.
L’expansion internationale de Vilmorin
Le français Vilmorin est devenu, grâce à l’intégration en 2006 du pôle « grandes cultures »
de son actionnaire principal, la coopérative Limagrain, le 4ème semencier mondial, derrière
les géants américains Monsanto, Pionner (Dupont) et le suisse Syngenta.
La stratégie de Vilmorin passe par la recherche, un large portefeuille de marques et
l’expansion à l’international. Le groupe, déjà présent dans de nombreux pays comme les
Etats‐Unis, l’Australie, Israël, le Japon et plusieurs pays européens, est parti à la conquête
du marché indien en 2006.
Son implantation progressive en Turquie s’est faite en trois phases principales :
- Création en 1986 de la société Anadolu Tohum Üretim ve Pazarlama inc. en
partenariat avec deux entrepreneurs locaux. Vilmorin détient le tiers des parts de la
société. Les activités de la nouvelle société sont les suivantes : création de nouvelles
marques sur le marché turc, production, conditionnement, distribution, importation
et exportation de semences végétales. Anadolu Tohum entre sur le marché des
semences en important les produits de la société Vilmorin.
- Avec la crise de 1994, l’actionnariat d’Anadolu Tohum évolue ; Vilmorin détient
désormais 47% du capital, le solde appartenant à l’entrepreneur Yavuz Batur.
- Dans le cadre d’une stratégie de développement à l’international, Vilmorin, devenu
1
Même si Vilmorin fait partie du groupe Limagrain, seul le chiffre d’affaires de Vilmorin est considéré ici.
21
22. le 4ème semencier mondial, a acquis, en 2007, la totalité du capital d’Anadolu Tohum
afin de conforter ses positions en Turquie. Celle‐ci est ainsi devenue une filiale à
100% française.
La semence potagère constitue l’activité principale d’Anadolu Tohum. Celle‐ci s’adresse
aussi bien aux professionnels de l’agriculture qu’aux jardiniers et aux agriculteurs
amateurs. Anadolu Tohum est présente à tous les niveaux du marché des semences avec
186 points de vente, 13 chaînes de distribution et 106 magasins. Elle dispose également
depuis 2004 d’un centre de recherche et développement à Antalya. Elle travaille sur le
marché turc via 12 marques dont les plus connues sont Vilmorin, Anadolu, Vita, Genta,
Green Way, Ferry Morse, Mantel Holland, Helin et Elfer. Son effectif est constitué de 65
personnes dont 17 agronomes permanents.
Le cimentier Vicat fait aussi figure d’exception avec plus du quart de ses ventes ciment
réalisées en Turquie. Depuis 1991 et son entrée au capital de Konya Cimento, puis en 1994
dans Bastas Cimento à Ankara, la Turquie représente une composante majeure du groupe.
Quelques autres groupes réalisent en Turquie un chiffre d’affaires non négligeable, compris
entre 2% et 10% de leur total mondial.
C’est notamment le cas d’Özmaya, filiale turque de Lesaffre, qui représente presque 10% de
l’activité mondiale du groupe. C’est aussi le cas d’Oyak Renault qui a réalisé, en 2008, 6,9%
de son chiffre d’affaire total en Turquie. Avec un chiffre d’affaires de plus de 2,6 milliards €
en 2008, la Turquie représente aujourd’hui l’un des principaux marchés pour Renault et
constitue une base de production et d’exportation d’une grande compétitivité qui contribue
très favorablement aux résultats du groupe.
A un niveau moindre, on peut citer CEVA DIF ILAC A.S., filiale de Ceva Santé Animale,
présente depuis le début des années 1990, et qui réalise 4,1% du chiffre d’affaires de la
maison mère en Turquie, grâce à la vente de ses produits pharmaceutiques vétérinaires.
Le secteur des banques et des assurances, où deux établissements réalisent plus de 2% de
leur chiffre d’affaires, est significatif. La joint‐venture établie entre TEB et BNP Paribas
réalise presque 3% du chiffre d’affaires du Groupe BNP Paribas. Groupama, implanté depuis
bientôt 20 ans dans le secteur de l’assurance, réalise 2,7% de son chiffre d’affaires en
Turquie.
Pour l’immense majorité des groupes, la contribution de la Turquie au chiffre d’affaires
mondial demeure très modeste, avec moins de 2%. Appartiennent notamment à cette
catégorie les grands groupes suivants : Peugeot (0,5%), Total (0,9%) ; Valeo (1%), Alstom
(0,8%), Carrefour (1,2%).
Pour les PME, la situation est en réalité assez peu différente, avec une grande majorité qui
réalise en Turquie moins de 2% du chiffre d’affaires, comme Chimirec‐Ekasan (1,7%),
A.Raymond (1%), SNOP (1,3%).
22
23. Vicat et l’ouverture internationale
La production de ciment est la principale activité du groupe Vicat depuis plus de 150 ans,
avec la découverte du ciment artificiel en 1817, par Louis Vicat puis la création de la
Compagnie Vicat en 1853.
D’abord située en Rhône‐Alpes, l’activité de l’entreprise s’est rapidement étendue sur tout
le territoire français entre 1960 et 1980. Depuis 1974 et l’acquisition d’une cimenterie aux
Etats‐Unis, le groupe n’a cessé d’accroître sa présence à l’international. Ainsi Vicat a investi
en Turquie en 1991 et 1994, au Sénégal en 1999, en Suisse en 2001, en Egypte et en Italie
en 2003, au Mali en 2004, au Kazakhstan en 2007 puis en Inde en 2008.
Le groupe emploie aujourd’hui 6700 personnes à travers le monde, dont 1400 en Turquie,
et dispose d’une capacité de production de 21 millions de tonnes de ciment.
La Turquie représente néanmoins déjà un enjeu jugé stratégique
L’implantation récente de nos entreprises laisse envisager un renforcement du poids de la
Turquie dans les activités
>> L’activité en Turquie de la majorité de nos entreprises est encore modeste en termes
relatifs, mais sa croissance est bien souvent telle que celles‐ci anticipent une situation
passablement différente d’ici quelques années seulement.
Si la contribution à la croissance des entreprises françaises de leurs implantations turques
est encore modérée, parce qu’elle est atténuée par la taille relative des opérations en
Turquie, elle pourrait devenir majeure d’ici quelques années, sous réserve naturellement de
profiter de la croissance du marché turc. Ce réservoir de croissance, qui existe dans d’autres
pays émergents, est d’autant plus valorisé que la croissance demeure atone et en tout cas
structurellement inférieure sur les marchés européens et américains, qui sont plus matures
voire saturés.
>> L’impact de la présence en Turquie dépasse l’enjeu du seul marché turc
Le caractère stratégique d’une présence en Turquie ne se résume en effet pas à un pari sur
un gain de croissance – profitable si possible. Certaines caractéristiques du pays –
notamment la faiblesse de ses coûts conjuguée à un niveau de développement déjà élevé
dans certaines régions – expliquent en effet qu’une implantation puisse avoir des effets sur
la compétitivité d’ensemble d’une entreprise. Ces effets peuvent être de deux ordres :
‐ Directs, si l’implantation en Turquie permet soit d’améliorer la compétitivité‐prix par
l’optimisation de la politique d’achat ou par l’exportation de produits finis à moindre
coût, soit de développer des capacités d’innovation ;
‐ Induits, et souvent initialement non prévus lors de l’implantation, si celle‐ci favorise
l’obtention de marchés en pays tiers, par le contact avec des clients ou des
23
24. prescripteurs turcs, ou plus profondément la réévaluation de la stratégie de
développement international en fonction de l’analyse des forces et des faiblesses des
principaux concurrents turcs.
L’analyse des motifs de l’implantation de nos entreprises en Turquie montre précisément la
richesse de l’enjeu.
24
25. L’accès au marché turc demeure la motivation principale de
l’implantation, mais d’autres facteurs jouent un rôle croissant (II)
Un examen d’ensemble des motivations des sociétés françaises dans leur démarche
d’implantation en Turquie permet d’en distinguer quatre, qui correspondent chacune à la
recherche de l’optimisation d’une fonction de base de l’entreprise :
vendre : l’implantation permet d’aborder le marché turc dans les meilleures conditions,
en prolongeant une démarche d’exportation depuis la France qui rencontre souvent des
limites ;
produire : dans un certain nombre de cas, l’établissement d’une unité de production en
Turquie ne répond pas uniquement – voire aucunement – à une stratégie de vente en
Turquie, mais à la volonté de créer une base d’exportation à faible coût d’investissement
et de fonctionnement.
acheter : certaines sociétés consacrent une part significative de leurs moyens en Turquie
au « sourcing » ou recherche de fournisseurs pour l’ensemble de leurs entités mondiales.
innover : certaines entreprises commencent à développer en Turquie une véritable
capacité d’innovation, qui va au‐delà de l’adaptation des produits au marché local.
Pour nos entreprises, la Turquie est donc à la fois un marché, une base de production à coût
relativement bas, une plate‐forme d’achat au meilleur prix et un réservoir de capacité
d’innovation. Plus marginalement, pour quelques grands groupes, l’implantation en Turquie
répond également à des considérations stratégiques d’identification et d’observation de
concurrents turcs mais surtout étrangers émergent.
Les témoignages des entreprises consultées montrent que les poids relatifs des quatre
principaux motifs d’implantation sont très inégaux. L’attrait du marché turc se détache
nettement et cette situation devrait perdurer dès lors que le développement économique
accroît les débouchés commerciaux sur place. En dynamique toutefois, l’implantation de nos
entreprises semble se complexifier et s’enrichir, prenant mieux en compte les possibilités
d’exportation, d’innovation et de sourcing qu’offre la Turquie.
Les implantations répondent principalement à une ambition commerciale en
Turquie
La production locale n’est, dans l’ensemble, que très faiblement exportée
Chaque entreprise a certes des produits, une culture et une histoire qui lui sont propres
et qui influencent son modèle de développement en Turquie. Il existe néanmoins des
tendances lourdes et beaucoup suivent des schémas d’implantation comparables. La
dynamique de développement la plus fréquemment rencontrée commence par des
exportations vers la Turquie depuis une base française ou européenne ; à ce stade, un
simple bureau de représentation peut suffire pour assurer la liaison avec les clients ou
avec un réseau de distribution externe. Une deuxième étape est parfois franchie avec la
création d’une filiale commerciale, ce qui permet de facturer en monnaie locale et
25
26. surtout d’étoffer la présence commerciale pour démarcher plus activement les clients ou
mieux contrôler les distributeurs.
Mais rapidement, un constat fréquent se dégage : pour vendre en Turquie, il faut y
produire, et ce pour de multiples raisons : compétitivité‐coût, maîtrise des délais de
livraison, offre d’un service après‐vente performant, réactivité à l’évolution de la
demande ou encore exigences des autorités en termes de localisation. Les entreprises,
notamment celles qui produisent des biens, préfèrent donc souvent une exploitation
directe en Turquie que de servir seulement le marché turc depuis la France.
Il est en effet frappant de constater que l’essentiel des capacités de production des
entreprises française présentes en Turquie répond à cette logique commerciale, ce
qu’atteste la faiblesse des taux d’export. La quasi‐totalité des entreprises industrielles
indique exporter hors de Turquie moins du quart de leur production et ce chiffre est
d’ailleurs même le plus souvent inférieur à 10%. Parallèlement, aucun cas d’export de
services à partir de Turquie n’a été identifié.
La deuxième caractéristique majeure de la production (mais aussi de services) par nos
entreprises en Turquie est qu’elle s’accompagne fréquemment d’exportations à partir de
la France ou d’Europe, soit pour les produits finis les plus hauts de gamme, soit pour des
composants critiques. L’exemple de L’Oréal témoigne de ce phénomène : si l’entreprise
est présente en Turquie pour la vente de presque toutes les marques du groupe, elle doit
importer bon nombre de ses produits, sa capacité de production en Turquie se limitant,
pour l’instant, aux produits capillaires.
La situation reste donc très éloignée d’un schéma de délocalisation où la Turquie
prendrait le relais de la France comme base exportable.
Quel marché ?
Les opportunités d’investissements concernent de nombreux secteurs en Turquie, aussi bien
pour la production de biens que de fournitures de services. Il ne s’agit pas ici de répertorier
et de classer les secteurs qui devraient faire l’objet d’investissements plus massifs de la part
des sociétés françaises, mais plutôt de montrer, à partir d’exemples d’entreprises
rencontrées, la diversité et l’attractivité du marché turc.
L’accompagnement des clients historiques
Bien souvent, l’idée de venir en Turquie est suggérée, avec plus ou moins d’insistance, par
certains clients français ou internationaux.
Tel a été le cas en particulier des équipementiers automobiles, comme Valéo, dont
l’implantation en Turquie en 1989 a été, certes guidée par l’ambition de développer les
marchés voisins d’Iran, de Russie, de Roumanie et du Moyen‐Orient, mais motivée en
premier lieu par le besoin de fournir les clients locaux comme Renault. Le groupe Renault a
aussi encouragé l’arrivée d’autres entreprises françaises comme SNOP Izmit Metal,
implantée à Gebze et dont l’activité principale est de fournir des pièces de structure
automobile. La société A. Raymond, spécialiste des systèmes de fixation par clipage et
collage, d’abord pour le marché automobile, puis pour l’industrie et le bâtiment fait aussi
partie des entreprises françaises arrivées en Turquie à la demande de son client Delphi, un
26
27. des plus grands concepteurs et fournisseurs de pièces détachées destinées au marché
automobile.
Dans le domaine des services, de nombreux exemples témoignent aussi de l’importance de
l’accompagnement des clients historiques. Tel est le cas du groupe de logistique (stockage,
supply‐chain, etc.) et de transport GEFCO, présent en Turquie depuis juillet 2002 et qui a fait
le choix, à l’origine, de venir en Turquie pour accompagner le développement des activités
du groupe PSA.
Le marché proprement turc
Avec une population de 71,5 millions d’habitants, âgés de moins de 25 ans pour plus de la
moitié, le marché turc constitue, en soit, un des marchés les plus attractifs pour les
entreprises françaises et étrangères. La très grande majorité des entreprises contactées
citent la taille et le dynamisme du marché turc comme première justification pour le choix
de leur implantation. Complémentaire de la taille du marché, la proximité géographique de
la Turquie avec la France, et donc de l’Europe, figure aussi en tête de la liste de ces
justifications : la Turquie est, en effet, non seulement très proche de la France, mais
constitue aussi un carrefour commercial stratégique.
Le marché turc est devenu aussi particulièrement attractif pour les entreprises françaises
depuis la mise en œuvre des réformes structurelles à la suite de la grave crise économique et
financière de 2001 .On constate d’ailleurs que de nombreuses implantations de PME, se sont
matérialisées depuis la fin de cette crise. La perspective du rapprochement avec l’ensemble
européen a aussi favorisé la dynamique de rattrapage et accéléré l’effort d’harmonisation du
tissu économique pour se mettre en adéquation avec les standards mondiaux.
Ce double mouvement a eu des effets particulièrement positifs sur le développement
d’opportunités sur le marché turc, et qui explique, en partie, la croissance constatée ces
dernières années. Cités par de nombreuses entreprises françaises, les chiffres de la
croissance turque ont été en effet impressionnants jusqu’à l’automne 2008 : l’expansion
moyenne du PIB a été de sept points par an, entre 2002 et 2006.
De nombreux secteurs à forte croissance suscitent un intérêt tout particulier de la part des
entreprises françaises, mais aussi étrangères, pour le marché turc. C’est le cas, par exemple,
du secteur de l’énergie : si le bouquet énergétique turc fait la part belle aux énergies fossiles
qui représentent 70% de l’ensemble, les investissements dans les infrastructures
hydroélectriques ainsi que dans les énergies renouvelables sont une des priorités du
gouvernement depuis quelques années.
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28. Focus sur les énergies renouvelables en Turquie
Hydroélectricité
Potentiel hydroélectrique de la Turquie :
brut : 433 Md kWh/an ;
technique : 216 Md kWh/an ;
économique : 150 Md kWh/an.
En 2007, les 148 centrales hydroélectriques installées sur le territoire, qui représentent une
capacité installée de 13 393 MW, ont produit près de 47 590 GWh. La Turquie utilise
aujourd’hui seulement 32 % de son potentiel économique. 158 centrales hydroélectriques
sont actuellement en construction ce qui représente une capacité installée additionnelle de
6 564 MW et une production additionnelle de 23 620 GWh/an. La valorisation du potentiel
hydroélectrique de la Turquie demeure une priorité majeure du nouveau gouvernement.
Eolien
La Turquie, considérée comme un pays plutôt riche en potentiel éolien, dispose
actuellement d’une puissance éolienne installée de près de 200 MW. Selon les évaluations
conduites par l’association des investisseurs privés du secteur éolien et hydraulique
(RESSIAD) sur la base de mesures du vent depuis 7‐8 ans, les experts estiment que près de
10 000 MW (soit 30 milliards de kWh par an) pourraient être produits par des turbines
éoliennes en Turquie. Ce chiffre correspondrait, selon l’association, en valeur à près de 2
Md USD par an. Les études de faisabilité sur le développement de l’énergie éolienne en
Turquie, menées par l’EIE (Direction générale des études pour les travaux électriques du
ministère de l’Energie et des Ressources naturelles), sont pour les investisseurs des pistes
de réflexion intéressantes sur le choix des sites à un fort potentiel. Un atlas éolien de la
Turquie recoupe les données de base utiles pour tout investisseur : carte des vents, zones
naturelles protégées, réseau de transport d’électricité.
Solaire
Le potentiel de production d’énergie solaire est relativement important en Turquie. Des
études ont ainsi montré que la Turquie recevait en moyenne 2 640 heures d’ensoleillement
par an avec une intensité de 3,6 kWh/m²/jour. Le solaire thermique et l’utilisation de
collecteurs pour l’eau chaude des habitations sont répandus sur le territoire turc.
Géothermie
La Turquie possède un potentiel géothermique considérable estimé à près de 31 500 MW th
(7e potentiel à l’échelle mondiale). La direction générale de la recherche et de l’exploration
minière en Turquie a identifié, à ce jour, 170 champs géothermiques avec des températures
pouvant monter jusqu’à 292°C. Ils sont situés, pour la plupart, dans les régions de la mer
Egée et de l’Anatolie centrale, autrement dit dans les zones où la concentration
démographique est la plus élevée. Le potentiel de développement est donc important pour
le chauffage urbain et la production électrique. Dans le cadre de la libéralisation des
marchés de l’énergie, la Turquie a lancé en août 2008 un projet de privatisation de 33
champs et 32 puits géothermiques appartenant actuellement à MTA (société nationale pour
l’exploration minière).
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