Café débat Bibliothèques de Riom Communauté : "pourquoi les régimes sont (presque) toujours des échecs..." par Florence Morel, psychologue au service psychiatrie du CHU de Clermont-Ferrand
1. Pourquoi fait-on des régimes ?
Image corporelle et régimes
Florence MOREL
Psychologue
Service Professeur LLORCA
CHU – Clermont-Ferrand
2. L’ESTIME DE SOI
L'estime de soi = valeur que l’on s'accorde.
Composée de nos réussites sociales, familiales,
professionnelles et de l’évaluation de notre apparence
physique (« l'image de notre corps que nous formons dans
notre esprit » - perception mentale que nous avons de nos
limites corporelles, de la désirabilité, et de la capacité de
notre corps à attirer le regard et l’attirance des autres).
L’apparence physique est ce qui contribue le plus à l’estime
de soi
La minceur est une préoccupation sociale importante : presque la
moitié des femmes en France considèrent qu’être mince est une
obligation pour être dans la norme, cette proportion monte jusqu’à 65
% pour les 18-24 ans.
3. L’ESTIME DE SOI
Simone de Beauvoir
Quand une fille devient femme, elle se dédouble : au lieu de coïncider
exactement avec elle-même, elle existe aussi à l’extérieur (préoccupations
relatives à l’apparence physique).
« Pour plaire, il faut chercher à le faire » : quand une femme est regardée,
elle sait qu’elle est jugée et désirée pour son apparence
Cooley : c’est la société qui construit l’image que les femmes ont
d’elles-mêmes.
Les miroirs reflètent les attributs physique et ce reflet permet aux
femmes de se voir comment les autres les voient (looking glass
self) : le soi miroir
4. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
L’INSATISFACTION CORPORELLE
60 % des personnes sont insatisfaites de leur apparence
physique
65 % des filles disent vouloir une silhouette ou un corps
plus mince.
Une image corporelle insatisfaisante provient d’une
perception (réelle ou non) que l’on se fait de sa
propre silhouette.
74% des femmes se trouvent
trop rondes
44% sont complexées par leur
ventre
34% détestent leurs cuisses
20% ne supportent pas leurs
fesses
Enfin 44% pensent n'être
regardées que par leurs
défauts!
Les garçons aussi !
Insatisfaction musculaire
55 % des femmes sont insatisfaites de
leurs poids,
57 % de leur taille,
50 % de leurs fesses
32 % de leurs muscles.
Les femmes préfèrent des seins plus
volumineux, des jambes plus longues,
un ventre plus plat et un corps plus
mince..
5. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
L’INSATISFACTION CORPORELLE
Les jugements concernant la beauté sont relatifs et
dépendent des normes en cours à un moment donné.
Les canons de la beauté ont évolué au cours des siècles.
Les études réalisées sur la représentation des femmes dans
les médias ont montré que la figure idéale féminine est de
plus en plus mince.
6. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
L’INSATISFACTION CORPORELLE
L’idéal de la minceur est entretenu et amplifié depuis une
trentaine d’années par les médias, les magazines féminins et le
cinéma.
D
7. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
L’INSATISFACTION CORPORELLE
Analyse des couvertures des magazines féminins de
1980 à nos jours (Anne Lacuisse-Chabot et Cécile
Nathan-Tilloy)
L’analyse a permis de mettre en avant plusieurs
phénomènes :
les femmes ont été progressivement dénudées,
les tenues sont plus sexy, suggestives, moulantes,
leur corps est de plus en plus mince, voire maigre.
8. Les filles, depuis leur plus jeune âge, sont confrontées à
des silhouettes de plus en plus minces qu’elles identifient
comme étant la norme (intériorisation de l’idéal de
minceur).
Poupée Barbie : les mensurations de Barbie sont
totalement irréalistes
Si Barbie était une femme en chair et en os son indice de
masse corporelle serait de 16, 5 (maigreur extrême).
Les mannequins filiformes = modèle à atteindre.
Actublog24.com
DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
L’INSATISFACTION CORPORELLE
9. QUEL EST VOTRE AVIS SUR CES 2
POUPÉES, LAQUELLE ALLEZ-VOUS
OFFRIR À VOTRE ENFANT ?
10. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
L’INSATISFACTION CORPORELLE
Méta-analyse portant sur 25 études
Effet + important chez les jeunes filles de moins de 19
ans.
A la fin de l’enfance et au début de l’adolescence, la
comparaison sociale joue un rôle important dans la
perception de soi (Levine et Smolak, 2002).
image de leur corps plus négative
que celles exposées a des images de
femmes de taille moyenne ou
supérieure ( Groesz, Levine, et
Murnen, 2002).
11. De l’importance du physique … à
l’insatisfaction corporelle
Illustration
Etude sur 2.516 garçons et filles âgés de 10 à 17 ans suivis 5
ans.
relation très nette entre la fréquence de lecture des
magazines de mode et le besoin de maigrir, le suivi de
régime pour maigrir, et la pratique régulière de comportements
nocifs pour la santé : vomissements, abus de laxatifs, jeûne
prolongé, tabac.
Van den Berg P, Neumark-Sztainer D, Hannan PJ, Haines J. Is dieting advice
from magazines helpful or harmful? Five-year associations with weight-control
behaviors and psychological outcomes in adolescents. Pediatrics 2007;
119(1):e30-7.
12. De l’importance du physique … à
l’insatisfaction corporelle
Illustration
Lecture de magazines de mode et influence sur l’image du
corps, le besoin de perdre du poids et les manœuvres pour
perdre du poids.
Etude réalisée auprès de 548 filles de 10 à 17 ans aux USA.
Résultats :
- La lecture régulière de la presse féminine « centrée sur
l’image de minceur » influence 67 % des filles.
- 47 % disent avoir voulu perdre du poids à la lecture de ces
magazines, alors que seulement 16 % en avaient besoin.
relation entre la lecture de cette presse,
insatisfaction corporelle et mise en place de
stratégies de contrôle du poids.
Field AE, Cheung L, Wolf AM, Herzog DB, Gortmaker SL, Colditz
GA. Exposure to the mass media and weight concerns among girls.
Pediatrics 1999; 103(3):E36-39.
13. De l’importance du physique … à
l’insatisfaction corporelle
Etude australienne
Des enfants entre 5 ans et 10 ans doivent choisir, parmi
des silhouettes standardisées, celle qui leur ressemble le
plus et celle à laquelle ils aimeraient ressembler.
Les enfants, quel que soit leur âge, évaluent correctement
leur silhouette.
MAIS les filles, dès l’âge de 5 ans préfèrent une
silhouette plus mince que la leur. A cet âge, les
garçons sont satisfaits de leur poids et de leurs
formes.
14. De l’importance du physique … à
l’insatisfaction corporelle
La minceur extrême est présentée comme un idéal
désirable mais aussi atteignable par toutes les femmes.
Pourtant, seulement 1% de la population est
génétiquement prédisposée pour être mince et
grande (notes from workshop on eating disorders)
(Steiner-Adair).
La perfection des mannequins des magazines, aux jambes
interminables, au grain de peau irréprochable est souvent
liée aux techniques des retouches numériques.
DIU TCA 2013128_FUJIDSCF8014.AVI
http://www.youtube.com/watch?v=iYhCn0jf46U&feature=player_embedded
http://gregorymoine.com/retouches-photographies-des-stars
15.
16. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE À
LA DÉFORMATION DES REPÈRES DE
POIDS
Etude auprès de 142 personnes - Anne Lacuisse-Chabot et Cécile Nathan-
Tillot
Présentation de la photo d’un mannequin anorexique
39 % des étudiantes ne l’ont pas trouvé maigre, mais mince, voire normale
18 % ont dit qu’elles aimeraient lui ressembler
49 % des sondées se trouvaient trop grosses alors que 97 % avaient un BMI inférieur à 25
seules 8 % d’entre elles ont indiqué un chiffre proche de la réalité. L’erreur moyenne était de 2
points et se traduisait par le fait que, lorsqu’elle était maigre, la jeune fille se voyait mince,
lorsqu’elle était mince, elle s’imaginait normale, et ainsi de suite.
Les représentations sociales du corps ne correspondent
pas aux réalités médicales.
Les repères sont déformés : la maigreur a été assimilée à la minceur
Il existe en quelque sorte deux échelles de la représentation du corps :
l’une médicale, l’autre sociale.
Les couvertures de magazine ont glissé vers une représentation idéalisée
de la maigreur – progressivement assimilée à la minceur – modifiant nos
schémas mentaux.
17. Tendance à la minceur comme
standard de poids pour les
femmes
18. DE L’IMPORTANCE DU PHYSIQUE
AU CONTRÔLE DU POIDS
L’image de beauté et de minceur des femmes qui est
inatteignable contribue à ce que les femmes ne soient pas
satisfaites de leur corps.
Pour améliorer leur estime de soi, tout est ainsi mis en
œuvre pour atteindre cette extrême minceur.
Conséquence la plus fréquente est le régime amaigrissant
Les recours aux régimes amaigrissants sont nombreux :
48% des 18-24 ans ont déjà pratiqué un régime
70 % des femmes ont suivi un régime
40 % des femmes suivent un régime alimentaire permanent
19. LE CONTRÔLE DE L’APPARENCE
PHYSIQUE
Incitations au régime incontournables.
Garner et al (1980) ont étudié les magazines féminins
entre 1959 et 1978 et ont révélé que le nombre d’articles
consacré au régime avait augmenté de façon substantielle.
Aucune femme ne peut échapper aux conseils associés au
contrôle alimentaire.
Etude de Anne Lacuisse-Chabot et Cécile Nathan-
Tillot dans 6 magazines féminins
1980-1982 : 17 régimes par an
1999 - 2001 : 60 régimes par an
http://www.dietepense.fr/dietepense/chroniques_tv/
20. LE CONTRÔLE DE L’APPARENCE
PHYSIQUE
Au printemps Les bourgeons éclosent et les
"régimes-magazines" aussi
Trouvez LE magasine qui ne parle pas de régime !
21. Le contrôle du poids
Plus de 40% des filles entre 11 et 13 ans déclarent
discuter régulièrement avec leurs amis du poids,
des formes et des régimes.
Les adolescentes ne donnent pas leur poids mais
le nombre de kilos qui les séparent du poids
« idéal ».
Levinson, Powell et Steelman (1986 cités dans Bedart et al,
1999)
23. INSATISFACTION CORPORELLE,
RÉGIMES ET ILLUSION DE
CONTRÔLE
On est tous programmé pour faire un certain
poids (poids d’équilibre qui peut être plus ou
moins différent du poids idéal)
1. On ne le choisit pas – illusion de contrôle du
poids
2. Il peut se dérégler – évènements de vie …
Combien de kilos
souhaitez-vous
perdre ?
24. Notre valeur ne dépend pas du poids que l’on fait
Il est difficile d’échapper au diktat de la minceur
La diversité devrait être la norme
Pour conclure
Le soi = l'ensemble des éléments qui nous définissent
Il est composé des croyances, des sentiments et des attitudes que les individus ont d'eux même.
Si on réussit dans un domaine que l’on trouve important, alors cela favorise l’estime de soi.
Si on n’accorde pas d’importance à un domaine dans lequel on est faible, cela n’affecte pas l’estime de soi.
Le soi = l'ensemble des éléments qui nous définissent
Il est composé des croyances, des sentiments et des attitudes que les individus ont d'eux même.
Si on réussit dans un domaine que l’on trouve important, alors cela favorise l’estime de soi.
Si on n’accorde pas d’importance à un domaine dans lequel on est faible, cela n’affecte pas l’estime de soi.
Perception négative de sa silhouette ou de parties de son corps.
Les filles sont plus insatisfaites de leur image corporelle. Mais les garçons sont également préoccupés par leur image corporelle.
On observe dans tous les magazines une forte augmentation
du nombre d’images sur lesquelles les
femmes sont dénudées ou nues (c’est-à-dire en
sous-vêtements, maillots de bain, ou tenues très
légères dévoilant le corps). L’évolution est considérable
dès le début des années 1980, et devient de plus
en plus importante à la fin des années 1990.
En outre, les tenues sont toujours plus légères ou
suggestives : bodies, pantalons moulants, décolletés
profonds ou encore tops dévoilant le ventre… Ce
type de vêtements laisse deviner des filles minces, au
ventre plat, aux salières plus ou moins creuses mais
toujours marquées.
Des femmes de plus en plus minces, voire maigres
Ces corps de plus en plus visibles sont aussi de
plus en plus minces, voire maigres. Ce phénomène
est surtout sensible en dernière période (1999-
2001), et particulièrement dans quelques magazines
(Vital et 20 Ans en tête).
Les participantes ayant été exposées à des représentations de femmes idéalement minces au travers des médias ont une image de leur corps plus négative que celles ayant été exposées a des images de femmes de taille moyenne ou supérieure ( Groesz, Levine, et Murnen, 2002).
Les filles qui lisaient ces articles avaient 3 fois plus souvent de fréquents vomissements provoqués ou d’abus de laxatifs pour maigrir et deux fois plus de jeûnes, de sauts de repas fréquents que les filles qui ne lisaient pas ces articles de presse.
Les filles qui les lisaient le + étaient celles qui avaient le + souvent suppression de repas, restriction alimentaire excessive, hyperactivité physique et besoin de perdre du poids.
Les filles qui les lisaient le plus fréquemment étaient 2 fois + à vouloir perdre du poids et 3 fois + plus à bouger pour maigrir, alors qu’elles n’en avaient pas besoin, que celles qui ne les lisaient pas. Elles pensaient aussi plus souvent qu’un corps mince est indispensable à la « forme ».
Field AE, Cheung L, Wolf AM, Herzog DB, Gortmaker SL, Colditz GA. Exposure to the mass media and weight concerns among girls. Pediatrics 1999; 103(3):E36-39.Les filles qui les lisaient le + étaient celles qui avaient le + souvent suppression de repas, restriction alimentaire excessive, hyperactivité physique et besoin de perdre du poids.
Les filles qui les lisaient le plus fréquemment étaient 2 fois + à vouloir perdre du poids et 3 fois + plus à bouger pour maigrir, alors qu’elles n’en avaient pas besoin, que celles qui ne les lisaient pas. Elles pensaient aussi plus souvent qu’un corps mince est indispensable à la « forme ».
Field AE, Cheung L, Wolf AM, Herzog DB, Gortmaker SL, Colditz GA. Exposure to the mass media and weight concerns among girls. Pediatrics 1999; 103(3):E36-39.
L’exposition à l’idéal de minceur des médias amène à ne pas être satisfaite de son corps
Ce phénomène concerne aussi les adolescents et les petites filles.
In one survey, the number one wish of girls aged 11-17 who were given three magic wishes for anything they wanted was “to lose weight and keep it off”(Kilbourne, 1994).
In another survey, middle-aged women were asked what they would most like to change about their lives, and more than half of them said “their weight” (Kilbourne, 1994). This pervasive body dissatisfaction and preoccupation with weight has become part of the female experience in North America; so much so that “psychologists have coined the term ‘normative discontent’ to explain the idea that it is normal if you are a female
Yves Simon, psychiatre Université Bruxelles
Etude valuer la sensibilité des jeunes femmes aux impacts visuels auxquels elles sont soumises de manière récurrente. (Anne Lacuisse-Chabot et Cécile Nathan-Tilloy) Estimer l’ampleur des manœuvres de régime auxquelles ces jeunes femmes pouvaient se plier. Le questionnaire était construit autour de trois outils : tout d’abord, un test sur le BMI (pour Body Mass Index, ou indice de masse corporelle, IMC) ; ensuite, un test visuel sur une couverture de magazine ; enfin, des informations sur les manœuvres de régime réalisées par la jeune femme sondée. Les résultats de cette enquête, qui reposent sur 142 questionnaires traités, sont parfois inquiétants.Elles savent, pour la
plupart, qu’elles ne sont pas « trop grosses » médicalement
parlant mais elles se considèrent comme
« trop grosses » esthétiquement.
De manière plus générale, il semble que les définitions
médicales ne correspondent plus aux représentations
sociales du corps féminin. Aujourd’hui,
la norme que nous impose la société est la minceur,
d’où cette confusion récurrente entre « normalité »
et « minceur ». Praticiens et femmes ne parlent plus
la même langue.
Elles apprennent, grâce à leurs pairs certaines attitudes, telles que la valorisation de la minceur et certains comportements, tels que les pratiques de régime.