1. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (1)
C’est seulement la conscience du
corps qui fait que l’amour semble
limité. Car le corps est une limite à
l’amour. À son origine était la croyance
en l’amour limité, et il fut fait afin de
limiter l’illimité. Ne pense pas que cela
soit une simple allégorie, car il fut fait
pour te limiter, toi. Toi qui te vois au-
dedans d’un corps, peux-tu te
connaître en tant qu’idée? Tout ce que
tu reconnais, tu l’identifies à
l’extérieur, à quelque chose qui est en
dehors. Tu ne peux même pas penser
à Dieu sans un corps ou sans une
forme quelconque que tu penses
reconnaître.
2. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (2)
Le corps ne peut pas connaître. Et tant
que tu limiteras ta conscience à ses
sens minuscules, tu ne verras pas la
grandeur qui t’entoure. Dieu ne peut
pas venir dans un corps, pas plus que
là tu ne peux te joindre à Lui. Les
limites à l’amour sembleront toujours
Le forclore et te garder à part de Lui.
Le corps est une minuscule clôture
autour d’une petite partie d’une idée
glorieuse et complète. Il trace un
cercle, infiniment petit, autour d’un
tout petit segment du Ciel, détaché du
tout, et proclame qu’au-dedans est
ton royaume, où Dieu ne peut entrer.
3. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (3)
Au-dedans de ce royaume règne l’ego, et
cruellement. Et pour défendre ce petit
grain de poussière, il t’enjoint de te battre
contre l’univers. Ce fragment de ton esprit
en est une si minuscule partie que, si
seulement tu pouvais apprécier le tout, tu
verrais immédiatement qu’il est comme le
plus petit rayon est au soleil, ou comme la
plus petite ride à la surface de l’océan.
Dans sa stupéfiante arrogance, ce
minuscule rayon de soleil a décidé qu’il
était le soleil; cette ride presque
imperceptible se proclame océan. Songe
comme elle est seule et effrayée, cette
petite pensée, cette illusion infinitésimale,
qui se tient à part contre l’univers. Le soleil
devient «l’ennemi» du rayon de soleil, qu’il
voudrait dévorer, et l’océan terrifie la
petite ride et veut l’avaler.
4. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (4)
Or ni le soleil ni l’océan ne sont même
conscients de toute cette étrange et
in-signifiante activité. Ils continuent
simplement, inconscients qu’ils sont
craints et haïs par un minuscule
segment d’eux-mêmes. Même ce
segment n’est pas perdu pour eux, car
il ne pourrait pas survivre à part d’eux.
Et ce qu’il pense être ne change en
aucune façon que son être est
totalement dépendant d’eux. Toute
son existence demeure encore en eux.
Sans le soleil, le rayon disparaîtrait; la
ride sans l’océan est inconcevable.
5. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (5)
Telle est l’étrange position dans
laquelle semblent être ceux qui vivent
dans un monde habité par des corps.
Chaque corps semble loger un esprit
séparé, une pensée déconnectée,
vivant seule et nullement jointe à la
Pensée par laquelle elle fut créée.
Chaque minuscule fragment semble
être autonome, ayant besoin d’autrui
pour certaines choses mais n’étant
aucunement totalement dépendant
de son unique Créateur; ayant besoin
du tout pour lui donner une
quelconque signification, car par lui-
même il ne signifie rien. Pas plus qu’il
n’a la moindre vie à part et par lui-
même.
6. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (6)
Comme le soleil et l’océan, ton Soi
continue, oublieux de ce que cette
partie minuscule se considère comme
toi. Elle ne manque pas; elle ne
pourrait pas exister si elle était
séparée, pas plus que le tout ne serait
le tout sans elle. Elle n’est pas un
royaume séparé, gouverné par une
idée de séparation d’avec le reste. Il
n’y a pas non plus de clôture qui
l’entoure, l’empêchant de se joindre
au reste et la gardant à part de son
Créateur. Ce petit aspect n’est pas
différent du tout, étant en continuité
et ne faisant qu’un avec lui. Il ne mène
pas de vie séparée, parce que sa vie
est l’unité dans laquelle son être fut
créé.
7. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (7)
Ce petit aspect clôturé, ne l’accepte pas
comme étant toi-même. Le soleil et
l’océan ne sont rien à côté de ce que tu es.
Le rayon de soleil n’étincelle que dans la
lumière du soleil, et la ride ne danse qu’en
reposant sur l’océan. Or il n’y a ni dans le
soleil ni dans l’océan la puissance qui
repose en toi. Voudrais-tu rester au-
dedans de ton minuscule royaume, triste
roi, amer souverain de tout ce qu’il
surveille, qui ne regarde rien et qui
pourtant serait encore prêt à mourir pour
le défendre? Ce petit soi n’est pas ton
royaume. Bien au-dessus, le surplombant
comme une arche et l’entourant d’amour,
est le tout glorieux qui offre tout son
bonheur et son contentement profond à
chaque partie. Le petit aspect que tu
penses avoir mis à part ne fait pas
exception.
8. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (8)
L’amour ne connaît pas de corps, et
s’étend vers tout ce qui fut créé pareil
à lui. Son manque total de limite est sa
signification. Il donne de façon tout à
fait impartiale et il n’englobe que pour
préserver et garder complet ce qu’il
voudrait donner. Dans ton minuscule
royaume, tu as si peu ! N’est-ce pas là,
donc, que tu devrais appeler l’amour à
entrer? Regarde le désert — sec,
stérile, brûlé et sans joie — qui
constitue ton petit royaume. Et rends-
toi compte de la vie et de la joie que
l’amour y apporterait d’où il vient, et
où il retournerait avec toi.
9. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin (9)
Derrière la barrière que tu as bâtie, la
Pensée de Dieu qui entoure ton petit
royaume attend que tu La laisses entrer et
rayonner sur le sol aride. Vois comme la
vie jaillit partout! Le désert devient un
jardin, vert, profond, tranquille, offrant le
repos à ceux qui ont perdu leur chemin, et
qui errent dans la poussière. Donne leur
un lieu de refuge, préparé pour eux par
l’amour là où était un désert. Et tous ceux
que tu accueilleras apporteront l’amour
avec eux du Ciel pour toi. Ils entrent un à
un en ce saint lieu, mais ils n’en partiront
pas seuls, comme ils sont venus. L’amour
qu’ils ont apporté leur restera, comme il te
restera. Et sous son influence bienfaisante,
ton petit jardin prendra de l’expansion et
attirera tous ceux qui ont soif d’eau vive
mais sont trop las pour continuer seuls.
10. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin
(10)
Va et trouve-les, car c’est ton Soi
qu’ils amènent. Et conduis-les
doucement à ton paisible jardin et
reçois là leur bénédiction. Ainsi il
grandira et s’étirera à travers le
désert, de sorte qu’aucun petit
royaume esseulé ne reste fermé à
l’amour, avec toi à l’intérieur. Alors
tu te reconnaîtras toi-même et tu
verras ton petit jardin doucement
transformé en Royaume des Cieux,
avec tout l’Amour de son Créateur
rayonnant sur lui.
11. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin
(11)
L’instant saint est ton invitation faite à
l’amour à entrer en ton triste et morne
royaume et à le transformer en un jardin
de paix et d’accueil. La réponse de l’amour
est inévitable. Il viendra parce que tu es
venu sans le corps et n’as interposé
aucune barrière qui fasse interférence avec
son heureuse venue. Dans l’instant saint,
tu ne demandes de l’amour que ce qu’il
offre à chacun, ni plus ni moins. Comme tu
demandes tout, tu le recevras. Et ton Soi
rayonnant soulèvera droit jusqu’au Ciel le
minuscule aspect que tu essayais de
cacher au Ciel. Aucune partie de l’amour
ne fait appel au tout en vain. Aucun Fils de
Dieu ne reste en dehors de Sa Paternité.
12. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin
(12)
Tu peux être sûr de ceci : l’amour est
entré dans ta relation particulière, et il
y est entré pleinement à ta faible
requête. Tu ne reconnais pas que
l’amour est venu, parce que tu n’as
pas encore lâché prise de toutes les
barrières que tu as levées contre ton
frère. Ni toi ni lui ne serez capables
d’accueillir l’amour séparément. Tu ne
pourrais pas plus connaître Dieu seul
qu’il ne te connaît sans ton frère. Mais
ensemble vous ne pourriez pas plus
être inconscients de l’amour que
l’amour ne pourrait ne pas vous
connaître, ou manquer de se
reconnaître en vous.
13. Chapitre 18
LA DISPARITION DU RÊVE
VIII. Le petit jardin
(13)
Tu as atteint la fin d’un voyage très
ancien sans t’être encore rendu
compte qu’il était terminé. Tu es
encore las et fourbu, et il semble que
la poussière du désert te colle encore
aux yeux et t’empêche de voir. Or
Celui Que tu as accueilli est venu à toi,
et voudrait t’accueillir. Il y a longtemps
qu’il attend de te faire cet accueil.
Reçois-le de Lui maintenant, car Il
voudrait que tu Le connaisses. Il n’y a
plus qu’un petit mur de poussière qui
se dresse encore entre toi et ton frère.
Souffle à peine dessus, avec un rire
joyeux, et il s’écroulera. Puis entre
dans le jardin que l’amour a préparé
pour vous deux.