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UNIVERSITÉ IBN Tofail
MASTER : Didactique langage et littérature




                 Matière : Méthode de recherche et travail universitaire




      Compte rendu de lecture
                          HERNANI                 VICTOR HUGO




Préparé par :                                  Remis au : PR RIZK




                          Année universitaire : 2012 /2013
PLAN :




I/. RÉSUMÉ
II/. ÉTUDE DES PERSONNAGES
      Hernani / Jean d’Aragon
      Doña Sol
      Don Ruy Gomez de Silva
      Don Carlos
III/. CLÉS DE LECTURE
     1. Contexte historique : nationalisme et libéralisme
     2. L’éclosion d’un nouveau genre : le drame romantique
     3. Hernani, un prototype du drame romantique ?
     4. La « bataille d’Hernani »
Poète, romancier, dramaturge et homme politique, Victor Hugo (1802-1885) est l’écrivain emblématique du romantisme
français. Élu « chef de file des romantiques », il mena également une vie politiquement engagée, intervenant dans de grandes
causes comme l’abolition de la peine de mort. Durant le Second Empire, il fut contraint à l’exil (1851-1870), durant lequel il
écrivit notamment son roman Les Misérables. À sa mort en 1885, la République lui organisa des obsèques nationales
grandioses et il fut célébré par le peuple comme « le plus grand écrivain français ».


UN DRAME ROMANTIQUE : TROIS HOMMES POUR
UNE FEMME
Hernani (1830), drame en cinq actes et en vers, provoqua une « bataille » entre les anciens et les modernes, à l’instar du
célèbre Cid de Corneille. Hugo souhaitait, avec cette pièce, faire triompher une nouvelle esthétique théâtrale, le drame
romantique, et force est de constater, en effet, que Hernani envoie valser les règles du théâtre classique.

Le sous-titre de l’intrigue, Tres para una, résume bien l’argument principal de la pièce – trois hommes aiment la même
femme : don Carlos, son oncle, don Ruy Gomez, futur empereur, et Hernani, jeune marginal dont dona Sol est amoureuse –,
mais n’en montre pas toute la complexité.



1. RÉSUMÉ
Acte I : LE ROI
Don Carlos s’introduit incognito dans la chambre de Doña Sol en se faisant passer pour son amant, Hernani. La duègne
consent, en échange d’argent, à le cacher dans une armoire. (scène 1) Hernani et doña Sol se retrouvent ensuite dans la
chambre. Le jeune homme lui fait des déclarations enflammées, or doña Sol doit épouser son oncle, don Ruy Gomez. La
jeune fille exprime son désir de suivre son amant et de partager sa vie de proscrit. Hernani évoque, quant à lui, sa promesse
de tuer le roi de Castille, don Carlos, pour venger son père que le père du roi a jadis assassiné. C’est alors que don Carlos
sort de l’armoire et déclare lui aussi son amour à doña Sol. On frappe à la porte. Don Ruy Gomez entre et est indigné
de voir deux hommes dans la chambre de sa fiancée. Don Carlos révèle alors qu’il est le roi d’Espagne et prétend qu’il se
trouve au château pour annoncer la mort de l’empereur. Hernani et doña Sol se donnent rendez-vous à minuit, mais le roi
surprend leur conversation. (scène 3) Hernani, reparti seul, entame un monologue sur la vengeance qu’il doit accomplir au
nom de son père. (scène 4)

Acte II : LE BANDIT
La nuit, devant le palais de don Ruy Gomez, le roi se tient en embuscade avec ses courtisans afin de surprendre les amants.
(scène 1) Faignant d’être Hernani, il parvient à rencontrer doña Sol. Il lui propose une vie de reine, mais elle refuse de
l’épouser et appelle à son secours Hernani, qui arrive et l’enlace. (scène 2) Ce dernier propose au roi un combat loyal ;
cependant, comme celui-ci refuse, Hernani le laisse partir, renonçant à ce qui serait un vil assassinat. Don Carlos menace
Hernani : il sera poursuivi dans tout l’Empire. (scène 3) Hernani, sachant qu’il est un danger pour doña Sol, remet en
question leur décision de fuir, mais elle s’y tient car tout lui est égal, pourvu qu’elle reste avec son amant. (scène 4).

Acte III : LE VIEILLARD
C’est le jour du mariage. Doña Sol et son futur époux discutent, mais ils sont interrompus par un page qui les informe de
l’arrivée d’un pèlerin, et par l’annonce que la troupe de rebelles a été arrêtée et qu’Hernani est mort. (scène 1) Don Ruy
Gomez rejoint le visiteur, conformément aux lois de l’hospitalité, puis doña Sol arrive à son tour. (scène 2) Voyant la jeune
femme vêtue d’une robe de mariée, le pèlerin révèle son identité : il est Hernani. Désespéré de voir que Doña Sol a résolu
d’épouser son oncle et l’a oublié, il souhaite qu’on l’arrête et qu’on le livre (sa tête est mise à prix). Don Ruy Gomez refuse
car, bien que bandit, Hernani est son hôte. Il décide de le protéger. (scène 3) Lorsqu’Hernani et doña Sol se retrouvent seuls,
ils se déclarent à nouveau leur amour. S’il le faut, ils mourront ensemble. L’oncle de la jeune fille entre alors qu’ils échangent
des regards langoureux. (scène 4) Don Ruy Gomez déplore le peu de respect d’Hernani, son manque d’honneur et la
dégénérescence du monde. Hernani souhaite se sacrifier pour prouver la bonne foi de sa maitresse. Mais, à l’annonce de
l’arrivée du roi, don Ruy Gomez se plie à nouveau à son devoir d’hospitalité et cache Hernani. (scène 5) Le roi pense
que don Ruy Gomez le trahit en protégeant volontairement le criminel. Après avoir passé en revue les portraits de ses illustres
ancêtres afin de justifier son acte, le vieillard explique à son souverain que, pour lui, les lois de l’hospitalité sont sacrées. Il
offre donc sa propre tête à la place de celle de son hôte. Mais doña Sol proteste et, finalement, c’est elle que le roi
emmène. (Scène 6) Quant à Hernani et don Ruy Gomez, alors qu’ils pourraient résoudre leur différend par un duel, ils
décident de s’allier afin de sauver doña Sol. Ils passent un accord : lorsque la jeune fille sera sauvée et que sonnera le
cor, Hernani devra mourir.
Acte IV : LE TOMBEAU
Dans les caveaux de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle, alors que les Grands Électeurs vont bientôt choisir le nouvel empereur,
don Carlos apprend d’un de ses courtisans les noms des conspirateurs qui comptent le faire tomber s’il est élu. Le roi
ignore encore que don Ruy Gomez et Hernani en font partie. (scène 1) Seul, don Carlos s’adresse à Charlemagne, puis entre
dans le tombeau de ce dernier pour lui demander conseil quant à la façon de gouverner. Arrivent ensuite les conjurés.
(scène 2) Ceux-ci choisissent l’homme qui sera chargé d’assassiner don Carlos : le sort désigne Hernani. Trois coups de
canon retentissent, annonçant que don Carlos a été élu empereur. (scène 3) Le nouvel empereur sort alors du tombeau et
fait cerner les conjurés par ses soldats. Hernani, qui est épargné, insiste pour se joindre au groupe et révèle sa véritable
identité : il est en fait le duc Jean d’Aragon, banni par le père de l’empereur. Doña Sol supplie don Carlos de laisser la vie
sauve à son amant. L’empereur accepte, donne la jeune fille à Hernani, le fait chevalier et pardonne à tous les autres. En
échange, Hernani renonce à le tuer. (scène 4) À nouveau seul, don Carlos se recueille devant le tombeau de Charlemagne et
lui demande s’il a bien agi.

Acte V : LA NOCE
De jeunes seigneurs discutent du mariage de doña Sol et Hernani. Alors qu’ils repèrent une personne vêtue de noir, les époux
arrivent. (Scène 1) Les seigneurs félicitent les jeunes mariés, puis s’en vont. (Scène 2) Les amants, seuls, évoquent leur
amour et leur joie d’être enfin unis lorsque le cor sonne. Pour cacher son trouble, Hernani demande à doña Sol d’aller
chercher une fiole dont le contenu pourrait le soulager. (Scène 3) Hernani se lamente, tandis qu’entre l’homme vêtu de noir,
don Ruy Gomez. (Scène 4) Celui-ci rappelle son pacte à Hernani et lui propose de choisir sa mort : lame ou poison. Le
jeune duc choisit le poison. Doña Sol revient. (Scène 5) Découvrant la situation, elle veut à tout prix défendre son amant et se
montre tour à tour agressive et plaintive, allant jusqu’à demander pitié pour son époux. Elle s’empare finalement la fiole de
poison et en boit la moitié. Hernani vide le reste de la fiole. Les époux meurent ainsi côte à côte, lui d’abord, elle ensuite.
Épouvanté, don Ruy Gomez se tue. (Scène 6)

Hernani / Jean d’Aragon
Hernani, qui est en vérité Jean d’Aragon, fils d’un Grand banni par le roi précédent, est un personnage marginal : il vit
comme un bandit dans les montagnes d’Aragon. Personnage romantique par excellence, tourmenté et fougueux, son
moteur principal est le désir : désir pour doña Sol, qu’il aime d’un amour fou, et désir de vengeance contre le roi, don
Carlos, dont le père a banni le sien. Il accorde une grande importance à l’honneur, mais hésite tout de même au moment
d’honorer le pacte fatal qu’il a conclu avec don Ruy Gomez.

Doña Sol
Seul personnage féminin (excepté la duègne de la première scène) et objet de passions rivales, doña Sol est également une
héroïne romantique. Elle est promise à son oncle, mais reste follement amoureuse d’Hernani, qu’elle rencontre en
cachette. Elle est prête à tout pour lui. Sa passion la mène à résister aux exigences de son rang et de son sang, aux
convenances, au roi, etc. De tous les personnages du drame, doña Sol est celui qui fait le plus preuve de persévérance : dès le
début de la pièce, elle accepte de suivre Hernani et de mener avec lui une existence de proscrit, et elle se tiendra à cette
décision, jusqu’à mourir avec lui.

Don Ruy Gomez de Silva
Don Ruy Carlos est un Grand d’Espagne, c’est-à-dire une des personnes les plus nobles du royaume. Âgé, il souhaite
épouser sa nièce, doña Sol, contre son gré. Il accorde une énorme importance au lignage et aux valeurs anciennes,
l’honneur et l’hospitalité, qu’il respecte jusqu’au bout, même contre son roi, contre le bonheur de sa nièce et contre lui-même,
puisque c’est en vertu des lois sacrées de l’hospitalité qu’il protège Hernani, pourtant son rival amoureux. Il sera la cause de
la perte des deux amants par le pacte qu’il a conclu avec Hernani.

Don Carlos
Don Carlos se présente d’abord, comme Hernani, sous une fausse identité, qu’il révèle cependant plus vite. Il est le roi
d’Espagne et, à la fin du drame, l’Empereur Charles Quint. Ce changement de statut s’accompagne d’un changement de
caractère : belliqueux, ambitieux, vengeur, intransigeant et violent dans la première partie de l’oeuvre, il adopte ensuite
un comportement plus mesuré et devient clément. Il rétablit alors le statut d’Hernani/Jean d’Aragon et lui permet
d’épouser celle qu’il aime, bien que ce soit également celle dont il voulait faire sa favorite.



3. CLÉS DE LECTURE
Contexte historique : nationalisme et libéralisme
Le 19e siècle fut un siècle mouvementé pour l’Europe entière. C’est tout d’abord le siècle de l’ éveil des nationalités : se
libérant des oppresseurs étrangers (dont fait partie la France sous Napoléon), les peuples réclament la reconnaissance de leur
identité propre et de leurs droits. On voit alors se constituer de nouveaux États européens, comme l’Italie ou l’Allemagne.
Cela a évidemment des conséquences sur la pensée et la littérature française : naissance du sentiment national et curiosité vis-
à-vis des réalités étrangères.

En France, dès la Révolution de 1789, le nationalisme est intimement lié au libéralisme : la liberté, qui signifie
l’affranchissement des tyrannies étrangères, est d’abord la revendication du pays. Celui-ci sort à peine de la Révolution–qui a
provoqué la chute de l’Ancien Régime, modifié la société et suscité de grands espoirs de réformes et de libertés -, des guerres
napoléoniennes et de la Restauration.

Cependant, la liberté du peuple apparaît aussi comme étant inséparable des libertés individuelles, qui sont encore très
restreintes. Parmi ces libertés, les écrivains français se préoccupent surtout de la liberté de pensée et de la liberté
d’expression, pour lesquelles ils luttent tout au long du 19e siècle, contre les institutions répressives telles que la censure.
Chateaubriand, le premier, combat les embûches à la liberté d’expression, puis il est suivi par les écrivains romantiques, dont
Victor Hugo est le chef de file. Entre 1827 et 1830, le romantisme se rallie ainsi au libéralisme politique. Dès lors, le
combat esthétique des romantiques en faveur de la liberté (liberté des formes, des genres, des sujets, etc.) se double
d’une dimension idéologique : « le romantisme n’est, à tout prendre, que le libéralisme en littérature », explique Hugo dans
la Préface d’Hernani.

L’éclosion d’un nouveau genre : le drame romantique

En littérature, le combat des auteurs romantiques pour la liberté s’est surtout porté sur le théâtre. D’avis que le théâtre, depuis
Marivaux et Beaumarchais, n’avait rien produit de nouveau, ils en ont fait le bastion de la tradition à abattre. Ils ont ainsi mis
à mal les principes, les règles et les bienséances de la tragédie classique afin d’opérer une véritable révolution des formes
et des genres, et de donner naissance à une nouvelle esthétique théâtrale : le drame romantique.

En 1827, Hugo publie Cromwell, drame injouable en raison de sa longueur, accompagné d’une Préface qui fera date dans
l’histoire du théâtre. Cette Préface est le reflet des espérances de la génération romantique de 1830. Hugo y définit les
caractéristiques du drame romantique.

Bon à savoir : le romantisme
Le romantisme est un mouvement artistique et littéraire européen né en Allemagne et en Angleterre à la fin du 18e siècle en réaction à la
philosophie des Lumières, qui prônait la suprématie de la raison. Ce mouvement touche aussi au domaine socio-politique puisqu’il s’attache
à la défense des droits des individus et des peuples.
Le romantisme a connu son apogée en France entre 1820 et 1848. Les écrivains romantiques français ont été particulièrement touchés par le
contexte politique de leur époque. La Révolution et les régimes qui lui ont succédé n’ont pas tenu les promesses de 1789, provoquant un
profond désenchantement. Ils ont alors été victimes du « mal du siècle ».
Les principales caractéristiques du romantisme sont :
l’affirmation de la subjectivité du poète, qui explore son « moi » profond ;
une mise en avant des sentiments, qui reflètent le mal du siècle accablant le poète ;
l’importance de la nature, avec laquelle le poète cherche à entrer en communion ou qu’il perçoit comme un refuge ou une source
d’inspiration ;
un gout pour les personnages légendaires et héroïques ;
la liberté des formes, qui passe par la réhabilitation de certains genres poétiques, le rejet de la tragédie classique, le développement
du roman, etc. ;
la liberté des sujets, l’écrivain pouvant dorénavant parler de tout ;
le mélange des genres, des tons et des niveaux de langue, par souci de vérité.8
Dans la monumentale Préface de Cromwell, le dramaturge, au nom de la « modernité », fait le procès des invraisemblances
de la tradition théâtrale dont la cause réside, selon lui, dans les contraintes qui pèsent sur le théâtre classique.

Tout d’abord, il rejette la règle des trois unités. Celle-ci comprend l’unité de temps (l’action de la pièce doit se dérouler en
un jour), l’unité de lieu (l’action doit se passer en un seul lieu) et l’unité d’action (la pièce ne peut comprendre qu’une seule
intrigue). Hugo estime que les règles d’unités de temps et de lieu, plus particulièrement, enlèvent sa substance au conflit
dramatique. Quant à l’unité d’action, il la maintient car il estime qu’elle est nécessaire. Elle doit cependant être appliquée
avec davantage de souplesse.

Ensuite, il s’insurge contre la loi de séparation des genres (tragédie/comédie), jugeant que celle-ci empêche de rendre
compte de la complexité de la nature humaine. Il promeut le drame, qui mélange les tons et les genres, permettant ainsi de
rendre compte de la « vérité » de la nature humaine.

                    C’est une grande et belle chose, écrivait-il ainsi, que de voir se déployer avec cette largeur un
                    drame où l’art développe puissamment la nature ; un drame où l’action marche à la conclusion,
                    d’une allure ferme et facile, sans diffusion et sans étranglement ; un drame enfin où le poète
                    remplisse pleinement le but multiple de l’art, qui est d’ouvrir au spectateur un double horizon,
                    d’illuminer à la fois l’intérieur et l’extérieur des hommes ; l’extérieur, par leurs discours et leurs
                    actions ; l’intérieur, par les a parte et les monologues ; de croiser, en un mot, dans le même
                    tableau, le drame de la vie et le drame de la conscience. 1

La fonction qu’il assigne au nouveau genre est de saisir les conflits essentiels de la vie tout entière . Pour cela, il est
nécessaire de faire apparaître dans une même oeuvre la beauté et la laideur, la grâce et la monstruosité, la grandeur et la
misère, bref, le sublime et le grotesque.

Hernani, un prototype du drame romantique ?
Hernani est traditionnellement considéré comme le premier drame romantique (Cromwell était injouable et Marion
Delorme avait été interdit). C’est cependant une oeuvre que l’on peut qualifier d’intermédiaire : elle présente quelques
caractéristiques du théâtre classique, mais également, et surtout, un certain nombre de traits nouveaux propres au drame
romantique.

Du théâtre classique, Hugo conserve :

1         l’alexandrin, vers comprenant 12 syllabes (qu’il abandonnera ensuite) ;
2         un sujet historique (même si les dates, les événements et les personnages ne sont pas tous historiques) ;
3         une division en cinq actes ;
4         une première scène d’exposition, qui fournit les éléments essentiels à la compréhension de l’intrigue ;
5         une dernière scène tragique.

La rupture romantique s’opère à plusieurs niveaux :

Les trois unités de temps, de lieu, et d’action ne sont pas respectées : l’histoire se déroule sur environ six mois, dans divers
lieux de Saragosse, à Aix-la-Chapelle et en Aragon, et l’intrigue tient sur deux colonnes vertébrales principales : une histoire
d’amour (trois hommes aiment la même femme) et une histoire d’honneur et de politique (Hernani a juré de tuer le roi pour
venger son père, et le jeune homme, dont la tête est mise à prix, est le chef d’une ce que le sous-titre indiqué par l’auteur dans
son manuscrit, Tres para una, souligne. Hugo respecterait ainsi l’unité d’action. bande de révoltés). Notons tout de même que
l’histoire d’amour semble être l’axe d’une convergence dans la pièce,
1          La règle de bienséance n’est pas respectée. En cela, le théâtre d’Hugo se rapproche du théâtre élisabéthain de la
deuxième moitié du 16e siècle dont le représentant majeur est Shakespeare. L’action commence dans la chambre de doña Sol,
c’est-à-dire un lieu strictement privé et intime, et se termine avec la mort de trois personnages sur scène alors que, dans le
théâtre classique, les décès ne pouvaient être représentés.
2          Hugo alterne les genres et les tons : certaines scènes sont comiques, d’autres lyriques (surtout les monologues),
d’autres encore épiques (c’est-à-dire propres à l’épopée, qui relatent des faits héroïques). Cela, d’une part dynamise le texte
et le jeu des acteurs, d’autre part rend la pièce plus « vraie » dans la peinture de la nature humaine. Hugo recherche ici encore
la liberté et la vérité.
3        Le style de l’auteur, qui donne au texte sa vitalité, rompt également avec les règles classiques. S’il utilise
l’alexandrin, on constate qu’il le malmène. Les vers sont souvent coupés et leur structure est parfois ternaire (4+4+4), ce qui,
à l’époque, est tout à fait révolutionnaire et deviendra ensuite une des caractéristiques principales du romantisme.
4         Les didascalies, très nombreuses, indiquent l’importance de la théâtralité de l’oeuvre. Dans Hernani, les paroles
des personnages sont importantes, mais leurs actes aussi, alors que le théâtre classique est souvent prioritairement centré sur
la langue et le discours.
La « bataille d’Hernani »
Écrit en 27 jours après l’interdiction par la censure de Marion Delorme, Hernani fut, dès son sa conception, un réel combat
pour Victor Hugo qui cherchait à faire triompher le drame romantique. En effet, avant même sa première représentation, cette
pièce déchaîna les passions – le texte avait été divulgué par un censeur. Mais, malgré les réticences du pouvoir – menacé par
toute nouveauté –, Hugo, avide de revanche, ne se laissa pas démonter.

1         Contrairement à ce qu’on a pu dire, la première de la pièce, le 25 février 1830, fut un réel succès et la célèbre
bataille dans le public, affrontant les anciens (les classiques) et les modernes (la jeune génération romantique), ne
commença réellement qu’avec la deuxième représentation et ne battit son plein que durant le mois de mars, à tel point
qu’on peut dire que le spectacle n’était pas seulement sur scène, mais également dans la salle (hurlements, coups,
interventions policières, etc.). Hernani devint un évènement, comme le fut Le Cid de Corneille en son temps. D’ailleurs, pour
preuve de sa réussite, quatre parodies de la pièce virent le jour l’année même de sa parution. Dans les années qui suivirent, la
pièce verra son succès s’estomper, puis, après son interdiction sous le Second Empire, fera à nouveau un triomphe en 1877
avec Mounet-Sully et Sarah Bernhardt. Depuis, elle est régulièrement mise en scène. Excepté le triomphe fait à Ruy Blas en
1838, Hernani reste un succès inégalé dans la production de Victor Hugo. En outre, c’est à l’aune de ce premier drame
romantique que les critiques ont par la suite jugée toute la production théâtrale des dramaturges romantiques.

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  • 1. UNIVERSITÉ IBN Tofail MASTER : Didactique langage et littérature Matière : Méthode de recherche et travail universitaire Compte rendu de lecture HERNANI VICTOR HUGO Préparé par : Remis au : PR RIZK Année universitaire : 2012 /2013
  • 2. PLAN : I/. RÉSUMÉ II/. ÉTUDE DES PERSONNAGES Hernani / Jean d’Aragon Doña Sol Don Ruy Gomez de Silva Don Carlos III/. CLÉS DE LECTURE 1. Contexte historique : nationalisme et libéralisme 2. L’éclosion d’un nouveau genre : le drame romantique 3. Hernani, un prototype du drame romantique ? 4. La « bataille d’Hernani »
  • 3. Poète, romancier, dramaturge et homme politique, Victor Hugo (1802-1885) est l’écrivain emblématique du romantisme français. Élu « chef de file des romantiques », il mena également une vie politiquement engagée, intervenant dans de grandes causes comme l’abolition de la peine de mort. Durant le Second Empire, il fut contraint à l’exil (1851-1870), durant lequel il écrivit notamment son roman Les Misérables. À sa mort en 1885, la République lui organisa des obsèques nationales grandioses et il fut célébré par le peuple comme « le plus grand écrivain français ». UN DRAME ROMANTIQUE : TROIS HOMMES POUR UNE FEMME Hernani (1830), drame en cinq actes et en vers, provoqua une « bataille » entre les anciens et les modernes, à l’instar du célèbre Cid de Corneille. Hugo souhaitait, avec cette pièce, faire triompher une nouvelle esthétique théâtrale, le drame romantique, et force est de constater, en effet, que Hernani envoie valser les règles du théâtre classique. Le sous-titre de l’intrigue, Tres para una, résume bien l’argument principal de la pièce – trois hommes aiment la même femme : don Carlos, son oncle, don Ruy Gomez, futur empereur, et Hernani, jeune marginal dont dona Sol est amoureuse –, mais n’en montre pas toute la complexité. 1. RÉSUMÉ Acte I : LE ROI Don Carlos s’introduit incognito dans la chambre de Doña Sol en se faisant passer pour son amant, Hernani. La duègne consent, en échange d’argent, à le cacher dans une armoire. (scène 1) Hernani et doña Sol se retrouvent ensuite dans la chambre. Le jeune homme lui fait des déclarations enflammées, or doña Sol doit épouser son oncle, don Ruy Gomez. La jeune fille exprime son désir de suivre son amant et de partager sa vie de proscrit. Hernani évoque, quant à lui, sa promesse de tuer le roi de Castille, don Carlos, pour venger son père que le père du roi a jadis assassiné. C’est alors que don Carlos sort de l’armoire et déclare lui aussi son amour à doña Sol. On frappe à la porte. Don Ruy Gomez entre et est indigné de voir deux hommes dans la chambre de sa fiancée. Don Carlos révèle alors qu’il est le roi d’Espagne et prétend qu’il se trouve au château pour annoncer la mort de l’empereur. Hernani et doña Sol se donnent rendez-vous à minuit, mais le roi surprend leur conversation. (scène 3) Hernani, reparti seul, entame un monologue sur la vengeance qu’il doit accomplir au nom de son père. (scène 4) Acte II : LE BANDIT La nuit, devant le palais de don Ruy Gomez, le roi se tient en embuscade avec ses courtisans afin de surprendre les amants. (scène 1) Faignant d’être Hernani, il parvient à rencontrer doña Sol. Il lui propose une vie de reine, mais elle refuse de l’épouser et appelle à son secours Hernani, qui arrive et l’enlace. (scène 2) Ce dernier propose au roi un combat loyal ; cependant, comme celui-ci refuse, Hernani le laisse partir, renonçant à ce qui serait un vil assassinat. Don Carlos menace Hernani : il sera poursuivi dans tout l’Empire. (scène 3) Hernani, sachant qu’il est un danger pour doña Sol, remet en question leur décision de fuir, mais elle s’y tient car tout lui est égal, pourvu qu’elle reste avec son amant. (scène 4). Acte III : LE VIEILLARD C’est le jour du mariage. Doña Sol et son futur époux discutent, mais ils sont interrompus par un page qui les informe de l’arrivée d’un pèlerin, et par l’annonce que la troupe de rebelles a été arrêtée et qu’Hernani est mort. (scène 1) Don Ruy Gomez rejoint le visiteur, conformément aux lois de l’hospitalité, puis doña Sol arrive à son tour. (scène 2) Voyant la jeune femme vêtue d’une robe de mariée, le pèlerin révèle son identité : il est Hernani. Désespéré de voir que Doña Sol a résolu d’épouser son oncle et l’a oublié, il souhaite qu’on l’arrête et qu’on le livre (sa tête est mise à prix). Don Ruy Gomez refuse car, bien que bandit, Hernani est son hôte. Il décide de le protéger. (scène 3) Lorsqu’Hernani et doña Sol se retrouvent seuls, ils se déclarent à nouveau leur amour. S’il le faut, ils mourront ensemble. L’oncle de la jeune fille entre alors qu’ils échangent des regards langoureux. (scène 4) Don Ruy Gomez déplore le peu de respect d’Hernani, son manque d’honneur et la dégénérescence du monde. Hernani souhaite se sacrifier pour prouver la bonne foi de sa maitresse. Mais, à l’annonce de l’arrivée du roi, don Ruy Gomez se plie à nouveau à son devoir d’hospitalité et cache Hernani. (scène 5) Le roi pense que don Ruy Gomez le trahit en protégeant volontairement le criminel. Après avoir passé en revue les portraits de ses illustres ancêtres afin de justifier son acte, le vieillard explique à son souverain que, pour lui, les lois de l’hospitalité sont sacrées. Il offre donc sa propre tête à la place de celle de son hôte. Mais doña Sol proteste et, finalement, c’est elle que le roi emmène. (Scène 6) Quant à Hernani et don Ruy Gomez, alors qu’ils pourraient résoudre leur différend par un duel, ils
  • 4. décident de s’allier afin de sauver doña Sol. Ils passent un accord : lorsque la jeune fille sera sauvée et que sonnera le cor, Hernani devra mourir.
  • 5. Acte IV : LE TOMBEAU Dans les caveaux de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle, alors que les Grands Électeurs vont bientôt choisir le nouvel empereur, don Carlos apprend d’un de ses courtisans les noms des conspirateurs qui comptent le faire tomber s’il est élu. Le roi ignore encore que don Ruy Gomez et Hernani en font partie. (scène 1) Seul, don Carlos s’adresse à Charlemagne, puis entre dans le tombeau de ce dernier pour lui demander conseil quant à la façon de gouverner. Arrivent ensuite les conjurés. (scène 2) Ceux-ci choisissent l’homme qui sera chargé d’assassiner don Carlos : le sort désigne Hernani. Trois coups de canon retentissent, annonçant que don Carlos a été élu empereur. (scène 3) Le nouvel empereur sort alors du tombeau et fait cerner les conjurés par ses soldats. Hernani, qui est épargné, insiste pour se joindre au groupe et révèle sa véritable identité : il est en fait le duc Jean d’Aragon, banni par le père de l’empereur. Doña Sol supplie don Carlos de laisser la vie sauve à son amant. L’empereur accepte, donne la jeune fille à Hernani, le fait chevalier et pardonne à tous les autres. En échange, Hernani renonce à le tuer. (scène 4) À nouveau seul, don Carlos se recueille devant le tombeau de Charlemagne et lui demande s’il a bien agi. Acte V : LA NOCE De jeunes seigneurs discutent du mariage de doña Sol et Hernani. Alors qu’ils repèrent une personne vêtue de noir, les époux arrivent. (Scène 1) Les seigneurs félicitent les jeunes mariés, puis s’en vont. (Scène 2) Les amants, seuls, évoquent leur amour et leur joie d’être enfin unis lorsque le cor sonne. Pour cacher son trouble, Hernani demande à doña Sol d’aller chercher une fiole dont le contenu pourrait le soulager. (Scène 3) Hernani se lamente, tandis qu’entre l’homme vêtu de noir, don Ruy Gomez. (Scène 4) Celui-ci rappelle son pacte à Hernani et lui propose de choisir sa mort : lame ou poison. Le jeune duc choisit le poison. Doña Sol revient. (Scène 5) Découvrant la situation, elle veut à tout prix défendre son amant et se montre tour à tour agressive et plaintive, allant jusqu’à demander pitié pour son époux. Elle s’empare finalement la fiole de poison et en boit la moitié. Hernani vide le reste de la fiole. Les époux meurent ainsi côte à côte, lui d’abord, elle ensuite. Épouvanté, don Ruy Gomez se tue. (Scène 6) Hernani / Jean d’Aragon Hernani, qui est en vérité Jean d’Aragon, fils d’un Grand banni par le roi précédent, est un personnage marginal : il vit comme un bandit dans les montagnes d’Aragon. Personnage romantique par excellence, tourmenté et fougueux, son moteur principal est le désir : désir pour doña Sol, qu’il aime d’un amour fou, et désir de vengeance contre le roi, don Carlos, dont le père a banni le sien. Il accorde une grande importance à l’honneur, mais hésite tout de même au moment d’honorer le pacte fatal qu’il a conclu avec don Ruy Gomez. Doña Sol Seul personnage féminin (excepté la duègne de la première scène) et objet de passions rivales, doña Sol est également une héroïne romantique. Elle est promise à son oncle, mais reste follement amoureuse d’Hernani, qu’elle rencontre en cachette. Elle est prête à tout pour lui. Sa passion la mène à résister aux exigences de son rang et de son sang, aux convenances, au roi, etc. De tous les personnages du drame, doña Sol est celui qui fait le plus preuve de persévérance : dès le début de la pièce, elle accepte de suivre Hernani et de mener avec lui une existence de proscrit, et elle se tiendra à cette décision, jusqu’à mourir avec lui. Don Ruy Gomez de Silva Don Ruy Carlos est un Grand d’Espagne, c’est-à-dire une des personnes les plus nobles du royaume. Âgé, il souhaite épouser sa nièce, doña Sol, contre son gré. Il accorde une énorme importance au lignage et aux valeurs anciennes, l’honneur et l’hospitalité, qu’il respecte jusqu’au bout, même contre son roi, contre le bonheur de sa nièce et contre lui-même, puisque c’est en vertu des lois sacrées de l’hospitalité qu’il protège Hernani, pourtant son rival amoureux. Il sera la cause de la perte des deux amants par le pacte qu’il a conclu avec Hernani. Don Carlos Don Carlos se présente d’abord, comme Hernani, sous une fausse identité, qu’il révèle cependant plus vite. Il est le roi d’Espagne et, à la fin du drame, l’Empereur Charles Quint. Ce changement de statut s’accompagne d’un changement de caractère : belliqueux, ambitieux, vengeur, intransigeant et violent dans la première partie de l’oeuvre, il adopte ensuite un comportement plus mesuré et devient clément. Il rétablit alors le statut d’Hernani/Jean d’Aragon et lui permet d’épouser celle qu’il aime, bien que ce soit également celle dont il voulait faire sa favorite. 3. CLÉS DE LECTURE Contexte historique : nationalisme et libéralisme
  • 6. Le 19e siècle fut un siècle mouvementé pour l’Europe entière. C’est tout d’abord le siècle de l’ éveil des nationalités : se libérant des oppresseurs étrangers (dont fait partie la France sous Napoléon), les peuples réclament la reconnaissance de leur identité propre et de leurs droits. On voit alors se constituer de nouveaux États européens, comme l’Italie ou l’Allemagne. Cela a évidemment des conséquences sur la pensée et la littérature française : naissance du sentiment national et curiosité vis- à-vis des réalités étrangères. En France, dès la Révolution de 1789, le nationalisme est intimement lié au libéralisme : la liberté, qui signifie l’affranchissement des tyrannies étrangères, est d’abord la revendication du pays. Celui-ci sort à peine de la Révolution–qui a provoqué la chute de l’Ancien Régime, modifié la société et suscité de grands espoirs de réformes et de libertés -, des guerres napoléoniennes et de la Restauration. Cependant, la liberté du peuple apparaît aussi comme étant inséparable des libertés individuelles, qui sont encore très restreintes. Parmi ces libertés, les écrivains français se préoccupent surtout de la liberté de pensée et de la liberté d’expression, pour lesquelles ils luttent tout au long du 19e siècle, contre les institutions répressives telles que la censure. Chateaubriand, le premier, combat les embûches à la liberté d’expression, puis il est suivi par les écrivains romantiques, dont Victor Hugo est le chef de file. Entre 1827 et 1830, le romantisme se rallie ainsi au libéralisme politique. Dès lors, le combat esthétique des romantiques en faveur de la liberté (liberté des formes, des genres, des sujets, etc.) se double d’une dimension idéologique : « le romantisme n’est, à tout prendre, que le libéralisme en littérature », explique Hugo dans la Préface d’Hernani. L’éclosion d’un nouveau genre : le drame romantique En littérature, le combat des auteurs romantiques pour la liberté s’est surtout porté sur le théâtre. D’avis que le théâtre, depuis Marivaux et Beaumarchais, n’avait rien produit de nouveau, ils en ont fait le bastion de la tradition à abattre. Ils ont ainsi mis à mal les principes, les règles et les bienséances de la tragédie classique afin d’opérer une véritable révolution des formes et des genres, et de donner naissance à une nouvelle esthétique théâtrale : le drame romantique. En 1827, Hugo publie Cromwell, drame injouable en raison de sa longueur, accompagné d’une Préface qui fera date dans l’histoire du théâtre. Cette Préface est le reflet des espérances de la génération romantique de 1830. Hugo y définit les caractéristiques du drame romantique. Bon à savoir : le romantisme Le romantisme est un mouvement artistique et littéraire européen né en Allemagne et en Angleterre à la fin du 18e siècle en réaction à la philosophie des Lumières, qui prônait la suprématie de la raison. Ce mouvement touche aussi au domaine socio-politique puisqu’il s’attache à la défense des droits des individus et des peuples. Le romantisme a connu son apogée en France entre 1820 et 1848. Les écrivains romantiques français ont été particulièrement touchés par le contexte politique de leur époque. La Révolution et les régimes qui lui ont succédé n’ont pas tenu les promesses de 1789, provoquant un profond désenchantement. Ils ont alors été victimes du « mal du siècle ». Les principales caractéristiques du romantisme sont : l’affirmation de la subjectivité du poète, qui explore son « moi » profond ; une mise en avant des sentiments, qui reflètent le mal du siècle accablant le poète ; l’importance de la nature, avec laquelle le poète cherche à entrer en communion ou qu’il perçoit comme un refuge ou une source d’inspiration ; un gout pour les personnages légendaires et héroïques ; la liberté des formes, qui passe par la réhabilitation de certains genres poétiques, le rejet de la tragédie classique, le développement du roman, etc. ; la liberté des sujets, l’écrivain pouvant dorénavant parler de tout ; le mélange des genres, des tons et des niveaux de langue, par souci de vérité.8
  • 7. Dans la monumentale Préface de Cromwell, le dramaturge, au nom de la « modernité », fait le procès des invraisemblances de la tradition théâtrale dont la cause réside, selon lui, dans les contraintes qui pèsent sur le théâtre classique. Tout d’abord, il rejette la règle des trois unités. Celle-ci comprend l’unité de temps (l’action de la pièce doit se dérouler en un jour), l’unité de lieu (l’action doit se passer en un seul lieu) et l’unité d’action (la pièce ne peut comprendre qu’une seule intrigue). Hugo estime que les règles d’unités de temps et de lieu, plus particulièrement, enlèvent sa substance au conflit dramatique. Quant à l’unité d’action, il la maintient car il estime qu’elle est nécessaire. Elle doit cependant être appliquée avec davantage de souplesse. Ensuite, il s’insurge contre la loi de séparation des genres (tragédie/comédie), jugeant que celle-ci empêche de rendre compte de la complexité de la nature humaine. Il promeut le drame, qui mélange les tons et les genres, permettant ainsi de rendre compte de la « vérité » de la nature humaine. C’est une grande et belle chose, écrivait-il ainsi, que de voir se déployer avec cette largeur un drame où l’art développe puissamment la nature ; un drame où l’action marche à la conclusion, d’une allure ferme et facile, sans diffusion et sans étranglement ; un drame enfin où le poète remplisse pleinement le but multiple de l’art, qui est d’ouvrir au spectateur un double horizon, d’illuminer à la fois l’intérieur et l’extérieur des hommes ; l’extérieur, par leurs discours et leurs actions ; l’intérieur, par les a parte et les monologues ; de croiser, en un mot, dans le même tableau, le drame de la vie et le drame de la conscience. 1 La fonction qu’il assigne au nouveau genre est de saisir les conflits essentiels de la vie tout entière . Pour cela, il est nécessaire de faire apparaître dans une même oeuvre la beauté et la laideur, la grâce et la monstruosité, la grandeur et la misère, bref, le sublime et le grotesque. Hernani, un prototype du drame romantique ? Hernani est traditionnellement considéré comme le premier drame romantique (Cromwell était injouable et Marion Delorme avait été interdit). C’est cependant une oeuvre que l’on peut qualifier d’intermédiaire : elle présente quelques caractéristiques du théâtre classique, mais également, et surtout, un certain nombre de traits nouveaux propres au drame romantique. Du théâtre classique, Hugo conserve : 1 l’alexandrin, vers comprenant 12 syllabes (qu’il abandonnera ensuite) ; 2 un sujet historique (même si les dates, les événements et les personnages ne sont pas tous historiques) ; 3 une division en cinq actes ; 4 une première scène d’exposition, qui fournit les éléments essentiels à la compréhension de l’intrigue ; 5 une dernière scène tragique. La rupture romantique s’opère à plusieurs niveaux : Les trois unités de temps, de lieu, et d’action ne sont pas respectées : l’histoire se déroule sur environ six mois, dans divers lieux de Saragosse, à Aix-la-Chapelle et en Aragon, et l’intrigue tient sur deux colonnes vertébrales principales : une histoire d’amour (trois hommes aiment la même femme) et une histoire d’honneur et de politique (Hernani a juré de tuer le roi pour venger son père, et le jeune homme, dont la tête est mise à prix, est le chef d’une ce que le sous-titre indiqué par l’auteur dans son manuscrit, Tres para una, souligne. Hugo respecterait ainsi l’unité d’action. bande de révoltés). Notons tout de même que l’histoire d’amour semble être l’axe d’une convergence dans la pièce, 1 La règle de bienséance n’est pas respectée. En cela, le théâtre d’Hugo se rapproche du théâtre élisabéthain de la deuxième moitié du 16e siècle dont le représentant majeur est Shakespeare. L’action commence dans la chambre de doña Sol, c’est-à-dire un lieu strictement privé et intime, et se termine avec la mort de trois personnages sur scène alors que, dans le théâtre classique, les décès ne pouvaient être représentés. 2 Hugo alterne les genres et les tons : certaines scènes sont comiques, d’autres lyriques (surtout les monologues), d’autres encore épiques (c’est-à-dire propres à l’épopée, qui relatent des faits héroïques). Cela, d’une part dynamise le texte et le jeu des acteurs, d’autre part rend la pièce plus « vraie » dans la peinture de la nature humaine. Hugo recherche ici encore la liberté et la vérité. 3 Le style de l’auteur, qui donne au texte sa vitalité, rompt également avec les règles classiques. S’il utilise l’alexandrin, on constate qu’il le malmène. Les vers sont souvent coupés et leur structure est parfois ternaire (4+4+4), ce qui, à l’époque, est tout à fait révolutionnaire et deviendra ensuite une des caractéristiques principales du romantisme. 4 Les didascalies, très nombreuses, indiquent l’importance de la théâtralité de l’oeuvre. Dans Hernani, les paroles des personnages sont importantes, mais leurs actes aussi, alors que le théâtre classique est souvent prioritairement centré sur la langue et le discours.
  • 8. La « bataille d’Hernani » Écrit en 27 jours après l’interdiction par la censure de Marion Delorme, Hernani fut, dès son sa conception, un réel combat pour Victor Hugo qui cherchait à faire triompher le drame romantique. En effet, avant même sa première représentation, cette pièce déchaîna les passions – le texte avait été divulgué par un censeur. Mais, malgré les réticences du pouvoir – menacé par toute nouveauté –, Hugo, avide de revanche, ne se laissa pas démonter. 1 Contrairement à ce qu’on a pu dire, la première de la pièce, le 25 février 1830, fut un réel succès et la célèbre bataille dans le public, affrontant les anciens (les classiques) et les modernes (la jeune génération romantique), ne commença réellement qu’avec la deuxième représentation et ne battit son plein que durant le mois de mars, à tel point qu’on peut dire que le spectacle n’était pas seulement sur scène, mais également dans la salle (hurlements, coups, interventions policières, etc.). Hernani devint un évènement, comme le fut Le Cid de Corneille en son temps. D’ailleurs, pour preuve de sa réussite, quatre parodies de la pièce virent le jour l’année même de sa parution. Dans les années qui suivirent, la pièce verra son succès s’estomper, puis, après son interdiction sous le Second Empire, fera à nouveau un triomphe en 1877 avec Mounet-Sully et Sarah Bernhardt. Depuis, elle est régulièrement mise en scène. Excepté le triomphe fait à Ruy Blas en 1838, Hernani reste un succès inégalé dans la production de Victor Hugo. En outre, c’est à l’aune de ce premier drame romantique que les critiques ont par la suite jugée toute la production théâtrale des dramaturges romantiques.