9. Les demoiselles d’Avignon.
Pablo Ruiz Picasso.
Les Demoiselles
d’Avignon.
1907.
Huile sur toile.
2,4 X 2,34 m.
Museum of
Modern
Art, New York.
10. Les demoiselles d’Avignon.
Que voit-on ?
Dénotation.
Connotation.
Interprétation.
Jugement de valeur.
Les éléments représentés :
Cinq femmes nues, fixant le
spectateur, aux corps
anguleux, deux visages
bariolés, quatre femmes
debout et de face et une
assise et le corps de
dos, des mouvements de
bras.
Des tentures ou des draps, une
nature morte de fruits.
Scène d’intérieur.
• Les éléments plastiques :
Très peu de profondeur, très
peu de perspective.
Des couleurs…
24. LE CUBISME SYNTHÉTIQUE
Le cubisme
s'est dirigé dans
une période
synthétiqueentr
e, 1912 et
1919, révélant
le célèbre
peintre Juan
Gris. Opposé
au cubisme
analytique, cett
e phase
introduit le
collage dans
l'œuvre.
33. En
1914, Apollinaire Il n'y manque aucun
s'engage, manière symbole, canon, cart
de démontrer e, sabre, ni le rehaut
combien il est en bleu, blanc, rouge.
Français, malgré Mais le tracé refuse
son nom polonais la virtuosité, les
et ses origines disproportions
cosmopolites - et troublent le regard et
donc suspectes il devient impossible
aux yeux d'une de tenir l'œuvre pour
opinion publique un hommage, fut-il
violemment amical. Picasso, que
nationaliste. Son sa nationalité
ami Picasso espagnole tient à
témoigne de son l'écart de la
ardeur, non sans mobilisation, ne cède
ironie. Le dessin pas à l'exaltation
pastiche les ultra-patriotique à
images d'Épinal à laquelle Apollinaire
la gloire de se montre sensible.
Napoléon.
34. La guerre de 1914-1918 opéra une rupture sans
précédent dans l’histoire des manières de
combattre : la guerre de mouvement, où deux
armées s’affrontaient face à face, laissait place à
un conflit de position, enterré, long, presque à
distance avec l’utilisation d’armes de longue
portée (obus, chars, fusils, mitraillettes…). La
masse seule des soldats comptait devant une
puissance de frappe détruisant et tuant à grande
échelle.
36. Cliché et légende
d'Yves Troadec :
Verdun - Un agent de
liaison qui préfère
emprunter la
tranchée pleine de
boue et prendre un
bain de pieds plutôt
que de se faire
démolir le portrait sur
la plaine.
40. Cliché et légende d'Yves Troadec : Verdun.
Carrefour des routes de Bras et de
Froideterre. Douilles de 75.
13 novembre 1917.
Carnet de guerre de Gaston Certain:" Le canon tonne s'en cesse et le soir quand l'eau ne tombe pas on regarde toutes
ces flammes qui sortent de terre. On se demande vraiment comment les hommes qui sont en avant peuvent résister à
toutes ces explosions qui font trembler la terre jusque sous nos pieds et pourtant nous sommes à 5 km. »
41. Les représentations traditionnelles (portraits
individuels de généraux, mêlée des deux
armées, champs de bataille, héros en action)
ne convenaient plus à cette forme
dépersonnalisée de combat : la bravoure
individuelle n’était plus de mise .
42. Bataille d'Austerlitz.
Auteur : François GERARD (1770-1837)
Date de création : 1810
Date représentée : 2 décembre 1805
Dimensions : Hauteur 510 cm - Largeur 958 cm
Technique et autres indications : peinture à l'huile sur toile
47. l’ampleur des aménagements militaires et des destructions engendrait des paysages
apocalyptiques. Comme le disait Félix Vallotton, peintre officiel envoyé par l’armée sur
le front pour constituer une iconographie de la guerre : « Peindre la guerre
aujourd’hui, ce n’est plus peindre des tableaux de bataille ».
58. Dans Verdun, dessin du front, l’absence de perspective
unique, le morcellement des points de fuite et la contraction
spatiale produite par la juxtaposition d’éléments figuratifs
engendrent un manque de repères qui transcrit
formellement la confusion extrême, l’aspect
méconnaissable des paysages et des sites. La représentation
fragmentée des objets en formes simplifiées et
ouvertes, c’est-à-dire sans contours bien délimités, traduit
quant à elle la dislocation physique des choses, leur
désintégration par les puissances destructrices.
59. Les solutions plastiques cubistes servirent également à
transcrire l’expérience des combats, la déshumanisation que
Léger ressentait. « Le fait de se battre, l’action individuelle
est réduite au minimum. Tu pousses la gâchette d’un fusil et
tu tires sans voir. Tu agis à peine. En somme on arrive à
ceci : des êtres humains agissant dans l’inconscient et
faisant agir des machines. »
Les personnages de Soldats assis sont essentiellement
composés de formes géométriques : cubes pour la tête et le
tronc, tubes circulaires pour les bras, cercles pour les
articulations. Ils sont ainsi dépersonnalisés, réduits à une
épure reproductible à l’infini.
61. Carnet de guerre de
D'abord ce sont
Gaston Certain :
des français on
"Les morts
les voit par
empestent l'air, on
dizaines au pied
commence à les
des meules de
enterrer. [...] Le
grains, puis
spectacle est
viennent les
terrible, le sol
tombes de ceux
remplit de trous
qu'on a pu
d'obus et jonché de
enterrer."
cadavres.
8 septembre 1914
63. Carnet de guerre de
Gaston Certain :
"Toujours est-il qu'une
balle vient de passer à
10 centimètre de mon
coude tout en éraflant la
tranchée. Le sous off. me
tire alors par les jambes
car je ne mettais même
pas aperçu de la balle et
me força à descendre un
peu vite."
5 janvier 1916
65. Éléments mécaniques dessinés sur une autre
feuille, traduisent exactement cette impression de faire
les « mêmes gestes aux mêmes endroits », cette
« mécanisation dont toute émotion est exclue » que
Léger a décrite dans ses lettres. Bien plus, réduits par
cette guerre à l’état de machines à tuer à l’égal des
autres armes, les hommes ont tellement perdu de
leur individualité et de leur humanité qu’ils se
confondent avec leur environnement dans Soldats
dans une maison en ruines. Le recours à un répertoire
formel similaire pour représenter les ruines et les
soldats produit une équivalence visuelle qui les
transforme en choses inanimées, presque en
accessoires matériels.
67. Tout autre chose : non plus la vision
héroïque, presque légendaire du duel en plein
ciel, mais ce qu'en voit l'homme du commun, le
fantassin - ici le brancardier Léger. En 1916 et
1917, il peint à plusieurs reprises des débris
d'aéroplanes, français ou allemands selon les cas.
Au rêve de légèreté succède la vision de la machine
brisée, de l'enchevêtrement des poutrelles et des
haubans, des ailes fracassées. Léger ne montre pas
ce que révèle souvent la photographie, les cadavres
mutilés et carbonisés des pilotes abattus. Il ne lui est
pas nécessaire d'entrer dans ces détails. En
employant le cubisme à rebours, il suggère avec
assez de force la violence du choc.
70. Pas plus que Léger, dont il est proche, Mare n'accumule les motifs macabres.
Quand il en figure un, c'est à distance, avec une grande sobriété, celle que permet
le cubisme.
De la mort, il montre l'effet, non les détails, mais l'épaisse fumée noire qui s'élève
de l'impact suffit, symboliquement, à l'expression de la détresse.
77. La guerre de 1914-1918 ne fut pas la guerre
éclair tant attendue. Elle s’enlisa rapidement
et, avec la mise en place des tranchées, devint
une guerre de position où la survie dépendait
essentiellement du silence et de l’invisibilité des
troupes. Il fallait voir sans être vu, surveiller
sans se faire repérer pour anticiper les
mouvements de l’ennemi ou attaquer sans
envoyer à l’aveuglette projectiles et soldats. Le
camouflage n’était plus une ruse ponctuelle
comme dans les guerres de mouvement, mais un
moyen de combat offensif et défensif.
79. Gertrude Stein rapporte que, devant le premier canon
camouflé qu’il vit, Picasso s’écria : « C’est nous qui avons fait
cela. » Comment Picasso a-t-il pu attribuer la paternité d’une
peinture utilitaire au cubisme ? Par quelle opération
mystérieuse le cubisme se retrouva-t-il sur du matériel
militaire ?
Guirand de Scevola donna lui-même les premiers éléments
d’explication : « J’avais, pour déformer totalement
l’objet, employé les moyens que les cubistes utilisent pour le
représenter, ce qui me permit par la suite d’engager dans ma
section quelques peintres aptes à dénaturer n’importe quelle
forme. » Les cubistes et le camouflage poursuivaient un but
similaire : intégrer la figure au fond, l’objet à son
environnement.
83. Le tableau, pour qui
n’est pas familiarisé Le matériel
avec cette militaire était peint
déconstruction d’aplats de couleur
visuelle, peut unie indépendants
apparaître comme des formes et de
une surface l’éclairage de
couverte d’aplats manière à abolir le
colorés légèrement volume de
modulés, s’apparent l’objet, à rendre ses
er à de l’abstraction. contours
Une « illisibilité » indéchiffrables et à
qui rejoint l’amalgamer à son
l’invisibilité environnement. Les
recherchée par le camaïeux de
camouflage. brun, de gris et de
vert, couleurs les
plus communes
dans la nature et les
moins
visibles, servaient
au mieux cette
recherche de
fusion.
84. L’utilisation du style cubiste et des peintres
cubistes paraît particulièrement impertinente
lorsque l’on sait que, quelques années plus tôt, leur
production avait été taxée de « peinture
boche », parce que leur marchand et leurs
acheteurs étaient allemands. Après avoir été
accusés de collaborer avec l’ennemi, ils devenaient
des patriotes indispensables à l’effort de guerre.
85. L’une des révélations de Léger pendant la guerre est le constat que
le monde a changé. Tout va plus vite, tout est plus complexe, les
sensations sont multipliées. C’est l’avènement de la modernité que
Léger cherche à exprimer par des moyens plastiques appropriés, en
peinture, mais aussi au cinéma. Dès sa démobilisation qui devient
effective à l’été 1918, Léger peint des tableaux de grand format qui
donnent à voir la ville moderne, une ville qui lui a tant manqué
pendant ses années au Front et qu’il pense pouvoir aborder avec
un regard nouveau. « Ne t’étonne pas que j’aie l’irrésistible désir
de la revoir et de la regarder. Il faut être ici pour
l’apprécier », écrivait-il depuis les tranchées à propos de Paris à
son ami Poughon (lettre du 12 août 1915).
La ville qu’il peint est une ville entièrement moderne, avec des
couleurs vives, de la lumière, des lettres et des signes échappés
d’affiches et de panneaux de circulation.