1. LA CRISE MONDIALE
I. DEFINITION
Une crise est un événement social ou personnel qui se caractérise par un paroxysme des souffrances, des
contradictions ou des incertitudes, pouvant produire des explosions de violence ou de révolte. La crise est
une rupture d'équilibre.
Dans le domaine médical, une crise est un changement rapide et grave intervenant dans l'état de santé d'un
malade ou d'une personne apparemment en bonne santé. Exemples : Crise cardiaque, crise d'asthme.
En psychologie, la crise est le paroxysme ou l'exacerbation d'un sentiment. Exemple : crise de désespoir.
Une crise économique est une dégradation brutale de la situation économique d'un pays ou d'une zone
économique, conséquence d'un décalage entre la production et la consommation. Elle se traduit par une forte
augmentation du chômage, par une baisse du PIB (Produit Intérieur Brut), un accroissement du nombre de
faillites, une baisse du pouvoir d'achat…
La crise économique la plus grave de l'histoire moderne, au niveau mondial, a été celle de 1929.
Une récession est une forme légère de crise économique, tandis que la dépression en est une forme plus
profonde.
Une crise politique est un moment important, grave et parfois décisif dans la vie d'une institution. Elle reflète
l'inadéquation manifeste entre l'organisation d'une institution politique ou publique et la réalité. Exemple : crise
ministérielle lors de la chute d'un gouvernement, jusqu'à la constitution d'un nouveau cabinet.
Une crise peut provoquer des manifestations, des grèves, des mouvements sociaux, des émeutes voire une
révolte ou une révolution.
On distingue la crise institutionnelle pouvant déboucher sur une nouvelle forme de régime politique avec
changement de Constitution, de la crise de régime pouvant provoquer une alternance de gouvernement.
II. A chaque pays sa crise
La crise économique est mondiale mais tous les pays ne la vivent de la même manière. Déficit commercial
structurel pour la France, menaces d'inflation en Chine, bulle immobilière en Espagne, consommation en berne
au Royaume-Uni ... Le Journal du Net passe en revue les points d'inquiétude mais aussi les raisons d'espérer
pour huit pays.
1. L'Allemagne, un bon élève mais fragile
L'Allemagne, qui fait figure d'élève modèle de l'Europe, a en effet de quoi faire pâlir d'envie bon nombre de ses
voisins : son taux de chômage, de 7% est l'un des plus faibles de la zone euro. Fin octobre, son excédent
commercial atteignait déjà 101,5 milliards d'euros en cumulé depuis le début de l'année.
Il faut dire que l'Allemagne a fait de gros efforts pour améliorer sa compétitivité : le coût du travail n'a progressé
que de 5,8% entre 2000 et 2010 contre 22,7% en France par exemple. Et comme elle s'est spécialisée sur les
biens à haute valeur ajoutée, le cours élevé de l'euro ne lui pose pas trop de problèmes.
Néanmoins, les Allemands ne peuvent pas rester hermétiques aux problèmes de leurs partenaires européens.
L'indice IFO, qui mesure le climat des affaires, a ainsi baissé pour le quatrième mois consécutif en octobre, à
106,7.
Le "modèle allemand" cache aussi deux fragilités structurelles. D'une part, il repose largement sur
les exportations, qui représentent 36% de son PIB selon la Banque mondiale. Un fort ralentissement de
l'économie mondiale pourrait donc être dramatique pour le pays.
Surtout, à long terme, l'Allemagne sera confronté au défi de sa démographie déclinante : elle devrait perdre
entre 12 et 17 millions d'habitants d'ici 50 ans selon l'office fédéral des statistiques. Bonne nouvelle peut-être pour
le chômage mais pas pour la croissance.
2. 2. La Chine croit mais ne rompt pas
Avec une hausse de 9,5% de son PIB prévue en 2011, la Chine demeure un solide moteur de la croissance
mondiale. Mais cette croissance pourrait bien alimenter un "syndrome Microsoft", sa puissance
économique suscitant l'hostilité de ses partenaires.
Principal point de discorde, sa monnaie. Selon les responsables politiques américains, le yuan serait sous-
évalué d'au moins 25%. Une stratégie destinée à favoriser ses exportations, qui représentent un quart de son
PIB. C'est d'ailleurs une de ses faiblesse : la Chine est particulièrement sensible à l'environnement économique
global. En octobre, le secteur manufacturier chinois a enregistré son plus faible rythme de croissance depuis trois
ans, en raison du ralentissement des commandes.
Autre inquiétude pour le géant asiatique : l'inflation. L'indice des prix à la consommation a augmenté de 5,7%
sur un an en octobre. En deux ans, estime le China Labour Bulletin, les salaires moyens ont augmenté de 50%.
Néanmoins, la Chine présente des attraits incomparables. Les bénéfices des entreprises ont augmenté de 27%
en glissement annuel sur les neuf premiers mois de 2011. Et elle a attiré 9,05 milliards de dollars
d'investissements étrangers en septembre, une hausse de 7,88% sur un an, selon le ministère chinois du
Commerce.
3. En Espagne dans le rouge, emploi et immobilier s'effondrent
L'Espagne ne parvient pas à renouer avec la croissance, engluée dans un chômage de masse et un déficit
public béant (9,3 % du PIB en 2010). En septembre 2011, le taux de chômage a atteint 22,6% de la population
selon Eurostat, le plus haut niveau parmi les pays industrialisés.
La bulle de l'immobilier a été particulièrement gonflée en Espagne, avec une frénésie de constructions et des
prix multipliés par sept entre 1987 et 2007. Avec l'éclatement de la bulle, c'est tout un pan de l'économie
espagnole qui s'est effondré. Le nombre de mises en chantier de logements neufs a été divisé par dix entre 2006
et 2011. Selon le site Spanish Property Insight, les prix de vente réels en septembre se situent en moyenne 22%
en-dessous du prix initialement demandé par le vendeur.
Dernier point d'inquiétude : le système bancaire. En juillet 2011, lors des tests de résistance des
banques européennes jugés pourtant assez accommodants, cinq des huit banques recalées étaient espagnoles.
Selon Standard & Poor's, les banques espagnoles auraient accumulé entre 296 et 313 milliards d'euros d'actifs à
risque depuis le début de la crise. Une véritable bombe à retardement.
4. Les Etats-Unis englués dans les tensions politiques
Les Etats-Unis ont beau jeu de railler l'incapacité des Européens à se mettre d'accord sur un plan de sortie de
crise. Mais c'est bien en partie à cause d'un désaccord politique que le pays a perdu en août son triple
A jusque-là accordé par Standard & Poor's. Une telle crise est susceptible de se reproduire à n'importe quel
moment tant les tensions sont fortes entre les deux camps, surtout à l'approche de l'élection présidentielle fin
2012.
En 2011, la dette brute des Etats-Unis devrait par ailleurs franchir la barre des 100% du PIB selon le FMI. Mais
l'avantage, quand on est maître de la monnaie de réserve mondiale, c'est qu'on est à peu près sûr de trouver
des acquéreurs de bons du Trésor libellés en dollars.
Actuellement, les deux principales préoccupations outre-Atlantique sont le chômage et l'immobilier, dont les prix
se sont effondrés de 20% depuis août 2007, dont 4% rien que l'an dernier selon la Federal Housing Finance
Agency. En septembre 2011, plus de 34% des maisons ont encore été vendues à perte.
Sur le front de l'emploi, l'amélioration est très lente. En octobre 2011, le taux de chômage a reculé de 0,1 point
par rapport au mois précédent, à 9%, un chiffre inférieur aux attentes. Le secteur privé a créé 104 000 postes
mais dans le même temps le public en a perdu 24 000.
5. La France abonnée aux déficits
Malgré deux plans d'austérité annoncés depuis août, la France a pour l'instant été épargnée par les mesures
drastiques prises en Espagne, au Portugal ou au Royaume-Uni. Mais l'agence d'évaluation financière Moody's a
annoncé en octobre l'avoir mise sous surveillance, "en raison d'une détérioration de ses ratios d'endettement".
La dette brute de la France, qui pesait 66,7% du PIB en 2005, s'élèvera à 86,8% du PIB fin 2011.
La prévision de croissance pour 2012 a, elle, été revue à 1% pour 2012. La consommation des ménages reste
relativement bonne, quasiment à son niveau d'avant crise.
3. En revanche, la France est fragilisée par une balance commerciale structurellement déficitaire. Entre janvier et
septembre 2011, le pays a accumulé 54,18 milliards d'euros de déficit commercial, contre 37,83 milliards sur la
même période l'an dernier. Enfin, en septembre, le nombre de demandeurs d'emplois a augmenté de 0,9 % sur
un mois.
Dans ce contexte, la France continue d'emprunter à des taux assez favorables : 3,25% pour les bons à 10 ans
lors de sa dernière émission, le 3 novembre. Ce qui rassure entre autres les investisseurs ? La capacité de la
France à lever des impôts.
6. Le Japon durement touché par le tsunami
L'économie japonaise, qui s'était reprise de 4% en 2010, replongera vraisemblablement dans la récession en
2011 avec une baisse de 0,1% de son PIB selon les prévisions du FMI. Le tsunami, qui a ravagé le nord-est du
pays en mars, est naturellement le principal responsable de cette rechute. Reste que la croissance japonaise est
quasi atone depuis le début des années 1990. Un cas typique de "stagflation", où les prix et les salaires ne
progressent plus.
Avec une dette équivalente à 220% de son PIB en 2010, le Japon est tout simplement le pays le plus endetté du
monde. Et ce n'est pas prêt de s'arranger : pour 2011, le FMI prévoit un déficit courant de 10,3% du PIB. Comme
les possibilités de compression des dépenses sont limitées, le gouvernement devra miser sur des hausses
d'impôts pour remonter la pente. Le FMI suggère par exemple aux Japonais de tripler leur taux de TVA,
actuellement à 5%.
Le pays dispose quand même de quelques atouts. Malgré des années de stagnation économique,
le chômage reste à un niveau très faible : 5,1% en 2010, pratiquement la moitié du taux de la zone euro (10,1%).
Sa dette est certes colossale mais détenue à 94% par des Japonais eux-mêmes (particuliers et banques). Et
l'industrie japonaise reste à la pointe de l'innovation.
Ces prochaines années, le Japon devra faire face à un fort déclin démographique et au vieillissement de sa
population : en 2050, 40% de la population aura plus de 65 ans, selon les projections de l'INED.
7. Le Royaume-Uni plombé par l'austérité
Une chance sur deux de replonger dans la récession. Tel est le résultat d'une étude de l'Institut national de
recherche économique et sociale (NIESR) outre-manche. Et quoi qu'il en soit, "l'économie ne reviendra pas au
niveau de son pic d'avant récession avant la fin de 2013", ajoute l'institut.
L'île a beau railler ses voisins de la zone euro et se féliciter de son autonomie budgétaire, sa santé économique
n'a rien de réjouissant. David Cameron applique depuis son élection en mai 2010 un remède de cheval : hausse
de 5 points de la TVA, suppression massive de postes dans la fonction publique, diminution ou gel des
allocations sociales, explosion des droits d'inscription universitaire...
De quoi déprimer les ménages, dont l'indice de confiance a chuté de 13 points entre octobre 2010 et octobre
2011, d'après le baromètre GfK. Leur consommation est négative sur les trois premiers trimestres de 2011 et ils
sont endettés jusqu'au cou : 138% de leur revenu brut disponible.
De plus, le taux de chômage, de 8% en juin 2011, devrait continuer à progresser au moins jusqu'à fin 2012 prédit
Goldman Sachs. Enfin, l’inflation menace : elle pourrait atteindre 4,5% en 2011 selon les prévisions du FMI,
alors même que les marges des industriels se réduisent. Pour sortir du marasme, la Banque d'Angleterre a
annoncé début octobre l'injection de 75 milliards de livres de liquidités dans l'économie.
8. La Russie dépendante des cours du pétrole
La Russie est devenue en 2010 le premier producteur mondial de pétrole et le deuxième de gaz naturel. Les
recettes d'exportations sur ces deux produits devraient passer de 255 milliards de dollars en 2010 à 420 milliards
de dollars en 2035. Une croissance essentiellement tirée par la demande chinoise, dont la part dans ces
exportations sera multipliée par dix sur la même période, selon les projections de l'AIE.
Grâce à cette manne, la dette russe est ridiculement faible : 9% de son PIB en 2010 et ses réserves de
change s'élèvent à 521 milliards de dollars fin mai 2011. Le problème, c'est que l'économie russe est
complètement tributaire du pétrole et du gaz, qui représentent 68% de ses exportations. Selon les calculs du
ministère des Finances russes, une baisse d'un dollar du baril de pétrole entraîne un manque à gagner de
1,8 milliard de dollars pour le budget de l'Etat.
Autre mal endémique du pays : la corruption, dont le Premier ministre Vladimir Poutine reconnaît lui-même
qu'elle "empêche le développement de la Russie". Associée à la bureaucratie, elle place la Russie en 124e
position dans le classement "Doing business" de 2012, qui mesure la qualité de la réglementation des affaires
dans le monde. Son adhésion à l'OMC, prévue pour le 9 novembre, pourra peut-être limiter les réticences des
investisseurs, qui bénéficieront de plus d'outils pour défendre leurs intérêts.