Potentiel du Maroc en Produits du Terroir et Stratégie Adoptée pour le dévelo...
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1. La théorie des champs conceptuels comme outil pour la formation des
praticiens professionnels de l’éducation
Nadja Maria Acioly-Régnier
Maître de conférences en Sciences de l'éducation
IUFM de Lyon - Laboratoire LDH - Université Lyon 2
Groupe de Psychologie de l'éducation mathématique - UNICAMP – Brésil
acioly.regnier@wanadoo.fr
Résumé
Cet article est orienté vers la construction d’un outil de formation inspiré de la
théorie des champs conceptuels de Gérard Vergnaud, et de l’analyse critique de
sa mise en œuvre dans deux contextes de formation. L’analyse de ces situations
de formation confirme que les conceptualisations sous-jacentes à l'action
peuvent se situer à des niveaux très différents, être plus ou moins explicites, et
même donner lieu à des transferts très variables d’un sujet à l’autre. Nous avons
identifié des obstacles à l’apprentissage et des effets didactiques bien précis dans
les deux groupes en formation. Pour une même situation et face à une même
tâche, nous avons observé des différences de conduites et de représentations qui
tiennent au degré de conceptualisation du réel.
Mots -clés : situation de formation, schème, transfert, obstacle didactique,
compétence
1.Introduction
L’objectif de cet article est d’alimenter la réflexion sur la formation professionnelle des
praticiens de l’éducation1, à partir de l’idée d’une nécessaire articulation entre la recherche et
la formation, qui dépasse une trop simple opposition entre la théorie et la pratique. Pour cela;
nous proposerons un outil de formation inspiré de la théorie des champs conceptuels ainsi
qu’une première analyse de sa mise en œuvre dans deux situations de formation différentes.
La formation des praticiens dans le domaine de l’éducation, comme toute formation
professionnelle, implique un développement de compétences. La notion de
professionnalisation est étroitement liée à des problèmes tant théoriques que pratiques,
auxquels quelques concepts développés à partir de « savoirs de référence » peuvent apporter
des éléments de réponse. Cette perspective rejoint l’idée selon laquelle «la professionnalité »
ne relève pas seulement d’un ensemble restreint de compétences techniques aisément
cernables, mais représente un large répertoire de schèmes qui concernent alors également
l’interaction avec autrui, la communication, le langage et l’affectivité. (Vergnaud, 1994).
1
Nous désignerons ici « praticiens de l’éducation » les professionnels ayant une charge de travail nécessitant des prises
de décision immédiates (l’enseignant, le psychologue scolaire, le conseiller principal d’éducation, etc.) en opposition aux
2. 2
En France, la formation des praticiens de l’éducation est un objet de débats récurrents, en
particulier, entre les tenants de l’idée que cette formation doit relever d’un lieu spécifique
(comme les Écoles Normales) et ceux qui considèrent qu’elle doit avant tout être assurée par
l’Université. C’est dans cette perspective que les IUFM se présentent comme un modèle
nourri culturellement de l’héritage des Écoles Normales et contraint par la nécessité d’une
formation académiquement gérée par l’Université. Ce débat est à nouveau impulsé par
l’actualité du projet de réforme des IUFM. Pour notre part il nous semble être un faux débat
qui risque de laisser de côté les aspects essentiels de la formation professionnelle concernant,
en particulier, l’alternance et les spécificités des situations de formation qui apportent des
aspects complémentaires de la conceptualisation nécessaire au praticien. Dans cette
perspective, quel que soit le modèle adopté, on observe que les personnes en formation
perçoivent une distance entre l’enseignement reçu dans l’institution de formation et les
savoirs pratiques nécessaires, notamment pour ce qui concernent la conduite d’une classe, la
prise de décisions au regard d’un diagnostic psychologique, etc.
Du côté des formateurs, il semble que l’accent soit plutôt mis sur la présentation et la
discussion d’outils conceptuels relevant de leur champ d’étude, en laissant aux stagiaires
l’entière responsabilité du transfert dans la mise en place des outils d’intervention en classe,
des techniques d’évaluation scolaire ou psychologique. Cette perspective relève plutôt d’une
conception juxtapositive de l’alternance entre les lieux de stage (lieu de la pratique) et
l’institut de formation (lieu de la théorie).
Les modifications sociales et culturelles observées dans les sociétés contemporaines
produisent de nouvelles réalités qui questionnent les praticiens de l’éducation, ou au moins,
les font réagir. Notons, par exemple, la question de « l’ennui des lycéens » qui a même fait
l’objet de la thèse de doctorat de Stéphanie Leloup (Leloup 2003). Nous pensons alors que les
notions de « compétence », et de « schème » dans le cadre théorique des champs conceptuels
nous paraissent appropriées pour étayer et enrichir l’analyse de la formation des praticiens de
l’éducation.
Ce praticien en tant que professionnel est confronté, de façon multiple, à la prise de décisions
d’ordre pédagogique, didactique mais aussi institutionnel dans le contexte de la salle de classe
au sein d'un établissement scolaire qui constitue une structure complexe. Cette complexité
introduit souvent une difficulté supplémentaire pour analyser les raisons d'une action qui a
réussi ou échoué. Notamment l’explicitation des conditions de production de la réalité
« théoriciens de l’éducation » (chercheurs spécialistes d’un champ disciplinaire telle que la psychologie, la sociologie, qui
prennent l’éducation comme un objet d’étude)
2
3. 3
préalable à cette analyse est rendue difficile par le fait que c’est dans l’action contextualisée
dans un milieu complexe que ce praticien doit prendre, de manière responsable, des décisions
efficaces et pertinentes, et développer ses compétences.
L'observation puis l'analyse des conduites des praticiens de l’éducation en action au sein d’un
contexte ouvre la voie à l'élaboration d'un éventail de situations d’enseignement utiles à la
formation de ces praticiens et au développement de leurs compétences. C’est pourquoi cet
article est orienté vers la construction d’un outil de formation et de l’analyse critique de sa
mise en œuvre dans deux contextes de formation..
2. Une approche inspirée de la théorie des champs conceptuels
Compétences et conceptions
Notre perspective se fonde sur une approche constructiviste qui reconnaît la notion de
compétence à condition de lui adjoindre celle de conception (Vergnaud 1988). Selon
Vergnaud, les conceptions s'expriment assez facilement avec des signifiants langagiers et
d'autres systèmes symboliques. Elles sont organisées en objets, propriétés et relations. Ces
propriétés et relations peuvent être à leur tour posées comme objets, analysées comme telles,
et susceptibles d'être mises en relation avec d'autres objets. Le langage naturel et les autres
systèmes symboliques permettent de désigner ces objets, propriétés et relations. Les
compétences, quant à elles, ne trouvent pas aussi aisément une expression symbolique, et c'est
donc à travers les conduites des sujets qu'on peut les étudier avec plus de certitude. Ainsi, un
des objectifs scientifiques de recherche est d'analyser les compétences des sujets en identifiant
les connaissances sur lesquelles elles reposent2. Cette perspective s’avère aussi pertinente
pour l’étude des situations de formation.
2.1.Le schème et la formation des compétences en éducation
Pour expliquer comment les compétences se forment puis sont mises en œuvre et négociées
avec le réel, le concept de « schème » peut se révéler comme un outil théorique très utile. Il
désigne l’unité cognitive qui permet à la personne de s'adapter à chaque situation nouvelle
d'une classe de situations relativement bien définie (Vergnaud, 1994).
Au service de la formation des compétences, le schème est tout autant soumis à une
adaptation sociale qui transite par la personnalité du sujet. Les structures cognitives existantes
du sujet confronté à une situation problème sont alors soumises à deux types de
transformation : soit subissent un changement adaptatif (accommodation), soit intègrent les
informations de l'environnement que le sujet a sélectionnées et transformées (assimilation).
3
4. 4
L'abandon d'un mode impératif familier impose de changer de registre de fonctionnement :
d'automatique, la pensée doit fonctionner de manière contrôlée (Lemeignan, Weil-Barais,
1993).
Vergnaud (Vergnaud 1981b) observe que « Ce sont ces deux préoccupations (interconnexion
des concepts et évolution psycho-génétique) qui l'ont conduit à définir la notion de champ
conceptuel comme un espace de problèmes ou de situations-problèmes dont le traitement
implique des concepts et des procédures de plusieurs types en étroite connexion. »
Cette théorie de la conceptualisation du réel intègre à la fois les aspects de la situation, du
concept lui-même et du sujet. Elle offre un cadre pour l’intelligibilité du processus de la
conceptualisation. Comprendre que la conceptualisation (produit) est construite, que le
développement cognitif qui en résulte, concerne tout autant les adultes que les enfants ou les
adolescents, et que cette conceptualisation est fonction de processus internes au sujet, qui
s'actualisent dans un contexte social et historique leur imposant autant de limites que de
conditions favorables.
3. Les situations-problèmes et les situations didactiques
Certaines recherches en Psychologie et en Didactique des mathématiques utilisent des
situations dans lesquelles la nature du contrat n'est pas toujours identifiée. Ainsi une
distinction s'est avérée nécessaire à propos des situations que J. Rogalski (Rogalski 1985)
clarifie en discutant les deux catégories suivantes : les situations-problèmes et les situations
didactiques. Celles-ci différent fondamentalement par l'objectif visé dans un domaine
spécifique: avec les situations-problèmes, on vise l'étude de l'état ou du fonctionnement
cognitif d'un sujet, tandis qu’avec les situations didactiques, on vise l'étude de la
transformation des connaissances d'un sujet.
Une situation-problème, comme l'indique son nom, suppose que le sujet soit mis dans une
situation nouvelle pour lui, à laquelle il doit s'adapter, sinon il doit se modifier en produisant
des actions matérielles ou symboliques (représentations graphiques, réponse orale ou écrite,
etc.). Il y a donc à la fois nouveauté et problème à résoudre. Cette nouveauté fait référence
aux acquis cognitifs du sujet : la signification du problème et celle de la situation elle-même
dépendent donc aussi de ces acquis antérieurs. Pour Rogalski (Rogalski 1985) il en découle un
problème méthodologique : la situation-problème doit avoir du sens pour le sujet et lui
permettre la mise en œuvre des représentations en rapport au champ conceptuel visé, faute de
quoi le problème étudié par l'observateur n’est pas celui est abordé par le sujet.
2
Conceptions et compétences sont reliées : les conceptions sont remises en cause lorsque le sujet rencontre des situations
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5. 5
3.1. Exemple 1 : situation problème explicitée par les étudiants psychologues scolaires en
formation
Dans une étude didactique conduite par N. Acioly-Régnier (2003), l'expérience suivante a été
menée dans le cadre d'un cours de psychologie destiné à la formation des psychologues
scolaires. Le groupe de 19 étudiants (18 femmes et 1 homme) a été réparti en 5 sous-groupes
de travail.
La situation didactique suivante a été donnée dès le début du cours avant même qu'aucune
question théorique n'ait été abordée ou discutée. Nous avons proposé une situation scolaire
dans laquelle un professeur des écoles signalait un enfant à un psychologue scolaire. Elle a été
la base du travail durant les 9 séances de 2h. Chacun des 5 sous-groupes a travaillé
séparément à la résolution du problème selon son propre point de vue. L'ultime phase du
travail a consisté en une situation de communication scénarisée des solutions construites par
chaque groupe suivie d'un débat argumenté par des références aux divers cadres théoriques
abordés durant les phases précédentes. Nous rapportons ici la situation didactique présentée
aux étudiants stagiaires psychologues scolaires.
Tableau T1 : Situation didactique présentée aux psychologues scolaires en formation
Phases Consignes
Phase 1 : Description Il est demandé de décrire la situation scolaire du point de vue des acteurs
de la situation scolaire (enseignant, parents, équipe pédagogique) du système éducatif en rapportant leur
discours respectif
Phase 2 : Solution Il est demandé de proposer une solution au problème posé par le professeur des
initialement proposée écoles du point de vue du psychologue scolaire
du point de vue du
psychologue scolaire
Phase 3: Solution Il est demandé de proposer une solution au problème posé par le professeur des
proposée par le écoles du point de vue du psychologue scolaire en tenant compte des différents
psychologue scolaire acteurs du système éducatif et des concepts de la psychologie, en essayant de replacer
en relation aux apports l'interprétation dans le cadre de la théorie des champs conceptuels.
théoriques développés Prévoir un entretien de restitution qui s'organise autour des questions :
dans le cours. Que doit-on dire à l'enfant ? Que doit-on dire aux parents ?
Que dire aux enseignants ? Que dire au psychiatre spécialisé ?
Phase 4 Communication et débat.
3.1.1. Analyse des différentes phases :
Chaque phase de cette situation a conduit à une réflexion étayée et approfondie dont nous ne
pouvons pas tenir compte dans sa totalité. Nous nous limiterons alors à quelques aspects
essentiels pour la problématique abordée ici.
Phase 1 : Le PROTOTYPE dans les situations proposées par les psychologues stagiaires
en formation
qui les contredisent ; et l'émergence de nouvelles compétences est conditionnée par l'abandon de conceptions initiales.
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6. 6
Il ressort clairement de l'analyse des solutions proposées que le prototype de l'élève signalé
par le professeur des écoles est :
UN GARÇON, c'est en effet le genre du sujet choisi par les 5 groupes reflètant un accord
implicite entre les 19 étudiants
en CYCLE 2 ( pour 4 sur 5, l'autre choix étant CYCLE 3)
avec des PROBLEMES D'APPRENTISSAGE (Dyscalculie, Dyslexie)
avec des TROUBLES DE COMPORTEMENT
manifestant de l'AGRESSIVITE auto- ou hétéro-dirigée
manifestant un REFUS DES REGLES
dont les PARENTS sont d'ORIGINE ETRANGERE (4 sur 5) ou encore DIVORCES ou
SEPARES DE CORPS (4 sur 5)
Phase 2 : d’une perspective traditionnelle de compréhension du problème à une
tentative de compréhension à la lumière de la théorie des champs conceptuels
La phase 2 a conduit les étudiants à une proposition ancrée sur un seul aspect de la situation.
En principe, les solutions se centraient sur l’analyse des troubles de comportement dans une
perspective clinique ou encore dans une analyse des variables socioculturelles possiblement
déterminantes de ces troubles. Nous avons pointé des conceptions du réel explicitées et leur
confrontation à des perspectives conceptuelles pouvant les contredire.
Phase 3 : retour sur les concepts
Durant cette phase, un ensemble des concepts issus de cadres théoriques diversifiés qui
devraient être maîtrisés par les psychologues, a été exposé dans une perspective de tester des
hypothèses diagnostiques. Les tableaux ci-dessous schématisent ce processus.
Tableau T2 : Perspectives différentes de compréhension de la situation
Situation spécifique (A : échec scolaire + troubles de comportement )
Perspective "traditionnelle" de compréhension du problème
B : Psychologie clinique (troubles affectifs de la personnalité)
C : Psychologie Cognitive (disfonctionnements cognitifs de la personnalité )
D : Psychologie sociale (groupes, leadership)
Relation de la situation avec plusieurs concepts de la psychologie et d'autres
champs disciplinaires, nécessaires à sa compréhension . Ici nous nous
occuperons de la psychologie.
Exemples : e : violence
b : troubles de calcul f : attention
c : troubles du langage g : appartenance culturel
d : identité h : angoisse
i : mémoire
Cette situation ne peut être comprise qu'à partir de plusieurs champs conceptuels
: tous les concepts d'une discipline ne sont pas nécessaires à la compréhension
d'une situation, une situation ne peut pas être comprise par un seul concept ou
champ disciplinaire; la maîtrise d'un concept implique la reconnaissance et la
mise en œuvre de celui-ci dans des situations différentes
6
7. 7
3.2. Exemple 2 : situation problème pour des étudiants de maîtrise de sciences de
l’éducation dans le cadre d’un dispositif de formation à distance
La situation proposée pour le cours psychologie de l’éducation (Acioly-Régnier, Gurtner,
2003) constitue un préalable pour comprendre certains des phénomènes d’éducation, de
formation, ou d'enseignement que rencontrent les professionnels tant du champ de
l'enseignement que de celui de la formation des adultes, du travail social ou de l'éducation à
la santé. L’outil de travail pour les étudiants se présente sous la forme d’une document
hypermédiatisé au format HTML. Une séance interactive de 2h sous la forme d’un groupe de
discussion via Internet a constitué une rencontre entre l’enseignant et les étudiants au cours de
laquelle la situation problème proposée a été discutée. Notre conception didactique se fonde
sur l'idée que des concepts de plusieurs domaines de la psychologie sont requis pour la
compréhension des situations formatives ou éducatives. Cependant la transposition didactique
nous a amenée à présenter les concepts que nous avons choisis d'aborder, dans le cadre de
référence d'origine avant de les mettre en lien dans une situation prototypique. Pour cela, nous
avons proposé une entrée par le biais de l’imaginaire, où une situation-problème prototypique
dans le domaine éducatif ne pouvait être comprise que par une visite rendue à plusieurs
domaines de la psychologie (sociale, cognitive et clinique). Dans ce contrat didactique,
l’étudiant serait alors pénalisé si sa proposition explicitant sa compréhension de la situation
n’impliquait pas un travail en réseau des concepts, soit pour les adopter dans l’interprétation,
soit pour les exclure comme des concepts non pertinents en la circonstance.
4. Quelques obstacles identifiés.
4.1. Dans le groupe de psychologues scolaires :
• Nous avons pu observer une difficulté initiale à expliciter et à analyser les conduites
professionnelles. Ainsi, le choix d’un test psychologique, par exemple, s’est avéré avant
tout conditionné par celui le plus usité dans le milieu de la pratique professionnelle. La
maîtrise de certains tests psychologiques semblait orienter la compréhension du problème
au regard des résultats produits par ceux-ci. La technique semblait revêtir une place plus
importante que la compréhension théorique même. Cependant, nous ne pouvons pas
oublier que la maîtrise d’un instrument technique vient s’ajouter à la compréhension du
cadre conceptuel dans lequel cet instrument prend son sens.
• La difficulté de changer de cadre de compréhension des phénomènes psychologiques. Les
psychologues scolaires en formation sont licenciés en psychologie (d’orientation clinique,
cognitive ou sociale) et ont acquis une expérience professionnelle en tant que professeur
7
8. 8
des écoles. Nous avons observé par exemple des résistances spécifiques à rentrer dans une
compréhension cognitive pour les étudiants stagiaires dont la formation est d’orientation
clinique.
• La propension à appliquer un schème à une classe trop large de situations : des troubles de
comportement associés à des concepts du domaine de la psychologie clinique.
• La propension à maintenir une réponse erronée indépendamment de l'acquisition d'un
nouveau schème que les sujets semblent avoir intégré. Dans ce cas, le déséquilibre
probablement engendré par les contradictions paraît restauré par un compromis d'ordre
social. Nous faisons ici référence plutôt au contexte de l’établissement scolaire où les
étudiants réalisent leur stage pratique.
4.2. Dans le groupe des étudiants de maîtrise de sciences de l’éducation
• Un refus initial à proposer une compréhension psychologique des phénomènes éducatifs.
Les arguments évoquaient en particulier le danger d’une telle procédure car ils n’étaient
pas des psychologues. Nous avons pu identifier ces arguments en analysant les échanges
écrits lors du travail en groupes de discussion par Internet. Cet obstacle semble amoindri
par la prise de conscience même que, dans certaines situations, la prise des décisions est
faite sur la base de théories implicites de la personnalité et de conceptions du réel parfois
même erronées. Dans le cadre proposé les concepts sur lesquels la prise de décision se
base, doivent alors être explicités, discutés et reformulés.
• La difficulté pour maîtriser des cadres théoriques différents.
5. Quelques effets didactiques repérés
5.1.Dans le groupe des étudiants psychologues scolaires :
La prise de conscience de l’insuffisance de l’emploi d’une seule perspective théorique pour la
compréhension des phénomènes éducatifs les a conduit à mieux saisir l’ancrage des théories
dans une situation familière et leur rôle dans la construction du sens de la situation. Ces
étudiants sont même parvenus à expliciter comment cette perspective de compréhension d’une
situation-problème au travers la théorie des champs conceptuels était analogue à la
compréhension d’une situation clinique par un médecin généraliste. Nous avons pu constater
ainsi la mise en place de nouveaux schèmes lorsque les précédents ne pouvaient plus
supporter le déséquilibre : par exemple, lorsque les résultats des tests projectifs ne font pas
ressortir des difficultés particulières du point de vue affectif, il apparaît un élargissement et
des schèmes comportant d’autres invariants opératoires.
8
9. 9
5.2. Dans le groupe des étudiants de maîtrise de sciences de l’éducation
En raison de la flexibilité apportée par les TICE dans un dispositif d’enseignement à distance,
la situation problème proposée semble, en première analyse qualitative, avoir facilité une
compréhension de la situation en recourant à un réseau de concepts de plusieurs champs
disciplinaires et non plus sur un mode linéaire classique centré sur une série de concepts d’un
domaine particulier de la psychologie. Elle a permis une entrée dynamique dans le processus
d’apprentissage pour l’étudiant qui ne vit pas l’interaction en face à face avec l’enseignant
comme en situation présentielle.
6. Conclusion
Au plan théorique, il est intéressant de souligner que l'analyse de ces situations de formation
confirme que les conceptualisations sous-jacentes à l'action peuvent se situer à des niveaux
très différents, être plus ou moins explicites, et même donner lieu à des transferts très
variables d’un sujet à l’autre.
On peut utiliser ce dispositif dans des situations de formation dans le but de :
• conduire une analyse précise des opérations de pensée et des connaissances impliquées
dans une famille de compétences données,
• rapporter cette analyse d'une part, aux situations de travail et aux problèmes qu'il faut
traiter aux cours de l'expérience professionnelle, d'autre part, aux conditions sociales de
formation dans lesquelles ces compétences peuvent se former, notamment celles de
l’institution de formation et celles des lieux de stage.
Pour le formateur, ce type de dispositif peut lui permettre d’identifier des invariants
opératoires, c’est à dire les connaissances du sujet qui sont sous-jacentes à ses conduites.
(Vergnaud, 1990). Pour une même situation et face à une même tâche, nous pouvons observer
des différences de conduites et de représentations qui tiennent au degré de conceptualisation
du réel.
Un point important à souligner concerne la richesse de la diversité des situations pertinentes
qui doivent être présentées dans ces contextes de formation, et que nos expériences de
formation analysées confirment. Par leur fonction de généralisation, les schèmes s’alimentent
de la variété des situations rencontrées susceptibles d'avoir du sens pour le sujet. La prise de
conscience et l'explicitation des invariants opératoires (objets, propriétés, relations) contenus
dans les schèmes favorisent ainsi leur généralisation et augmente leur étendue.
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10. 10
Références
Acioly-Régnier, N.M, Gurtner, J.L. (2003) Psychologie de l’éducation Poitiers : CNED,
Lyon : Campus Numérique FORSE
Leloup, S., (2003) L’ennui des lycéens. Du manque de motivation au décalage des attentes.
Thèse de doctorat en sciences de l’éducation de l’Université de Reims.
Lemeignan, G., Weil-Barais, A., (1993) Construire des concepts en physique, Paris :
Hachette Éducation
Rogalski, J. (1985) Acquisition de la bidimensionalité (combinatoire, espace, mesure) chez
les élèves d'âge scolaire et préscolaire - Thèse de Doctorat d'État - Université Paris VII
Vergnaud, G. (1981) - Quelques orientations théoriques et méthodologiques des recherches
françaises en didactique des mathématiques - Recherches en Didactique des
Mathématiques (vol. 2, n. 2, pp 215-232)
Vergnaud, G. (1988) - L'Elève face à la tâche: problèmes à résoudre, difficultés à surmonter
, European Journal of Psychology of Education, n° hors série
Vergnaud, G., (1994) Apprentissages et didactiques : où en est-on ? Paris : Hachette
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