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L’homme de goût
Michel Del Burgo, rencontre avec un chef

reportages / réflexion / humeur / recettes
#2

étoilé atypique, au parcours semé de défis et
d’accidents, à la veille de nouvelles aventures.

automne /
hiver
2013-2014

Le marché de 180 °C

Cerfeuil tubéreux, endive, cèpe, potimarron,
foie gras, brochet, poire, figue… Les produits
de saison à privilégier et les bons conseils pour
les cuisiner.

des recettes et des hommes

L’huîtredans l’étang de Thau
rose
Cette merveille élevée
d’après une méthode artisanale revisitée est
le joyau de la famille Tarbouriech.

des recettes et des hommes

la communauté
de l’ormeau

Sylvain Huchette et son équipe élèvent
en Bretagne l’ormeau bio de pleine mer,
un mollusque aussi rare que succulent.

divin quotidien
20 recettes pour illuminer la morne saison
en prenant le temps de cuisiner.

raisin et sentiments
Portrait de Peter Fischer, vigneron bio,
né en Allemagne, formé aux USA et établi
avec bonheur en Provence.

ISBN : 979-10-92254-02-0

19,90 euros

www.180c.fr

tables capitales

divin quotidien

dream team

chabrol ni raclette semilla
ripailleur ni tartiflette en cuisine
édito
#2
automne /
hiver
2013-2014

M

ook, revue, magazine, boni (Bel Ouvrage Non Identifié), bookazine,
magalivre, ovni, cookzine (si, si on nous l’a vraiment fait)… Pas facile
pour certains de mettre une étiquette sur 180 °C à la sortie de notre
premier numéro. Et pour cause. Plus riche qu’un magazine mais diffusé en
librairie, plus varié qu’un livre avec des reportages sur des paginations qu’on
ne trouve plus en presse, déconnecté de l’actu pure mais aux taquets sur les
saisons… On veut bien reconnaître que nous n’avons pas fait grand-chose pour
simplifier la tâche à ceux qui aiment les chemins (de table) bien balisés. Une
différence que nous revendiquons. D’abord parce que c’est ainsi que 180 °C est
né dans l’esprit de quelques fous de cuisine affamés de nouveauté et de création,
rejoints par quelques autres tout aussi enthousiastes à l’idée de tenter l’aventure.
Ensuite parce que l’absence même de groupe de presse ou d’édition à nos côtés
(c’est simple, nous faisons tout nous-même !) comme d’annonceurs (pas de pages
de publicité non plus) nous donne cette indépendance et cette liberté de ton et
de contenu à laquelle nous sommes attachés. Enfin, et surtout, parce que cette
façon très personnelle, à la fois exigeante, parfois foutraque, toujours authentique
et curieuse d’éditer cette revue (c’est le terme que nous préférons) nous a permis
de rencontrer nos lecteurs ! Oh bien sûr notre tirage (15 000 exemplaires) est
encore modeste, nous ne faisons trembler aucun mastodonte du secteur et nous
avons besoin de votre soutien (le bulletin d’abonnement se trouve en page 191 !)
pour avoir le temps (et les moyens) de développer tous les projets que nous avons
en tête, notamment dans l’univers numérique (notre application de recettes est
cependant dès à présent disponible sur l’AppleStore !). Mais tout de même, se dire
que sur la base de cette idée un peu folle et de l’énergie dépensée par une poignée
d’acharnés, nous nous sommes retrouvés ces derniers mois plusieurs milliers à
partager cette même passion pour le bon autour de 180 °C… Vous, je ne sais pas,
mais moi, ça me donne sacrément faim.

Sébastien Cauchon, Rédacteur en chef
sommaire
S
S S

#2

p. 44 F le

automne /
hiver
2013-2014

marché de 180 ˚c

La sélection
automne-hiver
Des produits de saison et les conseils
pour les préparer au mieux.

p. 104 F

divin quotidien

p. 136

le goût des mots

Ni Raclette,
Ni Tartiflette

Le français, ce
n’est pas de la tarte
p. 144

souvenir d’école

Des recettes pour se réconforter sans
crouler sous les féculents ni le fromage
fondu. Chiche ?

Objectif :
CAP Pâtissier
Chocolatier
p. 152

home made
p. 6 F l’homme

6 recettes pour
apprécier les
délices de l’hiver

de goût

l
’étoile filante

p. 132 F BERNARD,

La recette secrète du gâteau du
carmel de Lisieux démystifiée par
le redoutable Bernard.

p. 24 F itinéraire

Les tables
Parisiennes
de Chabrol
p. 32 F SUPER PRODUCTION

La communauté
de l’ormeau
Sylvain Huchette a créé en Bretagne
le premier élevage français de ce
délicieux mollusque méconnu.

Le célèbre robot pâtissier US a conquis
le cœur de notre rédacteur en chef.

team

p. 162 F technique, mais pas trop

les sémillants

archives
de la cuisine

Menus
plaisirs

p. 90 F SUPER PRODUCTION

Tarbouriech

Les Huîtres Roses de l’étang de Thau,
joyaux de la famille Tarbouriech.

french and
parfait

p. 182

même pas peur

La volaille en vessie
de Paul Bocuse

La friture des
pommes de terre

Rencontre en coulisses avec la brigade
et le chef qui œuvrent avec bonheur
au Semilla.
p. 84 F les

p. 168

(I love you Mimolette)

KitchenAid !
p. 68 F dream

La tarte aux
mille saveurs

Mimolette je t’aime

p. 138 F TOI MON…

Bruno Fuligni, historien, décrypte
les menus de l’alliance franco-russe
conservés à la bibliothèque Carnegie
de Reims.

2

dérapage
culinaire

LE SCOFA

Portrait de Michel del Burgo,
chef étoilé au parcours aussi
remarquable que chaotique.

Cinéaste de la province,
Claude Chabrol avait ses adresses
et ses plats de prédilection à Paris.

p. 160

CR AQUEUR DE RECETTES

p. 120 F la

galerie de 180 ˚c

p. 186

Plus complexe qu’on ne le croit, on
vous la détaille dans les règles de l’art.

p. 187

Matthieu Paley

étymotest

L’umami, késako ?
sans façon

Les 5 choses qu’on
aimerait ne plus
subir au restaurant
p. 188

Les images étonnantes et fascinantes
de ce photoreporter spécialisé dans les
régions de l'Ouest Himalaya.

cook books

La sélection des
livres de cuisine
étrangers. Que
valent les ouvrages
des vedettes ?
p. 190

after buzz
p. 170 F R A ISIN ET SENTIMENTS

Peter Fischer,

roi de Provence !
Visite au Château Revelette, domaine
d’un vigneron bio des côteaux d’Aix.

Les fiefs de la Rue
du Nil : Terroirs
d’Avenir & Frenchie
p. 192

connoisseurs
only

Jolies poupées

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

3
rédaction
Comité éditorial 

des recettes et des hommes

michel smith

Journaliste spécialisé en vin, gastronomie et tourisme,
auteur de guides de voyages et d’ouvrages sur le vin
(dernier en date : Les Grands Crus du Languedoc et du
Roussillon). Il prépare un « livre d’amour » sur le cépage
carignan à paraître en 2014.

éric
fénot

sébastien
cauchon

delphine
brunet

fabrice
bloch

contributeurs

Textes
philippe toinard

Chroniqueur gastronomique indépendant, il collabore
à plusieurs titres de presse. Parallèlement, il a publié
plus de quinze livres de cuisine, animé de nombreuses
émissions télévisées dédiées à la cuisine et présente
actuellement une chronique sur BFM TV.

guillemette odicino
Portraits des contributeurs par Marie Delafon.

Critique et journaliste de cinéma à Télérama où elle
signe plusieurs hors-séries, elle participe régulièrement
à de nombreuses émissions pour la radio et la télévision
(France2, CANAL+, Europe1, France Inter...).

stéphan lagorce

Formé par Jean Delaveyne et Philippe Da Silva, il a travaillé
aux États-Unis puis en République Populaire de Chine
où il a été chef du Maxim’s de Pékin. Ingénieur agronome,
il est aussi professeur des Sciences de l’aliment et auteur
de nombreux ouvrages culinaires.

éric libiot

+

éric trochon,
chihiro masui,
matthieu paley,
alexandre isard,
marie delafon,
marine belkebir,

et merci à Xavier Dupuy, président de La Cornue.

4

Né à Brest, il monte à Paris à 20 ans voir des films de toutes
les couleurs. Commence à écrire un peu partout et sur un
peu de tout (cinéma, Fort Boyard, roman policier, retraites
complémentaires…). Après Première il rejoint L’Express
dont il est le rédacteur en chef service culture/arts et
spectacles depuis 2006.

bruno fuligni

Haut fonctionnaire, maître de conférences à Sciences Po,
directeur de la collection « Tribuns » à la Documentation
française, auteur de seize ouvrages sur l’histoire politique
française et les utopies, dont Le Livre des espions
et Les Frasques de la Belle Époque.

monique perez

Après plusieurs années dans l’audiovisuel et des week-end
entiers passés à cuisiner pour les autres, Monique décide
il y a cinq ans de sauter le pas et de réaliser son grand rêve :
devenir pâtissière. CAP de pâtisserie (mais aussi de cuisine)
en poche, elle crée son entreprise de traiteur haut de
gamme, « Les Reines ». Elle travaille aujourd’hui à un projet
de découvertes culinaires en milieu scolaire.

bernard laurance

Grand voyageur, gourmand insatiable et perfectionniste,
Bernard livre depuis quatre ans ses recettes du monde
sur son blog lacuisinedebernard.com. Il dévoile aujourd’hui
ses tours de main lors d’ateliers, développe des projets
pour la télévision et termine l’écriture de son premier livre
consacré à la pâtisserie.

cécile delarue

Journaliste à la télévision et ailleurs, Cécile Delarue est
installée à Los Angeles depuis trois ans et s’est lancée
dans une véritable croisade pour sauver les Américains
de la bad-bouffe. Son blog et ses vidéos décalées sont
à suivre sur frenchandparfait.com

édité par Thermostat 6
S.A.R.L. au capital de 5 000 euros
Siège social :
8, rue des Goncourt
75011 Paris
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facebook.com/180C.LaRevue
twitter : @180C_LaRevue
Directeur de la rédaction
éric Fénot
eric@180c.fr
Rédacteur en chef
Sébastien Cauchon
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Directeur artistique
Fabrice Bloch
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Rédactrice et styliste culinaire
Delphine Brunet
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Conseiller culinaire
Éric Trochon M.O.F. 2011
eric.t@180c.fr
Secrétaires de rédaction
Sophie Schang & Audrey Génin
Directeur commercial
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Marketing et réseaux sociaux
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Emmanuel Brunet
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Vincent Rivalle
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Retouches
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Photographies
patrick swirc

Formé à l’école de photographie de Vevey en Suisse,
ce portraitiste de renom travaille régulièrement pour les
plus grands titres de presse (Libération, Elle, Télérama…).

guillaume czerw

Spécialisé en prises de vues culinaires, il travaille
aussi bien en reportage qu’au sein de son propre studio,
essentiellement pour la presse et l’édition, tout en
poursuivant le développement de projets personnels.

Imprimé et relié en France par :
Chirat, 744, rue de Sainte-Colombe
42540 Saint-Just-la-Pendue
Diffusion Géodif
01 44 41 11 11
geodif@eyrolles.com
Relations libraires
Virginie Migeotte
Nathalie Lacroix
relationslibraires@thermostat6.com
Relations presse
Life Style RP
Floriane Toinard
Tél. : 06 62 46 21 22
floriane.toinard@lifestyle-rp.com
ISBN : 979-10-92254-02-0
ISSN : 2268-1892.
Dépôt légal : octobre 2013
© 2013, Thermostat 6. Tous droits réservés, pour tous pays.

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

5
l’homme de goût

Michel del Burgo,

l’étoile
filante
adulé par certains confrères, raillé par d’autres
sous couvert d’anonymat, michel del burgo
est un cuisinier à fleur de peau au parcours
constellé d’étoiles. formé par les plus grands,
promis à une immense carrière, ses dix dernières
années peuvent pourtant paraître chaotiques,
entre ombres et lumières.

SSS
Texte Philippe Toinard
Photographies éric fénot

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

7
itinéraire

Pour Chabrol, Le Repaire
de Cartouche était la
cour des miracles.

Chabrol
in

city
the

du réalisateur on connaît la filmographie somptueuse
tout autant que la fascination pour la province,
sa bourgeoisie, ses codes, ses petits travers mais aussi
ses grands plats. entre deux tournages, claude chabrol
avait également un goût très sûr en matière de bonnes
tables à paris. des adresses parfois surannées mais
à l’indéniable authenticité et dont 180 ˚c révèle ici
la cartographie à l’attention des solides appétits.
SSS
Texte Guillemette Odicino
Photographie de Claude Chabrol alexandre isard

S

e mettre à table… On pense
à un suspect avouant, enfin, son crime dans
un bon film policier, et cette expression
prend tout son (double) sens avec le cinéaste
le plus gourmand d’entre les gourmets
(et inversement) : Claude Chabrol.
Chacha pour les intimes, se léchant les babines, buvant
du petit lait dès qu’un mets alléchant se profilait à l’horizon.

24

Tout a été dit, écrit, sur la manière dont il sélectionnait
ses lieux de tournages : des villes où il faisait bon boire
et manger, car le grand Claude était homme à mélanger
plaisir et travail, à même considérer que l’un n’allait pas
sans l’autre, et vice et versa et lycée (hôtelier) de Versailles.
Un homme qui se géolocalisait d’après les spécialités du coin,
le Guide Michelin à la main, et tenait, plus que tout, à la qualité
de la cantine pour ses ouailles, cela force notre respect.

>

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

25
France Haliotis. Kerazan 29880 Plouguerneau / Tél. : 02 98 37 17 39 / www.francehaliotis.com

super production

La communauté
de l’ormeau
sylvain huchette,
patron de france
haliotis, s’est installé
dans le finistère pour
élever et commercialiser
ce mollusque étrange
et méconnu. réservé
aux initiés. ou quasi…

SSS
Texte
Éric Libiot
Photographies
Patrick swirc

C

’est un temps d’hiver breton typique.
Du grand beau sur les côtes finistériennes,
aux abords de l’Aber-Wrac’h, chauffées
par un soleil éclatant. Ou presque. Disons
qu’un léger crachin est venu embellir
les lieux, histoire de ne pas trop dépayser
le chaland. De toute manière, il va falloir se mouiller
pour raconter cette histoire en forme de conte et légende.
À quelques encablures de la plage, l’Abalone fait le boulot.
À bord, Xavier, le Ch’ti rieur, patron du bateau, et Iain,
l’Écossais mutique, son second, remontent les cages.

Il faut toute la patience et l’expérience d’un génie
en mécano général pour déboulonner ces foutus écrous
qui les tiennent fermées. Une fois les cages ouvertes,
Xavier et Iain prennent de larges brassées d’algues qu’ils
jettent à l’intérieur. En s’approchant, on pourrait presque
entendre les cris de joie de ceux qui viennent de recevoir
de la nourriture toute fraîche.
L’ormeau. Mollusque marin élevé en mer, de la famille
des gastéropodes prosobranches, ce qui n’est pas un gros
mot. Coquille interne nacrée. Chair tendre. Cuisiné
snaké. Les Japonais en raffolent. Pour en définir le goût

>
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

33
le marché de 180 °C

C’est

bon

maintenant
Le panier
automne
hiver

une fois rangés les parasols,
les bouées-canards et autres paréos,
le gourmet peut enfin reprendre
une activité normale et se consacrer
aux bonheurs espérés de la méchante
saison. cèpes, potimarrons,
perdreaux, parmi d’autres richesses,
sont en vedette et adoucissent
la froidure du moment… mais
s’évaporent aussi sûrement que les
jours raccourcissent. accueillez
sans délai ces trésors aux fumets
nostalgiques d’humus, de sous-bois
et de brumes. carpe diem…
le cèpe : la tête ou la queue ?
 En automne, toutes affaires cessantes

SSS
Textes et recettes
Stéphan lagorce
Photographies
éric fénot
Stylisme
Delphine Brunet

Aussi sûrement que l’arthritique va à
l’ascenseur, l’authentique gourmand va au
cèpe. Qu’est-ce qu’un beau cèpe ? Faut-il
juger la vigueur de sa queue ou l’arrondi
quasi planétaire de sa tête ? Vaste question
à laquelle le grand chef et mycologue
confirmé Jean Delaveyne, répondait par
un lapidaire : « On doit pouvoir les manger
crus ! » Cependant, pour le néophyte, les
bons signes sont plus précis : une texture
assez ferme, des couleurs bien marquées
et, surtout, une légère odeur de sous-bois,
incontestable… Il ne faut pas craindre
la présence de brindilles, mousses et autres
feuilles ou limaçons qui, compagnons de
voyage, accompagnent naturellement les
champignons. La provenance des cèpes
est troublante puisqu’ils nous arrivent,
pour l’essentiel, des pays de l’Est : Biélorussie,
Ukraine, Bulgarie… Pourtant les cèpes

de la Corrèze, de la Dordogne ou du Limousin
sont réputés pour leur saveur unique. Au fait,
dit-on cèpe ou bolet ? Comme il vous plaira
tant qu’il s’agit de Boletus edulis, le meilleur
d’entre tous. Côté cuisine, Jean Delaveyne
ébouillantait très rapidement ses champignons
avant de les cuisiner. Jean-Michel Bédier,
son élève, les accommodait en ragoût,
avec du noilly, des échalotes et de la crème
fraîche. Aujourd’hui, la jeune génération
s’est affranchie des traditions, établies par
les maîtres : le cèpe, désormais, se déguste
en carpaccio ou en sorbet. Mais à la maison,
les apprêts les plus simples remportent tous les
suffrages, surtout en faisant les bons mariages.
Les cèpes convolent naturellement avec les
pommes de terre, l’ail, le persil, la graisse
de canard, les échalotes et la crème fraîche…
Un blanc sec et minéral soulignera bien les
arômes pénétrants du cèpe. Tout comme
le xérès racé de Sanlucar de Barrameda fait
merveille avec les huîtres.
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

45
le marché de 180°C

Pour 4 personnes / Difficulté : TRÈS LIMITÉE somme toute, à la cueillette des cèpes eux-mêmes
Indice de patience requis : TRÈS BAS, vu le résultat obtenu

Les cèpes farcis
Une petite recette apparemment toute
simple, que plus personne n’ose préparer…
Quel dommage ! Jean Delaveyne, le grand,
l’illustre chef et expert mycologue la
concoctait pour quelques clients triés sur
le volet dans son restaurant Le Camélia à
Bougival. Autres temps, autres coutumes :
les champignons se servent, désormais
en « espuma », « consommé » et autres
« vapeurs ». À quand la pommade ?
Cèpes
4 gros cèpes (dont le
chapeau fasse, si possible
au moins 10-15 cm
de diamètre)
Graisse d’oie ou de canard
Farce
3 poignées de
champignons des bois
(trompettes-de-la-mort,
girolles, chanterelles,
lactaires, etc.)
4 échalotes
Quelques brins
de persil plat
2 tranches de jambon
sec (Bayonne, Serrano,
Parme…)

400 g de poitrine de
porc fraîche (pas simple
à  trouver, ça, demandez
au boucher)
1 c. à s. de chapelure
(et un peu plus)
1 œuf
2 ou 3 c. à s. d’armagnac
Cuisson
4 tomates
1 gousse d’ail hachée
2 c. à s. de persil haché
Thym frais
Un verre de vin blanc sec
Sel et poivre

❶ Les cèpes (comme ils sont
beaux… Quel dommage de les
cuisiner !) Allez courage : le début,
c’est le plus pénible. Détachez
les pieds des cèpes. Nettoyez-les
et mettez-les de côté. Nettoyez
également leur chapeau. Ne les
passez tout de même pas à la
machine : ils y perdraient toute leur
saveur. Dans une grande poêle, faites
sauter dans deux ou trois cuillerées
à soupe de graisse les chapeaux
de cèpe salés et poivrés, un par un
et des deux côtés pendant une bonne
dizaine de minutes.

grossièrement les pieds des cèpes
(pas vos doigts). Faites sauter tous
ces champignons dans une grande
poêle bien chaude avec deux ou trois
cuillerées à soupe de graisse. Salez,
poivrez. Ajoutez les échalotes et le
persil hachés au terme de la cuisson
(10 minutes, en gros). Sortez du feu,
laissez refroidir. Hachez la poitrine
de porc (ou faites-le faire), hachez
aussi le jambon, mais pas trop.
Dans un saladier, mélangez le porc,
le jambon, les champignons sautés,
la chapelure, l’œuf et l’armagnac.
Salez, poivrez, mélangez bien.

❷ La farce (esthètes florentins,
abstenez-vous) Lavez, si besoin,
les champignons des bois, coupez

❸ Les cèpes farcis (Ah : ça se
précise !) Salez, poivrez les chapeaux
de cèpe sautés, répartissez la farce

Pour
6 PERSONNES
Difficulté : GÉRABLE
Indice de patience
requis : LIMITÉ,
somme toute

❹ La cuisson (ouf, pas trop
tôt…) Huilez légèrement un plat
allant au four (pardi !) et assez
grand pour tenir les cèpes, sans
qu’ils ne se chevauchent (un peu
de décence, s’il vous plaît). Coupez
les tomates en tranches, placez-les
au fond du plat. Posez par-dessus
les cèpes farcis. Versez le vin blanc,
saupoudrez le tout d’ail et de persil
hachés (pas trop). Enfournez
40 minutes, laissez reposer 3-4
minutes avant de vous mettre à table
avec un joli bergerac et profitez-en…

Velouté de champignons,
cèpes et noix caramélisées

Alexandre Dumas consacre un chapitre aux
cèpes dans son Grand Dictionnaire de cuisine,
c’est dire ! Il y distingue les cèpes francs à
tête noire et ceux à tête rousse. Qu’importe
le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse…
❶ Le bouillon (tel quel : c’est déjà délicieux !) Coupez
le pied des champignons et lavez-les. Hachez les échalotes et
faites-les suer au beurre. Ajoutez les champignons finement
coupés, salez, poivrez. Couvrez, laissez cuire 5 minutes.
Versez 1,5 litre d’eau froide. Portez à ébullition, puis laissez
mijoter très doucement 1 heure. Filtrez et conservez le
bouillon parfumé ; servez les champignons de Paris cuits
et fades aux enfants.
❷ Le roux Faites fondre le beurre. Ajoutez la farine, faites
cuire doucement 1 minute en remuant. Réservez.
❸ Le velouté (enfin… ) Nettoyez les cèpes. Coupez-les
en morceaux (gros comment ? Débrouillez-vous !). Faites-les
sauter dans une cocotte dix minutes avec 2 noix de beurre,
le sel, le poivre et les échalotes hachées. Ajoutez ensuite le
bouillon, portez à ébullition, laissez cuire encore 10 minutes
(les petits, assez fermes, demandent plus de temps que les
gros). Mixez finement hors du feu. Prélevez-en un bol : laissez
tiédir. Ajoutez le roux et mélangez. Versez ensuite cette
préparation bizarre dans la cocotte en mixant pour bien la
disperser. Portez à petite ébullition en mélangeant sans arrêt,
sortez du feu puis ajoutez la crème, mélangez. Servez avec
les noix préalablement caramélisées dans une poêle avec le
sucre, puis refroidies et concassées et un trait d’une (très)
bonne huile d’olive. Faites faire la vaisselle par les invités.

46

par-dessus. Poivrez, saupoudrez,
avec tact, de thym frais et de
chapelure. Faites préchauffer le four,
comme cette gazette, à 180 °C (th. 6).

Bouillon de champignons
1 kg de champignons
de Paris très frais (sinon,
ne faites pas la recette)
2 échalotes
1 noix de beurre
Roux
40 g de farine (plus ou
moins selon l’épaisseur
voulue)
60 g de beurre
Velouté
1 kg de cèpes (plutôt gros
que petits, ils sont plus
tendres et goûteux)
1,3 l de bouillon de
champignons (pas de
panique, vous l’avez
déjà fait)
15 cl de crème épaisse
3 noix de beurre
2 échalotes
Sel et poivre
Noix caramélisées
6 c. à s. de cerneaux
de noix entiers
6 c. à s. de sucre en poudre
Huile d’olive top qualité

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

47
semilla. 54, rue de seine, 75006 paris / Tél. : 01 43 54 34 50

dream team

Les

sémillants
souvent ignorée, rarement citée, la brigade
des talents qui entourent un chef en cuisine
est pourtant déterminante dans la réussite
et la renommée de ses plats. 180 ˚c s’est invité
dans les coulisses du semilla pour aller
à la rencontre de ceux qui accompagnent
notre chef maison, éric trochon.
SSS
Texte Sébastien CAUCHON
Photographies éric fénot

O

n a beau savoir que semilla signifie
« graine » en espagnol, lorsqu’on pénètre
au petit matin dans le restaurant du même
nom (une fresque murale évoquant sept
étapes de germination le rappelle d’ailleurs
fort à propos), on ne peut s’empêcher
d’avoir aussitôt en tête l’adjectif « sémillant » face au
frétillement de la jeune équipe qui s’active. « D’une vivacité
pétillante et gaie » nous renseigne le Larousse, et c’est bien
l’esprit du lieu et de cette brigade qui virevolte en souriant
sous nos yeux. Le jour de notre venue, le monte-charge

était capricieux. Ni une ni deux, commis, serveuses et souschef improvisent un ballet fluide pour transporter les
caisses de fruits, légumes et épicerie déposées à l’aube par
les fournisseurs vers le garde-manger situé dans le dédale
des caves de cet immeuble de la rue de Seine. C’est en effet
à proximité des biens connus Fish La Boissonnerie, Cosi
et La Dernière Goutte que l’Américain Juan Sanchez et
le Néo-Zélandais Drew Harré ont lancé en 2012 ce néobistrot confié au Meilleur Ouvrier de France éric Trochon,
associé et « consulting chef » du lieu. Et c’est parce qu’éric
fait partie de l’équipe de 180 °C qu’il a accepté ce que

>

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

69
Menu du banquet d’inauguration de la Fontaine
Subé, le 15 juillet 1906, sous la présidence
de Léon Bourgeois. Reims, BM, A 121.

les archives de la cuisine

Menus plaisirs
champagne et biscuits roses : c’est ce qu’évoque,
de prime abord, la ville de reims au gastronome
pressé. on sait moins qu’une de ses bibliothèques
abrite une fabuleuse collection de menus anciens.
SSS
Texte Bruno Fuligni

Menu du banquet
du 3 vendémiaire an 90
(24 septembre 1881),
organisé par le Comité
républicain radical
sous la présidence
du député Courmeaux,
pour le 90e anniversaire
de la République.
Reims, BM, A 135.

84

L

’obus allemand qui, en 1917, incendia l’hôtel
de ville de Reims, détruisit d’inestimables
trésors : au premier étage, en effet, se trouvait
la bibliothèque municipale, riche d’un fonds
extraordinaire d’ouvrages confisqués aux églises
et abbayes d’alentour pendant la Révolution.
Les Champenois, gens prudents, habitués par l’histoire
aux invasions venues de l’Est, avaient toutefois mis à l’abri
les documents les plus précieux : en sous-sol, cent mille
manuscrits et imprimés échappèrent à la catastrophe
et attendirent des jours meilleurs.
Le martyre de Reims, sa cathédrale ravagée, ses gargouilles
crachant le plomb fondu de la toiture en flammes émurent
le monde entier : à la fin de la Grande Guerre, au nom
de l’amitié franco-américaine, la Fondation Carnegie
pour la Paix internationale contribua au relèvement de
la cité meurtrie. Il fallait pour cela l’élan d’un milliardaire
philanthrope et Andrew Carnegie fit bien les choses.
C’est ainsi qu’au chevet de la cathédrale restaurée se trouve
aujourd’hui la bibliothèque qui porte son nom. Dans ce
palais Art Déco, rehaussé d’étranges mosaïques de marbre
et d’onyx, les cent mille pièces rescapées ont trouvé un refuge
solide, où de nouvelles acquisitions les ont bientôt rejointes.
Parmi ces joyaux, sept cents menus des xixe et xxe siècles :

bien plus qu’une succession de repas plantureux, ils nous
racontent une histoire politique et philosophique
de la iiie République. C’est pourquoi, sans doute,
les conservateurs ont eu la bonne idée de faire de cette
collection un fonds en soi, que le chercheur consulte
en feuilletant une série d’albums, avec l’impression confuse
de s’être assis dans la machine à remonter le temps.
SSS
La République se veut conviviale parce qu’elle est
d’abord démocratique et plébéienne, comme la grande
Révolution de 1789. Ses banquets doivent être simples
et francs, pour convenir au peuple : potage, bœuf en
sauce, rôti de veau et légumes, annonce sobrement ce
menu daté du 3 vendémiaire an 90 (24 septembre 1881),
pour le banquet « organisé par le Comité républicain
radical sous la présidence du citoyen Eugène Courmeaux,
député de la 1re circonscription de Reims, en l’honneur
du 90e anniversaire de la proclamation de la République ».
Le député Courmeaux ne s’en trouvera pas plus mal,
car ces plats de ménage sont encore suivis de roast-beef,
salade, fromage, biscuits, café, liqueurs et champagne…
À travers ce repas pour le moins arrosé et carné,
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

>
85
Médithau. Mas de Montpenèdre, 34340 Marseillan / Tél. : 04 67 77 23 21 / www.medithau.com et www.huitreseven.com

super production

Tarbouriech

la vie en rose

SSS
Texte Philippe Toinard
Photographies éric fÉnot

pour apprécier l’immensité
de l’étang de thau, il faut gravir
le mont saint-clair à sète.
de là, vue imprenable sur le plus
grand étang du languedoc où
s’alignent des centaines de tables
sous lesquelles les huîtres de
bouzigues grossissent sans jamais
connaître les marées. sauf qu’un
homme, florent tarbouriech,
en a décidé autrement.
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

91
divin quotidien

Pour 4 personnes
250 g de girolles
1 botte de ciboulette
4 c. à s. d’huile d’olive
6 œufs
10 cl de crème
fraîche épaisse
1 gousse d’ail
Sel et poivre

ni raclette,
ni tartiflette...

Les entrées
en douceur

Brouillade
de girolles

❶ Rincez rapidement les champignons sous l’eau froide,
égouttez-les puis épongez-les soigneusement dans du papier
absorbant. Coupez-les en deux ou trois selon leur grosseur.
❷ Ciselez la ciboulette et hachez l’ail finement.
❸ Battez les œufs avec la crème fraîche, du sel et du poivre.

les saisons passent
et reviennent, les recettes
aussi, toujours un peu
les mêmes… on a froid,
il fait gris, on s’ennuie !
c’est le temps pour
cuisiner et partager nos
découvertes, faire goûter
nos trouvailles et vivre
au rythme des produits
si riches de ces saisons
que l’on croit mortes.
voici une sélection de
recettes simples et faciles
pour redonner vie aux
plus frileux et défier
la morosité ambiante…
SSS
Recettes & stylisme
Delphine Brunet
Photographies
Guillaume czerw

❹ Dans une grande poêle, faites revenir les girolles dans
l’huile d’olive pendant 5 à 10 minutes jusqu’à évaporation
de toute leur eau. Ajoutez la ciboulette et l’ail puis laissez
rissoler quelques instants avant de verser les œufs.
Remuez avec une cuillère en bois pendant 5 minutes.
Rectifiez l’assaisonnement puis servez aussitôt.
Pour 4 personnes
2 œufs
100 g de yaourt
de brebis
150 g de potimarron
10 cl de lait
200 g de farine
1 sachet de levure
2 c. à s. de graines
de pavot
150 g de saumon fumé
40 g de beurre mou
Quelques brins d’aneth
1 c. à c. de baies roses
2 c. à s. d’huile d’olive
2 c. à s. de graines
de courge
Sel et poivre

Blinis de
potimarron
et rillettes
de saumon
❶ Coupez le potimarron en morceaux.
Faites-les cuire 15 minutes à la vapeur
et écrasez-les en purée.

❷ Coupez le saumon en fines lanières
puis ajoutez le beurre mou, l’aneth ciselé,
les baies roses concassées et du poivre.
Écrasez à la fourchette et réservez au frais.
❸ Séparez les blancs des jaunes d’œufs.
Battez les jaunes avec le yaourt, le lait et
la purée de potimarron. Ajoutez la farine,
la levure, du sel, du poivre et les graines
de pavot. Mélangez bien.
❹ Montez les blancs d’œufs en neige avec
une pincée de sel avant de les incorporer
délicatement au mélange.
❺ Faites griller à sec les graines de courge
avec du sel. Réservez. Déposez des louches
de pâte dans une poêle chaude huilée.
Laissez cuire 2 à 3 minutes de chaque côté.
Servez les blinis chauds avec les rillettes
de saumon et les graines de courge grillées.
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

105
la galerie de 180 °C

matthieu paley
dans chaque numéro, 180 ˚c ouvre ses pages à des grands
noms de la photographie pour exposer leur travail autour
de la nourriture. pour cette seconde galerie, nous
avons choisi matthieu paley et ses images des populations
nomades des hauts plateaux du pamir afghan.
Par Sébastien Cauchon

Cuisson des naans sur feu de bouses de yak
séchées. Le bétail est la seule richesse des
Kirghizes, originaires de Sibérie, qui troquent
leurs animaux contre de la farine avec les
ethnies des vallées basses.

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

121
bernard, craqueur de recettes

Le scofa
après le plébiscite
des pastéis de
nata, bernard
de lacuisinedebernard.com
s’attaque cette fois-ci pour
180 ˚c à percer le secret
d’une recette religieusement
gardé…

Q

uand je pars à la recherche d’une recette,
c’est un peu un mélange entre une chasse
au trésor et une expérience de savant
fou. Je me retrouve dans ma cuisine avec
le sujet d’expérimentation et je m’amuse
à décortiquer le processus de fabrication :
je soulève la pâte, je mets au four pour voir la réaction des
crèmes, je goûte petits morceaux par petits morceaux. Je fais
tout d’abord un vrai travail d’analyse pour bien comprendre
le goût et entrevoir les étapes nécessaires à l’élaboration
de la dite recette. Ça, c’est pour le côté savant fou.
Le plus incroyable dans tout cela, c’est de savoir que l’on
a souvent tous les éléments pour refaire la recette chez soi,
il suffit simplement d’avoir les bonnes proportions pour

SSS
Texte et recette
Bernard LAURANCE
Stylisme
Delphine brunet
Photographies
éric fénot

la reproduire. La chasse au trésor, c’est cela même : chercher
pour déceler la combinaison qui fonctionne. Il faut trouver
la technique adéquate, puiser dans sa mémoire une recette
qui pourra s’approcher le plus possible puis la modifier jusqu’à
ne plus distinguer l’essai du sujet d’expérimentation.
Le trésor, c’est le code, la recette, ses proportions, qui, une
fois parfaites, donnent accès à l’un des délices de la Terre.
Encore faut-il dénicher ce trésor. Tenter de percer une recette
réputée secrète est la partie la plus passionnante, mais
également la plus exaspérante qui soit : souvent cela ne marche
pas et il faut encore et toujours recommencer. L’excitation est
à son comble dans l’expérimentation mais elle cède souvent le
pas à l’agacement quand je m’aperçois que je fais fausse route.
Jusqu’à ce moment où, sous mes yeux, le miracle se produit
et je parviens enfin à « craquer » l’ADN de la recette.

les vrais ingrédients

Aujourd’hui pour 180 °C je m’attaque donc au scofa.
Mais qu’est-ce donc ? Il s’agit d’un gâteau dont les
initiales donnent des indications sur les ingrédients :
S : sucre, C : caramel, O : œufs, F : farine et A : amandes !
Tout simplement. Cela donne un délicieux gâteau meringué
aux amandes fourré à la crème au beurre au caramel.
Il provient à l’origine du carmel de Niort et a été mis au point
il y a une soixantaine d’années. La recette ultra top secrète
a été transmise puis produite sous licence dans l’abbaye
de Ligugé puis au carmel de Lisieux. Je vous invite comme
toujours à aller découvrir l’authentique gâteau sur place !
Mais dès qu’il y a un secret bien caché, c’est plus fort que
moi, je cherche à le percer ! De cette manière, vous pourrez
découvrir le scofa à la maison car il n’est pas facile de se le
procurer. Pour goûter et comprendre le scofa, j’ai dû prendre
le train pour Lisieux : un long voyage pour un seul gâteau
! Mais au moins j’avais la vraie liste des ingrédients utilisés
et je ne me reposais pas sur une simple légende (certaines
personnes pensent que le C du scofa fait référence à la crème,
alors qu’il n’y en a pas).
Nous ne saurons jamais tout à fait comment est fait le vrai
scofa, et c’est tant mieux. Cela laisse une part de rêve et
de mystère à cette spécialité dont la confection est cachée
derrière les murs du carmel de Lisieux sous l’œil protecteur
de sainte Thérèse S
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

133
toi, mon...

…  KitchenAid !
ma vie a changé il y a douze ans. le jour où mes
proches m’ont fait la surprise de m’offrir un
kitchenaid. enfin, ma vie de pâtissier amateur
j’entends, et ce n’était pas tout à fait une surprise…
SSS
Texte et recettes
Sébastien Cauchon
Photographies
éric fénot
Stylisme
Delphine Brunet

138

C

ela faisait en effet un moment
que je m’extasiais à voix haute
et intelligible sur la ligne parfaite
et les performances de cette
icône du design ménager,
surtout à l’approche de mon
anniversaire. Allant jusqu’à préciser que si,
un jour, j’avais la chance d’en posséder un,
c’était le modèle Artisan® couleur crème qui
avait ma préférence… Et, incroyable, c’est celui
que l’on m’a offert ! Au sein de la communauté
des passionnés de cuisine, l’objet alimente
régulièrement les fantasmes de ceux qui ne
le possèdent pas encore et suscite les louanges
de ceux qui ont sauté le pas. Une adoration qui
peut paraître démesurée à qui ne partagerait
pas cet engouement pour ce qui reste un robot
pâtissier. Car la bête est bien carrossée, certes,
et a la réputation d’être particulièrement
efficace, mais elle n’est pas donnée. Aussi,
le jour où le KitchenAid trône fièrement sur
le plan de travail, l’angoisse pointe derrière
la satisfaction d’avoir enfin touché le Graal.
Et s’il ne s’agissait que d’un batteur électrique
amélioré ? Au déballage, le poids de l’objet
tout en métal rassure et le bon à retourner
pour obtenir un livre de recettes fait plaisir.
Oubliez cependant ce dernier : daté et composé

d’improbables recettes exotiques, il est loin
d’être le meilleur ambassadeur de cette
magnifique machine. Car oui, redisons-le,
le KitchenAid est beau. Son look vintage
typique des Fifties US en a fait la star des
émissions de cuisine du monde entier et on
en connaît même certains qui se contentent
de l’utiliser comme élément de décoration
distinctif, au même titre qu’une Navy Chair
ou un fauteuil Eames. Les pauvres. Il est vrai
que son apparence en ferait presque oublier
ses mérites : un socle stable qui libère les
mains du pâtissier et fait gagner un temps
fou, et un mouvement rotatif « planétaire »
unique permettant d’obtenir une superbe
qualité d’émulsion allié à un robuste moteur
autorisant un pétrissage digne de ce nom.
Muni de ses trois outils de base (le fouet
métallique, le batteur plat, communément
appelé « feuille », et le crochet de pétrissage),
le KitchenAid réussit l’équation si difficile
à atteindre d’être à la fois admirable, fiable
et utile. C’est vrai, il ne chauffe ni ne cuit
comme certains de ses concurrents, ne râpe
ni ne tranche (même si des ustensiles en option
le lui permettent), mais on lui pardonne
aisément au vu de ses performances de pro
rendues accessibles aux amateurs pour monter
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

>

139
souvenir d’école

Objectif
CAP
Pâtissier Chocolatier

une vocation ancrée depuis toujours mais
embrassée tardivement… monique perez se souvient
que passer du rêve à la réalité d’un métier
de bouche nécessite plus que l’envie du moment
ou le passage devant trois caméras, et que cet
apprentissage est aussi celui de l’humilité.
144

L

a pâtisserie c’est comme la danse classique.
Face à l’émerveillement que procurent l’une
et l’autre, il faut en avoir fait l’expérience pour
comprendre ce qu’exige leur apprentissage.
Avant d’atteindre la perfection (éclair au
chocolat ou entrechat, même combat), chaque
élève aura éprouvé dans son corps rigueur et dépassement
de soi, appris à dompter son impatience et surmonter
l’inévitable découragement. Un travail en coulisses
qui ne doit jamais transparaître, le sacrifice d’années de
jeunesse qui, parfois, fait pourtant renoncer même
les plus passionnés.
Telle fut l’aventure dans laquelle je me suis
lancée, innocente, à… 37 ans !
Décidée à me reconvertir dans un
métier qui me fascinait depuis le
plus jeune âge, emportée par mon
amour pour la chose, j’ai intégré le
lycée professionnel de Clichy-sousBois. Objectif : décrocher le CAP
de pâtissier chocolatier. >

SSS
Texte Monique Perez
Illustrations Fabrice BLOCH

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

145
Rillettes
de lapin
Pour 2 pots
de 350 g environ
1 lapin coupé
en morceaux
d’environ 1 kg
2 oignons
2 carottes
8 abricots secs
2 feuilles de laurier
2 branches de thym
20 cl de vin blanc

❶ Épluchez les oignons et les carottes,
coupez-les en tranches puis faites-les
revenir dans une cocotte avec 2 cuillerées
à soupe de graisse de canard. Ajoutez
les morceaux de lapin, les abricots,
le thym, le laurier, le sel, le poivre, le clou
de girofle et le vin blanc. Couvrez et laissez
cuire à feu doux pendant 2 heures.

home made

Se réjouir

❷ Laissez refroidir et séparez la viande
des os avec une fourchette. Remettez la
viande dans la cocotte avec les légumes,
les aromates et 1 ou 2 cuillerées à soupe
de graisse.
❸ Mélangez bien puis remplissez des petits
bocaux et ajoutez un peu de graisse sur
le dessus, fermez puis gardez au frais.

du temps qui passe
ça souffle, ça gèle, ça mouille ? trois bonnes raisons de
rester au chaud dans notre cuisine cocon pour préparer
ce que l’on ne prend plus trop le temps de faire… ou de
rêvasser devant la cheminée en épluchant des coings. plus
de pelouse à tondre ni de petits pois à semer, il est temps
de se faire du bien et d’offrir le meilleur aux amis, aux
voisins, aux papis et aux petits.
SSS
Recettes & stylisme Delphine Brunet
Photographies Guillaume CZERW

152

1 clou de girofle
6 à 8 c. à s. de graisse
de canard
4 grosses pincées
de fleur de sel
2 pincées de poivre
concassé
5 c. à s. de sucre roux
2 pincées de fleur
de sel

À consommer dans les 3 à 4 jours.

Yaourts au lait
de chèvre
(p.154)

Pour 6 petits pots
1 l de lait de chèvre
entier
1 yaourt au lait
de chèvre entier
3 c. à s. de lait de
vache en poudre

❶ Faites tiédir le lait à environ 45 °C (pas
plus), ajoutez le yaourt et la poudre de lait.
Fouettez pour bien mélanger puis versez
dans des pots en verre ébouillantés.
❷ Chauffez le four à 50 °C, enfournez
les pots 3 heures puis éteignez le four et
laissez les pots à l’intérieur, sans ouvrir,
durant plusieurs heures (voire une nuit).

❸ Fermez-les ensuite avec des feuilles de
cellophane et placez-les au frais quelques
heures avant de les déguster.
Accompagnez-les de la gelée de coings
(voir p. 155).

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

153
technique... mais pas trop

Friture
sur toute la ligne
très utilisée en asie et dans tout le sud de l’europe,
la cuisson par friture dite “profonde” reste
marginale dans le répertoire des techniques
de la cuisine française. confinée aux beignets,
aux pommes de terre et à quelques poissons, ce vilain
petit canard des cuissons est délaissé, dans un
bel ensemble, par les chefs qui ne le connaissent
pas bien, les nutritionnistes qui l’ont excommunié
et les gourmets qui ne savent plus que penser…
mais pourquoi donc tant de haine ?
La friture : une cuisson bien huilée
La friture « profonde », celle où l’aliment est entièrement
immergé dans l’huile chaude, ne doit pas être vue
comme une simple cuisson mais plutôt comme
une « recomposition » de l’aliment ainsi préparé.
En effet : pendant la cuisson, l’aliment subit de très
nombreuses transformations biochimiques. Pendant
la friture, deux types de « transferts » sont à l’œuvre
dans l’aliment et en changent profondément la saveur,
la texture et même la composition.

SSS
Texte Stéphan lagorce
Photographies éric fÉnot

162

l’aliment et l’huile. En friture profonde, ce « gradient
thermique » est très élevé. Par ailleurs, plongé dans
l’huile, l’aliment subit une cuisson très particulière
dite « isotherme », c’est-à-dire identique sur toute
sa surface (température homogène, sans point chaud).
C’est l’association de ces deux caractéristiques uniques
« gradient thermique » élevé et « isothermie de surface »
qui donne aux aliments frits toutes leurs spécificités :
couleur dorée, texture croustillante, saveurs grillées
et torréfiées spécifiques.

Transferts thermiques
Tout d’abord, l’aliment cru dont la température est
d’environ 5 à 20 °C en moyenne dans la cuisine est plongé
dans un bain d’huile porté, lui, à 140-180 °C. Le « gradient
thermique » désigne la différence de température entre

Transferts de matières
Pendant la friture profonde, les interactions entre
l’aliment et le milieu de cuisson (l’huile chaude) sont
très nombreuses ! L’eau contenue dans l’aliment se vaporise
et sort de celui-ci en entraînant avec elle des protéines,
180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

>

163
Peter et Sandra Fischer, château Revelette, route de Rians, 13490 Jouques / Tél. : 04 42 63 75 43 / www.revelette.fr

raisin et sentiments

Peter Fischer

roi !
Provence 
de

aussi tourmenté que l’olivier et le vénérable figuier, mais
aussi jovial qu’un marseillais arpenteur de vieux port, l’homme
est ici dans son élément. un instant, il a le regard affûté
de l’aigle de bonelli scrutant l’horizon sur son rocher de la
sainte-  ictoire. un autre, il risque d’interpeller son copain d’un
v
tonitruant :“oh,pierrot, t’arrêtes de sentir mon vin ?bois-le ! 
”
accent provençal garanti… voyage dans le petit royaume
iconoclaste de revelette, en “provence continentale ”.
170

S

ilencieux, la chevelure toute ébouriffée par le vent d’hiver,
Peter Fischer fixe sa terre rouge parsemée de petits éclats de calcaire blanc
tout juste recouverts d’un léger duvet d’herbe tendre qui ferait le bonheur
des agneaux de Sisteron. Par moments, les yeux du vigneron observent une
petite troupe d’hommes recroquevillés sur des ceps rabougris par l’âge.
Ils se déplacent à la vitesse d’une échappée de petits-gris champions de
cross-country dans la rangée que lui-même vient de quitter et dans laquelle il a passé un
bon moment pour vérifier que la taille du grenache noir se faisait dans les règles de l’art,
ses règles à lui, celles d’un vigneron rusé mais exigeant, un gars à qui on ne la fait pas,
un type qui tient à sa future récolte comme à la prunelle de ses yeux, mais qui sait aussi
imprimer à son vignoble le sens de la mesure. La terre s’amourache à chacun de ses pas
tandis que Sisi, la cairn terrier aux poils grisonnants, inspecte le moindre bosquet

SSS
Texte Michel SMITH
Photographies éric fénot

>

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

171
même pas peur

La Poularde de Bresse
truffée en vessie Joannes Nandron

elles donnent des frissons autant qu’elles font saliver.
certaines recettes intimident les audacieux et titillent les
aguerris. avec un peu de rigueur et les judicieuses explications
de notre chef maison, vous aussi, vous oserez les affronter.
La volaille : bien choisir une volaille pas trop
grosse (sinon elle ne rentre pas dans la vessie).
Pour ma part j’ai utilisé une volaille un peu plus
petite (1,5 kg). La volaille de Bresse est idéale,
mais on peut se tourner également vers un coucou
de Rennes ou une gauloise blanche.

Les truffes fraîches sont idéales mais une jolie
truffe en boîte fait aussi l’affaire.

SSS
Photographies
éric fénot
Réalisation et adaptation
éric trochon
M.0.F. 2011

182

La vessie de porc : voilà le grand mystère de cette
recette (et une partie de son attrait…) ! Pour les
cuisiniers, c’est un peu l’ancêtre du sac sous vide…
Elle est soigneusement lavée, grattée et pliée avant
d’être séchée. C’est un procédé artisanal qui requiert
un peu de savoir-faire, il vaut donc mieux l’acheter
déjà prête (pas question d’utiliser de vessie fraîche).
Il faut la réhydrater soigneusement à l’eau salée
additionnée de vinaigre blanc avant de l’utiliser
pour qu’elle soit élastique.
Comme c’est une poche, on verifie qu’il n’y ait
pas de trous. Car si elle n’est pas étanche, elle ne
peut pas remplir son rôle de « sachet de cuisson 
en papillote ». On la retourne (l’interieur devient
l’exterieur) avant de la remplir (la baudruche
sera plus régulière). Le plus facile pour en
trouver consiste à se rapprocher d’un charcutier
artisan renommé (qui fabrique lui même toute
sa production…).

Les ingrédients
Pour 4 personnes
Une volaille de Bresse d’1,8 kg environ
Une vessie de porc dégorgée à l’eau salée
et vinaigrée
50 g de carottes*
50 g de navets*
50 g de céleri-rave*
8 belles lames de truffes
50 g de petits pois reverdis**
50 g de haricots verts cuits et coupés en petits
bâtonnets***
1 blanc de poireau cuit****
10 l de bouillon blanc de volaille
Madère (de très bonne qualité acheté

chez un caviste !)
Sel et poivre
La mousse de veau
150 g de filet mignon de veau, soigneusement paré
50 g de crème liquide à 35 % de matière grasse
Sel, poivre, une râpée de muscade
On peut ajouter aux ingrédients 50 g d’un
mélange de truffes et foie gras coupés en dés
ainsi que le foie de volaille.
* tournés à la petite cuillère à légumes et cuits. ** (c’est-à-dire juste
plongés quelques minutes dans une casserole d’eau bouillante puis
rafraîchis aussitôt). *** (c’est mieux de couper les haricots après
cuisson sinon ils se gorgent d’eau). **** bien égoutté sur du papier
absorbant.

180°C /automne-hiver 2013 / 14 A

183

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180 c Numéro 2

  • 1. L’homme de goût Michel Del Burgo, rencontre avec un chef reportages / réflexion / humeur / recettes #2 étoilé atypique, au parcours semé de défis et d’accidents, à la veille de nouvelles aventures. automne / hiver 2013-2014 Le marché de 180 °C Cerfeuil tubéreux, endive, cèpe, potimarron, foie gras, brochet, poire, figue… Les produits de saison à privilégier et les bons conseils pour les cuisiner. des recettes et des hommes L’huîtredans l’étang de Thau rose Cette merveille élevée d’après une méthode artisanale revisitée est le joyau de la famille Tarbouriech. des recettes et des hommes la communauté de l’ormeau Sylvain Huchette et son équipe élèvent en Bretagne l’ormeau bio de pleine mer, un mollusque aussi rare que succulent. divin quotidien 20 recettes pour illuminer la morne saison en prenant le temps de cuisiner. raisin et sentiments Portrait de Peter Fischer, vigneron bio, né en Allemagne, formé aux USA et établi avec bonheur en Provence. ISBN : 979-10-92254-02-0 19,90 euros www.180c.fr tables capitales divin quotidien dream team chabrol ni raclette semilla ripailleur ni tartiflette en cuisine
  • 2. édito #2 automne / hiver 2013-2014 M ook, revue, magazine, boni (Bel Ouvrage Non Identifié), bookazine, magalivre, ovni, cookzine (si, si on nous l’a vraiment fait)… Pas facile pour certains de mettre une étiquette sur 180 °C à la sortie de notre premier numéro. Et pour cause. Plus riche qu’un magazine mais diffusé en librairie, plus varié qu’un livre avec des reportages sur des paginations qu’on ne trouve plus en presse, déconnecté de l’actu pure mais aux taquets sur les saisons… On veut bien reconnaître que nous n’avons pas fait grand-chose pour simplifier la tâche à ceux qui aiment les chemins (de table) bien balisés. Une différence que nous revendiquons. D’abord parce que c’est ainsi que 180 °C est né dans l’esprit de quelques fous de cuisine affamés de nouveauté et de création, rejoints par quelques autres tout aussi enthousiastes à l’idée de tenter l’aventure. Ensuite parce que l’absence même de groupe de presse ou d’édition à nos côtés (c’est simple, nous faisons tout nous-même !) comme d’annonceurs (pas de pages de publicité non plus) nous donne cette indépendance et cette liberté de ton et de contenu à laquelle nous sommes attachés. Enfin, et surtout, parce que cette façon très personnelle, à la fois exigeante, parfois foutraque, toujours authentique et curieuse d’éditer cette revue (c’est le terme que nous préférons) nous a permis de rencontrer nos lecteurs ! Oh bien sûr notre tirage (15 000 exemplaires) est encore modeste, nous ne faisons trembler aucun mastodonte du secteur et nous avons besoin de votre soutien (le bulletin d’abonnement se trouve en page 191 !) pour avoir le temps (et les moyens) de développer tous les projets que nous avons en tête, notamment dans l’univers numérique (notre application de recettes est cependant dès à présent disponible sur l’AppleStore !). Mais tout de même, se dire que sur la base de cette idée un peu folle et de l’énergie dépensée par une poignée d’acharnés, nous nous sommes retrouvés ces derniers mois plusieurs milliers à partager cette même passion pour le bon autour de 180 °C… Vous, je ne sais pas, mais moi, ça me donne sacrément faim. Sébastien Cauchon, Rédacteur en chef
  • 3. sommaire S S S #2 p. 44 F le automne / hiver 2013-2014 marché de 180 ˚c La sélection automne-hiver Des produits de saison et les conseils pour les préparer au mieux. p. 104 F divin quotidien p. 136 le goût des mots Ni Raclette, Ni Tartiflette Le français, ce n’est pas de la tarte p. 144 souvenir d’école Des recettes pour se réconforter sans crouler sous les féculents ni le fromage fondu. Chiche ? Objectif : CAP Pâtissier Chocolatier p. 152 home made p. 6 F l’homme 6 recettes pour apprécier les délices de l’hiver de goût l ’étoile filante p. 132 F BERNARD, La recette secrète du gâteau du carmel de Lisieux démystifiée par le redoutable Bernard. p. 24 F itinéraire Les tables Parisiennes de Chabrol p. 32 F SUPER PRODUCTION La communauté de l’ormeau Sylvain Huchette a créé en Bretagne le premier élevage français de ce délicieux mollusque méconnu. Le célèbre robot pâtissier US a conquis le cœur de notre rédacteur en chef. team p. 162 F technique, mais pas trop les sémillants archives de la cuisine Menus plaisirs p. 90 F SUPER PRODUCTION Tarbouriech Les Huîtres Roses de l’étang de Thau, joyaux de la famille Tarbouriech. french and parfait p. 182 même pas peur La volaille en vessie de Paul Bocuse La friture des pommes de terre Rencontre en coulisses avec la brigade et le chef qui œuvrent avec bonheur au Semilla. p. 84 F les p. 168 (I love you Mimolette) KitchenAid ! p. 68 F dream La tarte aux mille saveurs Mimolette je t’aime p. 138 F TOI MON… Bruno Fuligni, historien, décrypte les menus de l’alliance franco-russe conservés à la bibliothèque Carnegie de Reims. 2 dérapage culinaire LE SCOFA Portrait de Michel del Burgo, chef étoilé au parcours aussi remarquable que chaotique. Cinéaste de la province, Claude Chabrol avait ses adresses et ses plats de prédilection à Paris. p. 160 CR AQUEUR DE RECETTES p. 120 F la galerie de 180 ˚c p. 186 Plus complexe qu’on ne le croit, on vous la détaille dans les règles de l’art. p. 187 Matthieu Paley étymotest L’umami, késako ? sans façon Les 5 choses qu’on aimerait ne plus subir au restaurant p. 188 Les images étonnantes et fascinantes de ce photoreporter spécialisé dans les régions de l'Ouest Himalaya. cook books La sélection des livres de cuisine étrangers. Que valent les ouvrages des vedettes ? p. 190 after buzz p. 170 F R A ISIN ET SENTIMENTS Peter Fischer, roi de Provence ! Visite au Château Revelette, domaine d’un vigneron bio des côteaux d’Aix. Les fiefs de la Rue du Nil : Terroirs d’Avenir & Frenchie p. 192 connoisseurs only Jolies poupées 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 3
  • 4. rédaction Comité éditorial  des recettes et des hommes michel smith Journaliste spécialisé en vin, gastronomie et tourisme, auteur de guides de voyages et d’ouvrages sur le vin (dernier en date : Les Grands Crus du Languedoc et du Roussillon). Il prépare un « livre d’amour » sur le cépage carignan à paraître en 2014. éric fénot sébastien cauchon delphine brunet fabrice bloch contributeurs Textes philippe toinard Chroniqueur gastronomique indépendant, il collabore à plusieurs titres de presse. Parallèlement, il a publié plus de quinze livres de cuisine, animé de nombreuses émissions télévisées dédiées à la cuisine et présente actuellement une chronique sur BFM TV. guillemette odicino Portraits des contributeurs par Marie Delafon. Critique et journaliste de cinéma à Télérama où elle signe plusieurs hors-séries, elle participe régulièrement à de nombreuses émissions pour la radio et la télévision (France2, CANAL+, Europe1, France Inter...). stéphan lagorce Formé par Jean Delaveyne et Philippe Da Silva, il a travaillé aux États-Unis puis en République Populaire de Chine où il a été chef du Maxim’s de Pékin. Ingénieur agronome, il est aussi professeur des Sciences de l’aliment et auteur de nombreux ouvrages culinaires. éric libiot + éric trochon, chihiro masui, matthieu paley, alexandre isard, marie delafon, marine belkebir, et merci à Xavier Dupuy, président de La Cornue. 4 Né à Brest, il monte à Paris à 20 ans voir des films de toutes les couleurs. Commence à écrire un peu partout et sur un peu de tout (cinéma, Fort Boyard, roman policier, retraites complémentaires…). Après Première il rejoint L’Express dont il est le rédacteur en chef service culture/arts et spectacles depuis 2006. bruno fuligni Haut fonctionnaire, maître de conférences à Sciences Po, directeur de la collection « Tribuns » à la Documentation française, auteur de seize ouvrages sur l’histoire politique française et les utopies, dont Le Livre des espions et Les Frasques de la Belle Époque. monique perez Après plusieurs années dans l’audiovisuel et des week-end entiers passés à cuisiner pour les autres, Monique décide il y a cinq ans de sauter le pas et de réaliser son grand rêve : devenir pâtissière. CAP de pâtisserie (mais aussi de cuisine) en poche, elle crée son entreprise de traiteur haut de gamme, « Les Reines ». Elle travaille aujourd’hui à un projet de découvertes culinaires en milieu scolaire. bernard laurance Grand voyageur, gourmand insatiable et perfectionniste, Bernard livre depuis quatre ans ses recettes du monde sur son blog lacuisinedebernard.com. Il dévoile aujourd’hui ses tours de main lors d’ateliers, développe des projets pour la télévision et termine l’écriture de son premier livre consacré à la pâtisserie. cécile delarue Journaliste à la télévision et ailleurs, Cécile Delarue est installée à Los Angeles depuis trois ans et s’est lancée dans une véritable croisade pour sauver les Américains de la bad-bouffe. Son blog et ses vidéos décalées sont à suivre sur frenchandparfait.com édité par Thermostat 6 S.A.R.L. au capital de 5 000 euros Siège social : 8, rue des Goncourt 75011 Paris www.180c.fr facebook.com/180C.LaRevue twitter : @180C_LaRevue Directeur de la rédaction éric Fénot eric@180c.fr Rédacteur en chef Sébastien Cauchon sebastien@180c.fr Directeur artistique Fabrice Bloch fabrice@180c.fr Rédactrice et styliste culinaire Delphine Brunet delphine@180c.fr Conseiller culinaire Éric Trochon M.O.F. 2011 eric.t@180c.fr Secrétaires de rédaction Sophie Schang & Audrey Génin Directeur commercial Erwan Bouët Willaumez erwan@180c.fr Marketing et réseaux sociaux Benjamin Gratton benjamin@180c.fr Emmanuel Brunet emmanuel@180c.fr Vincent Rivalle vincent@180c.fr Retouches www.dmbm.fr Photographies patrick swirc Formé à l’école de photographie de Vevey en Suisse, ce portraitiste de renom travaille régulièrement pour les plus grands titres de presse (Libération, Elle, Télérama…). guillaume czerw Spécialisé en prises de vues culinaires, il travaille aussi bien en reportage qu’au sein de son propre studio, essentiellement pour la presse et l’édition, tout en poursuivant le développement de projets personnels. Imprimé et relié en France par : Chirat, 744, rue de Sainte-Colombe 42540 Saint-Just-la-Pendue Diffusion Géodif 01 44 41 11 11 geodif@eyrolles.com Relations libraires Virginie Migeotte Nathalie Lacroix relationslibraires@thermostat6.com Relations presse Life Style RP Floriane Toinard Tél. : 06 62 46 21 22 floriane.toinard@lifestyle-rp.com ISBN : 979-10-92254-02-0 ISSN : 2268-1892. Dépôt légal : octobre 2013 © 2013, Thermostat 6. Tous droits réservés, pour tous pays. 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 5
  • 5. l’homme de goût Michel del Burgo, l’étoile filante adulé par certains confrères, raillé par d’autres sous couvert d’anonymat, michel del burgo est un cuisinier à fleur de peau au parcours constellé d’étoiles. formé par les plus grands, promis à une immense carrière, ses dix dernières années peuvent pourtant paraître chaotiques, entre ombres et lumières. SSS Texte Philippe Toinard Photographies éric fénot 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 7
  • 6. itinéraire Pour Chabrol, Le Repaire de Cartouche était la cour des miracles. Chabrol in city the du réalisateur on connaît la filmographie somptueuse tout autant que la fascination pour la province, sa bourgeoisie, ses codes, ses petits travers mais aussi ses grands plats. entre deux tournages, claude chabrol avait également un goût très sûr en matière de bonnes tables à paris. des adresses parfois surannées mais à l’indéniable authenticité et dont 180 ˚c révèle ici la cartographie à l’attention des solides appétits. SSS Texte Guillemette Odicino Photographie de Claude Chabrol alexandre isard S e mettre à table… On pense à un suspect avouant, enfin, son crime dans un bon film policier, et cette expression prend tout son (double) sens avec le cinéaste le plus gourmand d’entre les gourmets (et inversement) : Claude Chabrol. Chacha pour les intimes, se léchant les babines, buvant du petit lait dès qu’un mets alléchant se profilait à l’horizon. 24 Tout a été dit, écrit, sur la manière dont il sélectionnait ses lieux de tournages : des villes où il faisait bon boire et manger, car le grand Claude était homme à mélanger plaisir et travail, à même considérer que l’un n’allait pas sans l’autre, et vice et versa et lycée (hôtelier) de Versailles. Un homme qui se géolocalisait d’après les spécialités du coin, le Guide Michelin à la main, et tenait, plus que tout, à la qualité de la cantine pour ses ouailles, cela force notre respect. > 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 25
  • 7. France Haliotis. Kerazan 29880 Plouguerneau / Tél. : 02 98 37 17 39 / www.francehaliotis.com super production La communauté de l’ormeau sylvain huchette, patron de france haliotis, s’est installé dans le finistère pour élever et commercialiser ce mollusque étrange et méconnu. réservé aux initiés. ou quasi… SSS Texte Éric Libiot Photographies Patrick swirc C ’est un temps d’hiver breton typique. Du grand beau sur les côtes finistériennes, aux abords de l’Aber-Wrac’h, chauffées par un soleil éclatant. Ou presque. Disons qu’un léger crachin est venu embellir les lieux, histoire de ne pas trop dépayser le chaland. De toute manière, il va falloir se mouiller pour raconter cette histoire en forme de conte et légende. À quelques encablures de la plage, l’Abalone fait le boulot. À bord, Xavier, le Ch’ti rieur, patron du bateau, et Iain, l’Écossais mutique, son second, remontent les cages. Il faut toute la patience et l’expérience d’un génie en mécano général pour déboulonner ces foutus écrous qui les tiennent fermées. Une fois les cages ouvertes, Xavier et Iain prennent de larges brassées d’algues qu’ils jettent à l’intérieur. En s’approchant, on pourrait presque entendre les cris de joie de ceux qui viennent de recevoir de la nourriture toute fraîche. L’ormeau. Mollusque marin élevé en mer, de la famille des gastéropodes prosobranches, ce qui n’est pas un gros mot. Coquille interne nacrée. Chair tendre. Cuisiné snaké. Les Japonais en raffolent. Pour en définir le goût > 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 33
  • 8. le marché de 180 °C C’est bon maintenant Le panier automne hiver une fois rangés les parasols, les bouées-canards et autres paréos, le gourmet peut enfin reprendre une activité normale et se consacrer aux bonheurs espérés de la méchante saison. cèpes, potimarrons, perdreaux, parmi d’autres richesses, sont en vedette et adoucissent la froidure du moment… mais s’évaporent aussi sûrement que les jours raccourcissent. accueillez sans délai ces trésors aux fumets nostalgiques d’humus, de sous-bois et de brumes. carpe diem… le cèpe : la tête ou la queue ?  En automne, toutes affaires cessantes SSS Textes et recettes Stéphan lagorce Photographies éric fénot Stylisme Delphine Brunet Aussi sûrement que l’arthritique va à l’ascenseur, l’authentique gourmand va au cèpe. Qu’est-ce qu’un beau cèpe ? Faut-il juger la vigueur de sa queue ou l’arrondi quasi planétaire de sa tête ? Vaste question à laquelle le grand chef et mycologue confirmé Jean Delaveyne, répondait par un lapidaire : « On doit pouvoir les manger crus ! » Cependant, pour le néophyte, les bons signes sont plus précis : une texture assez ferme, des couleurs bien marquées et, surtout, une légère odeur de sous-bois, incontestable… Il ne faut pas craindre la présence de brindilles, mousses et autres feuilles ou limaçons qui, compagnons de voyage, accompagnent naturellement les champignons. La provenance des cèpes est troublante puisqu’ils nous arrivent, pour l’essentiel, des pays de l’Est : Biélorussie, Ukraine, Bulgarie… Pourtant les cèpes de la Corrèze, de la Dordogne ou du Limousin sont réputés pour leur saveur unique. Au fait, dit-on cèpe ou bolet ? Comme il vous plaira tant qu’il s’agit de Boletus edulis, le meilleur d’entre tous. Côté cuisine, Jean Delaveyne ébouillantait très rapidement ses champignons avant de les cuisiner. Jean-Michel Bédier, son élève, les accommodait en ragoût, avec du noilly, des échalotes et de la crème fraîche. Aujourd’hui, la jeune génération s’est affranchie des traditions, établies par les maîtres : le cèpe, désormais, se déguste en carpaccio ou en sorbet. Mais à la maison, les apprêts les plus simples remportent tous les suffrages, surtout en faisant les bons mariages. Les cèpes convolent naturellement avec les pommes de terre, l’ail, le persil, la graisse de canard, les échalotes et la crème fraîche… Un blanc sec et minéral soulignera bien les arômes pénétrants du cèpe. Tout comme le xérès racé de Sanlucar de Barrameda fait merveille avec les huîtres. 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 45
  • 9. le marché de 180°C Pour 4 personnes / Difficulté : TRÈS LIMITÉE somme toute, à la cueillette des cèpes eux-mêmes Indice de patience requis : TRÈS BAS, vu le résultat obtenu Les cèpes farcis Une petite recette apparemment toute simple, que plus personne n’ose préparer… Quel dommage ! Jean Delaveyne, le grand, l’illustre chef et expert mycologue la concoctait pour quelques clients triés sur le volet dans son restaurant Le Camélia à Bougival. Autres temps, autres coutumes : les champignons se servent, désormais en « espuma », « consommé » et autres « vapeurs ». À quand la pommade ? Cèpes 4 gros cèpes (dont le chapeau fasse, si possible au moins 10-15 cm de diamètre) Graisse d’oie ou de canard Farce 3 poignées de champignons des bois (trompettes-de-la-mort, girolles, chanterelles, lactaires, etc.) 4 échalotes Quelques brins de persil plat 2 tranches de jambon sec (Bayonne, Serrano, Parme…) 400 g de poitrine de porc fraîche (pas simple à  trouver, ça, demandez au boucher) 1 c. à s. de chapelure (et un peu plus) 1 œuf 2 ou 3 c. à s. d’armagnac Cuisson 4 tomates 1 gousse d’ail hachée 2 c. à s. de persil haché Thym frais Un verre de vin blanc sec Sel et poivre ❶ Les cèpes (comme ils sont beaux… Quel dommage de les cuisiner !) Allez courage : le début, c’est le plus pénible. Détachez les pieds des cèpes. Nettoyez-les et mettez-les de côté. Nettoyez également leur chapeau. Ne les passez tout de même pas à la machine : ils y perdraient toute leur saveur. Dans une grande poêle, faites sauter dans deux ou trois cuillerées à soupe de graisse les chapeaux de cèpe salés et poivrés, un par un et des deux côtés pendant une bonne dizaine de minutes. grossièrement les pieds des cèpes (pas vos doigts). Faites sauter tous ces champignons dans une grande poêle bien chaude avec deux ou trois cuillerées à soupe de graisse. Salez, poivrez. Ajoutez les échalotes et le persil hachés au terme de la cuisson (10 minutes, en gros). Sortez du feu, laissez refroidir. Hachez la poitrine de porc (ou faites-le faire), hachez aussi le jambon, mais pas trop. Dans un saladier, mélangez le porc, le jambon, les champignons sautés, la chapelure, l’œuf et l’armagnac. Salez, poivrez, mélangez bien. ❷ La farce (esthètes florentins, abstenez-vous) Lavez, si besoin, les champignons des bois, coupez ❸ Les cèpes farcis (Ah : ça se précise !) Salez, poivrez les chapeaux de cèpe sautés, répartissez la farce Pour 6 PERSONNES Difficulté : GÉRABLE Indice de patience requis : LIMITÉ, somme toute ❹ La cuisson (ouf, pas trop tôt…) Huilez légèrement un plat allant au four (pardi !) et assez grand pour tenir les cèpes, sans qu’ils ne se chevauchent (un peu de décence, s’il vous plaît). Coupez les tomates en tranches, placez-les au fond du plat. Posez par-dessus les cèpes farcis. Versez le vin blanc, saupoudrez le tout d’ail et de persil hachés (pas trop). Enfournez 40 minutes, laissez reposer 3-4 minutes avant de vous mettre à table avec un joli bergerac et profitez-en… Velouté de champignons, cèpes et noix caramélisées Alexandre Dumas consacre un chapitre aux cèpes dans son Grand Dictionnaire de cuisine, c’est dire ! Il y distingue les cèpes francs à tête noire et ceux à tête rousse. Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse… ❶ Le bouillon (tel quel : c’est déjà délicieux !) Coupez le pied des champignons et lavez-les. Hachez les échalotes et faites-les suer au beurre. Ajoutez les champignons finement coupés, salez, poivrez. Couvrez, laissez cuire 5 minutes. Versez 1,5 litre d’eau froide. Portez à ébullition, puis laissez mijoter très doucement 1 heure. Filtrez et conservez le bouillon parfumé ; servez les champignons de Paris cuits et fades aux enfants. ❷ Le roux Faites fondre le beurre. Ajoutez la farine, faites cuire doucement 1 minute en remuant. Réservez. ❸ Le velouté (enfin… ) Nettoyez les cèpes. Coupez-les en morceaux (gros comment ? Débrouillez-vous !). Faites-les sauter dans une cocotte dix minutes avec 2 noix de beurre, le sel, le poivre et les échalotes hachées. Ajoutez ensuite le bouillon, portez à ébullition, laissez cuire encore 10 minutes (les petits, assez fermes, demandent plus de temps que les gros). Mixez finement hors du feu. Prélevez-en un bol : laissez tiédir. Ajoutez le roux et mélangez. Versez ensuite cette préparation bizarre dans la cocotte en mixant pour bien la disperser. Portez à petite ébullition en mélangeant sans arrêt, sortez du feu puis ajoutez la crème, mélangez. Servez avec les noix préalablement caramélisées dans une poêle avec le sucre, puis refroidies et concassées et un trait d’une (très) bonne huile d’olive. Faites faire la vaisselle par les invités. 46 par-dessus. Poivrez, saupoudrez, avec tact, de thym frais et de chapelure. Faites préchauffer le four, comme cette gazette, à 180 °C (th. 6). Bouillon de champignons 1 kg de champignons de Paris très frais (sinon, ne faites pas la recette) 2 échalotes 1 noix de beurre Roux 40 g de farine (plus ou moins selon l’épaisseur voulue) 60 g de beurre Velouté 1 kg de cèpes (plutôt gros que petits, ils sont plus tendres et goûteux) 1,3 l de bouillon de champignons (pas de panique, vous l’avez déjà fait) 15 cl de crème épaisse 3 noix de beurre 2 échalotes Sel et poivre Noix caramélisées 6 c. à s. de cerneaux de noix entiers 6 c. à s. de sucre en poudre Huile d’olive top qualité 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 47
  • 10. semilla. 54, rue de seine, 75006 paris / Tél. : 01 43 54 34 50 dream team Les sémillants souvent ignorée, rarement citée, la brigade des talents qui entourent un chef en cuisine est pourtant déterminante dans la réussite et la renommée de ses plats. 180 ˚c s’est invité dans les coulisses du semilla pour aller à la rencontre de ceux qui accompagnent notre chef maison, éric trochon. SSS Texte Sébastien CAUCHON Photographies éric fénot O n a beau savoir que semilla signifie « graine » en espagnol, lorsqu’on pénètre au petit matin dans le restaurant du même nom (une fresque murale évoquant sept étapes de germination le rappelle d’ailleurs fort à propos), on ne peut s’empêcher d’avoir aussitôt en tête l’adjectif « sémillant » face au frétillement de la jeune équipe qui s’active. « D’une vivacité pétillante et gaie » nous renseigne le Larousse, et c’est bien l’esprit du lieu et de cette brigade qui virevolte en souriant sous nos yeux. Le jour de notre venue, le monte-charge était capricieux. Ni une ni deux, commis, serveuses et souschef improvisent un ballet fluide pour transporter les caisses de fruits, légumes et épicerie déposées à l’aube par les fournisseurs vers le garde-manger situé dans le dédale des caves de cet immeuble de la rue de Seine. C’est en effet à proximité des biens connus Fish La Boissonnerie, Cosi et La Dernière Goutte que l’Américain Juan Sanchez et le Néo-Zélandais Drew Harré ont lancé en 2012 ce néobistrot confié au Meilleur Ouvrier de France éric Trochon, associé et « consulting chef » du lieu. Et c’est parce qu’éric fait partie de l’équipe de 180 °C qu’il a accepté ce que > 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 69
  • 11. Menu du banquet d’inauguration de la Fontaine Subé, le 15 juillet 1906, sous la présidence de Léon Bourgeois. Reims, BM, A 121. les archives de la cuisine Menus plaisirs champagne et biscuits roses : c’est ce qu’évoque, de prime abord, la ville de reims au gastronome pressé. on sait moins qu’une de ses bibliothèques abrite une fabuleuse collection de menus anciens. SSS Texte Bruno Fuligni Menu du banquet du 3 vendémiaire an 90 (24 septembre 1881), organisé par le Comité républicain radical sous la présidence du député Courmeaux, pour le 90e anniversaire de la République. Reims, BM, A 135. 84 L ’obus allemand qui, en 1917, incendia l’hôtel de ville de Reims, détruisit d’inestimables trésors : au premier étage, en effet, se trouvait la bibliothèque municipale, riche d’un fonds extraordinaire d’ouvrages confisqués aux églises et abbayes d’alentour pendant la Révolution. Les Champenois, gens prudents, habitués par l’histoire aux invasions venues de l’Est, avaient toutefois mis à l’abri les documents les plus précieux : en sous-sol, cent mille manuscrits et imprimés échappèrent à la catastrophe et attendirent des jours meilleurs. Le martyre de Reims, sa cathédrale ravagée, ses gargouilles crachant le plomb fondu de la toiture en flammes émurent le monde entier : à la fin de la Grande Guerre, au nom de l’amitié franco-américaine, la Fondation Carnegie pour la Paix internationale contribua au relèvement de la cité meurtrie. Il fallait pour cela l’élan d’un milliardaire philanthrope et Andrew Carnegie fit bien les choses. C’est ainsi qu’au chevet de la cathédrale restaurée se trouve aujourd’hui la bibliothèque qui porte son nom. Dans ce palais Art Déco, rehaussé d’étranges mosaïques de marbre et d’onyx, les cent mille pièces rescapées ont trouvé un refuge solide, où de nouvelles acquisitions les ont bientôt rejointes. Parmi ces joyaux, sept cents menus des xixe et xxe siècles : bien plus qu’une succession de repas plantureux, ils nous racontent une histoire politique et philosophique de la iiie République. C’est pourquoi, sans doute, les conservateurs ont eu la bonne idée de faire de cette collection un fonds en soi, que le chercheur consulte en feuilletant une série d’albums, avec l’impression confuse de s’être assis dans la machine à remonter le temps. SSS La République se veut conviviale parce qu’elle est d’abord démocratique et plébéienne, comme la grande Révolution de 1789. Ses banquets doivent être simples et francs, pour convenir au peuple : potage, bœuf en sauce, rôti de veau et légumes, annonce sobrement ce menu daté du 3 vendémiaire an 90 (24 septembre 1881), pour le banquet « organisé par le Comité républicain radical sous la présidence du citoyen Eugène Courmeaux, député de la 1re circonscription de Reims, en l’honneur du 90e anniversaire de la proclamation de la République ». Le député Courmeaux ne s’en trouvera pas plus mal, car ces plats de ménage sont encore suivis de roast-beef, salade, fromage, biscuits, café, liqueurs et champagne… À travers ce repas pour le moins arrosé et carné, 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A > 85
  • 12. Médithau. Mas de Montpenèdre, 34340 Marseillan / Tél. : 04 67 77 23 21 / www.medithau.com et www.huitreseven.com super production Tarbouriech la vie en rose SSS Texte Philippe Toinard Photographies éric fÉnot pour apprécier l’immensité de l’étang de thau, il faut gravir le mont saint-clair à sète. de là, vue imprenable sur le plus grand étang du languedoc où s’alignent des centaines de tables sous lesquelles les huîtres de bouzigues grossissent sans jamais connaître les marées. sauf qu’un homme, florent tarbouriech, en a décidé autrement. 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 91
  • 13. divin quotidien Pour 4 personnes 250 g de girolles 1 botte de ciboulette 4 c. à s. d’huile d’olive 6 œufs 10 cl de crème fraîche épaisse 1 gousse d’ail Sel et poivre ni raclette, ni tartiflette... Les entrées en douceur Brouillade de girolles ❶ Rincez rapidement les champignons sous l’eau froide, égouttez-les puis épongez-les soigneusement dans du papier absorbant. Coupez-les en deux ou trois selon leur grosseur. ❷ Ciselez la ciboulette et hachez l’ail finement. ❸ Battez les œufs avec la crème fraîche, du sel et du poivre. les saisons passent et reviennent, les recettes aussi, toujours un peu les mêmes… on a froid, il fait gris, on s’ennuie ! c’est le temps pour cuisiner et partager nos découvertes, faire goûter nos trouvailles et vivre au rythme des produits si riches de ces saisons que l’on croit mortes. voici une sélection de recettes simples et faciles pour redonner vie aux plus frileux et défier la morosité ambiante… SSS Recettes & stylisme Delphine Brunet Photographies Guillaume czerw ❹ Dans une grande poêle, faites revenir les girolles dans l’huile d’olive pendant 5 à 10 minutes jusqu’à évaporation de toute leur eau. Ajoutez la ciboulette et l’ail puis laissez rissoler quelques instants avant de verser les œufs. Remuez avec une cuillère en bois pendant 5 minutes. Rectifiez l’assaisonnement puis servez aussitôt. Pour 4 personnes 2 œufs 100 g de yaourt de brebis 150 g de potimarron 10 cl de lait 200 g de farine 1 sachet de levure 2 c. à s. de graines de pavot 150 g de saumon fumé 40 g de beurre mou Quelques brins d’aneth 1 c. à c. de baies roses 2 c. à s. d’huile d’olive 2 c. à s. de graines de courge Sel et poivre Blinis de potimarron et rillettes de saumon ❶ Coupez le potimarron en morceaux. Faites-les cuire 15 minutes à la vapeur et écrasez-les en purée. ❷ Coupez le saumon en fines lanières puis ajoutez le beurre mou, l’aneth ciselé, les baies roses concassées et du poivre. Écrasez à la fourchette et réservez au frais. ❸ Séparez les blancs des jaunes d’œufs. Battez les jaunes avec le yaourt, le lait et la purée de potimarron. Ajoutez la farine, la levure, du sel, du poivre et les graines de pavot. Mélangez bien. ❹ Montez les blancs d’œufs en neige avec une pincée de sel avant de les incorporer délicatement au mélange. ❺ Faites griller à sec les graines de courge avec du sel. Réservez. Déposez des louches de pâte dans une poêle chaude huilée. Laissez cuire 2 à 3 minutes de chaque côté. Servez les blinis chauds avec les rillettes de saumon et les graines de courge grillées. 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 105
  • 14. la galerie de 180 °C matthieu paley dans chaque numéro, 180 ˚c ouvre ses pages à des grands noms de la photographie pour exposer leur travail autour de la nourriture. pour cette seconde galerie, nous avons choisi matthieu paley et ses images des populations nomades des hauts plateaux du pamir afghan. Par Sébastien Cauchon Cuisson des naans sur feu de bouses de yak séchées. Le bétail est la seule richesse des Kirghizes, originaires de Sibérie, qui troquent leurs animaux contre de la farine avec les ethnies des vallées basses. 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 121
  • 15. bernard, craqueur de recettes Le scofa après le plébiscite des pastéis de nata, bernard de lacuisinedebernard.com s’attaque cette fois-ci pour 180 ˚c à percer le secret d’une recette religieusement gardé… Q uand je pars à la recherche d’une recette, c’est un peu un mélange entre une chasse au trésor et une expérience de savant fou. Je me retrouve dans ma cuisine avec le sujet d’expérimentation et je m’amuse à décortiquer le processus de fabrication : je soulève la pâte, je mets au four pour voir la réaction des crèmes, je goûte petits morceaux par petits morceaux. Je fais tout d’abord un vrai travail d’analyse pour bien comprendre le goût et entrevoir les étapes nécessaires à l’élaboration de la dite recette. Ça, c’est pour le côté savant fou. Le plus incroyable dans tout cela, c’est de savoir que l’on a souvent tous les éléments pour refaire la recette chez soi, il suffit simplement d’avoir les bonnes proportions pour SSS Texte et recette Bernard LAURANCE Stylisme Delphine brunet Photographies éric fénot la reproduire. La chasse au trésor, c’est cela même : chercher pour déceler la combinaison qui fonctionne. Il faut trouver la technique adéquate, puiser dans sa mémoire une recette qui pourra s’approcher le plus possible puis la modifier jusqu’à ne plus distinguer l’essai du sujet d’expérimentation. Le trésor, c’est le code, la recette, ses proportions, qui, une fois parfaites, donnent accès à l’un des délices de la Terre. Encore faut-il dénicher ce trésor. Tenter de percer une recette réputée secrète est la partie la plus passionnante, mais également la plus exaspérante qui soit : souvent cela ne marche pas et il faut encore et toujours recommencer. L’excitation est à son comble dans l’expérimentation mais elle cède souvent le pas à l’agacement quand je m’aperçois que je fais fausse route. Jusqu’à ce moment où, sous mes yeux, le miracle se produit et je parviens enfin à « craquer » l’ADN de la recette. les vrais ingrédients Aujourd’hui pour 180 °C je m’attaque donc au scofa. Mais qu’est-ce donc ? Il s’agit d’un gâteau dont les initiales donnent des indications sur les ingrédients : S : sucre, C : caramel, O : œufs, F : farine et A : amandes ! Tout simplement. Cela donne un délicieux gâteau meringué aux amandes fourré à la crème au beurre au caramel. Il provient à l’origine du carmel de Niort et a été mis au point il y a une soixantaine d’années. La recette ultra top secrète a été transmise puis produite sous licence dans l’abbaye de Ligugé puis au carmel de Lisieux. Je vous invite comme toujours à aller découvrir l’authentique gâteau sur place ! Mais dès qu’il y a un secret bien caché, c’est plus fort que moi, je cherche à le percer ! De cette manière, vous pourrez découvrir le scofa à la maison car il n’est pas facile de se le procurer. Pour goûter et comprendre le scofa, j’ai dû prendre le train pour Lisieux : un long voyage pour un seul gâteau ! Mais au moins j’avais la vraie liste des ingrédients utilisés et je ne me reposais pas sur une simple légende (certaines personnes pensent que le C du scofa fait référence à la crème, alors qu’il n’y en a pas). Nous ne saurons jamais tout à fait comment est fait le vrai scofa, et c’est tant mieux. Cela laisse une part de rêve et de mystère à cette spécialité dont la confection est cachée derrière les murs du carmel de Lisieux sous l’œil protecteur de sainte Thérèse S 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 133
  • 16. toi, mon... …  KitchenAid ! ma vie a changé il y a douze ans. le jour où mes proches m’ont fait la surprise de m’offrir un kitchenaid. enfin, ma vie de pâtissier amateur j’entends, et ce n’était pas tout à fait une surprise… SSS Texte et recettes Sébastien Cauchon Photographies éric fénot Stylisme Delphine Brunet 138 C ela faisait en effet un moment que je m’extasiais à voix haute et intelligible sur la ligne parfaite et les performances de cette icône du design ménager, surtout à l’approche de mon anniversaire. Allant jusqu’à préciser que si, un jour, j’avais la chance d’en posséder un, c’était le modèle Artisan® couleur crème qui avait ma préférence… Et, incroyable, c’est celui que l’on m’a offert ! Au sein de la communauté des passionnés de cuisine, l’objet alimente régulièrement les fantasmes de ceux qui ne le possèdent pas encore et suscite les louanges de ceux qui ont sauté le pas. Une adoration qui peut paraître démesurée à qui ne partagerait pas cet engouement pour ce qui reste un robot pâtissier. Car la bête est bien carrossée, certes, et a la réputation d’être particulièrement efficace, mais elle n’est pas donnée. Aussi, le jour où le KitchenAid trône fièrement sur le plan de travail, l’angoisse pointe derrière la satisfaction d’avoir enfin touché le Graal. Et s’il ne s’agissait que d’un batteur électrique amélioré ? Au déballage, le poids de l’objet tout en métal rassure et le bon à retourner pour obtenir un livre de recettes fait plaisir. Oubliez cependant ce dernier : daté et composé d’improbables recettes exotiques, il est loin d’être le meilleur ambassadeur de cette magnifique machine. Car oui, redisons-le, le KitchenAid est beau. Son look vintage typique des Fifties US en a fait la star des émissions de cuisine du monde entier et on en connaît même certains qui se contentent de l’utiliser comme élément de décoration distinctif, au même titre qu’une Navy Chair ou un fauteuil Eames. Les pauvres. Il est vrai que son apparence en ferait presque oublier ses mérites : un socle stable qui libère les mains du pâtissier et fait gagner un temps fou, et un mouvement rotatif « planétaire » unique permettant d’obtenir une superbe qualité d’émulsion allié à un robuste moteur autorisant un pétrissage digne de ce nom. Muni de ses trois outils de base (le fouet métallique, le batteur plat, communément appelé « feuille », et le crochet de pétrissage), le KitchenAid réussit l’équation si difficile à atteindre d’être à la fois admirable, fiable et utile. C’est vrai, il ne chauffe ni ne cuit comme certains de ses concurrents, ne râpe ni ne tranche (même si des ustensiles en option le lui permettent), mais on lui pardonne aisément au vu de ses performances de pro rendues accessibles aux amateurs pour monter 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A > 139
  • 17. souvenir d’école Objectif CAP Pâtissier Chocolatier une vocation ancrée depuis toujours mais embrassée tardivement… monique perez se souvient que passer du rêve à la réalité d’un métier de bouche nécessite plus que l’envie du moment ou le passage devant trois caméras, et que cet apprentissage est aussi celui de l’humilité. 144 L a pâtisserie c’est comme la danse classique. Face à l’émerveillement que procurent l’une et l’autre, il faut en avoir fait l’expérience pour comprendre ce qu’exige leur apprentissage. Avant d’atteindre la perfection (éclair au chocolat ou entrechat, même combat), chaque élève aura éprouvé dans son corps rigueur et dépassement de soi, appris à dompter son impatience et surmonter l’inévitable découragement. Un travail en coulisses qui ne doit jamais transparaître, le sacrifice d’années de jeunesse qui, parfois, fait pourtant renoncer même les plus passionnés. Telle fut l’aventure dans laquelle je me suis lancée, innocente, à… 37 ans ! Décidée à me reconvertir dans un métier qui me fascinait depuis le plus jeune âge, emportée par mon amour pour la chose, j’ai intégré le lycée professionnel de Clichy-sousBois. Objectif : décrocher le CAP de pâtissier chocolatier. > SSS Texte Monique Perez Illustrations Fabrice BLOCH 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 145
  • 18. Rillettes de lapin Pour 2 pots de 350 g environ 1 lapin coupé en morceaux d’environ 1 kg 2 oignons 2 carottes 8 abricots secs 2 feuilles de laurier 2 branches de thym 20 cl de vin blanc ❶ Épluchez les oignons et les carottes, coupez-les en tranches puis faites-les revenir dans une cocotte avec 2 cuillerées à soupe de graisse de canard. Ajoutez les morceaux de lapin, les abricots, le thym, le laurier, le sel, le poivre, le clou de girofle et le vin blanc. Couvrez et laissez cuire à feu doux pendant 2 heures. home made Se réjouir ❷ Laissez refroidir et séparez la viande des os avec une fourchette. Remettez la viande dans la cocotte avec les légumes, les aromates et 1 ou 2 cuillerées à soupe de graisse. ❸ Mélangez bien puis remplissez des petits bocaux et ajoutez un peu de graisse sur le dessus, fermez puis gardez au frais. du temps qui passe ça souffle, ça gèle, ça mouille ? trois bonnes raisons de rester au chaud dans notre cuisine cocon pour préparer ce que l’on ne prend plus trop le temps de faire… ou de rêvasser devant la cheminée en épluchant des coings. plus de pelouse à tondre ni de petits pois à semer, il est temps de se faire du bien et d’offrir le meilleur aux amis, aux voisins, aux papis et aux petits. SSS Recettes & stylisme Delphine Brunet Photographies Guillaume CZERW 152 1 clou de girofle 6 à 8 c. à s. de graisse de canard 4 grosses pincées de fleur de sel 2 pincées de poivre concassé 5 c. à s. de sucre roux 2 pincées de fleur de sel À consommer dans les 3 à 4 jours. Yaourts au lait de chèvre (p.154) Pour 6 petits pots 1 l de lait de chèvre entier 1 yaourt au lait de chèvre entier 3 c. à s. de lait de vache en poudre ❶ Faites tiédir le lait à environ 45 °C (pas plus), ajoutez le yaourt et la poudre de lait. Fouettez pour bien mélanger puis versez dans des pots en verre ébouillantés. ❷ Chauffez le four à 50 °C, enfournez les pots 3 heures puis éteignez le four et laissez les pots à l’intérieur, sans ouvrir, durant plusieurs heures (voire une nuit). ❸ Fermez-les ensuite avec des feuilles de cellophane et placez-les au frais quelques heures avant de les déguster. Accompagnez-les de la gelée de coings (voir p. 155). 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 153
  • 19. technique... mais pas trop Friture sur toute la ligne très utilisée en asie et dans tout le sud de l’europe, la cuisson par friture dite “profonde” reste marginale dans le répertoire des techniques de la cuisine française. confinée aux beignets, aux pommes de terre et à quelques poissons, ce vilain petit canard des cuissons est délaissé, dans un bel ensemble, par les chefs qui ne le connaissent pas bien, les nutritionnistes qui l’ont excommunié et les gourmets qui ne savent plus que penser… mais pourquoi donc tant de haine ? La friture : une cuisson bien huilée La friture « profonde », celle où l’aliment est entièrement immergé dans l’huile chaude, ne doit pas être vue comme une simple cuisson mais plutôt comme une « recomposition » de l’aliment ainsi préparé. En effet : pendant la cuisson, l’aliment subit de très nombreuses transformations biochimiques. Pendant la friture, deux types de « transferts » sont à l’œuvre dans l’aliment et en changent profondément la saveur, la texture et même la composition. SSS Texte Stéphan lagorce Photographies éric fÉnot 162 l’aliment et l’huile. En friture profonde, ce « gradient thermique » est très élevé. Par ailleurs, plongé dans l’huile, l’aliment subit une cuisson très particulière dite « isotherme », c’est-à-dire identique sur toute sa surface (température homogène, sans point chaud). C’est l’association de ces deux caractéristiques uniques « gradient thermique » élevé et « isothermie de surface » qui donne aux aliments frits toutes leurs spécificités : couleur dorée, texture croustillante, saveurs grillées et torréfiées spécifiques. Transferts thermiques Tout d’abord, l’aliment cru dont la température est d’environ 5 à 20 °C en moyenne dans la cuisine est plongé dans un bain d’huile porté, lui, à 140-180 °C. Le « gradient thermique » désigne la différence de température entre Transferts de matières Pendant la friture profonde, les interactions entre l’aliment et le milieu de cuisson (l’huile chaude) sont très nombreuses ! L’eau contenue dans l’aliment se vaporise et sort de celui-ci en entraînant avec elle des protéines, 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A > 163
  • 20. Peter et Sandra Fischer, château Revelette, route de Rians, 13490 Jouques / Tél. : 04 42 63 75 43 / www.revelette.fr raisin et sentiments Peter Fischer roi ! Provence  de aussi tourmenté que l’olivier et le vénérable figuier, mais aussi jovial qu’un marseillais arpenteur de vieux port, l’homme est ici dans son élément. un instant, il a le regard affûté de l’aigle de bonelli scrutant l’horizon sur son rocher de la sainte-  ictoire. un autre, il risque d’interpeller son copain d’un v tonitruant :“oh,pierrot, t’arrêtes de sentir mon vin ?bois-le !  ” accent provençal garanti… voyage dans le petit royaume iconoclaste de revelette, en “provence continentale ”. 170 S ilencieux, la chevelure toute ébouriffée par le vent d’hiver, Peter Fischer fixe sa terre rouge parsemée de petits éclats de calcaire blanc tout juste recouverts d’un léger duvet d’herbe tendre qui ferait le bonheur des agneaux de Sisteron. Par moments, les yeux du vigneron observent une petite troupe d’hommes recroquevillés sur des ceps rabougris par l’âge. Ils se déplacent à la vitesse d’une échappée de petits-gris champions de cross-country dans la rangée que lui-même vient de quitter et dans laquelle il a passé un bon moment pour vérifier que la taille du grenache noir se faisait dans les règles de l’art, ses règles à lui, celles d’un vigneron rusé mais exigeant, un gars à qui on ne la fait pas, un type qui tient à sa future récolte comme à la prunelle de ses yeux, mais qui sait aussi imprimer à son vignoble le sens de la mesure. La terre s’amourache à chacun de ses pas tandis que Sisi, la cairn terrier aux poils grisonnants, inspecte le moindre bosquet SSS Texte Michel SMITH Photographies éric fénot > 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 171
  • 21. même pas peur La Poularde de Bresse truffée en vessie Joannes Nandron elles donnent des frissons autant qu’elles font saliver. certaines recettes intimident les audacieux et titillent les aguerris. avec un peu de rigueur et les judicieuses explications de notre chef maison, vous aussi, vous oserez les affronter. La volaille : bien choisir une volaille pas trop grosse (sinon elle ne rentre pas dans la vessie). Pour ma part j’ai utilisé une volaille un peu plus petite (1,5 kg). La volaille de Bresse est idéale, mais on peut se tourner également vers un coucou de Rennes ou une gauloise blanche. Les truffes fraîches sont idéales mais une jolie truffe en boîte fait aussi l’affaire. SSS Photographies éric fénot Réalisation et adaptation éric trochon M.0.F. 2011 182 La vessie de porc : voilà le grand mystère de cette recette (et une partie de son attrait…) ! Pour les cuisiniers, c’est un peu l’ancêtre du sac sous vide… Elle est soigneusement lavée, grattée et pliée avant d’être séchée. C’est un procédé artisanal qui requiert un peu de savoir-faire, il vaut donc mieux l’acheter déjà prête (pas question d’utiliser de vessie fraîche). Il faut la réhydrater soigneusement à l’eau salée additionnée de vinaigre blanc avant de l’utiliser pour qu’elle soit élastique. Comme c’est une poche, on verifie qu’il n’y ait pas de trous. Car si elle n’est pas étanche, elle ne peut pas remplir son rôle de « sachet de cuisson  en papillote ». On la retourne (l’interieur devient l’exterieur) avant de la remplir (la baudruche sera plus régulière). Le plus facile pour en trouver consiste à se rapprocher d’un charcutier artisan renommé (qui fabrique lui même toute sa production…). Les ingrédients Pour 4 personnes Une volaille de Bresse d’1,8 kg environ Une vessie de porc dégorgée à l’eau salée et vinaigrée 50 g de carottes* 50 g de navets* 50 g de céleri-rave* 8 belles lames de truffes 50 g de petits pois reverdis** 50 g de haricots verts cuits et coupés en petits bâtonnets*** 1 blanc de poireau cuit**** 10 l de bouillon blanc de volaille Madère (de très bonne qualité acheté chez un caviste !) Sel et poivre La mousse de veau 150 g de filet mignon de veau, soigneusement paré 50 g de crème liquide à 35 % de matière grasse Sel, poivre, une râpée de muscade On peut ajouter aux ingrédients 50 g d’un mélange de truffes et foie gras coupés en dés ainsi que le foie de volaille. * tournés à la petite cuillère à légumes et cuits. ** (c’est-à-dire juste plongés quelques minutes dans une casserole d’eau bouillante puis rafraîchis aussitôt). *** (c’est mieux de couper les haricots après cuisson sinon ils se gorgent d’eau). **** bien égoutté sur du papier absorbant. 180°C /automne-hiver 2013 / 14 A 183