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Et commence la guerre
des slogans et des promesses !
Almando Keslin :
un percussionniste
hors pair, parti
sans tambour ni
trompette !
par Philippe Saint Louis
Évens Pierre et
Azéa Augustama
conservent leur
ceinture !
par Kenson Désir
LUNDI 25 MAI 2015 NUMÉRO 4
WWW.LENATIONAL.HT
QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI
HAÏTI-ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
HAÏTI / SANTÉ PUBLIQUE
SOCIÉTÉ
Choléra, Ébola, Chikungunya :
trois dangers qui nous guettent
A
lors que tous les projecteurs
sont braqués sur la question
desélections,lecholéra,l’ébola
et, à la limite, le chikungunya
guettent sérieusement la santé de la
population. C’est la ministre de la Santé
publique et de la Population, Madame
Florence Guillaume Duperval, qui en
a fait l’annonce lors de la conférence
de presse hebdomadaire tenue, ce
vendredi 22 mai 2015, à la primature.
À l’occasion de la saison pluvieuse,
une nette augmentation des cas
de choléra a été remarquée un
peu partout à travers le pays avec
un pourcentage élevé pour le
département de l’Ouest. Pour pallier
la situation, Mme Duperval appelle
au respect des principes d’hygiène,
lesquels consistent à se laver les
mains et à faire bien cuire les
aliments avant toute consommation.
» suite, P. 4
» P. 18
» P. 21
»   P. 15
CULTURE
SPORT
» suite Page 5
Que cachent
les tôles rouges ?
par Pierre Clitandre
2 | N0
4 LUNDI 25 MAI 2015
Voir, entendre, parler en temps
de violencePar Yves chemla
TRIBUNE
O
n entend parfois dire, en
Haïti, que par opposition
à la situation actuelle, les
temps duvaliéristes étaient
tranquilles. C’est une affirmation
gratuite, et qui témoigne, sans aucun
doute, d’un manque d’appréciation,
ainsi que d’une rupture dans le tra-
vail de transmission de la mémoire.
Il est vrai que la majeure partie de la
population est née après la chute de
la maison Duvalier.
C’est une erreur que de regret-
ter ce passé, tant il a marqué ses
contemporains dans leur chair,
tant il a détraqué les psychés, et
lacéré les consciences. Beaucoup
de récits en témoignent. Il faut
lire Le Chant des Ténèbres de
Jean-Claude Brouard-Cambronne
qui a survécu à l’horreur de Fort-
Dimanche. Il faut aussi reconnaî-
tre dans le théâtre des mémoires
ce que la violence érigée en spec-
tacle a fait subir aux êtres dans
leur vie quotidienne : l’anxiété, la
dépression, le stress incessant, la
peur de disparaître comme tant
d’autres, sans même laisser de
traces, sinon dans les mémoires
des proches. Il y eut en effet les
victimes identifiées, et puis toutes
les autres, disparues pour avoir
posé le regard sur la Gorgone en
uniforme, pour avoir exprimé à
haute voix une pensée dissiden-
te, ou plus sûrement, considérée
comme telle. D’autres pour avoir
été au mauvais endroit, au mau-
vais moment.
Dans un récit encore inquiet – et
pourtant présenté plus de quatre
décennies après les faits – Ray-
mond Miot revient sur un événe-
ment qui a marqué la fin de son
adolescence : en avril 1971, la
famille de l’auteur apprend par
la bouche d’un ministre proche
du père, médecin, qu’elle est sur
le point d’être arrêtée. Dans la
nuit qui suit cette nouvelle, les
trois partent se cacher, la mère
en province dans sa famille, le fils
et le père dans la propriété située
en périphérie de la capitale d’un
couple d’amis, et ils attendent.
Pendant cette attente, la rumeur
se répand que le docteur François
Duvalier entre dans sa dernière
maladie. Le pays retient son souf-
fle. Mais pendant ces semaines
de claustration, personne ne doit
soupçonner leur présence dans
cette villa, sous peine d’être arrê-
tés, eux et ceux qui les accueil-
lent, et qui s’inquiètent. Certes,
ils auraient pu gagner une ambas-
sade, mais ç’aurait été reconnaître
par là une culpabilité, au regard
de la dictature féroce. C’était aussi
accepter de tout perdre : iden-
tité, système de reconnaissance,
certitude de la communauté de
compréhension. Or, ce ne sont pas
des activistes : le père est méde-
cin, la mère, directrice d’école, le
fils – qui est le narrateur – a com-
mencé des études de médecine. Il
s’interroge, car rien ne présageait
que sa famille se retrouve dans
une telle situation. Il va formuler
plusieurs hypothèses, et pour les
identifier, doit remonter dans ses
souvenirs. Le récit de Raymond
Miot tient son lecteur en haleine
par la concurrence et l’interaction
entre plusieurs axes de son récit :
l’attente d’une solution, la remon-
tée dans les souvenirs à la recher-
che de l’élément déclencheur, la
progression supposée de la mala-
die du président, perceptible par
des signes discrets, notamment
la rumeur. Chacune de ces lignes
de force interagit avec les autres,
confèrant au livre sa densité.
Il a suffi que le hasard se mette
de la partie, une dizaine d’années
auparavant : « Tout remonte à
l’agrandissement de ma cham-
bre à l’été 1962, qui m’a permis
d’avoir une vue directe sur la rue
et qui m’a aussi donné l’occasion
d’entendre certaines conversa-
tions de sbires du dictateur ».
Voir et entendre placent l’être
sur le seuil de la mise en danger.
D’autant que ce sont de bien
étranges visiteurs qui se glissent
la nuit sous la galerie de la maison
de la famille du docteur Miot. Ce
sont par exemple des amants, et
pas des moindres : Tassy, le tor-
tionnaire, et la femme d’un notable
du quartier. Ou bien des militaires
qui se protègent de la pluie. Le
jeune garçon entend ainsi parler
de Clément Barbot, l’homme qui
a aidé Duvalier à accéder au pou-
voir, en fomentant des troubles
qu’il réprimait ensuite, et qui,
déchu par le président atteint par
une paranoïa grandissante, sème
pendant plusieurs semaines la
terreur sur Port-au-Prince. Mais
le jeune Raymond est surpris en
train d’entendre et d’observer.
Serait-ce la cause lointaine de
cette menace d’arrestation ? De
fil en aiguille il explore rationnel-
lement plusieurs épisodes de son
existence et de celle de ses par-
ents. Cette façon de raconter en
situant la narration sur un axe du
temps dont les repères sont notre
présent, celui de cette année de la
crise et, de là, les années soixante,
pendant lesquelles se trouverait
la cause probable de leur peine,
pourrait tourner au procédé.
Mais tel n’est pas le cas, car ces
hypothèses qui débouchent sur
une vérité triviale, presque ridi-
cule si le contexte n’atteignait pas
au paroxysme de la terreur, ont
un effet cumulatif, et permettent
de décrire l’atmosphère de ces
années-là, pendant lesquelles, en
Haïti, on a été forcé de respirer
un air pourri par la haine et la
délation, pire même, la peur de
celle-ci, c’est-à-dire la perte de la
confiance en l’autre, qui entraîne
à l’atomisation de la société, et qui
en accélère le délitement.
Le narrateur revient sur des
moments tragiques : la tentative
d’enlèvement de Jean-Claude
Duvalier et de sa sœur. Duvalier
lâche des forces vomies par l’enfer
: « le chaos a alors régné sur la ville.
C’était l’horreur. Des macoutes et
des militaires ont profité de la
situation pour régler leurs dif-
férends, voler les commerçants
et commettre des crimes ». Pour
Duvalier, l’affaire était entendue
: le coupable était le lieutenant
François Benoît. Le chemin qui
mène à la maison de sa famille est
tracé par les cadavres de passants,
abattus par des macoutes et des
militaires surexcités. La famille
Benoît est massacrée, sans dis-
tinction d’âge ni de sexe. Le fils
est enlevé, que nul ne reverra, la
maison incendiée.
Et puis Clément Barbot révèle
publiquement qu’il est l’auteur
de cette tentative d’enlèvement.
Peu importe : Duvalier poursuit
la famille Benoît de sa haine, et,
au passage, en profite pour faire
éliminer de potentiels opposants.
Et Barbot de continuer, tuant des
soldats dans la nuit, protégé en
quelque sorte par le couvre-feu.
La peur se répand. Les soldats,
le doigt crispé sur la gâchette,
tirent parfois sur des passants.
On ne sort plus de chez soi que
rarement.
La mort de Barbot et de ses com-
plices, encerclés à Cazeau par les
troupes dirigées par Luc Désir,
Gracia Jacques ou Eloïs Maître
ne calme pas les allées du pou-
voir. Miot remet en mémoire des
épisodes et des noms, par exemple
celui de Riobé qui tint tête à une
armée depuis les grottes de Kens-
koff. Il rappelle combien les plus
démunis, les paysans, payèrent un
tribut de sang particulièrement
lourd après les incursions et les
débarquements de guérilléros :
des centaines d’entre eux, mas-
sacrés à Thiotte, Mapou, Grand
Gosier, Belle-Anse. Plus tard,
l’exécution publique de Marcel
Numa et Louis Drouin marquera
pour longtemps les esprits des
collégiens convoqués à ce sinis-
tre spectacle. Et puis, encore, il
y aura le présumé complot des
officiers et leur sinistre exécution
par leurs compagnons d’armes,
obligés d’accomplir, sous peine de
mort, ce geste misérable.
Miot revient sur ces épisodes, et
d’autres encore, avec une émotion
contenue. Mais la plaie, on le com-
prend assez vite, ne se refermera
pas. Pendant ces années, s’il ne
peut se résoudre à ne pas regarder,
ni à ne pas entendre, le narrateur
apprend cependant à mesurer
ses paroles. Plus de confidences
entre amis, même proches, car ils
pourraient avoir des accointances
avec des macoutes, ou bien être
tenus à parler, parce qu’ils font
l’objet d’un chantage. Les femmes
sont particulièrement visées : leur
corps, contre une très relative
mansuétude, à l’égard de leurs
proches. On sait que Kettly Mars
a trouvé là matière à un roman
particulièrement intense, Saisons
sauvages.
Il est une autre dimension à cette
violence, et qui est l’intimidation
par le symbolique. François Duva-
lier a utilisé les figures du vaudou,
au premier rang desquelles celle
de Baron Samedi. Voici le prési-
dent entrant dans une église où
l’on célèbre les funérailles d’un
enseignant qu’il a fait assassiner.
Devant l’assistance tétanisée, il
prend une chaise, s’assied près
du mort, et l’interroge. Dans son
dos, l’assistance le voit mimer les
questions et sans doute aussi les
réponses : « L’interrogatoire avait
l’air très sérieux et un silence
d’outre-tombe s’est installé dans
l’église. Personne n’a osé penser
à une supercherie. (…) À chaque
question, dont on n’entendait que
le marmonnement nasillard de
Duvalier, il y avait une réponse
». C’est aussi de cette façon que
s’impose la violence comme mode
de gouvernement, en instrumen-
talisant le symbolique.
On ne ressort pas rassuré du récit
de Raymond Miot : l’effondrement
démocratique – par la présidence
à vie, notamment, puis par la
transmission au fils de la fonction
- ; la généralisation de la violence,
et la mise au pas d’une société par
la contrainte, ne furent pas des
temps de prospérité, loin s’en faut,
mais bien ceux de l’enfermement
et de la claustration. La mort
du président, le caractère spec-
taculaire de ses funérailles n’ont
fait qu’ouvrir un autre chapitre,
tout aussi inquiétant : « la voix
du nouveau dictateur est moins
nasillarde que celle de son père,
mais elle traîne exagérément (…).
On a l’impression qu’il énonce un
mot, puis l’autre, sans compren-
dre vraiment ce qu’il lit ». Si le
passé immédiat était marqué par
la peur panique, il n’en reste pas
moins que « l’avenir est sombre ».
Mais c’est une autre histoire qui
s’ouvre. Il convient qu’elle aussi
soit inscrite dans les mémoires.
Non décidément, rien n’est à
regretter dans ce passé pourtant
encore proche.
RaimondMiot,LaPetiteChambre,éditions
XYZ,Montréal,2015
LUNDI 25 MAI 2015 N0
4 | 3
ACTUALITÉ
Une épée de Damoclès
Reynold ARIS
RELATIONSHAÏTIANO-DOMINICAINES
L
es Dominicains d’origine haïti-
enne de l’autre côté de la fron-
tière s’inquiètent. L’échéance
du délai de régularisation de
leur statut à travers le PIDH arri-
vera à terme le 17 juin prochain. Les
autorités n’en disent pas mot. Les
organisations de défense des droits
humains appellent, elles-mêmes, à
un moratoire et à une révision du
contenu de la loi y relative. Qu’est-ce
qui va se passer à l’expiration de ce
délai ?
Les autorités dominicaines annon-
cent qu’elles ne prolongeront
pas le délai de régularisation du
statut d’immigrants après le 17
juin prochain. C’est le ministre
dominicain de l’Intérieur et de la
Police, Jose Ramon Fadul, qui en
a fait l’annonce mercredi dans
les colonnes du journal El Nuevo
Diario.
Il précise en ce sens que le gou-
vernement de son pays s’apprête
à mettre en place les mécanismes
de rapatriement des immigrants
en situation irrégulière. Les
Forces armées et le ministère de
l’Immigration montent la logis-
tique de l’opération des rapatrie-
ments. Ces mécanismes ont été
conçus, affirment les autorités
dominicaines, en respect de la
dignité de ces migrants.
Les personnes ciblées, précise M.
Fadul, sont celles qui errent dans
les rues, les sans-emplois et celles
qui habitent les zones agricoles.
Aussi exhorte-t-il les étrangers
qui ne se sont pas encore fait
inscrire au Programme national
de régularisation des étrangers en
situation migratoire irrégulière en
République dominicaine (PNRE)
à le faire dans les vingt-huit jours
restants.
Le National a vainement tenté
de contacter des responsables
haïtiens autour de l’application
de cette décision. Cependant, au
ministère des Haïtiens vivant à
l’étranger (MHAVE), à la question
de savoir quelle sera la démarche
des autorités du pays pour éviter
cette déportation massive, un
cadre requérant l’anonymat,
nous a fait cette réponse « « Mal-
heureusement, le titulaire du
ministère n’est pas disponible
pour l’instant. Il est en voyage
», soulignant qu’une rencontre
devrait se tenir au plus haut
sommet de l’État pour savoir quel
comportement adopter.
Rapatriement massif :
une situation préoccupante
Cette situation interpelle les
organisations de défense des
droits humains, notamment le
Réseau national de défense des
droits humains (RNDDH). Selon
le responsable de programmes
du RNDDH, Marie Yolène Gilles,
l’arrêt 168-13 adopté par la Cour
constitutionnelle dominicaine le
23 septembre 2013 a privé un
ensemble de citoyens dominic-
ains d’ascendance haïtienne de
leur droit d’avoir une nationalité,
alors que ces citoyens se récla-
ment de nationalité dominicaine
au regard de la législation même
de ce pays qui reconnaît le droit
du sol (jus soli). Aussi, ajoute-elle,
ces citoyens n’ont aucun lien avec
Haïti.
Quant à l’arrêt 168-14 relative à la
régularisation du statut des immi-
grants en République dominicaine
en situation irrégulière, il informe
que celui-ci ne concerne nulle-
ment les Dominicains frappés
par la sentence de la Cour con-
stitutionnelle de la République
voisine. Pour lui, la régularisation
des ressortissants étrangers est
une autre paire de manches.
Dans cette loi, les autorités
dominicaines demandent à
Haïti, pays d’origine de ces res-
sortissants, de doter ses citoyens
de pièces d’identification, soit
d’un passeport soit d’une carte
d’identification, une des condi-
tions préalables à la régularisation
de leur statut.
Selon le militant, ce processus est
lent du fait qu’il en existe d’autres
à satisfaire au regard de l’arrêt
168-14. Les Haïtiens en situa-
tion irrégulière devraient trouver
des Dominicains qui sont munis
de leur carte d’identité couram-
ment appelée « Cedular» afin de
témoigner favorablement de leur
statut, de leur profil sociologique
dans leur communauté, pour
s’assurer qu’ils sont de paisibles
citoyens.
Cette initiative, informe-t-il, leur
permettra d’obtenir un papier
notarié. Néanmoins, ils doivent
être en mesure de prouver qu’ils
sont coutumiers des transactions
bancaires. S’ils ne peuvent pas
remplir les autres conditions, ils
auront toujours la vie difficile.
Mesures
Les autorités dominicaines doi-
vent prolonger le délai afin de
permettre aux dirigeants haï-
tiens d’aborder le problème plus
en profondeur. Le rapatriement
n’y apportera pas la solution.
Au contraire, il va déboucher
sur une crise. Car, soutient M.
Alizar, l’État haïtien ne dispose
pas d’une structure d’accueil pou-
vant recevoir ces milliers de citoy-
ens. Les autorités dominicaines
doivent non seulement accorder
un moratoire en vue de gagner
du temps pour résoudre le prob-
lème d’identification, mais elles
doivent également réviser la loi
sur la régularisation du statut des
migrants.
Édito
L'IVRAIE
ET LE BON GRAIN
N’est-ilpasrévoltantdecontinueràdire:«Mounseryepafèpolitik»?Commequoi,
lapolitiqueseraitl’affairede«vakabon»,d’opportunistesetdefilous.Lesdésillusions
d’unesociétéconscientemaintenantdesproblèmesréelsdoiventnousporteràun
sursautpourempêcherquelabarquenationalenesombre.
L’inacceptableestdevenuunenorme.Insidieusement,lesmédiasnationaux,lapro-
paganded’unepresseinternationale,lapopulationconfrontéeàdesproblèmessans
solutionetlepessimismequis’installedanslesesprits,ladérivedessensimpulsée
parlacorruptiongalopantedonnentdel’espaceàtouteslesaberrations.Certains,
pour enfoncer le clou, nous font croire que nous sommes une nation d’incapables
ou,commeonleditplustechniquement,«uneentitéchaotiqueingouvernable».
Soixante-dix candidats se présentent pour la présidentielle de 2015 ! Le Conseil
électoralprovisoire,n’ayantpaslamissionducontrôleéthiquedunombre,maiscelle
del’étudedesdossiersayantàvoiraveclesloisdupays,neressentpaslemalaise
d’annoncercettecoursedetouteslesbousculades.Mais,danslapresseparlée,écrite
ettélévisée,commentva-t-ongérerletempsd’antennedecettemultitude?Cesera
unvéritablecasse-têtepourunepressehaïtiennedéjàpressuréeparuneprogram-
mation comprimée à l’extrême. Si certains osent dire que c’est là une expérience
démocratiqueaprèslemonolithismedesgrandesdictatures,leplussimpleetlucide
descitoyensestdéjàaffligé,choquéd’entendrecettelonguelistedenomsauxacro-
nymespolitiqueslesplusrébarbatifs,quirappellel’époquerévolueoùc’étaitlaradio
gouvernementalequilisaitlalistedeceuxquiontréussil’examenaubaccalauréat!
Lesélecteursnonplusnesaventdéjàoùdonnerdelatête!Partagésentreunamide
quartierquitentelecoupduPalaisetunmusiciendéterminé,ceuxquivontdécider
duchoixàfairepourcepaysrongéjusqu’auxosn’aurontquedeuxchoix :s’abstenir
ouvoterdansl’émotion.Danslastupeuretlaconsternation,dansl’imbroglioetle
chaos,quefaire?
Ilfautramenerlapolitiqueàlamoralitépublique.Soyonssérieux!diraitfeuLeslie
FrançoisManigat.Oui,leconstatestfaitquelesprofessionnels,lesintellectuels,les
hommesetfemmesdesavoir-fairedansdiversdomainesontlaissélevideàceux
quisouventn’ontquelaqualitédesopportunistesetdesaudacieux,etdeceuxqui
sontprêtsàtouslesmauvaiscoups.
Il s’agit de l’avenir d’un pays mis à genoux. Ici, au National, nous ne demandons
pasdesuperbesarticulationsidéologiques.Maisnousréclamonsune«préparation
»pragmatiquedeceuxquivonts’engagerdansunearèneoùlescrisesnationales
mêléesauxpressionsinternationalesdemandentl’intelligence, laplusnetteratio-
nalitéetuneconstanteclairvoyance.Letridoitêtrefaitpourséparerlebongrainde
l’ivraie.
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4 LUNDI 25 MAI 2015
Déclarée présente en Haïti, le
19 octobre 2010, l’épidémie de
choléra a affecté sévèrement la
population haïtienne. Selon des
chiffres officiels communiqués par
la ministre Duperval, d’octobre
2010 au 20 mai 2015, environ
743 mille cas ont été dénombrés,
dont un total de 8 946 décès.
Pour le seul mois d’avril 2015, 3
600 cas ont été recensés, dont 16
décès. Le choléra allait continuer
encore à faire des victimes pendant
le mois de mai (jusqu’au 20 de
ce mois), en infectant pas moins
de 1 858 personnes, dont 5 ont
succombé. D’après Mme Duperval,
le département de l’Ouest a été
le plus touché avec 56 % des cas
recensés, dont 35 % sont localisé
dans trois communes (Delmas,
Port-au-Prince et Carrefour).
Le ministère de la Santé publique
n’est pas resté indifférent face à
cette remontée du choléra. Des
mesures ont été prises pour
contenir l’épidémie, explique la
ministre Guillaume, annonçant
que dans les jours qui viennent
des campagnes de sensibilisation
vont être entreprises à travers le
pays, notamment dans les treize
communes les plus touchées
par l’épidémie dans le cadre de
la mise en place de la première
phase du plan d’éradication du
choléra. À ce sujet, une rencontre
de haut niveau a été tenue, le
jeudi 21 mai, entre les plus hautes
autorités de l’État et celles de la
Minustah, entres autres.
Cinquante millions de dollars
sont débloqués par la Banque
mondiale, cette semaine, en vue de
permettre aux autorités haïtiennes
de mettre à exécution cette
phase du plan qui doit toucher
principalement des communes
des départements du Centre et de
l’Artibonite, a également informé
Florence Guillaume Duperval qui
exhorte la population à ne pas se
laisser emporter entièrement par
la fièvre électorale et négliger les
règles d’hygiène pouvant aider
à prévenir le choléra et d’autres
pathologies.
Ébola et chikungunya,
état d’alerte !
En ce qui a trait à l’épidémie
d’ébola, le ministère de la Santé
publique et de la Population
entend continuer ses actions pour
prévenir l’introduction de cette
maladie virale en Haïti. Ainsi, il
a été déconseillé aux voyageurs
haïtiens de se rendre dans certains
pays africains comme le Libéria, la
Guinée Conakry et la Sierra Léone.
Se fondant sur le dernier le rapport
de l’Organisation mondiale de
la santé (OMS), déclarant l’arrêt
de la transmission de l’ébola au
Libéria, les autorités haïtiennes
ont décidé d’exclure le Libéria de
la liste.
L’interdiction demeure pour les
deux autres pays. « Tenant compte
de la vulnérabilité particulière
d’Haïti, les recommandations
précédentes sont maintenues en
dépit de l’avancée considérable
faite pour contenir la maladie dans
les pays encore touchés comme
la Sierra Leone et la Guinée
Conakry », peut-on lire dans une
note de presse émanant du MSPP.
Toutefois, précise la note, tous
ceux ayant voyagé dans les pays
précités ne pourront et ne doivent
pas chercher à rentrer en Haïti
avant une période de vingt et un
jours.
Dans l’idée de protéger la santé de
la population, Florence Guillaume
Duperval lance une alerte sur le
chikungunya qui a déjà fait de
nombreuses victimes au sein de
la population. « Le moustique qui
propage ce virus est encore là »,
rappelle la ministre qui informe
du même coup de l’existence d’une
autre épidémie du nom de « Zigi-
five ou zigi » dont deux cas ont été
déjà découverts à la Jamaïque.
HAÏTI/SANTÉPUBLIQUE
ACTUALITÉ
Choléra, Ébola, Chikungunya :
trois dangers qui nous guettentNoclès Debréus
» suite de la première page
Dr
Florence Guillaume Duperval, ministre de la Santé publique et de la Population.
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JUNIOR ADME
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ADMINISTRATION :
RACHELLE COMPÈRE
LUNDI 25 MAI 2015 N0
4 | 5
B
andes de rara, défilé de
motocyclettes, avec des
motards arborant les T-shirts
plaqués de l’emblème de
certaines plateformes politiques
connues comme le MOPOD, LAPEH,
Renmen Ayiti, tout est bon pour se
montrer en ces jours d’inscription et
faire une démonstration de force qui
marquera les esprits. Ces motards
intéressés, sillonnent les rues de
Delmas et de Pétion-ville, sous les
regards passifs des passants.
S’il est vrai qu’on est encore
loin du matraquage médiatique
orchestré lors de la période
de campagne électorale de
2010, avec les “robots call” et
les billboards à profusion, les
candidats ne lésinent toutefois pas
sur les moyens pour faire bonne
impression. Les réseaux sociaux,
Facebook, Twitter, WhatsApp,
deviennent ainsi une tribune pour
chaque prétendant.
Ces espaces qui ne sont pas
prévus dans le décret électoral,
comme podium de campagne,
sont envahis de messages, et
permettent aux intéressés de
lancer une “précampagne”. Ils y
exposent, en toute quiétude, leur
“vision politique” ou des photos
de rencontres réalisées, dans le
cas des candidats à la présidence,
avec des groupes ou des catégories
sociales diverses, un peu partout
à travers la République. Des
leçons ont visiblement été tirées
de la campagne de 2010 qui a vu
l’ascension de Michel Martelly
au pouvoir. La communication,
ont-ils compris, devient de plus
en plus incontournable et aucun
n’entend se laisser devancer. À cet
effet, la majorité des candidats
à la présidence dispose d’un
groupe WhatsApp, d’une page
Facebook ou d’un compte twitter
qui sont régulièrement alimentés.
Les candidats à la députation et
aux sénatoriales qui ont, dans
un premier temps, alimenté les
débats lors des inscriptions, ont
eux aussi envahi la toile et mènent
une campagne silencieuse sur les
réseaux sociaux.
La convocation de la presse,
une nouvelle trouvaille
Nos candidats ne manquent
pas d’imagination pour
contourner l’interdiction faite
par le CEP d’ouvrir la période
de campagne prématurément.
La dernière trouvaille réside en
la convocation de la presse peu
avant leur inscription pour faire,
disent-ils, le point autour de
leurs inscriptions. Une stratégie
permettant d’occuper l’espace
médiatique.
Le décret électoral définit pourtant
les obligations et les interdits
pour l’utilisation des moyens de
communication et de propagande
électorale, notamment avant la
période de campagne. Certains
partis politiques semblent
oublier les normes. C’est le cas
du MOPOD qui a invité la presse,
via une note, à accompagner l’ex
sénateur Samuel Madistin lors
du dépôt de ses pièces pour les
prochaines élections, le mardi 19
mai à 11h a.m. au BED de l’Ouest
1. En fin de note, est toutefois
venu le petit slogan rappelant que
le juriste veut faire d’Haïti un État
fort.
Tous veulent donc prendre les
devant ou combler leur retard dans
la bataille communicationnelle.
Le journaliste Clarens Renois,
sous la bannière du parti UNIR,
a également averti la presse de
son inscription pour briguer la
magistrature suprême de l’État.
Il en a profité pour expliquer le
but de sa quête qui est d’arriver
à la réconciliation dans une
République de gens intègres, tout
en revendiquant le pouvoir pour
les jeunes afin de construire un
meilleur avenir.
La plateforme “Pitit Desalin” de
Moïse Jean Charles s’est mise
également au diapason en invitant
les journalistes à une conférence
de presse, le mardi 19 mai, à 11h
a.m., en son local, à Delmas 33.
Cette rencontre avec la presse
devait servir à faire le point, dit-
elle, autour du processus électoral,
particulièrement sur l’inscription
de son candidat à la présidence,
l’ex-sénateur Moise Jean Charles.
Pour Jean Henry Céant, ce sont les
organisations proches de RENMEN
AYITI, qui se sont chargées de
donner une conférence de presse
à F et F restaurant pour faire
le point autour du processus
électoral et l’inscription de leur
candidat à la présidence.
M. Céant, M. Jean Charles ainsi
que Laurent Lamothe, invité de
dernière heure, n’y sont pas allé de
main morte. Ils ont sorti l’artillerie
lourde. Une foule immense.
Des messages réguliers, ont
tenu en haleine, l’électorat, sans
compter les interventions dans
la presse de plusieurs proches
et partisans. Avant l’heure, la
bataille est donc lancée.
Guerre de positionnement ou
de tranchée, campagne avant la
lettre, peu importe, les partis,
groupements et regroupements
politiques tentent d’adapter leur
communication à leurs militants,
sympathisants, mais également
de mobiliser d’ores et déjà un
électorat réticent.
Et commence la guerre des slogans et des promesses !
par Lionel Edouard
HAÏTI-ÉLECTIONPRÉSIDENTIELLE
ACTUALITÉ
» suite de la première page
Port-au-Prince bout au rythme des élections, les opérations de marketing électoral débutent, alors que selon le
calendrier électoral, la période de campagne ne devrait pas être lancée avant le 8 juillet pour prendre fin le 7 août
2015.
Les États-Unis en faveur de modification
dans le calendrierSources : Alterpresse
HAÏTI-ÉLECTION
L
e conseiller spécial du départe-
ment d’état américain pour
Haïti, Thomas Adams, juge
opportune une modification
du calendrier relative aux élections
législatives, municipales, locales et
présidentielles annoncées prévues
d’aout à décembre prochains en Haïti.
Une modification du calendrier (à
2 tours au lieu de 3) « permettrait
d’économiser environ 30 millions
de dollars et donnerait au Conseil
électoral provisoire (Cep) un peu
plus de temps pour préparer les
opérations électorales », a-t-il
déclaré à un groupe de journalistes
haïtiens qui séjournent à
Washington, rapporte l’Agence
haïtienne de presse (Ahp).
Le budget prévu actuellement
pour la réalisation des élections
s’élève à environ 66 millions de
dollars américains.
Thomas Adams s’est déclaré
toutefois convaincu que les
élections auront lieu, coûte
que coûte, cette année, et a
rappelé que son pays contribue
financièrement à la réussite du
processus. Un retard de plus d’une
dizaine de jours a été pris sur la
publication, le 19 mai, de la liste
des candidats agréés pour prendre
part aux législatives fixées au 9
aout prochain.
Le traitement des contestations
a pris plus de temps que prévu
et environ 500 des plus de 2000
candidatures aux législatives ont
été rejetées pour non-conformité
aux critères contenus dans le
décret électoral.
Les dossiers de candidatures à
la présidentielle du 25 octobre
sont au nombre de 71, suivant un
dernier relevé.
La publication de la liste définitive
des candidats présidentiels est
attendue pour le 30 mai. Plusieurs
anciens fonctionnaires publics
n’ayant pas la décharge de leur
gestion se sont empressés de
s’inscrire, alors que ce document
est exigé par le décret électoral.
6 | N0
4 LUNDI 22 MAI 2015
ACTUALITÉ
L
e gouvernement de la Répub-
lique, via son porte-parole, le
ministre de la communication,
Rotchild François Junior, a
salué le déroulement du processus
électoral qui a vu un déferlement de
candidats à la plus haute fonction de
l’État. Le ministre qui intervenait à la
conférence de presse hebdomadaire
de la Primature vendredi, a aussi fait
le point sur les violences enregistrées
dans certaines zones lors de la pub-
lication de la liste des postulants aux
législatives par le CEP qui a mis envi-
ron 500 candidats hors de la course.
« Le gouvernement condamne avec
véhémence les violences enreg-
istrées dans certaines zones du
pays, notamment à Petit Goave et
Cayes-Jacmel », a lancé Rotchild
François Junior qui demande à
ce que « l’action publique soit
mise en mouvement contre les
auteurs de ces actes de vandal-
isme », avant de préciser que « la
violence électorale est contre le
jeu démocratique ».
En ce sens, dit-il, le gouvernement
souhaite que le processus élector-
al se déroule dans la plus grande
transparence possible et dans le
respect du décret électoral. Le
porte-parole du gouvernement Tèt
Kale croit important que tous les
citoyens jouent leur participation
pour la pleine réussite du proces-
sus électoral en Haïti.
Alors que la machine électorale
semble prendre sa vitesse de
croisière, certaines personnes
avisées de la société civile se mon-
trent encore pessimistes quant à
la tenue de ces joutes dans les
dates mentionnées par le calen-
drier électoral.
Un doute qui semble prendre de
jour en jour plus de sens, tenant
compte des enjeux qui entourent
le processus et qui risquent égale-
ment de l’hypothéquer. Budget,
sécurité, le problème de décharge
sont autant de questions aux-
quelles le gouvernement doit
s’adresser.
À deux mois et quelques jours du
déroulement du premier tour des
législatives, ni le CEP, ni l’exécutif
ne sont en mesure de fournir le
budget définitif de ces élections.
A cette préoccupation, Rotchild
François se veut rassurant en
informant que « le CEP est en
train de travailler sur ce dossier »,
selon des informations recueillies,
dit-il, auprès de son collègue Jean
Fritz Jean Louis qui fait l’interface
entre le CEP et le gouvernement.
En plus des 38 millions de dollars
américains placés dans le fond
fiduciaire qui est géré par le Pro-
gramme des nations unies pour
le développement (PNUD), Rot-
child François Junior dit, « que le
gouvernement est en pourparlers
avec les partenaires internation-
aux qui ont fait des promesses
dans le cadre du financement des
élections pour pouvoir compléter
cette somme déjà déposé dans
ledit fonds ». Pour l’instant, per-
sonne ne sait quand est ce que
ces bailleurs vont débloquer les
fonds promis.
Hormis la question de budget, la
sécurité demeure aussi un gros
défi, surtout après le désengage-
ment de la Mission des Nations
unies pour la stabilisation d’Haïti
(Minustha) dans six départements,
dont certains sont réputés, « zone
rouge ». Dans cette perspective,
le ministre de la Communication
qui parlait au nom du gouverne-
ment informe « que des échanges
sont déjà entamés avec les respon-
sables de la Minustha pour voir ce
qui est possible ». Entre-temps,
dit-il, « des dispositions sont
en train d’être prise au niveau
de la Police nationale d’Haïti à
ce sujet ».En ce qui concerne la
question de « décharge », le porte-
parole précise que la position du
gouvernement n’a pas changé,
en dépit du nombre important
d’anciens comptables des deniers
publics désireux de participer aux
élections, « le gouvernement n’est
pas l’institution chargée de gérer
la question de décharge », a-t-il
calmement ajouté.
À ce sujet, il convient de souligner
que ce dossier (décharge), selon
une source proche de la Prima-
ture, brûle entre le président de
la République et le Premier min-
istre Evans Paul. La démission de
M. Paul aurait même été exigée
après que ce dernier eut refusé de
signer un décret visant à accorder
décharge aux anciens comptables
de deniers publics. Un dossier à
suivre.
Le gouvernement salue le déroulement
du processus électoralpar Noclès Débréus
HAÏTI/ÉLECTIONS
Rotchild François Junior , ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.
LUNDI 25 MAI 2015 N0
4 | 7
L
’Association haïtienne des
entreprises de construction
(AHEC) a organisé, du 19 au
22 mai 2015, un séminaire
de formation à l’intention des
professionnels travaillant comme
opérateurs d’engins lourds au local de
la compagnie de construction Vorbe
et Fils, à Carrefour Shada (Croix-des-
Missions).
Contribuer à une meilleure
préparation des professionnels,
structurer le domaine de la
construction, font partie des
objectifs poursuivis par les
responsables de la « AHEC ».
Plusieurs dizaines de jeunes, des
deux sexes (40), ont pris part à
ce séminaire qui s’inscrit dans
le cadre de l’amélioration de la
performance des professionnels,
notamment les ingénieurs,
opérateurs et contrôleurs.
Se réjouissant de la mise en œuvre
de ce programme de formation, le
PDG de l’« AHEC », M. Hervé Le
Rouge, a expliqué que « depuis
sept ans, il s’évertue à réaliser
cette formation afin de venir à bout
de certains problèmes existant
dans le secteur des entreprises de
construction ».
Aujourd’hui, dit-il, souriant,
« notre objectif d’améliorer la
performance des professionnels
haïtiens n’est plus un rêve.
Ces derniers vont tirer aussi
satisfaction de leur travail », s’est
réjoui le patron de la « AHEC ».
Dans la même veine, Chantale
Rabel, coordonnatrice technique
du programme, a indiqué que « ce
volet revêt une grande capitale,
compte tenu du rôle que remplit
un équipement en bon état ».
« Lorsqu’on travaille avec un
matériel défectueux, c’est comme
si on n’en avait pas », soutient-
elle.
Elle appelle à un service d’entretien
au quotidien des équipements.
C’est dans cette optique que « nous
sommes en train de familiariser
les techniciens avec tout ce qui
a rapport avec la maintenance,
notamment les méthodes de
graissage (les huiles) ». Selon la
coordonnatrice, ce séminaire de
formation se réalisera également
au profit des cadres intermédiaires
tels que les responsables de
chantiers, les contremaîtres et
les chefs d’équipe. Car, soutient-
elle, cette initiative participe de
la structuration du secteur suite
à une prise de conscience de la
situation. Aussi, appelle-t-elle
au sens de responsabilité des
employés qui pensent n’être pas
redevables à leurs employeurs
en ce qui concerne la gestion des
équipements.
En Haïti, les demandeurs
d’emplois sont toujours en quête
du travail. Les postes sont souvent
confiés à des étrangers en raison
d’une carence de cadres. Ainsi, la
« AHEC » s’engage à remédier à ce
problème en colmatant les brèches
et en améliorant la performance
des techniciens œuvrant dans le
secteur.
Procédés d’évaluation
Pour évaluer ces séances de
formation, la coordonnatrice
informe qu’elle organisera des
activités interactives axées sur
des échanges. Cette démarche
lui permettra de voir illico si les
notions ont été bien assimilées par
les ingénieurs. Dùn autre coté, une
méthodologie imagée (visuelle)
sera utilisée pour évaluer les
opérateurs des engins lourds, des
contremaîtres, qui n’ont qu’une
connaissance pratique accumulée
sur le tas dans le domaine.
De son côté, Jeff Léandre, un
technicien en engin lourd a salué
la réalisation de cette activité qui,
dit-il, s’apparente à une sorte de «
mise à niveau » dans l’exercice de
sa profession. Vu la modernisation
des matériels, il s’avère nécessaire
de se mettre au diapason afin de
ne pas être en déphasage en ce
qui ce a trait à leur manipulation,
a-t-il dit.
Comment comprendre, poursuit-
il, qu’un de mes camarades
quipratique la mécanique depuis
quarante-deux ans, alors que
c’est la première fois de sa vie
qu’il participe à un séminaire de
formation relative à son champ
de compétence. En confiant un
équipement qui fait son apparition
en 2013 à ces techniciens, à quoi
devra-t-on s’attendre ? s’interroge
M. Léandre qui exhorte les
autorités haïtiennes à s’engager
dans des initiatives similaires en
vue de contribuer à la création
d’emplois pour le bien-être de la
population. Aussi, souhaite-t-il la
continuité de ce programme qu’il
aimerait voir se réaliser chaque
semestre.
HAÏTI/AHEC
ACTUALITÉ
À la recherche de la performancePar Reynold Aris
8 | N0
4 LUNDI 25 MAI 2015
MONDE
Le pape est-il diplomate et / ou
provocateur ?par Jean-Louis DE LA VAISSIERE | sources : AFP
L
e pape est-il un diplomate ?
Si tout le monde s’accorde
pour reconnaître une nou-
velle vigueur à la diplomatie
du Vatican, le pape François a aussi
obtenu ce résultat en multipliant
phrases et gestes volontairement ou
involontairement provocateurs.
Ce sens de la formule, François l’a
démontré dernièrement quand,
offrant à Mahmoud Abbas une
médaille représentant un ange,
il lui a lancé: « vous êtes un peu
un ange de la paix »: une phrase
qui a irrité Israël mais qui est une
manière habile de prendre le pré-
sident palestinien à ses propres
promesses.
« Ange » dans le langage bib-
lique veut dire « messager », et
le Vatican a tenu à souligner que
la formule n’était pas un éloge
naïf du président Abbas, mais
un encouragement. Jorge Bergo-
glio avait qualifié il y a un an M.
Abbas et son homologue Shimon
Peres d’”hommes de paix”.
François avait « commis » un
autre geste fort peu diploma-
tique, en priant en mai 2014, le
front appuyé contre le mur de
séparation entre les territoires
palestiniens et Israël.
Un langage de vérité
historique
Autre phrase provocatrice dont
il aurait pu s’abstenir, mais qu’il
a tenu à prononcer au nom de
la vérité historique, qui seule,
selon lui, peut amener une vraie
réconciliation entre les peuples:
le massacre des Arméniens en
Le Pape François salue la foule sur la place Saint-Pierre la foule sur la place
Saint-Pierre, le 20 mai 2015 au Vatican. Photo AFP/AFP/Archives
1915/16 « est largement considéré
comme le premier génocide du
XXe siècle ». Le pape citait alors,
à l’occasion d’une messe à Saint-
Pierre, un document signé en 2001
par Jean Paul II. La Turquie avait
aussitôt rappelé son ambassadeur.
Dans la crise syrienne, François
avait en revanche en septembre
2013 réagi davantage en chef reli-
gieux qu’en homme politique. Il
avait alors appelé dans une lettre
au G20 les dirigeants du monde
à empêcher les frappes contre le
régime de Bachar al-Assad, et les
fidèles à une grande journée de
prière et de jeûne.
Des frappes étaient alors envisa-
gées par les Etats-Unis et la France
contre le régime syrien accusé
d’avoir employé des armes chi-
miques contre sa population civile.
Certains estiment qu’une interven-
tion à ce stade de la guerre aurait
empêché l’escalade actuelle et la
montée en puissance du groupe
Etat islamique. En Ukraine, en
dénonçant une « guerre entre
chrétiens », le pape a semblé sur-
tout préoccupé par le fait que des
chrétiens --catholiques d’Orient et
orthodoxes-- contredisent le credo
chrétien en se battant. Mais il lui
est aussi reproché de n’avoir pas
mis en cause la politique russe en
Ukraine.
D’autres propos ont été jugés insul-
tants par des Etats, la diplomatie
du Saint-Siège s’efforçant ensuite
d’apaiser les choses, comme quand
il a parlé du trafic de drogue en
Amérique Latine.
« J’espère qu’on pourra éviter
à temps la mexicanisation (de
l’Argentine). J’en ai parlé avec
des évêques mexicains et c’est une
réalité terrifiante », avait-il lancé
dans une conversation privée. Le
Mexique s’est senti insulté.
« Je suis convaincu que tous ces
gestes et ces paroles du pape sont
calculées, voulues et non pas
improvisées. Il utilise volontaire-
ment les différents registres --lan-
gage officiel ou jargon populaire »
pour faire passer un message pour
faire bouger les lignes, relève le
vaticaniste Marco Politi, interrogé
par l’AFP.
François cherche souvent à dénon-
cer les systèmes et les personnes
--sociétés exportatrices d’armes,
trafiquants, hommes politiques-
-qui sont à l’origine des conflits et
de l’exploitation, avec des expres-
sions énigmatiques destinées à
frapper et à interroger les esprits:
ainsi a-t-il fustigé lundi devant des
religieuses du Proche-Orient le fait
que des chrétiens soient victimes
de “la persécution en gants blancs,
et du terrorisme blanc, et même
du terrorisme en gants blancs”. «
C’est caché mais ça existe », s’est-
il exclamé, faisant référence aux
décisions et aux politiques menées
notamment par des Etats non
désignés nommément. En novem-
bre, il avait déjà expliqué que des
responsables à travers le monde
« chassent les chrétiens avec des
gants blancs », sans recourir à la
violence mais à coups de tracas-
series administratives. Le grand
« sans faute » diplomatique du
pape François est la réconcilia-
tion entre Cuba et les Etats-Unis,
mais ce résultat a été obtenu par
un travail de trente ans sous deux
pontificats.
Pérou: état d'urgence
dans une province en
raison de manifestations
Sources : AFP
L
e gouvernement péruvien
a déclaré vendredi l’état
d’urgence dans la province
d’Islay, dans le sud du Pérou,
où un projet minier suscite depuis
deux mois des manifestations au
cours desquelles quatre personnes
sont mortes.
« Le gouvernement a pris la déci-
sion de décréter l’état d’urgence
dans tous les districts de la prov-
ince d’Islay et de Mollendo (sa
capitale, ndlr) pour une durée de
60 jours », a annoncé le Premier
ministre péruvien Pedro Cate-
riano au cours d’une conférence
de presse à Lima. L’état d’urgence
entre en vigueur ce samedi et ce
sont les forces armées qui seront
chargées de maintenir l’ordre
public, a précisé M. Cateriano.
Cette décision suspend des lib-
ertés personnelles telles que
l’inviolabilité du domicile, la lib-
erté de circulation et la liberté de
réunion, a-t-il souligné.
Un manifestant est mort ven-
dredi lors d’un nouvel affronte-
ment entre manifestants et pro-
testataires, selon des sources
médicales. Il s’agit du quatrième
Heurts à Arequipa le 14 mai 2015 entre forces de l’ordre et manifestants
protestant contre un projet manier à Islay. Photo AFP/AFP/Archives
décès enregistré depuis le début
il y a deux mois des manifesta-
tions contre le projet minier de
Tia Maria.
Ce projet de mine de cuivre,
d’un montant estimé à 1,4 mil-
liard de dollars, est mené par la
firme Southern Peru, filiale de la
compagnie mexicaine Southern
Copper.
La population de la région rejette
le projet, estimant qu’il nuira à
l’agriculture et à l’environnement.
Elle observe une grève générale
depuis le 23 mars et les manifesta-
tions se sont multipliées.
LUNDI 25 MAI 2015 N0
4 | 9
MONDE
L
e Des emails de l’ex-secrétaire
d’Etat Hillary Clinton, publiés
vendredi par le département
d’Etat, lèvent un coin de voile
sur un attentat anti-américain en
Libye en 2012 qui avait provoqué
une polémique aux Etats-Unis
visant la candidate démocrate à la
présidentielle de 2016.
L’ensemble des courriers électro-
niques de Mme Clinton, du temps
où elle pilotait la diplomatie
américaine (janvier 2009-février
2013), alimentent depuis des
semaines une autre controverse
ciblant la possible future première
femme présidente des Etats-Unis.
Ces emails ont en effet été rédigés
à partir d’une messagerie et d’un
serveur privés et non d’un compte
gouvernemental, comme c’est la
règle.
Vendredi, le département
d’Etat a publié 296 emails (350
pages) officiels de son ancienne
patronne, sur un total de quelque
30.000 messages (55.000 pages)
professionnels. Les emails dits
personnels ont été effacés.
L’intéressée, en campagne dans
le New Hamphire, s’est déclarée
« heureuse que les emails
commencent à sortir ».
« Je veux que les gens les voient
tous », a affirmé Mme Clinton.
La justice américaine avait
ordonné en début de semaine au
ministère des Affaires étrangères
de lancer immédiatement la
publication de la masse de
messages, au fur et à mesure et
non en une seule fois, comme il
l’avait prévu à partir de janvier
2016.
Sur cette quantité énorme
d’emails, des centaines concernent
la situation sécuritaire en Libye
entre 2011 et 2012, et notamment
l’attaque armée du 11 septembre
2012 contre le consulat des
Etats-Unis à Benghazi (est) qui
avait coûté la vie à l’ambassadeur
Christopher Stevens et à trois
autres agents américains.
Un attentat qui a traumatisé
la diplomatie américaine
« Ces documents s’étendent sur
une période de deux ans, du 1er
janvier 2011 au 31 décembre
2012 et concernent la sécurité et
les attaques contre la mission de
Benghazi, ainsi que la présence
diplomatique des Etats-Unis en
Libye », a expliqué la porte-parole
du département d’Etat Marie Harf.
Le New York Times s’était déjà
procuré et avait publié jeudi les
quelque 350 pages d’emails sur la
Libye et Benghazi.
L’affaire’ Benghazi
Ce qui était devenu au fil des
semaines fin 2012 dans la presse
américaine « l’affaire » ou le «
scandale » Benghazi a opposé le
gouvernement démocrate et le
Congrès républicain, avec son lot
d’auditions, d’enquêtes et de rap-
ports.
Ces emails étaient déjà entre les
mains d’une commission mise sur
pied par la majorité républicaine
du Congrès et chargée d’enquêter
sur l’attentat et la gestion qui en
a été faite par l’administration du
président Barack Obama.
La controverse politique avait
commencé à propos de la
responsabilité de l’attaque, le
gouvernement américain l’ayant
dans un premier temps attribuée
à une manifestation « spontanée
» de musulmans en colère à
Benghazi, avant de reconnaître
qu’il s’agissait d’un attentat «
terroriste » islamiste.
« Les emails que nous avons
publiés aujourd’hui ne modifient
pas l’essentiel des faits ou notre
analyse des évènements avant,
pendant et après l’attaque » du
11 septembre 2012, a défendu
Mme Harf. Les messages, difficiles
d’accès vendredi sur le site du
département d’Etat mais qui sont
les mêmes que ceux obtenus par
le New York Times, se concentrent
sur des mémos transmis à Mme
Clinton par un ami et homme
d’affaires, Sidney Blumenthal,
devenu conseiller informel sur la
Libye.
Au lendemain de l’attaque du 11
septembre 2012, M. Blumenthal
avait envoyé un mémo affirmant
qu’elle avait été perpétrée par
des « manifestants » furieux
d’une vidéo produite aux Etats-
Unis qu’ils jugeaient insultante à
l’égard de l’islam. Le lendemain,
M. Blumenthal avait changé de
version, accusant dans un autre
mémo le groupe libyen islamiste
Ansar Asharia, lié à Al-Qaïda.
Ces hésitations et différentes
versions de l’administration
américaine en septembre 2012
avaient alimenté la polémique
sur ce que savait éventuellement
la Maison Blanche ou ce qu’elle
aurait tenté de dissimuler à propos
de l’attaque.
« Les Américains peuvent
maintenant constater eux-mêmes
qu’il n’y aucune preuve à l’appui
de théories du complot », a
défendu l’élu démocrate Adam
Schiff, qui a demandé, comme
ses pairs républicains, que Mme
Clinton soit auditionnée par la
commission Benghazi.
Des emails de Clinton lèvent le voile
sur un attentat anti-américain en Libye en 2012
Sources : AFP
10 | N0
4 LUNDI 25 MAI 2015
ÉCONOMIE
CONSOMMATIONETSTANDARDSINTERNATIONAUX
RECONSTRUCTIONDESTPTC
La Journée mondiale de la métrologie a été célébrée, ce 20 mai, par le ministère du Commerce et de l’Industrie en
vue de sensibiliser les consommateurs à l’importance de la métrologie dans les activités commerciales. « Mesures
et Lumière » est le thème retenu sur le plan mondial pour cette célébration, mais en Haïti, elle a été célébrée autour
du thème national : « La métrologie pour une meilleure qualité de vie ».
33 normes pour une infrastructure de qualité
Sources : MCI
Un chantier en nette progression
L
a métrologie est l’un des
piliers de l’infrastructure de
qualité, qui cadre bien avec
« l’évolution du ministère du
Commerceetdel’Industrieetsonplan
stratégique triennal qui vise à faciliter
l’éclosion et le développement des
entreprises capables de générer de
manièrecontinuedesemploisdécents
et durables » dans le pays. Le ministre
duCommerceetdel’Industrieindique
que constituent une donnée majeure
et incontournable dans les échanges
commerciaux à l’échelle mondiale.
« L’incapacité de satisfaire aux
exigences du marché et le fait de
manquer d’éléments démontrant
la conformité à ces exigences
réduisent la capacité des pays
qui ne disposent pas d’une infra-
structure de qualité reconnue au
niveau international à pouvoir
exporter », a fait savoir le min-
istre Jude Hervey Day, ajoutant
que c’est dans le cadre du ren-
forcement de l’infrastructure de
qualité nationale que le ministère
a inauguré, en décembre 2012,
le Bureau haïtien de normalisa-
tion et le laboratoire nationale de
métrologie. « Ce sont deux struc-
tures importantes qui constituent
le fondement de cette infrastruc-
ture », a-t-il rappelé.
Un secteur que le ministère
du Commerce et de l’Industrie
semble soutenir beaucoup. « Des
équipements ont été acquis et des
travaux d’extension du laboratoire
de métrologie sont en cours pour
lui permettre de répondre aux
demandes de service de la part
des usagers », a indiqué le titulaire
du MCI, rappelant que, dans le
but de renforcer et de consolider
cette infrastructure, des comités
techniques ont été mis en place
et ont travaillé récemment à
l’adoption de 33 normes régionales
et internationales.
Pour sa part, la directrice du
Bureau national de normalisation
souhaite mettre en exergue, à
travers cette commémoration,
l’importance des instruments de
mesure qui doivent permettre de
déterminer avec exactitude les
quantités évaluées dans un secteur
quelconque, que ce soit dans les
marchés, les stations d’essence,
les hôpitaux, les laboratoires
d’essai et les industries. « Il est
donc essentiel de se rassurer
que les appareils de pesage, les
compteurs et autres instruments
de mesure utilisés dans le pays
sont conformes aux standards
internationaux et rassurent le
consommateur », a indiqué Mme
Michèle B. Paultre.
La directrice du BHN a précisé que
les actions de sensibilisation et les
formations dans les domaines de la
métrologie doivent être favorisées
pour que les entités concernées
soient en mesure de fournir à
l’échelle nationale des prestations
de service compétentes pour
l’étalonnage et la vérification
des instruments de mesure, de
contrôle et d’essai.
Rappelons que cette célébration
a été organisée par la direction
du contrôle, de la qualité et de
la protection du consommateur
– direction du BNH – qui rappelle
que la métrologie légale est un
outil pour la protection des
consommateurs, la loyauté des
échanges commerciaux et pour
garantir les intérêts économiques.
La métrologie légale représente,
en fait, l’intervention de l’État
pour garantir la qualité des
instruments de mesure ou des
opérations de mesurage touchant
l’intérêt public.
«
L’échéance de la fin du
mois d’octobre 2015 pour
l’achèvement des travaux de
reconstruction du Ministère
des travaux publics, transports
et communications (MTPTC)
sera respectée », a pronostiqué
l’ingénieur Alain Pamphile, conseiller
en infrastructures au Bureau de
l’ordonnateur national.
La construction de ce bâtiment de
1,270m2 à Delmas 33, financée
par l’Union européenne (UE) à
hauteur de 4.6 millions d’euros,
avait démarré le 14 juillet 2014
avec trois mois de retard. Après les
phases de terrassement, de fouilles
et de bétonnage des fondations, la
structure métallique complète est
en nette progression, a-t-on appris
d’une source proche du Bureau de
l’ordonnateur national.
L’ingénieur Vicenzo Candido,
coordonnateur d’une équipe
de techniciens Italiens à pied
d’œuvre sur ce chantier depuis
plus d’un mois, devrait procéder
prochainement au tôlage, au
ferraillage et au bétonnage graduel
de cette structure. Une évaluation
de l’état d’avancement des travaux
avait été effectuée mardi dernier
par Charles Jean-Jacques,
l’Ordonnateur National du Fonds
Européen de Développement
(FED) en Haïti.
Visite d’évaluation du chantier de reconstruction des TPTC par l’Ordonnateur
National du Fonds Européen de Développement (FED) en Haïti, Charles Jean-
Jacques. / Photo FED
Le ministère du Commerce et de l’Industrie veut sensibiliser les consommateurs à l’importance de la métrologie dans les
activités commerciales . / Photo MCI
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4 | 11
Les vingt-cinq pays passés en
revue, tous en développement
accéléré à l’image de la Chine,
du Vietnam, du Mexique ou de
l’Indonésie, mobilisent désormais
60 % des dépenses mondiales
d’exploration de nouveaux filons
de minerais. Il y a dix ans, ils n’en
totalisaient que 40 %.
Dans cette quête de nouveaux
gisements, l’Amérique latine
(25 % des dépenses mondiales
d’exploration) et l’Afrique (17
%) se taillent la part du lion.
Pas étonnant que les fusions-
acquisitions d’entreprises
minières se multiplient sur ces
deux continents.
En Afrique, elles ont été surtout
le fait des entreprises publiques
chinoises qui ont ciblé la
République démocratique du
Congo, la Sierra Leone, la Namibie
et l’Afrique du Sud.
Aux yeux des investisseurs, un
des atouts des pays émergents
est qu’ils détiennent un quasi-
monopole sur plusieurs types
de minerais, notamment dans
le domaine des platinoïdes, de
l’étain, du niobium ou des « terres
rares ».
Leur autre atout est le faible
niveau de leurs salaires...
ÉCONOMIE
L'eldorado minier des pays émergents
Par Alain Faujas
Les salaires des pays du Sud
rattrapent ceux du NordPar Matthieu Hoffstetter / bilan.ch
MATIÈRESPREMIÈRESINDUSTRIELLES
ÉCONOMIESDÉVELOPPÉESETPAYSÉMERGENTS
La corruption y est solidement installée, leur nationalisme demeure vivace et leurs infrastructures déficientes.
Pourtant, c’est dans les pays émergents que le secteur minier est appelé à se développer le plus vite au cours des
prochaines années, si l’on en croit l’étude publiées le 12 décembre par le cabinet Ernst & Young sur « les mines
dans les économies en croissance rapide ».
Et si miser sur les salaires bas des pays en développement n’était qu’un calcul de court terme? Une étude estime
que les écarts de rémunérations entre les pays en développement et développés va se réduire significativement
d’ici 2030.
E
st-il toujours rentable de délo-
caliser des pays du Nord vers
les pays émergents si la raison
principale du choix réside
dans les bas salaires? Pas si sûr à en
croire une récente étude du cabinet
de conseil PricewaterhouseCoopers
(PWC).
Selon celle-ci, les écarts de salaires
entre économies développées et
économies en développement
devraient sensiblement diminuer
d’ici 2030. Pas de rattrapage
intégral à attendre, mais
le différentiel pourrait être
sensiblement revu à la baisse dans
les deux décennies à venir.
La Chine voit déjà ses salaires
décoller
Le mouvement est déjà engagé
avec des rémunérations qui
ont augmenté de 181% entre
2004 et 2012 en Chine. Dans
le seul secteur textile, la hausse
s’accélère même avec +25% en
2012 et sans doute +20% en
2013.
Certes, le rattrapage sera progressif
et différencié selon le pays
concerné. Ainsi, les salaires en
Inde et aux Philippines devraient
rester parmi les plus faibles au
monde. Mais les rémunérations
moyennes pourraient néanmoins
quadrupler d’ici 2030 dans le
sous-continent (de 132 dollars
en 2011 à 616 dollars en 2030)
et tripler dans l’archipel (de 169
dollars à 581 dollars).
Le différentiel sera réduit
Or, en Europe ou aux Etats-Unis,
la hausse sera largement moins
importante sur la même période:
de 3821 dollars à 5022$ en
France, de 3482$ à 4574$ aux
États-Unis, de 3466$ à 4911$ en
Allemagne ou encore de 3433$
à 4665$ au Royaume-Uni. Une
croissance comprise entre +25 et
+35% pour la plupart des pays
développés.
Logiquement, ces évolutions
comparées conduisent à une
réduction du différentiel entre
les salaires réels (tous coûts
salariaux cumulés) entre pays
en développement et pays
développés. Ainsi, le rapport
entre le salaire réel moyen indien
et ses équivalents français et
allemand devrait passer de 28
et 26 respectivement en 2011
à 8 en 2030. Entre États-Unis
et Mexique, le rapport pourrait
passer de 7 à 4.
Les premières
relocalisations
De fait, le ralentissement du
mouvement de délocalisations
pourrait se poursuivre. Les
directions d’entreprises
pourraient être moins enclines à
fermer leurs sites de production
ici pour relocaliser dans les pays
où le coût de la main-d’œuvre
reste plus bas.
Mais pas question d’enterrer
les délocalisations pour autant.
Déjà car cette tendance de
rattrapage des niveaux de salaires
sera progressive. Ensuite, le
différentiel, même en 2030,
pourrait rester suffisant pour
que certaines sociétés fassent le
choix d’une délocalisation de la
production ou de certains services
en Chine, au Pakistan ou au Brésil.
Mais surtout, de nouvelles
stratégies de délocalisations
pourraient émerger. C’est ainsi
que H&M a récemment investi en
Ethiopie au détriment e ses sitess
de production textile en Chine.
Les coûts de l’énergie et du
transport
Main-d’œuvre moins chère que
dans les pays où l’évolution est
rapide, proximité plus grande
avec les marchés principaux
(Europe et États-Unis), d’autres
avantages peuvent être trouvés.
En rapprochant les sites de
production des débouchés, les
entreprises pourraient ainsi
mieux maîtriser la chaîne
d’approvisionnement et voir leurs
coûts de transport réduits.
Pas forcément un mauvais calcul
à l’heure où les coûts de l’énergie
augmentent parfois aussi vite
que les coûts de la main-d’œuvre.
Car la hausse des salaires est
fortement liée à la croissance du
PIB.
Les écarts de salaires entre économies développées et économies en
développement devraient sensiblement diminuer d’ici 2030. / Photo bilan.ch
12 | N0
4 LUNDI 25 MAI 2015
ÉCONOMIE
COMMERCEETINDUSTRIE
Dans le cadre du projet de modernisation et de dynamisation des associations de défense des consommateurs et
dans la perspective de restructuration, un plan de formation continue a été élaboré par la Direction du contrôle de
la qualité et de la protection des consommateurs du ministère du Commerce et de l’Industrie en vue de renforcer
les capacités des membres des associations en matière de gouvernance ou de pilotage.
Renforcer les capacités des associations
des consommateurs
Source : Ministère du Commerce et de l’Industrie
P
lus de 75 membres d’associa-
tions de défense de consom-
mateurs ont participé dans
le Nord et le Nord-Est à un
séminaire sur le thème « Leadership
des organisations », qui jouit d’une
grande pertinence car la gestion effi-
cace d’une association requiert, selon
le formateur, la présence d’un leader
efficace et dynamique qui sait porter
le projet de l’association en accep-
tant de prendre des responsabilités
vis-à-vis des adhérents et de la com-
munauté.
Ce séminaire vise également
à renforcer les capacités des
associations de défense de
consommateurs en matière de
leadership , à développer de
bonnes relations au sein des
équipes de travail, à orienter les
décisions prises qui garantissent
le bon fonctionnement des
associations et à développer
une bonne collaboration entre
le ministère du Commerce et
de l’Industrie et les fédérations
d’associations de consommateurs
du Nord et du Nord-Est.
« Nous espérons à travers cette
formation que les membres
acquerront des principes de
leadership qui s’imposent
aux différentes activités des
associations de défense des
consommateurs en vue de mener
des actions institutionnalisées et
de prendre des décisions fondées
sur un style de leadership qui
leur permet de travailler avec
les membres des associations
et la communauté sur une base
d’échange et de participation
effective », ont indiqué les
responsables de la Direction du
contrôle de la qualité et de la
protection des consommateurs
(DCQPC) du ministère du
Commerce et de l’Industrie.
Les responsables de la DCQPC
disent être convaincus qu’après
cette séance de formation, le mou-
vement consumériste va bénéfi-
cier d’un leadership efficace,
dynamique. « Les organisations
de défense des consommateurs
vont pouvoir répondre pleinement
de leur mission, celle de défendre
les intérêts des consommateurs
haïtiens de manière que ces derni-
ers puissent devenir des acteurs
essentiels dans la recherche de
la qualité et contribuer grande-
ment à la croissance économique
et au développement de notre
pays », ont-ils indiqué, rappel-
ant que ces activités ont pour
but également de partager des
recommandations pratiques et de
promouvoir des gestes essentiels
de prévention pour des aliments
plus sûrs et pour inciter la popula-
tion à changer de comportement
à l’achat ou la vente.
Financé par le Programme d’appui
à la mise en œuvre du marché
et de l’économie unique de la
Caraïbe (CMSE), ce séminaire va,
selon les organisateurs, permettre
de partager des recommandations
pratiques et de promouvoir des
gestes essentiels de prévention
pour des aliments plus sûrs et pour
inciter la population à changer
de comportement à l’achat ou la
vente.
Le ministère du Commerce et de l’Industrie veut sensibiliser les consommateurs
à l’importance de la métrologie dans les activités commerciales. / Photo MCI
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4 | 13
SOCIÉTÉ
Q
uels liens peut-il y avoir entre la dette et la psychanalyse ? Certains
avancent que François Hollande aurait commis une bourde en
parlant de dette en Guadeloupe, ce qui a réveillé les cohortes de
ceux qui sont convaincus que la France est dans son tort et qu’elle
doit restituer au pays cette somme qui a été versée par tranches pendant des
décennies et dont le peuple haïtien, en particulier la paysannerie, a fait les frais.
 Au-delà des manipulations politiques, de l’émotion suscitée par cette
question, je pense qu’il est de bon droit d’être étonné par la décision
prise par les dirigeants d’alors de payer cette somme à l’État français
après que nous avions défait sur le terrain les troupes de Napoléon.
Ce « nous » que j’utilise est tout à fait flou. Si les dernières batailles
dites décisives ont été dirigées par des hommes qui avaient fait tout
d’abord allégeance à l’État français, les chefs de la grande rébellion,
comme Lamour Dérance et Petit Noel Prieur, avaient déjà réduit le
corps expéditionnaire français, déjà mis à mal par la fièvre jaune, à
sa plus simple expression. La perspective d’un retour des colons, et
donc de la perte des privilèges dont ils jouissaient depuis la période
de Toussaint Louverture, allait porter, par intérêt de classe, toute une
classe d’hommes et de femmes - n’allant pas toutefois vers l’extrémisme
démesuré de Jean Baptiste Lapointe - à s’allier finalement avec
les troupes d’esclaves sur le terrain pour mettre en échec le projet
révisionniste de Napoléon.
Jean Jacques Dessalines, très tôt, comprendra les dessous de cette
alliance et ses mots célèbres « Et ceux dont les pères sont en Afrique,
qu’auront-Ils ? » auront les conséquences que l’on sait. Son assassinat
un 17 octobre ne devient alors que la suite logique de l’assassinat des
chefs auquel lui-même avait participé en éliminant Lamour Dérance.
L’État haïtien n’a jamais été forcé d’honorer cette dette que l’État
français réclamait. La France vaincue sur le terrain pouvait réclamer
n’importe quoi. Ce n’était que dernière arrogance d’une puissance
qui, de toute manière, ne pouvait plus prétendre à aucun droit sur
ce pays. Les masses haïtiennes se seraient soulevées comme un seul
homme pour faire échec à une improbable aventure des colons français
nostalgiques de leur période faste à Saint-Domingue.
Alors pourquoi nos dirigeants ont-ils payé ? Pour se trouver un appui
face à la montée de la contestation dans toutes les campagnes ? Pour
se protéger de la colère des masses rurales se rendant compte que
les créoles n’avaient fait que reproduire le système sous une forme
édulcorée et peut-être même plus violence par certains aspects ? La
ségrégation était toujours là dans ladite première république noire et
elle perdure encore de nos jours.
Ont-ils payé aussi pour s’assurer la reconnaissance de leur père, le
Blanc, leur seule référence, la mère noire ayant été refusée, rejetée,
cette Afrique qu’on brandit seulement comme l’enfant en colère prêt
à tout casser pour attirer l’attention du père aimé, mais méprisant ?
Il n’y avait pas non plus trop de réticence à payer, car celui en fin de
compte qui allait casquer était ce peuple noir qu’on méprisait. Notre
histoire n’est-elle alors qu’une vaste suite de traîtrises, depuis l’épisode
des Suisses, en passant par l’assassinat des chefs et celui de l’Empereur
quelques années plus tard ?
Si la France doit penser à s’acquitter de cette dette sous une forme
à déterminer par des responsables éclairés des deux États, loin de
l’agitation stérile des foules manipulées par des politiques en quête de
pouvoir, cela ne doit pas nous faire oublier cette question essentielle et
combien actuelle qui est celle de la trahison permanente de nos chefs.
EXIT
Dette et psychanalyse
ou la trahison des chefs !
par Gary Victor
À
Port-au-Prince, s’habiller ne
requiert pas un portefeuille
bien garni. Il suffit de trou-
ver la bonne marchande ou
plutôt le bon habit, quand il le faut.
Point n’est besoin d’affronter les
regards hautains des employés des
magasins de vêtements du haut de la
ville. Ni de recourir aux services des
tailleurs qui se font rares et qui, par
la même occasion deviennent de plus
en plus coûteux.
« Je ne me souviens plus depuis
quand j’ai été chez le tailleur.
Ca fait tellement longtemps ! »
Réponse singulière d’un jeune
d’environ une vingtaine d’années
à la question : « Quand vas-tu
chez le tailleur ? » Les réponses
des autres jeunes questionnés à
ce sujet ne sont pas différentes.
Certains y vont uniquement quand
ils veulent se procurer une tenue
qui coûtera sans doute plus chère
dans un magasin de vêtements.
D’autres avouent y aller quand ils
veulent un habit fait sur mesure
selon leurs désirs.
Si les tailleurs peuvent espérer
une cérémonie nuptiale ou des
funérailles pour voir un client
masculin, il n’en est pas de même
pour les filles. Elles disparaissent
considérablement de la clientèle
des couturiers. L’une avoue
n’aller chez le tailleur que pour
confectionner son uniforme.
Donc, une fois par an. Une autre,
peut-être deux fois par année, «
si je veux confectionner une jupe
spéciale ».
La majorité des jeunes interrogés
déclare acheter leurs vêtements
au centre-ville. C’est une
solution pour pallier au manque
de magasins de vêtements.
Parce que ces magasins sont
pour la plupart, logés à Pétion-
ville et semblent destinés à une
clientèle particulière. Le centre-
ville demeure la seule option
correspondant à leur pouvoir
d’achat. Le centre-ville et les
marchés environnants sont, selon
ces jeunes, plus accessibles et
moins coûteux.
Cependant, malgré cette
accessibilité, les marchandes de
vêtements usagés communément
appelés « pèpè » ont aussi leur
importance. Suze (nom d’emprunt)
témoigne : « J’achète mes
vêtements chez les marchandes
de pèpè » pour plusieurs raisons.
C’est moins cher. Quand je veux
avoir un vêtement que d’autres
filles ne porteront pas, c’est le
meilleur choix. Ces habits ne sont
pas communs. Et j’ai toutes les
chances de trouver des vêtements
de marque ». Par ailleurs, les filles
ne sont pas les seules à avoir cette
addiction aux vêtements usagés.
Les jeunes garçons fréquentent
également ces marchandes que
l’on retrouve un peu partout dans
les rues de la capitale. Situation
économique oblige.
Les magasins de vêtement que l’on
nomme « shop » ne semblent pas
avoir de clientèle assidue chez les
jeunes. Peu sont ceux qui y vont
pour se procurer leur vêtement.
Un faible pourcentage des jeunes
interrogés va de temps en temps
dans les magasins de vêtements.
Parfois pour une urgence. D’autres
fois, pour être sûr d’acheter des
vêtements de qualité.
Dans cette diversité qui ne
se construit que sur une base
économique, les couturiers
sont oubliés. Quand l’on trouve
facilement son habit pour pas
cher, voir un couturier n’est plus
obligatoire. Savoir quelle est
l’alternative pour ces hommes
ou ces femmes dans ce métier en
péril chez nous, comprendre leur
situation, évaluer les mécanismes
qu’il faut mettre en place pour
revaloriser cette profession, c’est
un autre débat.
L'art de se vêtir
selon ses moyenspar Stéphanie Balmir
Pour s’habiller en Haïti en 2015, il y a diverses options.
Dépendamment de ses moyens économiques, le choix
vestimentaire est différent. Chacun s’habille selon ses
goûts mais surtout selon ses poches. Où s’habillent les
jeunes ? Chez les marchandes ambulantes du centre-
ville ? Le marché Hyppolite ? Les « pèpè » ? Autant de
possibilités pour se vêtir. Mais quelle est la place des
tailleurs dans cette diversité ? Quand s’adresse-t-on à
eux ?
14 | N0
4 LUNDI 25 MAI 2015
SOCIÉTÉ
E
n Haïti, des milliers d’enfants
ne possèdent pas d’actes de
naissance ; ce qui est une
violation flagrante du droit
à l’identité.En février dernier, une
enquête conjointe de Institut du Bien-
être social et de Recherches l’IBESR
et de la municipalité de Plaisance,
avec le support technique du projet
de protection des droits humains
HPP AKSE, a permis de recenser pas
moins de 700 enfants en dessous de 5
ans non pourvus d’actes de naissance,
dans la seule Commune de Plaisance
(Nord d’Haïti).
Des milliers d’enfants ne sont pas
enregistrés et/ou ne possèdent
pas d’actes de naissance en Haïti.
Ce problème a été soulevé à de
nombreuses reprises par des
responsables d’organisations
communautaires à travers le pays.
«Quand on a la chance d’avoir
un acte de naissance en main,
la plupart du temps il n’est pas
enregistré aux archives nationales.
Parfois, on doit débourser jusqu’à
10 mille gourdes pour avoir un
document conforme », s’est
lamentée une jeune femme dans la
vingtaine participant à un atelier
de travail sur le droit à l’identité
à Plaisance.
À côté des problèmes d’ordre
structurels tels l’absence de
registre et de formulaires
de naissances au bureau de
l’État civil, il faut également
considérer l’accès difficile – dû à
la distance - du bureau de l’État
civil par rapport aux 8 sections
communales ainsi que des frais
illégaux réclamés certaines fois
pour l’obtention des documents.
« Un enfant ne détenant pas
d’acte de naissance est dépourvu
d’existence juridique. Ce qui
compromet la protection de ses
droits et, par ricochet, son avenir.
Sans identité, Il se trouve dans
une situation de vulnérabilité le
rendant facilement exploitable
», a expliqué Marjorie Bertrand
conseillère principale en
protection de l’enfant à HPP
AKSE, lors d’un atelier de travail
sur la protection de l’enfant et le
droit à l’identité à Plaisance.
Les communautés rurales
sont les plus touchées
Selon EMMUS V, pour huit enfants
sur dix (soit 80 %), la naissance
a été enregistrée à l’État civil.
Toutefois, seulement 73 % du
total, soit 7.3 sur dix, ont un acte
de naissance. Plusieurs raisons
tendent à expliquer cet état de fait,
soit que le document n’a jamais
été remis aux parents ou que ces
derniers ne l’ont pas retiré, soit
HAÏTISOCIÉTÉ/DROITÀL’IDENTIFICATION
Plaisance se mobilise pour
le droit à l'identité des enfants
par Vantz Brutus et Edner Décime
que par la suite il a été perdu et/ou
est devenu non disponible.
EMMUS V révèle également que
le problème d’identification et
d’enregistrement des enfants
affecte davantage les communautés
rurales et qu’il existe aussi
d’importantes disparités au niveau
départemental, les pourcentages
d’enfants de moins de 5 ans
enregistrés seraient autour de 70
% dans l’Artibonite et le Centre et
de 86 % dans l’Aire Métropolitaine
et le Sud.
Conscient de l’ampleur du défi,
le Président Martelly a pris un
arrêté en date du 16 janvier 2015
accordant un délai de 5 ans à
toute personne dépourvue d’acte
de naissance, pour régulariser son
état civil et ceci gratuitement.
La communauté de Plaisance se
mobilise pour profiter pleinement
de cette disposition. Un projet
pilote d’enregistrement des
naissances tardives, s’étendant
de février à juillet 2015, est
mis sur pied et devra inspirer
des interventions dans d’autres
communes également affectées par
ce problème.
Dans la première phase,
Maires, membres des Conseils
d’administration des sections
communales (CASECS) et
bénévoles se sont associés aux
clercs pour répertorier à travers
la commune et les sections
communales de Plaisance tous les
enfants non-enregistrés à l’état
civil.
Dans la deuxième phase, une base
de données sera constituée par la
municipalité de Plaisance pour
pouvoir guider des interventions
futures.
Dans la troisième phase, les
autorités locales (la Mairie, les
membres de Casec, Asec, les
officiers d’État civil, les clercs, les
acteurs de la société civile et le
secteur religieux vont développer
un mécanisme pour pouvoir suivre
les naissances et délivrer les actes
de naissance à temps.
À la recherche de solutions
durables
Les représentants des organisa-
tions communautaires réalisent
des rencontres régulières avec les
autorités locales à la recherche de
solutions durables au problème
d’état civil. Un plan d’action est
en cours d’élaboration et parmi les
mesures envisagées figurent :
• Un système d’enregistrement dès
la naissance dans les dispensaires
et centres de santé de la commune ;
• La mise en place d’un partenariat
écoles-églises-dispensaire/centres
de santé et le bureau de l’officier
d’État civil de Plaisance.
« Ce projet va apporter une réponse
durable au problème de l’état civil
à Plaisance. Non seulement nous
allons régulariser la situation des
centaines d’enfants qui n’ont pas
d’actes de naissance mais aussi
nous allons travailler avec tous
les acteurs concernés de près ou
de loin pour mettre en place un
mécanisme pour que chaque enfant
qui naisse ait automatiquement un
acte de naissance », a affirmé le
Maire, Anthony Josaphat.
LUNDI 25 MAI 2015 N0
4 | 15
SOCIÉTÉ
Champ de Mars. / Photo J. J. Augustin
D
epuis le séisme du 12 jan-
vier 2010, la zone qui a été
la plus investie à la capitale
est le Champ de Mars. Elle
a été, dès le lendemain de la catastro-
phe, envahie par une population aux
abois, ne sachant, dans leur subite
errance, où se mettre à couvert. Car
les secousses se répétaient. Rester à
l’intérieur d’une maison même non
fissurée était un grand risque. En
quelques jours, le Champ de Mars
était devenu le camp de réfugiés le
plus peuplé au bas de la ville.
Avec ses tentes offertes par des
organisations internationales
humanitaires, l’espace avait
drastiquement changé de
configuration. Du havre de repos
pour les piétons fatigués ou de la
tribune publique de discussions
enflammées de groupes politiques,
le Champ de Mars avait comme
perdu ses repères de relations
sociales et historiques. La place
Dessalines, la place Pétion, la
place Christophe, le kiosque
Occide Jeanty, tout l’ensemble
urbain n’était qu’un vaste lieu de
l’expérimentation psychologique,
sociale et de santé des instances
internationales.
Les citoyens de la capitale qui
tiraient une grande fierté en
déambulant aux pieds des statues
des héros de la patrie ne cachaient
pas leur malaise à la vue de ces
brusques transformations du
Champ de Mars. À quelques pas
du Palais national ravagé par le
séisme, le lieu ressemblait à un «
war zone ». On y craignait, surtout,
l’extension des épidémies, les
dégâts du sexe, la propagation de
fièvres et du choléra.
Après plus de deux ans dans cette
intolérable situation de déchéance
humaine, des instances nationales
et internationales commençaient
par relocaliser les réfugiés.
De la légèreté démocratique ?
Des plans de reconstruction, au
bout de deux ans et demi, ont
commencé par apparaître sur
des affiches. Le ministère du
Commerce et de l’Industrie, la
Cour de cassation, la restauration
de la place du Marron Inconnu
redonnaient un peu d’espoir.
Parallèlement, dans les espaces
où les tentes ont été enlevées,
des tôles rouges commençaient
par obstruer une bonne partie du
Champ de Mars.
Certains affirmaient même que cela
faisait l’affaire des commerçants
de la place qui stockaient ce
matériel en prévision des grands
projets de constructions publiques
et privées. D’autres argumentaient
que c’était une stratégie politique
pour démanteler les tribunes
politiques populaires qui
carburaient en ces lieux à plein
rendement.
Le Champ de Mars était devenu
donc comme un camp de
concentration où il était interdit
de voir ce qui se faisait derrière les
tôles rouges. Ces dernières avaient
la vertu de cacher l’assainissement
qui ne s’appliquaient pas sur les
Places. La poussière, la précarité,
des débris de construction jetés ici
et là mettaient à rude épreuve le
bronze des statues dont on pouvait
voir les menaces de corrosion. Les
urgences ne concernaient pas les
statues qui pouvaient attendre
pour leur restauration !
Le Champ d -Mars, aujourd’hui
encore, est totalement encerclé de
tôles rouges. On y ajoute des bleus
pour jouer un peu au nationalisme
cocardier ! La place Dessalines
est coupée en deux parties dont
l’une serait un agrandissement
moderne du Musée du Panthéon
national. L’amphithéâtre Occide
Jeanty inauguré redonne un peu
de couleur et d’harmonie festive
dans cette partie du Champ de
Mars. Certains critiquent les
couleurs trop vives des murs
qui jurent avec la blancheur du
kiosque. Le soleil tape très fort
sur les gradins !
Le ciné Triomphe, laisse-
on croire, sera inauguré sous
peu. L’immeuble a gagné en
transparence à cause des baies
vitrées qui ont remplacé des murs
autrefois épais de la dictature. De
la légèreté architecturale ? De
la démocratie moderne dans les
nouveaux immeubles ? Attendons
voir !
À la place des Artistes, en face de
l’ambassade de France qui sera
reconstruite, les érections de
tonnelles métalliques ne disent
rien de leur future fonctionnalité.
Les marchandes de poulets frits
se frottent les mains. Mais quel
sera le prix à payer pour les «
installations modernes » ?
Le Rex Théâtre est encore dans
son indescriptible délabrement.
Mais ses tôles rouges persistent
sur sa reconstruction en espace
et nombre de places. La place
de la Constitution ? Pas un mot
sur les tôles rouges. Un panneau
de signalisation informe que la
rue de la Liberté est fermée à la
circulation dans la perspective
de la réhabilitation du Champ de
Mars.
Une petite innovation à signaler
et pas des moindres : Le Bureau
d’ethnologie expose à son mur
d’entrée depuis quelques mois
des photos et artefacts de la
culture populaire. Cette semaine,
on y voit des photos de 1932
de Catherine Dunham et des
danseurs très athlétiques de Jean
René Delsoin. On peut y lire
aussi la Constitution impériale de
Jean Jacques Dessalines et une
importante biographie du Père de
la Patrie.
CHAMPDEMARS/RÉHABILITATION
Que cachent les tôles rouges ?par Pierre Clitandre
Des transformations s’effectuent au Champ de Mars. Les citoyens n’en sont pas trop renseignés. Le ministère de la
Culture n’en dit pas un mot. Seules les tôles rouges s’imposent en informations sommaires.
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4 LUNDI 25 MAI 2015
LUNDI 25 MAI 2015 N0
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CULTURE
Sa langue dans
la bouche de l'autre
par Jean Billy Mondesir
Des Amérindiens sont venus nous voir au début
du mois de mai. Oui, il existe encore des indiens en
Amérique. On avait une tendance à l’oublier tant leurs
voix sont étouffées et tant nous ne nous sommes
préoccupés que de nous-mêmes. Il en reste encore
en Amérique et ils luttent. Que longue sera cette
lutte contre l’indifférence, l’arrogance et l’irrespect
de l’autre. L’autre qui résiste encore à saluer leurs
humanités, à respecter leurs cultures, leurs territoires.
Ils sont venus ici, haut lieu de mémoire des indiens,
nous parler de leurs nuits : les Nuits amérindiennes.
C’étaient des nuits de belles lettres et de musique
qui se sont tenues à Port-au-Prince du 6 au 10 mai
dernier. C’étaient surtout des nuits rebelles dont nous
retiendrons certainement cette voix qui nous aura
appris que notre langue maternelle peut-être une arme
contre l’exclusion.
L
a poétesse innue de
pessamit Joséphine
Bacon, coprésidente
avec Yanick Lahens des
Nuits amérindiennes en Haïti, une
initiative des éditions Mémoire
d’encrier, a compris jusqu’où une
langue maternelle peut être ancrée
en soi. Elle a compris combien peut-
elle être un condensé de ce qu’on
est. C’est pourquoi, elle n’entend
jamais sortir sans la langue de son
peuple. Elle s’adresse à vous d’abord
en innu avant de traduire dans une
langue plus mondialisée, le français.
Elle sait que vous ne comprendrez
peut-être pas l’innu. Mais elle veut
quand même vous rappeler, qu’elle
aussi, elle a une langue qui porte
son histoire, la vie quotidienne de
sa communauté. Elle veut que vous
vous rendiez quand même compte
de tout ce que vous avez raté en elle
en ignorant sa langue. Elle traduit
ensuite en français pour vous dire «
je parle votre langue, ou une langue
que vous parlez parce que je ne veux
pas vous rater. Je ne veux pas rater le
monde. » Et continue à offrir où elle
passe l’exemple de cette possibilité
de dialogue.
Michèle Duvivier Pierre Louis
et Yanick Lahens ont chacune
tenté, lors de leurs prise de
parole à l’ouverture cet événe-
ment, quelques mots en innu.
On ne comprend pas tout de
suite ce petit courant qui par-
court les traits de Joséphine et
des autres innus. Mais quand la
chanteuse Chloé Sainte-Marie
nous a offert à son tour, dans son
accent québécois, quelques mots
créoles, le même frisson traversa
toute la salle et enfin, le petit
éclat de rire. Un petit mot de sa
langue dans la bouche de l’autre,
existe-t-il de geste d’amitié plus
sublime? Suivons l’exemple de
Joséphine. Offrons notre langue
aux autres, le créole et prenons les
leurs, l’anglais, l’innu, l’espagnol,
l’allemand....
D
epuis vingt cinq ans, le festival
Étonnantsvoyageurschantela
beauté et tisse des passerelles
pour la transmission de
l’imaginaire. Pour reprendre Claude
Renoult, le maire de Saint-Malo, «
depuis un quart de siècle ce festival
littéraire et artistique est au cœur des
débats qui agitent le monde et nous en
fait découvrir les moindres recoins ».
Pour cette édition, à travers tout un
programme d’activités qui s’est tenu
sur 26 lieux, les habitants de Saint-
Malo et des visiteurs de tous les vents
ont pu s’inventer une contre-allée à
l’ordre rigoureux du réel. 30 pays
étaient au rendez-vous, 30 visions
du monde, 30 manières d’écrire le
monde, son bruit et son silence.
Haïti, qui a déjà reçu le festival, a
été représentée par Yanick Lahens,
Lyonel Trouillot, Mackendy Orcel,
James Noel, Emmelie Prophète et
Franketienne.
Au menu des activités du festival,
100 films furent projetés ; 300
rencontres se sont tenues, on y a
trouvé également des spectacles, des
expositions, des ateliers jeunesse,
des débats, des lectures et des cafés
littéraires.
L’affiche du festival :
l’affirmation d’une position
politique
Pour cette édition 2015 du festival,
c’est une magnifique photo de la
dissidente birmane Aung San Suu
Kyi qui en a constitué l’affiche. En
faisant ce choix, les initiateurs du
festival ont voulu rendre hommage
à la pugnacité de cette grande
dame, cette femme de courage qui
a toujours dit « non » à l’injustice
et à la corruption. Depuis vingt-
cinq ans qu’elle est là, à dénoncer,
à refuser que le silence l’emporte
sur la justice, son travail commence
à apporter des fruits ; elle a même
obtenu le prix Nobel de la paix. En
faisant d’elle l’image des « Étonnants
voyageurs », la batterie d’artistes qui
était rassemblée à cette occasion a
souhaité dire au monde entier que
faire de l’art, c’est toujours, comme
l’aurait dit Balzac, « faire partie de
l’opposition qui s’appelle la vie ».
Être artiste, c’est toujours porter
dans sa voix le malaise des choses.
Les grands thèmes du festival
cette année
L’invention de la France, pour un
espace monde en français, dans un
monde en mouvement, un monde
très noir, L’imaginaire de la science,
L’aventure maritime, La maison
de l’imaginaire, Le vaste monde
étaient parmi les thèmes retenus
cette année et sur lesquels se sont
appuyés les différents dialogues
qui ont été engagés. Franketienne
a participé à un grand débat ayant
pour thème « Peindre, écrire :
l’imagination créatrice. Lyonel
Trouillot a signé avec Geneviève
Marie de Maupeou et Alain Sancerni
un « Dictionnaire de la rature » et
le recueil de poèmes « C’est avec
mains qu’on fait chanson » (Le
Temps des Cerises).
Les « Étonnants voyageurs » ont fait
une belle plongée dans l’imaginaire
québécois en compagnie de
Joséphine Bacon, Sophie Bienvenu,
Nicolas Dickner, Christian Guay-
Poliquin, Audrée Wilhelmy, Denise
Bombardier et Natasha Kanapé-
Fontaine. Beaucoup de jeunes
auteurs francophones étaient
présents sur les panels de cette
édition du festival, parmi eux
notamment Miguel Bonnefoy, le
lauréat 2014 du Prix du jeune
écrivain francophone.
Un quart de siècle
Dans la journée du 25 Mai, durant
trois heures, pour la célébration
des 25 ans, le public a été convié à
un tour du monde rétrospectif des
aventures d’Étonnants voyageurs
à Port-au-Prince, Dublin, Rabat
et bien sûr Saint-Malo. On y a
fait également un retour sur «
l’aventure du Manifeste pour une
littérature-monde en français »
signé en octobre 2007. Attendons
maintenant l’année prochaine pour
savoir où nous mèneront « Les
Étonnants voyageurs ».
Pour ses 25 ans,
le Festival Étonnants Voyageurs
est revenu à Saint-Malo
par Dangelo Néard
Du 23 au 25 mai 2015, deux cents auteurs du monde
entier se sont réunis à Saint-Malo pour célébrer le livre
et le cinéma. Deux cents « étonnants voyageurs » étaient
sur les quais de la cité corsaire. Quelque 60 000 visiteurs
étaient venus à leur rencontre. Dans le plaisir, dans la
bonté et par le dialogue, à bien y regarder, c’est la vie
qu’ils ont cherché à doubler, c’est le temps qu’ils ont
suspendu, c’est la parole que ces messieurs et dames ont
encensée.
La poétesse Joséphine Bacon lisant l’un de ses poèmes pour un groupe d’élèves
du collège Les Normaliens réunis.
Almondo était un passionné de son
art. Ses conversations se limitaient
presque à cela. Il parlait très peu
de lui. Par conséquent, personne
ou presque ne peut prétendre
détenir des informations fiables
pour écrire sa biographie. Ce dont
on est certain, toutefois, c’est que
sa carrière musicale s’est amorcée
à la fin des années soixante. Il a
roulé sa bosse un peu partout au
sein de quelques groupes musicaux
anonymes avant d’intégrer le Bossa
Combo où il fut associé à Jean
Jean-Pierre. À cette époque, le
Bossa Combo était le seul groupe
musical à disposer d’un véritable «
ban dèyè » complet.
Le jeune Keslin se fit tout de suite
remarquer grâce à ses roulements
et ponctuations d’une étonnante
précision. Ce qui faisait de lui,
dès l’entame de sa carrière, un
percussionniste de haut niveau.
Qu’il s’agisse de la batterie ou des
timbales, Armando les maîtrisait
avec une aisance déconcertante.
Grand maître de la mesure et de
la vélocité, son jeu sur la batterie
était caractérisé par une frappe
légère sur la cymbale couplée
d’une certaine intensité sur la
grosse caisse, faite d’équilibre et
d’exactitude.
Après son passage au sein du
Bossa Combo, il change de registre.
Tour à tour, il s’illustre chez le
« Shooblak », « les Zotobre » pour
enfin atterrir sur la piste du DP
Express, avec lequel il imposa,
pour de bon, son propre style.
Avec l’arrivée de Ti Manno, son
grand talent pour la composition
et l’arrangement musicaux s’est
révélé au grand jour. Il apporte
sa propre touche à « David », l’un
des plus grands classiques de la
musique haïtienne. Plus tard, il
expose sa versatilité en officiant
comme batteur attitré pour le
crooneur Ansy Dérose.
Par la suite, il a brièvement
collaboré avec Les Frères Déjean
de Pétion-Ville avant de fonder «
Omni Band », son propre groupe
musical.
Le morceau « Accolade bweson »,
qui figure sur le premier album
de ce groupe, produit par Fred
Paul, fait encore le bonheur des
mélomanes exigeants des années
quatre-vingt.
Véritable requin des studios,
Almando Keslin était, à une
certaine époque, l’un des batteurs
les plus sollicités du milieu. Fan
inconditionnel de Ti Manno, il a
dédié une bonne partie de sa vie à
mener un combat sans arrêt pour
la reconnaissance nationale de son
idole.
En effet, chaque année, au mois
de mai précisément, Almondo
faisait la tournée des stations de
radio pour parler de Ti Manno et
de son œuvre. Avec peu de moyens
et généralement sans aucune
aide, il organisait des concerts de
musique un peu partout dans la
capitale pour honorer la mémoire
de cette légende négligée et oubliée
par des générations d’hier et
d’aujourd’hui… de demain aussi,
qui sait !
Dans ces concerts, il invitait
des jeunes à venir revisiter des
morceaux chantés par Ti Manno,
soit au sein du DP Express ou
du Gemini All Stars. Almando a
mené ce combat avec courage et
passion. Il parcourait des dizaines
de kilomètres à pied sans se lasser
pour parler de Ti Manno.
Fier et orgueilleux, il regardait de
haut ceux qui ne comprenaient
pas et ne le soutenaient pas dans
son combat pour immortaliser le
nom et le personnage de Ti Manno.
«Avèk ou san yo, Pipo, m ap fè sa m
gen pou m fè ya », répétait-il de sa
voix éraillée et avec son rire franc.
Son énergie pour son âge était
contagieuse. Je ressens aujourd’hui
beaucoup de fierté pour l’avoir
connu et parce que j’ai eu la
chance, l’honneur et le privilège
de faire partie de ceux en qui il
avait confiance et pour qui il avait
du respect.
Repose en paix, Almondo !
Puisses-tu enfin trouver dans l’au-
delà cette sérénité que la vie sur
terre n’a pas su t’offrir. Tu as mené
le bon combat, mon frère, dans un
pays ou l’amnésie collective tend à
nous transformer en un peuple sans
gloire, sans âme et sans histoire.
Tu vouais une admiration sans
borne à Ti Manno, parti en mai.
L’histoire a voulu que le 22 mai tu
fasses aussi ton adieu à la musique,
à la terre, à Haïti. Triste mois de
mai !
18 | N0
4 LUNDI 25 MAI 2015
Almando Keslin : un percussionniste
hors pair, parti sans tambour ni trompette !par Philippe Saint Louis
CULTURE
Le mois de mai, tout compte fait, est un mois maudit pour les artistes haïtiens. Après Nemours Jean-Baptiste, George
Lys Hérard (Master Dji), Antoine Rossiny Jean Baptiste (Ti Manno) et Maurice Sixto, le décès d’Almando Keslin,
survenu le vendredi 22 mai 2015, très tôt dans la matinée, est venu grossir la liste de ces figures emblématiques
négligées de la culture haïtienne, parties vers l’au-delà au cours du cinquième mois de l’année.
Almando Keslin participant à l’une des émissions « Le divan de M. Jean » .
LUNDI 25 MAI 2015 N0
4 | 19
CULTURE
«
Dheepan », film d’amour et de
violencedeJacquesAudiard,sur
le parcours en France de réfugiés
sri-lankais, a reçu dimanche la
Palme d’or du 68e Festival de Cannes,
qui a mis les Français à l’honneur,
récompensant aussi les acteurs Vin-
cent Lindon et Emmanuelle Bercot.
« Recevoir un prix de la part des
frères Coen c’est quelque chose
d’assez exceptionnel », a déclaré
Jacques Audiard, 63 ans, très ému.
« Je pense à mon père », le scénar-
iste et dialoguiste Michel Audiard,
a-t-il ajouté.
La dernière Palme d’or française
avait été décernée en 2013 à « La
Vie d’Adèle » d’Abdellatif Kechiche.
Jacques Audiard avait déjà été
récompensé à plusieurs reprises
à Cannes, par le Prix du scénario
pour « Un Héros très discret » en
1996 et le Grand prix en 2009 pour
« Un Prophète ».
Autre récompense pour le
cinéma français, l’acteur Vincent
Lindon, 55 ans, a reçu le prix
d’interprétation pour « La loi du
marché » de Stéphane Brizé, film
cinglant sur la brutalité du monde
du travail, dans lequel il interprète
un chômeur de longue durée qui se
bat pour retrouver un emploi.
La voix brisée par l’émotion,
l’acteur, qui a été ovationné par la
salle, a chaleureusement remercié
le réalisateur et dédié son prix «
aux citoyens laissés pour compte
», estimant que ce prix était « un
acte politique ».
« C’est la première fois
que je reçois un prix
d’interprétation. C’est
l’un des trois plus beaux
jours de ma vie. »
L’actrice Emmanuelle Bercot, 47
ans, a reçu de son côté le prix
d’interprétation féminine pour «
Mon roi » de Maïwenn, ex-aequo
avec l’actrice américaine Rooney
Mara dans « Carol » de l’Américain
Todd Haynes, romance entre deux
femmes dans les années 50 avec
Cate Blanchett et Rooney Mara.
« Maïwenn, tu as cru en moi comme
personne avant, tu m’as regardée
comme personne avant », a dit
Emmanuelle Bercot, en longue
robe noire.
Ce prix récompense « l’audace, le
sens aigu de la liberté » de Maïwenn,
a encore déclaré l’actrice, qui inter-
prète dans ce film une avocate qui
se souvient de la passion destruc-
trice qu’elle a vécue pendant dix
ans avec Georgio (Vincent Cassel),
un séducteur et beau parleur.
Rooney Mara, qui n’était pas
présente à la cérémonie, campe
dans « Carol » le personnage d’une
toute jeune vendeuse qui va se
laisser séduire par une femme
bourgeoise à la beauté fatale (Cate
Blanchett).
- Nemes, Lanthimos et Hou Hsiao-
Hsien -
Le Grand prix a été décerné par le
jury présidé par les frères Coen à «
Son of Saul » (« Le fils de Saul ») du
Hongrois Laszlo Nemes, film choc
sur la Shoah.
Cette œuvre, qui raconte l’histoire
d’un déporté juif forcé de tra-
vailler dans les chambres à gaz à
Auschwitz, a impressionné par sa
mise en scène radicale. Il restitue
l’horreur de la Shoah sans presque
jamais montrer les victimes, par le
hors champ et les bruits.
« Ce continent est encore hanté par
le sujet », a commenté le réalisa-
teur en recevant son prix.
Le prix du Jury a été attribué au
Grec Yorgos Lanthimos pour « The
Lobster », fable grinçante et déran-
geante sur la solitude, le couple et
l’amour.
Le prix de la mise en scène est
revenu au cinéaste taïwanais Hou
Hsiao-Hsien pour « The Assassin
», histoire d’une justicière dans la
Chine du IXe siècle, à l’esthétique
ciselée.
Le réalisateur mexicain Michel
Franco a reçu de son côté le prix
du scénario pour « Chronic », por-
trait tout en retenue d’un infirmier,
interprété par Tim Roth, totale-
ment dévoué à l’accompagnement
de patients en fin de vie.
La cinéaste Agnès Varda, émue
aux larmes à l’évocation de son
ex-compagnon Jacques Demy,
a reçu quant à elle une Palme
d’honneur, une récompense seule-
ment décernée à ce jour à Woody
Allen, Clint Eastwood et Bernardo
Bertolucci.
Cannes : La Palme d'or à « Dheepan »
de Jacques Audiard, les Français à l'honneur
Sources : AFP
Jacques Audiard. / Photo AFP
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  • 1. Et commence la guerre des slogans et des promesses ! Almando Keslin : un percussionniste hors pair, parti sans tambour ni trompette ! par Philippe Saint Louis Évens Pierre et Azéa Augustama conservent leur ceinture ! par Kenson Désir LUNDI 25 MAI 2015 NUMÉRO 4 WWW.LENATIONAL.HT QUOTIDIEN • 25 gourdesRÉPUBLIQUE D’HAITI HAÏTI-ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE HAÏTI / SANTÉ PUBLIQUE SOCIÉTÉ Choléra, Ébola, Chikungunya : trois dangers qui nous guettent A lors que tous les projecteurs sont braqués sur la question desélections,lecholéra,l’ébola et, à la limite, le chikungunya guettent sérieusement la santé de la population. C’est la ministre de la Santé publique et de la Population, Madame Florence Guillaume Duperval, qui en a fait l’annonce lors de la conférence de presse hebdomadaire tenue, ce vendredi 22 mai 2015, à la primature. À l’occasion de la saison pluvieuse, une nette augmentation des cas de choléra a été remarquée un peu partout à travers le pays avec un pourcentage élevé pour le département de l’Ouest. Pour pallier la situation, Mme Duperval appelle au respect des principes d’hygiène, lesquels consistent à se laver les mains et à faire bien cuire les aliments avant toute consommation. » suite, P. 4 » P. 18 » P. 21 »   P. 15 CULTURE SPORT » suite Page 5 Que cachent les tôles rouges ? par Pierre Clitandre
  • 2. 2 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 Voir, entendre, parler en temps de violencePar Yves chemla TRIBUNE O n entend parfois dire, en Haïti, que par opposition à la situation actuelle, les temps duvaliéristes étaient tranquilles. C’est une affirmation gratuite, et qui témoigne, sans aucun doute, d’un manque d’appréciation, ainsi que d’une rupture dans le tra- vail de transmission de la mémoire. Il est vrai que la majeure partie de la population est née après la chute de la maison Duvalier. C’est une erreur que de regret- ter ce passé, tant il a marqué ses contemporains dans leur chair, tant il a détraqué les psychés, et lacéré les consciences. Beaucoup de récits en témoignent. Il faut lire Le Chant des Ténèbres de Jean-Claude Brouard-Cambronne qui a survécu à l’horreur de Fort- Dimanche. Il faut aussi reconnaî- tre dans le théâtre des mémoires ce que la violence érigée en spec- tacle a fait subir aux êtres dans leur vie quotidienne : l’anxiété, la dépression, le stress incessant, la peur de disparaître comme tant d’autres, sans même laisser de traces, sinon dans les mémoires des proches. Il y eut en effet les victimes identifiées, et puis toutes les autres, disparues pour avoir posé le regard sur la Gorgone en uniforme, pour avoir exprimé à haute voix une pensée dissiden- te, ou plus sûrement, considérée comme telle. D’autres pour avoir été au mauvais endroit, au mau- vais moment. Dans un récit encore inquiet – et pourtant présenté plus de quatre décennies après les faits – Ray- mond Miot revient sur un événe- ment qui a marqué la fin de son adolescence : en avril 1971, la famille de l’auteur apprend par la bouche d’un ministre proche du père, médecin, qu’elle est sur le point d’être arrêtée. Dans la nuit qui suit cette nouvelle, les trois partent se cacher, la mère en province dans sa famille, le fils et le père dans la propriété située en périphérie de la capitale d’un couple d’amis, et ils attendent. Pendant cette attente, la rumeur se répand que le docteur François Duvalier entre dans sa dernière maladie. Le pays retient son souf- fle. Mais pendant ces semaines de claustration, personne ne doit soupçonner leur présence dans cette villa, sous peine d’être arrê- tés, eux et ceux qui les accueil- lent, et qui s’inquiètent. Certes, ils auraient pu gagner une ambas- sade, mais ç’aurait été reconnaître par là une culpabilité, au regard de la dictature féroce. C’était aussi accepter de tout perdre : iden- tité, système de reconnaissance, certitude de la communauté de compréhension. Or, ce ne sont pas des activistes : le père est méde- cin, la mère, directrice d’école, le fils – qui est le narrateur – a com- mencé des études de médecine. Il s’interroge, car rien ne présageait que sa famille se retrouve dans une telle situation. Il va formuler plusieurs hypothèses, et pour les identifier, doit remonter dans ses souvenirs. Le récit de Raymond Miot tient son lecteur en haleine par la concurrence et l’interaction entre plusieurs axes de son récit : l’attente d’une solution, la remon- tée dans les souvenirs à la recher- che de l’élément déclencheur, la progression supposée de la mala- die du président, perceptible par des signes discrets, notamment la rumeur. Chacune de ces lignes de force interagit avec les autres, confèrant au livre sa densité. Il a suffi que le hasard se mette de la partie, une dizaine d’années auparavant : « Tout remonte à l’agrandissement de ma cham- bre à l’été 1962, qui m’a permis d’avoir une vue directe sur la rue et qui m’a aussi donné l’occasion d’entendre certaines conversa- tions de sbires du dictateur ». Voir et entendre placent l’être sur le seuil de la mise en danger. D’autant que ce sont de bien étranges visiteurs qui se glissent la nuit sous la galerie de la maison de la famille du docteur Miot. Ce sont par exemple des amants, et pas des moindres : Tassy, le tor- tionnaire, et la femme d’un notable du quartier. Ou bien des militaires qui se protègent de la pluie. Le jeune garçon entend ainsi parler de Clément Barbot, l’homme qui a aidé Duvalier à accéder au pou- voir, en fomentant des troubles qu’il réprimait ensuite, et qui, déchu par le président atteint par une paranoïa grandissante, sème pendant plusieurs semaines la terreur sur Port-au-Prince. Mais le jeune Raymond est surpris en train d’entendre et d’observer. Serait-ce la cause lointaine de cette menace d’arrestation ? De fil en aiguille il explore rationnel- lement plusieurs épisodes de son existence et de celle de ses par- ents. Cette façon de raconter en situant la narration sur un axe du temps dont les repères sont notre présent, celui de cette année de la crise et, de là, les années soixante, pendant lesquelles se trouverait la cause probable de leur peine, pourrait tourner au procédé. Mais tel n’est pas le cas, car ces hypothèses qui débouchent sur une vérité triviale, presque ridi- cule si le contexte n’atteignait pas au paroxysme de la terreur, ont un effet cumulatif, et permettent de décrire l’atmosphère de ces années-là, pendant lesquelles, en Haïti, on a été forcé de respirer un air pourri par la haine et la délation, pire même, la peur de celle-ci, c’est-à-dire la perte de la confiance en l’autre, qui entraîne à l’atomisation de la société, et qui en accélère le délitement. Le narrateur revient sur des moments tragiques : la tentative d’enlèvement de Jean-Claude Duvalier et de sa sœur. Duvalier lâche des forces vomies par l’enfer : « le chaos a alors régné sur la ville. C’était l’horreur. Des macoutes et des militaires ont profité de la situation pour régler leurs dif- férends, voler les commerçants et commettre des crimes ». Pour Duvalier, l’affaire était entendue : le coupable était le lieutenant François Benoît. Le chemin qui mène à la maison de sa famille est tracé par les cadavres de passants, abattus par des macoutes et des militaires surexcités. La famille Benoît est massacrée, sans dis- tinction d’âge ni de sexe. Le fils est enlevé, que nul ne reverra, la maison incendiée. Et puis Clément Barbot révèle publiquement qu’il est l’auteur de cette tentative d’enlèvement. Peu importe : Duvalier poursuit la famille Benoît de sa haine, et, au passage, en profite pour faire éliminer de potentiels opposants. Et Barbot de continuer, tuant des soldats dans la nuit, protégé en quelque sorte par le couvre-feu. La peur se répand. Les soldats, le doigt crispé sur la gâchette, tirent parfois sur des passants. On ne sort plus de chez soi que rarement. La mort de Barbot et de ses com- plices, encerclés à Cazeau par les troupes dirigées par Luc Désir, Gracia Jacques ou Eloïs Maître ne calme pas les allées du pou- voir. Miot remet en mémoire des épisodes et des noms, par exemple celui de Riobé qui tint tête à une armée depuis les grottes de Kens- koff. Il rappelle combien les plus démunis, les paysans, payèrent un tribut de sang particulièrement lourd après les incursions et les débarquements de guérilléros : des centaines d’entre eux, mas- sacrés à Thiotte, Mapou, Grand Gosier, Belle-Anse. Plus tard, l’exécution publique de Marcel Numa et Louis Drouin marquera pour longtemps les esprits des collégiens convoqués à ce sinis- tre spectacle. Et puis, encore, il y aura le présumé complot des officiers et leur sinistre exécution par leurs compagnons d’armes, obligés d’accomplir, sous peine de mort, ce geste misérable. Miot revient sur ces épisodes, et d’autres encore, avec une émotion contenue. Mais la plaie, on le com- prend assez vite, ne se refermera pas. Pendant ces années, s’il ne peut se résoudre à ne pas regarder, ni à ne pas entendre, le narrateur apprend cependant à mesurer ses paroles. Plus de confidences entre amis, même proches, car ils pourraient avoir des accointances avec des macoutes, ou bien être tenus à parler, parce qu’ils font l’objet d’un chantage. Les femmes sont particulièrement visées : leur corps, contre une très relative mansuétude, à l’égard de leurs proches. On sait que Kettly Mars a trouvé là matière à un roman particulièrement intense, Saisons sauvages. Il est une autre dimension à cette violence, et qui est l’intimidation par le symbolique. François Duva- lier a utilisé les figures du vaudou, au premier rang desquelles celle de Baron Samedi. Voici le prési- dent entrant dans une église où l’on célèbre les funérailles d’un enseignant qu’il a fait assassiner. Devant l’assistance tétanisée, il prend une chaise, s’assied près du mort, et l’interroge. Dans son dos, l’assistance le voit mimer les questions et sans doute aussi les réponses : « L’interrogatoire avait l’air très sérieux et un silence d’outre-tombe s’est installé dans l’église. Personne n’a osé penser à une supercherie. (…) À chaque question, dont on n’entendait que le marmonnement nasillard de Duvalier, il y avait une réponse ». C’est aussi de cette façon que s’impose la violence comme mode de gouvernement, en instrumen- talisant le symbolique. On ne ressort pas rassuré du récit de Raymond Miot : l’effondrement démocratique – par la présidence à vie, notamment, puis par la transmission au fils de la fonction - ; la généralisation de la violence, et la mise au pas d’une société par la contrainte, ne furent pas des temps de prospérité, loin s’en faut, mais bien ceux de l’enfermement et de la claustration. La mort du président, le caractère spec- taculaire de ses funérailles n’ont fait qu’ouvrir un autre chapitre, tout aussi inquiétant : « la voix du nouveau dictateur est moins nasillarde que celle de son père, mais elle traîne exagérément (…). On a l’impression qu’il énonce un mot, puis l’autre, sans compren- dre vraiment ce qu’il lit ». Si le passé immédiat était marqué par la peur panique, il n’en reste pas moins que « l’avenir est sombre ». Mais c’est une autre histoire qui s’ouvre. Il convient qu’elle aussi soit inscrite dans les mémoires. Non décidément, rien n’est à regretter dans ce passé pourtant encore proche. RaimondMiot,LaPetiteChambre,éditions XYZ,Montréal,2015
  • 3. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 3 ACTUALITÉ Une épée de Damoclès Reynold ARIS RELATIONSHAÏTIANO-DOMINICAINES L es Dominicains d’origine haïti- enne de l’autre côté de la fron- tière s’inquiètent. L’échéance du délai de régularisation de leur statut à travers le PIDH arri- vera à terme le 17 juin prochain. Les autorités n’en disent pas mot. Les organisations de défense des droits humains appellent, elles-mêmes, à un moratoire et à une révision du contenu de la loi y relative. Qu’est-ce qui va se passer à l’expiration de ce délai ? Les autorités dominicaines annon- cent qu’elles ne prolongeront pas le délai de régularisation du statut d’immigrants après le 17 juin prochain. C’est le ministre dominicain de l’Intérieur et de la Police, Jose Ramon Fadul, qui en a fait l’annonce mercredi dans les colonnes du journal El Nuevo Diario. Il précise en ce sens que le gou- vernement de son pays s’apprête à mettre en place les mécanismes de rapatriement des immigrants en situation irrégulière. Les Forces armées et le ministère de l’Immigration montent la logis- tique de l’opération des rapatrie- ments. Ces mécanismes ont été conçus, affirment les autorités dominicaines, en respect de la dignité de ces migrants. Les personnes ciblées, précise M. Fadul, sont celles qui errent dans les rues, les sans-emplois et celles qui habitent les zones agricoles. Aussi exhorte-t-il les étrangers qui ne se sont pas encore fait inscrire au Programme national de régularisation des étrangers en situation migratoire irrégulière en République dominicaine (PNRE) à le faire dans les vingt-huit jours restants. Le National a vainement tenté de contacter des responsables haïtiens autour de l’application de cette décision. Cependant, au ministère des Haïtiens vivant à l’étranger (MHAVE), à la question de savoir quelle sera la démarche des autorités du pays pour éviter cette déportation massive, un cadre requérant l’anonymat, nous a fait cette réponse « « Mal- heureusement, le titulaire du ministère n’est pas disponible pour l’instant. Il est en voyage », soulignant qu’une rencontre devrait se tenir au plus haut sommet de l’État pour savoir quel comportement adopter. Rapatriement massif : une situation préoccupante Cette situation interpelle les organisations de défense des droits humains, notamment le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH). Selon le responsable de programmes du RNDDH, Marie Yolène Gilles, l’arrêt 168-13 adopté par la Cour constitutionnelle dominicaine le 23 septembre 2013 a privé un ensemble de citoyens dominic- ains d’ascendance haïtienne de leur droit d’avoir une nationalité, alors que ces citoyens se récla- ment de nationalité dominicaine au regard de la législation même de ce pays qui reconnaît le droit du sol (jus soli). Aussi, ajoute-elle, ces citoyens n’ont aucun lien avec Haïti. Quant à l’arrêt 168-14 relative à la régularisation du statut des immi- grants en République dominicaine en situation irrégulière, il informe que celui-ci ne concerne nulle- ment les Dominicains frappés par la sentence de la Cour con- stitutionnelle de la République voisine. Pour lui, la régularisation des ressortissants étrangers est une autre paire de manches. Dans cette loi, les autorités dominicaines demandent à Haïti, pays d’origine de ces res- sortissants, de doter ses citoyens de pièces d’identification, soit d’un passeport soit d’une carte d’identification, une des condi- tions préalables à la régularisation de leur statut. Selon le militant, ce processus est lent du fait qu’il en existe d’autres à satisfaire au regard de l’arrêt 168-14. Les Haïtiens en situa- tion irrégulière devraient trouver des Dominicains qui sont munis de leur carte d’identité couram- ment appelée « Cedular» afin de témoigner favorablement de leur statut, de leur profil sociologique dans leur communauté, pour s’assurer qu’ils sont de paisibles citoyens. Cette initiative, informe-t-il, leur permettra d’obtenir un papier notarié. Néanmoins, ils doivent être en mesure de prouver qu’ils sont coutumiers des transactions bancaires. S’ils ne peuvent pas remplir les autres conditions, ils auront toujours la vie difficile. Mesures Les autorités dominicaines doi- vent prolonger le délai afin de permettre aux dirigeants haï- tiens d’aborder le problème plus en profondeur. Le rapatriement n’y apportera pas la solution. Au contraire, il va déboucher sur une crise. Car, soutient M. Alizar, l’État haïtien ne dispose pas d’une structure d’accueil pou- vant recevoir ces milliers de citoy- ens. Les autorités dominicaines doivent non seulement accorder un moratoire en vue de gagner du temps pour résoudre le prob- lème d’identification, mais elles doivent également réviser la loi sur la régularisation du statut des migrants. Édito L'IVRAIE ET LE BON GRAIN N’est-ilpasrévoltantdecontinueràdire:«Mounseryepafèpolitik»?Commequoi, lapolitiqueseraitl’affairede«vakabon»,d’opportunistesetdefilous.Lesdésillusions d’unesociétéconscientemaintenantdesproblèmesréelsdoiventnousporteràun sursautpourempêcherquelabarquenationalenesombre. L’inacceptableestdevenuunenorme.Insidieusement,lesmédiasnationaux,lapro- paganded’unepresseinternationale,lapopulationconfrontéeàdesproblèmessans solutionetlepessimismequis’installedanslesesprits,ladérivedessensimpulsée parlacorruptiongalopantedonnentdel’espaceàtouteslesaberrations.Certains, pour enfoncer le clou, nous font croire que nous sommes une nation d’incapables ou,commeonleditplustechniquement,«uneentitéchaotiqueingouvernable». Soixante-dix candidats se présentent pour la présidentielle de 2015 ! Le Conseil électoralprovisoire,n’ayantpaslamissionducontrôleéthiquedunombre,maiscelle del’étudedesdossiersayantàvoiraveclesloisdupays,neressentpaslemalaise d’annoncercettecoursedetouteslesbousculades.Mais,danslapresseparlée,écrite ettélévisée,commentva-t-ongérerletempsd’antennedecettemultitude?Cesera unvéritablecasse-têtepourunepressehaïtiennedéjàpressuréeparuneprogram- mation comprimée à l’extrême. Si certains osent dire que c’est là une expérience démocratiqueaprèslemonolithismedesgrandesdictatures,leplussimpleetlucide descitoyensestdéjàaffligé,choquéd’entendrecettelonguelistedenomsauxacro- nymespolitiqueslesplusrébarbatifs,quirappellel’époquerévolueoùc’étaitlaradio gouvernementalequilisaitlalistedeceuxquiontréussil’examenaubaccalauréat! Lesélecteursnonplusnesaventdéjàoùdonnerdelatête!Partagésentreunamide quartierquitentelecoupduPalaisetunmusiciendéterminé,ceuxquivontdécider duchoixàfairepourcepaysrongéjusqu’auxosn’aurontquedeuxchoix :s’abstenir ouvoterdansl’émotion.Danslastupeuretlaconsternation,dansl’imbroglioetle chaos,quefaire? Ilfautramenerlapolitiqueàlamoralitépublique.Soyonssérieux!diraitfeuLeslie FrançoisManigat.Oui,leconstatestfaitquelesprofessionnels,lesintellectuels,les hommesetfemmesdesavoir-fairedansdiversdomainesontlaissélevideàceux quisouventn’ontquelaqualitédesopportunistesetdesaudacieux,etdeceuxqui sontprêtsàtouslesmauvaiscoups. Il s’agit de l’avenir d’un pays mis à genoux. Ici, au National, nous ne demandons pasdesuperbesarticulationsidéologiques.Maisnousréclamonsune«préparation »pragmatiquedeceuxquivonts’engagerdansunearèneoùlescrisesnationales mêléesauxpressionsinternationalesdemandentl’intelligence, laplusnetteratio- nalitéetuneconstanteclairvoyance.Letridoitêtrefaitpourséparerlebongrainde l’ivraie.
  • 4. 4 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 Déclarée présente en Haïti, le 19 octobre 2010, l’épidémie de choléra a affecté sévèrement la population haïtienne. Selon des chiffres officiels communiqués par la ministre Duperval, d’octobre 2010 au 20 mai 2015, environ 743 mille cas ont été dénombrés, dont un total de 8 946 décès. Pour le seul mois d’avril 2015, 3 600 cas ont été recensés, dont 16 décès. Le choléra allait continuer encore à faire des victimes pendant le mois de mai (jusqu’au 20 de ce mois), en infectant pas moins de 1 858 personnes, dont 5 ont succombé. D’après Mme Duperval, le département de l’Ouest a été le plus touché avec 56 % des cas recensés, dont 35 % sont localisé dans trois communes (Delmas, Port-au-Prince et Carrefour). Le ministère de la Santé publique n’est pas resté indifférent face à cette remontée du choléra. Des mesures ont été prises pour contenir l’épidémie, explique la ministre Guillaume, annonçant que dans les jours qui viennent des campagnes de sensibilisation vont être entreprises à travers le pays, notamment dans les treize communes les plus touchées par l’épidémie dans le cadre de la mise en place de la première phase du plan d’éradication du choléra. À ce sujet, une rencontre de haut niveau a été tenue, le jeudi 21 mai, entre les plus hautes autorités de l’État et celles de la Minustah, entres autres. Cinquante millions de dollars sont débloqués par la Banque mondiale, cette semaine, en vue de permettre aux autorités haïtiennes de mettre à exécution cette phase du plan qui doit toucher principalement des communes des départements du Centre et de l’Artibonite, a également informé Florence Guillaume Duperval qui exhorte la population à ne pas se laisser emporter entièrement par la fièvre électorale et négliger les règles d’hygiène pouvant aider à prévenir le choléra et d’autres pathologies. Ébola et chikungunya, état d’alerte ! En ce qui a trait à l’épidémie d’ébola, le ministère de la Santé publique et de la Population entend continuer ses actions pour prévenir l’introduction de cette maladie virale en Haïti. Ainsi, il a été déconseillé aux voyageurs haïtiens de se rendre dans certains pays africains comme le Libéria, la Guinée Conakry et la Sierra Léone. Se fondant sur le dernier le rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), déclarant l’arrêt de la transmission de l’ébola au Libéria, les autorités haïtiennes ont décidé d’exclure le Libéria de la liste. L’interdiction demeure pour les deux autres pays. « Tenant compte de la vulnérabilité particulière d’Haïti, les recommandations précédentes sont maintenues en dépit de l’avancée considérable faite pour contenir la maladie dans les pays encore touchés comme la Sierra Leone et la Guinée Conakry », peut-on lire dans une note de presse émanant du MSPP. Toutefois, précise la note, tous ceux ayant voyagé dans les pays précités ne pourront et ne doivent pas chercher à rentrer en Haïti avant une période de vingt et un jours. Dans l’idée de protéger la santé de la population, Florence Guillaume Duperval lance une alerte sur le chikungunya qui a déjà fait de nombreuses victimes au sein de la population. « Le moustique qui propage ce virus est encore là », rappelle la ministre qui informe du même coup de l’existence d’une autre épidémie du nom de « Zigi- five ou zigi » dont deux cas ont été déjà découverts à la Jamaïque. HAÏTI/SANTÉPUBLIQUE ACTUALITÉ Choléra, Ébola, Chikungunya : trois dangers qui nous guettentNoclès Debréus » suite de la première page Dr Florence Guillaume Duperval, ministre de la Santé publique et de la Population. WWW.LENATIONAL.HT 2, DELMAS 40 B EMAIL: INFO@LENATIONAL.HT PUBLICITE@LENATIONAL.HT REDACTION@LENATIONAL.HT (509) 46 11 10 10 (509) 32 14 55 54 PROPRIÉTAIRE : LE NATIONAL. SA DIRECTEUR : JEAN GARDY LORCY PUBLICITÉ: SASKIA P.L.MICHEL DIRECTEUR ARTISTIQUE : FABRICE LAFLEUR RÉDACTEUR EN CHEF : GARY VICTOR RÉDACTEUR EN CHEF ADJ : HENRI ALPHONSE SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : JACQUES DESROSIERS JDESROSIERS@LENATIONAL.HT CONSEILLER À LA RÉDACTION : PIERRE CLITANDRE SECTION ACTUALITÉ : LIONEL EDOUARD SECTION CULTURE : DANGELO NÉARD SECTION ECONOMIE : HENRI ALPHONSE SECTION SPORTS : GERALD BORDES SECTION SOCIÉTÉ : JOE ANTOINE JN-BAPTISTE RÉDACTEURS : NOCLÈS DEBRÉUS, CADET JEAN MICHEL, STÉPHANIE BALMIR, VANTZ BRUTUS, KENSON DÉSIR, EDDY LAGUERRE, MONDÉSIR JEAN BILLY, REYNOLD ARIS, ISABELLE THÉOSMY, WALTER CAMEAU, SCHULTZ LAURENT JUNIOR PHOTOGRAPHES : JEAN JACQUES AUGUSTIN, RUBEN CHÉRY CORRECTEURS : GARRY AZÉMAR, JEAN ERIC FOUCHÉ GRAPHISTE : JUNIOR ADME DISTRIBUTION : MOÏSE PHILOGÈNE ADMINISTRATION : RACHELLE COMPÈRE
  • 5. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 5 B andes de rara, défilé de motocyclettes, avec des motards arborant les T-shirts plaqués de l’emblème de certaines plateformes politiques connues comme le MOPOD, LAPEH, Renmen Ayiti, tout est bon pour se montrer en ces jours d’inscription et faire une démonstration de force qui marquera les esprits. Ces motards intéressés, sillonnent les rues de Delmas et de Pétion-ville, sous les regards passifs des passants. S’il est vrai qu’on est encore loin du matraquage médiatique orchestré lors de la période de campagne électorale de 2010, avec les “robots call” et les billboards à profusion, les candidats ne lésinent toutefois pas sur les moyens pour faire bonne impression. Les réseaux sociaux, Facebook, Twitter, WhatsApp, deviennent ainsi une tribune pour chaque prétendant. Ces espaces qui ne sont pas prévus dans le décret électoral, comme podium de campagne, sont envahis de messages, et permettent aux intéressés de lancer une “précampagne”. Ils y exposent, en toute quiétude, leur “vision politique” ou des photos de rencontres réalisées, dans le cas des candidats à la présidence, avec des groupes ou des catégories sociales diverses, un peu partout à travers la République. Des leçons ont visiblement été tirées de la campagne de 2010 qui a vu l’ascension de Michel Martelly au pouvoir. La communication, ont-ils compris, devient de plus en plus incontournable et aucun n’entend se laisser devancer. À cet effet, la majorité des candidats à la présidence dispose d’un groupe WhatsApp, d’une page Facebook ou d’un compte twitter qui sont régulièrement alimentés. Les candidats à la députation et aux sénatoriales qui ont, dans un premier temps, alimenté les débats lors des inscriptions, ont eux aussi envahi la toile et mènent une campagne silencieuse sur les réseaux sociaux. La convocation de la presse, une nouvelle trouvaille Nos candidats ne manquent pas d’imagination pour contourner l’interdiction faite par le CEP d’ouvrir la période de campagne prématurément. La dernière trouvaille réside en la convocation de la presse peu avant leur inscription pour faire, disent-ils, le point autour de leurs inscriptions. Une stratégie permettant d’occuper l’espace médiatique. Le décret électoral définit pourtant les obligations et les interdits pour l’utilisation des moyens de communication et de propagande électorale, notamment avant la période de campagne. Certains partis politiques semblent oublier les normes. C’est le cas du MOPOD qui a invité la presse, via une note, à accompagner l’ex sénateur Samuel Madistin lors du dépôt de ses pièces pour les prochaines élections, le mardi 19 mai à 11h a.m. au BED de l’Ouest 1. En fin de note, est toutefois venu le petit slogan rappelant que le juriste veut faire d’Haïti un État fort. Tous veulent donc prendre les devant ou combler leur retard dans la bataille communicationnelle. Le journaliste Clarens Renois, sous la bannière du parti UNIR, a également averti la presse de son inscription pour briguer la magistrature suprême de l’État. Il en a profité pour expliquer le but de sa quête qui est d’arriver à la réconciliation dans une République de gens intègres, tout en revendiquant le pouvoir pour les jeunes afin de construire un meilleur avenir. La plateforme “Pitit Desalin” de Moïse Jean Charles s’est mise également au diapason en invitant les journalistes à une conférence de presse, le mardi 19 mai, à 11h a.m., en son local, à Delmas 33. Cette rencontre avec la presse devait servir à faire le point, dit- elle, autour du processus électoral, particulièrement sur l’inscription de son candidat à la présidence, l’ex-sénateur Moise Jean Charles. Pour Jean Henry Céant, ce sont les organisations proches de RENMEN AYITI, qui se sont chargées de donner une conférence de presse à F et F restaurant pour faire le point autour du processus électoral et l’inscription de leur candidat à la présidence. M. Céant, M. Jean Charles ainsi que Laurent Lamothe, invité de dernière heure, n’y sont pas allé de main morte. Ils ont sorti l’artillerie lourde. Une foule immense. Des messages réguliers, ont tenu en haleine, l’électorat, sans compter les interventions dans la presse de plusieurs proches et partisans. Avant l’heure, la bataille est donc lancée. Guerre de positionnement ou de tranchée, campagne avant la lettre, peu importe, les partis, groupements et regroupements politiques tentent d’adapter leur communication à leurs militants, sympathisants, mais également de mobiliser d’ores et déjà un électorat réticent. Et commence la guerre des slogans et des promesses ! par Lionel Edouard HAÏTI-ÉLECTIONPRÉSIDENTIELLE ACTUALITÉ » suite de la première page Port-au-Prince bout au rythme des élections, les opérations de marketing électoral débutent, alors que selon le calendrier électoral, la période de campagne ne devrait pas être lancée avant le 8 juillet pour prendre fin le 7 août 2015. Les États-Unis en faveur de modification dans le calendrierSources : Alterpresse HAÏTI-ÉLECTION L e conseiller spécial du départe- ment d’état américain pour Haïti, Thomas Adams, juge opportune une modification du calendrier relative aux élections législatives, municipales, locales et présidentielles annoncées prévues d’aout à décembre prochains en Haïti. Une modification du calendrier (à 2 tours au lieu de 3) « permettrait d’économiser environ 30 millions de dollars et donnerait au Conseil électoral provisoire (Cep) un peu plus de temps pour préparer les opérations électorales », a-t-il déclaré à un groupe de journalistes haïtiens qui séjournent à Washington, rapporte l’Agence haïtienne de presse (Ahp). Le budget prévu actuellement pour la réalisation des élections s’élève à environ 66 millions de dollars américains. Thomas Adams s’est déclaré toutefois convaincu que les élections auront lieu, coûte que coûte, cette année, et a rappelé que son pays contribue financièrement à la réussite du processus. Un retard de plus d’une dizaine de jours a été pris sur la publication, le 19 mai, de la liste des candidats agréés pour prendre part aux législatives fixées au 9 aout prochain. Le traitement des contestations a pris plus de temps que prévu et environ 500 des plus de 2000 candidatures aux législatives ont été rejetées pour non-conformité aux critères contenus dans le décret électoral. Les dossiers de candidatures à la présidentielle du 25 octobre sont au nombre de 71, suivant un dernier relevé. La publication de la liste définitive des candidats présidentiels est attendue pour le 30 mai. Plusieurs anciens fonctionnaires publics n’ayant pas la décharge de leur gestion se sont empressés de s’inscrire, alors que ce document est exigé par le décret électoral.
  • 6. 6 | N0 4 LUNDI 22 MAI 2015 ACTUALITÉ L e gouvernement de la Répub- lique, via son porte-parole, le ministre de la communication, Rotchild François Junior, a salué le déroulement du processus électoral qui a vu un déferlement de candidats à la plus haute fonction de l’État. Le ministre qui intervenait à la conférence de presse hebdomadaire de la Primature vendredi, a aussi fait le point sur les violences enregistrées dans certaines zones lors de la pub- lication de la liste des postulants aux législatives par le CEP qui a mis envi- ron 500 candidats hors de la course. « Le gouvernement condamne avec véhémence les violences enreg- istrées dans certaines zones du pays, notamment à Petit Goave et Cayes-Jacmel », a lancé Rotchild François Junior qui demande à ce que « l’action publique soit mise en mouvement contre les auteurs de ces actes de vandal- isme », avant de préciser que « la violence électorale est contre le jeu démocratique ». En ce sens, dit-il, le gouvernement souhaite que le processus élector- al se déroule dans la plus grande transparence possible et dans le respect du décret électoral. Le porte-parole du gouvernement Tèt Kale croit important que tous les citoyens jouent leur participation pour la pleine réussite du proces- sus électoral en Haïti. Alors que la machine électorale semble prendre sa vitesse de croisière, certaines personnes avisées de la société civile se mon- trent encore pessimistes quant à la tenue de ces joutes dans les dates mentionnées par le calen- drier électoral. Un doute qui semble prendre de jour en jour plus de sens, tenant compte des enjeux qui entourent le processus et qui risquent égale- ment de l’hypothéquer. Budget, sécurité, le problème de décharge sont autant de questions aux- quelles le gouvernement doit s’adresser. À deux mois et quelques jours du déroulement du premier tour des législatives, ni le CEP, ni l’exécutif ne sont en mesure de fournir le budget définitif de ces élections. A cette préoccupation, Rotchild François se veut rassurant en informant que « le CEP est en train de travailler sur ce dossier », selon des informations recueillies, dit-il, auprès de son collègue Jean Fritz Jean Louis qui fait l’interface entre le CEP et le gouvernement. En plus des 38 millions de dollars américains placés dans le fond fiduciaire qui est géré par le Pro- gramme des nations unies pour le développement (PNUD), Rot- child François Junior dit, « que le gouvernement est en pourparlers avec les partenaires internation- aux qui ont fait des promesses dans le cadre du financement des élections pour pouvoir compléter cette somme déjà déposé dans ledit fonds ». Pour l’instant, per- sonne ne sait quand est ce que ces bailleurs vont débloquer les fonds promis. Hormis la question de budget, la sécurité demeure aussi un gros défi, surtout après le désengage- ment de la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustha) dans six départements, dont certains sont réputés, « zone rouge ». Dans cette perspective, le ministre de la Communication qui parlait au nom du gouverne- ment informe « que des échanges sont déjà entamés avec les respon- sables de la Minustha pour voir ce qui est possible ». Entre-temps, dit-il, « des dispositions sont en train d’être prise au niveau de la Police nationale d’Haïti à ce sujet ».En ce qui concerne la question de « décharge », le porte- parole précise que la position du gouvernement n’a pas changé, en dépit du nombre important d’anciens comptables des deniers publics désireux de participer aux élections, « le gouvernement n’est pas l’institution chargée de gérer la question de décharge », a-t-il calmement ajouté. À ce sujet, il convient de souligner que ce dossier (décharge), selon une source proche de la Prima- ture, brûle entre le président de la République et le Premier min- istre Evans Paul. La démission de M. Paul aurait même été exigée après que ce dernier eut refusé de signer un décret visant à accorder décharge aux anciens comptables de deniers publics. Un dossier à suivre. Le gouvernement salue le déroulement du processus électoralpar Noclès Débréus HAÏTI/ÉLECTIONS Rotchild François Junior , ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.
  • 7. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 7 L ’Association haïtienne des entreprises de construction (AHEC) a organisé, du 19 au 22 mai 2015, un séminaire de formation à l’intention des professionnels travaillant comme opérateurs d’engins lourds au local de la compagnie de construction Vorbe et Fils, à Carrefour Shada (Croix-des- Missions). Contribuer à une meilleure préparation des professionnels, structurer le domaine de la construction, font partie des objectifs poursuivis par les responsables de la « AHEC ». Plusieurs dizaines de jeunes, des deux sexes (40), ont pris part à ce séminaire qui s’inscrit dans le cadre de l’amélioration de la performance des professionnels, notamment les ingénieurs, opérateurs et contrôleurs. Se réjouissant de la mise en œuvre de ce programme de formation, le PDG de l’« AHEC », M. Hervé Le Rouge, a expliqué que « depuis sept ans, il s’évertue à réaliser cette formation afin de venir à bout de certains problèmes existant dans le secteur des entreprises de construction ». Aujourd’hui, dit-il, souriant, « notre objectif d’améliorer la performance des professionnels haïtiens n’est plus un rêve. Ces derniers vont tirer aussi satisfaction de leur travail », s’est réjoui le patron de la « AHEC ». Dans la même veine, Chantale Rabel, coordonnatrice technique du programme, a indiqué que « ce volet revêt une grande capitale, compte tenu du rôle que remplit un équipement en bon état ». « Lorsqu’on travaille avec un matériel défectueux, c’est comme si on n’en avait pas », soutient- elle. Elle appelle à un service d’entretien au quotidien des équipements. C’est dans cette optique que « nous sommes en train de familiariser les techniciens avec tout ce qui a rapport avec la maintenance, notamment les méthodes de graissage (les huiles) ». Selon la coordonnatrice, ce séminaire de formation se réalisera également au profit des cadres intermédiaires tels que les responsables de chantiers, les contremaîtres et les chefs d’équipe. Car, soutient- elle, cette initiative participe de la structuration du secteur suite à une prise de conscience de la situation. Aussi, appelle-t-elle au sens de responsabilité des employés qui pensent n’être pas redevables à leurs employeurs en ce qui concerne la gestion des équipements. En Haïti, les demandeurs d’emplois sont toujours en quête du travail. Les postes sont souvent confiés à des étrangers en raison d’une carence de cadres. Ainsi, la « AHEC » s’engage à remédier à ce problème en colmatant les brèches et en améliorant la performance des techniciens œuvrant dans le secteur. Procédés d’évaluation Pour évaluer ces séances de formation, la coordonnatrice informe qu’elle organisera des activités interactives axées sur des échanges. Cette démarche lui permettra de voir illico si les notions ont été bien assimilées par les ingénieurs. Dùn autre coté, une méthodologie imagée (visuelle) sera utilisée pour évaluer les opérateurs des engins lourds, des contremaîtres, qui n’ont qu’une connaissance pratique accumulée sur le tas dans le domaine. De son côté, Jeff Léandre, un technicien en engin lourd a salué la réalisation de cette activité qui, dit-il, s’apparente à une sorte de « mise à niveau » dans l’exercice de sa profession. Vu la modernisation des matériels, il s’avère nécessaire de se mettre au diapason afin de ne pas être en déphasage en ce qui ce a trait à leur manipulation, a-t-il dit. Comment comprendre, poursuit- il, qu’un de mes camarades quipratique la mécanique depuis quarante-deux ans, alors que c’est la première fois de sa vie qu’il participe à un séminaire de formation relative à son champ de compétence. En confiant un équipement qui fait son apparition en 2013 à ces techniciens, à quoi devra-t-on s’attendre ? s’interroge M. Léandre qui exhorte les autorités haïtiennes à s’engager dans des initiatives similaires en vue de contribuer à la création d’emplois pour le bien-être de la population. Aussi, souhaite-t-il la continuité de ce programme qu’il aimerait voir se réaliser chaque semestre. HAÏTI/AHEC ACTUALITÉ À la recherche de la performancePar Reynold Aris
  • 8. 8 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 MONDE Le pape est-il diplomate et / ou provocateur ?par Jean-Louis DE LA VAISSIERE | sources : AFP L e pape est-il un diplomate ? Si tout le monde s’accorde pour reconnaître une nou- velle vigueur à la diplomatie du Vatican, le pape François a aussi obtenu ce résultat en multipliant phrases et gestes volontairement ou involontairement provocateurs. Ce sens de la formule, François l’a démontré dernièrement quand, offrant à Mahmoud Abbas une médaille représentant un ange, il lui a lancé: « vous êtes un peu un ange de la paix »: une phrase qui a irrité Israël mais qui est une manière habile de prendre le pré- sident palestinien à ses propres promesses. « Ange » dans le langage bib- lique veut dire « messager », et le Vatican a tenu à souligner que la formule n’était pas un éloge naïf du président Abbas, mais un encouragement. Jorge Bergo- glio avait qualifié il y a un an M. Abbas et son homologue Shimon Peres d’”hommes de paix”. François avait « commis » un autre geste fort peu diploma- tique, en priant en mai 2014, le front appuyé contre le mur de séparation entre les territoires palestiniens et Israël. Un langage de vérité historique Autre phrase provocatrice dont il aurait pu s’abstenir, mais qu’il a tenu à prononcer au nom de la vérité historique, qui seule, selon lui, peut amener une vraie réconciliation entre les peuples: le massacre des Arméniens en Le Pape François salue la foule sur la place Saint-Pierre la foule sur la place Saint-Pierre, le 20 mai 2015 au Vatican. Photo AFP/AFP/Archives 1915/16 « est largement considéré comme le premier génocide du XXe siècle ». Le pape citait alors, à l’occasion d’une messe à Saint- Pierre, un document signé en 2001 par Jean Paul II. La Turquie avait aussitôt rappelé son ambassadeur. Dans la crise syrienne, François avait en revanche en septembre 2013 réagi davantage en chef reli- gieux qu’en homme politique. Il avait alors appelé dans une lettre au G20 les dirigeants du monde à empêcher les frappes contre le régime de Bachar al-Assad, et les fidèles à une grande journée de prière et de jeûne. Des frappes étaient alors envisa- gées par les Etats-Unis et la France contre le régime syrien accusé d’avoir employé des armes chi- miques contre sa population civile. Certains estiment qu’une interven- tion à ce stade de la guerre aurait empêché l’escalade actuelle et la montée en puissance du groupe Etat islamique. En Ukraine, en dénonçant une « guerre entre chrétiens », le pape a semblé sur- tout préoccupé par le fait que des chrétiens --catholiques d’Orient et orthodoxes-- contredisent le credo chrétien en se battant. Mais il lui est aussi reproché de n’avoir pas mis en cause la politique russe en Ukraine. D’autres propos ont été jugés insul- tants par des Etats, la diplomatie du Saint-Siège s’efforçant ensuite d’apaiser les choses, comme quand il a parlé du trafic de drogue en Amérique Latine. « J’espère qu’on pourra éviter à temps la mexicanisation (de l’Argentine). J’en ai parlé avec des évêques mexicains et c’est une réalité terrifiante », avait-il lancé dans une conversation privée. Le Mexique s’est senti insulté. « Je suis convaincu que tous ces gestes et ces paroles du pape sont calculées, voulues et non pas improvisées. Il utilise volontaire- ment les différents registres --lan- gage officiel ou jargon populaire » pour faire passer un message pour faire bouger les lignes, relève le vaticaniste Marco Politi, interrogé par l’AFP. François cherche souvent à dénon- cer les systèmes et les personnes --sociétés exportatrices d’armes, trafiquants, hommes politiques- -qui sont à l’origine des conflits et de l’exploitation, avec des expres- sions énigmatiques destinées à frapper et à interroger les esprits: ainsi a-t-il fustigé lundi devant des religieuses du Proche-Orient le fait que des chrétiens soient victimes de “la persécution en gants blancs, et du terrorisme blanc, et même du terrorisme en gants blancs”. « C’est caché mais ça existe », s’est- il exclamé, faisant référence aux décisions et aux politiques menées notamment par des Etats non désignés nommément. En novem- bre, il avait déjà expliqué que des responsables à travers le monde « chassent les chrétiens avec des gants blancs », sans recourir à la violence mais à coups de tracas- series administratives. Le grand « sans faute » diplomatique du pape François est la réconcilia- tion entre Cuba et les Etats-Unis, mais ce résultat a été obtenu par un travail de trente ans sous deux pontificats. Pérou: état d'urgence dans une province en raison de manifestations Sources : AFP L e gouvernement péruvien a déclaré vendredi l’état d’urgence dans la province d’Islay, dans le sud du Pérou, où un projet minier suscite depuis deux mois des manifestations au cours desquelles quatre personnes sont mortes. « Le gouvernement a pris la déci- sion de décréter l’état d’urgence dans tous les districts de la prov- ince d’Islay et de Mollendo (sa capitale, ndlr) pour une durée de 60 jours », a annoncé le Premier ministre péruvien Pedro Cate- riano au cours d’une conférence de presse à Lima. L’état d’urgence entre en vigueur ce samedi et ce sont les forces armées qui seront chargées de maintenir l’ordre public, a précisé M. Cateriano. Cette décision suspend des lib- ertés personnelles telles que l’inviolabilité du domicile, la lib- erté de circulation et la liberté de réunion, a-t-il souligné. Un manifestant est mort ven- dredi lors d’un nouvel affronte- ment entre manifestants et pro- testataires, selon des sources médicales. Il s’agit du quatrième Heurts à Arequipa le 14 mai 2015 entre forces de l’ordre et manifestants protestant contre un projet manier à Islay. Photo AFP/AFP/Archives décès enregistré depuis le début il y a deux mois des manifesta- tions contre le projet minier de Tia Maria. Ce projet de mine de cuivre, d’un montant estimé à 1,4 mil- liard de dollars, est mené par la firme Southern Peru, filiale de la compagnie mexicaine Southern Copper. La population de la région rejette le projet, estimant qu’il nuira à l’agriculture et à l’environnement. Elle observe une grève générale depuis le 23 mars et les manifesta- tions se sont multipliées.
  • 9. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 9 MONDE L e Des emails de l’ex-secrétaire d’Etat Hillary Clinton, publiés vendredi par le département d’Etat, lèvent un coin de voile sur un attentat anti-américain en Libye en 2012 qui avait provoqué une polémique aux Etats-Unis visant la candidate démocrate à la présidentielle de 2016. L’ensemble des courriers électro- niques de Mme Clinton, du temps où elle pilotait la diplomatie américaine (janvier 2009-février 2013), alimentent depuis des semaines une autre controverse ciblant la possible future première femme présidente des Etats-Unis. Ces emails ont en effet été rédigés à partir d’une messagerie et d’un serveur privés et non d’un compte gouvernemental, comme c’est la règle. Vendredi, le département d’Etat a publié 296 emails (350 pages) officiels de son ancienne patronne, sur un total de quelque 30.000 messages (55.000 pages) professionnels. Les emails dits personnels ont été effacés. L’intéressée, en campagne dans le New Hamphire, s’est déclarée « heureuse que les emails commencent à sortir ». « Je veux que les gens les voient tous », a affirmé Mme Clinton. La justice américaine avait ordonné en début de semaine au ministère des Affaires étrangères de lancer immédiatement la publication de la masse de messages, au fur et à mesure et non en une seule fois, comme il l’avait prévu à partir de janvier 2016. Sur cette quantité énorme d’emails, des centaines concernent la situation sécuritaire en Libye entre 2011 et 2012, et notamment l’attaque armée du 11 septembre 2012 contre le consulat des Etats-Unis à Benghazi (est) qui avait coûté la vie à l’ambassadeur Christopher Stevens et à trois autres agents américains. Un attentat qui a traumatisé la diplomatie américaine « Ces documents s’étendent sur une période de deux ans, du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et concernent la sécurité et les attaques contre la mission de Benghazi, ainsi que la présence diplomatique des Etats-Unis en Libye », a expliqué la porte-parole du département d’Etat Marie Harf. Le New York Times s’était déjà procuré et avait publié jeudi les quelque 350 pages d’emails sur la Libye et Benghazi. L’affaire’ Benghazi Ce qui était devenu au fil des semaines fin 2012 dans la presse américaine « l’affaire » ou le « scandale » Benghazi a opposé le gouvernement démocrate et le Congrès républicain, avec son lot d’auditions, d’enquêtes et de rap- ports. Ces emails étaient déjà entre les mains d’une commission mise sur pied par la majorité républicaine du Congrès et chargée d’enquêter sur l’attentat et la gestion qui en a été faite par l’administration du président Barack Obama. La controverse politique avait commencé à propos de la responsabilité de l’attaque, le gouvernement américain l’ayant dans un premier temps attribuée à une manifestation « spontanée » de musulmans en colère à Benghazi, avant de reconnaître qu’il s’agissait d’un attentat « terroriste » islamiste. « Les emails que nous avons publiés aujourd’hui ne modifient pas l’essentiel des faits ou notre analyse des évènements avant, pendant et après l’attaque » du 11 septembre 2012, a défendu Mme Harf. Les messages, difficiles d’accès vendredi sur le site du département d’Etat mais qui sont les mêmes que ceux obtenus par le New York Times, se concentrent sur des mémos transmis à Mme Clinton par un ami et homme d’affaires, Sidney Blumenthal, devenu conseiller informel sur la Libye. Au lendemain de l’attaque du 11 septembre 2012, M. Blumenthal avait envoyé un mémo affirmant qu’elle avait été perpétrée par des « manifestants » furieux d’une vidéo produite aux Etats- Unis qu’ils jugeaient insultante à l’égard de l’islam. Le lendemain, M. Blumenthal avait changé de version, accusant dans un autre mémo le groupe libyen islamiste Ansar Asharia, lié à Al-Qaïda. Ces hésitations et différentes versions de l’administration américaine en septembre 2012 avaient alimenté la polémique sur ce que savait éventuellement la Maison Blanche ou ce qu’elle aurait tenté de dissimuler à propos de l’attaque. « Les Américains peuvent maintenant constater eux-mêmes qu’il n’y aucune preuve à l’appui de théories du complot », a défendu l’élu démocrate Adam Schiff, qui a demandé, comme ses pairs républicains, que Mme Clinton soit auditionnée par la commission Benghazi. Des emails de Clinton lèvent le voile sur un attentat anti-américain en Libye en 2012 Sources : AFP
  • 10. 10 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 ÉCONOMIE CONSOMMATIONETSTANDARDSINTERNATIONAUX RECONSTRUCTIONDESTPTC La Journée mondiale de la métrologie a été célébrée, ce 20 mai, par le ministère du Commerce et de l’Industrie en vue de sensibiliser les consommateurs à l’importance de la métrologie dans les activités commerciales. « Mesures et Lumière » est le thème retenu sur le plan mondial pour cette célébration, mais en Haïti, elle a été célébrée autour du thème national : « La métrologie pour une meilleure qualité de vie ». 33 normes pour une infrastructure de qualité Sources : MCI Un chantier en nette progression L a métrologie est l’un des piliers de l’infrastructure de qualité, qui cadre bien avec « l’évolution du ministère du Commerceetdel’Industrieetsonplan stratégique triennal qui vise à faciliter l’éclosion et le développement des entreprises capables de générer de manièrecontinuedesemploisdécents et durables » dans le pays. Le ministre duCommerceetdel’Industrieindique que constituent une donnée majeure et incontournable dans les échanges commerciaux à l’échelle mondiale. « L’incapacité de satisfaire aux exigences du marché et le fait de manquer d’éléments démontrant la conformité à ces exigences réduisent la capacité des pays qui ne disposent pas d’une infra- structure de qualité reconnue au niveau international à pouvoir exporter », a fait savoir le min- istre Jude Hervey Day, ajoutant que c’est dans le cadre du ren- forcement de l’infrastructure de qualité nationale que le ministère a inauguré, en décembre 2012, le Bureau haïtien de normalisa- tion et le laboratoire nationale de métrologie. « Ce sont deux struc- tures importantes qui constituent le fondement de cette infrastruc- ture », a-t-il rappelé. Un secteur que le ministère du Commerce et de l’Industrie semble soutenir beaucoup. « Des équipements ont été acquis et des travaux d’extension du laboratoire de métrologie sont en cours pour lui permettre de répondre aux demandes de service de la part des usagers », a indiqué le titulaire du MCI, rappelant que, dans le but de renforcer et de consolider cette infrastructure, des comités techniques ont été mis en place et ont travaillé récemment à l’adoption de 33 normes régionales et internationales. Pour sa part, la directrice du Bureau national de normalisation souhaite mettre en exergue, à travers cette commémoration, l’importance des instruments de mesure qui doivent permettre de déterminer avec exactitude les quantités évaluées dans un secteur quelconque, que ce soit dans les marchés, les stations d’essence, les hôpitaux, les laboratoires d’essai et les industries. « Il est donc essentiel de se rassurer que les appareils de pesage, les compteurs et autres instruments de mesure utilisés dans le pays sont conformes aux standards internationaux et rassurent le consommateur », a indiqué Mme Michèle B. Paultre. La directrice du BHN a précisé que les actions de sensibilisation et les formations dans les domaines de la métrologie doivent être favorisées pour que les entités concernées soient en mesure de fournir à l’échelle nationale des prestations de service compétentes pour l’étalonnage et la vérification des instruments de mesure, de contrôle et d’essai. Rappelons que cette célébration a été organisée par la direction du contrôle, de la qualité et de la protection du consommateur – direction du BNH – qui rappelle que la métrologie légale est un outil pour la protection des consommateurs, la loyauté des échanges commerciaux et pour garantir les intérêts économiques. La métrologie légale représente, en fait, l’intervention de l’État pour garantir la qualité des instruments de mesure ou des opérations de mesurage touchant l’intérêt public. « L’échéance de la fin du mois d’octobre 2015 pour l’achèvement des travaux de reconstruction du Ministère des travaux publics, transports et communications (MTPTC) sera respectée », a pronostiqué l’ingénieur Alain Pamphile, conseiller en infrastructures au Bureau de l’ordonnateur national. La construction de ce bâtiment de 1,270m2 à Delmas 33, financée par l’Union européenne (UE) à hauteur de 4.6 millions d’euros, avait démarré le 14 juillet 2014 avec trois mois de retard. Après les phases de terrassement, de fouilles et de bétonnage des fondations, la structure métallique complète est en nette progression, a-t-on appris d’une source proche du Bureau de l’ordonnateur national. L’ingénieur Vicenzo Candido, coordonnateur d’une équipe de techniciens Italiens à pied d’œuvre sur ce chantier depuis plus d’un mois, devrait procéder prochainement au tôlage, au ferraillage et au bétonnage graduel de cette structure. Une évaluation de l’état d’avancement des travaux avait été effectuée mardi dernier par Charles Jean-Jacques, l’Ordonnateur National du Fonds Européen de Développement (FED) en Haïti. Visite d’évaluation du chantier de reconstruction des TPTC par l’Ordonnateur National du Fonds Européen de Développement (FED) en Haïti, Charles Jean- Jacques. / Photo FED Le ministère du Commerce et de l’Industrie veut sensibiliser les consommateurs à l’importance de la métrologie dans les activités commerciales . / Photo MCI
  • 11. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 11 Les vingt-cinq pays passés en revue, tous en développement accéléré à l’image de la Chine, du Vietnam, du Mexique ou de l’Indonésie, mobilisent désormais 60 % des dépenses mondiales d’exploration de nouveaux filons de minerais. Il y a dix ans, ils n’en totalisaient que 40 %. Dans cette quête de nouveaux gisements, l’Amérique latine (25 % des dépenses mondiales d’exploration) et l’Afrique (17 %) se taillent la part du lion. Pas étonnant que les fusions- acquisitions d’entreprises minières se multiplient sur ces deux continents. En Afrique, elles ont été surtout le fait des entreprises publiques chinoises qui ont ciblé la République démocratique du Congo, la Sierra Leone, la Namibie et l’Afrique du Sud. Aux yeux des investisseurs, un des atouts des pays émergents est qu’ils détiennent un quasi- monopole sur plusieurs types de minerais, notamment dans le domaine des platinoïdes, de l’étain, du niobium ou des « terres rares ». Leur autre atout est le faible niveau de leurs salaires... ÉCONOMIE L'eldorado minier des pays émergents Par Alain Faujas Les salaires des pays du Sud rattrapent ceux du NordPar Matthieu Hoffstetter / bilan.ch MATIÈRESPREMIÈRESINDUSTRIELLES ÉCONOMIESDÉVELOPPÉESETPAYSÉMERGENTS La corruption y est solidement installée, leur nationalisme demeure vivace et leurs infrastructures déficientes. Pourtant, c’est dans les pays émergents que le secteur minier est appelé à se développer le plus vite au cours des prochaines années, si l’on en croit l’étude publiées le 12 décembre par le cabinet Ernst & Young sur « les mines dans les économies en croissance rapide ». Et si miser sur les salaires bas des pays en développement n’était qu’un calcul de court terme? Une étude estime que les écarts de rémunérations entre les pays en développement et développés va se réduire significativement d’ici 2030. E st-il toujours rentable de délo- caliser des pays du Nord vers les pays émergents si la raison principale du choix réside dans les bas salaires? Pas si sûr à en croire une récente étude du cabinet de conseil PricewaterhouseCoopers (PWC). Selon celle-ci, les écarts de salaires entre économies développées et économies en développement devraient sensiblement diminuer d’ici 2030. Pas de rattrapage intégral à attendre, mais le différentiel pourrait être sensiblement revu à la baisse dans les deux décennies à venir. La Chine voit déjà ses salaires décoller Le mouvement est déjà engagé avec des rémunérations qui ont augmenté de 181% entre 2004 et 2012 en Chine. Dans le seul secteur textile, la hausse s’accélère même avec +25% en 2012 et sans doute +20% en 2013. Certes, le rattrapage sera progressif et différencié selon le pays concerné. Ainsi, les salaires en Inde et aux Philippines devraient rester parmi les plus faibles au monde. Mais les rémunérations moyennes pourraient néanmoins quadrupler d’ici 2030 dans le sous-continent (de 132 dollars en 2011 à 616 dollars en 2030) et tripler dans l’archipel (de 169 dollars à 581 dollars). Le différentiel sera réduit Or, en Europe ou aux Etats-Unis, la hausse sera largement moins importante sur la même période: de 3821 dollars à 5022$ en France, de 3482$ à 4574$ aux États-Unis, de 3466$ à 4911$ en Allemagne ou encore de 3433$ à 4665$ au Royaume-Uni. Une croissance comprise entre +25 et +35% pour la plupart des pays développés. Logiquement, ces évolutions comparées conduisent à une réduction du différentiel entre les salaires réels (tous coûts salariaux cumulés) entre pays en développement et pays développés. Ainsi, le rapport entre le salaire réel moyen indien et ses équivalents français et allemand devrait passer de 28 et 26 respectivement en 2011 à 8 en 2030. Entre États-Unis et Mexique, le rapport pourrait passer de 7 à 4. Les premières relocalisations De fait, le ralentissement du mouvement de délocalisations pourrait se poursuivre. Les directions d’entreprises pourraient être moins enclines à fermer leurs sites de production ici pour relocaliser dans les pays où le coût de la main-d’œuvre reste plus bas. Mais pas question d’enterrer les délocalisations pour autant. Déjà car cette tendance de rattrapage des niveaux de salaires sera progressive. Ensuite, le différentiel, même en 2030, pourrait rester suffisant pour que certaines sociétés fassent le choix d’une délocalisation de la production ou de certains services en Chine, au Pakistan ou au Brésil. Mais surtout, de nouvelles stratégies de délocalisations pourraient émerger. C’est ainsi que H&M a récemment investi en Ethiopie au détriment e ses sitess de production textile en Chine. Les coûts de l’énergie et du transport Main-d’œuvre moins chère que dans les pays où l’évolution est rapide, proximité plus grande avec les marchés principaux (Europe et États-Unis), d’autres avantages peuvent être trouvés. En rapprochant les sites de production des débouchés, les entreprises pourraient ainsi mieux maîtriser la chaîne d’approvisionnement et voir leurs coûts de transport réduits. Pas forcément un mauvais calcul à l’heure où les coûts de l’énergie augmentent parfois aussi vite que les coûts de la main-d’œuvre. Car la hausse des salaires est fortement liée à la croissance du PIB. Les écarts de salaires entre économies développées et économies en développement devraient sensiblement diminuer d’ici 2030. / Photo bilan.ch
  • 12. 12 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 ÉCONOMIE COMMERCEETINDUSTRIE Dans le cadre du projet de modernisation et de dynamisation des associations de défense des consommateurs et dans la perspective de restructuration, un plan de formation continue a été élaboré par la Direction du contrôle de la qualité et de la protection des consommateurs du ministère du Commerce et de l’Industrie en vue de renforcer les capacités des membres des associations en matière de gouvernance ou de pilotage. Renforcer les capacités des associations des consommateurs Source : Ministère du Commerce et de l’Industrie P lus de 75 membres d’associa- tions de défense de consom- mateurs ont participé dans le Nord et le Nord-Est à un séminaire sur le thème « Leadership des organisations », qui jouit d’une grande pertinence car la gestion effi- cace d’une association requiert, selon le formateur, la présence d’un leader efficace et dynamique qui sait porter le projet de l’association en accep- tant de prendre des responsabilités vis-à-vis des adhérents et de la com- munauté. Ce séminaire vise également à renforcer les capacités des associations de défense de consommateurs en matière de leadership , à développer de bonnes relations au sein des équipes de travail, à orienter les décisions prises qui garantissent le bon fonctionnement des associations et à développer une bonne collaboration entre le ministère du Commerce et de l’Industrie et les fédérations d’associations de consommateurs du Nord et du Nord-Est. « Nous espérons à travers cette formation que les membres acquerront des principes de leadership qui s’imposent aux différentes activités des associations de défense des consommateurs en vue de mener des actions institutionnalisées et de prendre des décisions fondées sur un style de leadership qui leur permet de travailler avec les membres des associations et la communauté sur une base d’échange et de participation effective », ont indiqué les responsables de la Direction du contrôle de la qualité et de la protection des consommateurs (DCQPC) du ministère du Commerce et de l’Industrie. Les responsables de la DCQPC disent être convaincus qu’après cette séance de formation, le mou- vement consumériste va bénéfi- cier d’un leadership efficace, dynamique. « Les organisations de défense des consommateurs vont pouvoir répondre pleinement de leur mission, celle de défendre les intérêts des consommateurs haïtiens de manière que ces derni- ers puissent devenir des acteurs essentiels dans la recherche de la qualité et contribuer grande- ment à la croissance économique et au développement de notre pays », ont-ils indiqué, rappel- ant que ces activités ont pour but également de partager des recommandations pratiques et de promouvoir des gestes essentiels de prévention pour des aliments plus sûrs et pour inciter la popula- tion à changer de comportement à l’achat ou la vente. Financé par le Programme d’appui à la mise en œuvre du marché et de l’économie unique de la Caraïbe (CMSE), ce séminaire va, selon les organisateurs, permettre de partager des recommandations pratiques et de promouvoir des gestes essentiels de prévention pour des aliments plus sûrs et pour inciter la population à changer de comportement à l’achat ou la vente. Le ministère du Commerce et de l’Industrie veut sensibiliser les consommateurs à l’importance de la métrologie dans les activités commerciales. / Photo MCI
  • 13. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 13 SOCIÉTÉ Q uels liens peut-il y avoir entre la dette et la psychanalyse ? Certains avancent que François Hollande aurait commis une bourde en parlant de dette en Guadeloupe, ce qui a réveillé les cohortes de ceux qui sont convaincus que la France est dans son tort et qu’elle doit restituer au pays cette somme qui a été versée par tranches pendant des décennies et dont le peuple haïtien, en particulier la paysannerie, a fait les frais.  Au-delà des manipulations politiques, de l’émotion suscitée par cette question, je pense qu’il est de bon droit d’être étonné par la décision prise par les dirigeants d’alors de payer cette somme à l’État français après que nous avions défait sur le terrain les troupes de Napoléon. Ce « nous » que j’utilise est tout à fait flou. Si les dernières batailles dites décisives ont été dirigées par des hommes qui avaient fait tout d’abord allégeance à l’État français, les chefs de la grande rébellion, comme Lamour Dérance et Petit Noel Prieur, avaient déjà réduit le corps expéditionnaire français, déjà mis à mal par la fièvre jaune, à sa plus simple expression. La perspective d’un retour des colons, et donc de la perte des privilèges dont ils jouissaient depuis la période de Toussaint Louverture, allait porter, par intérêt de classe, toute une classe d’hommes et de femmes - n’allant pas toutefois vers l’extrémisme démesuré de Jean Baptiste Lapointe - à s’allier finalement avec les troupes d’esclaves sur le terrain pour mettre en échec le projet révisionniste de Napoléon. Jean Jacques Dessalines, très tôt, comprendra les dessous de cette alliance et ses mots célèbres « Et ceux dont les pères sont en Afrique, qu’auront-Ils ? » auront les conséquences que l’on sait. Son assassinat un 17 octobre ne devient alors que la suite logique de l’assassinat des chefs auquel lui-même avait participé en éliminant Lamour Dérance. L’État haïtien n’a jamais été forcé d’honorer cette dette que l’État français réclamait. La France vaincue sur le terrain pouvait réclamer n’importe quoi. Ce n’était que dernière arrogance d’une puissance qui, de toute manière, ne pouvait plus prétendre à aucun droit sur ce pays. Les masses haïtiennes se seraient soulevées comme un seul homme pour faire échec à une improbable aventure des colons français nostalgiques de leur période faste à Saint-Domingue. Alors pourquoi nos dirigeants ont-ils payé ? Pour se trouver un appui face à la montée de la contestation dans toutes les campagnes ? Pour se protéger de la colère des masses rurales se rendant compte que les créoles n’avaient fait que reproduire le système sous une forme édulcorée et peut-être même plus violence par certains aspects ? La ségrégation était toujours là dans ladite première république noire et elle perdure encore de nos jours. Ont-ils payé aussi pour s’assurer la reconnaissance de leur père, le Blanc, leur seule référence, la mère noire ayant été refusée, rejetée, cette Afrique qu’on brandit seulement comme l’enfant en colère prêt à tout casser pour attirer l’attention du père aimé, mais méprisant ? Il n’y avait pas non plus trop de réticence à payer, car celui en fin de compte qui allait casquer était ce peuple noir qu’on méprisait. Notre histoire n’est-elle alors qu’une vaste suite de traîtrises, depuis l’épisode des Suisses, en passant par l’assassinat des chefs et celui de l’Empereur quelques années plus tard ? Si la France doit penser à s’acquitter de cette dette sous une forme à déterminer par des responsables éclairés des deux États, loin de l’agitation stérile des foules manipulées par des politiques en quête de pouvoir, cela ne doit pas nous faire oublier cette question essentielle et combien actuelle qui est celle de la trahison permanente de nos chefs. EXIT Dette et psychanalyse ou la trahison des chefs ! par Gary Victor À Port-au-Prince, s’habiller ne requiert pas un portefeuille bien garni. Il suffit de trou- ver la bonne marchande ou plutôt le bon habit, quand il le faut. Point n’est besoin d’affronter les regards hautains des employés des magasins de vêtements du haut de la ville. Ni de recourir aux services des tailleurs qui se font rares et qui, par la même occasion deviennent de plus en plus coûteux. « Je ne me souviens plus depuis quand j’ai été chez le tailleur. Ca fait tellement longtemps ! » Réponse singulière d’un jeune d’environ une vingtaine d’années à la question : « Quand vas-tu chez le tailleur ? » Les réponses des autres jeunes questionnés à ce sujet ne sont pas différentes. Certains y vont uniquement quand ils veulent se procurer une tenue qui coûtera sans doute plus chère dans un magasin de vêtements. D’autres avouent y aller quand ils veulent un habit fait sur mesure selon leurs désirs. Si les tailleurs peuvent espérer une cérémonie nuptiale ou des funérailles pour voir un client masculin, il n’en est pas de même pour les filles. Elles disparaissent considérablement de la clientèle des couturiers. L’une avoue n’aller chez le tailleur que pour confectionner son uniforme. Donc, une fois par an. Une autre, peut-être deux fois par année, « si je veux confectionner une jupe spéciale ». La majorité des jeunes interrogés déclare acheter leurs vêtements au centre-ville. C’est une solution pour pallier au manque de magasins de vêtements. Parce que ces magasins sont pour la plupart, logés à Pétion- ville et semblent destinés à une clientèle particulière. Le centre- ville demeure la seule option correspondant à leur pouvoir d’achat. Le centre-ville et les marchés environnants sont, selon ces jeunes, plus accessibles et moins coûteux. Cependant, malgré cette accessibilité, les marchandes de vêtements usagés communément appelés « pèpè » ont aussi leur importance. Suze (nom d’emprunt) témoigne : « J’achète mes vêtements chez les marchandes de pèpè » pour plusieurs raisons. C’est moins cher. Quand je veux avoir un vêtement que d’autres filles ne porteront pas, c’est le meilleur choix. Ces habits ne sont pas communs. Et j’ai toutes les chances de trouver des vêtements de marque ». Par ailleurs, les filles ne sont pas les seules à avoir cette addiction aux vêtements usagés. Les jeunes garçons fréquentent également ces marchandes que l’on retrouve un peu partout dans les rues de la capitale. Situation économique oblige. Les magasins de vêtement que l’on nomme « shop » ne semblent pas avoir de clientèle assidue chez les jeunes. Peu sont ceux qui y vont pour se procurer leur vêtement. Un faible pourcentage des jeunes interrogés va de temps en temps dans les magasins de vêtements. Parfois pour une urgence. D’autres fois, pour être sûr d’acheter des vêtements de qualité. Dans cette diversité qui ne se construit que sur une base économique, les couturiers sont oubliés. Quand l’on trouve facilement son habit pour pas cher, voir un couturier n’est plus obligatoire. Savoir quelle est l’alternative pour ces hommes ou ces femmes dans ce métier en péril chez nous, comprendre leur situation, évaluer les mécanismes qu’il faut mettre en place pour revaloriser cette profession, c’est un autre débat. L'art de se vêtir selon ses moyenspar Stéphanie Balmir Pour s’habiller en Haïti en 2015, il y a diverses options. Dépendamment de ses moyens économiques, le choix vestimentaire est différent. Chacun s’habille selon ses goûts mais surtout selon ses poches. Où s’habillent les jeunes ? Chez les marchandes ambulantes du centre- ville ? Le marché Hyppolite ? Les « pèpè » ? Autant de possibilités pour se vêtir. Mais quelle est la place des tailleurs dans cette diversité ? Quand s’adresse-t-on à eux ?
  • 14. 14 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 SOCIÉTÉ E n Haïti, des milliers d’enfants ne possèdent pas d’actes de naissance ; ce qui est une violation flagrante du droit à l’identité.En février dernier, une enquête conjointe de Institut du Bien- être social et de Recherches l’IBESR et de la municipalité de Plaisance, avec le support technique du projet de protection des droits humains HPP AKSE, a permis de recenser pas moins de 700 enfants en dessous de 5 ans non pourvus d’actes de naissance, dans la seule Commune de Plaisance (Nord d’Haïti). Des milliers d’enfants ne sont pas enregistrés et/ou ne possèdent pas d’actes de naissance en Haïti. Ce problème a été soulevé à de nombreuses reprises par des responsables d’organisations communautaires à travers le pays. «Quand on a la chance d’avoir un acte de naissance en main, la plupart du temps il n’est pas enregistré aux archives nationales. Parfois, on doit débourser jusqu’à 10 mille gourdes pour avoir un document conforme », s’est lamentée une jeune femme dans la vingtaine participant à un atelier de travail sur le droit à l’identité à Plaisance. À côté des problèmes d’ordre structurels tels l’absence de registre et de formulaires de naissances au bureau de l’État civil, il faut également considérer l’accès difficile – dû à la distance - du bureau de l’État civil par rapport aux 8 sections communales ainsi que des frais illégaux réclamés certaines fois pour l’obtention des documents. « Un enfant ne détenant pas d’acte de naissance est dépourvu d’existence juridique. Ce qui compromet la protection de ses droits et, par ricochet, son avenir. Sans identité, Il se trouve dans une situation de vulnérabilité le rendant facilement exploitable », a expliqué Marjorie Bertrand conseillère principale en protection de l’enfant à HPP AKSE, lors d’un atelier de travail sur la protection de l’enfant et le droit à l’identité à Plaisance. Les communautés rurales sont les plus touchées Selon EMMUS V, pour huit enfants sur dix (soit 80 %), la naissance a été enregistrée à l’État civil. Toutefois, seulement 73 % du total, soit 7.3 sur dix, ont un acte de naissance. Plusieurs raisons tendent à expliquer cet état de fait, soit que le document n’a jamais été remis aux parents ou que ces derniers ne l’ont pas retiré, soit HAÏTISOCIÉTÉ/DROITÀL’IDENTIFICATION Plaisance se mobilise pour le droit à l'identité des enfants par Vantz Brutus et Edner Décime que par la suite il a été perdu et/ou est devenu non disponible. EMMUS V révèle également que le problème d’identification et d’enregistrement des enfants affecte davantage les communautés rurales et qu’il existe aussi d’importantes disparités au niveau départemental, les pourcentages d’enfants de moins de 5 ans enregistrés seraient autour de 70 % dans l’Artibonite et le Centre et de 86 % dans l’Aire Métropolitaine et le Sud. Conscient de l’ampleur du défi, le Président Martelly a pris un arrêté en date du 16 janvier 2015 accordant un délai de 5 ans à toute personne dépourvue d’acte de naissance, pour régulariser son état civil et ceci gratuitement. La communauté de Plaisance se mobilise pour profiter pleinement de cette disposition. Un projet pilote d’enregistrement des naissances tardives, s’étendant de février à juillet 2015, est mis sur pied et devra inspirer des interventions dans d’autres communes également affectées par ce problème. Dans la première phase, Maires, membres des Conseils d’administration des sections communales (CASECS) et bénévoles se sont associés aux clercs pour répertorier à travers la commune et les sections communales de Plaisance tous les enfants non-enregistrés à l’état civil. Dans la deuxième phase, une base de données sera constituée par la municipalité de Plaisance pour pouvoir guider des interventions futures. Dans la troisième phase, les autorités locales (la Mairie, les membres de Casec, Asec, les officiers d’État civil, les clercs, les acteurs de la société civile et le secteur religieux vont développer un mécanisme pour pouvoir suivre les naissances et délivrer les actes de naissance à temps. À la recherche de solutions durables Les représentants des organisa- tions communautaires réalisent des rencontres régulières avec les autorités locales à la recherche de solutions durables au problème d’état civil. Un plan d’action est en cours d’élaboration et parmi les mesures envisagées figurent : • Un système d’enregistrement dès la naissance dans les dispensaires et centres de santé de la commune ; • La mise en place d’un partenariat écoles-églises-dispensaire/centres de santé et le bureau de l’officier d’État civil de Plaisance. « Ce projet va apporter une réponse durable au problème de l’état civil à Plaisance. Non seulement nous allons régulariser la situation des centaines d’enfants qui n’ont pas d’actes de naissance mais aussi nous allons travailler avec tous les acteurs concernés de près ou de loin pour mettre en place un mécanisme pour que chaque enfant qui naisse ait automatiquement un acte de naissance », a affirmé le Maire, Anthony Josaphat.
  • 15. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 15 SOCIÉTÉ Champ de Mars. / Photo J. J. Augustin D epuis le séisme du 12 jan- vier 2010, la zone qui a été la plus investie à la capitale est le Champ de Mars. Elle a été, dès le lendemain de la catastro- phe, envahie par une population aux abois, ne sachant, dans leur subite errance, où se mettre à couvert. Car les secousses se répétaient. Rester à l’intérieur d’une maison même non fissurée était un grand risque. En quelques jours, le Champ de Mars était devenu le camp de réfugiés le plus peuplé au bas de la ville. Avec ses tentes offertes par des organisations internationales humanitaires, l’espace avait drastiquement changé de configuration. Du havre de repos pour les piétons fatigués ou de la tribune publique de discussions enflammées de groupes politiques, le Champ de Mars avait comme perdu ses repères de relations sociales et historiques. La place Dessalines, la place Pétion, la place Christophe, le kiosque Occide Jeanty, tout l’ensemble urbain n’était qu’un vaste lieu de l’expérimentation psychologique, sociale et de santé des instances internationales. Les citoyens de la capitale qui tiraient une grande fierté en déambulant aux pieds des statues des héros de la patrie ne cachaient pas leur malaise à la vue de ces brusques transformations du Champ de Mars. À quelques pas du Palais national ravagé par le séisme, le lieu ressemblait à un « war zone ». On y craignait, surtout, l’extension des épidémies, les dégâts du sexe, la propagation de fièvres et du choléra. Après plus de deux ans dans cette intolérable situation de déchéance humaine, des instances nationales et internationales commençaient par relocaliser les réfugiés. De la légèreté démocratique ? Des plans de reconstruction, au bout de deux ans et demi, ont commencé par apparaître sur des affiches. Le ministère du Commerce et de l’Industrie, la Cour de cassation, la restauration de la place du Marron Inconnu redonnaient un peu d’espoir. Parallèlement, dans les espaces où les tentes ont été enlevées, des tôles rouges commençaient par obstruer une bonne partie du Champ de Mars. Certains affirmaient même que cela faisait l’affaire des commerçants de la place qui stockaient ce matériel en prévision des grands projets de constructions publiques et privées. D’autres argumentaient que c’était une stratégie politique pour démanteler les tribunes politiques populaires qui carburaient en ces lieux à plein rendement. Le Champ de Mars était devenu donc comme un camp de concentration où il était interdit de voir ce qui se faisait derrière les tôles rouges. Ces dernières avaient la vertu de cacher l’assainissement qui ne s’appliquaient pas sur les Places. La poussière, la précarité, des débris de construction jetés ici et là mettaient à rude épreuve le bronze des statues dont on pouvait voir les menaces de corrosion. Les urgences ne concernaient pas les statues qui pouvaient attendre pour leur restauration ! Le Champ d -Mars, aujourd’hui encore, est totalement encerclé de tôles rouges. On y ajoute des bleus pour jouer un peu au nationalisme cocardier ! La place Dessalines est coupée en deux parties dont l’une serait un agrandissement moderne du Musée du Panthéon national. L’amphithéâtre Occide Jeanty inauguré redonne un peu de couleur et d’harmonie festive dans cette partie du Champ de Mars. Certains critiquent les couleurs trop vives des murs qui jurent avec la blancheur du kiosque. Le soleil tape très fort sur les gradins ! Le ciné Triomphe, laisse- on croire, sera inauguré sous peu. L’immeuble a gagné en transparence à cause des baies vitrées qui ont remplacé des murs autrefois épais de la dictature. De la légèreté architecturale ? De la démocratie moderne dans les nouveaux immeubles ? Attendons voir ! À la place des Artistes, en face de l’ambassade de France qui sera reconstruite, les érections de tonnelles métalliques ne disent rien de leur future fonctionnalité. Les marchandes de poulets frits se frottent les mains. Mais quel sera le prix à payer pour les « installations modernes » ? Le Rex Théâtre est encore dans son indescriptible délabrement. Mais ses tôles rouges persistent sur sa reconstruction en espace et nombre de places. La place de la Constitution ? Pas un mot sur les tôles rouges. Un panneau de signalisation informe que la rue de la Liberté est fermée à la circulation dans la perspective de la réhabilitation du Champ de Mars. Une petite innovation à signaler et pas des moindres : Le Bureau d’ethnologie expose à son mur d’entrée depuis quelques mois des photos et artefacts de la culture populaire. Cette semaine, on y voit des photos de 1932 de Catherine Dunham et des danseurs très athlétiques de Jean René Delsoin. On peut y lire aussi la Constitution impériale de Jean Jacques Dessalines et une importante biographie du Père de la Patrie. CHAMPDEMARS/RÉHABILITATION Que cachent les tôles rouges ?par Pierre Clitandre Des transformations s’effectuent au Champ de Mars. Les citoyens n’en sont pas trop renseignés. Le ministère de la Culture n’en dit pas un mot. Seules les tôles rouges s’imposent en informations sommaires.
  • 16. 16 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015
  • 17. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 17 CULTURE Sa langue dans la bouche de l'autre par Jean Billy Mondesir Des Amérindiens sont venus nous voir au début du mois de mai. Oui, il existe encore des indiens en Amérique. On avait une tendance à l’oublier tant leurs voix sont étouffées et tant nous ne nous sommes préoccupés que de nous-mêmes. Il en reste encore en Amérique et ils luttent. Que longue sera cette lutte contre l’indifférence, l’arrogance et l’irrespect de l’autre. L’autre qui résiste encore à saluer leurs humanités, à respecter leurs cultures, leurs territoires. Ils sont venus ici, haut lieu de mémoire des indiens, nous parler de leurs nuits : les Nuits amérindiennes. C’étaient des nuits de belles lettres et de musique qui se sont tenues à Port-au-Prince du 6 au 10 mai dernier. C’étaient surtout des nuits rebelles dont nous retiendrons certainement cette voix qui nous aura appris que notre langue maternelle peut-être une arme contre l’exclusion. L a poétesse innue de pessamit Joséphine Bacon, coprésidente avec Yanick Lahens des Nuits amérindiennes en Haïti, une initiative des éditions Mémoire d’encrier, a compris jusqu’où une langue maternelle peut être ancrée en soi. Elle a compris combien peut- elle être un condensé de ce qu’on est. C’est pourquoi, elle n’entend jamais sortir sans la langue de son peuple. Elle s’adresse à vous d’abord en innu avant de traduire dans une langue plus mondialisée, le français. Elle sait que vous ne comprendrez peut-être pas l’innu. Mais elle veut quand même vous rappeler, qu’elle aussi, elle a une langue qui porte son histoire, la vie quotidienne de sa communauté. Elle veut que vous vous rendiez quand même compte de tout ce que vous avez raté en elle en ignorant sa langue. Elle traduit ensuite en français pour vous dire « je parle votre langue, ou une langue que vous parlez parce que je ne veux pas vous rater. Je ne veux pas rater le monde. » Et continue à offrir où elle passe l’exemple de cette possibilité de dialogue. Michèle Duvivier Pierre Louis et Yanick Lahens ont chacune tenté, lors de leurs prise de parole à l’ouverture cet événe- ment, quelques mots en innu. On ne comprend pas tout de suite ce petit courant qui par- court les traits de Joséphine et des autres innus. Mais quand la chanteuse Chloé Sainte-Marie nous a offert à son tour, dans son accent québécois, quelques mots créoles, le même frisson traversa toute la salle et enfin, le petit éclat de rire. Un petit mot de sa langue dans la bouche de l’autre, existe-t-il de geste d’amitié plus sublime? Suivons l’exemple de Joséphine. Offrons notre langue aux autres, le créole et prenons les leurs, l’anglais, l’innu, l’espagnol, l’allemand.... D epuis vingt cinq ans, le festival Étonnantsvoyageurschantela beauté et tisse des passerelles pour la transmission de l’imaginaire. Pour reprendre Claude Renoult, le maire de Saint-Malo, « depuis un quart de siècle ce festival littéraire et artistique est au cœur des débats qui agitent le monde et nous en fait découvrir les moindres recoins ». Pour cette édition, à travers tout un programme d’activités qui s’est tenu sur 26 lieux, les habitants de Saint- Malo et des visiteurs de tous les vents ont pu s’inventer une contre-allée à l’ordre rigoureux du réel. 30 pays étaient au rendez-vous, 30 visions du monde, 30 manières d’écrire le monde, son bruit et son silence. Haïti, qui a déjà reçu le festival, a été représentée par Yanick Lahens, Lyonel Trouillot, Mackendy Orcel, James Noel, Emmelie Prophète et Franketienne. Au menu des activités du festival, 100 films furent projetés ; 300 rencontres se sont tenues, on y a trouvé également des spectacles, des expositions, des ateliers jeunesse, des débats, des lectures et des cafés littéraires. L’affiche du festival : l’affirmation d’une position politique Pour cette édition 2015 du festival, c’est une magnifique photo de la dissidente birmane Aung San Suu Kyi qui en a constitué l’affiche. En faisant ce choix, les initiateurs du festival ont voulu rendre hommage à la pugnacité de cette grande dame, cette femme de courage qui a toujours dit « non » à l’injustice et à la corruption. Depuis vingt- cinq ans qu’elle est là, à dénoncer, à refuser que le silence l’emporte sur la justice, son travail commence à apporter des fruits ; elle a même obtenu le prix Nobel de la paix. En faisant d’elle l’image des « Étonnants voyageurs », la batterie d’artistes qui était rassemblée à cette occasion a souhaité dire au monde entier que faire de l’art, c’est toujours, comme l’aurait dit Balzac, « faire partie de l’opposition qui s’appelle la vie ». Être artiste, c’est toujours porter dans sa voix le malaise des choses. Les grands thèmes du festival cette année L’invention de la France, pour un espace monde en français, dans un monde en mouvement, un monde très noir, L’imaginaire de la science, L’aventure maritime, La maison de l’imaginaire, Le vaste monde étaient parmi les thèmes retenus cette année et sur lesquels se sont appuyés les différents dialogues qui ont été engagés. Franketienne a participé à un grand débat ayant pour thème « Peindre, écrire : l’imagination créatrice. Lyonel Trouillot a signé avec Geneviève Marie de Maupeou et Alain Sancerni un « Dictionnaire de la rature » et le recueil de poèmes « C’est avec mains qu’on fait chanson » (Le Temps des Cerises). Les « Étonnants voyageurs » ont fait une belle plongée dans l’imaginaire québécois en compagnie de Joséphine Bacon, Sophie Bienvenu, Nicolas Dickner, Christian Guay- Poliquin, Audrée Wilhelmy, Denise Bombardier et Natasha Kanapé- Fontaine. Beaucoup de jeunes auteurs francophones étaient présents sur les panels de cette édition du festival, parmi eux notamment Miguel Bonnefoy, le lauréat 2014 du Prix du jeune écrivain francophone. Un quart de siècle Dans la journée du 25 Mai, durant trois heures, pour la célébration des 25 ans, le public a été convié à un tour du monde rétrospectif des aventures d’Étonnants voyageurs à Port-au-Prince, Dublin, Rabat et bien sûr Saint-Malo. On y a fait également un retour sur « l’aventure du Manifeste pour une littérature-monde en français » signé en octobre 2007. Attendons maintenant l’année prochaine pour savoir où nous mèneront « Les Étonnants voyageurs ». Pour ses 25 ans, le Festival Étonnants Voyageurs est revenu à Saint-Malo par Dangelo Néard Du 23 au 25 mai 2015, deux cents auteurs du monde entier se sont réunis à Saint-Malo pour célébrer le livre et le cinéma. Deux cents « étonnants voyageurs » étaient sur les quais de la cité corsaire. Quelque 60 000 visiteurs étaient venus à leur rencontre. Dans le plaisir, dans la bonté et par le dialogue, à bien y regarder, c’est la vie qu’ils ont cherché à doubler, c’est le temps qu’ils ont suspendu, c’est la parole que ces messieurs et dames ont encensée. La poétesse Joséphine Bacon lisant l’un de ses poèmes pour un groupe d’élèves du collège Les Normaliens réunis.
  • 18. Almondo était un passionné de son art. Ses conversations se limitaient presque à cela. Il parlait très peu de lui. Par conséquent, personne ou presque ne peut prétendre détenir des informations fiables pour écrire sa biographie. Ce dont on est certain, toutefois, c’est que sa carrière musicale s’est amorcée à la fin des années soixante. Il a roulé sa bosse un peu partout au sein de quelques groupes musicaux anonymes avant d’intégrer le Bossa Combo où il fut associé à Jean Jean-Pierre. À cette époque, le Bossa Combo était le seul groupe musical à disposer d’un véritable « ban dèyè » complet. Le jeune Keslin se fit tout de suite remarquer grâce à ses roulements et ponctuations d’une étonnante précision. Ce qui faisait de lui, dès l’entame de sa carrière, un percussionniste de haut niveau. Qu’il s’agisse de la batterie ou des timbales, Armando les maîtrisait avec une aisance déconcertante. Grand maître de la mesure et de la vélocité, son jeu sur la batterie était caractérisé par une frappe légère sur la cymbale couplée d’une certaine intensité sur la grosse caisse, faite d’équilibre et d’exactitude. Après son passage au sein du Bossa Combo, il change de registre. Tour à tour, il s’illustre chez le « Shooblak », « les Zotobre » pour enfin atterrir sur la piste du DP Express, avec lequel il imposa, pour de bon, son propre style. Avec l’arrivée de Ti Manno, son grand talent pour la composition et l’arrangement musicaux s’est révélé au grand jour. Il apporte sa propre touche à « David », l’un des plus grands classiques de la musique haïtienne. Plus tard, il expose sa versatilité en officiant comme batteur attitré pour le crooneur Ansy Dérose. Par la suite, il a brièvement collaboré avec Les Frères Déjean de Pétion-Ville avant de fonder « Omni Band », son propre groupe musical. Le morceau « Accolade bweson », qui figure sur le premier album de ce groupe, produit par Fred Paul, fait encore le bonheur des mélomanes exigeants des années quatre-vingt. Véritable requin des studios, Almando Keslin était, à une certaine époque, l’un des batteurs les plus sollicités du milieu. Fan inconditionnel de Ti Manno, il a dédié une bonne partie de sa vie à mener un combat sans arrêt pour la reconnaissance nationale de son idole. En effet, chaque année, au mois de mai précisément, Almondo faisait la tournée des stations de radio pour parler de Ti Manno et de son œuvre. Avec peu de moyens et généralement sans aucune aide, il organisait des concerts de musique un peu partout dans la capitale pour honorer la mémoire de cette légende négligée et oubliée par des générations d’hier et d’aujourd’hui… de demain aussi, qui sait ! Dans ces concerts, il invitait des jeunes à venir revisiter des morceaux chantés par Ti Manno, soit au sein du DP Express ou du Gemini All Stars. Almando a mené ce combat avec courage et passion. Il parcourait des dizaines de kilomètres à pied sans se lasser pour parler de Ti Manno. Fier et orgueilleux, il regardait de haut ceux qui ne comprenaient pas et ne le soutenaient pas dans son combat pour immortaliser le nom et le personnage de Ti Manno. «Avèk ou san yo, Pipo, m ap fè sa m gen pou m fè ya », répétait-il de sa voix éraillée et avec son rire franc. Son énergie pour son âge était contagieuse. Je ressens aujourd’hui beaucoup de fierté pour l’avoir connu et parce que j’ai eu la chance, l’honneur et le privilège de faire partie de ceux en qui il avait confiance et pour qui il avait du respect. Repose en paix, Almondo ! Puisses-tu enfin trouver dans l’au- delà cette sérénité que la vie sur terre n’a pas su t’offrir. Tu as mené le bon combat, mon frère, dans un pays ou l’amnésie collective tend à nous transformer en un peuple sans gloire, sans âme et sans histoire. Tu vouais une admiration sans borne à Ti Manno, parti en mai. L’histoire a voulu que le 22 mai tu fasses aussi ton adieu à la musique, à la terre, à Haïti. Triste mois de mai ! 18 | N0 4 LUNDI 25 MAI 2015 Almando Keslin : un percussionniste hors pair, parti sans tambour ni trompette !par Philippe Saint Louis CULTURE Le mois de mai, tout compte fait, est un mois maudit pour les artistes haïtiens. Après Nemours Jean-Baptiste, George Lys Hérard (Master Dji), Antoine Rossiny Jean Baptiste (Ti Manno) et Maurice Sixto, le décès d’Almando Keslin, survenu le vendredi 22 mai 2015, très tôt dans la matinée, est venu grossir la liste de ces figures emblématiques négligées de la culture haïtienne, parties vers l’au-delà au cours du cinquième mois de l’année. Almando Keslin participant à l’une des émissions « Le divan de M. Jean » .
  • 19. LUNDI 25 MAI 2015 N0 4 | 19 CULTURE « Dheepan », film d’amour et de violencedeJacquesAudiard,sur le parcours en France de réfugiés sri-lankais, a reçu dimanche la Palme d’or du 68e Festival de Cannes, qui a mis les Français à l’honneur, récompensant aussi les acteurs Vin- cent Lindon et Emmanuelle Bercot. « Recevoir un prix de la part des frères Coen c’est quelque chose d’assez exceptionnel », a déclaré Jacques Audiard, 63 ans, très ému. « Je pense à mon père », le scénar- iste et dialoguiste Michel Audiard, a-t-il ajouté. La dernière Palme d’or française avait été décernée en 2013 à « La Vie d’Adèle » d’Abdellatif Kechiche. Jacques Audiard avait déjà été récompensé à plusieurs reprises à Cannes, par le Prix du scénario pour « Un Héros très discret » en 1996 et le Grand prix en 2009 pour « Un Prophète ». Autre récompense pour le cinéma français, l’acteur Vincent Lindon, 55 ans, a reçu le prix d’interprétation pour « La loi du marché » de Stéphane Brizé, film cinglant sur la brutalité du monde du travail, dans lequel il interprète un chômeur de longue durée qui se bat pour retrouver un emploi. La voix brisée par l’émotion, l’acteur, qui a été ovationné par la salle, a chaleureusement remercié le réalisateur et dédié son prix « aux citoyens laissés pour compte », estimant que ce prix était « un acte politique ». « C’est la première fois que je reçois un prix d’interprétation. C’est l’un des trois plus beaux jours de ma vie. » L’actrice Emmanuelle Bercot, 47 ans, a reçu de son côté le prix d’interprétation féminine pour « Mon roi » de Maïwenn, ex-aequo avec l’actrice américaine Rooney Mara dans « Carol » de l’Américain Todd Haynes, romance entre deux femmes dans les années 50 avec Cate Blanchett et Rooney Mara. « Maïwenn, tu as cru en moi comme personne avant, tu m’as regardée comme personne avant », a dit Emmanuelle Bercot, en longue robe noire. Ce prix récompense « l’audace, le sens aigu de la liberté » de Maïwenn, a encore déclaré l’actrice, qui inter- prète dans ce film une avocate qui se souvient de la passion destruc- trice qu’elle a vécue pendant dix ans avec Georgio (Vincent Cassel), un séducteur et beau parleur. Rooney Mara, qui n’était pas présente à la cérémonie, campe dans « Carol » le personnage d’une toute jeune vendeuse qui va se laisser séduire par une femme bourgeoise à la beauté fatale (Cate Blanchett). - Nemes, Lanthimos et Hou Hsiao- Hsien - Le Grand prix a été décerné par le jury présidé par les frères Coen à « Son of Saul » (« Le fils de Saul ») du Hongrois Laszlo Nemes, film choc sur la Shoah. Cette œuvre, qui raconte l’histoire d’un déporté juif forcé de tra- vailler dans les chambres à gaz à Auschwitz, a impressionné par sa mise en scène radicale. Il restitue l’horreur de la Shoah sans presque jamais montrer les victimes, par le hors champ et les bruits. « Ce continent est encore hanté par le sujet », a commenté le réalisa- teur en recevant son prix. Le prix du Jury a été attribué au Grec Yorgos Lanthimos pour « The Lobster », fable grinçante et déran- geante sur la solitude, le couple et l’amour. Le prix de la mise en scène est revenu au cinéaste taïwanais Hou Hsiao-Hsien pour « The Assassin », histoire d’une justicière dans la Chine du IXe siècle, à l’esthétique ciselée. Le réalisateur mexicain Michel Franco a reçu de son côté le prix du scénario pour « Chronic », por- trait tout en retenue d’un infirmier, interprété par Tim Roth, totale- ment dévoué à l’accompagnement de patients en fin de vie. La cinéaste Agnès Varda, émue aux larmes à l’évocation de son ex-compagnon Jacques Demy, a reçu quant à elle une Palme d’honneur, une récompense seule- ment décernée à ce jour à Woody Allen, Clint Eastwood et Bernardo Bertolucci. Cannes : La Palme d'or à « Dheepan » de Jacques Audiard, les Français à l'honneur Sources : AFP Jacques Audiard. / Photo AFP