Dans le contexte des crises financières et des évolutions réglementaires, ce point de vue entend dépasser le débat
d’actualité pour éclairer la réflexion sous deux angles :
• Reposer les fondamentaux du système d’intermédiation
bancaire afin de mieux analyser les implications des
mutations en cours
• Etudier les inflexions stratégiques et opérationnelles
nécessaires afin de dessiner un agenda de transformation
pour les banques françaises.
[Gestion des risques et conformite] separation des activites bancaires
Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
1. Quel rôle et quel modèle
pour les banques françaises ?
2.
3. Sommaire
Le rôle des banques p. 6
Le modèle d’intermédiation bancaire
aujourd’hui sous pression p. 8
Le risque du développement explosif
du « shadow banking » p. 10
Un foisonnement d’initiatives pour
répondre aux besoins de financement
de l’économie française p. 12
Mettre en place une supervision
renforcée et pragmatique p. 14
Vers un nouveau modèle
pour les banques françaises p. 18
L’impératif de la transformation digitale p. 22
4. P
rojet de loi sur la réforme bancaire en France ;
évolutions prochaines du dispositif de protection des
consommateurs ; décision des autorités américaines
de ne pas appliquer Bâle 3 en 2013… entraînant aussitôt
de la part des banques européennes une demande de
report de l'entrée en vigueur du règlement CRR et de la
directive CRD IV au 1er janvier 2014 ; nouveau rapport du
Conseil de Stabilité Financière sur les enjeux et risques du
shadow banking ; ralentissement du crédit aux entreprises ;
mutation attendue des réseaux bancaires dans une logique
d’abaissement du point mort…
L’actualité est décidément riche en débats structurants
pour l’avenir du secteur bancaire en France.
Dans ce contexte, nous avons souhaité dépasser le débat
d’actualité pour éclairer la réflexion sous deux angles :
• Reposer les fondamentaux du système d’intermédiation
bancaire afin de mieux analyser les implications des
mutations en cours
• Etudier les inflexions stratégiques et opérationnelles
nécessaires afin de dessiner un agenda de transformation
pour les banques françaises.
4 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
5. En synthèse
Essentiel pour l’économie, le rôle des Mettre en place une supervision
banques est aujourd’hui sous pression renforcée et pragmatique
Face à la succession des crises, nombreux sont ceux Les normes prudentielles de Bâle n’ont pas réussi
qui ont jeté l’anathème sur les banques. Elles restent jusqu’ici à empêcher les crises parce qu’elles ont été
néanmoins des moteurs essentiels de l‘économie, inégalement appliquées et largement contournées
tant par leur fonction d’intermédiation traditionnelle (dérives dans la mise en œuvre du modèle « originate
que par leurs services de banque d’investissement. to distribute », « shadow banking »). Les pouvoirs
publics se focalisent désormais sur la séparation
Le modèle d’intermédiation des banques françaises banque de détail / banque d’investissement (sous
est aujourd’hui sous pression, du fait de la trois variantes attachées aux noms de Volcker, Vickers
réglementation comme des crises. et Liikanen) et aux plans de résolution (testaments)
• Bâle 3 impose aux banques une charge accrue en des banques jugées « trop grosses pour faire défaut ».
capital et des contraintes de liquidité qui pèsent sur Mais la clé du succès résidera principalement dans
une activité de crédit déjà affaiblie par la crise. l’efficacité et le pragmatisme de la mise en œuvre de
• La contrainte de liquidité est particulièrement ces mesures :
pénalisante pour les banques françaises car
l’épargne collectée sous forme d’assurance-vie, de • cohérence des règles applicables dans tous les pays
livret A ou de valeurs mobilières ne leur apporte pas pour ne pas créer de distorsions de concurrence,
de ressources bilancielles. • application des règles sous le contrôle d’un
• Les titres de dette souveraine des pays développés superviseur européen unique et puissant, tel que
utilisés comme coussins de liquidité sont désormais prévu dans le projet d’union bancaire, capable
porteurs de risque de crédit sauf à consentir à un d’apprécier les situations individuelles,
taux négatif. • préservation des caractéristiques des banques
françaises qui ont contribué à leur résilience à
travers le modèle de banque universelle.
Un foisonnement d’initiatives
palliatives qui n’apportent qu’une Vers un nouveau modèle pour les
réponse partielle aux besoins de banques françaises
financement de l’économie française
Les banques françaises ne pourront pas faire
Dans ce contexte, la France voit aujourd’hui l’économie d’une transformation de leur modèle afin
fleurir nombre d’initiatives publiques motivées de mieux prendre en compte la double contrainte
par la perception d’insuffisances des circuits de de capital et de liquidité, tant dans la gestion du
financement traditionnels : augmentation des portefeuille d’activités que dans l’optimisation de la
plafonds des livrets d’épargne réglementée, création consommation des ressources rares.
d’une Banque Publique d’Investissement, constitution
d’une Agence de Financement des Investissements Elles devront en outre reconstituer leur capital de
Locaux... Des initiatives issues de la sphère privée confiance auprès de leurs clients en répondant à
vont dans le même sens : partenariats de financement de nouvelles exigences de leur part : transparence
entre assureurs et banquiers, structures de accrue, juste prix, qualité de service, alors même
refinancement mutualisé entre PME, développement qu’il leur faudra réduire significativement leur
de plateformes de crédit peer-to-peer… base de coûts. La mise en œuvre d’une véritable «
transformation digitale » sera un levier prioritaire qui
Ces initiatives traduisent les limites actuelles de notre touchera autant la relation client que les processus
modèle d’intermédiation bancaire. Mais seule une opérationnels ou l’organisation interne.
action coordonnée des régulateurs, des superviseurs
et des banques elles-mêmes pourra constituer une
solution forte et durable.
Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ? 5
6. Le rôLe
des banQues
Les banques opèrent une
« intermédiation » entre acteurs
disposant d’excédents monétaires
à placer d’un côté et acteurs
demandeurs d’un financement pour
leurs projets de l’autre
u
ne banque, pour ses clients, c’est avant tout un profitent largement les grandes entreprises et les
tiers de confiance. Un tiers de confiance à qui Etats en émettant des titres, actions ou obligations,
on confie son argent, à qui on s’adresse pour que peuvent directement souscrire les épargnants.
obtenir un financement, dont on attend des produits Mais la désintermédiation n’est en réalité presque
et services de qualité. jamais totale, les banques restant des partenaires
clés de ces grands clients pour placer leurs titres,
C’est à ce titre que les banques gèrent les comptes et pour faciliter leurs transactions portant sur des
les moyens de paiement des particuliers, leur livrets montants supérieurs à la liquidité instantanée du
rémunérés, leurs comptes titres ou leurs contrats marché ou pour concevoir des produits répondant sur
d’assurance vie. Ce sont elles aussi qui financent mesure à chaque stratégie d’investissement. C’est ce
un achat de véhicule ou de bien immobilier. C’est qu’écrivaient récemment aux autorités européennes
là leur activité de banque de détail. Mais leur rôle et françaises deux grands patrons français : « Les
est également essentiel vis-à-vis des entreprises grandes entreprises comme les nôtres, mais
dont elles financent tant le fonds de roulement que aussi de plus en plus de PME, attendent de leurs
les investissements et à qui elles offrent toute une banques qu’elles fournissent une combinaison
panoplie des produits et services leur permettant de financements à travers le crédit et l’accès aux
d’optimiser leur trésorerie et de couvrir leurs marchés financiers, aussi bien que des solutions de
risques. On parle alors de banque de financement et couverture. »
d’investissement. La plupart des grandes banques
françaises, dites universelles, cumulent l’ensemble Pour les clients particuliers ou les PME,
de ces activités. l’intermédiation bancaire traditionnelle reste
absolument incontournable, d’autant qu’elle présente
Pour remplir ces missions, les banques opèrent l’avantage considérable de filtrer les risques de crédit
une « intermédiation » entre acteurs disposant d’une part, d’assurer la transformation de dépôts
d’excédents monétaires à placer d’un côté et acteurs courts en prêts longs d’autre part.
demandeurs d’un financement pour leurs projets
de l’autre. Les marchés financiers offrent certes C’est une part essentielle du rôle des banques
une alternative à l’intermédiation bancaire, dont que d’optimiser la gestion de ces risques et de les
6 QuEL RôLE Et QuEL moDèLE PouR LES BanQuES FRançaISES ?
7. IntERméDIatIon BanCaIRE
épargnants emprunteurs
entreprises ou particuliers
état actionnaires banque centrale marché
interbancaire
Dépôts liquides Garantie Prêts longs
Capital Liquidité Liquidité
sans risque dépôts risqués
mitigation transformation
du risque de crédit de maturité
marge d’intérêt
Banque
couvrir in fine par leurs fonds propres. La question sur les derniers mois et seulement 16 % par émission
de savoir si les banques prennent effectivement de titres.
assez de risques, et quel est le quantum de fonds
propres nécessaires (plus il faut de fonds propres Au-delà de cette mission essentielle d’intermédiation,
pour un niveau de risque donné, moins le volume de les banques représentent, en tant qu’employeur,
crédits sera élevé), sont sources d’éternels débats, un secteur majeur de l’économie, avec ses 400 000
fréquemment perturbés par la médiation de dossiers emplois. Il est donc essentiel pour le pays d’avoir un
ponctuels d’entreprises en difficulté. secteur bancaire efficace et prospère. Sans quoi,
c’est toute l’économie, et donc l’emploi du pays, qui en
En tout état de cause, c’est cette concentration paierait le prix.
de risques sur une fonction bancaire essentielle à
l’économie, ainsi que la protection des épargnants
ou des investisseurs, qui justifient que les banques
soient strictement contrôlées et qu’on leur impose de
respecter des normes prudentielles.
Pour autant, cette fonction d’intermédiation des
banques est aujourd’hui menacée dans son volume
par les exigences nouvelles de fonds propres et de
liquidité, alors même que les banques françaises sont
un maillon clé du financement de notre économie.
La progression de 2,6 % des encours de crédits
bancaires à fin juillet 2012, et le taux moyen des
nouveaux crédits qui s’établit à 2,14 %, inférieur à la
moyenne de la zone euro, sont au cœur de la santé
économique de notre pays. On estime que plus de
84 % des besoins de financement des entreprises
françaises ont été couverts par des crédits bancaires
QuEL RôLE Et QuEL moDèLE PouR LES BanQuES FRançaISES ? 7
8. Le modèle
d’intermédiation
bancaire aujourd’hui
sous pression
Le rôle traditionnel d’intermédiation des
banques est auiourd’hui remis en cause par les
crises et les réponses réglementaires aux crises
L
es crises à répétition ont instauré un climat de de mesures – connues sous le nom de Bâle 3 –
défiance entre banques qui se concrétise par imposant aux banques une charge accrue en capital
une fragilité récurrente de la liquidité bancaire. pour faire face aux risques de crédit et de marché
A plusieurs reprises, le marché inter-bancaire s’est ainsi que le respect de ratios sévères de levier et de
complètement tari et des épisodes de « bank run » liquidité. Initialement prévue progressive de 2013
ont même été observés. Il a fallu que les banques à 2018 (projet de directive CRD4), l’application des
centrales recourent à des mesures exceptionnelles exigences de fonds propres cibles a été anticipée en
pour desserrer cet étau et permettre aux banques Europe dès le 1er janvier 2011 (Directives CRD 2 et 3
commerciales de poursuivre leurs opérations. correspondant aux normes dites Bâle 2,5), au risque
de restreindre encore une offre de crédit déjà affaiblie
Il est important de noter que la contrainte de liquidité par la crise.
est particulièrement handicapante pour les banques
françaises qui subissent les conséquences d’une L’expérience a montré, en effet, que de bons ratios
politique fiscale qui a historiquement orienté une de fonds propres n’étaient pas suffisants pour éviter
large part de l’épargne nationale vers l’assurance-vie de graves difficultés à certaines banques ; DEXIA
(1600 Mds€ d’encours à fin 2011) et les placements en et le Crédit Immobilier de France en ont fait la triste
valeurs mobilières et OPCVM (1200 Mds€), ainsi que expérience. Comme toute entreprise, l’entreprise
le livret A (185 Mds€) et plus généralement l’épargne- bancaire meurt par cessation de paiement. Et
réglementée, plutôt que vers les ressources de bilan plus encore que toute autre entreprise, puisque le
bancaires (1800 Mds€). Ces dernières sont, en effet, commerce d’argent est sa raison d’être. A contrario,
les seules ressources internes que puissent mobiliser si les ratios de liquidité et de levier sont trop sévères,
les banques pour alimenter leur activité de crédit. alors c’est le métier de banquier qui disparaît.
Notons au passage que les récentes décisions des Enfin, dans cette tourmente, les banques ont
pouvoirs publics français de doublement prochain récemment perdu un de leurs derniers points
des plafonds du Livret A et du LDD d’une part, et fixes : l’actif mobilisable sans risque que constituait
de taxation des revenus du capital d’autre part, la dette souveraine des pays développés, qui leur
renforcent encore l’avantage concurrentiel des livrets permettait de couvrir leur risque de liquidité sans
d’épargne réglementée et de l’assurance-vie par encourir de risque de crédit. Aujourd’hui, il faut que
rapport aux autres produits d’épargne. Autant de l’investisseur rétribue l’emprunteur souverain si le
ressources supplémentaires qui risquent d’échapper risque de ce dernier est le meilleur ou parmi les moins
aux bilans des banques. mauvais !
Préoccupés par cette fragilité générale et par le Toutes ces évolutions ou ruptures dans
risque systémique qu’elle engendre au niveau de l’environnement dans lequel évoluent les banques
l’ensemble du secteur, les régulateurs de l’activité sont à l’origine d’un certain nombre d’initiatives
bancaire ont eux aussi réagi en obligeant les banques visant à contourner les contraintes ou à pallier les
à mieux se protéger des risques. Dans un cadre insuffisances liées à l’intermédiation bancaire.
mondialisé, le Comité de Bâle a élaboré un ensemble
8 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
9. Synthèse des flux de financement de l’économie française
Encours à fin 2011 en milliards d’euros
1700 Mds€
Provisions techniques
1600 Mds€
Primes d’assurance
Assurances
400 Mds€
Actions et OPCVM
1200 Mds€
Autres titres
1000 Mds€ 1000 Mds€
Actions et OPCVM Actions et OPCVM
200 Mds€ Marchés 2000 Mds€
Autres titres Autres titres
financiers
400 Mds€ 400 Mds€
Actions et OPCVM Actions et OPCVM
1200 Mds€ 1200 Mds€
Autres titres Autres titres
1800 Mds€ 2200 Mds€
Dépôts Crédits
Banques
2 300 Mds€ et autres IF 2 400 Mds€
Dépôts Crédits
1900 Mds€ 1900 Mds€
Comptes à recevoir Crédit Comptes à payer
commercial
2600 Mds€ 2800 Mds€
Participations Participations Participations
non cotées
4 200 Mds€ 6 400 Mds€
Sociétés non financières Sociétés non financières
Σ 9 100 Mds€ Σ 9 900 Mds€
4 000 Mds€ 1 300 Mds€
Ménages Ménages
900 Mds€ 900 Mds€ 1 200 Mds€ 2 200 Mds€
Administrations publiques Emprunts des non résidents Prêts des non résidents Administrations publiques
Capacités de financement Financements Besoins de financement
des Agents Non Financiers internationaux hors titres des Agents Non Financiers
Direction des flux de financement
Source : Comptes financiers annuels provisoires - Version simplifiée -
Année 2011 – Tableaux et graphiques, Banque de France, 2012.
Analyses Capgemini Consulting.
10. Le risque du
développement
explosif du
« shadow banking »
L
e « shadow banking » est un ensemble de d’échapper aux contraintes liées à l’appel à l’épargne
mécanismes de substitution à l’intermédiation publique, et un fort effet de levier de crédit bancaire.
bancaire hors du champ de contrôle prudentiel.
On oppose ainsi un paradigme « originate to
Dans ce schéma, les banques (voire certains distribute » de fragmentation de la chaîne de valeur
intermédiaires non-banques notamment dans les au modèle « originate to hold » de l’intermédiation
pays anglo-saxons) réalisent l’origination de crédits bancaire traditionnelle. Encore peu développé en
sans en assumer le financement. Elles cèdent pour ce France, ce nouveau modèle présente l’avantage de
faire leurs créances à des Special Purpose Vehicles transférer une partie du risque d’intermédiation
(SPV) ou « conduits » de titrisation, entités non des banques vers des investisseurs avertis et
consolidées mais dont elles se portent garantes, qui consentants. Les conditions dans lesquelles il a été
se refinancent en émettant sur le marché des titres mis en œuvre aux Etats Unis (déresponsabilisation de
(Asset Backed Securities), le plus souvent à court l’originateur, manque de transparence) sont toutefois
terme, « restructurés » et « rehaussés » de façon à à l’origine directe de la crise des subprimes.
répondre à la diversité des attentes des investisseurs
en matière de rendement et de risque. Les banques Cette dérive du « shadow banking » n’a certes pas
peuvent ainsi échafauder, à leur profit ou à celui de échappé aux pouvoirs publics et aux régulateurs ;
leurs clients, des montages quasiment sans capital ces derniers ont commencé à proposer des
pour refinancer à très court terme toutes sortes règles (conservation d’un minimum de risque par
d’actifs et de créances. Leur seule contribution, lignes l’originateur, transparence sur les risques réellement
de crédit ou de liquidité – voire simples engagements transférés) de nature à éviter le renouvellement d’une
implicites de racheter les titres qui ne trouveraient telle dérive malsaine, et donc dangereuse. Mais la
pas preneur – accordées aux conduits qu’elles difficulté de l’entreprise est grande, quand on pense
sponsorisent, n’ont en effet qu’un faible impact aux problèmes d’application de règles aux banques
prudentiel, s’agissant d’engagements hors bilan. elles-mêmes, pourtant beaucoup plus aisées à
contrôler.
Des montages similaires sont mis en œuvre par
des fonds d’investissement, également à très
faible capital, qui combinent, hors de tout cadre
réglementaire, le rachat et la restructuration de
créances, la levée de ressources en cercles privés afin
10 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
11. On oppose ainsi un paradigme
« originate to distribute » de
fragmentation de la chaîne de
valeur au modèle « originate
to hold » de l’intermédiation
bancaire traditionnelle.
SHADOW BANKING
Tranches equity,
mezzanine, CDS
Part
Hedge Fund
ABCP (senior)
Rachat
de créance
Prime Cotisation Prêt
Assurance ou Marché
Fond de pension Conduit
Pooling Banque
MBS, CDO, autres Structuration
ABS (senior) Tirtrisation
Part
OPCVM
monétaire
Ligne de liquidité
É m
p ru nteu
E
t
r
pa
rgn an
Dépôt à vue Sponsor
Prêt
Dépôt à terme Banque
Garantie dépôts Liquidité
Banque
État Centrale
Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ? 11
12. un foisonnement d’initiatives
visant à répondre aux
besoins de financement
de l’économie française
Toutes ces initiatives sont autant de signes des
limites du modèle traditionnel d’intermédiation
bancaire qu’elles cherchent à compenser
P
ays traditionnellement interventionniste, doté • Le projet de Banque Publique d’Investissement (BPI)
d’un nouveau gouvernement désireux d’agir sur pour consolider en un guichet unique l’ensemble des
le financement de l’économie et notamment concours publics aux entreprises (PME et ETI) en
des PME, la France voit fleurir aujourd’hui nombre fonds propres, crédits, garanties, et subventions. La
d’initiatives innovantes venant des pouvoirs publics BPI disposerait d’une force de frappe de 40 Mds€,
qui visent à compléter les circuits de financement qui pourrait être abondée de fonds en provenance du
traditionnels jugés insuffisants. Des initiatives Livret de Développement Durable (LDD).
issues de la sphère privée vont dans le même sens.
L’ensemble de ces initiatives sont à destination
des entreprises, mais aussi des particuliers ou des
collectivités territoriales. Citons par exemple :
Le projet de Banque Publique d’Investissement
PME / ETI et acteurs de
l’économie sociale et solidaire
à partir de 2013,
la Banque Publique Fonds propres Prêts à long terme Garanties et subventions Services
d‘Investissement sera
Guichet unique
le guichet bancaire
unique de distribution ex CDC-Entreprises ex FSI ex OSEO ex Ubifrance
de financements publics Banque Publique d’Investissement
aux PME et ETI en
France Capital
État (50%) CDC (50%)
>> Le projet de Banque Publique d’Investissement (BPI) en cours de >> Une extension du rôle de la BPI aux services d’accompagnement à
mise en œuvre par les pouvoirs publics vise à répondre aux besoins l’export développés par Ubifrance est envisagée à l’avenir.
de financement des PME / ETI que ni les banques traditionnelles >> La BPI serait ainsi en mesure d’offrir par un guichet unique toute la
– grevées par le coût en capital imposé par Bâle 3 – ni les marchés panoplie des instruments.
financiers ne parviennent à satisfaire. >> La BPI devrait être initialement dotée de 40 Md€ et pourrait
>> La BPI devrait reprendre dans un cadre intégré l’ensemble des centraliser des fonds collectés par les LDD.
dispositifs publics qui contribuent aujourd’hui – en étroite >> La gouvernance de la BPI devrait faire une place importante à la
collaboration avec les banques – au financement des PME / ETI : dimension régionale tant au niveau de son conseil d’administration
• En fonds propres que de ses comités d’engagement.
• En prêts à long terme
• En garanties et subventions
12 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
13. • Les partenariats entre des assureurs et des • La constitution envisagée par les pouvoirs publics
banques, ces dernières cédant aux premiers des d’une Agence de Financement des Investissements
créances qu’elles ne souhaitent ou ne peuvent Locaux (AFIL) pour permettre aux collectivités
pas porter dans leur bilan, sauf à brider leur locales d’accéder dans des conditions économiques
développement. Les premiers accords de ce type aux marchés de dette.
ont été annoncés tant en interne des groupes de
bancassurance comme le Crédit Agricole (fonds • Le développement d’une plate-forme de crédit
commun de titrisation de créances aux collectivités peer-to-peer (crowdfunding) telle que Prêt d’Union,
locales) qu’en externe comme celui que vient de plébiscitée par des emprunteurs cherchant une
conclure AXA avec la Société Générale et le Crédit alternative aux crédits bancaires.
Agricole (fonds commun de placement finançant les
crédits aux PME/ETI originés par les deux banques). Toutes ces initiatives sont autant de signes des limites
du modèle traditionnel d’intermédiation bancaire
• L’apparition d’un nouvel opérateur privé, Isodev, qu’elles cherchent à compenser. Il est probable
qui prétend apporter aux PME/ETI un financement néanmoins qu’elles ne suffisent pas à répondre aux
en prêts participatifs, quasi-fonds propres leur besoins de financement de l’économie française.
facilitant l’obtention de crédits bancaires pour Seule une réponse coordonnée des régulateurs,
financer leurs projets. des superviseurs et des banques elles-mêmes,
recourant aux marchés financiers dans des conditions
• Une structure comme le fonds commun de de transparence et de sécurité contrôlées, pourra
placement Micado France 2018 qui a permis à des constituer une solution forte et durable.
PME non notées de placer des obligations auprès
d’investisseurs institutionnels en mutualisant leurs
besoins de financement.
Un partenariat de bancassurance
PME
CA : > 250 MEUR
Dette brute : > 150 MEUR
Un fonds commun de
Prêts accordés Origination
Décaissement et Durée : 3 à 5 ans et servicing placement permet à AXA,
portage des encours Montant : 30 à 100 M€ à la Société Générale et au
Crédit Agricole d’optimiser le
respect des règlementations
Solvency II et Bâle III
Fonds commun
80 % financement de placement 20 % financement
et risque et risque
Assureur
AXA Banque
Enveloppe totale entre SG / CA
500 M€ et 1 Md€
>> Bâle 3 impose un coût en capital et en liquidité aux banques >> Pour échapper aux problèmes posés par l’asymétrie d’information
particulièrement pénalisant pour leur activité de financement des entre le banquier et l’assureur, le montage imaginé par AXA avec deux
PME. Elles sont donc conduites à rechercher des partenaires disposant banques consiste à confier les décisions d’octroi à un fonds commun
de liquidités et prêts à financer une part des créances en en assumant de placement partagé.
le risque de crédit. >> Cet investissement permet à AXA à la fois de doper le rendement
>> En application des recommandations des régulateurs pour éviter le de son portefeuille d’actifs et de le diversifier, réduisant ainsi la
renouvellement des excès des subprime, aucune structuration n’est consommation de capital associée en application des normes Solvency
mise en œuvre et les banques conservent 20% des créances à leur bilan II.
avec les risques associés. Les banques assurent par ailleurs la gestion
des prêts jusqu’à leur échéance.
Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ? 13
14. Mettre en place
une supervision
renforcée et
pragmatique
Comment donc concilier la légitime
méfiance envers les possibles excès
de la finance avec le maintien du
rôle essentiel d’intermédiation des
banques ?
D
u côté des régulateurs, toute une panoplie Barnier, qui viennent d’être rendues publiques sans
de mesures ont été envisagées, depuis engager la Commission, confirment paradoxalement
l’accélération de la mise en œuvre des normes la force du modèle de banque universelle tout en
Bâle 3, la régulation des modes de rémunération des proposant de cantonner une large part des activités
traders ou la taxation des transactions financières, de marché : activités pour compte propre et de market
jusqu’à l’interdiction pure et simple des ventes à making.
découvert ou de l’utilisation spéculative des produits
dérivés. Tout récemment, le Gouverneur de la Banque de
France, Christian Noyer déclarait quant à lui : « Ce
Une idée récurrente consiste à cantonner dans les principe de la séparation des activités, je n’en
banques la « bonne finance », celle qui fait vivre comprends absolument pas l’intérêt ». Le gouverneur
l’économie réelle, afin de la mettre à l’abri des prône, en revanche, «une interdiction pure et simple»
turbulences de la finance spéculative ou du moins des activités spéculatives des établissements et des
exposée aux risques des marchés. « contrôles internes renforcés des risques liés aux
activités de marchés ».
Dans une version britannique, associée au nom de
l’économiste John Vickers qui en a été le porte-parole,
la banque de détail devrait être juridiquement séparée
des autres activités bancaires comme la banque
de financement et d’investissement. Très complexe
et coûteuse à mettre en œuvre pour des banques
universelles à la française, cette réforme est surtout
motivée par la disproportion prise par les activités de
banque d’investissement concentrées dans la City par
rapport à l’économie réelle du Royaume Uni.
De l’autre côté de l’Atlantique, la règle due à Paul
Volcker, ancien directeur de la FED, et intégrée au
Dodd-Frank Act, a plus simplement choisi d’interdire
aux banques de spéculer pour compte propre ou de
financer des fonds spéculatifs.
En Europe, les conclusions du groupe d’experts
présidé par Erkki Liikanen à la demande de Michel
14 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
15.
16. Le rapport Vickers de l’Indepedent Commission on Banking (UK)
Motivation Fonctionnement
>> Sécuriser le service de base bancaire : cantonner la banque des >> Séparation juridique : séparer les activités de banque des
particuliers et des PME loin des activités risquées de marché et de particuliers et PME et celles de banque d’investissement et de
financement structuré afin de protéger les dépôts des particuliers financement, même si un même holding peut détenir des banques
et des PME, ainsi que les systèmes de paiement et des entités spéculatrices
>> Protéger l’économie britannique de son secteur >> Exigences de fonds propres : le rapport Vickers propose pour la
dominant : protéger la banque de détail et l’économie britannique banque de détail des exigences de fonds propres plus élevées que
des risques induits par les poids des activités de la City Bâle III (au moins 10% des actifs pondérés)
>> Limiter l’intervention de l’Etat en cas de faillite : limiter >> Impact UK : ne serait applicable qu’à l’activité de banque de détail
l’exposition de l’Etat qui ne protégera que la partie banque de au UK donc elle impacte peu de banques d’Europe continentale
détail en cas de faillite
Statut actuel Implications
>> Statut : >> Complexité de mise en œuvre pour les banques
• Automne 2012 : Adoption de principe universelles : due à la restructuration juridique et opérationnelle,
• D’ici mai 2015 : Présentation de textes de loi détaillés à l’obligation de formaliser tous les contrats franchissant la
• 2019 : Entrée en vigueur frontière de cantonnement et à l’application de contraintes
>> Instances responsables : ministère des finances, Banque particulière à ces transactions
d’Angleterre et Financial Services Authority >> Alea moral : le cantonnement de la banque des particuliers et
PME peut encourager les banques à prendre plus des risques
dans ces activités (crédits immobiliers, prêts aux entreprises /
particuliers) car elles sont encore plus assurées de l’intervention
de l’Etat en cas de faillite
La règle Volcker du Dodd-Frank Act (USA)
Motivation Fonctionnement
>> Eviter le risque spéculatif : interdire les investissements pour >> Séparation juridique : séparer les activités de banque de celles
compte propre et les relations porteuses de risque avec les fonds de «spéculation», même si un même holding peut détenir des
spéculatifs (Hedge Funds) et les fonds de Private Equity banques et des entités spéculatrices
>> Empêcher les conflits d’intérêts : éviter que les banques >> Impact global : serait applicable à toute banque ayant une
d’investissement cumulent face à la même opportunité un rôle activité aux USA, donc elle impacterait directement la plupart des
de conseil et un rôle d’investisseur en fonds propres (notamment banques européennes
suite au scandale des CDO Abacus de Goldman Sachs sur les
subprimes)
>> Réduire la taille des banques : Paul Volcker souhaitait la limitation
de la taille des banques, mais cela n’a pas été retenu par le Congrès Implications
>> Faciliter la liquidation des banques en cessation de
paiements : préparer des plans détaillés de résolution (« living >> Réduction de la liquidité : la liquidité sur les marchés financiers
will ») qui permettent aux banques de prévoir à l’avance comment risque de diminuer à suite à la disparition du trading pour compte
leurs activités pourront être démantelées en cas de crise propre opéré par des banques
>> Difficulté de mise en pratique : la définition précise du trading
pour compte propre est difficile à faire, notamment par rapport
à la prise de risque d’un « market-maker » ou par rapport
au financement et à la couverture des risques des activités
Statut actuel
commerciales
>> Statut : mise au point décalée (la date initialement prévue du 21 >> Augmentation des frais : les frais bancaires pourraient
juillet 2012 n’a pas pu être respectée) augmenter suite à la disparition du trading pour compte propre,
>> Instances responsables : Federal Reserve, Commodity Futures considéré comme très lucratif
Trading Commission, Federal Deposit Insurance Corporation,
Office of the Comptroller of the Currency et Securities and
Exchange Commission
16 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
17. Le rapport Liikanen à la Commission Européenne (UE)
Motivation Fonctionnement
>> Compléter la réglementation existante ou en cours de >> Sécurisation de la banque de dépôts : collecte des dépôts,
finalisation : compléter les directives CRD 3 et CRD 4 issues des provision des moyens de paiement, financement de l’économie (y
recommandations du Comité de Bâle (Bâle 2,5 et 3) de la BRI compris la fourniture de produits de couverture de risques)
>> Renforcer le secteur bancaire européen : étudier l’opportunité >> Séparation juridique des activités de trading les plus
de réformes structurelles afin de renforcer la stabilité du secteur risquées : transactions pour compte propre, activité de teneur de
bancaire européen et de limiter le risque résiduel incombant aux marché, financement des fonds spéculatifs et de private equity
contribuables européens notamment à travers le sauvetage des >> Autorisation de loger dans un même groupe banque de dépôt
institutions trop grosses pour faire défaut et la garantie des dépôts et banque de trading mais application des conditions de marché
>> Base de règlementation européenne : servir de base à et des limites de concentration de risques (LE/GRR) aux
l’élaboration de nouvelles directives communautaires pour transactions internes dépôt/trading
réformer le secteur bancaire. Le rapport peut être considéré >> Mise en œuvre de mesures de redressement et de résolution des
comme le pendant européen aux travaux de Volcker et Vickers crises bancaires (selon projet de directive existant) et recours à la
dépréciation autoritaire des créances (bail in)
>> Renforcement des exigences de capital liées au trading
(coussin ou minimum indépendant du RWA)
Statut actuel >> Introductions de limites de ratios de Loan-to-value (LTV )
>> Rapport publié le 2 octobre 2012 et/ou Loan-to-income (LTI ) applicables au financement de
>> Instances responsables : Commission européenne à qui revient l’immobilier
la responsabilité de proposer un cadre réglementaire au Parlement >> Renforcement de la gouvernance des groupes bancaires
Européen et au Conseil après consultation de l’European Banking
Authority
Implications
>> Remise en cause de la banque universelle ?
Ces différentes approches partagent le souci de L’argument vaut aussi à l’intérieur de l’Europe. Des
minimiser le syndrome des banques « trop grosses règles non appliquées partout ou appliquées de
pour faire défaut » que la quasi-certitude de manière trop disparate sont des facteurs de distorsion
sauvetage par les pouvoirs publics inciterait à une de concurrence, qui risqueraient de désavantager
prise de risque excessive. Elles convergent également les banques de tel ou tel pays. De ce point de vue,
sur les solutions : obligation généralisée de formaliser les progrès de l’union bancaire européenne seront
des plans de résolution (testaments bancaires) et décisifs. Ils permettront d’aller vers une supervision
renforcement des pouvoirs des superviseurs chargés européenne des établissements bancaires. Les
de la résolution en cas de crise. moyens affectés à cette nouvelle mission seront
clés pour faire face à la complexité des situations
Quel que soit le dosage finalement retenu entre ces particulières et à la puissance des intérêts en jeu.
différents leviers destinés à protéger l’économie des C’est à ce prix qu’on pourra appliquer à bon escient
turbulences des marchés financiers, il faut souhaiter l’esprit des normes, plutôt que leur lettre, condamnée
que sera préservée la solidité dont ont fait montre à être toujours en retard d’une guerre.
les banques françaises dans les différentes crises
successives que nous venons de vivre. Trop de règles,
ou des règles trop dures, tuent les règles, qui seront
alors contournées.
Enfin, dans l’environnement concurrentiel mondial
actuel, des règles qui ne s’appliqueraient pas
également à tous les établissements seraient
difficilement acceptables. L’expérience des normes
IFRS – pourtant d’origine anglo-saxonne et dont le
caractère pro-cyclique est par ailleurs maintenant
démontré – et des normes Bâle 2, que les Etats Unis
n’ont toujours pas mises en œuvre, doit être méditée
au moment des décisions d’application de Bâle 3 en
Europe.
Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ? 17
18. Vers un nouveau
modèle pour
les banques
françaises
La mise en oeuvre d’une véritable
« transformation digitale » sera
un levier prioritaire pour répondre
à ces enjeux
D
’ ores et déjà, le nouvel environnement prudentiel a conduit des banques à évoluer en restructurant leur
portefeuille d’activités en fonction des contraintes de capital et de liquidité.
Les banques françaises COMMENCENT A S’ADAPTER au nouvel
environnement prudentiel
Réduction du bilan Recours aux dépôts
grace […] à la baisse de notre bilan […] BNP Dans l’activité de banque de détail, tous les
Paribas atteindra […] l’objectif de ratio common métiers ont contribué aux bénéfices […],
equity Tier one de 9 %, dans le respect intégral des illustrés notamment par la croissance des volumes
normes Bâle III. de dépôts […]
BNP Paribas BNP Paribas
Rapport annuel 2011 Rapport annuel 2011
L’évolution soudaine de l’environnement […] a Dans un contexte de marché difficile, le
nécessité d’accélérer certains chantiers […]. Groupe a refinancé en 2011 le renouvellement
Ainsi, le groupe entend réduire la taille de son bilan de sa dette arrivant à maturité […] grâce à un effort
[…] et ses besoins en matière de liquidité supplémentaire de collecte de dépôts
Société Générale Société Générale
Document de référence, 2012 Document de référence, 2012
Le nouveau modèle s’appuie sur une stratégie Dans un contexte de crise de […], les Caisses
visant à limiter la taille du bilan : adaptation régionales ont intensifié leurs efforts en
vers un modèle "originate to distribute" : origination matière de collecte bilancielle en développant leur
et structuration du financement […] offre de dépôts à terme
Crédit Agricole Crédit Agricole
Document de référence et rapport annuel 2011 Document de référence et rapport annuel 2011
[…] Natixis et le Groupe BPCE ont commencé à […] faisant face au défi représenté par Bâle 3
réduire les risques pondérés et à améliorer la […], le réseau axe le développement de son
gestion de la liquidité. […] la BFI s’est dotée de moyens épargne vers l’épargne bilancielle, dont les secours
[…] pour accélérer […] l’allégement de son bilan. progressent de 10 % […]
Groupe BPCE Document de référence et rapport financier annuel 2011 Groupe BPCE Document de référence et rapport financier annuel 2011
18 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
19. éVoLutIon DE La StRuCtuRE FInanCIèRE DES BanQuES FRançaISES
cumuL bnp paribas, société généraLe, crédit agricoLe et bpce
Q4 2009 Q3 2012 Objectif
Q4 2009 Q3 2012
Bâle III
Actifs Pondérés 1896 md€ 1767 md€ -129,0 md€
Ratio de
8,3 % 11,3 % +3,0 pt 6-11 %
solvabilité
Fonds propres
157,8 md€ 199,7 md€ +41,9 md€
durs
Ratio de
2,7 % 3,1 % +0,4 pt 3%
levier*
Total du bilan 5804 md€ 6540 md€ +734 md€
*Calcul de Capgemini Consulting
Sources : Financial Statements – BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole, BPCE, tenant compte des changements de réglementation pendant la période
constats anaLyse
> Réduction des actifs pondérés : en réaction aux contraintes imposées > Croissance du ratio de solvabilité : le ratio de solvabilité croît de 3,0
par Bâle 2.5, les actifs pondérés baissent de 129,0 Md€ (-6,8 %) points, qui proviennent de la réduction des actifs pondérés pour +0,6
> Augmentation des fonds propres : l’augmentation des fonds propres points et de l’augmentation des fonds propres durs pour +2,4 points
durs est principalement réalisée par la capitalisation des bénéfices > Levier croissant : le ratio de levier augmente légèrement du fait de la
> Total du bilan croissant : indiquant un développement de l’activité en croissance plus rapide des fonds propres durs (+26,6 %) que du total de
dépit de la contrainte de liquidité bilan (+12,7 %)
Au-delà de ce premier niveau d’adaptation aux crises et aux évolutions réglementaires, le modèle des banques
devra évoluer plus en profondeur. Cette transformation relèvera pour l’essentiel à nos yeux, de cinq lignes de
forces : la poursuite de la reconfiguration des métiers, l’optimisation de la consommation de ressources rares,
l’intégration de la gestion de bilan au pilotage opérationnel, la reconquête de la confiance de la clientèle, et la
refonte du modèle opérationnel.
QuEL RôLE Et QuEL moDèLE PouR LES BanQuES FRançaISES ? 19
20. Cette transformation
relèvera de cinq lignes
de forces.
Poursuite de la reconfiguration des couvrir les engagements. Ce transfert de créances
métiers vers des investisseurs avertis et consentants
devra toutefois être accompagné des précautions
Le portefeuille d’activités devra continuer à évoluer imposées, sinon par les régulateurs, du moins par les
pour alléger les activités fortement consommatrices superviseurs pour éviter les dérives qui ont contribué
de liquidité et/ou de fonds propres qui ne font pas à la crise des subprimes (conservation d’une part du
partie du cœur stratégique de la banque. Les activités risque, transparence sur les risques cédés).
de spécialistes du financement des particuliers ou
des entreprises adossées au seul marché pour leur Intégration de la gestion de bilan au
refinancement en feront notamment les frais : elles pilotage opérationnel
seront confrontées à l’alternative d’élargir leur offre à
la collecte d’épargne ou de disparaître. La gestion du bilan devra cesser d’être une affaire
de spécialistes d’ALM pour irriguer l’ensemble
La place de la banque d’investissement dans des fonctions de pilotage opérationnel et de
les groupes bancaires français sera quant à elle marketing, auxquelles seront imposées des limites
largement déterminée par l’issue des négociations et des refacturations internes des consommations
entre le Conseil, le Parlement européen et la BCE de liquidité. Elle devra s’appuyer sur des outils
sur le cadre légal de ces activités. La gouvernance sophistiqués, mettant en œuvre une modélisation
européenne n’est toutefois pas en mesure de complexe appliquée à des données détaillées à la
restreindre unilatéralement les activités de marché maille des contrats élémentaires, et capables de
qui sont globales. Les entreprises françaises auront mesurer et de projeter finement l’impact sur les
donc toujours accès à ce type d’intermédiation. risques structurels de tel scénario budgétaire, de tel
Un abandon forcé de ces activités par les banques nouveau produit ou de la cession de tel portefeuille.
européennes aurait donc pour conséquence de
renforcer un peu plus la domination des banques Ce déploiement nécessitera de conduire un
d’investissement américaines. changement profond dans les modes de gouvernance
des lignes métier et filiales par le niveau groupe
Optimisation de la consommation de ainsi que dans le pilotage opérationnel des activités.
ressources rares La complexité déjà inhérente à l’intégration de la
contrainte de capital au pilotage bancaire va se
L’optimisation de la liquidité conduira à développer la trouver ainsi fortement accrue.
collecte de dépôts bancaires au détriment d’autres
offres d’épargne hors bilan. Elle privilégiera les
dépôts réputés stables du fait de leurs clauses
contractuelles (pénalités de retraits anticipés, dépôts
à préavis de retrait,…) ou du fait de leur usage (dépôts
associés à une gestion de flux : cash management,
conservation de titres,…).
L’optimisation du capital rendra de son côté
incontournable le recours au modèle « originate to
distribute » pour libérer la capacité de prêt contrainte
par le niveau de fonds propres disponibles pour
20 Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ?
21. Reconquête de la confiance de la Refonte du modèle opérationnel
clientèle
La poursuite des efforts déjà engagés pour réduire
La dégradation de l’image des banques dans l’esprit la base de coûts sans dégrader la qualité de service
du public s’est traduite par une fragilisation de la nécessitera des ruptures structurantes dans le
position de tiers de confiance qui est au cœur du management des activités. Le prérequis pour aller
métier bancaire. La reconquête de la confiance est au-delà de simples améliorations à la marge est
donc un point de passage obligé de tout projet de de disposer de processus dématérialisés conçus
développement. Elle passe, à nos yeux, par la réponse et pilotés de bout en bout à travers l’ensemble des
à trois exigences de la clientèle. canaux que ce soit en avant-vente ou en après-vente.
• Une exigence de transparence que les banques C’est la condition pour pouvoir tirer tous les avantages
doivent s’approprier et qui doit se traduire par une de décisions de concentration et de délocalisation
refondation du rôle des forces commerciales. Sur d’activités support ou de back-office, le moindre des
un marché mature, a fortiori dans un contexte de avantages n’étant pas la liberté gagnée de repenser le
digitalisation des échanges, les banques devront format des points de vente.
tisser ou retisser des relations personnalisées et
de confiance avec leurs clients. Cela suppose un Les nouvelles technologies digitales facilitent
investissement important dans les compétences et grandement la dimension technique de cette
les outils permettant de faire face tout à la fois à la optimisation du modèle opérationnel et peuvent
diversité des clients, à la technicité des produits, à également contribuer à une transformation
l’omniprésence des interactions à distance et à la plus large de la relation client, voire du modèle
complexité des règles et procédures imposées par économique. Mais cette transformation nécessite un
la banque et ses superviseurs. investissement très important dans la reconfiguration
des rôles et responsabilités au sein de la banque et
• Une exigence de juste prix. Le client accepte de
un effort de conduite du changement soutenu dans la
payer un service quand il en connaît et reconnaît
durée.
la valeur. Les excès des packages à prendre ou à
laisser devront faire place à une offre configurable
sur mesure pour répondre aux besoins de chaque
client, et avec une tarification qui l’incite à élargir
la part de ses besoins bancaires traités avec son
partenaire financier privilégié.
• Une exigence de qualité de service qui est à la
mesure de l’omniprésence des services bancaires,
notamment de paiement, dans la vie des clients.
Elle s’attache particulièrement aux deux points
de la fiabilité et du délai. Mais elle embrasse
également une attente de disponibilité dans le
temps et dans l’espace rendue banale par la
diffusion dans le grand public des smart phones,
tablettes et ordinateurs portables, à des prix
accessibles et avec une ergonomie telle que tous
savent très vite s’en servir.
Quel rôle et quel modèle pour les banques françaises ? 21
23. Remerciement :
Ce point de vue a bénéficié de la contribution de Patrick Werner
Contacts :
Jean Coumaros Jacques Richer
Senior Vice President Directeur
jean.coumaros@capgemini.com jacques.richer@capgemini.com