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L’association Bourgogne Balkans Express         The Bourgone Balkans Express Association,
avec le soutien du 1er cycle européen de       with the support of the European undergradu-
  Dijon, Europe centrale et orientale, de        ate cycle, Central and Eastern Europe, of
  Sciences Po Paris a l’honneur de vous        Sciences Po Paris in Dijon, has the honour to
présenter les actes du colloque organisé          present the written contributions of the
         le 21 avril 2009 à Dijon :             workshop held on 21 April 2009, in Dijon :




           « Les perspectives de stabilisation et d’intégration
                           des Balkans occidentaux »
                                            •••
               « Stabilisation and Integration Perspectives
                            for the Western Balkans »




         L’association Bourgogne Balkans Express (loi 1901) a été créée en 2006 à l’ini-
 tiative de deux étudiants du cycle Europe Centrale et Orientale de Sciences Po Paris à
 Dijon, de nationalité albanaise et serbe. L’objectif principal de ce colloque sur les Bal-
 kans occidentaux était de réunir praticiens et chercheurs sur des thématiques et orien-
 tations liée à l’intégration euro-atlantique des Balkans occidentaux qui prennent toute
 leur importance dans le contexte d’aujourd’hui.
         Le colloque s’est tenu le 21 avril 2009 dans l’enceinte du cycle Est européen de
 Sciences Po Paris à Dijon. Il s’agissait d’un véritable échange d’idées, d’informations et
 de visions politiques sur l’avenir de la région des Balkans, en vue de discuter des solu-
 tions concrètes, susceptibles de répondre aux enjeux et défis de cette zone.


         The Bourgogne Balkans Express Association (law 1901) was created at the initia-
 tive of two students of Albanian and Serbian nationality of the Central and Eastern Euro-
 pean campus of Sciences Po Paris in Dijon. The main objective of this workshop on the
 Western Balkans was to reunite practitioners and researchers to debate on On questions
 pertaining to the Euro-Atlantic integration of the region, which are gaining particular im-
 portance today .
         The workshop was held on 21 April 2009 at the Central and Eastern European
 campus of Sciences Po Paris in Dijon. It consisted in a real exchange of ideas, informa-
 tion and political views on the future of Balkans region, in order to discuss concrete so-
 lutions that might respond to the challenges that this region faces nowadays.
Imprimé à Paris, France, juillet 2009
Droits d’auteur: Association Bourgogne Balkans Express (loi 1901)
1er Cycle de Sciences Po Paris, Europe centrale et orientale
14, Av. Victor Hugo, 21000 Dijon

Reproduction permise sous condition de citer les auteurs des textes ci-joints ainsi que la publication.
L’association Bourgogne Balkans Express exprime ses remerciements les plus sincères
à l’ensemble des chercheurs et praticiens ayant participé au colloque:


      Hido Biscevic ; Ana Maria Boromisa ; Joseph Brinker ; Arnaud Danjean ;
        Srdjan Dizdarevic ; Mary-Ann Hennessey ; Katrin Hett ; Tim Judah ;
         Karolina Kottova ; Jaromír Levíček ; Alexandre Lévy ; Pierre Mirel ;
    Tanja Miscevic ; Alistar Nolan ; Luan Rama ; Jacques Rupnik ; Piotr Smolar ;
                Thérèse Sobieski ; Veton Surroi ; Jovan Teokarevic ;
                     Nebojsa Vukadinovic ; Daliborka Uljarevic.




                   et aux organismes ayant coparrainé l’événement:


        Commission Européenne, Organisation du Traité de l'Atlantique Nord,
                     Conseil Régional Bourgogne, Ville de Dijon,
                      Arte.tv, Courrier International, Le Monde,
      Courrier des Balkans, Europe Direct Bourgogne, Association Jean Monnet,
Sommaire / Contents :




    Préface des actes du colloque
         - L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
               Pierre Mirel …………………………………………………………………….. p.8



    Tables Rondes / Round Tables :

         - EU policies in the Balkans: the challenges of consistency
               Jacques Rupnik     …………………………………………………………… p.16

         - Normalization in four steps
              Veton Surroi        …………………………………………………………… p.19

         - Are there any alternatives to the European perspective of the Balkans
         and the EU Enlargement?
                Tanja Miscevic   …………………………………………………………… p.21

         - Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
         obstacles structurels à la perspective européenne?
                Luan Rama          …………………………………………………………… p.24

         - Croatia: good or bad example?
               Ana-Maria Boromisa ………………………………………………………… p.30

         - NATO-EU as a strategic partnership: toward a global cooperation
          in the stabilisation of the region
                Jovan Teokarevic …………………………………………………………… p.33

         - Can civil society succeed in emancipating itself from historical,
         sociological and ideological burdens?
               Srdjan Dizdarevic …………………………………………………………… p.36



    Contributions externes / External Contributions :

         - Integration, stability and blackmail
                Slobodan Casule …………………………………………………..……                  p.37

    Bourgogne Balkans Express               …………………………..……               p.40
L’Union européenne et les Balkans occidentaux :
       enjeux et perspectives
       Pierre Mirel
       Directeur. Relations avec Albanie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Serbie, Kosovo.
       DG Élargissement, Commission Européenne (Bruxelles)




        Madame la vice-présidente du Conseil ré-                      Frontières acceptées, droits humains respectés,
gional, merci de nous accueillir ce matin. Merci                     Etat de droit établi, marché unique étendu, crois-
pour vos paroles de bienvenue et, si vous me                         sance économique spectaculaire, manne finan-
permettez, bravo pour l'engagement européen                          cière de rattrapage économique, on ne peut nier
fort de la région Bourgogne.                                         la réussite de ce qui restera comme l'un des ac-
                                                                     complissements majeurs de la politique exté-
Mesdames et messieurs, chers collègues, permet-                      rieure commune.
tez-moi aussi de féliciter Sciences Po Dijon et
l'association Bourgogne Balkans Express pour                         Faire de la politique fiction est toujours un exer-
cette conférence, la seconde de ce type. Dijon va                    cice aléatoire et vain. Mais que l'on imagine un
ainsi s'imposer comme un rendez-vous incontour-                      instant ce qui serait arrivé en Europe centrale
nable dans le débat sur l'une des grandes politi-                    sans cette réponse positive et dynamique de
ques de l'Union européenne, celle de l'élargisse-                    l'Union européenne ! Quelles politiques aventu-
ment.                                                                reuses auraient pu conduire certains leaders! A
                                                                     quelles dérives aurait-on pu assister! On songe
C'est donc un grand plaisir de revenir à Dijon,                      immédiatement, comme en écho, aux conséquen-
d'autant que nous célébrons cette année un dou-                      ces dramatiques de l'absence d'une telle réponse,
ble anniversaire historique. Il y a 20 ans le Mur                    d'un engagement semblable de l'Union euro-
de Berlin était abattu, ouvrant ainsi la voie à l'ou-                péenne, avec les Balkans occidentaux.
verture du "Rideau de fer" qui coupait l'Europe en
deux depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.                    Ni la crise économique actuelle (hélas supportée
                                                                     par tous), ni la résurgence ici ou là de relents na-
         er                                     ème
Et le 1       mai, nous célébrerons le 5              anniver-       tionalistes ne peuvent atténuer le réel succès de
saire de l'élargissement de l'Union européenne à                     ce qui restera, j'en suis convaincu, comme l'une
l'Europe centrale, qui acheva la réunification                       des grandes réalisations de la construction euro-
d'une grande partie du continent européen.                           péenne depuis sa création.


Double anniversaire, en effet, puisque le 5ème                       Le pouvoir de transformation de l'UE et de sa
élargissement fut la réponse européenne à la                         conditionnalité, les fameux critères de Copenha-
chute du Mur de Berlin. Un choix historique, qui                     gue, le "soft power" comme on le désigne parfois,
renvoyait aux valeurs fondamentales sur lesquel-                     a réussi en dépit des obstacles et des contraintes.
les le projet Monet-Schuman s'était construit: les
valeurs de paix, démocratie et solidarité.                           Mais alors, si cet élargissement a si bien réussi,
                                                                     d'où vient aujourd'hui ce sentiment diffus qu'il ne
     ème
Ce 5       élargissement a sans conteste prouvé la                   peut être reproduit à l'identique avec les Balkans
capacité du processus d'adhésion à transformer                       occidentaux ? Pourquoi cette impression de frilo-
les pays candidats en démocraties, dotées d'éco-                     sité du côté, sinon de l'Union européenne, tout au
nomies de marché et en mesure de rejoindre les                       moins de certains de ses membres et, assuré-
15 pour faire face ensemble aux défis communs.                       ment, d'une grande partie de son opinion publi-
                                                                     que ?
                * Discours tenu lors de la conférence d’ouverture du colloque auprès du Conseil Régional de Bourgogne
    8
L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
                                                   Pierre Mirel




Une telle analyse nous occuperait tout ce jour. Je      Dans le même temps, et face à ce processus
me limiterai ici à trois observations. Tout d'abord,    d'élargissement, quelle image les Balkans occi-
si les 'politiques' se plaisent aujourd'hui à recon-    dentaux renvoient-ils aux citoyens européens ?
naître le succès du 5ème élargissement, leur com-       Assurément celle d'une terre de conflits, où cor-
munication, au niveau national, n'a pas toujours        ruption, trafics et crime organisé continuent.
été, loin s'en faut, à la hauteur des enjeux et n'a
pas réussi, dans nombre d'Etats membres, à po-          Je ne grossis pas l'image: il suffit de lire la
pulariser l'idée que c'était la paix et la sécurité     presse, qui en fait même parfois sa "une". Il y a
qui étaient en jeu. Nous en payons aujourd'hui le       sans conteste un fort déficit d'image.
prix avec une opinion publique encore partagée
sur les mérites de l'élargissement.                     Pourtant, ce serait oublier les progrès accomplis
                                                        par tous les pays de la région. C'est la Croatie qui
D'autant plus partagée, et c'est ma seconde ob-         est engagée dans le processus "vertueux" de l'ad-
servation, que la crise financière a des consé-         hésion où chaque pas positif détermine le sui-
quences économiques et sociales dramatiques.            vant. Et, malgré les difficultés, le pays progresse.
                                                        Ici encore le "soft power" de l'Union européenne
La crise et son cortège de licenciements, où l'on a     réussit à entraîner des changements positifs.
beau jeu d'incriminer l'autre, qu'il soit le nouvel
Etat membre où certaines entreprises se délocali-       C'est l'Ancienne République Yougoslave de Macé-
sent, ou bien les travailleurs étrangers comme on       doine qui vient de tenir des élections qui, contrai-
l'a vu récemment en Irlande et au Royaume Uni.          rement aux précédentes, ont été régulières et
La crise et la tentation du repli sur soi.              transparentes. Lorsque l'on connaît le poids que
                                                        l'Union européenne a mis dans la balance, nul
En ces temps difficiles, les tribuns populistes ont     doute que ce succès lui est aussi imputable.
beau jeu de surfer sur la vague des peurs et des
drames économiques locaux pour flatter la fibre         C'est aussi l'accord de Prud en Bosnie Herzégo-
sociale et identitaire, en identifiant toujours l'Au-   vine, par lequel les leaders de trois grandes for-
tre comme le bouc émissaire, et en l'occurrence         mations politiques se sont engagés à travailler
'Bruxelles' comme le responsable de tous les            pour des solutions communes aux conditions po-
maux.                                                   sées pour la fermeture du Bureau du Haut Repré-
                                                        sentant des Nations Unies. C'est bien là un signe
Dernière observation, la panne institutionnelle:        manifeste que lorsque la volonté existe, les solu-
l'absence d'un nouveau traité, le Traité de Lis-        tions peuvent être inventées. Or, là encore, c'est
bonne, qui devrait assurer un meilleur fonction-        la pression internationale qui a conduit à cette
nement à une Europe élargie à 27. Entre égoïsme         avancée.
national et utopie altermondialiste, ceci montre,
hélas, que le projet européen n'est jamais ferme-       C'est également la Serbie qui a transféré à La
ment acquis. Alors qu'à l'évidence c'est de plus        Haye 44 des 46 inculpés par le TPIY, qui déploie
d'Europe dont l'Union a besoin.                         des efforts remarqués pour coopérer pleinement
                                                        avec le tribunal, et qui a décidé d'assumer à elle
D'où la position de certains leaders européens,         seule les obligations liées à l'Accord de Stabilisa-
face à une nouvelle vague d'élargissement, alors        tion et d'Association en mettant en œuvre, unila-
que se profilent les élections au Parlement euro-       téralement, l'Accord intérimaire.
péen, des élections nationales importantes dans
certains Etats membres et la fin du processus de        C'et aussi le Monténégro qui a progressé suffi-
ratification du Traité de Lisbonne. Ces préoccupa-      samment sur le chemin européen pour que le
tions sont d'autant plus fortes que mettre en or-       Conseil, dans quelques jours, demande à la Com-
dre la maison "Europe" est en soi un objectif fort      mission de préparer son avis, conformément au
louable pour y accueillir de nouveaux invités.          traité.
                                                                                                          9
L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
                                                    Pierre Mirel



C'est encore l'Albanie, qui malgré le passé de dic-       L'image qui nous est renvoyée est également
tature, l'une des plus terribles jamais subies par        celle d'une Serbie qui peine à tourner la page des
un pays, se transforme progressivement et s'ap-           guerres récentes. Loin de moi l'idée de sous-
prête, elle aussi, à déposer sa candidature à l'ad-       estimer les efforts accomplis par les autorités ser-
hésion à l'Union européenne.                              bes vers la pleine coopération avec le TPIY.


Sans oublier le Kosovo où, contrairement aux              Mais lorsque des décisions du TPIY sont contes-
prédictions de nombreux oiseaux de mauvaise               tées publiquement (ce qui n'est hélas pas unique-
augure, la situation post-déclaration d'indépen-          ment le case de la Serbie), lorsque des partis po-
dance est stable, grâce en particulier à la com-          litiques continuent à proclamer "héros" ceux que
munauté internationale, et notamment à l'enga-            le tribunal recherche, lorsque des ONG qui s'ef-
gement fort et déterminé de l'Union européenne.           forcent de rechercher la vérité et de la dire sont
                                                          mises en accusation par certains groupes, force
Les progrès sont donc réels et tangibles. Ils ne          est de constater que l'on est loin des valeurs de
sont pourtant pas à la hauteur des défis. Ne nous         réconciliation qui ont fondé le projet européen.
voilons pas la face. Les conflits bilatéraux sont
légion entre les pays des Balkans occidentaux:            Nous voyons aussi l'Ancienne République yougo-
conflits frontaliers, retour des réfugiés et des per-     slave   de   Macédoine   empêchée     de    rejoindre
sonnes   déplacées,     double   nationalité   et   ses   l'OTAN pour la question du nom et qui adopte
conséquences. On est encore bien loin du "bon             elle-même une attitude parfois conflictuelle.
voisinage" et de la coopération régionale prônés
par le Processus de Stabilisation et d'Association,       Une Croatie ralentie dans son processus européen
que le Sommet de Zagreb a consacré en 2000, il            non seulement par une querelle bilatérale, avec
y a neuf ans déjà.                                        un Etat membre, mais aussi par ses propres diffi-
                                                          cultés à tout faire pour tourner la page.
La récente visite du Premier ministre Sanader à
Belgrade et l'annonce d'une solution au litige            Autre élément qui pèse sur les relations, la cor-
frontalier entre la Croatie et le Monténégro sont         ruption et le crime organisé. En dépit des progrès
toutefois, il faut l'espérer, les prémisses d'un          réels accomplis, les mesures prises jusqu'alors
mouvement que l'on espère ample et capable                sont loin de répondre aux défis que pose la puis-
d'apporter des réponses aux différends existant.          sance des forces occultes qui sapent l'établisse-
                                                          ment d'un Etat de droit. Le déficit d'image qui
D'autre part, la "volonté de vivre ensemble" qui          s'ensuit a un impact déplorable sur l'opinion pu-
caractérise tout Etat tarde à se manifester dans          blique européenne.
certains pays, notamment en Bosnie Herzégo-
vine, en plain repli identitaire, et qui a tendance à     Nous trouvons ainsi, d'un côté, une Union euro-
rendre la communauté internationale responsable           péenne avec certains Etats membres plutôt fri-
de sa propre incapacité à inventer un modèle pro-         leux et, de l'autre, des pays engagés dans les
pre pour faire cohabiter ses trois peuples consti-        réformes mais qui n'adoptent pas les mesures à
tuant.                                                    la hauteur des défis historiques que leur situation
                                                          et que le processus européen exigent.
N'est-ce pas là le paradoxe de l'adhésion ? Des
pays qui, en devenant membres de l'UE, décide-            C'est bien là une différence majeure avec le 5ème
ront librement de mettre en commun une part de            élargissement. Les pays d'Europe centrale ont, au
leur souveraineté et pour lesquelles les frontières       contraire, fait montre d'un extraordinaire consen-
vont s'estomper derrière le marché unique et l'es-        sus national envers l'adhésion et sa conditionnali-
pace Schengen, et qui maintiennent des attitudes          té. On ne le retrouve pas avec la même force
plus ethniques ou nationales que régionales et            dans les Balkans occidentaux.
européennes.


    10
L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
                                                    Pierre Mirel



Certes, la plupart des dirigeants politiques s'en-      contraintes auxquelles elle fait face.
gagent dans les mêmes termes. Mais leurs déci-
sions ne reflètent hélas pas toujours les promes-       C'est le strict respect du nouveau "consensus sur
ses faites lors des rencontres européennes. Les         l'élargissement" de décembre 2006 que le Conseil
mesures prises ne sont pas à la hauteur des en-         va suivre: respect des engagements pris, stricte
jeux. Comme si l'enveloppe nationale ou ethnique        application de la conditionnalité, meilleure com-
prévalait rapidement sur l'engagement européen.         munication auprès de l'opinion publique.


Comment pourrait-il en être autrement alors             C'est également ce qui a animé les Etats mem-
qu'un récent sondage Gallup montre que les ci-          bres en adoptant les accords de facilitation des
toyens accordent plus de prix à leur appartenance       visas. Bien sûr, ces derniers ne répondent pas
ethnique ou religieuse qu'à leur citoyenneté ?          suffisamment aux attentes des citoyens. C'est
Comme le notait Bronislaw Geremek, "il est plus         pourquoi nous sommes engagés dans un dialogue
facile d'unir des économies et des administrations      sur la libéralisation des visas, au terme duquel les
que d'unir des mémoires".                               Etats qui satisferont aux conditions des feuilles de
                                                        route (road maps) verront l'obligation de visas
C'est d'abord aux élites politiques de dépasser         levée. Et nous sommes confiants, comme l'a ré-
leurs clivages et de mettre leurs actes en adéqua-      cemment déclaré le Vice Président Barrot, qu'une
tion avec leurs promesses. C'est de leaders cou-        telle décision positive pourrait être prise pour cer-
rageux dont la région a besoin, capables de tour-       tains pays en 2009.
ner la page en engageant les changements qui
s'imposent.                                             C'est dans cet esprit aussi que l'Union euro-
                                                        péenne se prépare à un engagement plus fort en
C'est aussi à la société civile, à sa communauté        Bosnie-Herzégovine dès lors que les conditions
d'affaires et à ses ONG, de s'engager plus résolu-      seront remplies pour que le Bureau du Haut re-
ment encore qu'elles ne l'ont fait jusqu'alors pour     présentant des Nations Unies soit fermé.
confronter les leaders politiques à leurs propres
engagements et pousser à des réformes qui rap-          C'est dans cet esprit enfin que l'Union apporte
procheront les pays de l'objectif européen.             son appui aux Balkans occidentaux face à la crise
                                                        économique qui va les frapper, plus qu'ils ne le
Pourtant, en dépit des difficultés et des contrain-     pensent d'ailleurs eux-mêmes aujourd'hui.
tes que l'Union européenne elle-même connaît et
que j'ai évoquées précédemment, le Conseil euro-        L'Union européenne a, en effet, engagé une aide
péen vient de réaffirmer la "perspective euro-          de € 150 millions avec les Institutions financières
péenne" des Balkans occidentaux. Leitmotiv fa-          Internationales qui va permettre de lever par cel-
cile, direz-vous ?                                      les-ci quelque € 600 millions de prêts, notam-
                                                        ment en faveur des PME et des infrastructures.
Assurément non, si l'on garde à l'esprit comment        De plus, la BEI et la BERD, en particulier, vont
fonctionne le "système européen": les conclusions       lever quelque € 5,5 milliards pour les Balkans
du Conseil engagent l'Union et il n'est pas             occidentaux.
d'exemple qu'elles n'aient été suivies de décisions
positives lorsque les conditions étaient réunies.       Enfin, la Commission s'apprête à engager € 100
                                                        millions en dons sur son programme IPA comme
A preuve, le fait que, dans quelques jours, le          soutien budgétaire à la Serbie dans cette période
Conseil demandera à la Commission de préparer           difficile pour le pays, à la suite de son accord
son avis sur la candidature du Monténégro. Et,          avec le FMI. Et elle est prête à considérer des
comme le Commissaire Rehn l'a déclaré: "le mo-          opérations similaires avec d'autres pays si les
ment n'est pas venu pour l'Union européenne de          conditions sont remplies.
prendre une année sabbatique", en dépit des


                                                                                                          11
L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
                                                   Pierre Mirel



Pour tenter de répondre à l'une des questions de       D'aucuns disent aussi qu'une stratégie spécifique
cette conférence: "la perspective européenne dé-       devrait être inventée pour les Balkans occiden-
pend-elle davantage des problèmes internes à           taux. Si l'on entend par là modifier la condition-
l'Union européenne que des progrès des pays            nalité, alors non, la stratégie qui a réussi avec le
eux-mêmes?", je dirais qu'elle dépend bien évi-        5ème élargissement ne doit pas être adaptée.
demment des deux.
                                                       Par contre, si l'on entend par là un engagement
Mais en ajoutant aussitôt qu'elle dépend d'abord       plus fort de l'Union, alors oui, Commission et
et avant tout des progrès que les pays peuvent         Conseil doivent s'engager davantage avec les
mettre en avant. Des signes tangibles doivent          Présidences successives. C'est précisément ce
être donnés aux Etats membres que la perspec-          que l'Union européenne fait au Kosovo et se pré-
tive européenne prévaut, qu'un réel consensus          pare à faire en Bosnie Herzégovine. Comme c'est
national peut conduire à des mesures fortes qui        le Commissaire Rehn qui s'engage dans une mé-
feront progresser les pays sur leur voie euro-         diation entre la Slovénie et la Croatie.
péenne.
                                                       La tentation peut être grande pour certains pays
En quelque sorte: "aide-toi, l'Europe t'aidera". Le    de clamer que le processus n'est ralenti que
 ème
5      élargissement est, ici encore, la preuve vi-    parce que l'Union européenne n'est pas disposée
vante que l'Union honore ses engagements lors-         à les accueillir. Certains pays candidats y avaient
que les pays tiennent leurs promesses.                 déjà succombé au milieu des années 90. C'est
                                                       toujours un faux fuyant qui ne trompe personne,
D'aucuns disent parfois que la conditionnalité est     généralement à consommation intérieure et le
appliquée de façon trop stricte aux Balkans occi-      plus souvent destiné à masquer l'absence de ré-
dentaux. L'Union a pourtant montré qu'elle savait      formes internes.
prendre en compte les facteurs politiques internes
lorsque la situation l'exigeait.                       Il n'y a pas d'alternative à l'adhésion à l'Union
                                                       européenne pour les Balkans occidentaux. Ils
J'en veux pour preuve la signature des Accords         sont européens, par leur géographie, leur histoire
d'Association et de Stabilisation avec la Bosnie-      et leur culture. Ils appartiennent à l'Europe. Ils
Herzégovine et avec la Serbie dans les conditions      deviendront membres de l'Union européenne par
que l'on sait. Recherche du consensus et sens du       leur détermination à respecter ses valeurs et à
compromis sont aussi des principes cardinaux de        remplir les conditions à leur adhésion.
la construction européenne.
                                                       L'Union européenne s'y est fermement engagée.
Et l'on sait bien que la Commission européenne         Elle les accueillera comme elle l'a fait avec les 12
continue de plaider pour que l'Accord intérimaire      en 2004 et 2007. Aux pays de tenir leurs promes-
avec la Serbie soit mis en œuvre maintenant.           ses. L'Union européenne tiendra la sienne. C'est
Mais dans le processus conduisant à l'adhésion,        notre chantier d'avenir.
chaque étape requiert un accord unanime des 27.
Cette règle de base ne devrait jamais être ou-
bliée.




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L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
                               Pierre Mirel




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Tables Rondes / Round Tables




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L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives
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                                                                                            Modérateur / Moderator:



                                 La perspective européenne /
                                                                            Alexandre Levy, Journalist « Courrier International »
Table Ronde / Round Table 1 :

                                 The European perspective
                                                                                                 Participants :
                                                                           Jacques RUPNIK, CERI researcher, Sciences Po Paris
                                                                   Karolina KOTTOVA, Director of the Department for the Coordination
                                                                              of EU Affairs at the Czech Government’s Office
                                                                                  Mary-Ann HENNESSEY, Political Adviser,
                                                                         DG of Democracy and Political Affairs, Council of Europe
                                                                              Pierre MIREL, Director, Relations with Albania,
                                                                        Bosnia and Herzegovina, Montenegro, Serbia and Kosovo
                                                                                 (DG Enlargement), European Commission
                                                                                     Tanja MISCEVIC, Former Director
                                                                                  of the Serbian Office for EU Integration
                                                                           Veton SURROI, Former leader of ORA party, Kosovo
                                 Minorités et nationalismes /




                                                                                           Modérateur / Moderator :
                                 Minorities and nationalisms
Table Ronde / Round Table 2 :




                                                                                  Piotr SMOLAR, Journalist, « Le Monde »

                                                                                                 Participants :
                                                                              Ana Maria BOROMISA, University of Zagreb,
                                                                      Department of International Relations, Economics and Politics
                                                                      Jaromír LEVÍČEK, South and South East Europe Department,
                                                                                     Czech Ministry of Foreign Affairs
                                                                                Jovan TEOKAREVIC, Belgrade University,
                                                                                       Faculty of Political Science
                                                                              Katrin HETT, NATO Officer, Western Balkans,
                                                                                        Public Diplomacy Division
                                                                       Luan RAMA, Writer, Former Albanian Ambassador to France




                                                                                           Modérateur / Moderator :
                                                                                  Tim JUDAH , Journalist, “The Economist”
 Table Ronde / Round Table 3 :




                                                                                                 Participants :
                                                                                   Alistar NOLAN, Principal Administrator,
                                                                           « Investment Compact for South East Europe » OECD
                                 Valeurs / Values




                                                                       Arnaud DANJEAN, European Deputy, Specialist of the Balkans,
                                                                                 Daliborka ULJAREVIC, Executive Director,
                                                                                « Centre for Civic Education », Montenegro
                                                                   Hido Biscevic, Secretary General of the Regional Co-operation Council
                                                                 Joseph BRINKER, Head of Political Affairs for the OSCE Mission in Kosovo
                                                                         Nebojsa VUKADINOVIC, CERI researcher, SciencesPo Paris
                                                                Srdjan DIZDAREVIC, President of the Helsinki Committee for Human Rights
                                                                  in Bosnia and Herzegovina and Vice-President of the Helsinki Federation
                                                                                Thérèse SOBIESKI, Head of Unity - Serbia,
                                                                                  DG Enlargement, European Commission




                                                                                                                                            15
EU policies in the Balkans:
    the challenges of consistency
    Jacques Rupnik
    Research Director at the Centre d’Études et de Recherches Internationales /
    Sciences Po Paris (Paris)




        During and in the immediate aftermath of      condition to a successful integration to the EU.
the wars of Yugoslav dissolution the European         There has been in recent years a growing Europe-
Union was often criticized for the inconsistencies    anization of the international presence in the Bal-
of its security policies and for the latent tension   kans while US priorities shifted outside Europe
between the emphasis on postwar regional coop-        (from Iraq and Iran to Afghanistan and Pakistan).
eration (the Stability Pact) and the priority given   However, the US has, with vice-president Biden’s
to the merits of individual countries on which the    visit to the region, recently shown signs of con-
prospect of EU enlargement were to be assessed.       tinuing re-engagement which is also seen as cru-
Today, the overall thrust of the EU’s Balkans pol-    cial by several actors in the region (Bosniaks,
icy appears more focused and more consistent:         Kosovars, Albanians and Croats). There are some
we have moved from an agenda dominated by             transatlantic differences concerning the assess-
security issues related to the dissolution of Yugo-   ment of the stability of the region and particularly
slavia, to an agenda focused on the perspective       over Bosnia (Holbrooke) with serious implica-
on the Western Balkans’ accession to the EU. The      tions: keep the OHR or not? having a US “special
formal political commitment of all EU members is      envoy”? Should the EU encourage a continuing
there since the Saloniki summit in 2003 and Kos-      US engagement in the Balkans or consider its
ovo’s independence last year was presented as         scaling down as consistent with the process of
the turning point between the final stage post-       European integration seen as “the only game in
Yugoslav fragmentation and the region’s integra-      town”? Have we really moved from security-
tion process into the EU. The coherence of the EU     driven containment to politically driven integra-
approach to the region was found at last: The         tion?
framework was set, the verbal commitments of
the political elites in the region were clear         Russia played no part in Central Europe’s acces-
enough, the policy tools were supposedly familiar     sion to the EU, but it has a significant nuisance
to all since the previous wave of Eastern enlarge-    capacity in a number of countries in the Balkans,
ment. What was the difference between Central         most obviously through energy supply and the
Europe and the Balkans? Ten years. There are,         Kosovo question. Serbia now tends to be consid-
however, a number of reasons why this reassur-        ered in Brussels as pivotal to the region and its
ing presentation (as well as the coherence of EU      current government as the most favorable to the
enlargement policies) should be questioned.           EU in two decades. Yet it has made a deal with
                                                      Russia on both above-mentioned issues (giving
1. The EU and other major international ac-           Moscow a stake in the energy sector while relying
tors.                                                 on its backing in the UN over Kosovo). The con-
                                                      sistency of the EU position on Kosovo and the
The US-led NATO enlargement toward Central            “frozen conflicts” in the Caucasus has been ques-
Europe preceded EU’s enlargement and it seems         tioned by Russia. To say that these are self-
to be the pattern again in the Western Balkans        serving arguments does not dispense with ad-
with the recent accession of Croatia and Albania      dressing the tension between the legitimacy of
to the Atlantic Alliance. The transatlantic bond      the Kosovo independence process and its interna-
and the emphasis on security are seen as a pre-       tional legality.


    16
EU Policies in the Balkans: the challenges of consistency
                                                     Jacques Rupnik



Turkey opened enlargement negotiations with                  a direct stake in the region’s stability and acces-
the EU before the countries of the Western Bal-              sion prospect (Slovenia, Bulgaria, Romania). That
kans which, from their point of view, was far from           proximity and involvement of member states can
obvious. The consistency question for the EU’s               be a powerful vector of EU influence in the region.
future enlargement approach could be summed                  But it can also become an impediment. Greece’s
up as follows: do you aim, for the sake of                   unresolved conflict with Skopje over the name of
‘geographic    coherence’,    for   a   ‘post-ottoman’       the Macedonian state has blocked the latter’s
enlargement to the South East? Or should you                 NATO accession which was supported by all other
not, for the sake of political plausibility (i.e. if you     EU members. Croatia’s difficulty or reluctance to
are serious about the Western Balkans in the EU)             settle the border issue with Slovenia has led the
decouple their EU future from Turkey’s?                      latter to remind it of its necessary consent to
                                                             Croatia’s membership.
2. Coherence between regional and individ-                   These developments should suffice to question
ual approaches                                               the widespread assumption that a member state
                                                             is the best stabilizer and “advocate” of its
This brings back in a different form the question            neighbor as prospective member. The inclusion of
of coherence between regional and individual ap-             Croatia into the EU would certainly contribute to
proaches. The current assumption is that the                 the stabilization of democracy there. The impact
“regatta” approach works fine for the EU (it                 on neighboring Bosnia-Herzegovina (BiH) is, how-
makes the enlargement process ‘discreet’ and                 ever,    debatable      as     Croats   from   Bosnia-
thus more acceptable to Western public opinion)              Herzegovina, who massively own Croatian pass-
and the countries concerned. Indeed, all of them             ports, will thus lose interest in the future of their
cheer for a speedy accession of Croatia as open-             state. Romania is the most vocal advocate of
ing the door to the EU for the rest of the Western           Moldova’s future membership in the EU. Its influ-
Balkans. The logic of emulation may work for                 ence over its Eastern neighbor has, during the
some: Macedonia, Montenegro, Albania etc. But                recent political crisis in Chisinau, been described
for the unfinished states such Bosnia, Kosovo,               as both attractive and destabilizing at the same
and Serbia there may be a case for a parallel ac-            time. In short, a coherent enlargement policy
cession to the EU. The shared European roof was              should also entail a careful consideration of its
meant to help defuse and overcome unsettled                  impact on neighbors and thus its relationship to
contentious territorial and institutional issues. To         the EU’s neighborhood policy or its “Eastern part-
be sure, nobody’s accession should in principle be           nership”.
held   hostage    to   the   intransigence   of   one’s
neighbor. But given the possible interaction be-             4. From protectorates to integration through
tween different aspects of the “Serbian question,”           nation-state building.
it also seems prudent to make sure unfinished
statehood issues are settled simultaneously dur-             This sounds like a coherent summary of EU’s en-
ing the accession process, when leverage is                  deavor in the region: 1. from crisis management
strongest. Back to a regional perspective albeit             to Europeanized protectorates 2. Exit from pro-
on a smaller scale.                                          tectorates (BiH and Kosovo) implies entry into the
                                                             EU. The difficulty (and this is where consistency is
3. Coherence between EU policies and those                   most immediately tested) is that the EU is for the
of its member states.                                        first time in its history directly involved in assist-
                                                             ing the creation of its future member states.
The converse question concerns the coherence                 There are three ‘unfinished’ states in the Western
between EU policies and those of its member                  Balkans: Bosnia, Kosovo, and Serbia. EU Com-
states. Some of them have, for historical and                missioner for enlargement Olli Rehn has rightly
geographic reasons, more involved (Greece, Aus-              pointed out that protectorates cannot be inte-
tria, Italy). Other, new members of the EU, have             grated into the EU. Nor can unfinished states. The


                                                                                                                 17
EU Policies in the Balkans: the challenges of consistency
                                                      Jacques Rupnik



two European protectorates should be examined                 ‘status-neutral’ (given that five EU members have
as test cases for consistency.                                not recognized Kosovo’s independence) while it
                                                              remains unclear which law applies when in Kos-
Bosnia: Is Bosnia a stable state? The answer                  ovo: is it the international regulations of the past
depends on which High Representative you listen               decade under UNMIK, is it the new laws voted by
to: former HR Paddy Ashdown (fear of disintegra-              the Kosovo parliament or is it (in the Northern
tion) or most recent HR Lajcak: Bonn powers                   enclave) Serbian law? Depending on where you
have become irrelevant as has the HR’s office. Is             are and when you get a different answer to this
Bosnia a functional state? Certainly not. The pro-            question.     Which     state,   which   international
tectorate ensures stability but reinforces dysfunc-           agency, which law? This surely is the most formi-
tionality. Can the exit from the protectorate and a           dable ‘consistency challenge’ for EU representa-
shift to a pre-accession agenda be a powerful                 tive Peter Feith and more generally for the EU
enough leverage to push through an institutional              mission in Kosovo. Hence also the question: is
reform necessary to develop the sense of owner-               Kosovo really an independent state on the road to
ship and make BiH a viable polity? This is where              the EU or the protectorate’s new cloth?
one man’s plea for consistency of the European
perspective borders on another man’s the act of               This sums up some of the key dilemmas raised in
faith.                                                        examining the coherence of the EU’s approaches
                                                              to the Western Balkans. It highlights the con-
Kosovo: EULEX is the largest civilian mission                 trasts or the tensions between stated consistency
ever launched under ESDP. The exit from protec-               and its implementation. It also points out some of
torate is conceived as an assistance in the build-            the implications on the ground as soon as EU ap-
ing of a new state with the prospect of turning               pears divided (Kosovo) or hesitant between con-
the EU presence into pre-accession monitoring.                tainment and integration (Bosnia). No wonder the
The rationale sounds coherent enough until you                issue of policy consistency looks different when
realise that the EU still coexists with UNMIK and             seen from Brussels or from the countries at the
the ICO. Eulex is supposed to assist the rule of              receiving end in the Balkans.
law of the new state, but it officially remains




    18
Normalization in four steps
     The European integration of the Western Balkans remains
     unclear without the normalization of the relationship
     between Kosovo and Serbia
     Veton Surroi
     Former leader of ORA party, Kosovo




1. After the EU accession of Croatia within the         level. Kosovo, being treated in such a manner by
next two years, the question of the final arrange-      Serbia, might block the most advanced phase of
ment of the Balkans’ European future will again         the relationship between Serbia and the EU, the
become an unanswered issue. The next ten years          preparation for accession. It’s completely impos-
will define how these states will be transformed,       sible that Serbia will be accepted into the EU with
and for the European Union, the nature of their         an unresolved problem like the relationship with
accession, be it as a group – like for some previ-      Kosovo.
ous enlargements - or individually, one after an-
other, like Croatia.                                    This situation, where Kosovo and Serbia are
                                                        keeping each other hostage on their respective
However, the answer for the “group vs. individ-         European path, might continue longer if there is
ual” dilemma won’t appear on the agenda without         no external intervention to change it. But the
clarifying the nature of these countries seeking to     conditions for such external intervention could be
adhere to the European Union. There is still a tri-     met in the course of this year. The European Un-
angle of uncompleted states in the Western Bal-         ion has a unique opportunity to impose a new
kans. Bosnia and Herzegovina is a protectorate          orientation for the relationship between Serbia
that continues to be based upon a peace agree-          and Kosovo that might not reappear again for the
ment (Dayton), but without a constitutional order       next ten years. Serbia is requesting the liberaliza-
created by its citizens. A part of this state, the      tion of its visa regime and the candidate status
Republika Serpska, to a large extent refuses BiH’s      for the EU. Both these points could be conditioned
identity. Kosovo is an incomplete state both on its     (decided?) by the EU this year. Kosovo, on the
internal functioning (the factual division of the       other hand, needs to get itself outside the actual
country) and its international legitimacy. Serbia,      unclear protectorate situation and look toward a
by refusing to recognize Kosovo and by maintain-        clearer perspective of European accession. These
ing territorial claims on it, represents a state that   are important and necessary points for Brussels.
has not reached its final shape yet either. The
existence of such a triangle, with a strong sup-        In addition, the new administration in Washington
port from Belgrade, will certainly obstruct their       with a little effort can achieve an intervention ca-
perspective of a European future and simultane-         pacity that brings to an end the successful trans-
ously the European accession as a group of the          atlantic intervention in the Balkans, which began
Western Balkans as part of the European conti-          at the end of the Bosnian War and continued with
nent’s unification.                                     the accompanying of Kosovo till its independence.
                                                        Actually, the Serbian initiative to seize the Inter-
2. Kosovo and Serbia are a Siamese obstruction          national Court of Justice could prolong the current
to EU accession. Serbia, by not recognizing Kos-        stage of waiting and inspire some voices in Bel-
ovo’s special state identity, by continuing to keep     grade or even in Prishtina to state that no action
a part of Kosovo attached to itself and at the          should be taken without having the final opinion
same time by being supported by five EU Member          of the Court. However, whatever might be the
States on such policies, is blocking the beginning      Court’s opinion, it will not change a number of
new phase of the relationship between Kosovo            things: the irrevocable independence of Kosovo,
and the European Union, namely at a contractual         its irrevocable recognition, the problem Serbia

                                                                                                         19
Normalization in four steps
                                                    Veton Surroi



has with this situation and the danger of a non-            Kosovo’s independence. Therefore, this measur-
normalized relationship between Serbia and Kos-             able progress will qualify Serbia as a State which
ovo for the concretization of their European path.          is creating the basis for resolving its neighbor-
                                                            hood problems (which is an important objective
3.Kosovo and Serbia need a normalization proc-              for the states having recognized Kosovo’s inde-
ess of their relationship with each other. Four ba-         pendence and that will have to decide on Serbia’s
sic steps are requested for this to happen.                 accession path).
The first is the beginning of a process of dialogue
between Prishtina and Belgrade, a dialogue also             The fourth step is the creation of a new European
known as “talks on talks.”     Although it’s known          integration value. In other words, it represents
that there are stark differences on the existence           the beginning of both, the Stabilization andAsso-
of an independent Kosovo, the political authorities         ciation Process for Kosovo and the negotiations
of both countries should define open topics that            with the EU as a membership candidate for Ser-
can be treated between the two countries without            bia.
taking Kosovo’s status into consideration.
The second is the integration of such a dialogue            4.The EU in collaboration with the US could close
into a transatlantic format. It is obvious that the         the chapter of Balkans’ instability within the next
success in the Balkans has been achieved only               twelve months by creating the right conditions for
when an intensive true cooperation between the              what will be the states of the sixth wave of EU
EU and the US has existed. It is now time to the            enlargement, somewhere near the end of the
normalization of the Kosovo-Serbia relationship             coming decade. This opportunity might not be
through the reappearance of this collaboration as           available for too long, though. The Bosnian and
part of a transatlantic regional integration policy.        Kosovar status quo have already created de facto
The third step is the implementation of a transi-           territorial divisions threatening to grow into mag-
tory process of non-statutory normalization be-             netic fields for the division of the whole region.
tween Serbia and Kosovo. The conditions to ex-              Instead of a ten-year period of integration, the
plicitly encourage the European integration of one          ignoring of the actual situation might produce a
another will be created within this process, al-            ten-year period of territorial bargaining, which
though the differences in opinion on the status             can add Macedonia to the triangle of uncompleted
will remain. This means the creation of a measur-           states.
able process that would allow all the EU Member
States to consider Kosovo as a contractual part-            It will be a lost ten-year period for the popula-
ner , including those that have not recognized              tions of this part of the Balkans.




    20
Are there any alternatives to the European per-
    spective of the Balkans and the EU Enlargement?

    Tanja Miscevic
    Former Director of the Serbian Office for EU Integration




I—EU perspective means not only EU mem-                 II—The alternative for the EU perspective
bership, but applying the “model EU” in the             for Serbia, therefore, cannot be Russia – it
first place                                             does not provide a model for reforming the
                                                        state and society
The Copenhagen criteria (from 1993, including
from the 1995 Madrid criterion on administrative        - Traditional good economic, political, cultural ties
capacity) provides guidance and benchmarks for          and diplomatic relations
the economic, political and legal transition for        - Political support over Kosovo issue. Popular
any country willing to become member of the EU.         support for enhancing cooperation between two
This is the same for the Western Balkans. Much          countries - trust of Serbian public opinion in Rus-
more, previous history of European Integration          sia, Russians supporting Serbs
has shown how powerful this model can be: in-           - But, Russia is a country, not an International
Greece, Spain, Portugal, CEE countries. On the          Organization – it does not accept members, so
other hand, to follow the EU as a model needs           Serbia could not join
political consensus, it is time-consuming and           - Not only good relations are necessary for a
very expensive, especially in the situation of the      country in transition - there is no Russian pre-
global economic crisis. Also, public opinion gets       scription or model to be applied
tired over time and sees more costs than bene-          - There are a lot of good reasons for enhanced
fits of the process, in the first place because of      cooperation between Serbia and the Russian Fed-
its duration. The problem is the fact that the idea     eration : Energy security - Serbia solving huge
of EU membership prevails over the need to de-          part of its energy problem with pipe line South
velop European values.                                  Stream. Free trade agreement – Serbia as a
                                                        bridge in trading between EU and Russia
But, applying the EU as a model also means that         - But, if Serbia is too close to Russia that raises
transition country needs less time than ever to         the question of its real will to join EU – in sub-
build stable democratic institutions and function-      stance but also in perception
ing market economies, because this is the best
possible “blue print” for transition not only the       Problems that are always present when partners
state but of the society. Much more, the EU pro-        are unequal – powerful state can dictate relation-
vides technical and financial support for those         ship (example – selling Oil Industry of Serbia)
reforms. Nevertheless, the EU today faces multi-
ple problems which also create difficulties for
those countries wishing to become its members:          III—The European perspective for the West-
troubled with its own difficulties, it is noticeable    ern Balkans can be valid only if it is
that the EU more and more has a tendency to             strengthened by concrete substance, not
neglect the Western Balkan countries. Therefore,        only with declarations – that is why the is-
so called “enlargement fatigue” in the EU results       sue of alternatives emerged
in “reform fatigue” in candidate and potential
candidate countries. Furthermore, this leads pub-       Political consensus in WB countries on the EU
lic opinion and those opposed to the European           integration process reflects a national consensus
integration process to search for alternatives.         – people do see the importance of being in the

                                                                                                          21
Are there any alternatives to the European perspective of the Balkans and the EU Enlargement?
                                               Tanja Miscevic



EU. In the other side, two EU/WB summits and                   Even in this situation, to understand the EU inte-
Council meetings statements— affirmation of a                  gration process as a home work, good for coun-
European perspective by EU Member states.                      try not only for EU membership, but also for
                                                               state building and state management. Much
The problem in this relation is the fact that since            more, regional cooperation – not only condition
Thessaloniki (2003) there has be no new Summit                 but necessity.
– there is no political will in the EU for substantial
commitments. Observing more strictly conditions                This situation will worsen if Lisbon ratification
than in previous enlargements gives impression                 problems are not solved in 2009, and if there is a
of double standards for WB. It takes too long for              continuation of very long and deep economic cri-
WB countries in order to reach next formal step                sis in the EU. Crisis of the political elite in the EU
(SAA, membership application, Negotiating mem-                 member state – lack of vision for Europe will im-
bership), reflecting the non-existence of a sub-               pact vision for enlargement. All those problems
stantive and comprehensive EU Enlargement                      reflect on WB countries – “they do not want us”.
strategy.




 Propositions :


     1. EU perspective means not only EU membership, but applying the “model EU” in the first place

 Strengths                    Weaknesses                     Opportunities                 Threats

 - Copenhagen criteria        - To follow the EU as a        - Less time than ever is      - EU troubled with its
 provide guidance and         model requires political       necessary to build stable     own problems, neglecting
 benchmarks for eco-          consensus, is time-            democratic institutions       WB countries
 nomic, political, and        consuming and very ex-         and functioning market        - Enlargement fatigue in
                              pensive                        economy                       the EU which results in
 legal transition
                              - Public opinion gets tired    - Best possible “blue         “reform fatigue” in candi-
 - History of European        over time and sees more        print” for transition not     date and potential candi-
 integration has shown        costs than benefits            only of the state but also    date countries
 how powerful this            - Idea of EU membership        of societyEU technical
 model can be (Greece,        prevails over EU values        and financial support for
 Spain, Portugal, CEE                                        reforms
 countries)

 2. The alternative to an EU perspective for Serbia, therefore, cannot be Russia – it does not provide
 a model for reforming state and society

 Strengths                    Weaknesses                     Opportunities                 Threats

 - Traditional good eco-      - Russia is a country, not     - Energy security – Serbia    - If Serbia is too close to
 nomic, political, cultural   an International Organiza-     is solving huge part of its   Russia that raises the
 ties and diplomatic rela-    tion – it does not accept      energy problem with pipe      question of real will to
 tions                        members, so Serbia could       line South Stream             join the EU – in substance
 - Political support over     not join                       - Free trade agreement –      but also in perception
 Kosovo issue                 - Not only good relations      Serbia as a bridge in trad-   - Problems that are al-
 - Popular support for en-    are necessary for a coun-      ing between the EU and        ways present when part-
 hancing cooperation be-      try in transition - there is   Russia                        ners are unequal – power-
 tween two countries -        no Russian prescription or                                   ful state can dictate rela-
 Serbian public opinion       model to be applied                                          tionship (example: selling
 trusts Russia, Russians                                                                   of Serbia’s oil industry)
 support Serbs


   22
Are there any alternatives to the European perspective of the Balkans and the EU Enlargement?
                                          Tanja Miscevic




Propositions :


3. The European perspective for the Western Balkans can be valid only if it is strengthened with con-
crete substance, not only with declarations – that is why the issue of alternatives emerged

Strengths                  Weaknesses                    Opportunities                Threats

- Political consensus in   - Since Thessaloniki          - Less time than ever is     - to understand EU inte-
WB countries on EU inte-   (2003) there have been no     necessary to build stable    gration process as a home
gration                    further summits – no po-      democratic institutions      work, good for the coun-
- National consensus in    litical will in the EU for    and functioning market       try and not only for EU
WB countries – people      substantial commitments       economy                      membership
see the importance being   - EU is observing condi-      - Best possible “blue        - state-building and state
in the EU                  tions more strictly than in   print” for transition not    management
- two EU/WB summits        previous enlargements,        only of the state but also   - regional cooperation –
and Council meeting        which gives the impres-       of societyEU technical       not only a condition but a
statements – declaration   sion of double standards      and financial support for    necessity
of European perspective    for WB                        reforms
by EU Member states        - It takes too long for WB
                           countries in order to reach
                           next formal step (SAA,
                           membership application,
                           negotiating membership)
                           - Non-existence of sub-
                           stantive and comprehen-
                           sive EU Enlargement
                           strategy




                                                                                                             23
Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
     obstacles structurels à la perspective européenne?
     Luan Rama
     Writer, Former Albanian Ambassador in France




Depuis les dernières guerres de Yougoslavie et la       gestion pratique de l’État. Presque dans tous les
fin de la guerre du Kosovo, le paysage et la carte      pays des Balkans occidentaux on retrouve plus ou
géopolitique des Balkans ont changé. De nou-            moins les mêmes symptômes liés à la corruption,
veaux États ont été créés, souvent au prix de           la fraude électorale, le crime organisé et l’écono-
nettoyages ethniques et de grands massacres. Il         mie noire, les trafics clandestins des produits et
semble que les peuples qui vivaient sous le poids       d’êtres humains, l’absence d’une vraie Société
écrasant de l’histoire séculaire, sont enfin libérés    Civile ou bien l’esprit d’un national-populisme des
de cette charge pleine de haine interethnique, de       élites politiques que l’on peut voir en Albanie, en
vieilles guerres, de conflits de territoires et de      Serbie, en Macédoine, en Bosnie et ailleurs. Les
frontières et d’autres guerres qui se dessinaient.      élites politiques, pour rester au pouvoir, se re-
On peut dire que c’était la fin d’une vieille mytho-    tournent vers le populisme, comme en Albanie ou
logie et le début d’une nouvelle histoire sans my-      en Serbie. Même si plusieurs années se sont
thes. Et cette fin ou début de l’histoire ne pourrait   écoulées depuis les changements politiques dans
pas se réaliser sans l’aide de deux facteurs essen-     les Balkans, les rivalités intra-régionales se res-
tiels: l’engagement de l’Union européenne et de         sentent toujours. Ces rivalités qui avant étaient
l’OTAN. Ce sont eux qui ont accompagné la tran-         entre la Turquie, le Grèce, la Yougoslavie, l’Alba-
sition des Balkans occidentaux vers de nouvelles        nie et la Bulgarie, ont changé, même si quelques
démocraties. L’Europe ne peut pas abandonner            alliances ont survécu telle l’alliance gréco-serbe
les Balkans non seulement parce qu’ils font partie      qui était unie contre le «danger turc» et l’expan-
de sa géographie et de son histoire, mais aussi         sion de l’Islam dans les Balkans occidentaux »,
car ils sont acteurs de la civilisation européenne      mais aussi sur la «question macédonienne».
moderne.                                                D’autres vieilles alliances ont disparu comme celle
                                                        de la Grèce avec la Bulgarie sur le partage de la
Plusieurs années se sont écoulées. Depuis la der-       Macédoine et «le danger turc».
nière guerre l’engagement de l’UE a été sans re-
lâche. Mais il est aussi vrai que les États balkani-    Pendant les années 90 et plus tard, nous avons
ques, après une longue transition, qui continue,        été témoins des rivalités Serbie-Croatie, Serbie-
restent des pays fragiles, aux gouvernements            Albanie, Serbie-Monténégro, Macédoine-Albanie.
instables à cause de leur héritage historique,          Et des rivalités sont apparues même au sein d’un
même si du point de vue constitutionnel, législa-       même État comme cela s’est passé en Bosnie (la
tif, structures administratives, ils répondent aux      guerre de Bosnie et le choix d’une Bosnie mul-
standards européens. Bien sûr, cela est le résul-       tiethnique, avec une rotation de dirigeants par les
tat du travail commun de ces États avec le l’UE,        trois entités qui la composent) ; en Serbie avec la
le Conseil de l’Europe, l’OSCE, la Commission de        guerre du Kosovo et la déclaration d’indépen-
Venise, ainsi que d’autres institutions internatio-     dance ou avec le nouvel État fragile de la Macé-
nales pour créer des institutions fiables pour un       doine, où le conflit entre la population slave et
État qui a dans ses fondements la démocratie,           albanaise (qui représente 30% de la population)
État de Droit, le pluralisme et le respect des          s’est embrasé.
Droits de l’Homme. Or, pendant toutes ces an-
nées, les réflexes d’antan ont perduré dans la          Aujourd’hui, ce processus de rivalités perdure

   24
Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
                                 obstacles structurels à la perspective européenne?
                                                       Luan Rama



toujours même s’il n’a pas la même intensité.                 térale de la République de Monténégro. La pers-
Cependant, la Serbie et la Croatie cherchent à                pective européenne du Monténégro accepté au-
mettre de côté leur guerre et la tragédie de Kraji-           jourd’hui comme pays candidat à l’UE a calmé les
na et à trouver des points communs pour déve-                 tensions internes parmi les Monténégrins et Ser-
lopper de nouveaux marchés, des moyens de                     bes dans cette petite république.
communication et de ranimer leur ancienne liai-
son en dépassant leurs nationalismes. Les rivali-             La rivalité Macédoine-Albanie avait elle aussi un
tés   serbo-albanaises       sont    historiques.   Après     caractère ethnique et émotionnel parce que les
1913, avec la Conférence des Ambassadeurs à                   Macédoniens peu nombreux se voyaient comme
Londres, la moitié du peuple albanais s’est trou-             un peuple menacé. Cela était lié non seulement à
vée en dehors des frontières de l’État albanais.              l’augmentation démographique des Albanais en
Mais cela c’est de l’histoire et nous n’avons pas             Macédoine mais aussi à la demande insistante
besoin de retourner vers l’histoire, même s’il y a            des Albanais pour la reconnaissance de leurs
un siècle. Aujourd’hui il faut regarder les réalités          droits en tant que peuple constitutif de la Répu-
et les horizons à l’avenir. Les fondements des                blique de Macédoine.
rivalités serbe-albanaises ont été et sont ethni-
ques, mais aussi émotionnels, qui comme je vous               En ce qui concerne les conflits à l’intérieur des
l’ai dit, sont liés à l’histoire. Le soutien que l’Alba-      États, le plus préoccupant reste celui de la Bosnie
nie a donné aux Kosovars a ravivé la rivalité en-             où après les Accords de Dayton même si la Bos-
tre les deux États depuis la création du royaume              nie est reconnue en tant qu’entité entière, il reste
de Yougoslavie puis la création de la Fédération              encore la possibilité de la séparation de l’une des
yougoslave. Même si les contacts officiels entre              entités. C’est la persistance de l’UE qui maintient
Belgrade et Tirana ne manquent pas aujourd’hui,               debout la gestion de cet État et cela à travers des
leur rivalité reste évidente et certainement très             difficultés énormes qui ont pour base l’apparte-
émotionnelle. De toute façon, avec l’indépen-                 nance ethnique. Mais le pont de Mostar nous
dance du Kosovo est finie la question que dans                donne de l’espoir. Tout dépendra de la dynamique
les chancelleries européennes on a appelé «la                 de la perspective européenne qu’on offrira à ce
question albanaise» et la peur de la Serbie d’avoir           pays. Il est clair qu’intégrées à l’UE et à l’OTAN,
dans ses frontières la Grande Albanie à un mo-                les politiques intérieures deviennent dépendantes
ment où avec tant de guerres elle n’a pas pu                  des ces autorités extérieures.
créer sa Grande Serbie. L’existence de deux États
de la même nation n'est ce pas une première                   En ce qui concerne le conflit Kosovo-Serbie, le
dans l'Histoire. La "question allemande", qui a été           processus de la séparation a été consumé, même
en partie à l'origine de deux guerres mondiales, a            si la Serbie s’est adressée au Tribunal Internatio-
laissé côte à côte l'Autriche et l'Allemagne. Les             nal qui aura, je pense, un verdict ambigu dans
intérêts des Albanais d'Albanie, du Kosovo, de la             son interprétation. Le Kosovo a proclamé son In-
Macédoine ou du Monténégro qui sont très bien                 dépendance et elle est reconnue par une grande
intégrés dans la République monténégrine, sont                partie des pays de l’UE et d’autres pays dans le
suffisamment divergents pour que tous ces alba-               monde. Bien sûr, pour le moment reste un conflit
nophones ne songent pas à se réunir. Pendant                  ouvert dans les relations actuelles entre la Serbie
des décennies ils ont vécu dans des États diffé-              et le Kosovo et qui sans doute est lié à l’intégra-
rents et aujourd’hui sont plus préoccupés par les             tion des Serbes dans la société multiethnique du
difficultés   de    la   vie        quotidienne,    sous-     Kosovo. En ce qui concerne les problèmes de la
développement, corruption, criminalité, la stabili-           Macédoine avec les Albanais, ils ont été résolus
té d’un État fiable, avec ce rêve de s’intégrer le            avec les Accords d’Ohrid et cela grâce à la contri-
plus vite possible à l’UE.                                    bution de l’UE et des États Unis d’Amérique. Au-
                                                              jourd’hui, la Macédoine a déposé sa candidature
Le conflit Serbie-Monténégro s’est terminé avec la            pour devenir membre de l’UE et le pays a pro-
séparation des deux États et la déclaration unila-            gressé, même si le processus a été lent.


                                                                                                             25
Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
                              obstacles structurels à la perspective européenne?
                                                    Luan Rama



Beaucoup de pratiques et de faits empêchent et             Serbie, dans le même temps que le représentant
retardent la perspective européenne des pays des           des États-Unis à Pristina félicite l’État kosovar
Balkans occidentaux, mais le plus important je             pour « leur décision qui était dans l’esprit du
pense que c’est l’Histoire et la peur de l’Autre que       «Plan Ahtisaari» et du bon voisinage entre les
l’analyste français Dominique Moisi appelle «la            deux pays». Donc une simple visite a fait monter
culture de la peur». Existe-t-elle aujourd’hui dans        l’adrénaline aussi bien à Pristina qu’à Belgrade.
les Balkans ? Bien sûr que oui. Il suffit d’ouvrir les     Le grand européen Bronislaw Geremek, quand il
livres d’histoire dans les écoles pour trouver l’i-        parlait sur la construction européenne et son ave-
maginaire des nouvelles générations chargées               nir, insistait sur la dimension spirituelle et il avait
d’une sorte de nationalisme guerrier. Cela on              raison. Donc pour nous les balkaniques, il nous
peut le trouver en Albanie, Serbie, Kosovo, en             faut aujourd’hui que le mot l’AUTRE nous le rem-
Bosnie ou en Macédoine. Les historiens de ces              placions par le mot ENSEMBLE. Mais pour cela, il
pays ne sont pas capables de combattre l’histoire          faut une volonté de faire ensemble ! Donc de
officielle. Donc il faudra du temps pour que l’his-        créer une identité commune dans le respect et la
toire s’écrive avec un esprit humaniste.                   reconnaissance des identités particulières… Cela
                                                           nous amène au principe de la citoyenneté. Mais
Cependant, pensant au rôle de l’Albanie dans les           pour faire cela il faut d’abord une volonté politi-
conflits balkaniques ces dernières années, nous            que, il faut un État de Droit, il faut une société
pouvons dire que sa politique a été retenue, sans          civile et aussi une instance d’arbitrage (donc à
vouloir intervenir, en se préoccupant d’abord de           l’échelle européenne) pour veiller sur l’égalité des
son intégration dans les structures de l’OTAN et           droits et des libertés communautaires.
de l’UE. Donc, les conflits, les rivalités dans les
Balkans sont émotionnelles. Les positions de la            En ce qui concerne la Société Civile, il ne faut pas
Macédoine qui n’accepte pas une proposition                qu’elle   s’occupe    seulement     des   Droits    de
grecque d’un nouveau nom pour sa république tel            l’Homme, mais d’abord elle doit devenir dans ces
que «La République de Macédoine du Nord» sont              pays un porte-parole de l’opinion publique et de
émotionnelles. Mais la position grecque aussi, qui         la critique de la gouvernance et de la gestion de
a empêché la Macédoine d’intégrer l’OTAN récem-            l’État, donc devenir un contre-pouvoir comme le
ment est non seulement une obsession officielle            sont en grande partie les medias.
mais aussi émotionnelle et historique. La Grèce
proteste en se demandant pourquoi les Macédo-              En Albanie, la société civile est encore dispersée
niens ont donné le nom d’Alexandre Le Grand à              et mal organisée, malgré l’aide continue de l’UE
leur aéroport principal et à la grande autoroute.          et des organismes comme SOROS, etc.. Elle reste
C’est toujours l’Histoire qui nous retient, diffé-         impuissante et les intellectuels sont marginalisés
remment de ce qui s’est passé entre la France et           par le pouvoir et l’économie. En raison de leur
l’Allemagne après la Deuxième Guerre mondiale,             survie, lutter contre le pouvoir autoritaire est une
qui très rapidement ont laissé l’histoire de côté          sorte de suicide. Donc les intérêts économiques
pour affronter ensemble les défis de leur avenir.          sont plus forts que ceux de l’éthique, de la morale
Voilà pourquoi l’Occident voit dans les Balkans            et de la bonne gouvernance des institutions politi-
occidentaux un blocage qui est réel. Quatre jours          ques et étatiques. En Serbie il y a une activiste
auparavant, le Président serbe Tadic a demandé à           renommée, Mme Bisersko qui défend avec vi-
Bruxelles d’aller à Decani au Kosovo pour les Pâ-          gueur les droits des kosovars, mais un homolo-
ques orthodoxes. Cette demande a été prise                 gue kosovar n’est pas vu au Kosovo où un Koso-
comme une menace de leur souveraineté par les              var défend les droits des Serbes. La société civile
Kosovars, mais après avoir été conseillé par l’Eu-         en Serbie semble impuissante devant l’atmos-
rope et les États-unis d’Amérique, le gouverne-            phère générale où règne le discours nationaliste
ment du Kosovo l’a acceptée comme une visite               pour le destin historique de la Serbie, de dire son
privée. Pour le Président Tadic, bien sûr cette vi-        mot, même si une grande partie pense que ce
site se faisait pour obtenir un capital politique en       conflit sur le Kosovo qui perdure, retarde la pers-


   26
Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
                             obstacles structurels à la perspective européenne?
                                                   Luan Rama



pective européenne de la Serbie.                          auparavant, les autorités serbes ont tout fait pour
                                                          empêcher la rupture entre les deux républiques
Je pense que si vraiment on doit trouver une so-          de la confédération Serbie-Monténégro. Cela a
lution rapide pour l’intégration des Balkans occi-        non seulement aggravé les relations entre les
dentaux avec les valeurs et les standards euro-           deux républiques mais aussi le processus d’inté-
péens, cette solution il faut la chercher d’abord à       gration. Dès que le conflit a été résolu, la porte à
Belgrade. Belgrade est un point névralgique, car          la candidature du Monténégro comme membre de
même si on règle les problèmes séparément en              l’UE s’est ouverte. Ce sera la même chose avec le
Bosnie, au Kosovo, en Albanie, en Macédoine,              Kosovo. Les leaders serbes de demain compren-
etc., le problème restera non résolu si Belgrade          dront que la demande du retour du Kosovo en
garde sa même optique politique du conflit, parce         Serbie n’était qu’une perte de temps et une rhé-
que avec la Serbie sont liés les relations Serbie-        torique nationaliste, parce que les frontières des
Bosnie, Serbie-Kosovo, Serbie–Albanie ou Serbie-          deux pays, Serbie et Kosovo seront ouvertes et
Macédoine même si cette dernière relation est             symboliques, et que les standards européens as-
secondaire. Un changement de l’optique politique          sureront pour tous les mêmes droits identitaires,
à Belgrade éteindra définitivement les conflits           politiques, économiques, culturels, etc., donc les
réels et ceux gelés, en apportant une nouvelle            libertés et les droits fondamentaux. D’autres pays
dynamique dans le rapprochement des Balkans               continuent à connaître l’indépendance de Kosovo.
occidentaux à l’UE. Nous félicitons les Croates qui       La demande du retour du Kosovo en Serbie res-
vont joindre prochainement l’Union européenne             semble à une politique politicienne, donnant aux
(envisageable pour 2012-2014), mais notre sou-            hommes politiques en Serbie les possibilités de
hait est que les autres pays des Balkans occiden-         rester en politique. Un homme politique qui ac-
taux entrent quelques années après la Croatie.            cepte le contraire, comme on l’a déjà vu à Bel-
Mais pour cela il faut une fort volonté politique de      grade, perdra et s’effacera du paysage politique
la part de l’UE. Sinon, si on parle de manière            actuel. Alors le politique choisit l’alternative natio-
symbolique, et en 2020 on regarde le monde                naliste avec l’espoir que ce sera le monde qui
d’une hauteur de 10.000 m, on regardera les               trouvera la solution et pas lui. La demande de la
Commissaires européens en train de se bagarrer            Serbie au Tribunal International pour le retour du
avec les gouvernements de ces pays sur tel ou tel         Kosovo va seulement retarder le processus de la
acquis communautaire, à un moment où d’autres             reconnaissance du Kosovo internationalement,
puissances, la Chine, l’Inde, etc., seront dans les       mais on sait que devant le principe de l’autodé-
frontières de cette Europe. Donc il faut agir vite!       termination, comme on l’a vu au Timor-Este, ce
                                                          Tribunal ne pourra sans doute pas recommander
Sur le Kosovo, on sait que la Serbie l’empêche            ce retour.
par tous les moyens de se former comme un vrai
                                                          Quand on parle parfois dans la presse sur le Ko-
État et qu’il puisse fonctionner comme un État
                                                          sovo, de moins en moins on parle de la possibilité
démocratique, pluraliste, multiethnique, avec l’as-
                                                          du partage de Mitrovica, en se souvenant aussi
piration de s’intégrer à l’UE et dans les Institu-
                                                          du précédent de Chypre. Mais est-ce que cela est
tions et la vie internationale. Cela empêche non
                                                          fiable? Quelques décennies ont passé depuis le
seulement le progrès du Kosovo mais aussi de la
                                                          partage de Chypre et les fièvres nationalistes se
Serbie elle-même. A l’intérieur du Kosovo, le plus
                                                          sont éteintes et les nouvelles générations de
grand problème est la ville de Mitrovica divisée
                                                          cette île cherchent aujourd’hui à régler ce para-
entre Serbes au nord et les Albanais au sud de la
                                                          doxe historique. Déjà on sait que l’indépendance
ville. Si Belgrade renonce à commander les Ser-
                                                          du Kosovo constitue une dérogation, rendue iné-
bes à Mitrovica (considérés par eux comme partie
                                                          luctable par la politique de nettoyage ethnique de
intégrante de la Serbie) les Serbes seront inté-
                                                          Milosevic et la guerre de 1999.
grés dans la société multiethnique et les structu-
res de l’État                                             Le partage du Nord du Kosovo n’est pas accepté
                                                          ni par l’UE, ni par les États-Unis, ni par les pays
Influencées par le nationalisme, quelques années

                                                                                                             27
Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
                              obstacles structurels à la perspective européenne?
                                                    Luan Rama



intéressés directement comme la Serbie et le Ko-           que si la première stratégie a fait des progrès, la
sovo. Le partage serait un précédent dangereux             deuxième n’est pas arrivée aux résultats atten-
pour l’Europe, ou une zone de milliers de ressor-          dus. Dans la coopération entre la Serbie, la Bos-
tissants de la même origine pourrait demander de           nie, le Monténégro, l’Albanie, la Macédoine et le
créer leur propre état ou de joindre le pays voi-          Kosovo, il n’y a pas de grands projets qui lient
sin. J’ai dit les Américains parce que les destins         leur destin et leur futur commun, ou d’autres ré-
des Européens et des Américains liés ensemble              alisations qui puissent rapprocher les peuples en-
font ce que nous appelons l’Occident.                      tre eux.
La création d’États ethniques dans les Balkans             Il est vrai qu’il existe des niveaux différents dans
n’est pas valable et n’est pas dans la philosophie         le développement de ces pays. Cela incite les
politique d’aujourd’hui, ni de l’UE. Et cela, parce        pays de la région à «échapper» aux Balkans et à
que créer un État ethnique présuppose de dépla-            chercher des partenaires économiques plus déve-
cer des populations. Mais nous ne sommes plus              loppés, déjà membres de l’UE. Du coup, la coopé-
en 1922 quand la Grèce et la Turquie ont échan-            ration régionale préconisée par l’UE reste peu
gé des populations pour devenir des États ethni-           efficace et apparaît plutôt comme une raison poli-
quement homogènes. Aujourd’hui on vit à une                tique.
autre époque.                                              On le sait, depuis les années 90, l’UE a été enga-
Les Balkans occidentaux sont dans un moment                gée à travers de programmes définis pour les
crucial de leur histoire moderne, de leur avenir et        Balkans occidentaux en vue de l’intégration de
nous ne devons pas perdre de temps pour attra-             cette région. Les guerres de Yougoslavie et le
per le train de l’Europe. Bien sûr que les contacts        chauvinisme de Milosevic ont gêné ce processus,
étatiques n’ont pas manqué dans cette région,              processus qui recommencera avec plus de force
l’organisation de sommets et de conférences ré-            avec le Pacte de Stabilité pour les Balkans occi-
gionales   avec   des   déclarations   enthousiastes       dentaux.
(souvent incitées par l’UE). Mais il faut avouer           Symboliquement, des années auparavant, Ber-
qu’il y a une sorte d’auto-isolement où chaque             nard Kouchner avait proclamé que «L’Europe est
pays oublie que la perspective européenne cher-            née à Pristina», une déclaration certainement
che d’abord la destruction des barrières, souvent          symbolique parce qu’il regardait la fin des guerres
imaginaires, qui empêchent l’ouverture vers l’Au-          balkaniques comme le début d’une politique com-
tre et le développement des projets communs qui            mune de l’Europe qui allait faire sienne la ques-
concernent l’économie, l’énergie, la communica-            tion balkanique et réunir tous les pays de l’Eu-
tion, le tourisme, la culture, etc. Voilà pourquoi         rope. Et si on regarde du point de vue géographi-
au sommet de Zagreb il a été question du désen-            que, on peut remarquer que le Kosovo se trouve
clavement des Balkans occidentaux. La stratégie            au cœur des Balkans occidentaux et l’évolution
de l’UE pour ces pays a été l’approche par deux            des Balkans est fortement liée à lui.
stratégies simultanément : la coopération directe
de Bruxelles avec chaque pays à travers de pro-            Conclusion:
grammes bien définis, l’aide financière, le dialo-         -L’Union européenne doit soutenir une nouvelle
gue politique, etc., et de l’autre côté la coopéra-        élite politique dans les pays des Balkans occiden-
tion intra-régionale, donc entre les pays balkani-         taux parce que souvent, les leaders politiques
ques.                                                      actuels pensent plutôt à leur pouvoir et à leur
Développer une approche régionale, c’est avant             monopole sur l’économie qu’à l’avenir de leur
tout responsabiliser les acteurs locaux en leur            pays. Il existe une démagogie assez forte et une
signifiant que leur sort dépend également de leur          lutte sans merci pour le pouvoir qui freine le pro-
capacité à s’entendre avec leurs voisins. La coo-          grès dans ces pays. Tous parlent de progrès dans
pération régionale constitue également un moyen            l’intégration européenne.
d’attirer les investisseurs étrangers qui ne peu-
vent pas se satisfaire de petits marchés natio-            - L’Union européenne doit soutenir d’abord des
naux enclavés. Malheureusement nous constatons             projets intra-régionaux auquels font partie deux


   28
Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes:
                             obstacles structurels à la perspective européenne?
                                                   Luan Rama



ou plusieurs pays, afin de rapprocher les peuples         politique. Il est vrai que souvent la société civile
des Balkans occidentaux par des intérêts com-             dans ces pays est impuissante devant les politi-
muns. En plus, le Kosovo est resté comme un îlot          ques.
isolé. Ses frontières doivent s’ouvrir non seule-
ment à l’Albanie comme c’est le cas, mais aussi           - Il faut ouvrir les frontières des pays de Schen-
aux autres voisins.                                       gen pour les ressortissants des Balkans occiden-
                                                          taux en 2010, en aidant les États respectifs par
- L’UE doit accentuer la pression et travailler plus      des programmes pour remplir les conditions né-
avec Belgrade, en accélérant encore son intégra-          cessaires comme la sûreté des documents, la
tion à l’UE, non seulement dans le dialogue politi-       lutte contre l’émigration illégale et l’ordre et la
que, mais en lui ouvrant ses portes même avant            sécurité publique dans ces pays, etc. Ouvrir ces
tous les autres pays de la région, parce que cela         frontières seulement pour la Serbie, le Monténé-
va aider à trouver les solutions de ses conflits          gro et la Macédoine, serait une erreur. La libéra-
avec la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo, mais             tion des visas doit se faire en même temps pour
aussi à l’amélioration de ses relations avec l’Alba-      tous, surtout quand on parle de la Serbie et du
nie et la Macédoine. De toute façon, je pense qu’il       Kosovo. L’histoire des passeports biométriques
serait plus raisonnable qu’après l’entrée de la           que la Serbie donne à quelques milliers de Koso-
Croatie, les pays des Balkans occidentaux entrent         vars pour qu’ils puissent voyager, (comme d’ail-
en bloc.                                                  leurs   la   Croatie   aux     Croates   de    Bosnie-
                                                          herzégovine), nous rappelle les mêmes tactiques
- L’Union européenne doit soutenir la société ci-         que celles de la Russie pour les Ossètes de l’Os-
vile de ces pays et les projets qui aident au dé-         sétie du Sud, les Abkhaz ou les Ukrainiens de Cri-
senclavement de ces sociétés, au rapprochement            mée, car cela est l’expression d’une forme de na-
des sociétés civiles de ces pays, devenant des            tionalisme et d’une politique conflictuelle.
facteurs importants dans l’espace public et la vie




                                                                                                            29
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  • 3. L’association Bourgogne Balkans Express The Bourgone Balkans Express Association, avec le soutien du 1er cycle européen de with the support of the European undergradu- Dijon, Europe centrale et orientale, de ate cycle, Central and Eastern Europe, of Sciences Po Paris a l’honneur de vous Sciences Po Paris in Dijon, has the honour to présenter les actes du colloque organisé present the written contributions of the le 21 avril 2009 à Dijon : workshop held on 21 April 2009, in Dijon : « Les perspectives de stabilisation et d’intégration des Balkans occidentaux » ••• « Stabilisation and Integration Perspectives for the Western Balkans » L’association Bourgogne Balkans Express (loi 1901) a été créée en 2006 à l’ini- tiative de deux étudiants du cycle Europe Centrale et Orientale de Sciences Po Paris à Dijon, de nationalité albanaise et serbe. L’objectif principal de ce colloque sur les Bal- kans occidentaux était de réunir praticiens et chercheurs sur des thématiques et orien- tations liée à l’intégration euro-atlantique des Balkans occidentaux qui prennent toute leur importance dans le contexte d’aujourd’hui. Le colloque s’est tenu le 21 avril 2009 dans l’enceinte du cycle Est européen de Sciences Po Paris à Dijon. Il s’agissait d’un véritable échange d’idées, d’informations et de visions politiques sur l’avenir de la région des Balkans, en vue de discuter des solu- tions concrètes, susceptibles de répondre aux enjeux et défis de cette zone. The Bourgogne Balkans Express Association (law 1901) was created at the initia- tive of two students of Albanian and Serbian nationality of the Central and Eastern Euro- pean campus of Sciences Po Paris in Dijon. The main objective of this workshop on the Western Balkans was to reunite practitioners and researchers to debate on On questions pertaining to the Euro-Atlantic integration of the region, which are gaining particular im- portance today . The workshop was held on 21 April 2009 at the Central and Eastern European campus of Sciences Po Paris in Dijon. It consisted in a real exchange of ideas, informa- tion and political views on the future of Balkans region, in order to discuss concrete so- lutions that might respond to the challenges that this region faces nowadays.
  • 4. Imprimé à Paris, France, juillet 2009 Droits d’auteur: Association Bourgogne Balkans Express (loi 1901) 1er Cycle de Sciences Po Paris, Europe centrale et orientale 14, Av. Victor Hugo, 21000 Dijon Reproduction permise sous condition de citer les auteurs des textes ci-joints ainsi que la publication.
  • 5. L’association Bourgogne Balkans Express exprime ses remerciements les plus sincères à l’ensemble des chercheurs et praticiens ayant participé au colloque: Hido Biscevic ; Ana Maria Boromisa ; Joseph Brinker ; Arnaud Danjean ; Srdjan Dizdarevic ; Mary-Ann Hennessey ; Katrin Hett ; Tim Judah ; Karolina Kottova ; Jaromír Levíček ; Alexandre Lévy ; Pierre Mirel ; Tanja Miscevic ; Alistar Nolan ; Luan Rama ; Jacques Rupnik ; Piotr Smolar ; Thérèse Sobieski ; Veton Surroi ; Jovan Teokarevic ; Nebojsa Vukadinovic ; Daliborka Uljarevic. et aux organismes ayant coparrainé l’événement: Commission Européenne, Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, Conseil Régional Bourgogne, Ville de Dijon, Arte.tv, Courrier International, Le Monde, Courrier des Balkans, Europe Direct Bourgogne, Association Jean Monnet,
  • 6.
  • 7. Sommaire / Contents : Préface des actes du colloque - L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel …………………………………………………………………….. p.8 Tables Rondes / Round Tables : - EU policies in the Balkans: the challenges of consistency Jacques Rupnik …………………………………………………………… p.16 - Normalization in four steps Veton Surroi …………………………………………………………… p.19 - Are there any alternatives to the European perspective of the Balkans and the EU Enlargement? Tanja Miscevic …………………………………………………………… p.21 - Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama …………………………………………………………… p.24 - Croatia: good or bad example? Ana-Maria Boromisa ………………………………………………………… p.30 - NATO-EU as a strategic partnership: toward a global cooperation in the stabilisation of the region Jovan Teokarevic …………………………………………………………… p.33 - Can civil society succeed in emancipating itself from historical, sociological and ideological burdens? Srdjan Dizdarevic …………………………………………………………… p.36 Contributions externes / External Contributions : - Integration, stability and blackmail Slobodan Casule …………………………………………………..…… p.37 Bourgogne Balkans Express …………………………..…… p.40
  • 8. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel Directeur. Relations avec Albanie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Serbie, Kosovo. DG Élargissement, Commission Européenne (Bruxelles) Madame la vice-présidente du Conseil ré- Frontières acceptées, droits humains respectés, gional, merci de nous accueillir ce matin. Merci Etat de droit établi, marché unique étendu, crois- pour vos paroles de bienvenue et, si vous me sance économique spectaculaire, manne finan- permettez, bravo pour l'engagement européen cière de rattrapage économique, on ne peut nier fort de la région Bourgogne. la réussite de ce qui restera comme l'un des ac- complissements majeurs de la politique exté- Mesdames et messieurs, chers collègues, permet- rieure commune. tez-moi aussi de féliciter Sciences Po Dijon et l'association Bourgogne Balkans Express pour Faire de la politique fiction est toujours un exer- cette conférence, la seconde de ce type. Dijon va cice aléatoire et vain. Mais que l'on imagine un ainsi s'imposer comme un rendez-vous incontour- instant ce qui serait arrivé en Europe centrale nable dans le débat sur l'une des grandes politi- sans cette réponse positive et dynamique de ques de l'Union européenne, celle de l'élargisse- l'Union européenne ! Quelles politiques aventu- ment. reuses auraient pu conduire certains leaders! A quelles dérives aurait-on pu assister! On songe C'est donc un grand plaisir de revenir à Dijon, immédiatement, comme en écho, aux conséquen- d'autant que nous célébrons cette année un dou- ces dramatiques de l'absence d'une telle réponse, ble anniversaire historique. Il y a 20 ans le Mur d'un engagement semblable de l'Union euro- de Berlin était abattu, ouvrant ainsi la voie à l'ou- péenne, avec les Balkans occidentaux. verture du "Rideau de fer" qui coupait l'Europe en deux depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Ni la crise économique actuelle (hélas supportée par tous), ni la résurgence ici ou là de relents na- er ème Et le 1 mai, nous célébrerons le 5 anniver- tionalistes ne peuvent atténuer le réel succès de saire de l'élargissement de l'Union européenne à ce qui restera, j'en suis convaincu, comme l'une l'Europe centrale, qui acheva la réunification des grandes réalisations de la construction euro- d'une grande partie du continent européen. péenne depuis sa création. Double anniversaire, en effet, puisque le 5ème Le pouvoir de transformation de l'UE et de sa élargissement fut la réponse européenne à la conditionnalité, les fameux critères de Copenha- chute du Mur de Berlin. Un choix historique, qui gue, le "soft power" comme on le désigne parfois, renvoyait aux valeurs fondamentales sur lesquel- a réussi en dépit des obstacles et des contraintes. les le projet Monet-Schuman s'était construit: les valeurs de paix, démocratie et solidarité. Mais alors, si cet élargissement a si bien réussi, d'où vient aujourd'hui ce sentiment diffus qu'il ne ème Ce 5 élargissement a sans conteste prouvé la peut être reproduit à l'identique avec les Balkans capacité du processus d'adhésion à transformer occidentaux ? Pourquoi cette impression de frilo- les pays candidats en démocraties, dotées d'éco- sité du côté, sinon de l'Union européenne, tout au nomies de marché et en mesure de rejoindre les moins de certains de ses membres et, assuré- 15 pour faire face ensemble aux défis communs. ment, d'une grande partie de son opinion publi- que ? * Discours tenu lors de la conférence d’ouverture du colloque auprès du Conseil Régional de Bourgogne 8
  • 9. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel Une telle analyse nous occuperait tout ce jour. Je Dans le même temps, et face à ce processus me limiterai ici à trois observations. Tout d'abord, d'élargissement, quelle image les Balkans occi- si les 'politiques' se plaisent aujourd'hui à recon- dentaux renvoient-ils aux citoyens européens ? naître le succès du 5ème élargissement, leur com- Assurément celle d'une terre de conflits, où cor- munication, au niveau national, n'a pas toujours ruption, trafics et crime organisé continuent. été, loin s'en faut, à la hauteur des enjeux et n'a pas réussi, dans nombre d'Etats membres, à po- Je ne grossis pas l'image: il suffit de lire la pulariser l'idée que c'était la paix et la sécurité presse, qui en fait même parfois sa "une". Il y a qui étaient en jeu. Nous en payons aujourd'hui le sans conteste un fort déficit d'image. prix avec une opinion publique encore partagée sur les mérites de l'élargissement. Pourtant, ce serait oublier les progrès accomplis par tous les pays de la région. C'est la Croatie qui D'autant plus partagée, et c'est ma seconde ob- est engagée dans le processus "vertueux" de l'ad- servation, que la crise financière a des consé- hésion où chaque pas positif détermine le sui- quences économiques et sociales dramatiques. vant. Et, malgré les difficultés, le pays progresse. Ici encore le "soft power" de l'Union européenne La crise et son cortège de licenciements, où l'on a réussit à entraîner des changements positifs. beau jeu d'incriminer l'autre, qu'il soit le nouvel Etat membre où certaines entreprises se délocali- C'est l'Ancienne République Yougoslave de Macé- sent, ou bien les travailleurs étrangers comme on doine qui vient de tenir des élections qui, contrai- l'a vu récemment en Irlande et au Royaume Uni. rement aux précédentes, ont été régulières et La crise et la tentation du repli sur soi. transparentes. Lorsque l'on connaît le poids que l'Union européenne a mis dans la balance, nul En ces temps difficiles, les tribuns populistes ont doute que ce succès lui est aussi imputable. beau jeu de surfer sur la vague des peurs et des drames économiques locaux pour flatter la fibre C'est aussi l'accord de Prud en Bosnie Herzégo- sociale et identitaire, en identifiant toujours l'Au- vine, par lequel les leaders de trois grandes for- tre comme le bouc émissaire, et en l'occurrence mations politiques se sont engagés à travailler 'Bruxelles' comme le responsable de tous les pour des solutions communes aux conditions po- maux. sées pour la fermeture du Bureau du Haut Repré- sentant des Nations Unies. C'est bien là un signe Dernière observation, la panne institutionnelle: manifeste que lorsque la volonté existe, les solu- l'absence d'un nouveau traité, le Traité de Lis- tions peuvent être inventées. Or, là encore, c'est bonne, qui devrait assurer un meilleur fonction- la pression internationale qui a conduit à cette nement à une Europe élargie à 27. Entre égoïsme avancée. national et utopie altermondialiste, ceci montre, hélas, que le projet européen n'est jamais ferme- C'est également la Serbie qui a transféré à La ment acquis. Alors qu'à l'évidence c'est de plus Haye 44 des 46 inculpés par le TPIY, qui déploie d'Europe dont l'Union a besoin. des efforts remarqués pour coopérer pleinement avec le tribunal, et qui a décidé d'assumer à elle D'où la position de certains leaders européens, seule les obligations liées à l'Accord de Stabilisa- face à une nouvelle vague d'élargissement, alors tion et d'Association en mettant en œuvre, unila- que se profilent les élections au Parlement euro- téralement, l'Accord intérimaire. péen, des élections nationales importantes dans certains Etats membres et la fin du processus de C'et aussi le Monténégro qui a progressé suffi- ratification du Traité de Lisbonne. Ces préoccupa- samment sur le chemin européen pour que le tions sont d'autant plus fortes que mettre en or- Conseil, dans quelques jours, demande à la Com- dre la maison "Europe" est en soi un objectif fort mission de préparer son avis, conformément au louable pour y accueillir de nouveaux invités. traité. 9
  • 10. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel C'est encore l'Albanie, qui malgré le passé de dic- L'image qui nous est renvoyée est également tature, l'une des plus terribles jamais subies par celle d'une Serbie qui peine à tourner la page des un pays, se transforme progressivement et s'ap- guerres récentes. Loin de moi l'idée de sous- prête, elle aussi, à déposer sa candidature à l'ad- estimer les efforts accomplis par les autorités ser- hésion à l'Union européenne. bes vers la pleine coopération avec le TPIY. Sans oublier le Kosovo où, contrairement aux Mais lorsque des décisions du TPIY sont contes- prédictions de nombreux oiseaux de mauvaise tées publiquement (ce qui n'est hélas pas unique- augure, la situation post-déclaration d'indépen- ment le case de la Serbie), lorsque des partis po- dance est stable, grâce en particulier à la com- litiques continuent à proclamer "héros" ceux que munauté internationale, et notamment à l'enga- le tribunal recherche, lorsque des ONG qui s'ef- gement fort et déterminé de l'Union européenne. forcent de rechercher la vérité et de la dire sont mises en accusation par certains groupes, force Les progrès sont donc réels et tangibles. Ils ne est de constater que l'on est loin des valeurs de sont pourtant pas à la hauteur des défis. Ne nous réconciliation qui ont fondé le projet européen. voilons pas la face. Les conflits bilatéraux sont légion entre les pays des Balkans occidentaux: Nous voyons aussi l'Ancienne République yougo- conflits frontaliers, retour des réfugiés et des per- slave de Macédoine empêchée de rejoindre sonnes déplacées, double nationalité et ses l'OTAN pour la question du nom et qui adopte conséquences. On est encore bien loin du "bon elle-même une attitude parfois conflictuelle. voisinage" et de la coopération régionale prônés par le Processus de Stabilisation et d'Association, Une Croatie ralentie dans son processus européen que le Sommet de Zagreb a consacré en 2000, il non seulement par une querelle bilatérale, avec y a neuf ans déjà. un Etat membre, mais aussi par ses propres diffi- cultés à tout faire pour tourner la page. La récente visite du Premier ministre Sanader à Belgrade et l'annonce d'une solution au litige Autre élément qui pèse sur les relations, la cor- frontalier entre la Croatie et le Monténégro sont ruption et le crime organisé. En dépit des progrès toutefois, il faut l'espérer, les prémisses d'un réels accomplis, les mesures prises jusqu'alors mouvement que l'on espère ample et capable sont loin de répondre aux défis que pose la puis- d'apporter des réponses aux différends existant. sance des forces occultes qui sapent l'établisse- ment d'un Etat de droit. Le déficit d'image qui D'autre part, la "volonté de vivre ensemble" qui s'ensuit a un impact déplorable sur l'opinion pu- caractérise tout Etat tarde à se manifester dans blique européenne. certains pays, notamment en Bosnie Herzégo- vine, en plain repli identitaire, et qui a tendance à Nous trouvons ainsi, d'un côté, une Union euro- rendre la communauté internationale responsable péenne avec certains Etats membres plutôt fri- de sa propre incapacité à inventer un modèle pro- leux et, de l'autre, des pays engagés dans les pre pour faire cohabiter ses trois peuples consti- réformes mais qui n'adoptent pas les mesures à tuant. la hauteur des défis historiques que leur situation et que le processus européen exigent. N'est-ce pas là le paradoxe de l'adhésion ? Des pays qui, en devenant membres de l'UE, décide- C'est bien là une différence majeure avec le 5ème ront librement de mettre en commun une part de élargissement. Les pays d'Europe centrale ont, au leur souveraineté et pour lesquelles les frontières contraire, fait montre d'un extraordinaire consen- vont s'estomper derrière le marché unique et l'es- sus national envers l'adhésion et sa conditionnali- pace Schengen, et qui maintiennent des attitudes té. On ne le retrouve pas avec la même force plus ethniques ou nationales que régionales et dans les Balkans occidentaux. européennes. 10
  • 11. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel Certes, la plupart des dirigeants politiques s'en- contraintes auxquelles elle fait face. gagent dans les mêmes termes. Mais leurs déci- sions ne reflètent hélas pas toujours les promes- C'est le strict respect du nouveau "consensus sur ses faites lors des rencontres européennes. Les l'élargissement" de décembre 2006 que le Conseil mesures prises ne sont pas à la hauteur des en- va suivre: respect des engagements pris, stricte jeux. Comme si l'enveloppe nationale ou ethnique application de la conditionnalité, meilleure com- prévalait rapidement sur l'engagement européen. munication auprès de l'opinion publique. Comment pourrait-il en être autrement alors C'est également ce qui a animé les Etats mem- qu'un récent sondage Gallup montre que les ci- bres en adoptant les accords de facilitation des toyens accordent plus de prix à leur appartenance visas. Bien sûr, ces derniers ne répondent pas ethnique ou religieuse qu'à leur citoyenneté ? suffisamment aux attentes des citoyens. C'est Comme le notait Bronislaw Geremek, "il est plus pourquoi nous sommes engagés dans un dialogue facile d'unir des économies et des administrations sur la libéralisation des visas, au terme duquel les que d'unir des mémoires". Etats qui satisferont aux conditions des feuilles de route (road maps) verront l'obligation de visas C'est d'abord aux élites politiques de dépasser levée. Et nous sommes confiants, comme l'a ré- leurs clivages et de mettre leurs actes en adéqua- cemment déclaré le Vice Président Barrot, qu'une tion avec leurs promesses. C'est de leaders cou- telle décision positive pourrait être prise pour cer- rageux dont la région a besoin, capables de tour- tains pays en 2009. ner la page en engageant les changements qui s'imposent. C'est dans cet esprit aussi que l'Union euro- péenne se prépare à un engagement plus fort en C'est aussi à la société civile, à sa communauté Bosnie-Herzégovine dès lors que les conditions d'affaires et à ses ONG, de s'engager plus résolu- seront remplies pour que le Bureau du Haut re- ment encore qu'elles ne l'ont fait jusqu'alors pour présentant des Nations Unies soit fermé. confronter les leaders politiques à leurs propres engagements et pousser à des réformes qui rap- C'est dans cet esprit enfin que l'Union apporte procheront les pays de l'objectif européen. son appui aux Balkans occidentaux face à la crise économique qui va les frapper, plus qu'ils ne le Pourtant, en dépit des difficultés et des contrain- pensent d'ailleurs eux-mêmes aujourd'hui. tes que l'Union européenne elle-même connaît et que j'ai évoquées précédemment, le Conseil euro- L'Union européenne a, en effet, engagé une aide péen vient de réaffirmer la "perspective euro- de € 150 millions avec les Institutions financières péenne" des Balkans occidentaux. Leitmotiv fa- Internationales qui va permettre de lever par cel- cile, direz-vous ? les-ci quelque € 600 millions de prêts, notam- ment en faveur des PME et des infrastructures. Assurément non, si l'on garde à l'esprit comment De plus, la BEI et la BERD, en particulier, vont fonctionne le "système européen": les conclusions lever quelque € 5,5 milliards pour les Balkans du Conseil engagent l'Union et il n'est pas occidentaux. d'exemple qu'elles n'aient été suivies de décisions positives lorsque les conditions étaient réunies. Enfin, la Commission s'apprête à engager € 100 millions en dons sur son programme IPA comme A preuve, le fait que, dans quelques jours, le soutien budgétaire à la Serbie dans cette période Conseil demandera à la Commission de préparer difficile pour le pays, à la suite de son accord son avis sur la candidature du Monténégro. Et, avec le FMI. Et elle est prête à considérer des comme le Commissaire Rehn l'a déclaré: "le mo- opérations similaires avec d'autres pays si les ment n'est pas venu pour l'Union européenne de conditions sont remplies. prendre une année sabbatique", en dépit des 11
  • 12. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel Pour tenter de répondre à l'une des questions de D'aucuns disent aussi qu'une stratégie spécifique cette conférence: "la perspective européenne dé- devrait être inventée pour les Balkans occiden- pend-elle davantage des problèmes internes à taux. Si l'on entend par là modifier la condition- l'Union européenne que des progrès des pays nalité, alors non, la stratégie qui a réussi avec le eux-mêmes?", je dirais qu'elle dépend bien évi- 5ème élargissement ne doit pas être adaptée. demment des deux. Par contre, si l'on entend par là un engagement Mais en ajoutant aussitôt qu'elle dépend d'abord plus fort de l'Union, alors oui, Commission et et avant tout des progrès que les pays peuvent Conseil doivent s'engager davantage avec les mettre en avant. Des signes tangibles doivent Présidences successives. C'est précisément ce être donnés aux Etats membres que la perspec- que l'Union européenne fait au Kosovo et se pré- tive européenne prévaut, qu'un réel consensus pare à faire en Bosnie Herzégovine. Comme c'est national peut conduire à des mesures fortes qui le Commissaire Rehn qui s'engage dans une mé- feront progresser les pays sur leur voie euro- diation entre la Slovénie et la Croatie. péenne. La tentation peut être grande pour certains pays En quelque sorte: "aide-toi, l'Europe t'aidera". Le de clamer que le processus n'est ralenti que ème 5 élargissement est, ici encore, la preuve vi- parce que l'Union européenne n'est pas disposée vante que l'Union honore ses engagements lors- à les accueillir. Certains pays candidats y avaient que les pays tiennent leurs promesses. déjà succombé au milieu des années 90. C'est toujours un faux fuyant qui ne trompe personne, D'aucuns disent parfois que la conditionnalité est généralement à consommation intérieure et le appliquée de façon trop stricte aux Balkans occi- plus souvent destiné à masquer l'absence de ré- dentaux. L'Union a pourtant montré qu'elle savait formes internes. prendre en compte les facteurs politiques internes lorsque la situation l'exigeait. Il n'y a pas d'alternative à l'adhésion à l'Union européenne pour les Balkans occidentaux. Ils J'en veux pour preuve la signature des Accords sont européens, par leur géographie, leur histoire d'Association et de Stabilisation avec la Bosnie- et leur culture. Ils appartiennent à l'Europe. Ils Herzégovine et avec la Serbie dans les conditions deviendront membres de l'Union européenne par que l'on sait. Recherche du consensus et sens du leur détermination à respecter ses valeurs et à compromis sont aussi des principes cardinaux de remplir les conditions à leur adhésion. la construction européenne. L'Union européenne s'y est fermement engagée. Et l'on sait bien que la Commission européenne Elle les accueillera comme elle l'a fait avec les 12 continue de plaider pour que l'Accord intérimaire en 2004 et 2007. Aux pays de tenir leurs promes- avec la Serbie soit mis en œuvre maintenant. ses. L'Union européenne tiendra la sienne. C'est Mais dans le processus conduisant à l'adhésion, notre chantier d'avenir. chaque étape requiert un accord unanime des 27. Cette règle de base ne devrait jamais être ou- bliée. 12
  • 13. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel 13
  • 14. Tables Rondes / Round Tables 14
  • 15. L’Union européenne et les Balkans occidentaux : enjeux et perspectives Pierre Mirel Modérateur / Moderator: La perspective européenne / Alexandre Levy, Journalist « Courrier International » Table Ronde / Round Table 1 : The European perspective Participants : Jacques RUPNIK, CERI researcher, Sciences Po Paris Karolina KOTTOVA, Director of the Department for the Coordination of EU Affairs at the Czech Government’s Office Mary-Ann HENNESSEY, Political Adviser, DG of Democracy and Political Affairs, Council of Europe Pierre MIREL, Director, Relations with Albania, Bosnia and Herzegovina, Montenegro, Serbia and Kosovo (DG Enlargement), European Commission Tanja MISCEVIC, Former Director of the Serbian Office for EU Integration Veton SURROI, Former leader of ORA party, Kosovo Minorités et nationalismes / Modérateur / Moderator : Minorities and nationalisms Table Ronde / Round Table 2 : Piotr SMOLAR, Journalist, « Le Monde » Participants : Ana Maria BOROMISA, University of Zagreb, Department of International Relations, Economics and Politics Jaromír LEVÍČEK, South and South East Europe Department, Czech Ministry of Foreign Affairs Jovan TEOKAREVIC, Belgrade University, Faculty of Political Science Katrin HETT, NATO Officer, Western Balkans, Public Diplomacy Division Luan RAMA, Writer, Former Albanian Ambassador to France Modérateur / Moderator : Tim JUDAH , Journalist, “The Economist” Table Ronde / Round Table 3 : Participants : Alistar NOLAN, Principal Administrator, « Investment Compact for South East Europe » OECD Valeurs / Values Arnaud DANJEAN, European Deputy, Specialist of the Balkans, Daliborka ULJAREVIC, Executive Director, « Centre for Civic Education », Montenegro Hido Biscevic, Secretary General of the Regional Co-operation Council Joseph BRINKER, Head of Political Affairs for the OSCE Mission in Kosovo Nebojsa VUKADINOVIC, CERI researcher, SciencesPo Paris Srdjan DIZDAREVIC, President of the Helsinki Committee for Human Rights in Bosnia and Herzegovina and Vice-President of the Helsinki Federation Thérèse SOBIESKI, Head of Unity - Serbia, DG Enlargement, European Commission 15
  • 16. EU policies in the Balkans: the challenges of consistency Jacques Rupnik Research Director at the Centre d’Études et de Recherches Internationales / Sciences Po Paris (Paris) During and in the immediate aftermath of condition to a successful integration to the EU. the wars of Yugoslav dissolution the European There has been in recent years a growing Europe- Union was often criticized for the inconsistencies anization of the international presence in the Bal- of its security policies and for the latent tension kans while US priorities shifted outside Europe between the emphasis on postwar regional coop- (from Iraq and Iran to Afghanistan and Pakistan). eration (the Stability Pact) and the priority given However, the US has, with vice-president Biden’s to the merits of individual countries on which the visit to the region, recently shown signs of con- prospect of EU enlargement were to be assessed. tinuing re-engagement which is also seen as cru- Today, the overall thrust of the EU’s Balkans pol- cial by several actors in the region (Bosniaks, icy appears more focused and more consistent: Kosovars, Albanians and Croats). There are some we have moved from an agenda dominated by transatlantic differences concerning the assess- security issues related to the dissolution of Yugo- ment of the stability of the region and particularly slavia, to an agenda focused on the perspective over Bosnia (Holbrooke) with serious implica- on the Western Balkans’ accession to the EU. The tions: keep the OHR or not? having a US “special formal political commitment of all EU members is envoy”? Should the EU encourage a continuing there since the Saloniki summit in 2003 and Kos- US engagement in the Balkans or consider its ovo’s independence last year was presented as scaling down as consistent with the process of the turning point between the final stage post- European integration seen as “the only game in Yugoslav fragmentation and the region’s integra- town”? Have we really moved from security- tion process into the EU. The coherence of the EU driven containment to politically driven integra- approach to the region was found at last: The tion? framework was set, the verbal commitments of the political elites in the region were clear Russia played no part in Central Europe’s acces- enough, the policy tools were supposedly familiar sion to the EU, but it has a significant nuisance to all since the previous wave of Eastern enlarge- capacity in a number of countries in the Balkans, ment. What was the difference between Central most obviously through energy supply and the Europe and the Balkans? Ten years. There are, Kosovo question. Serbia now tends to be consid- however, a number of reasons why this reassur- ered in Brussels as pivotal to the region and its ing presentation (as well as the coherence of EU current government as the most favorable to the enlargement policies) should be questioned. EU in two decades. Yet it has made a deal with Russia on both above-mentioned issues (giving 1. The EU and other major international ac- Moscow a stake in the energy sector while relying tors. on its backing in the UN over Kosovo). The con- sistency of the EU position on Kosovo and the The US-led NATO enlargement toward Central “frozen conflicts” in the Caucasus has been ques- Europe preceded EU’s enlargement and it seems tioned by Russia. To say that these are self- to be the pattern again in the Western Balkans serving arguments does not dispense with ad- with the recent accession of Croatia and Albania dressing the tension between the legitimacy of to the Atlantic Alliance. The transatlantic bond the Kosovo independence process and its interna- and the emphasis on security are seen as a pre- tional legality. 16
  • 17. EU Policies in the Balkans: the challenges of consistency Jacques Rupnik Turkey opened enlargement negotiations with a direct stake in the region’s stability and acces- the EU before the countries of the Western Bal- sion prospect (Slovenia, Bulgaria, Romania). That kans which, from their point of view, was far from proximity and involvement of member states can obvious. The consistency question for the EU’s be a powerful vector of EU influence in the region. future enlargement approach could be summed But it can also become an impediment. Greece’s up as follows: do you aim, for the sake of unresolved conflict with Skopje over the name of ‘geographic coherence’, for a ‘post-ottoman’ the Macedonian state has blocked the latter’s enlargement to the South East? Or should you NATO accession which was supported by all other not, for the sake of political plausibility (i.e. if you EU members. Croatia’s difficulty or reluctance to are serious about the Western Balkans in the EU) settle the border issue with Slovenia has led the decouple their EU future from Turkey’s? latter to remind it of its necessary consent to Croatia’s membership. 2. Coherence between regional and individ- These developments should suffice to question ual approaches the widespread assumption that a member state is the best stabilizer and “advocate” of its This brings back in a different form the question neighbor as prospective member. The inclusion of of coherence between regional and individual ap- Croatia into the EU would certainly contribute to proaches. The current assumption is that the the stabilization of democracy there. The impact “regatta” approach works fine for the EU (it on neighboring Bosnia-Herzegovina (BiH) is, how- makes the enlargement process ‘discreet’ and ever, debatable as Croats from Bosnia- thus more acceptable to Western public opinion) Herzegovina, who massively own Croatian pass- and the countries concerned. Indeed, all of them ports, will thus lose interest in the future of their cheer for a speedy accession of Croatia as open- state. Romania is the most vocal advocate of ing the door to the EU for the rest of the Western Moldova’s future membership in the EU. Its influ- Balkans. The logic of emulation may work for ence over its Eastern neighbor has, during the some: Macedonia, Montenegro, Albania etc. But recent political crisis in Chisinau, been described for the unfinished states such Bosnia, Kosovo, as both attractive and destabilizing at the same and Serbia there may be a case for a parallel ac- time. In short, a coherent enlargement policy cession to the EU. The shared European roof was should also entail a careful consideration of its meant to help defuse and overcome unsettled impact on neighbors and thus its relationship to contentious territorial and institutional issues. To the EU’s neighborhood policy or its “Eastern part- be sure, nobody’s accession should in principle be nership”. held hostage to the intransigence of one’s neighbor. But given the possible interaction be- 4. From protectorates to integration through tween different aspects of the “Serbian question,” nation-state building. it also seems prudent to make sure unfinished statehood issues are settled simultaneously dur- This sounds like a coherent summary of EU’s en- ing the accession process, when leverage is deavor in the region: 1. from crisis management strongest. Back to a regional perspective albeit to Europeanized protectorates 2. Exit from pro- on a smaller scale. tectorates (BiH and Kosovo) implies entry into the EU. The difficulty (and this is where consistency is 3. Coherence between EU policies and those most immediately tested) is that the EU is for the of its member states. first time in its history directly involved in assist- ing the creation of its future member states. The converse question concerns the coherence There are three ‘unfinished’ states in the Western between EU policies and those of its member Balkans: Bosnia, Kosovo, and Serbia. EU Com- states. Some of them have, for historical and missioner for enlargement Olli Rehn has rightly geographic reasons, more involved (Greece, Aus- pointed out that protectorates cannot be inte- tria, Italy). Other, new members of the EU, have grated into the EU. Nor can unfinished states. The 17
  • 18. EU Policies in the Balkans: the challenges of consistency Jacques Rupnik two European protectorates should be examined ‘status-neutral’ (given that five EU members have as test cases for consistency. not recognized Kosovo’s independence) while it remains unclear which law applies when in Kos- Bosnia: Is Bosnia a stable state? The answer ovo: is it the international regulations of the past depends on which High Representative you listen decade under UNMIK, is it the new laws voted by to: former HR Paddy Ashdown (fear of disintegra- the Kosovo parliament or is it (in the Northern tion) or most recent HR Lajcak: Bonn powers enclave) Serbian law? Depending on where you have become irrelevant as has the HR’s office. Is are and when you get a different answer to this Bosnia a functional state? Certainly not. The pro- question. Which state, which international tectorate ensures stability but reinforces dysfunc- agency, which law? This surely is the most formi- tionality. Can the exit from the protectorate and a dable ‘consistency challenge’ for EU representa- shift to a pre-accession agenda be a powerful tive Peter Feith and more generally for the EU enough leverage to push through an institutional mission in Kosovo. Hence also the question: is reform necessary to develop the sense of owner- Kosovo really an independent state on the road to ship and make BiH a viable polity? This is where the EU or the protectorate’s new cloth? one man’s plea for consistency of the European perspective borders on another man’s the act of This sums up some of the key dilemmas raised in faith. examining the coherence of the EU’s approaches to the Western Balkans. It highlights the con- Kosovo: EULEX is the largest civilian mission trasts or the tensions between stated consistency ever launched under ESDP. The exit from protec- and its implementation. It also points out some of torate is conceived as an assistance in the build- the implications on the ground as soon as EU ap- ing of a new state with the prospect of turning pears divided (Kosovo) or hesitant between con- the EU presence into pre-accession monitoring. tainment and integration (Bosnia). No wonder the The rationale sounds coherent enough until you issue of policy consistency looks different when realise that the EU still coexists with UNMIK and seen from Brussels or from the countries at the the ICO. Eulex is supposed to assist the rule of receiving end in the Balkans. law of the new state, but it officially remains 18
  • 19. Normalization in four steps The European integration of the Western Balkans remains unclear without the normalization of the relationship between Kosovo and Serbia Veton Surroi Former leader of ORA party, Kosovo 1. After the EU accession of Croatia within the level. Kosovo, being treated in such a manner by next two years, the question of the final arrange- Serbia, might block the most advanced phase of ment of the Balkans’ European future will again the relationship between Serbia and the EU, the become an unanswered issue. The next ten years preparation for accession. It’s completely impos- will define how these states will be transformed, sible that Serbia will be accepted into the EU with and for the European Union, the nature of their an unresolved problem like the relationship with accession, be it as a group – like for some previ- Kosovo. ous enlargements - or individually, one after an- other, like Croatia. This situation, where Kosovo and Serbia are keeping each other hostage on their respective However, the answer for the “group vs. individ- European path, might continue longer if there is ual” dilemma won’t appear on the agenda without no external intervention to change it. But the clarifying the nature of these countries seeking to conditions for such external intervention could be adhere to the European Union. There is still a tri- met in the course of this year. The European Un- angle of uncompleted states in the Western Bal- ion has a unique opportunity to impose a new kans. Bosnia and Herzegovina is a protectorate orientation for the relationship between Serbia that continues to be based upon a peace agree- and Kosovo that might not reappear again for the ment (Dayton), but without a constitutional order next ten years. Serbia is requesting the liberaliza- created by its citizens. A part of this state, the tion of its visa regime and the candidate status Republika Serpska, to a large extent refuses BiH’s for the EU. Both these points could be conditioned identity. Kosovo is an incomplete state both on its (decided?) by the EU this year. Kosovo, on the internal functioning (the factual division of the other hand, needs to get itself outside the actual country) and its international legitimacy. Serbia, unclear protectorate situation and look toward a by refusing to recognize Kosovo and by maintain- clearer perspective of European accession. These ing territorial claims on it, represents a state that are important and necessary points for Brussels. has not reached its final shape yet either. The existence of such a triangle, with a strong sup- In addition, the new administration in Washington port from Belgrade, will certainly obstruct their with a little effort can achieve an intervention ca- perspective of a European future and simultane- pacity that brings to an end the successful trans- ously the European accession as a group of the atlantic intervention in the Balkans, which began Western Balkans as part of the European conti- at the end of the Bosnian War and continued with nent’s unification. the accompanying of Kosovo till its independence. Actually, the Serbian initiative to seize the Inter- 2. Kosovo and Serbia are a Siamese obstruction national Court of Justice could prolong the current to EU accession. Serbia, by not recognizing Kos- stage of waiting and inspire some voices in Bel- ovo’s special state identity, by continuing to keep grade or even in Prishtina to state that no action a part of Kosovo attached to itself and at the should be taken without having the final opinion same time by being supported by five EU Member of the Court. However, whatever might be the States on such policies, is blocking the beginning Court’s opinion, it will not change a number of new phase of the relationship between Kosovo things: the irrevocable independence of Kosovo, and the European Union, namely at a contractual its irrevocable recognition, the problem Serbia 19
  • 20. Normalization in four steps Veton Surroi has with this situation and the danger of a non- Kosovo’s independence. Therefore, this measur- normalized relationship between Serbia and Kos- able progress will qualify Serbia as a State which ovo for the concretization of their European path. is creating the basis for resolving its neighbor- hood problems (which is an important objective 3.Kosovo and Serbia need a normalization proc- for the states having recognized Kosovo’s inde- ess of their relationship with each other. Four ba- pendence and that will have to decide on Serbia’s sic steps are requested for this to happen. accession path). The first is the beginning of a process of dialogue between Prishtina and Belgrade, a dialogue also The fourth step is the creation of a new European known as “talks on talks.” Although it’s known integration value. In other words, it represents that there are stark differences on the existence the beginning of both, the Stabilization andAsso- of an independent Kosovo, the political authorities ciation Process for Kosovo and the negotiations of both countries should define open topics that with the EU as a membership candidate for Ser- can be treated between the two countries without bia. taking Kosovo’s status into consideration. The second is the integration of such a dialogue 4.The EU in collaboration with the US could close into a transatlantic format. It is obvious that the the chapter of Balkans’ instability within the next success in the Balkans has been achieved only twelve months by creating the right conditions for when an intensive true cooperation between the what will be the states of the sixth wave of EU EU and the US has existed. It is now time to the enlargement, somewhere near the end of the normalization of the Kosovo-Serbia relationship coming decade. This opportunity might not be through the reappearance of this collaboration as available for too long, though. The Bosnian and part of a transatlantic regional integration policy. Kosovar status quo have already created de facto The third step is the implementation of a transi- territorial divisions threatening to grow into mag- tory process of non-statutory normalization be- netic fields for the division of the whole region. tween Serbia and Kosovo. The conditions to ex- Instead of a ten-year period of integration, the plicitly encourage the European integration of one ignoring of the actual situation might produce a another will be created within this process, al- ten-year period of territorial bargaining, which though the differences in opinion on the status can add Macedonia to the triangle of uncompleted will remain. This means the creation of a measur- states. able process that would allow all the EU Member States to consider Kosovo as a contractual part- It will be a lost ten-year period for the popula- ner , including those that have not recognized tions of this part of the Balkans. 20
  • 21. Are there any alternatives to the European per- spective of the Balkans and the EU Enlargement? Tanja Miscevic Former Director of the Serbian Office for EU Integration I—EU perspective means not only EU mem- II—The alternative for the EU perspective bership, but applying the “model EU” in the for Serbia, therefore, cannot be Russia – it first place does not provide a model for reforming the state and society The Copenhagen criteria (from 1993, including from the 1995 Madrid criterion on administrative - Traditional good economic, political, cultural ties capacity) provides guidance and benchmarks for and diplomatic relations the economic, political and legal transition for - Political support over Kosovo issue. Popular any country willing to become member of the EU. support for enhancing cooperation between two This is the same for the Western Balkans. Much countries - trust of Serbian public opinion in Rus- more, previous history of European Integration sia, Russians supporting Serbs has shown how powerful this model can be: in- - But, Russia is a country, not an International Greece, Spain, Portugal, CEE countries. On the Organization – it does not accept members, so other hand, to follow the EU as a model needs Serbia could not join political consensus, it is time-consuming and - Not only good relations are necessary for a very expensive, especially in the situation of the country in transition - there is no Russian pre- global economic crisis. Also, public opinion gets scription or model to be applied tired over time and sees more costs than bene- - There are a lot of good reasons for enhanced fits of the process, in the first place because of cooperation between Serbia and the Russian Fed- its duration. The problem is the fact that the idea eration : Energy security - Serbia solving huge of EU membership prevails over the need to de- part of its energy problem with pipe line South velop European values. Stream. Free trade agreement – Serbia as a bridge in trading between EU and Russia But, applying the EU as a model also means that - But, if Serbia is too close to Russia that raises transition country needs less time than ever to the question of its real will to join EU – in sub- build stable democratic institutions and function- stance but also in perception ing market economies, because this is the best possible “blue print” for transition not only the Problems that are always present when partners state but of the society. Much more, the EU pro- are unequal – powerful state can dictate relation- vides technical and financial support for those ship (example – selling Oil Industry of Serbia) reforms. Nevertheless, the EU today faces multi- ple problems which also create difficulties for those countries wishing to become its members: III—The European perspective for the West- troubled with its own difficulties, it is noticeable ern Balkans can be valid only if it is that the EU more and more has a tendency to strengthened by concrete substance, not neglect the Western Balkan countries. Therefore, only with declarations – that is why the is- so called “enlargement fatigue” in the EU results sue of alternatives emerged in “reform fatigue” in candidate and potential candidate countries. Furthermore, this leads pub- Political consensus in WB countries on the EU lic opinion and those opposed to the European integration process reflects a national consensus integration process to search for alternatives. – people do see the importance of being in the 21
  • 22. Are there any alternatives to the European perspective of the Balkans and the EU Enlargement? Tanja Miscevic EU. In the other side, two EU/WB summits and Even in this situation, to understand the EU inte- Council meetings statements— affirmation of a gration process as a home work, good for coun- European perspective by EU Member states. try not only for EU membership, but also for state building and state management. Much The problem in this relation is the fact that since more, regional cooperation – not only condition Thessaloniki (2003) there has be no new Summit but necessity. – there is no political will in the EU for substantial commitments. Observing more strictly conditions This situation will worsen if Lisbon ratification than in previous enlargements gives impression problems are not solved in 2009, and if there is a of double standards for WB. It takes too long for continuation of very long and deep economic cri- WB countries in order to reach next formal step sis in the EU. Crisis of the political elite in the EU (SAA, membership application, Negotiating mem- member state – lack of vision for Europe will im- bership), reflecting the non-existence of a sub- pact vision for enlargement. All those problems stantive and comprehensive EU Enlargement reflect on WB countries – “they do not want us”. strategy. Propositions : 1. EU perspective means not only EU membership, but applying the “model EU” in the first place Strengths Weaknesses Opportunities Threats - Copenhagen criteria - To follow the EU as a - Less time than ever is - EU troubled with its provide guidance and model requires political necessary to build stable own problems, neglecting benchmarks for eco- consensus, is time- democratic institutions WB countries nomic, political, and consuming and very ex- and functioning market - Enlargement fatigue in pensive economy the EU which results in legal transition - Public opinion gets tired - Best possible “blue “reform fatigue” in candi- - History of European over time and sees more print” for transition not date and potential candi- integration has shown costs than benefits only of the state but also date countries how powerful this - Idea of EU membership of societyEU technical model can be (Greece, prevails over EU values and financial support for Spain, Portugal, CEE reforms countries) 2. The alternative to an EU perspective for Serbia, therefore, cannot be Russia – it does not provide a model for reforming state and society Strengths Weaknesses Opportunities Threats - Traditional good eco- - Russia is a country, not - Energy security – Serbia - If Serbia is too close to nomic, political, cultural an International Organiza- is solving huge part of its Russia that raises the ties and diplomatic rela- tion – it does not accept energy problem with pipe question of real will to tions members, so Serbia could line South Stream join the EU – in substance - Political support over not join - Free trade agreement – but also in perception Kosovo issue - Not only good relations Serbia as a bridge in trad- - Problems that are al- - Popular support for en- are necessary for a coun- ing between the EU and ways present when part- hancing cooperation be- try in transition - there is Russia ners are unequal – power- tween two countries - no Russian prescription or ful state can dictate rela- Serbian public opinion model to be applied tionship (example: selling trusts Russia, Russians of Serbia’s oil industry) support Serbs 22
  • 23. Are there any alternatives to the European perspective of the Balkans and the EU Enlargement? Tanja Miscevic Propositions : 3. The European perspective for the Western Balkans can be valid only if it is strengthened with con- crete substance, not only with declarations – that is why the issue of alternatives emerged Strengths Weaknesses Opportunities Threats - Political consensus in - Since Thessaloniki - Less time than ever is - to understand EU inte- WB countries on EU inte- (2003) there have been no necessary to build stable gration process as a home gration further summits – no po- democratic institutions work, good for the coun- - National consensus in litical will in the EU for and functioning market try and not only for EU WB countries – people substantial commitments economy membership see the importance being - EU is observing condi- - Best possible “blue - state-building and state in the EU tions more strictly than in print” for transition not management - two EU/WB summits previous enlargements, only of the state but also - regional cooperation – and Council meeting which gives the impres- of societyEU technical not only a condition but a statements – declaration sion of double standards and financial support for necessity of European perspective for WB reforms by EU Member states - It takes too long for WB countries in order to reach next formal step (SAA, membership application, negotiating membership) - Non-existence of sub- stantive and comprehen- sive EU Enlargement strategy 23
  • 24. Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama Writer, Former Albanian Ambassador in France Depuis les dernières guerres de Yougoslavie et la gestion pratique de l’État. Presque dans tous les fin de la guerre du Kosovo, le paysage et la carte pays des Balkans occidentaux on retrouve plus ou géopolitique des Balkans ont changé. De nou- moins les mêmes symptômes liés à la corruption, veaux États ont été créés, souvent au prix de la fraude électorale, le crime organisé et l’écono- nettoyages ethniques et de grands massacres. Il mie noire, les trafics clandestins des produits et semble que les peuples qui vivaient sous le poids d’êtres humains, l’absence d’une vraie Société écrasant de l’histoire séculaire, sont enfin libérés Civile ou bien l’esprit d’un national-populisme des de cette charge pleine de haine interethnique, de élites politiques que l’on peut voir en Albanie, en vieilles guerres, de conflits de territoires et de Serbie, en Macédoine, en Bosnie et ailleurs. Les frontières et d’autres guerres qui se dessinaient. élites politiques, pour rester au pouvoir, se re- On peut dire que c’était la fin d’une vieille mytho- tournent vers le populisme, comme en Albanie ou logie et le début d’une nouvelle histoire sans my- en Serbie. Même si plusieurs années se sont thes. Et cette fin ou début de l’histoire ne pourrait écoulées depuis les changements politiques dans pas se réaliser sans l’aide de deux facteurs essen- les Balkans, les rivalités intra-régionales se res- tiels: l’engagement de l’Union européenne et de sentent toujours. Ces rivalités qui avant étaient l’OTAN. Ce sont eux qui ont accompagné la tran- entre la Turquie, le Grèce, la Yougoslavie, l’Alba- sition des Balkans occidentaux vers de nouvelles nie et la Bulgarie, ont changé, même si quelques démocraties. L’Europe ne peut pas abandonner alliances ont survécu telle l’alliance gréco-serbe les Balkans non seulement parce qu’ils font partie qui était unie contre le «danger turc» et l’expan- de sa géographie et de son histoire, mais aussi sion de l’Islam dans les Balkans occidentaux », car ils sont acteurs de la civilisation européenne mais aussi sur la «question macédonienne». moderne. D’autres vieilles alliances ont disparu comme celle de la Grèce avec la Bulgarie sur le partage de la Plusieurs années se sont écoulées. Depuis la der- Macédoine et «le danger turc». nière guerre l’engagement de l’UE a été sans re- lâche. Mais il est aussi vrai que les États balkani- Pendant les années 90 et plus tard, nous avons ques, après une longue transition, qui continue, été témoins des rivalités Serbie-Croatie, Serbie- restent des pays fragiles, aux gouvernements Albanie, Serbie-Monténégro, Macédoine-Albanie. instables à cause de leur héritage historique, Et des rivalités sont apparues même au sein d’un même si du point de vue constitutionnel, législa- même État comme cela s’est passé en Bosnie (la tif, structures administratives, ils répondent aux guerre de Bosnie et le choix d’une Bosnie mul- standards européens. Bien sûr, cela est le résul- tiethnique, avec une rotation de dirigeants par les tat du travail commun de ces États avec le l’UE, trois entités qui la composent) ; en Serbie avec la le Conseil de l’Europe, l’OSCE, la Commission de guerre du Kosovo et la déclaration d’indépen- Venise, ainsi que d’autres institutions internatio- dance ou avec le nouvel État fragile de la Macé- nales pour créer des institutions fiables pour un doine, où le conflit entre la population slave et État qui a dans ses fondements la démocratie, albanaise (qui représente 30% de la population) État de Droit, le pluralisme et le respect des s’est embrasé. Droits de l’Homme. Or, pendant toutes ces an- nées, les réflexes d’antan ont perduré dans la Aujourd’hui, ce processus de rivalités perdure 24
  • 25. Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama toujours même s’il n’a pas la même intensité. térale de la République de Monténégro. La pers- Cependant, la Serbie et la Croatie cherchent à pective européenne du Monténégro accepté au- mettre de côté leur guerre et la tragédie de Kraji- jourd’hui comme pays candidat à l’UE a calmé les na et à trouver des points communs pour déve- tensions internes parmi les Monténégrins et Ser- lopper de nouveaux marchés, des moyens de bes dans cette petite république. communication et de ranimer leur ancienne liai- son en dépassant leurs nationalismes. Les rivali- La rivalité Macédoine-Albanie avait elle aussi un tés serbo-albanaises sont historiques. Après caractère ethnique et émotionnel parce que les 1913, avec la Conférence des Ambassadeurs à Macédoniens peu nombreux se voyaient comme Londres, la moitié du peuple albanais s’est trou- un peuple menacé. Cela était lié non seulement à vée en dehors des frontières de l’État albanais. l’augmentation démographique des Albanais en Mais cela c’est de l’histoire et nous n’avons pas Macédoine mais aussi à la demande insistante besoin de retourner vers l’histoire, même s’il y a des Albanais pour la reconnaissance de leurs un siècle. Aujourd’hui il faut regarder les réalités droits en tant que peuple constitutif de la Répu- et les horizons à l’avenir. Les fondements des blique de Macédoine. rivalités serbe-albanaises ont été et sont ethni- ques, mais aussi émotionnels, qui comme je vous En ce qui concerne les conflits à l’intérieur des l’ai dit, sont liés à l’histoire. Le soutien que l’Alba- États, le plus préoccupant reste celui de la Bosnie nie a donné aux Kosovars a ravivé la rivalité en- où après les Accords de Dayton même si la Bos- tre les deux États depuis la création du royaume nie est reconnue en tant qu’entité entière, il reste de Yougoslavie puis la création de la Fédération encore la possibilité de la séparation de l’une des yougoslave. Même si les contacts officiels entre entités. C’est la persistance de l’UE qui maintient Belgrade et Tirana ne manquent pas aujourd’hui, debout la gestion de cet État et cela à travers des leur rivalité reste évidente et certainement très difficultés énormes qui ont pour base l’apparte- émotionnelle. De toute façon, avec l’indépen- nance ethnique. Mais le pont de Mostar nous dance du Kosovo est finie la question que dans donne de l’espoir. Tout dépendra de la dynamique les chancelleries européennes on a appelé «la de la perspective européenne qu’on offrira à ce question albanaise» et la peur de la Serbie d’avoir pays. Il est clair qu’intégrées à l’UE et à l’OTAN, dans ses frontières la Grande Albanie à un mo- les politiques intérieures deviennent dépendantes ment où avec tant de guerres elle n’a pas pu des ces autorités extérieures. créer sa Grande Serbie. L’existence de deux États de la même nation n'est ce pas une première En ce qui concerne le conflit Kosovo-Serbie, le dans l'Histoire. La "question allemande", qui a été processus de la séparation a été consumé, même en partie à l'origine de deux guerres mondiales, a si la Serbie s’est adressée au Tribunal Internatio- laissé côte à côte l'Autriche et l'Allemagne. Les nal qui aura, je pense, un verdict ambigu dans intérêts des Albanais d'Albanie, du Kosovo, de la son interprétation. Le Kosovo a proclamé son In- Macédoine ou du Monténégro qui sont très bien dépendance et elle est reconnue par une grande intégrés dans la République monténégrine, sont partie des pays de l’UE et d’autres pays dans le suffisamment divergents pour que tous ces alba- monde. Bien sûr, pour le moment reste un conflit nophones ne songent pas à se réunir. Pendant ouvert dans les relations actuelles entre la Serbie des décennies ils ont vécu dans des États diffé- et le Kosovo et qui sans doute est lié à l’intégra- rents et aujourd’hui sont plus préoccupés par les tion des Serbes dans la société multiethnique du difficultés de la vie quotidienne, sous- Kosovo. En ce qui concerne les problèmes de la développement, corruption, criminalité, la stabili- Macédoine avec les Albanais, ils ont été résolus té d’un État fiable, avec ce rêve de s’intégrer le avec les Accords d’Ohrid et cela grâce à la contri- plus vite possible à l’UE. bution de l’UE et des États Unis d’Amérique. Au- jourd’hui, la Macédoine a déposé sa candidature Le conflit Serbie-Monténégro s’est terminé avec la pour devenir membre de l’UE et le pays a pro- séparation des deux États et la déclaration unila- gressé, même si le processus a été lent. 25
  • 26. Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama Beaucoup de pratiques et de faits empêchent et Serbie, dans le même temps que le représentant retardent la perspective européenne des pays des des États-Unis à Pristina félicite l’État kosovar Balkans occidentaux, mais le plus important je pour « leur décision qui était dans l’esprit du pense que c’est l’Histoire et la peur de l’Autre que «Plan Ahtisaari» et du bon voisinage entre les l’analyste français Dominique Moisi appelle «la deux pays». Donc une simple visite a fait monter culture de la peur». Existe-t-elle aujourd’hui dans l’adrénaline aussi bien à Pristina qu’à Belgrade. les Balkans ? Bien sûr que oui. Il suffit d’ouvrir les Le grand européen Bronislaw Geremek, quand il livres d’histoire dans les écoles pour trouver l’i- parlait sur la construction européenne et son ave- maginaire des nouvelles générations chargées nir, insistait sur la dimension spirituelle et il avait d’une sorte de nationalisme guerrier. Cela on raison. Donc pour nous les balkaniques, il nous peut le trouver en Albanie, Serbie, Kosovo, en faut aujourd’hui que le mot l’AUTRE nous le rem- Bosnie ou en Macédoine. Les historiens de ces placions par le mot ENSEMBLE. Mais pour cela, il pays ne sont pas capables de combattre l’histoire faut une volonté de faire ensemble ! Donc de officielle. Donc il faudra du temps pour que l’his- créer une identité commune dans le respect et la toire s’écrive avec un esprit humaniste. reconnaissance des identités particulières… Cela nous amène au principe de la citoyenneté. Mais Cependant, pensant au rôle de l’Albanie dans les pour faire cela il faut d’abord une volonté politi- conflits balkaniques ces dernières années, nous que, il faut un État de Droit, il faut une société pouvons dire que sa politique a été retenue, sans civile et aussi une instance d’arbitrage (donc à vouloir intervenir, en se préoccupant d’abord de l’échelle européenne) pour veiller sur l’égalité des son intégration dans les structures de l’OTAN et droits et des libertés communautaires. de l’UE. Donc, les conflits, les rivalités dans les Balkans sont émotionnelles. Les positions de la En ce qui concerne la Société Civile, il ne faut pas Macédoine qui n’accepte pas une proposition qu’elle s’occupe seulement des Droits de grecque d’un nouveau nom pour sa république tel l’Homme, mais d’abord elle doit devenir dans ces que «La République de Macédoine du Nord» sont pays un porte-parole de l’opinion publique et de émotionnelles. Mais la position grecque aussi, qui la critique de la gouvernance et de la gestion de a empêché la Macédoine d’intégrer l’OTAN récem- l’État, donc devenir un contre-pouvoir comme le ment est non seulement une obsession officielle sont en grande partie les medias. mais aussi émotionnelle et historique. La Grèce proteste en se demandant pourquoi les Macédo- En Albanie, la société civile est encore dispersée niens ont donné le nom d’Alexandre Le Grand à et mal organisée, malgré l’aide continue de l’UE leur aéroport principal et à la grande autoroute. et des organismes comme SOROS, etc.. Elle reste C’est toujours l’Histoire qui nous retient, diffé- impuissante et les intellectuels sont marginalisés remment de ce qui s’est passé entre la France et par le pouvoir et l’économie. En raison de leur l’Allemagne après la Deuxième Guerre mondiale, survie, lutter contre le pouvoir autoritaire est une qui très rapidement ont laissé l’histoire de côté sorte de suicide. Donc les intérêts économiques pour affronter ensemble les défis de leur avenir. sont plus forts que ceux de l’éthique, de la morale Voilà pourquoi l’Occident voit dans les Balkans et de la bonne gouvernance des institutions politi- occidentaux un blocage qui est réel. Quatre jours ques et étatiques. En Serbie il y a une activiste auparavant, le Président serbe Tadic a demandé à renommée, Mme Bisersko qui défend avec vi- Bruxelles d’aller à Decani au Kosovo pour les Pâ- gueur les droits des kosovars, mais un homolo- ques orthodoxes. Cette demande a été prise gue kosovar n’est pas vu au Kosovo où un Koso- comme une menace de leur souveraineté par les var défend les droits des Serbes. La société civile Kosovars, mais après avoir été conseillé par l’Eu- en Serbie semble impuissante devant l’atmos- rope et les États-unis d’Amérique, le gouverne- phère générale où règne le discours nationaliste ment du Kosovo l’a acceptée comme une visite pour le destin historique de la Serbie, de dire son privée. Pour le Président Tadic, bien sûr cette vi- mot, même si une grande partie pense que ce site se faisait pour obtenir un capital politique en conflit sur le Kosovo qui perdure, retarde la pers- 26
  • 27. Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama pective européenne de la Serbie. auparavant, les autorités serbes ont tout fait pour empêcher la rupture entre les deux républiques Je pense que si vraiment on doit trouver une so- de la confédération Serbie-Monténégro. Cela a lution rapide pour l’intégration des Balkans occi- non seulement aggravé les relations entre les dentaux avec les valeurs et les standards euro- deux républiques mais aussi le processus d’inté- péens, cette solution il faut la chercher d’abord à gration. Dès que le conflit a été résolu, la porte à Belgrade. Belgrade est un point névralgique, car la candidature du Monténégro comme membre de même si on règle les problèmes séparément en l’UE s’est ouverte. Ce sera la même chose avec le Bosnie, au Kosovo, en Albanie, en Macédoine, Kosovo. Les leaders serbes de demain compren- etc., le problème restera non résolu si Belgrade dront que la demande du retour du Kosovo en garde sa même optique politique du conflit, parce Serbie n’était qu’une perte de temps et une rhé- que avec la Serbie sont liés les relations Serbie- torique nationaliste, parce que les frontières des Bosnie, Serbie-Kosovo, Serbie–Albanie ou Serbie- deux pays, Serbie et Kosovo seront ouvertes et Macédoine même si cette dernière relation est symboliques, et que les standards européens as- secondaire. Un changement de l’optique politique sureront pour tous les mêmes droits identitaires, à Belgrade éteindra définitivement les conflits politiques, économiques, culturels, etc., donc les réels et ceux gelés, en apportant une nouvelle libertés et les droits fondamentaux. D’autres pays dynamique dans le rapprochement des Balkans continuent à connaître l’indépendance de Kosovo. occidentaux à l’UE. Nous félicitons les Croates qui La demande du retour du Kosovo en Serbie res- vont joindre prochainement l’Union européenne semble à une politique politicienne, donnant aux (envisageable pour 2012-2014), mais notre sou- hommes politiques en Serbie les possibilités de hait est que les autres pays des Balkans occiden- rester en politique. Un homme politique qui ac- taux entrent quelques années après la Croatie. cepte le contraire, comme on l’a déjà vu à Bel- Mais pour cela il faut une fort volonté politique de grade, perdra et s’effacera du paysage politique la part de l’UE. Sinon, si on parle de manière actuel. Alors le politique choisit l’alternative natio- symbolique, et en 2020 on regarde le monde naliste avec l’espoir que ce sera le monde qui d’une hauteur de 10.000 m, on regardera les trouvera la solution et pas lui. La demande de la Commissaires européens en train de se bagarrer Serbie au Tribunal International pour le retour du avec les gouvernements de ces pays sur tel ou tel Kosovo va seulement retarder le processus de la acquis communautaire, à un moment où d’autres reconnaissance du Kosovo internationalement, puissances, la Chine, l’Inde, etc., seront dans les mais on sait que devant le principe de l’autodé- frontières de cette Europe. Donc il faut agir vite! termination, comme on l’a vu au Timor-Este, ce Tribunal ne pourra sans doute pas recommander Sur le Kosovo, on sait que la Serbie l’empêche ce retour. par tous les moyens de se former comme un vrai Quand on parle parfois dans la presse sur le Ko- État et qu’il puisse fonctionner comme un État sovo, de moins en moins on parle de la possibilité démocratique, pluraliste, multiethnique, avec l’as- du partage de Mitrovica, en se souvenant aussi piration de s’intégrer à l’UE et dans les Institu- du précédent de Chypre. Mais est-ce que cela est tions et la vie internationale. Cela empêche non fiable? Quelques décennies ont passé depuis le seulement le progrès du Kosovo mais aussi de la partage de Chypre et les fièvres nationalistes se Serbie elle-même. A l’intérieur du Kosovo, le plus sont éteintes et les nouvelles générations de grand problème est la ville de Mitrovica divisée cette île cherchent aujourd’hui à régler ce para- entre Serbes au nord et les Albanais au sud de la doxe historique. Déjà on sait que l’indépendance ville. Si Belgrade renonce à commander les Ser- du Kosovo constitue une dérogation, rendue iné- bes à Mitrovica (considérés par eux comme partie luctable par la politique de nettoyage ethnique de intégrante de la Serbie) les Serbes seront inté- Milosevic et la guerre de 1999. grés dans la société multiethnique et les structu- res de l’État Le partage du Nord du Kosovo n’est pas accepté ni par l’UE, ni par les États-Unis, ni par les pays Influencées par le nationalisme, quelques années 27
  • 28. Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama intéressés directement comme la Serbie et le Ko- que si la première stratégie a fait des progrès, la sovo. Le partage serait un précédent dangereux deuxième n’est pas arrivée aux résultats atten- pour l’Europe, ou une zone de milliers de ressor- dus. Dans la coopération entre la Serbie, la Bos- tissants de la même origine pourrait demander de nie, le Monténégro, l’Albanie, la Macédoine et le créer leur propre état ou de joindre le pays voi- Kosovo, il n’y a pas de grands projets qui lient sin. J’ai dit les Américains parce que les destins leur destin et leur futur commun, ou d’autres ré- des Européens et des Américains liés ensemble alisations qui puissent rapprocher les peuples en- font ce que nous appelons l’Occident. tre eux. La création d’États ethniques dans les Balkans Il est vrai qu’il existe des niveaux différents dans n’est pas valable et n’est pas dans la philosophie le développement de ces pays. Cela incite les politique d’aujourd’hui, ni de l’UE. Et cela, parce pays de la région à «échapper» aux Balkans et à que créer un État ethnique présuppose de dépla- chercher des partenaires économiques plus déve- cer des populations. Mais nous ne sommes plus loppés, déjà membres de l’UE. Du coup, la coopé- en 1922 quand la Grèce et la Turquie ont échan- ration régionale préconisée par l’UE reste peu gé des populations pour devenir des États ethni- efficace et apparaît plutôt comme une raison poli- quement homogènes. Aujourd’hui on vit à une tique. autre époque. On le sait, depuis les années 90, l’UE a été enga- Les Balkans occidentaux sont dans un moment gée à travers de programmes définis pour les crucial de leur histoire moderne, de leur avenir et Balkans occidentaux en vue de l’intégration de nous ne devons pas perdre de temps pour attra- cette région. Les guerres de Yougoslavie et le per le train de l’Europe. Bien sûr que les contacts chauvinisme de Milosevic ont gêné ce processus, étatiques n’ont pas manqué dans cette région, processus qui recommencera avec plus de force l’organisation de sommets et de conférences ré- avec le Pacte de Stabilité pour les Balkans occi- gionales avec des déclarations enthousiastes dentaux. (souvent incitées par l’UE). Mais il faut avouer Symboliquement, des années auparavant, Ber- qu’il y a une sorte d’auto-isolement où chaque nard Kouchner avait proclamé que «L’Europe est pays oublie que la perspective européenne cher- née à Pristina», une déclaration certainement che d’abord la destruction des barrières, souvent symbolique parce qu’il regardait la fin des guerres imaginaires, qui empêchent l’ouverture vers l’Au- balkaniques comme le début d’une politique com- tre et le développement des projets communs qui mune de l’Europe qui allait faire sienne la ques- concernent l’économie, l’énergie, la communica- tion balkanique et réunir tous les pays de l’Eu- tion, le tourisme, la culture, etc. Voilà pourquoi rope. Et si on regarde du point de vue géographi- au sommet de Zagreb il a été question du désen- que, on peut remarquer que le Kosovo se trouve clavement des Balkans occidentaux. La stratégie au cœur des Balkans occidentaux et l’évolution de l’UE pour ces pays a été l’approche par deux des Balkans est fortement liée à lui. stratégies simultanément : la coopération directe de Bruxelles avec chaque pays à travers de pro- Conclusion: grammes bien définis, l’aide financière, le dialo- -L’Union européenne doit soutenir une nouvelle gue politique, etc., et de l’autre côté la coopéra- élite politique dans les pays des Balkans occiden- tion intra-régionale, donc entre les pays balkani- taux parce que souvent, les leaders politiques ques. actuels pensent plutôt à leur pouvoir et à leur Développer une approche régionale, c’est avant monopole sur l’économie qu’à l’avenir de leur tout responsabiliser les acteurs locaux en leur pays. Il existe une démagogie assez forte et une signifiant que leur sort dépend également de leur lutte sans merci pour le pouvoir qui freine le pro- capacité à s’entendre avec leurs voisins. La coo- grès dans ces pays. Tous parlent de progrès dans pération régionale constitue également un moyen l’intégration européenne. d’attirer les investisseurs étrangers qui ne peu- vent pas se satisfaire de petits marchés natio- - L’Union européenne doit soutenir d’abord des naux enclavés. Malheureusement nous constatons projets intra-régionaux auquels font partie deux 28
  • 29. Les rivalités intra-régionales et les fragilités internes: obstacles structurels à la perspective européenne? Luan Rama ou plusieurs pays, afin de rapprocher les peuples politique. Il est vrai que souvent la société civile des Balkans occidentaux par des intérêts com- dans ces pays est impuissante devant les politi- muns. En plus, le Kosovo est resté comme un îlot ques. isolé. Ses frontières doivent s’ouvrir non seule- ment à l’Albanie comme c’est le cas, mais aussi - Il faut ouvrir les frontières des pays de Schen- aux autres voisins. gen pour les ressortissants des Balkans occiden- taux en 2010, en aidant les États respectifs par - L’UE doit accentuer la pression et travailler plus des programmes pour remplir les conditions né- avec Belgrade, en accélérant encore son intégra- cessaires comme la sûreté des documents, la tion à l’UE, non seulement dans le dialogue politi- lutte contre l’émigration illégale et l’ordre et la que, mais en lui ouvrant ses portes même avant sécurité publique dans ces pays, etc. Ouvrir ces tous les autres pays de la région, parce que cela frontières seulement pour la Serbie, le Monténé- va aider à trouver les solutions de ses conflits gro et la Macédoine, serait une erreur. La libéra- avec la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo, mais tion des visas doit se faire en même temps pour aussi à l’amélioration de ses relations avec l’Alba- tous, surtout quand on parle de la Serbie et du nie et la Macédoine. De toute façon, je pense qu’il Kosovo. L’histoire des passeports biométriques serait plus raisonnable qu’après l’entrée de la que la Serbie donne à quelques milliers de Koso- Croatie, les pays des Balkans occidentaux entrent vars pour qu’ils puissent voyager, (comme d’ail- en bloc. leurs la Croatie aux Croates de Bosnie- herzégovine), nous rappelle les mêmes tactiques - L’Union européenne doit soutenir la société ci- que celles de la Russie pour les Ossètes de l’Os- vile de ces pays et les projets qui aident au dé- sétie du Sud, les Abkhaz ou les Ukrainiens de Cri- senclavement de ces sociétés, au rapprochement mée, car cela est l’expression d’une forme de na- des sociétés civiles de ces pays, devenant des tionalisme et d’une politique conflictuelle. facteurs importants dans l’espace public et la vie 29